CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Jeune chantier de fin de siècle, l’étude du très médiatique fait religieux en milieu carcéral n’a pas trente ans. Poursuivant les recompositions sociales de la modernité, ce champ de recherche émerge puis se prolonge dans un contexte d’accélération de la pluralisation religieuse de la population pénale et de l’offre cultuelle intra-muros. Les sciences sociales entérinent donc la représentation croissante de religiosités méditerranéennes et orientales dans les prisons britanniques (Beckford et Gilliat, 1998), l’expansionnisme néo-pentecôtiste dans les prisons outre-Atlantique du Cono Sur (Manchado, 2019 ; Brardinelli et Algranti, 2013), ou encore l’importance de la place occupée par l’islam dans les prisons et dans la vie de milliers de prisonniers en Europe latine et centrale (Khosrokhavar, 2004 ; Beckford, Joly et Khosrokhavar, 2005 ; Rhazzali, 2010 ; Schneuwly Purdie, 2011 ; Becci et Knobel, 2013 ; Venel, 2013). Pour autant, l’intérêt scientifique pour le phénomène ne se réduit pas au seul pluralisme et se ramifie en quelques grands axes. Ainsi les contributions s’attèlent généralement à rendre compte de la régulation institutionnelle du religieux par l’administration pénitentiaire (Becci, 2011), de l’organisation légale, pratique et informelle des aumôneries (Hunt, 2011 ; Schneuwly Purdie, 2013), des apports du religieux à la réinsertion (Becci, 2013 ; La Torre, 2013). Enfin, réencouragée par la polémique entourant « la radicalisation islamiste », la dernière thématique régulièrement abordée concerne les détenus eux-mêmes à travers les – très – divers comportements se réclaman…

Français

Ce texte entreprend d’éprouver la pertinence de « la religion en prison » en tant qu’objet sociologique à part entière. L’enjeu ici n’est pas de persévérer dans une finalité hyper-spécialisée mais de réinscrire l’étude de ce phénomène dans une perspective généraliste et décloisonnée du seul registre de la religion. Des données de première main et de plusieurs contributions couvrant l’ensemble des ressources sociales disponibles intra-muros interrogent l’incomparabilité supposée des comportements religieux vis-à-vis des autres pratiques observables en milieu carcéral. Partant, c’est bien la spécificité ontologique du religieux – souvent tenue pour acquise à défaut d’être empiriquement démontrée – qui s’avère sujette à caution, notamment lorsqu’il s’agit de mettre en lumière le phénomène massif des conversions dans la population pénale. En dernier lieu, le texte invite à mobiliser le religieux en qualité d’outil sociologique au service de l’objectivation des mécanismes de socialisation carcérale dont il demeure l’un des multiples produits.

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  • prison
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Thibault Ducloux
Centre Maurice Halbwachs – CNRS, ENS, EHESS
ducloux_t"at"hotmail.fr
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Mis en ligne sur Cairn.info le 20/12/2021
https://doi.org/10.4000/ress.7853
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