CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Le 31 mai 1888, la Belgique introduit dans son système pénal un mécanisme particulièrement innovant. Celui-ci prévoit un mode d’exécution de la peine privative de liberté qui permet au condamné de subir sa peine en dehors de la prison, moyennant le respect des conditions qui lui sont imposées pendant un délai d’épreuve déterminé. Le mécanisme de la libération conditionnelle est né. Si ce système n’est réformé qu’à la marge pendant plus de cent ans, l’affaire Dutroux marque un véritable tournant : dès 1998, de nombreuses réformes touchant à la libération conditionnelle et, plus généralement, au domaine de l’exécution des peines privatives de liberté sont initiées.

2Dans l’espace public, le destin de la libération conditionnelle est toutefois loin d’être linéaire. Si celle-ci perdure et fait même l’objet d’un encadrement juridique et institutionnel de plus en plus étroit, elle est dans le même temps régulièrement mise en cause et à diverses reprises aménagée. L’affaire Dutroux ne constitue certes pas le seul facteur expliquant les multiples réformes adoptées depuis 1998 en la matière. Toutefois, le choc induit par cette affaire, qui se prolonge dans le temps au gré des demandes de libération anticipée qu’introduisent certains de ses protagonistes, a indubitablement ouvert une fenêtre d’opportunité pour celles et ceux qui entendent réviser le système de la libération conditionnelle en Belgique. Il est en effet reconnu qu’un contexte de crise peut faciliter l’adoption de réformes  [1]. L’étude de la libération conditionnelle et de ses réformes indique que les effets d’une crise sur l’évolution des politiques publiques peuvent être de long terme. Des développements législatifs continuent ainsi à marquer le système de la libération conditionnelle vingt ans après l’éclatement de l’affaire Dutroux.

3La recherche pointe par ailleurs que, sur le fond, les évolutions législatives en la matière sont marquées par un certain nombre de tensions. D’une part, la compétence d’accorder ou de refuser une mesure de libération conditionnelle a fait l’objet d’un encadrement institutionnel et procédural croissant, une judiciarisation de ce processus de prise de décision ayant progressivement été instaurée. D’autre part, ces dernières années, le mécanisme de la libération conditionnelle s’est à plusieurs reprises trouvé dans le viseur du législateur, qui a procédé à un durcissement des conditions d’accès à la libération conditionnelle, par exemple en rehaussant les seuils à partir desquels une demande de libération conditionnelle peut être accordée et en instituant des périodes de sûreté qui, dans certains cas, peuvent amener le juge du fond (et non celui de l’exécution des peines) à retarder le moment où une demande de libération conditionnelle peut être examinée. Alors que le premier train de réformes (1998-2006) a été inspiré par des considérations à la fois juridiques (le législateur souhaitant insuffler dans ce domaine du droit un surcroît de sécurité juridique) et humanistes (en apportant un certain nombre de réponses à une crise de légitimité de la prison alors criante), le second train de réformes (2013-2017) a visé à satisfaire une partie de l’opinion publique  [2] perçue comme réclamant une sévérité accrue à l’égard des auteurs des crimes les plus graves. La libération conditionnelle semble ainsi naviguer entre une approche progressiste et humaniste, d’une part, et ce que d’aucuns qualifient de populisme pénal, d’autre part.

4De façon quelque peu paradoxale, ces logiques contradictoires se renforcent l’une l’autre à l’égard d’une catégorie spécifique, et particulièrement concernée : celle des personnes condamnées à une peine privative de liberté. Dès lors que, d’un côté, les tribunaux de l’application des peines mis en place en 2006 s’avèrent relativement sévères dans leurs décisions d’octroi ou de refus de libérations conditionnelles et que, d’un autre côté, les conditions pour obtenir une libération conditionnelle ont été à plusieurs reprises durcies par le législateur, des condamnés en nombre sans cesse croissant purgent désormais la totalité de leur peine privative de liberté, sans bénéficier d’un aménagement de peine à cet égard  [3], contrairement à une croyance populaire largement répandue  [4]. Les conséquences de cette situation sur le plan de la lutte contre la récidive sont pointées par plusieurs observateurs : les détenus qui sont amenés à purger la totalité de leur peine ne bénéficient plus des mesures d’accompagnement leur permettant de se réinsérer dans la société. Certains d’entre eux sont ainsi plus enclins à commettre, à leur sortie, de nouvelles infractions susceptibles de les faire à nouveau entrer dans la chaîne pénale.

5L’objectif du présent Courrier hebdomadaire est d’analyser ces différentes évolutions et tensions. Pour ce faire, il revient sur la genèse et le développement des politiques publiques en matière de libération conditionnelle en Belgique. Une attention particulière est accordée au contexte dans lequel ont été adoptées les réformes successives, aux processus législatifs qui y ont conduit – dont les prises de position des partis politiques en présence –, au positionnement de la société civile à ces multiples occasions ainsi qu’aux principaux effets induits par ces réformes sur le plan juridique. Cette recherche repose sur une étude qualitative longitudinale de la presse, sur l’analyse des annales parlementaires et d’autres documents pertinents qui émaillent le parcours législatif de ces différentes réformes, ainsi que sur la prise en considération de la littérature spécialisée en droit de l’exécution des peines et en criminologie.

1. La loi du 31 mai 1888

6Avant d’aborder les principales lignes de force du régime de libération conditionnelle tel qu’il a été instauré en 1888, quelques considérations plus historiques sont proposées. Il n’est en effet pas possible de saisir la portée de la réforme introduite à cette occasion sans percevoir un certain nombre d’éléments de contexte qui renvoient tant à des événements qu’à des évolutions dans le domaine des idées et, plus particulièrement, dans la manière d’aborder le sens de la sanction pénale et de la peine privative de liberté.

1.1. Le contexte politique et intellectuel

7L’histoire de la libération conditionnelle en Belgique est indissociable du nom du ministre de la Justice qui a porté la réforme ayant permis d’introduire cette modalité d’exécution des peines privatives de liberté dans le droit pénal belge : Jules Le Jeune  [5]. Ainsi, la loi du 31 mai 1888 établissant la libération conditionnelle dans le système pénal  [6], mise en œuvre par un arrêté royal du 8 août de la même année  [7], est souvent qualifiée de « loi Lejeune » – l’orthographe en principe correcte de « loi Le Jeune » étant moins souvent rencontrée  [8].

8Cette loi constitue une évolution majeure dans ce domaine du droit. Alors qu’auparavant la peine privative de liberté éventuellement prononcée par une juridiction pénale devait, en principe  [9], être purgée dans sa totalité, la possibilité d’une libération anticipée est introduite dans le droit pénal.

9L’inscription d’une telle évolution législative dans le contexte socio-politique de l’époque mérite d’être brièvement rappelée. Deux événements retiennent en particulier l’attention, tous deux survenus en 1886. En premier lieu, il convient d’évoquer les mouvements sociaux qui ont émaillé l’année 1886, à savoir des grèves et des actions ouvrières d’ampleur qui ont surgi dans les bassins industriels et houillers situés dans les provinces de Hainaut et de Liège. Il y a également eu des grèves dans d’autres régions du pays en 1885, notamment à Gand, dans l’industrie du textile. En 1886, la révolte sociale s’étend et s’intensifie, et ce en raison de conditions économiques particulièrement difficiles – la Belgique traverse alors une grave crise économique – et d’inégalités sociales de plus en plus criantes  [10]. Ce mouvement social est réprimé dans le sang. Plusieurs dizaines de morts et des centaines de blessés sont à déplorer. En outre, la répression judiciaire s’avère particulièrement vive. Ainsi, lorsque le législateur envisage d’intégrer le principe de la libération conditionnelle dans le droit pénal, l’un des objectifs politiques qu’il entend poursuivre est d’adoucir une répression que d’aucuns ont pu juger excessive : « les peines infligées dans le cadre des débordements populaires furent sévères et largement disproportionnées par rapport aux faits commis, dans le but d’écraser la révolte et de constituer des exemples »  [11].

10En effet, si la répression policière et judiciaire s’est avérée particulièrement féroce dans un premier temps, le pouvoir s’est ensuite efforcé de lâcher du lest au moyen de quelques premières législations sociales  [12]. Il convient donc de replacer la loi Le Jeune dans ce contexte afin de mettre en lumière une intention politique oubliée. Il s’agit de « répondre à la pression exercée par la population ouvrière, l’opinion publique et certains milieux parlementaires, visant à ce que les personnes condamnées dans le cadre des mouvements sociaux de 1886 puissent bénéficier de mesures clémentes »  [13]. Tel est particulièrement le cas s’agissant d’Oscar Falleur et de Xavier Schmidt, « condamnés chacun à 20 ans de travaux forcés suite au rôle prépondérant qu’ils avaient joué dans le cadre des débordements sociaux de 1886 à Liège, dans la région du Centre et dans le Borinage. (…) La loi de 1888 instaurant la libération conditionnelle permit d’abréger ces peines »  [14].

11En second lieu, on peut évoquer une saga judiciaire qui défraya la chronique en 1886 : l’affaire Vandersmissen, du nom du député Gustave Vandersmissen. Durant les années 1870, celui-ci s’éprend de la cantatrice Alice Renaud, avec qui il se marie. Parallèlement, le jeune avocat intensifie son engagement politique et se fait élire député en 1884. Il fait alors partie d’un groupe de parlementaires indépendants mais liés au parti catholique. Étant entendu qu’il descend d’une famille libérale, un tel positionnement est perçu comme une trahison par ses proches. Son épouse ayant de nombreuses liaisons extra-conjugales, G. Vandersmissen fait savoir qu’il entame une procédure de divorce, mais il se réconcilie en secret avec son épouse. Alors que celle-ci menace de rendre publique cette réconciliation, il veut la faire changer d’avis et se rend dans l’appartement où elle réside depuis leur rupture. Il découvre alors qu’elle a repris une correspondance avec le célèbre peintre, dessinateur et graveur Félicien Rops, l’un de ses anciens amants, et l’abat d’un coup de revolver. G. Vandersmissen comparaît devant la cour d’assises. Il est défendu par une équipe d’avocats, parmi lesquels figure J. Le Jeune, et est condamné à une peine de 15 ans de réclusion en première instance, peine qui sera ramenée à 10 ans en degré d’appel. Cette affaire, qui se caractérise par la déferlante médiatique qu’elle a suscitée  [15], est remarquable également par les liens qu’elle entretient avec la question de la libération conditionnelle. Lorsqu’il devient ministre de la Justice (en 1887, dans le gouvernement unipartite catholique Beernaert), J. Le Jeune instaure en effet la libération conditionnelle et celle-ci bénéficie à son ancien client, qui est libéré après deux ans de détention  [16].

12Au-delà de cet aspect presque anecdotique, la loi du 31 mai 1888 marque le passage à une nouvelle logique. À la suite de Laura Aubert et Philippe Mary, il est en effet possible de diviser l’évolution de la législation en la matière en trois grandes périodes : la période classique, qui correspond au système issu du Code pénal de 1810 ; la période de défense sociale, qui s’étend de 1888 à la fin du XXe siècle et qui met l’accent sur la nécessité de protéger l’ensemble de la société à l’égard de certains comportements ; et une troisième période qui, faute de mieux, peut être qualifiée de contemporaine, marquée par un impératif à la fois de responsabilisation et de gestion des risques  [17].

13L’emploi du terme « classique » ne doit pas être trompeur, car la période des grandes codifications napoléoniennes marque une rupture nette par rapport au système applicable durant l’Ancien régime, qui était caractérisé par un manque de sécurité juridique, une inégalité de traitement et des pratiques arbitraires. L’imprégnation de la philosophie des Lumières sur les réformes menées durant la période révolutionnaire, et postérieurement, doit être rappelée. Montesquieu dans De l’esprit des lois et après lui Cesare Beccaria dans Des délits et des peines appellent en effet de leurs vœux une législation pénale claire et prévisible, fondée en particulier sur le principe de la légalité des délits et des peines (Nullum crimen, nulla pœna sine lege). Le rôle du juge est alors conçu de manière relativement mécanique : il lui revient d’appliquer la loi aux cas particuliers qui lui sont soumis. La seule marge de manœuvre qui lui est conférée, en tout cas dans un premier temps, est liée à la fixation de la peine entre un plancher et un plafond – mais il s’agit aussi de limiter, dans une fourchette fixée par la loi, le résultat de son intervention.

14Si, à l’origine, la pensée classique est assez indifférente à la question de la responsabilité personnelle, progressivement, sous l’influence d’auteurs qu’il est possible de qualifier de néoclassiques, elle tend à mettre l’accent « sur la responsabilité subjective de l’auteur de l’infraction »  [18]. Les auteurs qui s’inscrivent dans un tel courant de pensée « proposent [ainsi] d’individualiser la peine, en la proportionnant non plus seulement à la gravité de l’infraction, mais aussi à la responsabilité morale de son auteur »  [19]. En Belgique, cette évolution se traduit notamment par l’adoption de la loi du 4 octobre 1867 relative aux circonstances atténuantes : « Largement utilisées, les circonstances atténuantes permettent d’assurer une plus grande effectivité de la répression pénale. Dans un certain nombre de cas, la gravité des peines prévues par le [Code pénal] de 1810, en vigueur en Belgique jusqu’à sa réforme de 1867, entraînait en effet une forme d’impunité : les jurys hésitaient à condamner les auteurs à des peines jugées disproportionnées. Mais les circonstances atténuantes contribuent aussi à un adoucissement de la répression pénale, à une époque où s’accroissent, en Belgique comme ailleurs en Europe, les tensions politiques et sociales sous l’influence de la lutte des classes »  [20].

15L’idée d’une responsabilité morale est ainsi prédominante dans un premier temps, ancrée dans la subjectivité de celui qui a violé la loi pénale. Elle imprègne en particulier les modalités de détention qui sont instaurées en Belgique dans le courant du XIXe siècle, sous l’influence d’Édouard Ducpétiaux, inspecteur général des prisons de 1830 à 1861. Ce dernier privilégie en effet le régime cellulaire, qui suppose que le temps de détention soit passé en cellule, dans une situation d’isolement par rapport aux autres détenus, afin de favoriser l’introspection et l’amendement. Ce type de régime carcéral s’oppose au régime commun, qui implique le maintien d’une vie sociale entre détenus  [21].

16Avec le temps, l’accent se déplace en direction de l’idée de responsabilité sociale, la notion de dangerosité devenant alors prédominante. La deuxième période est ainsi placée sous le signe de la notion de défense sociale, qui n’obéit pas exclusivement à une logique de rétribution d’un individu qui a fauté, mais qui s’intéresse également à la protection de la société, à l’utilité de la peine. La loi du 31 mai 1888 s’inscrit dans cette tendance, tout comme un certain nombre de projets législatifs rappelés par P. Mary, tous portés par le ministre J. Le Jeune : « projets de loi relatifs notamment à la libération conditionnelle (1888), à la protection de l’enfance (1889), au régime cellulaire (1889), aux peines et au régime pénitentiaire des récidivistes (1890), aux aliénés criminels et aux alcooliques (1891), aux vagabonds et aux mendiants (1891), etc. Parmi ces projets destinés à réformer en profondeur le système pénal et pénitentiaire, seuls deux deviennent lois : celui relatif à la libération conditionnelle et celui sur la répression du vagabondage et de la mendicité »  [22].

17Un détour par la figure tutélaire d’Adolphe Prins, pénaliste et sociologue belge, mentor de J. Le Jeune, s’avère ici instructif  [23]. La notion centrale mise en avant par cet auteur est celle de dangerosité : il ne faut pas adapter la réponse pénale au degré de responsabilité subjectivement ressentie de l’auteur d’une infraction, mais à l’intensité du danger qu’il représente pour la société. Une attention particulière est ainsi accordée aux récidivistes ainsi qu’à une catégorie qu’A. Prins appelle les « défectueux », c’est-à-dire les personnes qui présentent un certain nombre de caractéristiques psychiques et comportementales qui les rendent enclins à la délinquance  [24]. La logique présidant aux réformes labellisées « défense sociale » vise ainsi à accroître l’utilité sociale de la peine. Le mécanisme de la libération conditionnelle doit, en particulier, « donner la possibilité de séparer les irrécupérables de ceux dont l’amendement semble possible »  [25], et qui pourront ainsi réintégrer la société et s’y maintenir durablement et pacifiquement. Dans l’esprit d’A. Prins, cette nouvelle approche doit également marquer de son empreinte l’organisation des conditions de détention. Selon lui, le régime cellulaire imposé à l’ensemble des détenus doit être remplacé par un système de régimes différenciés en fonction de la catégorie de détenus à laquelle ils sont destinés : « A. Prins plaide pour l’organisation d’un système adapté aux différentes catégories de délinquants pour les garder ou les traiter selon leur état permanent, et non les punir pour un fait passé. (…) A. Prins conçoit un système pénitentiaire comprenant une classification des établissements selon le type de détenu qu’ils hébergeraient »  [26]. Il faudra toutefois attendre la période de l’entre-deux-guerres pour que cette nouvelle conception de l’organisation pénitentiaire produise ses premiers effets en Belgique : « Malgré plus de trente années passées à la tête de l’administration pénitentiaire (1884-1917), malgré aussi le succès de sa doctrine de défense sociale, A. Prins ne suscite aucune réforme pénitentiaire d’envergure de son vivant. Les tenants du régime cellulaire résistent en effet aux coups portés au système mis en place par É. Ducpétiaux, qui reste d’application, à tout le moins pour les adultes, et est consacré par le règlement général des prisons de 1905 »  [27]. Cependant, une fois qu’elle commencera à se déployer, la philosophie de défense sociale marquera profondément de son empreinte tant les évolutions de la législation pénale (la loi sur la libération conditionnelle étant à cet égard en quelque sorte pionnière puisque adoptée en 1888, c’est-à-dire antérieurement à d’autres législations s’inscrivant explicitement dans une logique de défense sociale  [28]) que l’organisation du monde carcéral.

18Une troisième période peut d’ores et déjà être annoncée, qu’il est possible de qualifier de contemporaine. Durant celle-ci, on observe que d’autres logiques viennent interférer avec la logique de défense sociale alors prédominante, sans que celle-ci se voie pour autant remise en cause de façon principielle (cf. infra). Ces deux logiques complémentaires qui viennent s’immiscer dans la fabrique de la peine sont, d’une part, un accent placé sur le risque futur que représente un condamné en raison d’un certain nombre de caractéristiques qui lui sont propres et, d’autre part, une demande plus forte que par le passé, adressée aux personnes purgeant une peine privative de liberté, d’entreprendre les démarches nécessaires à leur réinsertion future dans la société.

1.2. Les principes posés dans la loi du 31 mai 1888

19Si le principe de la libération conditionnelle, posé dans la loi du 31 mai 1888, subit au fil du temps de nombreux aménagements, il conserve néanmoins un noyau de stabilité. Michel van de Kerchove définit la libération conditionnelle de la façon suivante : « la mise en liberté d’un condamné à une peine privative de liberté qui a exécuté une partie seulement de sa peine, mais qui ne sera définitivement acquise que s’il satisfait, dans le délai d’épreuve fixé, aux conditions qui lui sont imposées »  [29]. Ces éléments de définition seront repris dans la loi qui sera adoptée en 2006 (cf. infra) afin d’exposer les grands principes qui régissent ce domaine du droit.

20À la fin du XIXe siècle, un phénomène d’individualisation de la peine et des modalités liées à son exécution est à l’œuvre. Il marque également l’autre grand volet de la loi de 1888 : l’instauration du sursis, qualifié à l’époque de « condamnation conditionnelle ». Le principe du sursis est le suivant : l’exécution de la peine prononcée par un juge dans le cadre d’une condamnation est suspendue « pendant un délai d’épreuve, à l’issue duquel la peine prononcée ne pourra plus être exécutée si l’intéressé ne commet pas une nouvelle infraction dont la gravité est déterminée par la loi »  [30]. L’idée sous-jacente est que certaines personnes sont suffisamment et efficacement punies, d’une part, par les effets symboliques qui s’attachent à une condamnation pénale et, d’autre part, si est brandie une simple menace, une peine effective s’avérant dès lors inutile. À leur égard, l’exécution de la peine pourrait même être contre-productive et accroître le risque de récidive. Si, au départ, aucun dispositif d’accompagnement ou de contrôle des conditions imposées n’est prévu concernant les personnes condamnées avec sursis, il sera instauré par une loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation  [31], sous la forme d’une suspension ou d’un sursis probatoire.

21Le sursis et la libération conditionnelle sont ainsi apparus ensemble dans notre droit. Ces évolutions marquent le passage d’une logique exclusivement rétributive, caractéristique de la période classique, à une logique fondée sur un impératif de protection de la société. Ces deux modalités s’inscrivent également dans une tendance plus générale de diversification des outils mis à la disposition du juge pénal.

22Au départ, dans l’esprit même de son concepteur, le ministre J. Le Jeune, tout comme dans celui d’A. Prins, inspirateur du premier cité, la libération conditionnelle est conçue comme une faveur qui est accordée à un détenu ayant apporté la preuve de ses capacités d’amendement, mais en aucune façon comme un droit. A. Prins écrit ainsi : « Il n’est nullement question, cela va de soi, de faire de la libération conditionnelle la règle, de laisser supposer aux détenus qu’ils y ont un droit ; c’est une faveur exceptionnelle accordée par le ministre à des détenus dignes d’intérêt »  [32]. Selon J. Le Jeune, l’instauration du mécanisme de la libération conditionnelle correspond d’ailleurs à un surcroît de sévérité, et non d’indulgence. En effet, il entend mettre un terme à un système de libération automatique qui avait été prévu, dans certains cas, suite à l’adoption de la loi du 4 mars 1870  [33]. Selon les termes de celle-ci, les détenus qui étaient astreints au régime cellulaire bénéficiaient d’une réduction de peine automatique, calculée en appliquant un barème fixé dans la loi. La justification de ce système était la suivante : « Le régime cellulaire [étant] plus rigoureux et moralisateur que le régime commun, et (…) l’action d’un tel régime étant plus efficace au début de la détention, son utilité décroît avec le temps et la peine doit donc être réduite proportionnellement »  [34]. C’est contre ce système que la réforme de 1888 est envisagée, J. Le Jeune souhaitant supprimer ce caractère automatique de la libération, qui ne tenait pas compte du comportement du détenu durant sa détention  [35]. Au départ, la question de l’amendement de la personne condamnée à une peine privative de liberté est en effet centrale, celle-ci devant « mériter » l’aménagement de peine qui lui est octroyé à titre de faveur. Afin d’être en mesure de se prononcer, le ministre de la Justice est mis en possession de différents avis, qui évaluent le comportement ainsi que les progrès de chaque détenu, considéré individuellement. Plus tard, ces différentes caractéristiques évolueront. D’une part, la libération conditionnelle, de simple faveur, sera envisagée comme un droit à part entière (même si cette question demeure aujourd’hui encore controversée et que cette évolution ne semble pas s’être réalisée en pratique  [36]). D’autre part, et corrélativement, la logique d’amendement et de sélection positive qu’elle suppose, en vertu de laquelle ne sortent de prisons que les personnes ayant fait la preuve de leur amélioration et de leur prise de conscience de la gravité de leurs actes, sera progressivement supplantée par un principe de sélection négative selon lequel « la modalité doit être accordée par principe aux [personnes condamnées], sauf si des contre-indications peuvent être retenues » (bien que certains considèrent que ce passage d’une sélection positive à négative n’a pas été pleinement réalisé)  [37].

2. De la loi du 31 mai 1888 à l’affaire Dutroux

23Entre 1888 et 1998, le système de la libération conditionnelle n’est pas réformé de façon notable  [38]. Cependant, il ne constitue pas pour autant un no man’s land juridique : des propositions de réforme sont formulées et ce domaine du droit est réglé à coup de circulaires ministérielles, qui peuvent être très nombreuses  [39].

24Au titre des législations qui touchent indirectement au domaine de la libération conditionnelle, il est possible de mentionner la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude. Comme son nom l’indique assez clairement, il s’agit d’une législation qui s’inscrit dans une optique de défense sociale, tout comme la loi du 31 mai 1888 sur la libération conditionnelle  [40]. Il est intéressant de noter que, à l’origine de cette loi, figurent des projets portés par J. Le Jeune, en sa qualité de ministre de la Justice et ensuite de sénateur  [41]. Cette législation a introduit dans le droit pénal « une mesure de sûreté que la jurisprudence finira par consacrer comme peine : la mise à disposition du gouvernement. Exécutée après la peine principale, elle visait les récidivistes de crime sur crime pour lesquels elle était obligatoire », ainsi que les récidivistes de délit sur crime et de crime sur délit et les « délinquants d’habitude », pour lesquels elle était facultative  [42]. Cette loi du 9 avril 1930 est remplacée par la loi du 1er juillet 1964 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude  [43], sans que sa philosophie générale soit pour autant modifiée.

25La matière évolue encore par la suite. En 1998, dans le sillage de l’affaire Dutroux et à l’occasion de la réforme de la libération conditionnelle qui est alors décidée (cf. infra), « la loi de défense sociale de 1964 [est rebaptisée] en “loi de défense à l’égard des anormaux, des délinquants d’habitude et des auteurs de certains délits sexuels”. Pour répondre à la demande d’instauration de peines incompressibles qui [émerge] à l’époque, il [est] en effet décidé de renforcer l’application de la mise à la disposition du gouvernement à l’égard des délinquants dits “sexuels” »  [44]. Quelques années plus tard, en 2007, la notion de mise à la disposition du gouvernement est remplacée par celle de mise à la disposition du tribunal de l’application des peines (TAP ; cf. infra)  [45].

26En outre, durant cette longue période qui va de 1888 à 1998, le système existant de libération conditionnelle de même que, plus généralement, le domaine de l’exécution des peines font l’objet de critiques et de propositions de réformes  [46]. La loi Le Jeune est notamment « fortement critiquée pour son manque de clarté au niveau des conditions à remplir pour obtenir une libération conditionnelle. L’amendement est considéré comme une condition purement subjective, et donc inopérante. La procédure administrative et sa longue chaîne d’avis est jugée complexe, lourde, non transparente, et son caractère unilatéral et non contradictoire comme incompatible avec les droits de la défense »  [47]. Différentes propositions de réformes sont ainsi élaborées. Outre les travaux d’un collectif de membres de l’administration pénitentiaire intitulé « Collectif réforme pénitentiaire »  [48], une modification substantielle du système de libération conditionnelle est en particulier envisagée, en 1985, dans l’avant-projet de Code pénal rédigé par le commissaire royal à la réforme du Code pénal, Robert Legros, qui propose notamment de judiciariser la matière de l’exécution des peines par la création d’un tribunal de l’application des peines  [49]. Aucune suite concrète ne sera toutefois réservée à ces différents initiatives et projets.

3. Le choc de l’affaire Dutroux

27La question de la position sociale et juridique des victimes d’actes intentionnels de violence et du sort réservé aux coupables connaît une présence renouvelée dans l’espace public au début des années 1990, en particulier en raison des activités de l’asbl Marc et Corinne  [50]. Celles-ci ont été suscitées par une affaire survenue en 1992, celle « d’un jeune couple sauvagement abattu dans les bois par deux condamnés, l’un en congé pénitentiaire et l’autre en libération conditionnelle ». Cette affaire « suscita un mouvement d’opinion particulièrement virulent qui, s’attaquant directement à “la conscience” du ministre de la Justice de l’époque, le présenta, en tant que signataire des décisions de congé et de libération anticipée, comme l’un des responsables directs de cet assassinat »  [51].

28Mais c’est surtout l’affaire Dutroux, et le choc tout à la fois social et politique qu’elle a représenté, qui a conduit à mettre en chantier d’importantes réformes dans le fonctionnement de la police et de la justice en Belgique, réformes qui ont été initiées à partir de la fin des années 1990 mais qui se sont poursuivies bien au-delà. Au moment de l’affaire Dutroux, semble s’opérer une transition entre la période qualifiée ci-avant de défense sociale et celle qualifiée de contemporaine, marquée par « un contexte d’hyperréactivité aux risques »  [52].

29Un rappel exhaustif des faits n’est pas envisageable dans le cadre restreint de cette étude. Il est quand même utile d’insister ici sur certains antécédents judiciaires de Marc Dutroux, récidiviste et polycriminel. Ses premières condamnations remontent à la fin des années 1970, pour vol. C’est en 1986 qu’intervient sa première arrestation pour des faits à caractère sexuel. M. Dutroux et Michelle Martin, qui est alors sa compagne, sont arrêtés pour des faits de séquestrations, d’enlèvements et de viols de mineures de moins de 16 ans commis entre 1983 et 1985. En 1989, ils sont condamnés respectivement à 13 ans et demi et 5 ans de prison. D’autres condamnations suivent à la fin des années 1980 et au début des années 1990. En août 1991, M. Martin est libérée. En avril 1992, M. Dutroux bénéficie quant à lui d’une libération conditionnelle, signée par le ministre de la Justice, Melchior Wathelet (PSC). M. Dutroux est rapidement en état de récidive. En novembre 1992, des faits d’attouchements sexuels sur mineures commis à la patinoire de Charleroi sont signalés. M. Dutroux est interrogé par la police communale et relâché. Pour des faits de séquestration de deux personnes en raison d’un différend sur le vol d’un camion, M. Dutroux est à nouveau incarcéré entre le 6 décembre 1995 et le 20 mars 1996.

30Au moment où survient cette incarcération, Julie Lejeune et Mélissa Russo – deux fillettes enlevées à Grâce-Hollogne le 24 juin 1995 –, se trouvent dans une cache aménagée au sein même de la maison de M. Dutroux, à Marcinelle. Il est important de rappeler ces circonstances, car elles permettent d’éclairer la responsabilité de M. Martin. L’enquête mettra en effet en évidence qu’elle a laissé mourir de faim et de soif les fillettes enlevées par son époux. En outre, l’enquête menée pour le vol d’un camion conduira des enquêteurs de la gendarmerie dans la maison de Marcinelle les 13 et 19 décembre 1995. Lors de la deuxième perquisition menée, deux enquêteurs entendent des voix d’enfants, mais leurs recherches sont infructueuses. Julie et Mélissa – qui se trouvaient alors dans la cache – auraient pu être sauvées à cette occasion. Il s’agit d’un élément de cette affaire qui marquera particulièrement l’opinion.

31Le 13 août 1996, M. Dutroux est arrêté, avec M. Martin et deux complices, dans le cadre de ce qui deviendra l’affaire Dutroux dont l’écho, loin de se limiter à la scène nationale, retentira bien au-delà des frontières de la Belgique. Outre Julie et Mélissa, les autres victimes de la bande criminelle sont Laetitia Delhez, Sabine Dardenne, An Marchal et Eefje Lambrecks, les deux dernières citées ayant été assassinées par M. Dutroux quelques jours après leur enlèvement à Ostende, le 23 août 1995. Les autres protagonistes de l’affaire, outre M. Martin, sont Bernard Weinstein, qui a été assassiné par M. Dutroux en novembre 1995, Michel Lelièvre et Michel Nihoul. Toxicomane, M. Lelièvre a aidé M. Dutroux à enlever les enfants à plusieurs reprises. Le 22 juin 2004, il est condamné à 25 années de réclusion pour participation à une association de malfaiteurs impliquée dans des enlèvements et des séquestrations d’enfants, ainsi que pour divers trafics. Quant à lui, M. Nihoul est inculpé pour enlèvement d’enfants le 17 août 1996, mais il sera innocenté pour l’ensemble des faits relatifs aux enfants par la cour d’assises de la province de Luxembourg à l’issue du procès, particulièrement médiatisé, qui sera organisé à Arlon en 2004 afin de juger les principaux protagonistes de cette affaire  [53].

32De cette affaire ressort une vision de la justice particulièrement contrastée. En premier lieu, il s’agit, d’un moment charnière qui conduit à des réformes profondes de la justice et de la police. Un plan Octopus  [54] est en effet adopté, qui comprend différents volets : la disparition de la gendarmerie et une nouvelle organisation de la police  [55] ; la création du Conseil supérieur de la justice (CSJ), des maisons de justice et des services psycho-sociaux en prison ; une révision du processus de nomination des magistrats ; le renforcement des droits des victimes tant dans le cadre de la procédure pénale elle-même – ce qui sera réalisé suite à l’adoption de la loi du 12 mars 1998  [56] – qu’au niveau de la phase d’exécution des peines (cf. infra). Ces différentes réformes tendent notamment à apaiser un sentiment de défiance des citoyens vis-à-vis de la justice, qui a pris à l’occasion de l’affaire Dutroux une forme exacerbée. Certes, le thème de la justice et de son fonctionnement n’était pas aux abonnés absents précédemment. Il est ainsi possible de citer, notamment, les travaux, qui se sont tenus à la fin des années 1980 et au début des années 1990, de la commission parlementaire d’enquête chargée d’examiner la manière dont la lutte contre le banditisme et le terrorisme est menée, créée le 21 avril 1988. Il n’en demeure pas moins que l’affaire Dutroux marque un véritable tournant. La critique des dysfonctionnements de la police et de la justice y acquiert un caractère central, et imprégnera en particulier les travaux de la très médiatisée commission d’enquête parlementaire mise en place par la Chambre des représentants (cf. infra).

33En second lieu, l’affaire Dutroux constitue aussi, de façon quelque peu paradoxale, un moment où la possibilité que la justice soit rendue et que la vérité puisse être mise au jour est incarnée par des membres du pouvoir judiciaire, et en particulier par un juge d’instruction de Neufchâteau, Jean-Marc Connerotte, et par le procureur du Roi au sein du même arrondissement judiciaire, Michel Bourlet. En effet, l’action de la cellule d’enquête de Neufchâteau dans cette affaire criminelle s’est avérée déterminante. C’est elle qui a fait la lumière sur une série de disparitions de mineures d’âge. Une ancienne affaire, celle de la disparition de Loubna Benaïssa, disparue à Ixelles le 5 août 1992, est ainsi également résolue à leur initiative en mars 1997. L’émoi suscité par cette affaire – qui, comme on l’oublie parfois, a également été mise au centre des interrogations et investigations de la commission d’enquête parlementaire organisée au sein de la Chambre des représentants (dite commission Dutroux) – conduira à l’adoption de réformes importantes en matière de défense sociale  [57].

34Durant cette période, la justice est dès lors à la fois critiquée, voire conspuée, d’une part, et idéalisée, d’autre part. À un sentiment de défiance vis-à-vis de la justice comme institution, dans son fonctionnement « traditionnel » – ou en tout cas perçu comme tel –, auquel correspond la figure du juge automate et à distance du corps social, répond la confiance placée dans certains acteurs de la justice, qui apparaissent comme des « chevaliers blancs » et des magistrats de proximité, plutôt que froids et distants  [58].

35Cette opposition connaît son point culminant lorsque la Cour de cassation rend, le 14 octobre 1996, un arrêt ordonnant le dessaisissement du juge J.-M. Connerotte  [59]. Cette décision de justice, fréquemment qualifiée d’« arrêt Connerotte » ou d’« arrêt spaghetti », suscite d’importantes controverses au sein de l’opinion publique et parmi les juristes eux-mêmes  [60]. Alors que, le 21 septembre 1996, M. Bourlet et J.-M. Connerotte participaient à un souper spaghetti destiné à financer la défense de Laetitia Delhez, la Cour de cassation est saisie par l’avocat de M. Dutroux d’une requête en dessaisissement pour suspicion légitime. Elle estime que J.-M. Connerotte manque d’impartialité. La Cour de cassation fait droit à cette demande, sans toutefois aller jusqu’à considérer que des soupçons d’impartialité pèsent sur l’arrondissement de Neufchâteau lui-même, considéré dans sa globalité. Le juge J.-M. Connerotte est dessaisi de l’instruction, et son collègue Jacques Langlois au sein du même arrondissement judiciaire hérite du dossier  [61].

36Au niveau chronologique, ce point culminant, qui fait craindre à certains observateurs un basculement de la Belgique dans une situation politique troublée voire insurrectionnelle, correspond à la tenue de la Marche blanche, devenue un exemple d’action pacifique et citoyenne et, à ce titre, pouvant participer à un mouvement plus général de renouveau démocratique  [62]. Parmi les revendications portées par ce mouvement, figure une révision du système de la libération conditionnelle, considéré comme insuffisamment transparent, trop laxiste et ne permettant pas une implication des victimes et de leurs proches. Avant que l’affaire Dutroux ne survienne, une modification du système de libération conditionnelle avait été envisagée à plusieurs reprises, notamment par le commissaire royal à la réforme du Code pénal, R. Legros (cf. supra).

37En outre, et plus généralement, des commissions visant à élaborer des projets de réforme de la procédure pénale et de l’exécution des peines poursuivent ou entament leurs travaux dans le contexte du choc politique induit par l’affaire Dutroux. La commission pour le droit de la procédure pénale (dite commission Franchimont), mise sur pied en 1991  [63], accélère ainsi ses travaux de façon notable. Dans le secteur du droit pénitentiaire et de l’exécution des peines, si une réforme de la libération conditionnelle est envisagée sans attendre une réflexion d’ensemble de ce domaine du droit, une commission chargée de l’élaboration d’une loi de principe concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus (dite commission Dupont) est également mise en place (cf. infra). Il peut donc être affirmé que l’éclatement de l’affaire Dutroux a eu pour effet de réactiver de façon notable des ambitions de réforme qui lui préexistaient  [64]. D’autres modifications de la législation sont par ailleurs initiées à cette occasion, également dans le sillage des travaux de la commission d’enquête parlementaire déjà citée qui, dans ses deux rapports, a avancé un certain nombre de propositions.

4. Les lois des 5 et 18 mars 1998

38En 1996, la confiance des citoyens belges à l’égard des institutions publiques est donc fortement altérée, particulièrement envers le système judiciaire. Dans la foulée de l’affaire Dutroux, le taux de confiance envers la justice chute de 26 % à 10 % en seulement quelques mois  [65]. Comme cela a été indiqué, cette méfiance grandissante conduit les pouvoirs publics à adopter un certain nombre de réformes, notamment en matière judiciaire. C’est dans ce cadre que prend place l’une des premières réformes d’envergure du système de libération conditionnelle qui, pour rappel, n’a pas été modifié de façon notable depuis la loi Le Jeune du 31 mai 1888. Notamment, cette réforme instaure des commissions de libération conditionnelle et prévoit la consultation des victimes préalablement à l’octroi d’une libération conditionnelle.

4.1. En amont de la réforme : la mise sur pied d’une commission d’enquête parlementaire

39Le 22 août 1996, jour de l’enterrement de deux des victimes de Marc Dutroux, Julie Lejeune et Mélissa Russo, la manière avec laquelle les enquêtes sur les disparitions d’enfants ont été menées, l’application de la loi pénale ainsi que l’exécution des peines sont questionnées en commission de la Justice de la Chambre des représentants. Le 14 octobre 1996, une proposition visant à instaurer une commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner la manière dont l’enquête, dans ses volets policiers et judiciaires, a été menée dans l’affaire « Dutroux-Nihoul et consorts » est déposée par Didier Reynders (PRL), Patrick Dewael (VLD) et Marc Verwilghen (VLD)  [66]. Cette proposition est examinée le 17 octobre 1996 par la commission de la Justice et est adoptée le même jour par la Chambre des représentants, réunie en séance plénière.

40Durant ses travaux, la commission d’enquête parlementaire auditionne notamment M. Wathelet le 29 novembre 1996. Alors qu’il était ministre de la Justice, celui-ci a ordonné la libération de M. Dutroux en adoptant un arrêté ministériel le 6 avril 1992 (qui a pris effet deux jours plus tard). M. Wathelet est interrogé quant aux motifs ayant présidé à sa décision quatre ans plus tôt. Selon l’intéressé, « pour l’époque, la décision n’était sûrement pas anormale »  [67], puisqu’il avait pris sa décision de libérer anticipativement M. Dutroux sur la base de quatre avis positifs contre deux avis négatifs. La responsabilité du ministre continue toutefois à être pointée du doigt par le président de la commission d’enquête parlementaire, M. Verwilghen : « C’est une décision que je continue à ne pas approuver ; à mon avis personnel, le ministre porte une responsabilité politique »  [68]. Dans son rapport final, la commission d’enquête retient la responsabilité du ministre de la Justice de l’époque, M. Wathelet, dans la libération de M. Dutroux  [69]. Par ailleurs, le parquet de Charleroi se voit lui aussi imputer la responsabilité de ne pas avoir informé le ministre de la Justice de faits qui auraient pu entraîner la révocation de la libération conditionnelle de M. Dutroux. En effet, comme cela a été indiqué, en novembre 1992, la police locale de Charleroi avait interpellé M. Dutroux pour attentat à la pudeur sur des jeunes filles à la patinoire à Charleroi. Mais aucun procès-verbal n’avait été dressé et aucune procédure visant à révoquer la libération conditionnelle de M. Dutroux n’avait alors été entreprise. Deux autres cas indiquant que M. Dutroux ne respectait pas les conditions de sa libération conditionnelle (pour vols et séquestration arbitraire) s’étaient produits à nouveau en novembre 1993 et en décembre 1995, sans effet.

41En définitive, c’est « l’échec de la mise en œuvre de la loi sur la libération conditionnelle » qui est souligné dans le rapport final de la commission  [70]. En conséquence, plusieurs recommandations sont formulées afin de réformer le système de libération conditionnelle. La commission appelle notamment de ses vœux la mise en place d’un tribunal de l’application de peines : « Étant donné que la mise en œuvre de la loi du 31 mai 1888 sur la libération conditionnelle s’est soldée par un échec et doit être repensée, la commission se rallie à la notion de tribunal de l’application des peines. Dans l’attente d’une évaluation de la libération conditionnelle, le tribunal de l’application des peines doit en tout cas décider de tous les aspects et modalités de l’application des peines, y compris la libération conditionnelle »  [71].

42La commission estime également nécessaire de revoir la place de la victime dans le cadre de la procédure devant mener à l’octroi d’une mesure de libération conditionnelle : « La commission recommande (…) d’instaurer le droit pour la victime d’être consultée dans la procédure d’avis en matière de libération conditionnelle. Il ne s’agit pas de subordonner la décision à l’accord de la victime mais de solliciter son avis. Il faut également que la libération soit préparée par une aide à la victime et qu’elle se réalise dans des conditions optimales de sécurité (comme le choix de la résidence du libéré) »  [72].

43Approuvé à l’unanimité, le rapport de la commission d’enquête parlementaire est rendu public le 14 avril 1997. Il est à noter que le parti d’extrême droite Vlaams Blok (VB) a été représenté dans la commission d’enquête parlementaire par le député fédéral Gerolf Annemans. Ce parti est alors le seul à défendre une suppression pure et simple du système de libération conditionnelle. Pourtant, il a également voté en faveur du rapport, qui ne prévoit pas la suppression de ce dispositif vieux de plus de cent ans. Le VB justifie cette position par le fait qu’il aurait conditionné son vote (et, d’une certaine manière, l’adoption du rapport à l’unanimité) à l’inscription dans le rapport d’une révision du fonctionnement du système de libération conditionnelle  [73]. S’il n’est clairement pas le seul parti à se prononcer en faveur d’une réforme en la matière, son influence n’en demeure pas moins perceptible à ce niveau.

4.2. Les lois des 5 et 18 mars 1998 : de la mise à l’agenda à l’adoption

44La législation sur la libération conditionnelle s’apprête ainsi à être revue en profondeur. Dès décembre 1996, le ministre de la Justice du gouvernement Dehaene II (CVP/PS/SP/PSC), Stefaan De Clerck (CVP), soumet deux avant-projets de loi à la section de législation du Conseil d’État. Ces avant-projets visent notamment à ne plus faire dépendre les libérations conditionnelles du pouvoir exécutif. Six commissions de libération conditionnelle sont prévues, chacune présidée par un magistrat. Ces juridictions administratives connaissent le système de l’échevinage, c’est-à-dire qu’elles sont composées à la fois de juges professionnels et de juges non professionnels  [74]. Ces derniers sont des experts soit dans le domaine pénitentiaire, soit dans le champ de la réinsertion sociale. Les commissions de libération conditionnelle se caractérisent ainsi par leur fonctionnement pluridisciplinaire, trait qui sera conservé lors de leur remplacement par les tribunaux de l’application des peines (cf. infra). Lorsqu’une libération conditionnelle est octroyée avant la moitié de la peine quand celle-ci est d’au moins dix ans, la commission doit statuer à l’unanimité. En outre, ces avant-projets prévoient que les victimes doivent être consultées avant que ne soit prononcée une décision de libération conditionnelle. En revanche, le seuil d’admissibilité à la libération conditionnelle n’est pas revu. En conséquence, il demeure possible pour un condamné d’être libéré après avoir purgé un tiers de sa peine ou deux tiers en cas de récidive légale.

45Si ce ne sont pas de véritables tribunaux de l’application des peines qui sont d’emblée envisagés, comme recommandé dans le rapport de la commission d’enquête parlementaire, cela tient au fait que l’instauration de tribunaux de l’application des peines nécessite une révision de l’article 157 de la Constitution, relatif au pouvoir judiciaire. Cet article n’étant pas ouvert à révision, une telle modification n’est pas possible et seule une « étape intermédiaire » sur le chemin menant à la création de tels tribunaux peut alors être envisagée à ce moment précis.

46S. De Clerck dépose chacun des projets de loi au Parlement après avoir reçu l’avis du Conseil d’État, et ce sans suivre la recommandation formulée par ce dernier visant à fusionner les deux textes en raison de leur indivisibilité (ce qui ne manquera d’ailleurs pas d’être soulevé à plusieurs reprises lors des débats parlementaires) : le projet de loi instituant les commissions de libération conditionnelle  [75] est déposé au Sénat le 26 mars 1997 ; le projet de loi relatif à la libération conditionnelle et modifiant la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude, remplacée par la loi du 1er juillet 1964  [76], est quant à lui déposé à la Chambre des représentants le 10 juin 1997.

47Après avoir fait l’objet de nombreux échanges et après avoir été voté en commission de la Justice du Sénat, le projet de loi instituant des commissions de libération conditionnelle est débattu en séance plénière, au Sénat, puis soumis au vote le 17 juillet 1997. À cette occasion, et alors que le rapport d’enquête parlementaire avait été adopté à l’unanimité, c’est davantage une logique « majorité contre opposition » qui prévaut. Ainsi, alors que les sociaux-chrétiens (CVP et PSC) et les socialistes (PS et SP) défendent le projet de loi, l’opposition libérale ne se prononce pas en faveur du texte. La Fédération PRL FDF et le VLD soulignent l’importance du projet de loi et considèrent qu’il s’agit d’une avancée considérable ; en outre, ils saluent la composition pluridisciplinaire des commissions de libération conditionnelle. Néanmoins, ils regrettent que le texte ne permette pas la mise sur pied de véritables tribunaux de l’application des peines, comme le suggère pourtant le rapport de la commission d’enquête parlementaire. En conséquence, ils annoncent s’abstenir lors du vote. C’est sur la base d’une argumentation similaire qu’intervient la Volksunie (VU). Les écologistes (Écolo et Agalev) reconnaissent également que le texte est une étape importante par rapport à la situation qui prévalait jusqu’alors, mais regrettent que de véritables tribunaux de l’application des peines ne soient pas mis en place et doutent que les moyens humains prévus pour la mise en œuvre de la réforme suffisent pour atteindre les objectifs fixés. Enfin, l’extrême droite (incarnée par le VB) s’oppose au texte sur la base d’objections de fond au système de la libération conditionnelle, en rappelant qu’elle défend l’abolition pure et simple de ce mécanisme mis en place en 1888. In fine, le projet de loi instituant les commissions de libération conditionnelle est adopté le 17 juillet 1997 au Sénat par 60 voix (CVP, PS, SP et PSC). Alors que les libéraux, les écologistes et les nationalistes s’abstiennent, seul le VB (à l’exception de Joris Van Hauthem, qui s’abstient) vote contre le texte. Le projet de loi est alors transmis à la Chambre des représentants.

48Le projet de loi instituant des commissions de libération conditionnelle voté par le Sénat est analysé par la Chambre des représentants le 15 janvier 1998, concomitamment au projet de loi relatif à la libération conditionnelle. Les débats portant sur les deux projets de loi en séance plénière de la Chambre des représentants sont dès lors présentés ensemble dans les paragraphes qui suivent.

49À nouveau, et sans surprise, une logique majorité-opposition se dessine à la Chambre des représentants à l’égard des deux projets de loi. Chacun des textes est ainsi défendu par les partenaires de la majorité. Le parlementaire Thierry Giet (PS) précise par exemple qu’il s’agit « d’une amélioration remarquable par rapport au système que nous connaissons encore aujourd’hui »  [77]. Selon les représentants des partis soutenant les textes, il est en effet souhaitable que le pouvoir de décision quant aux libérations conditionnelles ne soit plus laissé entre les mains du ministre de la Justice. Par ailleurs, tous saluent l’aspect pluridisciplinaire des commissions mises en place et la prise en compte des victimes dans le processus de libération conditionnelle. En outre, les députés de la majorité se félicitent que ne soient pas instaurées des peines incompressibles, comme cela est pourtant réclamé par nombre de parlementaires de l’opposition.

50De son côté, l’opposition exprime son désaccord à l’égard de chacun des textes présentés. Les critiques formulées par les libéraux francophones portent notamment sur les conditions de fond prévues pour pouvoir bénéficier d’une libération conditionnelle (la Fédération PRL FDF dénonce, par exemple, le fait qu’aucune nouvelle condition ne soit fixée par le gouvernement pour qu’une personne condamnée à une peine privative de liberté puisse bénéficier d’une libération anticipée), sur l’absence de création de périodes de sûreté et de peines incompressibles (comme la Fédération PRL FDF l’a réclamé à travers un grand nombre d’amendements), sur l’absence de création de véritables tribunaux de l’application des peines, sur la place de la victime dans la procédure de libération conditionnelle (qui est considérée comme étant encore trop faible), et sur le contrôle et le suivi des personnes libérées de façon conditionnelle. Pour reprendre la formule utilisée par le député Antoine Duquesne, la Fédération PRL FDF considère que « l’objet et l’ampleur de la réforme restent très limités »  [78]. Du côté néerlandophone aussi, les libéraux se montrent critiques à l’égard des projets de loi soumis par le gouvernement fédéral. Notamment, le VLD demande que soit rehaussé le seuil minimal à partir duquel une libération conditionnelle peut être octroyée (d’un tiers de la peine à deux tiers, et de deux tiers de la peine à trois quarts en cas de récidive), propose de supprimer le principe constitutionnel de grâce royale (article 110 de la Constitution) et demande l’instauration d’un véritable tribunal de l’application des peines en lieu et place des commissions de libération conditionnelle dont l’un des projets prévoit la création.

51Bien que siégeant dans l’opposition, les écologistes  [79] annoncent qu’ils soutiendront les deux projets de loi. Selon eux, ces textes souffrent de plusieurs carences : par exemple, en ne permettant pas d’inclure suffisamment et de façon automatique les victimes lors du traitement d’une demande de libération conditionnelle, et en ne prévoyant pas suffisamment de commissions de libération conditionnelle à travers le pays. Néanmoins, Écolo et Agalev considèrent que ces projets de loi « sont importants et constituent un pas dans la bonne direction »  [80]. De leur côté, les formations d’extrême droite – à savoir le VB et le FN – se prononcent contre la réforme.

52Les amendements déposés par l’opposition et relatifs aux deux projets de loi sont tous rejetés lors des votes. Suite aux débats qui se tiennent en séance plénière, le 15 janvier 1998, le projet de loi instituant les commissions de libération conditionnelle est adopté par 89 voix (CVP, PSC, PS, SP, Écolo et Agalev). Alors que les libéraux (sauf Julien Van Aperen, VLD, qui s’abstient) ainsi que le VB et le FN s’y opposent, la VU s’abstient. Le projet de loi relatif à la libération conditionnelle et modifiant la loi du 9 avril 1930 remplacée par la loi du 1er juillet 1964 est lui aussi adopté par 89 voix (CVP, PSC, PS, SP, Écolo et Agalev). Les libéraux (sauf Julien Van Aperen, VLD, qui s’abstient) et l’extrême droite s’y opposent, alors que la VU s’abstient ; quant à lui, Georges Clerfayt (Fédération PRL FDF) perd son vote alors qu’il souhaitait s’opposer au texte. Les deux textes sont alors transmis au Sénat.

53Le 19 février 1998, c’est le Sénat qui débat puis vote à son tour sur les deux projets de loi adoptés par la Chambre des représentants près d’un mois plus tôt. Les partis sociaux-chrétiens (CVP et PSC) et socialistes (PS et SP) défendent les projets de loi en rappelant notamment que ceux-ci permettent de tenir compte de l’avis et des remarques des victimes si elles le souhaitent, de prendre des décisions en matière de libération conditionnelle sur une base solide, dans le cadre d’un débat contradictoire, par des magistrats et des assesseurs qualifiés, et de rendre possible la réinsertion des condamnés grâce aux conditions assorties aux libérations anticipées.

54Les écologistes admettent que, « après avoir pesé le pour et le contre »  [81], il s’agit de textes équilibrés. Ils préféreraient certes l’instauration de tribunaux de l’application des peines, mais ils reconnaissent que l’urgence impose une phase intermédiaire telle que celle proposée, qui prend la forme de l’instauration de commissions de libération conditionnelle. Les écologistes saluent également la prise en compte des victimes que prévoient les textes. En conséquence, ils annoncent soutenir chacun des projets de loi. Quant à eux, les libéraux rappellent notamment qu’ils sont favorables à une révision des seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle. Ils s’opposent dès lors au projet de loi relatif à la libération conditionnelle, mais annoncent leur abstention à l’égard du projet instituant des commissions de libération conditionnelle. Les textes ne remettant pas fondamentalement en cause le système de libération conditionnelle, le VB annonce voter contre ceux-ci. Enfin, la VU considère que les projets de loi vont dans le bon sens mais demeurent ambigus et peu ambitieux. Elle questionne par exemple la manière avec laquelle un détenu est en capacité (ou non) de prévoir lui-même son propre plan de réinsertion.

55Dans la foulée de ces débats, chacun des textes est adopté en séance plénière, le 19 février 1998. Le projet de loi instituant des commissions de libération conditionnelle est adopté avec 38 voix. Seuls les sénateurs du VLD (à l’exception d’Hugo Coveliers, qui s’abstient) et du VB votent contre. Les sénateurs de la Fédération PRL FDF et de la VU s’abstiennent. Le projet de loi relatif à la libération conditionnelle est également adopté avec 38 voix. Néanmoins, et à l’instar du vote à la Chambre des représentants, l’opposition qu’il rencontre est plus ferme puisqu’elle regroupe 15 voix, à savoir celles de la Fédération PRL FDF, du VLD et du VB. Comme elle l’avait annoncé durant les débats, la VU s’abstient à nouveau.

56Le lendemain, le quotidien Le Soir évoque cette réforme par référence à la législation plus que centenaire qu’elle est venue remplacer : « La loi Lejeune… rajeunie par le Parlement »  [82]. La loi relative à la libération conditionnelle et modifiant la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude, remplacée par la loi du 1er juillet 1964, est sanctionnée par le Roi le 5 mars 1998  [83] ; quant à elle, la loi instituant les commissions de libération conditionnelle est sanctionnée le 18 mars 1998  [84].

4.3. Les principales modifications apportées par les lois des 5 et 18 mars 1998 sur le plan juridique

57Suite à l’adoption des lois des 5 et 18 mars 1998, les commissions de libération conditionnelle sont instituées. Ce domaine du droit a ainsi été modifié, en premier lieu, sur le plan institutionnel et procédural. Mais les réformes de la libération conditionnelle introduites dans la foulée de l’affaire Dutroux  [85] se caractérisent également par un certain nombre de droits conférés aux victimes durant la phase post-sentencielle.

4.3.1. L’instauration de commissions de libération conditionnelle

58Au système antérieur, qui conférait une compétence discrétionnaire au ministre de la Justice, se substitue un nouveau système. Des commissions de libération conditionnelle sont créées. Auparavant, il appartenait au ministre de la Justice d’ordonner et de révoquer une mesure de libération conditionnelle. Concrètement, une proposition de libération conditionnelle émanait du directeur d’établissement et était ensuite prise en considération par l’administration. Un avis était alors rendu par le parquet qui avait exercé les poursuites ainsi que par le directeur et la commission administrative de l’établissement pénitentiaire concerné. Le ministre de la Justice pouvait alors, se fondant sur ces avis ou sur d’autres considérations (comme le niveau de surpopulation carcérale alors enregistré dans les prisons du pays), prendre une décision en accordant ou en refusant la mesure de libération conditionnelle sollicitée. À la suite de l’adoption des lois des 5 et 18 mars 1998, ce pouvoir de décision est dévolu à une commission administrative et encadré par un certain nombre de règles procédurales.

59Comme cela a été indiqué, l’option de la mise en place de tribunaux de l’application des peines en bonne et due forme, appartenant à l’ordre judiciaire, était privilégiée. Ainsi, les conclusions des travaux menés par la commission d’enquête parlementaire mise en place afin de faire la lumière sur l’affaire Dutroux suggéraient de créer de véritables tribunaux de l’application des peines. Une telle réforme nécessitait cependant la modification de l’article 157 de la Constitution, alors non ouvert à la révision. Une solution temporaire a donc été trouvée, consistant à créer des juridictions administratives chargées de statuer sur les demandes de libération conditionnelle. Six commissions de libération conditionnelle ont été instaurées dans le pays. En outre, le législateur a opté, à cette occasion, pour le système de l’échevinage, en associant au sein de ces commissions nouvellement créées des juges professionnels et des juges non professionnels, en l’occurrence des experts en matière pénitentiaire ou dans le domaine de la réinsertion sociale. S’il est prévu que la commission doit statuer à l’unanimité dans certains cas, le législateur n’a en revanche pas revu à la hausse les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle ni prévu de peines incompressibles, pourtant réclamées par une partie de l’opinion mais aussi par plusieurs partis politiques de l’opposition.

60Est en outre instaurée une nouvelle procédure impliquant deux organes décisionnels : la conférence du personnel et la commission de libération conditionnelle. La première est tenue, trois mois avant la date d’admissibilité du condamné à la libération conditionnelle, de vérifier que les conditions d’octroi sont bien remplies. Si la conférence du personnel  [86] estime que tel n’est pas le cas, il lui appartient de reporter l’examen du dossier à une date ultérieure, jouant ainsi un rôle particulièrement important de « filtre » (alors qu’elle était conçue au départ comme une instance consultative et non décisionnelle  [87]). Si la conférence prend une décision négative à trois reprises, et successivement, le détenu peut demander au directeur de l’établissement pénitentiaire dans lequel il se trouve de saisir la commission de libération conditionnelle. En cas d’avis positif émis par la conférence du personnel, « le directeur de l’établissement [rédige] une proposition de libération qui [est] transmise par le ministre de la Justice, dont l’administration [remet] son avis, accompagnée de l’avis du parquet, à la commission de libération conditionnelle compétente »  [88].

61Quel bilan tirer du fonctionnement des commissions de libération conditionnelle ? À la lecture des rapports qui ont été publiés à l’époque, ce bilan apparaît contrasté. D’une part, on constate une sévérité accrue à l’égard de la plupart des catégories de condamnés, qui se voient plus rarement que par le passé accorder une mesure de libération conditionnelle. D’autre part, et de façon paradoxale, cet effet ne semble pas repérable en ce qui concerne les personnes s’étant rendues coupables d’infractions à caractère sexuel : « Si la libération conditionnelle a été réformée et son accès rendu plus difficile en 1998 suite à l’affaire “Dutroux” et, donc, en référence au problème des condamnés pour faits de mœurs, c’est l’écrasante majorité des autres condamnés (97 % des dossiers) qui semble[nt] en subir les conséquences puisque les avis en matière de libération conditionnelle leur sont nettement moins favorables et qu’ils paraissent bien plus livrés à eux-mêmes pour la préparation de leur libération conditionnelle »  [89].

4.3.2. La place des victimes dans la procédure

62En 1998, la place des victimes durant la procédure d’octroi d’une mesure de libération conditionnelle est également repensée  [90]. Il s’agit bien sûr là d’une conséquence directe de la séquence politico-sociale initiée à partir des événements de l’été 1996 : « Les débats parlementaires ayant conduit à l’adoption des lois de 1998 se sont déroulés dans la temporalité immédiate de l’affaire Dutroux, si bien que la question des victimes y a occupé une place centrale »  [91].

63On observe ici un changement d’approche radical par rapport à la loi Le Jeune, qui n’accordait à la victime aucune place, circonstance qui est d’ailleurs rappelée dans les travaux préparatoires : « Il n’est fait mention des victimes ni dans la loi du 31 mai 1888, ni dans l’arrêt d’exécution du 17 janvier 1921. Ce n’était pas étonnant pour l’époque puisque, aussi bien au niveau du droit pénal classique que de la défense sociale, tout se focalisait autour de l’auteur du délit. Le désintérêt manifesté à l’égard de la victime est justement critiqué et il s’est formé au sein de la société un mouvement visant à garantir les droits des victimes »  [92].

64En adoptant la loi du 5 mars 1998 relative à la libération conditionnelle, le législateur a ainsi « consacré pour la première fois une place pour les victimes dans la procédure de l’exécution des peines, en prévoyant de les consulter et de les entendre quant aux conditions particulières pouvant être imposées dans leur intérêt, et de les informer des décisions d’octroi de la libération conditionnelle »  [93]. Le système alors mis en place est le suivant. Il repose sur une distinction entre, d’une part, les victimes d’infractions graves (dont la liste est fixée dans un arrêté royal pris en application de la loi du 5 mars 1998  [94]) et, d’autre part, les victimes d’infractions ayant donné lieu à une condamnation à une peine privative de liberté de 1 an au moins. Tandis que les premières sont automatiquement associées à la procédure de libération conditionnelle, sauf si elles s’y opposent, les secondes doivent communiquer par écrit leur volonté d’être tenues informées d’une éventuelle libération conditionnelle ou d’être entendues en vue de fournir des informations en rapport avec les éventuelles conditions qui pourraient être établies dans leur intérêt  [95]. En 2006, l’adoption de la loi relative au statut juridique externe des condamnés conduira à un renforcement des droits reconnus aux victimes durant la phase post-sentencielle (cf. infra).

5.. Les deux lois du 17 mai 2006

65L’adoption des lois des 5 et 18 mars 1998 avait été présentée comme une étape intermédiaire sur le chemin d’une judiciarisation de la compétence en matière de libération conditionnelle. En effet, le fonctionnement des commissions de libération conditionnelle n’a pas été sans susciter un certain nombre de critiques  [96]. Par ailleurs, le législateur s’est fixé pour objectif de réformer plus en profondeur le domaine de l’exécution des peines.

66La création de tribunaux de l’application des peines est l’une des innovations majeures apportées au système de libération conditionnelle en Belgique, en 2006. À la suite de cette réforme – qui intervient elle-même dans la foulée de l’adoption d’une loi de principes concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus (cf. infra) –, le pouvoir d’accorder une mesure de libération anticipée pénètre partiellement dans le giron du pouvoir judiciaire. Dans le même temps, un authentique encadrement juridique est prévu pour ce qui est nommé le « statut juridique externe » des personnes condamnées à une peine privative de liberté (le législateur faisant ainsi aboutir le projet, envisagé depuis plusieurs années, de réformer plus en profondeur le domaine de l’exécution des peines). En 2006, les droits des victimes dans les procédures d’exécution de la peine sont également renforcés.

5.1. De la mise en place de la commission Holsters au dépôt de deux projets de loi

67La création de tribunaux de l’application des peines est inscrite dans l’accord du gouvernement fédéral Verhofstadt I (VLD/PS/Fédération PRL FDF MCC/SP/Écolo/Agalev) du 14 juillet 1999. Elle est rendue possible par l’ouverture à révision de l’article 157 de la Constitution (relatif au pouvoir judiciaire) suite à l’adoption de la loi du 5 mai 1999  [97]. L’accord précise en outre que le gouvernement entend limiter la compressibilité d’un certain nombre de peines, lorsque des infractions particulièrement graves sont impliquées, et recourir davantage à des peines alternatives à la privation de liberté. Les critiques formulées par l’opposition libérale durant la législature précédente et lors de l’adoption des lois des 5 et 18 mars 1998 (cf. supra) sont donc prises en compte par le nouveau gouvernement dirigé par Guy Verhofstadt (VLD).

68Dans cette logique, le ministre de la Justice, Marc Verwilghen (VLD), installe le 28 février 2000 une commission « Tribunaux de l’application des peines, position juridique externe et fixation de la peine ». Dite commission Holsters, du nom de son président, cette commission – qui sera officialisée par un arrêté royal du 27 juin 2000  [98] – a pour mission de rendre, le 30 juin 2002, un rapport portant sur le statut juridique interne et externe des condamnés ainsi que sur la création de tribunaux de l’application des peines  [99]. Elle vise ainsi à préparer la réforme prévue dans l’accord de gouvernement. Par ailleurs, elle reprend partiellement à son compte la mission de la commission Dupont qui, mise sur pied en 1997, avait déjà élaboré une note préparatoire sur le statut juridique interne des condamnés  [100].

69Initialement, la commission Dupont – du nom de son président, Lieven Dupont, professeur de droit pénal, de pénologie et de droit pénitentiaire à la Katholieke Universiteit Leuven (KUL) – avait pour objectif d’élaborer la loi de principes concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des condamnés  [101]. Le rôle qui avait été confié à L. Dupont se caractérisait ainsi, à l’origine, par sa vocation transversale. En juin 1996, peu avant l’éclatement de l’affaire Dutroux, ce juriste avait été chargé par le ministre de la Justice, S. De Clerck, d’élaborer un projet de loi pénitentiaire globale, devant régir le statut juridique des détenus considéré dans tous ses aspects  [102]. Ce n’est qu’en raison d’éléments conjoncturels qu’une scission avait finalement dû être opérée entre les dimensions « interne » et « externe » de ce statut juridique  [103]. Ces éléments conjoncturels renvoient notamment à des décisions prises par le ministre de la Justice, M. Verwilghen, entré en fonction durant l’été 1999. Ce dernier avait en particulier donné un délai, expirant en février 2000, à la commission Dupont afin qu’elle finalise ses travaux. À l’expiration de ce délai, seule la partie de la réforme relative au « statut juridique interne » des condamnés avait pu être finalisée. Par voie de conséquence, la commission Dupont avait été brièvement prolongée et chargée de rédiger une note d’orientation sur l’autre volet, relatif au « statut juridique externe »  [104].

70Les travaux de la commission Dupont serviront de base à une proposition de loi déposée à la Chambre des représentants le 17 juillet 2001  [105]. Le 12 janvier 2005, sera finalement promulguée la loi de principes concernant l’administration des établissements pénitentiaires ainsi que le statut juridique des détenus  [106], plus communément appelée « loi de principes », « loi Dupont » ou encore « loi pénitentiaire »  [107]. Il s’agira là d’une avancée majeure : précédemment, ce domaine du droit bénéficiait d’un degré peu élevé de sécurité juridique, car il n’était réglé que par des circulaires administratives.

71Insistons sur le fait que les dimensions interne et externe du statut juridique des détenus ne sont dissociées que de façon artificielle. Dans l’esprit des concepteurs de ces différentes réformes, il s’agit en réalité des deux faces d’une même médaille, la future loi de principes du 12 janvier 2005 (relative au statut interne) devant en particulier servir de cadre interprétatif pour aborder les problèmes d’exécution posés par les futures lois du 17 mai 2006 (l’une relative au statut externe et l’autre portant création du tribunal de l’application des peines). Les travaux de la commission Holsters s’inscrivent ainsi dans la continuité de ceux de la commission Dupont : cette commission déclarera d’ailleurs que « son travail s’était basé sur le projet de note de la commission Dupont quant au statut juridique externe des [détenus] et que les grands principes dégagés par la commission Dupont relatifs au statut juridique interne des [détenus] avaient une portée générale et s’appliquaient également au statut juridique externe »  [108].

72La commission Holsters est composée de 24 membres, qui sont tous des experts et/ou des acteurs de terrain et dont plusieurs sont issus de la commission Dupont, à savoir : Denis Holsters, président honoraire à la Cour de cassation, Kristel Beyens, professeur à la Vrije Universiteit Brussel (VUB), Pieter Bollen, conseiller au cabinet du ministre de la Justice, Jean-Noël Coumanne, président de la commission de libération conditionnelle de Liège, Monique Delos, avocat général près la cour d’appel de Mons, Koen D’Haenens, collaborateur du cabinet du ministre de la Justice, Marc De Swaef, avocat général près la Cour de cassation, Wim Depreeuw, assesseur en matière d’exécution des peines à la commission de libération conditionnelle néerlandophone de Bruxelles, Luc Huybrechts, conseiller à la Cour de cassation, Ann Jacobs, professeur à l’Université de Liège (ULg), Juliette Laveyt, juge au tribunal de première instance de Bruxelles, Marc Neve, avocat au barreau de Liège, Robert Perriëns, président de la commission de libération conditionnelle d’Anvers, Tony Peters, professeur à la KUL, Freddy Pieters, président de la commission de libération conditionnelle néerlandophone de Bruxelles, Pierre Reynaert, directeur régional du service des maisons de justice pour le ressort de la cour d’appel de Mons, Greet Smaers, professeur à l’Universiteit van Maastricht, Sonja Snacken, professeure à la VUB, Erella Toledo, premier substitut du procureur du Roi de Bruxelles, Wauter Van Laethem, collaborateur du cabinet du ministre de la Justice, Sabine van der Elst, membre du ministère public à la commission de libération conditionnelle francophone de Bruxelles, Marie-Françoise Berrendorf, conseillère adjointe à la Direction générale des Établissements pénitentiaires, Vicky De Souter, conseillère adjointe à la Direction générale de la Législation pénale, et Yves Van Den Berge, conseiller adjoint à la Direction générale des Établissements pénitentiaires.

73Le 22 mars 2001, le gouvernement Verhofstadt I dépose au Parlement une proposition de révision de l’article 157 de la Constitution, relatif au pouvoir judiciaire. Moins de deux ans plus tard, la loi du 17 décembre 2002 modifie l’article 157 de la Constitution en prévoyant l’existence de tribunaux de l’application des peines, afin de remplacer les commissions de libération conditionnelle mises sur pied en 1998 à titre d’étape intermédiaire. L’article 157 est dorénavant rédigé comme suit : « Il y a des tribunaux de l’application des peines dans les lieux déterminés par la loi. Elle règle leur organisation, leurs attributions, le mode de nomination de leurs membres et la durée des fonctions de ces derniers »  [109]. Une nouvelle étape est ainsi franchie dans le sens de la création de tribunaux de l’application des peines.

74Malgré la mise sur pied de la commission Holsters, ces tribunaux ne voient pas encore le jour. En conséquence, l’accord du gouvernement fédéral Verhofstadt II (VLD/PS/MR/ SP.A–Spirit) du 8 juillet 2003 prévoit à nouveau de réformer les conditions de la libération conditionnelle et de mettre sur pied des tribunaux de l’application des peines  [110] :

75

« Le nouveau système de mise en liberté conditionnelle sera adapté en fonction de la peine prononcée : peines de prison de moins de cinq ans, peines de prison de cinq ans et plus, peines prononcées en cas de récidive et peines prononcées en cas de récidive pour crimes de sang. Dans ces deux derniers cas la peine à purger ne peut être ramenée en dessous de respectivement 2/3 et 3/4 de la peine prononcée par le juge. En toute circonstance, le ministère public peut s’opposer à la libération. Opposition ou non, le dossier sera toujours soumis à la commission des mises en liberté conditionnelle ou au tribunal de l’application des peines qui prend une décision.
Les tribunaux de l’application des peines seront mis sur pied et intégreront les commissions existantes de mise en liberté conditionnelle dont elles reprendront le même principe de multidisciplinarité au niveau de leur composition. La loi d’application des peines s’inspirera des résultats de la commission Holsters et du projet de loi relatif à la politique pénitentiaire ».

76Le 9 mai 2003, la commission Holsters remet son rapport au ministre de la Justice  [111]. Parmi ses recommandations, elle suggère la création d’un tribunal de l’application des peines par province et en Région bruxelloise. Ce tribunal serait composé de chambres multidisciplinaires (un magistrat professionnel et des assesseurs en réinsertion sociale et en exécution des peines) et siégerait à huis clos dans un tribunal de première instance ou dans un établissement pénitentiaire. Selon le rapport de la commission, ce tribunal serait compétent pour les peines privatives de liberté et ses décisions seraient susceptibles d’appel. Le rapport contient en outre un ensemble de recommandations en matière d’exécution des peines, développe l’arsenal des peines envisageables et prévoit l’information, mais également l’audition des victimes – si elles en expriment le souhait – en cas de demande de libération conditionnelle du condamné.

77Les conclusions de la commission Holsters sont au moins partiellement mises à l’épreuve de critiques  [112]. Ainsi, alors qu’elle propose de confier le suivi des décisions du tribunal au ministère public en lui octroyant la compétence de saisir, ou non, le tribunal de l’application des peines pour réévaluer la situation des condamnés, le manque de clarté quant au rôle et à la mission des différents acteurs, dont les assistants de justice, est pointé du doigt. En conséquence, le projet de loi qui sera ultérieurement déposé au Sénat par le gouvernement fédéral intègre cette critique en distinguant les missions de suivi et de contrôle : la première est assumée par le tribunal de l’application des peines, auquel les assistants de justice font rapport, et la deuxième est assumée par le ministère public, qui est doté de la capacité de saisir le tribunal de l’application des peines s’il considère que la mesure devrait être réévaluée.

78Le 30 mars 2004, le Conseil des ministres approuve la « Note-cadre de sécurité intégrale », qui organise notamment la création de tribunaux de l’application des peines qui se prononceront en première instance sur l’exécution de peines privatives de liberté et qui prendront en considération l’intérêt des victimes  [113]. Les recommandations formulées par la commission Holsters sont donc, à ce stade, suivies par la majorité gouvernementale. Le 10 décembre 2004, le gouvernement Verhofstadt II adopte les avant-projets de loi visant à mettre en œuvre concrètement ces propositions, avant d’inviter le Conseil supérieur de la justice (CSJ) à émettre un avis sur chacun de ceux-ci, le 21 décembre  [114].

5.2. Le processus législatif

79Le 20 avril 2005, un projet de loi instaurant des tribunaux de l’application des peines et un projet de loi relatif au statut juridique externe des détenus sont déposés par le gouvernement au Sénat  [115].

80Bien que les deux textes soient intimement liés, le Sénat se saisit d’abord du projet de loi instaurant des tribunaux de l’application des peines. Dans la foulée des débats en commission de la Justice, il se réunit en séance plénière le 15 juillet 2005 afin de se prononcer sur ce texte. À ce moment, une logique majorité-opposition prévaut. Ainsi, tous les partis – sans exception – reconnaissent l’importance d’instaurer des tribunaux de l’application des peines comme étape supplémentaire, dans la droite ligne des recommandations formulées par la commission d’enquête établie dans le cadre de l’affaire Dutroux. Les partis de la majorité saluent la clarté que le texte offre en matière de répartition des compétences entre le pouvoir judiciaire et le ministre de la Justice, le caractère multidisciplinaire de la juridiction, et la juste répartition des compétences entre le tribunal de l’application des peines et le ministère public pour ce qui concerne le suivi de l’exécution des peines. En revanche, les partis de l’opposition mettent en doute un certain nombre d’aspects du projet de loi. Ainsi, le CDH et le CD&V remettent en question le fonctionnement concret des tribunaux de l’application des peines au regard des importants moyens budgétaires qu’ils nécessitent. Par ailleurs, ils s’interrogent quant à la pertinence de distinguer les peines privatives de liberté de moins de trois ans de celles de plus de trois ans. En effet, alors qu’il est prévu qu’un juge unique statue dans le premier cas et que celui-ci soit entouré de deux assesseurs en application des peines dans le second cas, les partis de tradition sociale chrétienne indiquent que la durée de la peine peut être interprétée dans un contexte différent d’une région à l’autre. Enfin, tant le CDH que le CD&V regrettent le manque de clarté quant au statut des assesseurs. À l’extrême droite, le VB craint essentiellement le problème de la surpopulation carcérale et, en conséquence, le risque d’un accroissement du nombre de libérations conditionnelles octroyées.

81Dans la foulée des débats, sur les 65 sénateurs présents, 45 votent en faveur du texte et 20 s’abstiennent. Aucun sénateur ne s’oppose au projet de loi. Parmi les abstentionnistes, se retrouvent le CD&V, le CDH, le VB et Hugo Coveliers (indépendant, ex-VU). Le sénateur du FN, Michel Delacroix, se prononce en faveur du texte. L’extrême droite est ainsi la seule famille politique à ne pas voter de façon homogène sur ce texte. Le texte voté est transmis à la Chambre des représentants.

82Le deuxième projet de loi, relatif au statut juridique externe des condamnés, est quant à lui débattu dans les mois suivants au sein de la commission Justice du Sénat, puis en séance plénière le 15 décembre 2005. En séance plénière, un certain nombre de questions sont soulevées, mais la majorité des partis qui trouvent à s’exprimer (MR, VLD, PS, SP.A, CDH et CD&V) sont favorables au projet de loi. Tous ces partis rappellent l’importance du principe de légalité que le projet de loi tend à rendre désormais effectif dans le domaine de l’exécution des peines. En effet, les modalités d’exécution de la peine privative devront désormais être fixées dans la loi elle-même, alors qu’elles étaient jusqu’alors régies par des circulaires ministérielles  [116], à l’exception de la libération conditionnelle. De même, la majorité des partis louent les efforts déployés par le gouvernement afin de limiter les effets préjudiciables de la détention, ou encore afin de favoriser la prise en compte du point de vue des victimes dans le processus d’exécution de la peine. Ces mêmes partis rappellent en outre leur satisfaction à l’égard de la prise en compte, par la ministre de la Justice, Laurette Onkelinx (PS), de deux critiques majeures formulées lors des débats en commission de la Justice. La première portait sur la disposition selon laquelle le ministre de la Justice peut libérer certains détenus en cas de surpopulation carcérale. La deuxième portait sur le fait que seules les victimes qui se sont constituées parties civiles sont prises en compte dans le processus. Sur cette base, le projet de loi a été adapté par la ministre : le nouveau texte supprime la disposition relative à la surpopulation carcérale et il est convenu que les victimes qui ne se constituent pas parties civiles peuvent aussi être prises en compte dans le processus.

83Seul le VB émet de vives critiques à l’égard du texte dans son ensemble. Selon lui, la prise en compte des victimes est essentielle, mais le gouvernement ne dispose pas des moyens permettant de véritablement mettre en œuvre cette disposition. Le VB avance également que, en permettant au tribunal de l’application des peines de modifier les peines, il est porté atteinte à l’autorité de la chose jugée et à l’autorité du juge de fond. Enfin, et plus fondamentalement, l’objectif assumé depuis de nombreuses années par le VB est de supprimer purement et simplement le système de libération conditionnelle. Dès lors, le VB annonce qu’il s’opposera au texte.

84Le 15 décembre 2005, le texte est adopté par 47 voix contre 10 en séance plénière. Seuls le VB et le FN votent contre le texte ; aucun parti ne s’abstient. Le texte est alors transmis à la Chambre des représentants.

85Après de nombreuses réunions de la commission de la Justice de la Chambre des représentants, les députés fédéraux débattent des deux projets de loi en séance plénière les 29 et 30 mars 2006. À cette occasion, le rapporteur, Walter Muls (SP.A–Spirit), rappelle qu’un troisième projet de loi modifiant la loi du 5 mars 1998 relative à la libération conditionnelle a été retiré à la suite des débats au sein de la commission. Ce texte prévoyait spécifiquement que les personnes condamnées pour assassinat avec récidive ne puissent prétendre à une libération conditionnelle avant d’avoir purgé les trois quarts de leur peine  [117].

86Durant les échanges portant sur les deux autres projets de loi, une logique majorité-opposition – qui s’était déjà dessinée au Sénat – prévaut. Ainsi, les formations socialistes et libérales saluent le travail réalisé, en rappelant l’importance de l’instauration des tribunaux de l’application des peines. Par ailleurs, elles rappellent que le projet portant sur le statut juridique externe des condamnés permet d’assurer une plus grande sécurité juridique, en substituant à un ensemble de circulaires ministérielles un cadre légal afin de fixer les modalités de l’exécution des peines. Elles soulignent en outre la clarté que ce même projet de loi offre sur le plan de la répartition des compétences entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif. Elles rappellent aussi l’importance que le texte accorde aux victimes dans le processus. Enfin, elles font remarquer que le travail réalisé au sein de la commission de la Justice a permis de faire évoluer le texte initialement voté au Sénat. Par exemple, le titre du projet de loi relatif au statut juridique externe des condamnés est modifié afin d’y faire apparaître les victimes, et la notion de victime est elle-même élargie, afin d’accroître leur rôle dans le processus.

87Néanmoins, les partis de l’opposition demeurent critiques à l’égard de certains aspects de la réforme. Le CDH et le CD&V pointent tout d’abord une difficulté dans l’organisation des tribunaux de l’application des peines. Selon eux, il serait davantage pertinent d’instituer les tribunaux de l’application des peines par province plutôt que par ressort de cour d’appel, afin d’en augmenter le nombre et de garantir l’effectivité de leur mission. Ensuite, les deux partis dénoncent la distinction opérée entre les condamnés dont la partie de la ou des peines à exécuter est inférieure ou égale à trois ans d’emprisonnement ou supérieure à trois ans (cf. supra), craignent une surcharge de travail pour les maisons de justice et s’inquiètent quant à la mise en œuvre pratique des textes au regard des importants moyens – notamment financiers – qu’ils nécessitent. Quant à lui, le VB dénonce le laxisme toujours plus grand que ces textes provoqueraient selon lui.

88Le 30 mars 2006, le projet de loi instaurant des tribunaux de l’application des peines est adopté par 105 voix. Aucun député fédéral ne vote contre le texte, mais 21 s’abstiennent. Parmi ces derniers, se trouvent les élus du VB, du FN, de la N-VA mais aussi quelques députés du CD&V. Le CD&V apparaît désuni sur ce texte puisqu’un ensemble d’autres députés votent en faveur du projet de loi. Le même jour, le projet de loi relatif au statut juridique externe des condamnés est adopté par 92 voix ; 14 députés s’y opposent et 18 s’abstiennent. Seuls les formations d’extrême droite VB et FN s’opposent au texte. Le CD&V et la N-VA s’abstiennent, ainsi que Jacqueline Galant (MR). Chacun de ces textes est alors renvoyé au Sénat qui, le 4 mai 2006, les adopte définitivement. Le 17 mai 2006 , les deux lois sont sanctionnées par le Roi  [118].

89Bien qu’elles soient adoptées dix ans après l’affaire Dutroux, ces deux lois s’inscrivent dans la stricte continuité de celle-ci, après une succession d’étapes intermédiaires qui ont notamment conduit à la mise en place des commissions de libération conditionnelle et, ensuite, à la révision de la Constitution pour permettre la création de tribunaux de l’application des peines. La sénatrice Nathalie T’Serclaes (MCC), qui a été membre de la commission Dutroux (elle était alors membre, et jusqu’en 1998, du PSC), le rappelle d’ailleurs lors des échanges en séance plénière, au Sénat, le 15 décembre 2005 : « Ce texte fait (…) suite aux recommandations de la commission Dutroux, à la suite desquelles, dans un premier temps, on avait mis sur pied les commissions de libération conditionnelle. La présente proposition est une étape supplémentaire qui va dans le sens des souhaits émis à l’époque »  [119].

90Aucun nouveau fait d’actualité notoire n’explique l’adoption de cette loi à ce moment. La longueur du processus tient davantage à la manière avec laquelle le texte a été adopté, notamment sur la base de recommandations formulées par la commission Holsters.

91Il est également à noter que si la réforme se base largement sur la première partie du rapport de la commission Holsters, elle ne prend pas en compte la deuxième partie de ce rapport. Les réformes principales, inspirées de ce rapport, concernent la création de tribunaux de l’application des peines et le statut juridique externe des condamnés à une peine privative de liberté. La deuxième partie du rapport, qui porte davantage sur la fixation de la peine et, notamment, sur l’extension de l’éventail des peines, a été largement négligée par les décideurs politiques.

5.3. Le positionnement de la société civile

92Alors que les auditions au Sénat et à la Chambre des représentants en vue de l’adoption des lois du 17 mai 2006 incluent un nombre limité d’acteurs de la société civile, cette dernière accueille relativement bien le projet de réforme. En effet, nombreux sont les acteurs issus du monde judiciaire, carcéral ou associatif à revendiquer qu’il soit mis fin à l’arbitraire du pouvoir exécutif dans l’exécution des peines et à réclamer l’instauration d’une juridiction compétente en matière de libération conditionnelle. Il en est par exemple ainsi de la Ligue des droits de l’Homme (LDH)  [120].

93Le 21 décembre 2004, le Conseil supérieur de la Justice (CSJ) est invité à rendre un avis à la ministre de la Justice, L. Onkelinx. Dans son avis rendu le 23 février 2005, il déclare notamment : « L’instauration d’une meilleure protection juridique pour les détenus offre non seulement des avantages pour les détenus eux-mêmes, mais également pour les victimes de la société. Elle crée en effet une plus grande transparence dans les objectifs, les procédures et l’exécution des peines dans notre pays »  [121].

94La section belge de l’Observatoire international des prisons (OIP) se montre aussi favorable à l’instauration de tribunaux de l’application des peines. Mais avant même que les projets de loi ne soient déposés par le gouvernement, l’OIP fait part d’au moins deux inquiétudes  [122]. D’une part, il craint que ce nouveau système soit plus sévère envers les condamnés. D’autre part, alors qu’il est envisagé que six tribunaux de l’application des peines soient créés dans l’ensemble du pays, il se demande si ce nombre sera suffisant. En conséquence, l’OIP opère un suivi des lois du 17 mai 2006 et, dans une notice publiée en 2008, en pointe les limites et les faiblesses : « Si l’on peut se réjouir du fait que le judiciaire est aujourd’hui partiellement compétent en matière d’exécution des peines, force est de constater que cette réforme n’a pas fondamentalement bouleversé les mentalités »  [123]. À travers cette notice, l’OIP dénonce notamment l’absence de personnel suffisant, spécifiquement au sein des services psycho-sociaux des prisons, ainsi que le manque de moyens octroyés à la création des tribunaux de l’application des peines.

5.4. Les principales modifications apportées par les lois du 17 mai 2006 sur le plan juridique

95Sont successivement examinées dans cette section les grandes modifications apportées par le législateur en 2006 : l’instauration d’un tribunal de l’application des peines, la création d’un cadre légal pour le statut juridique externe des détenus et la révision du droit accordé aux victimes.

5.4.1. L’instauration des tribunaux de l’application des peines (TAP)

96À l’occasion de l’adoption de la loi du 17 mai 2006, le choix a été posé par le législateur de créer un tribunal de l’application des peines (TAP) par ressort de la cour d’appel, en prévoyant par ailleurs une chambre francophone et une chambre néerlandophone pour le ressort de Bruxelles  [124]. La composition du TAP est marquée par sa diversité : comme dans le cadre des commissions de libération conditionnelle, le système de l’échevinage a en effet été retenu, ce qui implique une collaboration entre magistrats professionnels et non professionnels. Le TAP est ainsi composé d’un président, juge professionnel qui doit justifier d’une expérience de cinq ans au moins et avoir suivi une formation spécialisée. Deux assesseurs en application des peines, l’un spécialisé en matière pénitentiaire, l’autre en réinsertion sociale, complètent la composition du tribunal  [125].

97Mais le TAP n’est pas l’unique nouvelle juridiction créée par la loi du 17 mai 2006. La fonction de juge de l’application des peines (JAP) est également créée (même si certaines de ses compétences ne sont pas mises en œuvre concernant l’aménagement des peines privatives de liberté égales ou inférieures à trois ans : cf. infra). En outre, dans le domaine de l’exécution des peines, l’administration pénitentiaire conserve des compétences dans certains cas. Comment s’organise la répartition des compétences entre ces différents organes ?

98Il convient de rappeler, tout d’abord, que la libération conditionnelle n’est que l’une des modalités qui sont rattachées au statut externe des condamnés. La libération conditionnelle est ce que l’on appelle une modalité d’exécution de la peine privative de liberté  [126]. Si la libération conditionnelle est bien connue, notamment en raison du traitement médiatique qui lui est réservé, il s’agit d’une institution parmi d’autres. « Le régime belge de l’exécution des peines connaît un grand nombre de modalités, aux régimes d’application divers : permissions de sortie, congés pénitentiaires, semi-liberté, détention limitée, surveillance électronique, libération conditionnelle, libération provisoire, libération en vue de l’éloignement ou de la remise, libération provisoire pour raisons médicales, etc. Ces différents aménagements permettent à la personne condamnée de purger sa peine [privative de liberté] en dehors de la prison, dans la communauté, souvent après un certain temps et avec l’obligation de respecter certaines conditions »  [127]. Ces différentes modalités ne sont pas toutes encadrées par la loi, certaines – comme la libération provisoire ou le régime de semi-liberté – faisant par exemple l’objet de circulaires ministérielles.

99Parmi les autres modalités d’exécution d’une peine privative de liberté, après la loi du 17 mai 2006, certaines relèvent, non du TAP, mais toujours du ministre de la Justice : c’est notamment le cas de la permission de sortie  [128], du congé pénitentiaire  [129], de l’interruption de l’exécution de la peine  [130] et de la mise en liberté provisoire en vue de l’éloignement du territoire  [131]. D’autres modalités attachées à la peine relèvent quant à elles de la compétence commune du TAP et du JAP : sont visées la détention limitée  [132], la surveillance électronique  [133], la libération conditionnelle  [134] et la mise en liberté provisoire en vue d’éloignement du territoire ou de la remise  [135]. Enfin, certaines modalités d’exécution de la peine ressortissent à la compétence exclusive du juge de l’application des peines : sont concernés, notamment, la libération provisoire pour raisons médicales  [136], la réduction du total des peines prononcées en cas de concours d’infractions  [137] et le remplacement d’une peine d’emprisonnement ferme d’un an maximum par une peine de travail en cas de survenance d’éléments nouveaux  [138]. En effet, le législateur a fait le choix de confier au pouvoir judiciaire les décisions qui modifient la situation du condamné au point de changer la nature de la peine, tout en maintenant la compétence du pouvoir exécutif pour les mesures qui n’affectent pas celle-ci  [139].

100Pour répartir les compétences entre le TAP et le JAP, le législateur a opté pour un critère temporel. La durée de la peine prononcée doit être prise en considération : le TAP est compétent pour les peines privatives de liberté dont la partie exécutoire est supérieure à 3 ans, tandis que le JAP est compétent pour celles dont la partie exécutoire est égale ou inférieure à 3 ans  [140]. Il est important de noter que seule la partie à exécuter de la peine doit être prise en considération, qui diffère souvent de la peine effectivement prononcée par le juge pénal. Comme le rappelle Olivia Nederlandt, il appartient à « l’administration pénitentiaire [de réaliser] les calculs pour déterminer si [un condamné se situe] au-dessus ou en dessous de ce couperet de trois ans. Ces calculs sont souvent complexes du fait que la plupart des condamnés exécutent non pas une, mais plusieurs peines, dont certaines sont prononcées en état de récidive ou assorties d’un sursis. Par exemple, si une partie de la peine est assortie d’un sursis, la partie couverte par le sursis n’entre pas en ligne de compte pour le calcul »  [141].

101Si le TAP et le JAP ont été mis en place assez rapidement  [142], certaines compétences confiées par le législateur au JAP n’ont en revanche pas été mises en œuvre. En vertu de la loi du 17 mai 2006, le JAP est notamment compétent pour aménager la peine (ou les peines) encourue(s) par des personnes condamnées à une ou plusieurs peines privatives de liberté dont la partie à exécuter est inférieure ou égale à trois ans. À cet égard, l’entrée en vigueur des dispositions pertinentes de la loi du 17 mai 2006 a été différée à plusieurs reprises. Cette entrée en vigueur aurait dû intervenir au plus tard le 1er octobre 2020, et ce par l’effet d’une loi du 5 mai 2019  [143]. Cependant, l’une des conséquences de la crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19 survenue en 2020 a été de retarder encore une telle entrée en vigueur  [144]. En effet, la loi du 31 juillet 2020 portant dispositions urgentes diverses en matière de justice  [145] prévoit, en son article 101, que le délai ultime d’entrée en vigueur de la loi est le 1er avril 2021. Jusqu’à cette date au moins, c’est donc le ministre de la Justice, et plus précisément encore la Direction Gestion de la détention (DGD) du SPF Justice et les directeurs des établissements pénitentiaires, qui restent compétents pour aménager les peines de moins de 3 ans. Actuellement, le ministre de la Justice applique une instruction ministérielle du 16 mai 2017  [146].

5.4.2. Le statut externe des condamnés

102En 2006, le législateur ne se contente pas d’adopter la loi instaurant les TAP et le JAP. L’une des deux lois adoptées le 17 mai 2006, à savoir celle relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, va bien au-delà de ce premier objectif.

103Comme son intitulé l’indique, cette loi comporte deux volets. Nous nous concentrons en premier lieu sur cette notion de statut externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté. Au niveau du statut juridique de l’ensemble des détenus et condamnés, une distinction est en effet établie entre le statut juridique interne et le statut juridique externe.

104Le statut interne « correspond à l’ensemble des règles qui régissent la vie du détenu en tant qu’occupant de la prison »  [147]. Est ici impliquée une série de principes qui concernent « une multitude de domaines tels la planification de la détention, la discipline, les régimes différenciés, les visites, etc. »  [148]. Quant à lui, le statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté règle « les aspects extérieurs de la détention » et « fixe la manière dont [la personne condamnée] recouvre ou conserve, totalement ou partiellement, temporairement ou définitivement sa liberté d’aller et de venir »  [149]. À l’instar du statut juridique interne, le statut externe est resté pendant longtemps soumis au pouvoir exécutif, ce domaine du droit n’étant que peu encadré par la loi (à cet égard, la matière de la libération conditionnelle constitue une relative exception, une loi régissant la matière, comme on le sait, depuis 1888 ; cf. supra).

105Longtemps, le domaine de l’exécution des peines privatives de liberté s’est donc avéré problématique du point de vue de la sécurité juridique, d’une part, et au regard du principe de séparation des pouvoirs, d’autre part. Après celle du 12 janvier 2005 relative au statut interne des détenus, la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités de la peine vise ainsi à combler un « déficit législatif ayant jusqu’ici caractérisé la matière »  [150].

106La question de la définition de la libération conditionnelle est également réglée par le législateur en 2006. L’article 24 de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe dispose en effet : « La libération conditionnelle est un mode d’exécution de la peine privative de liberté par lequel le condamné subit sa peine en dehors de la prison, moyennant le respect des conditions qui lui sont imposées pendant un délai d’épreuve déterminé ». Aucune définition de cette modalité d’exécution de la peine n’avait été explicitement énoncée dans la loi à l’occasion de la réforme de 1998.

107Les critères sur lesquels doit se fonder le TAP pour accorder une libération conditionnelle sont énoncés à l’article 47 de la loi du 17 mai 2006. Il s’agit d’une liste de contre-indications qui s’entendent alors de « l’absence de perspectives de réinsertion sociale du condamné », du « risque de perpétration de nouvelles infractions graves », du « risque que le condamné importune les victimes » et de « l’attitude du condamné à l’égard des victimes des infractions qui ont donné lieu à sa condamnation »  [151].

108Pour en saisir la portée, il convient de tenir compte de l’interprétation de ces critères qui a progressivement été dégagée dans la jurisprudence des TAP  [152]. Par exemple, lorsque la loi énonce qu’une mesure de libération conditionnelle ne peut être accordée en cas d’« absence de perspectives de réinsertion sociale du condamné », la jurisprudence estime que le condamné doit avoir, plus que des perspectives, un plan solide qui se décline en trois volets : hébergement, occupation et suivi (sur les plans social, psychologique, financier, etc.). L’ensemble des contre-indications énoncées par le législateur sont à mettre en lien avec l’importance donnée au risque de récidive : plus celui-ci est important, plus les exigences posées dans le plan de réinsertion sont importantes elles aussi. Concernant l’attitude du condamné à l’égard des victimes, les TAP tiennent compte de l’empathie que démontre le condamné, des regrets qu’il exprime, de l’acceptation des conditions fixées par les victimes, du remboursement des sommes auxquelles il a été condamné (en fonction des revenus du condamné), etc. Sur ce plan, la législation obéit à une logique de gestion des risques et l’action du TAP s’inscrit elle-même dans une telle logique. En outre, le TAP s’insère dans une autre philosophie contemporaine, qui est à l’œuvre dans d’autres domaines du droit (comme celui de l’assurance chômage  [153]), à savoir celle de responsabilisation : le TAP est attentif à la façon dont les condamnés sont capables d’élaborer des projets d’avenir, il demande à ceux-ci de faire preuve de « proactivité » dans le cadre de l’élaboration de leur plan de réinsertion. Ainsi, les condamnés « passifs » ont peu de chances de se voir octroyer une mesure d’aménagement de peine et, inversement, les condamnés « actifs » sont favorisés (ces derniers étant souvent ceux qui disposent de moyens et de soutiens à l’extérieur du monde carcéral plus importants)  [154].

109Concernant les conditions elles-mêmes auxquelles une libération anticipée est soumise, une distinction peut enfin être posée entre les conditions générales et les conditions particulières. Les premières sont prévues à l’article 55, alinéas 1 à 3, de la loi du 17 mai 2006 :

110

« Le jugement d’octroi de la modalité d’exécution de la peine précise que le condamné est soumis aux conditions générales suivantes :
  1° ne pas commettre d’infractions ;
  2° sauf pour la détention limitée et pour la mise en liberté provisoire en vue de l’éloignement du territoire, avoir une adresse fixe et, en cas de changement, communiquer sans délai l’adresse de sa nouvelle résidence au ministère public et, le cas échéant, à l’assistant de justice chargé de la guidance ;
  3° donner suite aux convocations du ministère public et, le cas échéant, de l’assistant de justice chargé de la guidance. (…) ».

111À ces conditions, le TAP peut adjoindre, en vertu de l’article 56, § 1er, des conditions particulières qui sont quant à elles individualisées, et « qui permettent la réalisation du plan de réinsertion sociale, (…) de répondre aux contre-indications (…), ou qui s’avèrent nécessaires dans l’intérêt des victimes ». Par exemple, le TAP peut imposer au condamné de collaborer avec l’assistant de justice, d’indemniser les victimes, de suivre une thérapie, de ne pas consommer des stupéfiants, de ne pas fréquenter certains endroits ou certaines personnes, etc. Après sa sortie de prison, et durant la durée de son délai d’épreuve, le condamné libéré de façon conditionnelle est dit en probation ou en guidance, et il fait l’objet d’un accompagnement par un assistant de justice, membre d’une Maison de justice.

112L’un des aspects importants de la réforme de 2006 est que la libération conditionnelle, de faveur accordée par les organes compétents, devient un droit subjectif dans le chef de la personne condamnée à une peine privative de liberté, même si une telle question demeure encore à ce jour controversée  [155]. Suivant cette thèse, le TAP serait tenu d’octroyer la mesure de libération anticipée dès qu’il constate que l’ensemble des conditions prévues par la loi sont remplies et que le condamné marque son accord à l’égard de ces dernières  [156]. Ce changement de perspective doit toutefois être relativisé. En effet, il appartient au TAP d’appliquer un certain nombre de critères, dont certains s’avèrent difficiles à manier. Il en va ainsi, en particulier, de l’évaluation du risque de récidive dans le chef du condamné et d’un certain nombre de critères énoncés dans la loi : « Le caractère flexible des notions légales utilisées pour définir les contre-indications (exemples : l’absence de perspectives de réinsertion sociale, le risque de perpétration de nouvelles infractions graves, l’attitude du condamné à l’égard des victimes…) fait que le TAP “se présente moins comme le juge des droits individuels du condamné que comme le juge des risques présentés par une situation” »  [157].

5.4.3. Les droits des victimes

113Lorsque l’on considère la loi relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, il convient également de considérer l’objectif poursuivi par le législateur de donner davantage de droits aux victimes durant la phase d’exécution de la peine, qui transparaît dans l’intitulé même de ladite loi. Une telle réforme s’inscrit dans le sillage des revendications formulées par la société civile durant l’affaire Dutroux, qui avaient déjà été concrétisées à la fin des années 1990, notamment suite à l’adoption de la loi du 5 mars 1998 relative à la libération conditionnelle (cf. supra).

114Parmi les modifications qui interviennent en 2006 à ce sujet, deux mesures peuvent être épinglées en particulier. En premier lieu, le statut de victime est reconnu non seulement à la personne qui s’est constituée partie civile, mais également à d’autres catégories de personnes (afin que la notion de victime au sens juridique et technique se rapproche de ce que l’on entend plus généralement lorsque ce mot est employé dans le langage courant, dans un sens plus « psychologique »). En second lieu, le système d’association automatique de certaines catégories de victimes à la procédure, mis en place en 1998, est abrogé : « Toutes les victimes doivent faire une démarche active – introduire une demande – pour pouvoir bénéficier du droit d’être informées et/ou entendues dans le cadre de l’exécution des peines : il n’y a plus de prise de contact automatique avec certaines victimes comme sous le régime de la loi de 1998. Le législateur de 2006 voulait en effet responsabiliser les victimes, et les inviter à jouer un rôle actif dans la procédure »  [158].

115Un nouveau revirement sera toutefois opéré en 2019. En effet, le législateur décidera alors de revenir, à terme et pour certaines catégories de victimes, à un système d’implication automatique dans la procédure : « La loi du 5 mai 2019 réintroduit une prise de contact automatique avec les victimes de certaines infractions (infractions portant atteinte à l’intégrité physique ou psychique ou menaçant celles-ci, qui seront définies par arrêté royal). Les parlementaires ont déclaré répondre à une demande des [acteurs] de terrain (ministère public et maisons de justice), qui, pour expliquer la très faible participation des victimes à la procédure relative à l’exécution des peines, avancent notamment l’explication des difficultés des démarches qu’il faut entreprendre pour pouvoir être [informé ou entendu], et la complexité de la matière »  [159].

116Il est à noter, enfin, que l’objectif général visant à faire une place aux victimes dans le cadre de la procédure d’examen d’une mesure de libération conditionnelle, mis en œuvre pour la première fois en 1998 et redéfini en 2006, sera encore approfondi, notamment lors de l’adoption de la loi du 15 décembre 2013 portant diverses dispositions en vue d’améliorer le statut de la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine  [160]. Cette législation prévoit notamment un temps plus important consacré à la victime lors des audiences du TAP, lorsque sont discutées les conditions posées dans son intérêt et auxquelles devra obéir la mesure de libération anticipée.

6. La loi du 17 mars 2013

117Les lois adoptées les 5 et 18 mars 1998 ainsi que le 17 mai 2006 afin de faire évoluer le droit en matière de libération conditionnelle ne portent pas atteinte aux seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle. Pourtant, plusieurs partis politiques revendiquent une évolution en ce sens depuis un grand nombre d’années. Dans un contexte ravivant l’émotion vécue durant l’affaire Dutroux, ces seuils sont partiellement revus à l’occasion de l’adoption de la loi du 17 mars 2013 modifiant le Code judiciaire et la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités de la peine  [161]. Cette loi durcit les conditions d’octroi de la libération conditionnelle, ce qui a pour conséquence de provoquer de nombreuses réactions émanant d’acteurs de la société civile.

6.1. Le contexte

118Alors que l’affaire Dutroux remonte à plus de quinze ans et alors que plusieurs lois ont été adoptées depuis lors afin de réviser le système de libération conditionnelle et de répondre ainsi à certaines carences mises en évidence, notamment, par la commission d’enquête parlementaire établie à l’occasion de cette affaire (cf. supra), cette thématique ne disparaît pas du paysage politique. L’influence de l’affaire Dutroux reste prédominante, en particulier à la suite des demandes de libération conditionnelle qui sont formulées par M. Martin – ainsi que par M. Dutroux et M. Lelièvre – à partir de 2007. Les responsables politiques décident de faire écho à ces mouvements au sein de l’opinion publique, et le système de libération conditionnelle est ainsi à nouveau amené à évoluer.

119Rapidement après l’instauration des TAP, M. Martin introduit une première demande de libération conditionnelle, en avril 2007. En effet, ayant purgé un tiers de sa peine, M. Martin est admissible au régime de libération conditionnelle dès le 14 août 2006. Néanmoins, le TAP de Mons refuse de donner une suite favorable à cette demande, arguant de la gravité des faits, de l’absence d’un plan de reclassement et des risques de récidive liés au profil psychologique de la détenue. De nouvelles demandes sont introduites en octobre 2008 et en novembre 2009, sans davantage de succès et avec les mêmes motivations de la part du tribunal. En revanche, une quatrième demande de libération conditionnelle introduite en avril 2011 est acceptée par le TAP de Mons le 9 mai 2011. La décision de libération ne peut toutefois produire ses effets, puisque celle-ci a été accordée sur la base d’un plan de réinsertion qui prévoyait que M. Martin séjourne dans un couvent en France. Or le garde des Sceaux français, Michel Mercier, s’oppose à cet accueil en raison des risques que l’arrivée de M. Martin sur le territoire français comporte pour l’ordre public  [162]. Dès lors, le 22 septembre 2011, le TAP révoque sa décision de libérer de manière anticipée M. Martin, qui demeure donc en prison. En juin 2012, une cinquième demande de libération est introduite auprès du TAP. Le 31 juillet de la même année, ce dernier décide d’octroyer une libération conditionnelle à M. Martin  [163]. Cette décision repose notamment sur le plan de réinsertion sociale présenté par l’avocat de la détenue, qui prévoit qu’elle séjournera dans le couvent des sœurs clarisses de Malonne, près de Namur. Une manifestation s’opposant à cette libération, qui rassemble 350 personnes, se tient à Malonne le 3 août 2012  [164]. Malgré la pression de l’opinion, les sœurs maintiennent leur décision d’accueillir M. Martin si la décision de libération conditionnelle qui a été accordée à celle-ci n’est pas invalidée par la Cour de cassation  [165] (ce qui ne sera finalement pas le cas, la Cour de cassation rejetant, dans un arrêt du 28 août 2012  [166], le pourvoi introduit dans cette affaire). Une manifestation de plus grande ampleur, qui rassemble environ 5 000 personnes, se tient à Bruxelles le dimanche 17 août  [167]. Il est fait état de cet événement dans la presse étrangère également  [168]. Sur la base du plan de reclassement qu’elle a élaboré, mais aussi d’un ensemble de conditions fixées par le TAP, M. Martin est libérée le 28 août 2012.

120Quelques mois plus tard, le 4 février 2013, M. Dutroux – qui a alors purgé un tiers de sa peine – introduit pour la première fois une demande de libération conditionnelle auprès du TAP. Cette demande est toutefois rejetée le 18 février 2013.

121Ce contexte est crucial pour comprendre les nouvelles évolutions législatives en matière de libération conditionnelle. En effet, alors que M. Martin avait déjà introduit plusieurs demandes de libération conditionnelle, l’accord du gouvernement fédéral Di Rupo (PS/CD&V/MR/SP.A/Open VLD/CDH) du 1er décembre 2011 prévoit une révision des seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle  [169] :

122

« Pour des infractions d’une extrême gravité ayant entraîné la mort, par exemple le viol et l’attentat à la pudeur ou l’enlèvement de mineur, le seuil d’admissibilité à la libération conditionnelle sera porté au minimum à la moitié de la peine, et trois quarts en cas de récidive, en cas de condamnation à 30 ans ou à perpétuité (…). Pour ces mêmes infractions, le juge pourra, lors de la condamnation, considérer que l’auteur est en état de récidive s’il avait été condamné à une peine correctionnelle effective de 3 années minimum dans les 10 ans qui précèdent.
  La loi du 26 avril 2007 relative à la mise à disposition du tribunal de l’application des peines sera mise en œuvre sans délai, lui permettant de prononcer une peine complémentaire à l’issue de l’emprisonnement effectif ».

123Bien que le droit en la matière n’évolue pas au début de la législature, la situation change drastiquement avec la libération de M. Martin le 28 août 2012. Rapidement après la décision du TAP de Mons, et plus encore après la sortie de prison de l’ex-compagne de M. Dutroux, l’ensemble des partis politiques s’expriment dans le sens d’une révision des lois existantes, principalement pour rehausser les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle, mais aussi pour instaurer des peines de sûreté ou encore pour que les victimes soient davantage impliquées ou, à tout le moins, informées par le pouvoir judiciaire lors de libérations conditionnelles  [170].

6.2. L’évolution législative

124Le 5 décembre 2011, le gouvernement Di Rupo est mis sur pied. Au-delà d’une importante réforme institutionnelle, l’accord de gouvernement prévoit notamment la révision du système de libération conditionnelle afin d’en durcir les conditions d’octroi (cf. supra).

125Le 14 septembre 2012, le Conseil des ministres adopte un avant-projet de loi préparé par la ministre de la Justice, Annemie Turtelboom (Open VLD), et déjà validé en comité ministériel restreint (« kern ») le 6 septembre afin de modifier le Code pénal et la loi du 17 mai 2006. Cet avant-projet de loi est adopté quelques jours seulement après la libération de M. Martin, le 28 août 2012, et quelques mois avant la demande de libération de M. Dutroux, le 4 février 2013. C’est donc dans un contexte spécifique et motivé par l’urgence que ce texte s’impose à l’agenda politique.

126Faisant rapidement face aux critiques formulées par la société civile ainsi qu’aux réserves émises par le Conseil d’État et le CSJ (cf. infra), cet avant-projet de loi fait place à deux projets de loi validés par le Conseil des ministres le 11 janvier 2013 et déposés à la Chambre des représentants le 16 janvier suivant  [171]. Il est à noter que, conformément à l’article 80 de la Constitution et à l’article 51 du règlement de la Chambre des représentants, le gouvernement fédéral demande l’urgence pour chacun de ces projets de loi  [172]. Tous deux sont débattus concomitamment au sein du Parlement fédéral car ils portent sur la même réforme. Puisque c’est le projet de loi modifiant le Code judiciaire et modifiant la loi du 17 mai 2006 qui comporte l’essentiel des modifications portant sur la libération conditionnelle  [173], c’est celui-ci qui retient notre attention dans la présente analyse.

127Pour certaines catégories de personnes condamnées à des peines d’emprisonnement particulièrement lourdes, ce projet de loi modifie la composition des TAP (désormais composés de deux juges professionnels et deux juges assesseurs, et non plus d’un juge professionnel et de deux juges assesseurs) ainsi que leur mode de fonctionnement (les décisions étant désormais prises à l’unanimité et non plus à la majorité), rehausse les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle dans certains cas, supprime l’automaticité de la procédure (le condamné doit désormais effectuer une demande lui-même pour lancer la procédure) et allonge le délai d’épreuve (c’est-à-dire le laps de temps qui suit la libération conditionnelle). Alors que le texte adopté par le gouvernement en septembre 2012 prévoyait que le parquet et le directeur de l’établissement pénitentiaire devaient donner leur accord pour qu’une demande de libération conditionnelle soit transmise au TAP, cet aspect fortement mis en cause par la société civile disparaît de la nouvelle mouture du texte.

128Comme pour les lois précédemment adoptées en la matière, une logique majorité-opposition prévaut lors de l’adoption de cette loi. Après avoir été voté en commission de la Justice de la Chambre des représentants le 29 janvier 2013, le texte est soumis à la discussion et au vote des députés fédéraux deux jours plus tard, soit le 31 janvier, en séance plénière. Avant que les échanges sur le fond du projet de loi ne débutent, Juliette Boulet (Écolo) interpelle le président de la Chambre pour lui faire part de la volonté du groupe Écolo-Groen de renvoyer le texte en commission de la Justice. Elle évoque une lettre ouverte communiquée par un collectif composé d’acteurs du monde judiciaire, carcéral et associatif faisant part de leurs craintes quant aux effets de l’adoption du projet de loi et regrettant de ne pas avoir été auditionnés en commission (cf. infra). Les élus du groupe N-VA et du groupe VB soutiennent eux aussi la demande de renvoi en commission. Comme l’indique Sophie De Wit (N-VA), « le moins que nous puissions faire aujourd’hui, c’est entendre ceux qui doivent exécuter cette législation sur le terrain et qui doivent se confronter aux problèmes qui s’y posent »  [174]. Alors qu’une motion est déposée par le groupe Écolo-Groen pour forcer le renvoi en commission, elle n’obtient le soutien que de 47 parlementaires. Cette motion rejetée, le projet de loi reste à l’ordre du jour.

129Durant les débats qui se tiennent au sein de l’hémicycle de la Chambre des représentants, les formations de la majorité rappellent que, selon elles, le projet de loi permet de répondre à une inquiétude de la population et participe à la restauration de la confiance des citoyens envers les instances judiciaires pénales.

130Quant à elle, l’opposition s’y oppose de façon ferme. Les écologistes dénoncent le projet de loi sur la forme et sur le fond. Ils regrettent à nouveau que les acteurs de terrain n’aient pas été pris en compte dans le processus, par exemple lors d’auditions au sein de la commission de la Justice. Ils indiquent en outre que la possibilité qui est offerte au ministre de la Justice de se pourvoir en cassation après la décision du TAP est une immixtion du pouvoir exécutif dans les prérogatives du pouvoir judiciaire. Ils émettent également des doutes quant aux conséquences du durcissement des conditions d’octroi de la libération conditionnelle, en termes de réinsertion sociale des condamnés (des carences dans ce domaine étant susceptibles d’augmenter le risque de récidive) mais également de surpopulation carcérale. Enfin, ils déplorent la fin du caractère automatique de la procédure de libération conditionnelle, considérant qu’elle contribue à créer deux catégories de condamnés : ceux qui sont informés des procédures à suivre et ceux qui ne le sont pas. Plusieurs de ces critiques sont largement partagées par les députés FDF. Ceux-ci indiquent en outre que le projet de loi va au-delà de la déclaration de politique générale et met en danger la notion même de libération conditionnelle.

131Pour la N-VA, si l’objectif poursuivi par le texte – à savoir adopter une approche plus sévère à l’égard des récidivistes – est honorable, le projet de loi est une occasion manquée d’appréhender le système de libération conditionnelle dans sa globalité et de façon fondamentale. Le parti nationaliste flamand dénonce ainsi un « bricolage hâtif »  [175]. Selon la N-VA, le projet de loi pèche par le manque de consultation qui a présidé à son accouchement, provoque une complexification des procédures, concerne trop peu de condamnés et trahit un manque de confiance de la part de l’exécutif à l’égard du pouvoir judiciaire. Enfin, le VB considère lui aussi que le texte est une occasion manquée pour une réforme en profondeur. Selon le VB, il concerne trop peu de condamnés et ne durcit pas assez les conditions d’octroi de la libération conditionnelle.

132Soumis au vote des députés fédéraux le même jour, le projet de loi est adopté par 78 voix contre 46 (et 0 abstention). Adopté par le PS, le SP.A, le MR, l’Open VLD, le CDH et le CD&V, il est rejeté par la N-VA, Écolo, Groen, les FDF, le VB, la LDD et le député indépendant (ex-PP) Laurent Louis  [176]. Le texte est alors transmis au Sénat.

133Le Sénat se saisit du texte en séance plénière le 7 mars 2013. Tout comme à la Chambre des représentants, les partis de la majorité rappellent que le projet de loi concrétise l’accord de gouvernement signé entre les partenaires de la coalition. Bien qu’ils indiquent qu’il s’agit d’une étape et non d’un aboutissement en soi, ils se félicitent des avancées qu’il comporte. Dans l’opposition, les écologistes dénoncent à nouveau le règne de « l’émocratie »  [177]. Sont fustigées, en particulier, la remise en cause du caractère automatique de la procédure de libération conditionnelle et la révision de la composition des TAP. Les sénateurs écologistes regrettent par ailleurs que le statut des victimes dans le cadre des procédures menées devant les TAP n’ait pas été amélioré. Quant à elle, la N-VA pointe l’absence d’une approche globale de la libération conditionnelle, qui aurait pu conduire à rehausser davantage les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle. Pour sa part, le VB dénonce une « législation de l’apparence »  [178] ou une « législation symbolique »  [179]. Selon lui, la politique belge de l’exécution des peines est la plus laxiste du monde et devrait être plus radicalement réformée.

134Le projet de loi est adopté par 40 voix contre 20. Alors que les six partis de la majorité votent en faveur du texte, les sénateurs de la N-VA, d’Écolo, de Groen et du VB, ainsi que le sénateur Jurgen Céder (indépendant, ex-VB), votent contre le texte  [180]. Puisque le texte alors adopté intègre plusieurs amendements – principalement issus de la majorité –, le projet de loi est transmis à la Chambre des représentants.

135Comme le prévoit l’article 87 du règlement de la Chambre des représentants, le projet de loi renvoyé à la Chambre par le Sénat ne fait plus l’objet d’une discussion générale en séance plénière. Il est adopté le 14 mars 2013 par la Chambre, avec 77 voix. Alors que les partis de la majorité votent tous en faveur du texte, les députés de la N-VA, d’Écolo, de Groen, du VB, des FDF et de la LDD s’opposent au texte. Le député indépendant L. Louis s’abstient.

136La loi est sanctionnée par le Roi le 17 mars 2013  [181] ; elle entre en vigueur le 19 mars 2013.

6.3. Le positionnement de la société civile

137Nombreux sont les acteurs du monde judiciaire, carcéral ou associatif à avoir exprimé leurs réticences, voire leur ferme opposition, au projet de réforme du système de libération conditionnelle. Ainsi, en septembre 2012, à la veille de l’examen de l’avant-projet de loi de la ministre A. Turtleboom par le conseil des ministres (cf. supra), plusieurs de ces acteurs se fédèrent, de manière assez exceptionnelle. Le conseil de l’Ordre français des avocats du barreau de Bruxelles, de Nederlandstalige Vereniging van Magistraten (NVM), le conseil de l’Ordre du barreau de Liège, l’Association syndicale des magistrats (ASM), Magistratuur & Maatschappij (M&M), la Ligue des droits de l’homme (LDH), la Liga voor Mensenrechten, le Syndicat des avocats pour la démocratie (SAD) et la section belge de l’Observatoire international des prisons (OIP) tiennent une conférence de presse commune au Palais de justice de Bruxelles le 13 septembre 2012. Inhabituelle dans sa composition, cette fédération d’acteurs forme ce qui est rapidement appelé un « front peu commun ». À l’occasion de cette conférence de presse, les différents acteurs déplorent l’adoption d’une réforme qui, selon eux, répond davantage à l’émotion qu’à une nécessité sur le plan juridique. Une forme de populisme pénal (cf. infra) y est par ailleurs dénoncée. Le président de la LDH, Alexis Deswaef, indique : « Nous dénonçons cette tendance à légiférer pour communiquer et pas pour améliorer la société, [nous dénonçons] le populisme pénal du gouvernement alors qu’il devrait faire œuvre de pédagogie »  [182].

138En outre, ces acteurs mettent en garde contre les effets contre-productifs, voire néfastes, d’une telle réforme. Sur la base d’études pointant que plus la peine privative de liberté subie est longue, plus la réinsertion est difficile, ainsi que sur la base de travaux suggérant que le risque de retour en prison est plus faible pour les détenus qui ont bénéficié d’une libération anticipée, ils rappellent que la libération conditionnelle concourt tant à réinsérer les personnes condamnées qu’à prévenir la récidive des auteurs d’une infraction. La présidente de la section belge de l’OIP déclare ainsi : « Vu leurs conditions de détention, la plupart des détenus sont empêchés de préparer leur réinsertion, voire leur insertion, dans la société. Résultat : ils sortent de prison la rage au ventre et complètement perdus »  [183]. Les conséquences que l’adoption d’une telle réforme comporte au regard de la surpopulation carcérale en Belgique sont aussi jugées dramatiques. Rappelant qu’il s’agit d’une réalité bien présente en Belgique depuis de nombreuses années, ces acteurs soulignent que les risques d’aggravation de la surpopulation carcérale sont réels.

139Alors que l’opposition à ces textes demeure intense dans les mois qui suivent, le CSJ est sollicité par la ministre de la Justice, A. Turtleboom, pour remettre un avis sur le texte proposé. Dans un avis rendu le 25 octobre 2012, le CSJ rappelle qu’il ne souhaite pas se prononcer sur les choix politiques à l’origine de la réforme, tout en émettant de vives réserves  [184]. Il regrette notamment qu’aucune évaluation scientifique du fonctionnement des TAP et de la libération conditionnelle n’ait été commanditée par le gouvernement fédéral afin de guider ses réflexions. Indiquant que les études similaires menées à l’étranger ont pointé les nombreuses limites que comporte un rehaussement du seuil d’admissibilité à la libération conditionnelle, le CSJ s’interroge sur l’efficacité du dispositif prévu par le gouvernement. En outre, il pointe du doigt les risques qu’une telle réforme comporte quant au maintien de l’équilibre des pouvoirs. Alors que le texte prévoit que le TAP ne peut désormais examiner le dossier de libération anticipée que si le directeur de prison et le ministère public y sont favorables, le CSJ rappelle que tous deux sont soumis à l’autorité du ministre de la Justice et qu’il y a donc ingérence du pouvoir exécutif dans un domaine réservé par la Constitution au pouvoir judiciaire. La nécessité qu’une libération anticipée soit adoptée à l’unanimité pour les cas les plus graves est également dénoncée. Par ailleurs, la fin du caractère automatique des demandes de libération conditionnelle est perçue comme étant légitime, mais discriminante. Le CSJ suggère que le directeur de la prison soit tenu d’informer les détenus par écrit, mais aussi lors d’un entretien individuel de la possibilité d’être libéré anticipativement. Enfin, le CSJ formule une proposition relative à la durée du délai d’épreuve. Il propose ainsi que, dans tous les cas ou dans les cas les plus graves, le total des peines déjà purgées, augmenté de la durée du délai d’épreuve, corresponde au minimum à la durée de la peine d’emprisonnement telle que prononcée par le juge.

140Dans les mois qui suivent, les arguments avancés par le CSJ sont partagés et développés par les mêmes acteurs du monde judiciaire, carcéral ou associatif qui avaient déjà mis en garde contre l’adoption d’une telle réforme à la veille du Conseil des ministres du 14 septembre. Sur le fond, trois éléments majeurs de la réforme sont principalement dénoncés.

141Le premier concerne le rehaussement des seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle pour les personnes condamnées à 30 ans d’emprisonnement ou à une peine de réclusion à perpétuité. Selon ces acteurs, un tel rehaussement provoquerait une discrimination entre les condamnés. En outre, il suggère une méfiance du pouvoir exécutif à l’égard du pouvoir judiciaire puisqu’il limiterait la marge de manœuvre du TAP. Plus fondamentalement, c’est ainsi l’équilibre des pouvoirs qui est jugé menacé.

142Le deuxième élément porte sur la suppression du caractère automatique de la procédure de libération conditionnelle. Selon les différents acteurs opposés à la réforme, une telle suppression ne serait pas sans réduire de façon substantielle le nombre de dossiers de demande de libération conditionnelle. En outre, elle provoquerait une nouvelle discrimination entre les personnes condamnées puisqu’un grand nombre d’entre elles sont mal informées ou fragilisées, par exemple par le fait qu’elles sont illettrées, ne peuvent pas s’exprimer dans une des langues nationales ou ne disposent pas d’un avocat. En conséquence, ces associations regrettent que, à tout le moins, le directeur d’un établissement pénitentiaire ne soit pas tenu d’informer, non seulement par écrit, mais aussi lors d’un entretien individuel et périodique, les condamnés de la possibilité de bénéficier d’une libération anticipée.

143Enfin, le troisième élément a trait à la procédure d’octroi de la libération conditionnelle. Les mêmes acteurs dénoncent que la libération anticipée des personnes condamnées aux peines privatives de liberté les plus lourdes requiert – selon le projet de réforme – une décision adoptée, non plus à la majorité, mais à l’unanimité par un tribunal dont le nombre de juges est augmenté (de trois à cinq). Au-delà de la discrimination provoquée entre deux catégories de détenus, est dénoncé le fait que ce mode d’octroi de la libération conditionnelle rend la libération anticipée peu envisageable en pratique pour cette catégorie de condamnés.

144Également préoccupé par la réforme en cours d’adoption, le Centre d’action laïque (CAL) fait lui aussi savoir qu’il s’y oppose fermement  [185]. Tout comme le CSJ, il regrette qu’aucune étude n’ait été menée afin d’appuyer la nécessité de revoir le droit en ce sens. En outre, il dénonce le fait que la réforme soit adoptée dans la précipitation et met en exergue l’impact qu’elle comporte, notamment à l’égard du budget de l’État et au regard de la problématique de la surpopulation carcérale.

145Toutes ces critiques formulées en dehors de l’arène strictement politique vont dans le même sens : il est demandé au Parlement fédéral de ne pas voter en faveur de la réforme proposée par le gouvernement Di Rupo. Si cette demande ne sera pas entendue par les partis de la majorité, il est à noter que nombre des arguments défendus par ces acteurs issus de la société civile seront mobilisés par les parlementaires de l’opposition dans le cadre des débats institutionnels. En outre, une motion déposée par le groupe Écolo-Groen et soutenue par les députés de la N-VA et du VB sera introduite auprès du président de la Chambre des représentants le 31 janvier 2013, afin de demander un renvoi du texte en commission de la Justice pour répondre aux demandes formulées par les représentants de la société civile et de les inviter à s’exprimer (cf. supra).

6.4. Les principales modifications apportées par la loi du 17 mars 2013 sur le plan juridique

146Dans cette section, sont examinées les principales modifications résultant de l’adoption de la loi du 17 mars 2013 modifiant le Code judiciaire et la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités de la peine : concernant les personnes condamnées à une peine de réclusion de trente ans, les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle sont rehaussés et le délai d’épreuve est allongé ; le caractère automatique des demandes de libération conditionnelle est supprimé ; enfin, diverses modifications sont apportées sur le plan du fonctionnement et de la composition du TAP.

6.4.1. Les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle relevés et le délai d’épreuve prolongé pour certaines catégories de détenus

147Ces modifications valent pour les personnes condamnées à une peine de réclusion de 30 ans ou à perpétuité. Dans le système antérieur, il convenait d’opérer une première distinction entre les condamnés à temps et les condamnés à perpétuité. En ce qui concerne les condamnés à temps, c’est-à-dire les personnes condamnées à une peine d’une durée déterminée, en ce compris les personnes condamnées à une peine de 30 ans, une distinction supplémentaire devait être établie : le condamné primaire – à savoir celui qui n’est pas en situation de récidive légale – devait avoir effectué un tiers de sa peine (ou de ses peines) pour pouvoir solliciter une libération conditionnelle et celui en état de récidive légale devait avoir purgé deux tiers de sa peine (ou de ses peines), avec une limite de 14 ans dans les deux cas. Concernant les personnes condamnées à perpétuité, le seuil d’admissibilité à la libération conditionnelle ne pouvait excéder 10 ans pour le condamné à perpétuité primaire et 16 ans pour le condamné à perpétuité en état de récidive légale.

148Il est à noter qu’un tel système, simple en apparence, n’a pas manqué de susciter un certain nombre de difficultés, de sorte que l’existence dans la législation de seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle différenciés en fonction d’un certain nombre de critères doit être relativisée. Comme a pu le rappeler Damien Vandermeersch, « la Cour constitutionnelle a considéré que cette situation était contraire à la Constitution en telle sorte que le taux d’un tiers est appliqué actuellement à toutes les condamnations à exécuter »  [186]. Deux arrêts rendus par la Cour constitutionnelle suite à une question préjudicielle lui ayant été adressée sont ici impliqués : l’un le 18 décembre 2014  [187], l’autre le 26 juillet 2017  [188]. Pour porter remède à cette situation d’inconstitutionnalité mise en évidence par la haute juridiction, le législateur a adopté la loi du 5 mai 2019  [189] qui introduit un article 55bis dans le Code pénal prévoyant une nouvelle forme de récidive : celle de crime sur délit  [190]. Toutefois, certains auteurs de doctrine estiment que, « dès lors que la loi du 5 mai 2019 [n’a pas fait] disparaître toutes les discriminations identifiées par la Cour constitutionnelle, la règle des deux tiers ne peut toujours pas être appliquée »  [191].

149Ces précisions ayant été apportées, nous pouvons revenir aux effets de la loi du 17 mars 2013 sur le calcul du seuil d’admissibilité à la libération conditionnelle et le délai d’épreuve pour certaines catégories de condamnés. En substance, les personnes condamnées à une peine de réclusion de 30 ans voient leur situation alignée sur celle des condamnés à perpétuité. Pour ces deux catégories, et uniquement pour elles, les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle sont sensiblement augmentés. Le seuil ne correspond désormais plus à un tiers de la peine, mais à la moitié : « Le condamné primaire à une peine de réclusion de trente ans ou à perpétuité ne sera admissible à la libération conditionnelle qu’après avoir subi quinze ans de privation de liberté au lieu de dix »  [192]. Ensuite, « tout condamné à trente ans ou à perpétuité, ayant précédemment été condamné à une peine criminelle, devra avoir subi vingt-trois ans de privation de liberté au lieu de quatorze ou seize »  [193]. L’hypothèse envisagée ici est donc celle dite de la récidive de crime sur crime. Une autre hypothèse, celle de la récidive de crime sur délit, est également envisagée. Dans ce cas, le seuil d’admissibilité à la libération conditionnelle est relevé de façon notable puisqu’il est porté d’une durée de 10 ans à une durée de 19 ans. Sont visées par le législateur, en 2013, les personnes qui ont été condamnées à une peine d’emprisonnement de 30 ans ou à perpétuité. S’il apparaît que celles-ci ont été précédemment condamnées à une peine correctionnelle d’au moins 3 ans d’emprisonnement ferme du chef d’une des infractions énumérées dans la loi (et considérées comme étant particulièrement graves), et s’il s’est écoulé moins de 10 ans entre le moment où ces personnes ont purgé leur peine (ou le moment où leur peine a été prescrite) et les nouveaux faits ayant donné lieu à leur condamnation à une peine de 30 ans ou à perpétuité, celles-ci devront subir une détention presque deux fois plus longue (19 ans, au lieu de 10 ans auparavant). La récidive de crime sur délit n’étant, alors, pas consacrée dans le Code pénal, les condamnés à une peine de réclusion de 30 ans ou à perpétuité, et qui avaient déjà été condamnés à une peine correctionnelle, étaient jusqu’ici considérés comme primaires et non récidivistes. Ils ne devaient dès lors subir que 10 années d’emprisonnement avant d’être admissibles à la libération conditionnelle  [194]. La récidive de crime sur délit n’ayant pas, à ce moment-là, été introduite dans le Code pénal par le législateur, une solution intermédiaire a été trouvée par celui-ci : il s’est employé à durcir les conditions de la libération conditionnelle pour certaines catégories, à savoir les condamnés à une peine supérieure à 30 ans de prison qui ont déjà été condamnés en correctionnelle pour une infraction reprise dans une liste fixée dans la loi.

150Le législateur prolonge également en 2013 le délai d’épreuve applicable aux condamnés à une peine de réclusion de 30 ans. Ce délai varie en fonction de la durée de la peine ou des peines. En principe, le délai d’épreuve est « égal à la durée de la peine restant à purger au moment où la libération conditionnelle est octroyée, sans pouvoir être inférieur à deux ans », comme le prévoit l’article 71, alinéa 2, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe.

151Avant la réforme de 2013, en cas de condamnation à une peine criminelle à temps ou à une ou plusieurs peine(s) correctionnelle(s) dont la durée totale excédait 5 ans d’emprisonnement principal (ce qui incluait, jusqu’à la réforme de 2013, les personnes condamnées à une réclusion de 30 ans), le délai d’épreuve était de minimum 5 ans (si la partie de la peine restant à exécuter au moment où la libération conditionnelle était accordée était inférieure à cette durée) et de maximum 10 ans (si la partie de la peine restant à purger était supérieure)  [195]. Ce délai était en outre obligatoirement fixé à 10 ans en cas de condamnation à la réclusion à perpétuité  [196].

152Les modifications introduites par le législateur en 2013 sont les suivantes : la situation des condamnés à une peine de réclusion de 30 ans est alignée sur celle des condamnés à la réclusion à perpétuité, c’est-à-dire qu’ils se verront appliquer un délai d’épreuve dans tous les cas de 10 ans. Comme l’a relevé la doctrine, la tentation risque d’être grande, pour cette catégorie de détenus, d’« aller “à fond de peine”, pour recouvrer une pleine et entière liberté une fois de retour dans la société, ce qui n’est absolument pas positif du point de vue de l’évitement de la récidive »  [197]. Un amendement avait pourtant été déposé par la sénatrice Inge Faes (N-VA) pour prévoir que le délai d’épreuve ne pourrait jamais être inférieur à la peine restant à purger, donnant ainsi au TAP une certaine marge de manœuvre en la matière  [198], mais il n’avait pas été retenu  [199].

6.4.2. La suppression du caractère automatique de la procédure de libération conditionnelle

153Il s’agit ici d’une modification importante par rapport au système antérieur, mis en place suite à l’adoption des lois du 17 mai 2006. L’automaticité était en effet une innovation apportée par cette réforme. Auparavant, « sous l’empire de la loi du 5 mars 1998, la commission de libération conditionnelle était uniquement saisie sur demande du détenu ayant, en outre, obtenu un avis positif de la conférence du personnel de la prison »  [200]. En 2006, le législateur avait prévu que le TAP ou le JAP se prononce de façon automatique quant à la libération conditionnelle des personnes condamnées à une peine privative de liberté. La procédure était la suivante : il incombait au directeur de l’établissement pénitentiaire dans lequel se trouvait le condamné « d’introduire automatiquement la procédure en rendant, au plus tôt quatre mois et au plus tard deux mois avant que ce dernier n’atteigne les seuils d’admissibilité, un avis motivé contenant une proposition d’octroi ou de refus d’une libération conditionnelle »  [201]. Une simple obligation d’information à l’égard du condamné pèse désormais sur le directeur d’établissement pénitentiaire  [202]. Le gouvernement a estimé qu’une démarche active de la part du condamné était opportune  [203] :

154

« Le présent projet de loi prévoit que dorénavant la procédure d’octroi d’une libération conditionnelle ne sera plus lancée “automatiquement” par un avis du directeur. Désormais, le condamné devra, comme c’est le cas pour la procédure d’octroi d’une détention limitée ou d’une surveillance électronique, rédiger une demande écrite à cet effet.
Le gouvernement estime en effet que l’on peut attendre du condamné qu’il entreprenne une démarche active pour lancer cette procédure. De manière tout à fait similaire aux procédures d’octroi d’une détention limitée ou d’une surveillance électronique, il convient d’informer le condamné du fait qu’il se trouve, à quatre mois près, dans les conditions de temps. Cela laisse ainsi le temps nécessaire pour préparer le dossier qui doit être soumis au tribunal de l’application des peines ».

155Des critiques sont formulées à l’égard de cet aspect de la réforme, qui recoupent largement celles émises par la société civile (cf. supra). La doctrine se place tout d’abord sur le plan strictement juridique, en rappelant qu’un tel système n’est pas conforme à la position du Comité des ministres du Conseil de l’Europe  [204]. D’autres niveaux d’analyse sont également considérés. Sur le plan humain, la situation des condamnés illettrés, qui ne maîtrisent pas l’une des langues nationales ou plus généralement qui sont vulnérables sur le plan social, est mise en évidence  [205]. Sur le plan social, le déficit d’accompagnement et de suivi des condamnés avant et au moment de leur sortie de prison constituera une conséquence inévitable, est-il rappelé, d’une diminution du nombre de libérations conditionnelles accordées. Avec deux effets qui sont également relevés ailleurs dans ce Courrier hebdomadaire : une augmentation de la surpopulation carcérale, d’une part, et un accroissement du risque de récidive, d’autre part  [206].

6.4.3. Les modifications apportées au fonctionnement et à la composition du TAP

156Sans que le législateur n’ait procédé à une évaluation du fonctionnement des TAP, des modifications concernant le fonctionnement et la composition de ceux-ci sont introduites. Pour la plupart d’entre elles, ces modifications n’ont pas une portée générale : elles ne concernent que les personnes condamnées à une peine de réclusion de 30 ans ou à perpétuité à l’égard desquelles une peine de mise à la disposition du TAP a été prononcée  [207]. Sur le plan quantitatif, il est intéressant de noter que ne sont ainsi concernés en 2013, au moment où la loi est adoptée, qu’à peine 13 détenus (dont M. Dutroux) sur plus de 11 500 personnes qui se trouvent alors incarcérées  [208].

157La première modification concerne la composition du TAP. Dès lors que cette juridiction doit connaître d’une demande qui émane des personnes condamnées à une peine de réclusion de 30 ans ou à perpétuité, assortie d’une mise à la disposition du TAP, elle doit désormais être composée de cinq et non plus de trois membres : le juge de l’application des peines et les deux assesseurs spécialisés, auxquels sont ajoutés « deux juges du tribunal correctionnel, ces derniers devant, selon le vœu du législateur, apporter toute leur expérience en matière de fixation des peines »  [209]. Il convient de noter qu’une telle composition élargie est exceptionnelle en droit pénal belge  [210].

158Pour ces mêmes catégories de condamnés, la décision prise par le TAP (élargi) d’octroyer une modalité d’exécution de la peine doit être prise à l’unanimité, et non plus à la majorité comme c’était le cas précédemment  [211]. La justification d’une telle modification de l’état du droit peut être puisée dans l’exposé des motifs : il existe « des décisions spécifiques qui, dans des cas exceptionnels, en l’espèce l’octroi d’une modalité d’exécution de la peine à la catégorie des condamnés aux peines les plus lourdes, doivent être prises à l’unanimité des voix afin d’obtenir les garanties maximales que la décision la plus adéquate soit prise »  [212].

159Caroline Mulier et Mona Giacometti abordent de manière critique l’emploi du terme « adéquate » dans ce passage. Selon elles, la décision « adéquate » est présumée être le refus de la mesure visant à aménager la peine. Or il est possible que quatre membres du TAP soient en faveur de la mesure et qu’un seul s’y oppose  [213]. Selon elles, le législateur instaure en réalité, sans l’affirmer explicitement, un droit de veto en ce domaine. En matière pénale, l’unanimité est pourtant requise, en règle générale, pour aggraver la situation de la personne poursuivie, et non l’inverse.

160Selon certains commentateurs, tant la règle de la composition spéciale du TAP que la règle de l’unanimité sont en outre sources de discriminations non justifiées éventuelles entre différentes catégories de condamnés, et ce même si le gouvernement a pu affirmer, durant les travaux préparatoires : « Cette condition d’unanimité des voix ne porte en rien préjudice à l’argumentation du législateur de 2006 quant à la différence de traitement qu’engendrerait une telle condition entre les peines de trois ans ou moins et celles de trois ans ou plus. En effet, le présent projet ne modifie en rien cette situation. Ce n’est que dans la catégorie des peines de plus de trois ans que le législateur précise qu’à l’égard de la catégorie des condamnés aux peines les plus lourdes, les futures décisions relatives à l’octroi d’une modalité d’exécution de la peine devront être prises à l’unanimité des voix. Cette distinction est opportune, raisonnable et proportionnelle compte tenu de la gravité des peines infligées à cette catégorie de condamnés »  [214].

161Un autre éventuel problème de constitutionnalité se pose en lien avec le pouvoir d’injonction qui est conféré au ministre de la Justice pour que le parquet introduise un pourvoi en cassation  [215]. En effet, la loi du 17 mars 2013 a modifié l’article 96 de la loi de 2006 relative au statut juridique externe afin d’accorder au ministre de la Justice un pouvoir d’injonction vis-à-vis du ministère public, lui permettant de contraindre ce dernier à introduire un pourvoi en cassation contre une décision rendue par le TAP. Or C. Mulier et M. Giacometti relèvent que ce nouveau pouvoir d’injonction pourrait violer les termes de l’article 151, § 1er, de la Constitution, qui dispose : « Le ministère public est indépendant dans l’exercice des recherches et poursuites individuelles, sans préjudice du droit du ministre compétent d’ordonner des poursuites et d’arrêter des directives contraignantes de politique criminelle, y compris en matière de politique de recherche et de poursuite »  [216].

162De manière générale, l’évaluation par la doctrine juridique des lois adoptées en 2013 est au diapason de celle qui a pu émaner d’acteurs inscrits dans la société civile (cf. supra). Est particulièrement critiqué ce texte de circonstance qu’est la loi du 17 mars 2013, dont le lien avec des étapes émaillant le parcours judiciaire de M. Dutroux lui-même est signalé  [217]. Cela explique notamment que cette loi a été adoptée au pas de charge, entre le 16 janvier et le 17 mars 2013, sans procéder à des consultations d’acteurs de terrain et sans solliciter l’avis du Conseil d’État. Ainsi, cette réforme est largement perçue – ce qui n’était pas le cas de la réforme de 2006 – comme ayant été guidée « par la “vox populi”, pour adapter la législation suite à l’un ou l’autre cas particulier, ayant suscité l’émoi auprès de la population »  [218].

7. La loi du 21 décembre 2017

163Si la notion de peine incompressible – défendue par plusieurs partis politiques au moins depuis l’affaire Dutroux – ne parvient pas à s’imposer et à être concrètement traduite dans le droit, la notion de période de sûreté refait surface afin de permettre aux juges de limiter les possibilités de libération anticipée pour les personnes condamnées à une peine privative de liberté. Tout comme en 2013, cette évolution vise à durcir le système de libération conditionnelle en Belgique. Bien que ses réactions soient moins nombreuses qu’en 2013, la société civile réagit négativement à l’adoption de la loi du 21 décembre 2017.

7.1. Le contexte

164Le contexte dans lequel est adoptée la loi du 21 décembre 2017 instaurant des périodes de sûreté est spécifique à plus d’un titre. Tout d’abord, et contrairement aux évolutions législatives précédentes, il n’est pas directement lié aux conséquences de l’affaire Dutroux. En effet, alors que le projet de loi prévoit qu’une période de sûreté peut être décidée par un juge du fond lors du prononcé de la peine, il ne concerne pas les condamnés ayant déjà été jugés par le passé. Par ailleurs, l’affaire Dutroux ne connaît pas de rebondissement notable durant cette période.

165Ensuite, l’année 2017 est encore marquée par la vague d’attentats terroristes commis en Europe par le groupe terroriste État islamique (Daesh) depuis 2015. En Belgique particulièrement, une cellule terroriste sur le point de commettre des attentats commandités par l’État islamique a été démantelée à Verviers le 15 janvier 2015. Le 22 mars 2016, deux attentats revendiqués par l’État islamique ont été commis à Bruxelles et à Zaventem, faisant un total de 32 victimes. Ces attentats – ainsi que l’émotion suscitée par les attentats commis à l’étranger, notamment en France – provoquent ce qui est perçu comme un sentiment d’impunité au sein de l’opinion publique. C’est d’ailleurs dans ce contexte que sont adoptés plusieurs textes modifiant le Code de la nationalité, le Code pénal et le Code d’instruction criminelle  [219].

166Par ailleurs, un certain nombre de ressortissants belges quittent la Belgique pour combattre auprès du groupe terroriste État islamique, principalement en Syrie, depuis plusieurs années. Commence à se poser la question du retour en Belgique de ces ressortissants (appelés « returnees »). En avril 2017, répondant à une question parlementaire de la députée Monica De Coninck (SP.A), le ministre de la Sécurité et de l’Intérieur du gouvernement fédéral Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD), Jan Jambon (N-VA), indique que, en avril, 119 personnes sont déjà rentrées d’une zone de combat en Syrie  [220]. Parmi ces 121 ressortissants belges, 44 sont en prison en Belgique et 5 sont en prison à l’étranger. Revient alors à l’agenda politique la question des périodes de sûreté et du durcissement des peines à l’égard de ces catégories de personnes.

167Enfin, il est à noter que la composition du gouvernement fédéral elle-même favorise la révision du droit en la matière. Alors que plusieurs formations politiques – dont les socialistes et les écologistes – ne sont pas favorables à une évolution législative visant à accroître la période durant laquelle un condamné est en prison, celles-ci siègent dans l’opposition depuis octobre 2014. Par ailleurs, alors que les libéraux ainsi que les nationalistes flamands réclament l’instauration de peines de sûreté depuis de nombreuses années (les libéraux le réclamaient déjà lors des débats parlementaires en vue de l’adoption des lois des 5 et 18 mars 1998 ; cf. supra), ils siègent désormais dans la majorité, avec les chrétiens-démocrates flamands. Au-delà de l’actualité qui impose – bien qu’indirectement – la thématique, il y a donc une fenêtre d’opportunité concrètement ouverte pour une évolution législative en la matière. C’est en effet la première fois depuis 1999 que les libéraux et les socialistes ne gouvernent pas ensemble au niveau fédéral, et la participation de la N-VA au gouvernement fédéral est inédite.

7.2. L’évolution législative

168En 2014, et alors que le système de la libération conditionnelle a été réformé durant la législature précédente, l’accord du gouvernement fédéral Michel I du 9 octobre 2014 prévoit à nouveau de renforcer les conditions d’octroi de la libération conditionnelle, à travers l’introduction de la notion de période de sûreté : « Pour certaines infractions d’une extrême gravité (…), le gouvernement donnera au juge du fond la possibilité d’assortir la peine qu’il prononce d’une période de sûreté avant l’échéance de laquelle aucune libération anticipée ne peut intervenir »  [221].

169Il faut attendre un certain temps avant que cette intention affichée par la nouvelle coalition se traduise concrètement. Le 14 mai 2017, un Conseil des ministres extraordinaire se tient à Val Duchesse sur la thématique de la sécurité  [222]. Ce Conseil des ministres extraordinaire s’inscrit dans un contexte marqué par la volonté du Premier ministre, Charles Michel (MR), de rendre davantage tangible, à tout le moins sur la scène médiatique, l’action menée par son gouvernement, notamment en réponse à une critique formulée par le patronat flamand selon lequel le gouvernement fédéral se comporterait comme s’il était en affaires courantes  [223]. À cette occasion, 28 mesures sont décidées par le gouvernement fédéral, parmi lesquelles la possibilité pour le juge d’associer à la peine privative de liberté qu’il prononce une période durant laquelle aucun aménagement de peine ne pourra être envisagé.

170Concrètement, le texte proposé par le gouvernement fédéral à la Chambre des représentants  [224] confère au juge pénal la possibilité d’assortir la peine privative de liberté qu’il prononce d’une période de sûreté, et ce dans deux hypothèses. La première concerne les condamnations à une peine privative de liberté d’au moins 3 ans et de moins de 30 ans lorsqu’un certain nombre d’infractions, limitativement énumérées, ont été commises : crimes et délits contre la sûreté de l’État, violations graves du droit international humanitaire, infractions terroristes, viol ou attentat à la pudeur ayant entraîné la mort, assassinat de policiers en raison de leur qualité, tortures ayant entraîné la mort sans intention de la donner, et enlèvement ou détention de mineurs ayant entraîné la mort. Dans ces cas, le juge peut imposer une période de sûreté d’une durée se situant entre un tiers et deux tiers de la peine, ce qui impliquera qu’une libération conditionnelle ne pourra être prononcée qu’après l’expiration de ce délai. La deuxième hypothèse concerne les condamnations à une peine privative de liberté de 30 ans ou à perpétuité, et ce quelle que soit l’infraction pour laquelle la peine est prononcée (et sans qu’il faille donc considérer la liste limitative évoquée supra). Dans ces cas, le juge peut rendre impossible l’octroi d’une libération conditionnelle pendant une période allant de 15 à 25 ans.

171Le texte déposé par le gouvernement fédéral est longuement débattu en commission de la Justice de la Chambre des représentants, qui vote en sa faveur le 7 novembre 2017. L’adoption de ce texte n’est pas sans provoquer des réactions au sein de la société civile, et particulièrement de la part d’acteurs du monde judiciaire. Ainsi, l’Ordre des barreaux francophones et germanophone (Avocats.be) s’oppose fermement à l’instauration de peines de sûreté. Selon lui, une telle réforme pose un certain nombre de problèmes, notamment en termes de réinsertion des condamnés et de prérogatives du TAP sur lesquelles le juge du fond pourrait indûment empiéter  [225].

172Les débats ont ensuite lieu en séance plénière, le 14 décembre 2017. À cette occasion, les partis de la majorité (N-VA, MR, CD&V et Open VLD) soulignent qu’ils demeurent fortement attachés au principe de la libération conditionnelle. Le ministre de la Justice, Koen Geens (CD&V), rappelle que l’adoption de peines incompressibles n’est pas à l’ordre du jour. Néanmoins, ces mêmes formations indiquent combien il est important d’adopter une telle mesure, notamment afin de répondre à un sentiment d’impunité de plus en plus répandu dans la population. Selon le MR, il s’agit d’une proposition formulée de longue date par le parti libéral et qui ne parvenait pas à être traduite en décision politique en raison de la présence du PS au sein de la majorité jusqu’en 2014  [226]. Le PS admet quant à lui que son opposition aux peines de sûreté a toujours été forte  [227].

173Dans l’opposition, les critiques sont nombreuses. Au PS, il est ainsi reproché au gouvernement fédéral de ne pas tenir compte de la réalité, indiquant que la majorité des condamnés ne bénéficient pas d’une libération conditionnelle. La question de la réinsertion des condamnés est elle aussi abordée. Il est rappelé que la réinsertion est rendue plus difficile lorsqu’une libération conditionnelle n’est pas envisageable. En outre, l’introduction de peines de sûreté est considérée comme étant une entorse inopportune aux prérogatives du TAP. Les critiques sont partiellement partagées par le SP.A, qui regrette par ailleurs que le texte vise à protéger spécifiquement les fonctionnaires de police (et non, par exemple, les magistrats). Le parti socialiste flamand annonce qu’il s’abstiendra lors du vote.

174Sur les bancs des écologistes, le texte est également combattu. L’enjeu de la réinsertion des condamnés est questionné, mais également la surpopulation carcérale qu’une telle mesure risque, selon Écolo et Groen, d’aggraver. Enfin, les deux partis rappellent que l’accord de gouvernement proposait que les peines de sûreté soient réservées aux « infractions d’une extrême gravité » alors que, dans le projet de loi, elles concernent aussi les peines privatives de liberté de plus de 3 ans.

175Le CDH reconnaît qu’une proposition de loi visant à permettre aux juges de prononcer des peines de sûreté a été déposée dans le passé par ses députés fédéraux Christian Brotcorne et Joseph Georges  [228]. Néanmoins, le CDH indique que cette mesure était proposée dans un contexte spécifique, caractérisé par l’émotion de l’opinion à la suite de la libération conditionnelle de M. Martin. Selon le CDH, la législation a évolué depuis lors – avec un durcissement des peines – et la proposition d’instaurer des périodes de sûreté formulée par le gouvernement concerne un nombre de cas beaucoup trop large. En conséquence, le CDH annonce qu’il ne votera pas en faveur du projet de loi mais qu’il s’abstiendra.

176En définitive, le 14 décembre 2017, le texte est adopté par 81 voix issues de la majorité, contre 32 non et 21 abstentions (le CDH et le SP.A étaient les deux groupes politiques s’abstenant lors du vote). La loi modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté et modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive en ce qui concerne l’arrestation immédiate est sanctionnée par le Roi le 21 décembre 2017  [229] ; elle entre en vigueur le 21 janvier 2018.

7.3. Le positionnement de la société civile

177La mobilisation de la société civile à l’encontre de la loi du 21 décembre 2017 est moins intense que celle qui s’était développée en un « front peu commun » lors du processus législatif ayant conduit à l’adoption de la loi du 17 mars 2013. Néanmoins, cela ne signifie pas que cette évolution législative a fait consensus au sein de la société civile et plusieurs types d’acteurs ont pris publiquement position afin de faire part de leurs inquiétudes quant au texte en cours d’adoption. Parmi ceux-ci, relevons l’Ordre des barreaux francophones et germanophone (Avocats.be)  [230].

178Dans une note rédigée le 6 novembre 2017 par Cédric Bernes, avocat au barreau de Namur et membre de la commission pénale d’Avocats.be, l’Ordre des barreaux francophones et germanophone fait savoir d’initiative à la commission de la Justice de la Chambre des représentants qu’il est totalement opposé à la possibilité de prévoir une période de sûreté  [231]. Rappelant que l’octroi d’une libération conditionnelle s’effectue dans la plupart des cas bien après le moment auquel une libération conditionnelle est légalement possible, il considère notamment que fixer un temps minimal d’emprisonnement au moment du prononcé de la décision concourt à multiplier les risques pour les détenus, pour les agents pénitentiaires mais aussi pour la société dans sa globalité. En effet, cela réduit l’espoir des détenus et, en conséquence, accroît leur dangerosité. Par ailleurs, toujours selon Avocats.be, cela diminue les perspectives de réinsertion des condamnés pour au moins deux raisons. D’une part, il est jugé probable que certains détenus préfèrent désormais purger la totalité de leur peine pour éviter d’être soumis à un ensemble de conditions pendant une période déterminée. D’autre part, en augmentant le seuil à partir duquel un détenu peut être éligible à la libération conditionnelle, le délai d’épreuve pendant lequel le condamné libéré est contrôlé se trouve réduit. Enfin, Avocats.be considère que le projet de loi instaure une entorse aux prérogatives du TAP.

179La LDH s’oppose à plusieurs reprises à l’instauration de périodes de sûreté. Dès la déclaration de politique générale prononcée par C. Michel en 2014, elle fait part de ses inquiétudes à l’égard de cette mesure. En outre, de concert avec le Syndicat des avocats pour la démocratie (SAD), elle introduit un recours en annulation des articles 2 à 5 de la loi du 21 décembre 2017 (qui organisent cette période de sûreté) devant la Cour constitutionnelle. La requête parvient au greffe de la Cour le 12 juillet 2018  [232] et sa notification est publiée au Moniteur belge le 3 septembre 2018. La Cour constitutionnelle rejette ce recours dans un arrêt rendu le 19 novembre 2020  [233].

7.4. Les principales modifications apportées par la loi du 21 décembre 2017 sur le plan juridique

180Comme cela a été indiqué, le mécanisme de la période de sûreté a été introduit en 2017 par le législateur, par le biais de l’adoption de la loi du 21 décembre 2017 modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté et modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive en ce qui concerne l’arrestation immédiate.

181L’effet de cette réforme est de faire obstacle à l’introduction d’une demande de libération conditionnelle. Il s’agit d’un mécanisme nouveau, inconnu auparavant du droit belge. Ce mécanisme ne doit pas être confondu avec la mesure de mise à la disposition du gouvernement, devenue mise à la disposition du TAP  [234] : « La mise à disposition est une peine complémentaire qui vient s’ajouter à la peine principale lorsque celle-ci arrive à échéance. Elle vient donc en complément à la peine principale et s’adresse principalement aux “auteurs d’infractions qui représentent une menace importante et durable pour la société”. Cette mesure permet de maintenir un condamné en détention alors que celui-ci a entièrement purgé sa peine »  [235]. Toutefois, une mesure de mise à disposition ne fait pas obstacle à ce qu’une mesure de libération conditionnelle soit sollicitée et, le cas échéant, accordée. Par exemple, M. Dutroux, dont la condamnation à une peine de réclusion à perpétuité a été assortie d’une peine de mise à disposition d’une durée de 10 ans, a entamé au début des années 2010 des démarches en ce sens, démarches qu’il a poursuivies plus récemment, accompagné par son avocat Bruno Dayez. À travers notamment la publication d’un livre  [236], ce dernier a, à cette occasion, souhaité susciter dans la société belge un débat, à partir du cas de son client, sur le sens de la peine et les conditions d’incarcération.

182La mesure de mise à la disposition du TAP diffère ainsi du mécanisme de la période de sûreté introduit en 2017 : selon celui-ci, le juge qui prononce la condamnation peut, dans certaines conditions, assortir la peine de privation de liberté qu’il prononce d’une période durant laquelle elle ne pourra pas faire l’objet d’un aménagement prenant la forme d’une libération conditionnelle. La loi instaure ainsi une sorte de concurrence implicite entre les compétences du juge pénal qui prononce une condamnation et le TAP, en accordant au juge du fond le droit de prévoir, dans certains cas, qu’une partie de la peine d’emprisonnement qu’il prononce soit incompressible. Sur le plan technique, cela a pris la forme d’une modification apportée par la loi du 21 décembre 2017 aux articles 25 et 26 de la loi du 17 mai 2006 sur le statut externe des détenus, dans lesquels sont énoncés les modes de calcul de la date d’admissibilité à la libération conditionnelle.

183Deux cas de figure ont été envisagés par le législateur. D’une part, la situation dans laquelle une personne a été condamnée à une peine privative de liberté dont la partie à exécuter s’élève à plus de 3 ans et à moins de 30 ans. Seules certaines infractions pénales, limitativement énumérées, peuvent déboucher sur la prononciation d’une telle période de sûreté : les crimes et délits contre la sûreté de l’État ; les violations graves du droit international humanitaire ; les infractions terroristes ; le viol ou l’attentat à la pudeur ayant entraîné la mort ; l’assassinat d’un policier en raison de sa qualité ; les faits de torture ayant entraîné la mort sans intention de la donner ; l’enlèvement ou la détention de mineurs ayant entraîné la mort. Dans ce cas, le juge du fond peut décider, au moment où il prononce la condamnation, que la personne condamnée ne pourra bénéficier d’une libération conditionnelle qu’après avoir purgé entre un tiers et deux tiers de sa peine. D’autre part, lorsqu’une personne a été condamnée à une peine privative de liberté de 30 ans ou plus ou à perpétuité, quelle que soit la nature des faits commis, le juge du fond est autorisé à fixer une période de sûreté, durant laquelle une mesure de libération conditionnelle ne pourra pas être accordée, d’une durée se situant entre 15 et 25 ans.

184Dans le cadre de la première hypothèse envisagée par le législateur, les infractions visées, cela a été noté, sont limitativement énumérées. Les choix opérés font l’objet de critiques de la part de la doctrine juridique. Certaines infractions sont visées, d’autres non, sans que le législateur se soit expliqué suffisamment à cet égard dans les travaux préparatoires, ce qui crée des incohérences et est source, potentiellement, de discriminations entre différentes catégories de personnes, plaide ainsi un auteur  [237] qui s’appuie notamment sur l’avis rendu par la section de législation du Conseil d’État  [238].

185Si les conditions légales sont rencontrées, le juge qui prononce la condamnation à une peine privative de liberté – qui peut être soit le tribunal correctionnel, soit la cour d’assises – peut assortir celle-ci d’une période de sûreté de manière quasi souveraine, même si un certain nombre de balises entourent inévitablement le pouvoir ainsi conféré au juge pénal, qui est tenu constitutionnellement de motiver sa décision : « Le législateur a entendu reconnaître aux juges le pouvoir d’apprécier souverainement non seulement l’opportunité d’assortir certaines peines privatives de liberté d’une période de sûreté mais également d’en déterminer la durée dans les limites fixées par la loi. La période de sûreté étant toujours facultative, les cours et tribunaux se voient reconnaître un pouvoir d’appréciation quant à l’opportunité de la prononcer. Ils détermineront leur décision sur la base des circonstances concrètes de la cause, qui sont qualifiées de “spécificités du dossier”, et de la personnalité de la personne condamnée. Le Conseil d’État [insiste] sur les critères de la gravité de l’infraction, de l’attitude et de la personnalité du condamné au moment des faits et du danger que celui-ci est réputé représenter pour la société »  [239].

186Les différentes hypothèses envisagées par la loi du 21 décembre 2017 reposaient sur le droit pénal existant à l’époque, qui avait notamment fait l’objet de plusieurs modifications substantielles à la suite de l’adoption de la loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions diverses en matière de justice (dite loi « pot-pourri II »)  [240]. Ironie du sort, le jour même où la loi instaurant une période de sûreté était promulguée, la Cour constitutionnelle rendait un arrêt  [241] par lequel elle annulait certaines dispositions contenues dans la loi « pot-pourri II », privant ainsi de son objet, par ricochet en quelque sorte, une partie de la réforme de 2017  [242].

187La nature juridique de la période de sûreté a été controversée. S’agit-il d’une mesure liée à l’exécution de la peine, qui ne pourra plus être modalisée que dans une certaine mesure uniquement par le TAP ? Ou s’agit-il d’une mesure qui affecte la peine elle-même, qui participe à sa sévérité ? La position du ministre de la Justice, K. Geens, a elle-même évolué : alors qu’il en faisait initialement, dans l’exposé des motifs du projet de loi, un élément de gravité de la peine  [243], il a affirmé par la suite, durant les travaux parlementaires, qu’il s’agissait d’une modalité d’exécution de la peine  [244]. La doctrine juridique a semblé considérer que la période de sûreté éventuellement prononcée par le juge du fond était un élément constitutif de la peine  [245]. Quant à elle, la jurisprudence s’est avérée plus divisée sur cette question  [246]. La Cour constitutionnelle a finalement eu l’occasion de se pencher sur cette question dans son arrêt rendu dans le cadre de l’affaire introduite conjointement par la LDH et le SAD (cf. supra). Elle a ainsi pu préciser que la période de sûreté, si elle ne constitue pas une nouvelle peine, n’en fait pas moins partie intégrante de la peine prononcée par le juge du fond et ne constitue pas « une mesure relevant de son application »  [247].

188Plus généralement, les juristes qui ont publié sur ce sujet ne semblent pas convaincus par le choix posé par le législateur d’insérer dans le droit pénal le mécanisme de la période de sûreté, faisant leurs certains arguments mis en avant par des acteurs inscrits dans la société civile (cf. supra). Aux yeux d’un certain nombre d’auteurs, le TAP semble en effet le mieux à même de déterminer si le trajet spécifique d’un individu condamné à une peine privative de liberté justifie que lui soit accordée une libération conditionnelle. Selon ces auteurs, on peut notamment craindre certains effets contre-productifs qui pourraient découler de cette législation. D’une part, une telle situation pourrait être génératrice de frustration dans le chef d’une personne à qui a été ôté tout espoir de voir sa condition améliorée à moyenne échéance, et potentiellement source de violence : « Le condamné à une période de sûreté, surtout si elle est de longue durée, risque de nourrir un sentiment de colère, de frustration, de rejet de la société libre face à ce qu’il ressentira comme une négation de sa part d’humanité et de ses capacités d’amendement », car « seule l’exécution modulable de la peine laisse place à l’espoir, à la rédemption »  [248]. D’autre part, on pourrait craindre que les risques de récidive, plutôt que d’être amenuisés, soient augmentés par la réforme, critique qui avait déjà été émise en 2013 par une partie de la doctrine. En effet, ne pouvant plus espérer obtenir une mesure de libération conditionnelle, les détenus seront incités à aller « à fond de peine »  [249]. À leur sortie, aucune mesure d’accompagnement ne sera dès lors prise à leur égard. À la lecture des rapports annuels que rend la Direction générale des Établissements pénitentiaires du SPF Justice, on observe que de moins en moins de libérations conditionnelles sont octroyées. De 2000 à 2017, le nombre de libérations conditionnelles accordées à travers le pays est en effet assez stable, alors que le nombre de personnes condamnées à une peine privative de liberté est, quant à lui, « en constante augmentation ([il] a augmenté de 31,7 % entre les années 2000 et 2015) »  [250]. Une telle situation pose problème quant à la question de la réinsertion des condamnés, qui ne font plus l’objet d’une surveillance et d’un accompagnement par le parquet et les assistants de justice. Cela est d’autant plus notable que l’efficacité de la libération conditionnelle a été prouvée : le taux de réussite d’une mesure de libération conditionnelle a été de 54,4 % en 2010, de 56,1 % en 2011, de 53,0 % en 2012, de 60,0 % en 2013 et de 62,0 % en 2014  [251].

189Comme le résume Jean-François Funck, juge au TAP de Bruxelles et assistant à l’UCLouvain, l’adoption de la loi du 21 décembre 2017 instaurant une période de sûreté semble reposer sur une triple méfiance : « Méfiance à l’égard de l’auteur, dont le juge du fond décidera, de manière péremptoire, qu’il n’est pas capable d’évoluer avant une longue période. Méfiance à l’égard du TAP et des décisions qu’il pourrait prendre. Méfiance à l’égard du système de la libération conditionnelle, alors qu’il est le mécanisme le plus adapté pour concilier les fonctions de sanction et de réinsertion de la peine »  [252].

8. L’automne 2019 : une fenêtre d’opportunité pour une nouvelle réforme de la libération conditionnelle ?

190À l’exception de la loi du 21 décembre 2017 instaurant une période de sûreté, chaque évolution législative en matière de libération conditionnelle depuis près de trente ans est liée à l’affaire Dutroux et à ses conséquences. Si les réformes de 1998 et de 2006 découlent des recommandations formulées par la commission d’enquête parlementaire créée à l’époque, la réforme de 2013 est adoptée dans l’urgence, alors que M. Martin a récemment obtenu une libération conditionnelle et alors que M. Dutroux envisage d’introduire une demande de libération conditionnelle (cf. supra).

191L’affaire Dutroux est donc un épisode fondamental à cerner pour comprendre l’évolution du système de libération conditionnelle en Belgique. Néanmoins, cette affaire ne se limite pas aux moments précités. Les demandes de libération conditionnelle successives des différents protagonistes de cette affaire contribuent à réactiver les demandes d’une partie de l’opinion publique afin de restreindre davantage les possibilités de libération conditionnelle pour les détenus. Deux événements majeurs se produisant en 2019 sont ainsi susceptibles de remettre la question de la libération conditionnelle à l’agenda médiatique et politique : l’octroi d’une libération conditionnelle à M. Lelièvre et la décision de lancer une nouvelle expertise psychiatrique de M. Dutroux dans la perspective d’une libération conditionnelle future.

192Alors que M. Lelièvre – ancien complice de M. Dutroux – est incarcéré depuis le 13 août 1996 et alors que la fin de sa peine est prévue le 4 octobre 2023, il quitte la prison d’Ittre pour la première fois en mars 2018, dans le cadre d’un congé pénitentiaire pour une durée maximale de 16 heures. Cette autorisation de sortie est renouvelée à plusieurs reprises afin que le condamné puisse préparer sa libération. Une demande de surveillance électronique est introduite en septembre 2018. Néanmoins, suite à la perte du logement dans lequel M. Lelièvre envisageait de s’installer, la demande est rejetée par le TAP. Mais le 17 septembre 2019, et alors que le directeur de la prison d’Ittre a émis durant l’été un avis favorable à sa libération, le TAP de Bruxelles est appelé à statuer sur une demande de libération conditionnelle du condamné. Bien que le ministère public ait quant à lui remis un avis défavorable à sa libération, le 30 septembre, le TAP de Bruxelles décide de libérer M. Lelièvre sous conditions. Le 2 décembre, M. Lelièvre est effectivement libéré conditionnellement.

193Les réactions d’une partie de l’opinion publique sont particulièrement vives à cette occasion. Ainsi, le 18 décembre 2019, M. Lelièvre est agressé à son domicile, à Anderlecht, et son appartement est saccagé  [253]. Un logement temporaire lui est trouvé par le TAP. Rapidement, un groupe Facebook rassemblant entre 700 et 800 internautes est créé afin d’organiser la traque de M. Lelièvre.

194Deux mois plus tôt, le 17 octobre 2019, le TAP de Bruxelles tenait une audience dans le cadre de la procédure de demande de libération conditionnelle de M. Dutroux. À cette occasion, les avocats de M. Dutroux ont sollicité la désignation d’un collège d’experts chargés de dresser un profil psychiatrique du condamné afin « d’éclairer le tribunal de l’application des peines sur la question de sa dangerosité »  [254]. Alors que le ministère public y est favorable – les dernières expertises psychiatriques ayant été menées en 2013 et 2015 –, le TAP de Bruxelles accède à la demande des avocats de M. Dutroux le 28 octobre et ordonne une nouvelle expertise psychiatrique. Trois psychiatres sont nommés par le TAP. Si les résultats de l’expertise sont initialement attendus pour le 11 mai 2019 au plus tard, les psychiatres demandent le report de cette échéance dès le 5 mai afin de compléter leur travail par des tests psychologiques  [255]. Le TAP accède à cette demande, sans fixer de nouvelle échéance. C’est finalement le 9 septembre 2020 que le rapport est remis. Long d’une nonantaine de pages, ce rapport conclut à un risque de récidive élevé de la part de M. Dutroux, décrivant son profil comme étant psychopathique. En conséquence, l’avocat de M. Dutroux informe que sa demande de libération conditionnelle est « mise en pause à court et moyen terme »  [256].

195Ces deux événements contribuent à replacer la question de la libération conditionnelle au cœur de l’agenda médiatique. En conséquence, une « marche noire » est organisée à Bruxelles le 20 octobre 2019 afin de protester contre une potentielle libération conditionnelle de M. Dutroux dans le futur et contre la libération conditionnelle de M. Lelièvre déjà décidée par le TAP de Bruxelles  [257]. Plus fondamentalement, à travers cette manifestation, les organisateurs souhaitent exhorter le Parlement fédéral à adopter une « loi des anges » instaurant des peines incompressibles pour les délits sexuels contre mineurs. Alors que près de 350 000 personnes étaient rassemblées à Bruxelles le 20 octobre 1996 lors de la « marche blanche » et alors que plusieurs milliers de personnes sont attendus pour cette « marche noire »  [258], seuls 400 participants habillés de noir prennent part à cette manifestation du 20 octobre 2019.

196Même si la question de la libération conditionnelle et des peines incompressibles est à l’agenda médiatique à l’automne 2019, elle ne parvient pas à se hisser à l’agenda politique. Cela peut notamment s’expliquer par la crise politique dans laquelle est plongé le pays depuis décembre 2018. Alors que le gouvernement fédéral est minoritaire depuis le 9 décembre 2018 et alors qu’il est en affaires courantes depuis le 21 décembre 2018, les élections fédérales du 26 mai 2019 n’ont pas encore permis de dégager un accord de majorité à ce moment  [259]. Si certains percevaient ce moment comme idéal pour engranger de nouvelles réformes en la matière, la fenêtre d’opportunité alors ouverte s’est ainsi vite refermée.

Conclusion

197L’instauration du mécanisme de la libération conditionnelle dénote, dès ses origines, une nouvelle conception de la relation entre le condamné et la société. La logique de défense sociale qui sous-tend cette réforme a partie liée avec l’idée d’un amendement possible pour un certain nombre de délinquants, qui sont en mesure de profiter de la période de détention pour se repentir et préparer leur retour à la vie régulière, et, corrélativement, avec l’idée que la société doit être protégée d’un certain nombre de délinquants jugés « irrécupérables ». La libération conditionnelle est alors considérée comme une faveur et le pouvoir de décision en la matière se situe dans le giron du pouvoir exécutif, qui agit de manière discrétionnaire, ce qui conduit dans certains cas à une forme d’arbitraire.

198Progressivement, suite à la montée en puissance des droits humains dans le cours du XXe siècle, émerge une autre conception selon laquelle la libération conditionnelle, comme les autres mesures d’exécution des peines, doit être encadrée juridiquement et soumise au contrôle du pouvoir judiciaire  [260]. La liberté d’aller et venir dont sont privées les personnes condamnées constitue en effet une liberté fondamentale et devrait, à ce titre, faire l’objet d’un strict contrôle de légalité. Dans une telle optique, sont exigés un encadrement de la procédure et une judiciarisation du pouvoir de décision – ou, à tout le moins, l’instauration d’un recours effectif pouvant être activé par les personnes condamnées – permettant un contrôle plus circonstancié, mais aussi plus individualisé de chaque dossier.

199Malgré certaines propositions de réformes formulées après la Seconde Guerre mondiale, les choses ne progressent pas. Parallèlement, l’opinion publique est périodiquement marquée par des événements traumatisants, dont certains impliquent des personnes ayant bénéficié d’une modalité de mise en liberté provisoire ou anticipée, telle une mesure de libération conditionnelle. Un point culminant est atteint lors de l’affaire Dutroux, qui révèle un certain nombre de « dysfonctionnements » de la justice et de la police, selon la formule alors consacrée, notamment à la suite des travaux de la commission d’enquête parlementaire mise en place au sein de la Chambre des représentants.

200Cette affaire, dans laquelle peut être vue une sorte d’accélérateur de réformes  [261], s’avère fondamentale pour saisir l’inscription socio-politique des réformes de la libération conditionnelle qui débutent à la fin des années 1990. Une judiciarisation de ce domaine du droit intervient, en deux temps, avec la création des commissions de libération conditionnelle en 1998 et des tribunaux de l’application des peines (TAP) en 2006. Les décideurs politiques font ainsi écho aux demandes émanant de la société civile visant à un encadrement de la procédure d’octroi des mesures de libération conditionnelle. La place des victimes à toutes les étapes de la procédure pénale est également mieux assurée. À ce moment, la demande d’instauration de peines incompressibles avancée par une partie de l’opinion publique et certains partis politiques n’est pas concrétisée. En 1998, « le législateur n’a pas cherché à adopter des lois plus répressives dans la foulée de ce drame. Il a au contraire voté des lois qui sont venues concrétiser une partie d’une réforme en cours de réflexion visant à la légalisation et à la judiciarisation de l’exécution des peines privatives de liberté »  [262]. De la même manière, en 2005 et en 2006, l’adoption des lois pénitentiaires régissant les statuts interne et externe des détenus procède « d’une volonté politique de réformer la matière indépendamment de l’émotion suscitée par des affaires singulières »  [263].

201Une seconde phase s’enclenche alors – qui transcende d’ailleurs les frontières de la Belgique, et correspond à ce que le sociologue français Didier Fassin appelle un « moment punitif »  [264] –, durant laquelle l’accès à la libération conditionnelle est rendu plus difficile pour certaines catégories de détenus. La réforme de 2013, qui s’en tient au niveau de l’exécution des peines, joue sur les seuils d’admissibilité et la durée du délai d’épreuve, ainsi que sur la composition du TAP et la procédure devant celui-ci. En 2017, l’instauration du mécanisme de la période de sûreté renforce cette attitude de méfiance à l’égard du TAP. Le législateur établit alors une sorte de concurrence implicite entre le juge du fond et celui de l’exécution des peines. En effet, c’est au moment de la prononciation de la peine que le juge pénal peut assortir, dans certains cas, la peine de privation de liberté qu’il prononce d’une période de sûreté durant laquelle aucune mesure de libération conditionnelle ne pourra être accordée. Cette défiance vis-à-vis du TAP s’explique d’autant plus difficilement que cette juridiction s’avère relativement sévère, comme le démontrent des données chiffrées publiées par le SPF Justice.

202Les effets de cette seconde phase ne tardent pas à se faire sentir. En particulier, le taux des condamnés qui vont « à fond de peine » augmente de façon sensible. Comme le rappelle Christine Guillain, qui cite des chiffres rendus publics par la Direction générale des Établissements pénitentiaires du SPF Justice, on observe que, durant une période de référence de « dix ans (2007-2017), les condamnés allant jusqu’à la fin de leur peine, sont passés de 420 à 812, soit une augmentation de près de 100 % »  [265]. Les conditions pour pouvoir bénéficier d’une libération anticipée se durcissant, les détenus sont en effet bien souvent amenés à purger la totalité de leur peine, ce qui les conduit à bénéficier d’un régime de liberté plein et entier à leur sortie. La conséquence principale de cette situation est la suivante : alors que l’objectif constant poursuivi par le législateur est la diminution du risque de récidive, celui-ci se trouve au contraire accru, les mesures d’accompagnement dont bénéficient les condamnés en libération conditionnelle n’étant pas applicables à ceux qui, découragés ou mal informés, font le choix de ne pas solliciter un tel aménagement de leur peine privative de liberté.

203L’analyse de cette matière fait ainsi apparaître une profonde ambivalence. D’un côté, le législateur a fait le choix d’encadrer le domaine de l’exécution des peines, et notamment la compétence en matière de libération conditionnelle, afin que chaque décision prise le soit par des professionnels – qu’ils soient magistrats ou experts en matière pénitentiaire ou en réinsertion sociale –, en connaissance de cause et dans le respect d’un certain nombre de balises légales et procédurales. De l’autre côté, ce même législateur semble céder, de l’avis de certains observateurs, à une sorte de tentation voire de « passion » répressive, le conduisant à durcir le droit pénal et le droit pénitentiaire  [266], en tout cas vis-à-vis de certaines catégories de délinquants et de détenus. Des partis politiques expriment ainsi fréquemment leur profonde méfiance vis-à-vis des possibilités de réinsertion sociale des délinquants, et les politiques publiques, dans le domaine pénal et carcéral, sont périodiquement affectées par une hyperréactivité aux risques – cette notion de « risque » ayant d’ailleurs pu être considérée, plus généralement, comme un nouveau paradigme de nos sociétés contemporaines  [267].

204Le travail législatif semble ainsi naviguer entre, d’une part, une œuvre de consolidation des principes régissant ce domaine du droit qui fait l’objet d’un encadrement et d’une institutionnalisation croissants, et ce afin de lutter contre une tendance à l’insécurité juridique qui le marquait précédemment (et qui continue à le marquer dans une certaine mesure, malgré les réformes), et, d’autre part, une propension à adopter des législations restrictives, qu’elles soient ou non de circonstance, qui viennent déséquilibrer cet édifice et jeter la suspicion sur les acteurs de terrain.

205De telles évolutions ont suscité des inquiétudes. Des auteurs, à l’instar de divers membres de la société civile, commentant des législations amenuisant le principe d’individualisation des peines, ont même évoqué à ce propos un « recul de civilisation »  [268]. Si un tel diagnostic a été posé par référence à des réformes touchant le droit pénal matériel et procédural lui-même, et en particulier la loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions diverses en matière de justice (dite loi pot-pourri II), il semble pouvoir être transposé au domaine de l’exécution des peines. En effet, il affecte certaines évolutions non seulement en droit pénal mais aussi en droit pénitentiaire, comme ce Courrier hebdomadaire a pu le rappeler. C’est ainsi que la loi du 17 mars 2013, prise à la suite de la libération conditionnelle accordée à M. Martin par le TAP de Mons, a pu être perçue comme un exemple particulièrement parlant de « populisme pénal »  [269]. À cette occasion, le législateur n’a pas jugé utile de prendre du recul par rapport à une émotion qui avait émergé dans une partie de l’opinion publique  [270]. Il n’a pas davantage choisi la voie de la pédagogie  [271], ce qui aurait pu le conduire à expliquer que, contrairement à une croyance répandue, la libération conditionnelle n’est pas une remise de peine, mais une autre façon de l’exécuter, dont l’efficacité sur le plan de la prévention de la récidive a d’ailleurs été prouvée. En 2017, l’instauration du mécanisme de la période de sûreté, si elle n’a pas été suscitée par un événement traumatisant l’opinion, a également été perçue comme participant à ce mouvement d’érosion d’un certain nombre de principes régulateurs du droit pénal et du droit pénitentiaire.

206Durant la présente législature fédérale (55e), le processus de judiciarisation du domaine de l’exécution des peines devrait en principe franchir une étape supplémentaire, avec la judiciarisation de l’exécution des peines jusqu’à trois ans, qui serait enfin confiée au juge de l’application des peines (JAP). Il n’y a pas lieu de croire qu’un durcissement supplémentaire des conditions pour pouvoir accéder à une mesure de libération conditionnelle sera par ailleurs mis en œuvre par le gouvernement dirigé par Alexander De Croo (Open VLD). Outre qu’une réforme précise à ce sujet n’est évoquée ni dans l’accord de gouvernement ni dans l’exposé de politique générale du nouveau ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne (Open VLD), la coalition dite Vivaldi (PS/MR/Écolo/CD&V/Open VLD/SP.A/Groen) comprend un certain nombre de partis, appartenant aux familles socialiste et écologiste, qui ne sont pas favorables à une telle évolution. Toutefois, on sait d’expérience que les décisions en la matière peuvent être fortement influencées par des événements dramatiques, dont il est bien sûr impossible de prédire la survenance prochaine ni la mesure dans laquelle ils pourraient influencer, le cas échéant, les politiques publiques dans le domaine du droit pénal et du droit de l’exécution des peines.

Notes

  • [1]
    N. Schiffino, Crises politiques et démocratie en Belgique, Paris, L’Harmattan, 2003.
  • [2]
    L’expression « opinion publique » peut être définie comme « l’ensemble des croyances et idées qui caractériseraient une population donnée ». Néanmoins, il s’agit d’une notion polysémique et dont les contours précis sont sujets à débat. Le recours à la notion d’opinion publique appelle donc à la prudence. Cf. B. Biard, L’influence des partis populistes de droite radicale sur la fabrique des politiques publiques en démocratie. Étude comparée des cas suisse, français et belge, Thèse de doctorat en sciences politiques, UCLouvain, 2019, p. 60.
  • [3]
    L’emploi du terme « peine », que l’on retrouve fréquemment dans ce Courrier hebdomadaire, peut en réalité renvoyer, concrètement, à différentes « peines » auxquelles une même personne a été condamnée. En effet, nombreux sont les condamnés qui doivent exécuter plusieurs peines concomitamment. Pour la facilité du lecteur, le choix a été fait d’employer le terme « peine » uniquement au singulier.
  • [4]
    C. Adam, J.-F. Cauchie, M.-S. Devresse, F. Digneffe, D. Kaminski, Crime, justice et lieux communs. Une introduction à la criminologie, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 179-202.
  • [5]
    P. Mary, « La politique pénitentiaire », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2137, 2012, p. 10 ; l’auteur se réfère à H. Jaspar, « Jules Le Jeune et son œuvre de législation criminelle », Revue de droit pénal et de criminologie, 1911, p. 257-269 et à H. Jaspar, « L’œuvre de M. Jules Le Jeune », Revue de droit pénal et de criminologie, 1909, p. 1083-1084.
  • [6]
    Moniteur belge, 3 juin 1888.
  • [7]
    Arrêté royal du 1er août 1888 contenant les mesures d’exécution de la loi du 31 mai 1888, Moniteur belge, 8 août 1888.
  • [8]
    Par souci d’exactitude, c’est bien cette appellation de « loi Le Jeune » que nous emploierons dans ce Courrier hebdomadaire.
  • [9]
    Comme cela sera exposé infra, la loi du 4 mars 1870 relative à la réduction des peines sous le régime de la séparation (Moniteur belge, 10 mai 1870) avait déjà organisé un système de réduction de peine automatique pour certaines catégories de détenus.
  • [10]
    Cf. X. Mabille, Nouvelle histoire politique de la Belgique, Bruxelles, CRISP, 2011, p. 158-161.
  • [11]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle : une réforme opportune ? », Annales de droit de Louvain, 2013, n° 2, p. 202.
  • [12]
    J. Lefèvre, « 1886, première grande révolte ouvrière en Belgique », Solidaire, 17 mars 2016, www.solidaire.org.
  • [13]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 202. Cf. également cette publication à laquelle ces auteures se réfèrent : S. Christiaensens, « De zaak Falleur & co: de opmerkelijke aanleiding tot de “wet Lejeune”. Hoe politieke opportunismen het crimineel beleid beïnvloeden », Panopticon. Tijdschrift voor Strafrecht, Criminologie en Forensisch welzijnswerk, 1997, p. 511.
  • [14]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 202, note 9.
  • [15]
    P. Aron, « Du fait divers médiatique à la littérature judiciaire : l’affaire Vandersmissen », in G. Pinson (dir.), Presse, prostitution, bas-fonds (1830-1930), Québec, Université Laval, 2013, www.medias19.org.
  • [16]
    À cette époque, le ministre de la Justice dispose de la possibilité d’accorder une mesure de libération conditionnelle quelle que soit la proportion de la peine privative de liberté déjà effectuée. Par la suite, des seuils seront instaurés en deçà desquels des aménagements de peines ne pourront pas être octroyés.
  • [17]
    L. Aubert, P. Mary, « Chronique de criminologie. La fabrique de la récidive », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, n° 2, 2014, p. 439 et suivantes ; P. Mary, F. Bartholeyns, J. Béghin, « La prison en Belgique : de l’institution totale aux droits des détenus ? », Déviance et Société, volume 30, n° 3, 2006, p. 399.
  • [18]
    Y. Cartuyvels, G. Cliquennois, « La défense sociale pour les aliénés délinquants en Belgique : le soin comme légitimation d’un dispositif de contrôle ? », Champ pénal/Penal field en ligne, volume 12, 2015, p. 3, https://journals.openedition.org.
  • [19]
    Ibidem.
  • [20]
    Ibidem, p. 3-4.
  • [21]
    Cf. M.-S. Dupont-Bouchat, « Ducpétiaux ou le rêve cellulaire », Déviance et société, volume 12, n° 1, 1988, p. 1-27.
  • [22]
    P. Mary, « La politique pénitentiaire », op. cit., p. 10.
  • [23]
    M. van de Kerchove, « Les avatars de la loi belge de défense sociale : le changement dans la continuité », Déviance et Société, volume 34, n° 4, 2010, p. 485-502. Cf. aussi A. Prins, La défense sociale et les transformations du droit pénal, Bruxelles/Genève, Médecine et Hygiène, 1986 ; F. Tulkens, « Un chapitre de l’histoire des réformateurs. Adolphe Prins et la défense sociale », in F. Tulkens (dir.), Généalogie de la défense sociale en Belgique (1880-1914), Bruxelles, Story-Scientia, 1988, p. 17-46.
  • [24]
    M. van de Kerchove, « Les avatars de la loi belge de défense sociale », op. cit., p. 485.
  • [25]
    P. Mary, « La politique pénitentiaire », op. cit., p. 10-11.
  • [26]
    Ibidem, p. 9-10.
  • [27]
    Ibidem, p. 10.
  • [28]
    Dont la plus connue est la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude (Moniteur belge, 11 mai 1930) : cf. infra.
  • [29]
    M. van de Kerchove, Quand dire, c’est punir. Essai sur le jugement pénal, Bruxelles, Presses de l’Université Saint-Louis, 2005, p. 87-88.
  • [30]
    Ibidem, p. 86-87.
  • [31]
    Moniteur belge, 17 juillet 1964.
  • [32]
    A. Prins, « La loi sur la libération conditionnelle et les condamnations conditionnelles », Journal des tribunaux, n° 582, 1889 (cité par O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées. Une immersion dans la fabrique législative et la pratique judiciaire du droit de l’exécution des peines privatives de liberté, Thèse de doctorat en sciences juridiques, USL-B, 2020, p. 57).
  • [33]
    Loi du 4 mars 1870 relative à la réduction des peines sous le régime de la séparation, Moniteur belge, 10 mai 1870.
  • [34]
    P. Mary, « La politique pénitentiaire », op. cit., p. 9.
  • [35]
    Ibidem ; O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 57.
  • [36]
    Ibidem, p. 249-253.
  • [37]
    Ibidem, p. 801.
  • [38]
    J. Bastard, Le travail de la décision. Les processus de l’application des peines en Belgique francophone, Thèse de doctorat en sciences politiques et sociales, ULiège, 2017, p. 43. Cf. aussi J. Bastard, « Les processus de l’application des peines en Belgique : temps légal et temps légitime des sorties anticipées de prison », Revue de droit pénal et de criminologie, n° 1, 2018, p. 41-68.
  • [39]
    Cf. le tableau proposé dans T. Slingeneyer, « Généalogie de la libération conditionnelle en Belgique. Analyse à partir du triptyque foucaldien du “savoir-pouvoir-sujet” », Revue interdisciplinaire d’études juridiques, volume 57, n° 2, 2006, p. 82. Pour être complet, il est également opportun de rappeler l’existence de l’arrêté royal du 17 janvier 1921 contenant les mesures d’exécution des dispositions de la loi du 31 mai 1888 modifiée par celles des 3 août 1899, 1er mai 1913 et 19 août 1920, concernant la libération conditionnelle des condamnés civils et militaires (Moniteur belge, 10 février 1921). Toutefois, ce texte ne constitue « qu’une exception apparente à ce calme plat puisqu’il est quasiment identique à l’arrêté royal du 1er août 1888. La seule différence entre ces deux arrêtés royaux est liée à l’application de la libération conditionnelle aux militaires » (T. Slingeneyer, « Généalogie de la libération conditionnelle en Belgique », op. cit., p. 81).
  • [40]
    M. van de Kerchove, « Les avatars de la loi belge de défense sociale », op. cit., p. 485.
  • [41]
    M. van de Kerchove, « L’organisation d’asiles spéciaux pour aliénés criminels et aliénés dangereux. Aux sources de la loi de défense sociale », in F. Tulkens (dir.), Généalogie de la défense sociale en Belgique (1880-1914), op. cit., p. 113-140.
  • [42]
    L. Aubert, P. Mary, « Chronique de criminologie », op. cit., p. 440.
  • [43]
    Moniteur belge, 17 juillet 1964.
  • [44]
    P. Mary, D. Kaminski, E. Maes, F. Vanhamme, « Le traitement de la “dangerosité” en Belgique : internement et mise à la disposition du gouvernement », Champ pénal/Penal field en ligne, volume 8, 2011, p. 13, https://journals.openedition.org.
  • [45]
    Cf. la loi du 26 avril 2007 relative à la mise à la disposition du tribunal de l’application des peines (Moniteur belge, 13 juillet 2007), entrée en vigueur le 1er février 2012. Cette réforme a rendu le TAP compétent pour prononcer une telle peine complémentaire. À cette occasion, « la liste des infractions qui sont susceptibles d’entraîner une mise à disposition a [également] été complétée. Cette peine doit être systématiquement prononcée pour les récidivistes (crime sur crime) ou les infractions qui ont entraîné la mort. Elle est par contre facultative pour les formes graves de criminalité (prise d’otage, viol, attentat à la pudeur, incendie volontaire, etc.). Les délinquants d’habitude ont, eux, été écartés du champ d’application de la loi, qui s’axe plus sur la répression des crimes et des délits en fonction, non plus de leur nombre, mais de leur caractère odieux ». Enfin, la durée maximale d’une peine de mise à la disposition du gouvernement est ramenée de 20 à 15 ans. Cf. F. Vansiliette, « La mise à disposition du tribunal d’application des peines : une réponse à la grande criminalité », Justice en ligne, 7 novembre 2012, www.justice-en-ligne.be.
  • [46]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 58 ; C. Eliaerts, « La révision de la loi sur la libération conditionnelle. Vers un droit de l’exécution des peines ? », Revue de droit pénal et de criminologie, n° 11, 1980, p. 915-930.
  • [47]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 59.
  • [48]
    Ibidem, p. 60 ; P. Mary, « La politique pénitentiaire », op. cit., p. 18.
  • [49]
    R. Legros, Avant-projet de Code pénal, Bruxelles, Moniteur belge, 1985. Cf. O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 68-78.
  • [50]
    B. Rihoux, S. Walgrave, « Disparitions d’enfants et Justice : émergence de nouveaux acteurs », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1590-1591, 1998, p. 7. Cf. aussi B. Rihoux, S. Walgrave, L’année blanche. Un million de citoyens blancs : Qui sont-ils ? Que veulent-ils ?, Bruxelles, EVO, 1997. Sur l’affaire Dutroux en général, cf. aussi Y. Cartuyvelset al., L’affaire Dutroux. La Belgique malade de son système, Bruxelles, Complexe, 1997.
  • [51]
    M.-S. Devresse, « Les aménagements de peine en Belgique. Aperçu des particularités d’un statut dit “externe” en constante évolution », Criminocorpus en ligne : L’aménagement des peines privatives de liberté : l’exécution de la peine autrement, Comparaisons internationales, 2013, p. 2, http://journals.openedition.org.
  • [52]
    L. Aubert, P. Mary, « Chronique de criminologie », op. cit., p. 440.
  • [53]
    Pour une analyse de ce procès et de certaines de ses implications socio-politiques, philosophiques ou encore psychologiques, cf. V. Magos (dir.), Procès Dutroux. Penser l’émotion, Bruxelles, Ministère de la Communauté française, Coordination de l’aide aux victimes de maltraitance, 2004.
  • [54]
    Cette appellation est retenue car l’accord est soutenu par huit partis : CVP, VLD, SP, PS, PRL, PSC, VU et FDF.
  • [55]
    L. Van Outrive, « La réforme des polices », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1580-1581, 1997.
  • [56]
    Loi du 12 mars 1998 relative à l’amélioration de la procédure pénale au stade de l’information et de l’instruction, Moniteur belge, 2 avril 1998. Ce texte est souvent qualifié de loi Franchimont, par référence à Michel Franchimont, président de la Commission pour le droit de la procédure pénale (cf. infra). Cf. D. Vandermeersch, O. Klees, « La réforme “Franchimont”. Commentaire de la loi du 12 mars 1998 relative à l’amélioration de la procédure pénale au stade de l’information et de l’instruction », Journal des tribunaux, n° 5886, 1998, p. 417-449.
  • [57]
    Cf. notamment M. van de Kerchove, « Les avatars de la loi belge de défense sociale », op. cit., p. 487.
  • [58]
    J. Commaille, À quoi nous sert le droit ?, Paris, Gallimard, 2015.
  • [59]
    Cour de cassation, 14 octobre 1996 (Pasicrisie, 1996, p. 918-921 ; Journal des procès, volume 313, 1996, p. 25).
  • [60]
    Cf. notamment B. Frydman, « La philosophie de l’arrêt Connerotte », Journal des Procès, volume 324, 1997, p. 10-14. Cf. aussi le débat, mené dans LaRevue interdisciplinaire d’études juridiques (USL-B), entre le même Benoît Frydman (ULB) et Fernand Tanghe (Université d’Anvers) : F. Tanghe, « 1. L’État de droit n’est pas la démocratie. Quelques réflexions à propos de l’arrêt-spaghetti » et B. Frydman, « 2. La démocratie en quête de principes », Revue interdisciplinaire d’études juridiques, volume 39, n° 2, 1997, respectivement p. 107-149 et 150-166.
  • [61]
    E. Lentzen, C. Panier, « La Justice dans la tourmente. Des pouvoirs et des faits », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1533, 1996, p. 23-24 ; B. Rihoux, S. Walgrave, L’année blanche, op. cit., p. 71-86.
  • [62]
    B. Rihoux, S. Walgrave, A.-P. Frognier, « Les mobilisations blanches : d’une crise de légitimité à l’émergence de nouveaux mouvements émotionnels ? », in J. Faniel, C. Gobin, D. Paternotte (dir.), Se mobiliser en Belgique. Raisons, cadres et formes de la contestation sociale contemporaine, Louvain-la-Neuve, Académia L’Harmattan, 2020, p. 63-81.
  • [63]
    Cette commission a été créée par un arrêté ministériel du 23 octobre 1991 (Moniteur belge, 1er novembre 1991).
  • [64]
    M. van de Kerchove, « Les mouvements législatifs consécutifs aux affaires de délinquance sexuelle », in C. Adam, D. de Fraene, P. Mary, C. Nagels, S. Smeets (dir.), Sexe et normes, Bruxelles, Bruylant, 2012, p. 19-33.
  • [65]
    B. Rihoux, S. Walgrave, A.-P. Frognier, « Les mobilisations blanches », op. cit.
  • [66]
    Chambre des représentants, Proposition visant à instaurer une commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner la manière dont l’enquête, dans ses volets policiers et judiciaires, a été menée dans “l’affaire Dutroux-Nihoul et consorts”, n° 713/1, 14 octobre 1996.
  • [67]
    La Libre Belgique, 30 novembre 1996.
  • [68]
    Ibidem.
  • [69]
    Chambre des représentants, Commission d’enquête, Enquête parlementaire sur la manière dont l’enquête, dans ses volets policiers et judiciaires, a été menée dans “l’affaire Dutroux-Nihoul et consorts”. Rapport, n° 713/6, 14 avril 1997, p. 150.
  • [70]
    Ibidem, p. 150.
  • [71]
    Ibidem, p. 183.
  • [72]
    Ibidem, p. 164.
  • [73]
    Entretien avec un parlementaire VB réalisé le 29 août 2017.
  • [74]
    Pour un éclairage plus philosophique de ce mode d’organisation de la justice, cf. B. Frydman, « Juge professionnel et juge citoyen. L’échevinage à la croisée de deux cultures judiciaires », in La participation du citoyen à l’administration de la justice. Actes du colloque organisé le 25 novembre 2005 à la Maison des Parlementaires à Bruxelles, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 13-29 ; V. Lefebve, « L’échevinage et la question du jugement. Approche philosophique d’un mode d’organisation de la justice », Justine, Association syndicale des magistrats, volume 45, 2017, p. 5-8.
  • [75]
    Sénat, Projet de loi instituant les commissions de libération conditionnelle, n° 589/1, 26 mars 1997.
  • [76]
    Chambre des représentants, Projet de loi relatif à la libération conditionnelle et modifiant la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude remplacée par la loi du 1er juillet 1964, n° 1070/1, 10 juin 1997.
  • [77]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, 15 janvier 1998, p. 7653.
  • [78]
    Ibidem, p. 7640.
  • [79]
    Qui forment un seul et unique groupe politique au sein de la Chambre des représentants.
  • [80]
    Ibidem, p. 7650.
  • [81]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, 19 février 1998, p. 4472.
  • [82]
    Le Soir, 20 février 1998.
  • [83]
    Moniteur belge, 2 avril 1998.
  • [84]
    Moniteur belge, 2 avril 1998.
  • [85]
    Pour une présentation détaillée des modifications introduites en 1998 concernant la libération conditionnelle, cf. P. Mary, « Les nouvelles lois sur la libération conditionnelle en Belgique », Revue de droit pénal et de criminologie, n° 7-8, 1998, p. 713-757.
  • [86]
    Dont sont membres le directeur de l’établissement pénitentiaire (qui la préside), un membre du service psycho-social de la prison, un agent pénitentiaire et un secrétaire.
  • [87]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 86.
  • [88]
    P. Mary, « Libération conditionnelle et gestion des risques : le cas des condamnés pour faits de mœurs en Belgique », Criminologie, volume 40, n° 2, 2007, p. 150.
    C. Adam, P. Mary, « La libération conditionnelle des auteurs d’infraction à caractère sexuel : les effets pervers d’une obsession », in C. Adam, D. De Fraene, P. Mary, C. Nagels, S. Smeets (dir.), Sexe et normes, op. cit., p. 276-277.
  • [89]
    Ibidem.
  • [90]
    Le lecteur pourra consulter le numéro que la Revue de la faculté de droit de l’ULB a consacré en 2005 à cette question : « Quelles places pour les victimes dans la justice pénale ? » (volume 31). Cf. en particulier les deux contributions suivantes : H. Tubex, « L’exécution de la peine privative de liberté à l’ombre des victimes : bilan de la brèche ouverte par la procédure de libération conditionnelle », p. 280-306 et M. Preumont, « La place de la victime dans la procédure pénale : d’un bout à l’autre de la chaîne », p. 123-160.
  • [91]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 238.
  • [92]
    Chambre des représentants, Projet de loi relatif à la libération conditionnelle et modifiant la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude remplacée par la loi du 1er juillet 1964, n° 1070/1, 10 juin 1997, p. 3.
  • [93]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 339. Cf. les articles 3, § 4, et 4, § 3 et § 8, de la loi du 5 mars 1998 relative à la libération conditionnelle.
  • [94]
    Article 12 de l’arrêté royal du 10 février 1999 portant des mesures d’exécution relatives à la libération conditionnelle (Moniteur belge, 23 février 1999).
  • [95]
    Ibidem.
  • [96]
    M.-S. Devresse, « Les aménagements de peine en Belgique », op. cit., p. 4 ; P. Mary, « Les nouvelles lois sur la libération conditionnelle en Belgique », op. cit.
  • [97]
    Moniteur belge, 5 mai 1999.
  • [98]
    Arrêté royal du 27 juin 2000 portant création d’une Commission “tribunaux de l’application des peines, statut juridique externe des détenus et fixation de la peine”, Moniteur belge, 13 juillet 2000.
  • [99]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 83.
  • [100]
    P. Mary, « La nouvelle loi pénitentiaire. Retour sur un processus de réforme (1996-2006) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1916, 2006, p. 19-32 ; G. Kellens, « Dynamique et lignes directrices des projets Dupont et Holsters », Journal des procès, n° 483, 2004, p. 17-19.
  • [101]
    Arrêté royal du 25 novembre 1997 portant création d’une Commission chargée de l’élaboration de la “loi de principe concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus”, Moniteur belge, 9 janvier 1998.
  • [102]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 79-80. Ces travaux mèneront à la constitution formelle de la commission Dupont, à l’automne 1997.
  • [103]
    Ibidem, p. 79-83 ; P. Mary, Enjeux contemporains de la prison, Bruxelles, Presses de l’Université Saint-Louis, 2013, p. 51-55.
  • [104]
    Arrêté royal du 10 février 2000 portant prolongation des travaux de la Commission chargée de l’élaboration de la “loi de principes concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus”, Moniteur belge, 29 février 2000. Cf. P. Mary, « La nouvelle loi pénitentiaire », op. cit., p. 22.
  • [105]
    Chambre des représentants, Proposition de loi de principes concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus, n° 1365/1, 17 juillet 2001.
  • [106]
    Moniteur belge, 1er février 2005.
  • [107]
    P. Mary, « La nouvelle loi pénitentiaire », op. cit.
  • [108]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 103.
  • [109]
    C. Regnier, La Constitution au fil de ses versions, Bruxelles, CRISP, 2019, p. 279.
  • [110]
    Chancellerie du Premier ministre, Direction générale Communication externe, « Accord de gouvernement du 8 juillet 2003. Une Belgique créative et solidaire », 12 juillet 2004.
  • [111]
    Contrairement au rapport rendu par la commission Dupont, qui a fait l’objet d’une publication dans les documents parlementaires (Chambre des représentants, Rapport final de la commission Dupont, 5 juillet 2000, n° 1076/1), le rapport rendu par la commission Holsters, qui lui a succédé, n’a pas été rendu public. Il a pourtant constitué une source d’inspiration pour le gouvernement fédéral au moment de rédiger les projets de loi qui aboutiront à l’adoption des deux lois du 17 mai 2006. Cf. O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 83.
  • [112]
    L. Nouwynck, « Le ministère public dans le projet “Holsters” : défis et changements », Journal des procès, n° 482, 2004, p. 28-29.
  • [113]
    « Note-cadre de sécurité intégrale », 30-31 mars 2004, p. 112, www.dsb-spc.be.
  • [114]
    Cf. Sénat, Projet de loi instaurant des tribunaux de l’application des peines. Avis du Conseil supérieur de la justice [du 23 février 2005], n° 1127/3, 14 juin 2005.
  • [115]
    Sénat, Projet de loi instaurant des tribunaux de l’application des peines, n° 1127/1, 20 avril 2005 ; Sénat, Projet de loi relatif au statut juridique externe des détenus, n° 1128/1, 20 avril 2005.
  • [116]
    Sur cette question, cf. O. Nederlandt, « La légalité en matière pénitentiaire : une illusion ? », in L. Detroux, M. El Berhoumi, B. Lombaert (dir.), La légalité : un principe de la démocratie belge en péril, Bruxelles, Larcier, 2019, p. 141-177.
  • [117]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant la loi du 5 mars 1998 relative à la libération conditionnelle et modifiant la loi du 9 avril 1930 de défense sociale à l’égard des anormaux et des délinquants d’habitude, remplacée par la loi du 1er juillet 1964 et modifiant le Code d’instruction criminelle, n° 1319/1, 26 août 2004.
  • [118]
    Loi du 17 mai 2006 instaurant des tribunaux de l’application des peines, Moniteur belge, 15 juin 2006 ; Loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, Moniteur belge, 15 juin 2006.
  • [119]
    Sénat, Annales parlementaires, 15 décembre 2005, p. 40.
  • [120]
    Dénommée Ligue des droits humains depuis le 26 mai 2018.
  • [121]
    Sénat, Projet de loi instaurant des tribunaux de l’application des peines. Avis du Conseil supérieur de la justice [du 23 février 2005], n° 1127/3, 14 juin 2005, p. 2.
  • [122]
    OIP, « Notice 2005 ».
  • [123]
    OIP, « Notice 2008 ».
  • [124]
    Article 76 du Code judiciaire.
  • [125]
    Article 78 du Code judiciaire. Cf. Y. Cartuyvels, C. Guillain, M. van de Kerchove, « Législation », in Chronique de droit pénal 2006-2010, Bruxelles, Larcier, 2011, p. 24 ; M. Clavie, « Le tribunal de l’application des peines : les quatre premières années de jurisprudence », Journal des tribunaux, n° 6439, 2011, p. 405-416.
  • [126]
    O. Michiels, G. Falque, « Les modalités d’exécution des peines privatives de liberté », in Principes de procédure pénale, Bruxelles, Larcier, 2019, p. 567-598.
  • [127]
    Y. Cartuyvels, C. Guillain, M. van de Kerchove, « Législation », op. cit., p. 24.
  • [128]
    Loi du 17 mai 2006 instaurant des tribunaux de l’application des peines, article 4.
  • [129]
    Ibidem, article 6.
  • [130]
    Ibidem, article 15.
  • [131]
    Ibidem, article 20. En 2018, une nouvelle forme de privation de liberté sera créée : le placement en maison de transition (cf. les articles 68 à 79 de la loi du 11 juillet 2018 portant des diverses dispositions en matière pénale, Moniteur belge, 18 juillet 2018).
  • [132]
    Loi du 17 mai 2006 instaurant des tribunaux de l’application des peines, article 21.
  • [133]
    Ibidem, article 22.
  • [134]
    Ibidem, article 25.
  • [135]
    Ibidem, article 26.
  • [136]
    Ibidem, article 72.
  • [137]
    Ibidem, article 81.
  • [138]
    Ibidem, article 87.
  • [139]
    R. Andersenet al., « Statut juridique externe des condamnés », in Répertoire pratique du droit belge. Complément 11, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 508.
  • [140]
    Y. Cartuyvels, C. Guillain, M. van de Kerchove, « Législation », op. cit., p. 24-25.
  • [141]
    O. Nederlandt, « Condamné à une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à trois ans, que va-t-il m’arriver ? », Justice en ligne, 3 janvier 2016, www.justice-en-ligne.be.
  • [142]
    Entrée en vigueur le 1er février 2007 (arrêté royal du 22 janvier 2007, Moniteur belge, 26 janvier 2007).
  • [143]
    Loi du 5 mai 2019 modifiant la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine en vue d’adapter la procédure devant le juge de l’application des peines en ce qui concerne les peines privatives de liberté de trois ans ou moins, Moniteur belge, 14 juin 2019. Cf. O. Nederlandt, « La légalité en matière pénitentiaire », op. cit., p. 161.
  • [144]
    Un autre élément qui peut expliquer un tel report est le manque de candidats s’étant présentés pour exercer la fonction de JAP.
  • [145]
    Moniteur belge, 7 août 2020.
  • [146]
    Instruction du ministre de la Justice (Koen Geens) aux directeurs de prison, « La libération provisoire des condamnés subissant une ou plusieurs peines d’emprisonnement dont la partie exécutoire n’excède pas trois ans », 16 mai 2017. Cf. O. Nederlandt, « Actualités en droit de l’exécution des peines privatives de liberté : un état de crise permanent ? », in C. Guillain, F. Kuty (dir.), Actualités en droit pénal et exécution des peines, Bruxelles, Larcier, 2020, p. 184, note 171.
  • [147]
    A. Chomé, « Statut externe du détenu », in O. Bastynset al., Droit pénal et procédure pénale, Waterloo, Kluwer, 2010, p. 130.
  • [148]
    M.-S. Devresse, « Les aménagements de peine en Belgique », op. cit., p. 2.
  • [149]
    A. Chomé, « Statut externe du détenu », op. cit., p. 130.
  • [150]
    M.-A. Beernaert, « Vers des tribunaux de l’application des peines et une définition légale du statut juridique “externe” des personnes condamnées à une peine privative de liberté », Revue de droit pénal et de criminologie, n° 1, 2007, p. 8.
  • [151]
    La loi du 15 décembre 2013 portant diverses dispositions en vue d’améliorer le statut de la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine (Moniteur belge, 19 décembre 2013) introduira une nouvelle contre-indication, ayant trait aux « efforts consentis par le condamné pour indemniser la partie civile, compte tenu de la situation patrimoniale du condamné telle qu’elle a évolué par son fait depuis la perpétration des faits pour lesquels il a été condamné ».
  • [152]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 524-585.
  • [153]
    V. Lefebve, « Les réformes de l’assurance chômage (2011-2019) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2438-2439, 2019, p. 22.
  • [154]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 545.
  • [155]
    Ibidem, p. 249-253 ; T. Slingeneyer, « La libération conditionnelle. Une sanction, des épreuves ? Réflexions à partir des aspects flexibles et rigides de la mesure », in D. Kaminski (dir.), La flexibilité des sanctions. XXIes Journées juridiques Jean Dabin, Bruxelles, Bruylant, 2013, p. 156-157.
  • [156]
    Ibidem, p. 161.
  • [157]
    Ibidem (l’auteur se réfère à T. Moreau, C. Hoffmann, « Difficultés et défis pour la défense du condamné devant le tribunal de l’application des peines », in L’exécution des peines privatives de liberté. Regards croisés, Louvain-la-Neuve, Anthemis, 2008, p. 165-166). Cf. aussi R. Andersenet al., « Statut juridique externe des condamnés », op. cit., p. 508.
  • [158]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 240.
  • [159]
    O. Nederlandt, « Actualités en droit de l’exécution des peines privatives de liberté », op. cit., p. 149-150. Cf. l’article 2 de la loi du 5 mai 2019 modifiant la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine en vue d’adapter la procédure devant le juge de l’application des peines en ce qui concerne les peines privatives de liberté de trois ans ou moins.
  • [160]
    Moniteur belge, 19 décembre 2013.
  • [161]
    Moniteur belge, 19 mars 2013.
  • [162]
    Libération en ligne, 11 mai 2011, www.liberation.fr.
  • [163]
    Le Soir, 1er août 2012.
  • [164]
    La Libre Belgique, 4 et 5 août 2012.
  • [165]
    La Libre Belgique, 9 août 2012.
  • [166]
    Pasicrisie, 2012, p. 1555-1561.
  • [167]
    La Libre Belgique, 9 août 2012.
  • [168]
    Cf. par exemple Le Monde, 22 août 2012.
  • [169]
    « Accord de gouvernement », 1er décembre 2011, p. 140, www.lachambre.be.
  • [170]
    M.-A. Beernaert, « La libération conditionnelle dans la tourmente », in E. Boydens, R. De Baerdemaeker (dir.), La justice : enjeux et perspectives de demain, Bruges/Limal, La Charte/Anthemis, 2013, p. 49-65.
  • [171]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant le Code d’instruction criminelle et modifiant la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine. Projet de loi modifiant le Code judiciaire et modifiant la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, n° 2603/1 et 2604/1, 16 janvier 2013.
  • [172]
    L’article 51 du règlement de la Chambre des représentants indique que « l’urgence décidée par la Chambre a pour effet de suspendre l’application des dispositions prescrivant les priorités et les délais ».
  • [173]
    L’autre projet de loi vise surtout à modifier l’article 344 du Code d’instruction criminelle pour y introduire une nouvelle base de récidive.
  • [174]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, 31 janvier 2013, p. 49.
  • [175]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, 31 janvier 2013, p. 56.
  • [176]
    Le vote des députés fédéraux pour le projet de loi modifiant le Code d’instruction criminelle et modifiant la loi du 17 mai 2006 est identique à leur vote pour ce projet de loi.
  • [177]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, 7 mars 2013, p. 43. Sur cette question, cf. notamment J. Pitseys, « L’émocratie n’existe pas ! Ou l’OCAM et la com’… », Les @nalyses du CRISP en ligne, 1er mars 2016, www.crisp.be.
  • [178]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, 7 mars 2013, p. 36.
  • [179]
    Ibidem.
  • [180]
    Le vote des sénateurs pour le projet de loi modifiant le Code d’instruction criminelle et modifiant la loi du 17 mai 2006 est identique à leur vote pour ce projet de loi, à l’exception du vote de la sénatrice Mieke Vogels (Groen), non comptabilisé pour le projet de loi modifiant le Code judiciaire et modifiant la loi du 17 mai 2016. Le projet de loi modifiant le Code d’instruction criminelle et modifiant la loi du 17 mai 2006 n’étant pas amendé, il est transmis à la Chambre des représentants en vue de la sanction royale.
  • [181]
    Loi du 17 mars 2013 modifiant le Code judiciaire et modifiant la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, Moniteur belge, 19 mars 2013.
  • [182]
    RTBF Info, 13 septembre 2012, www.rtbf.be. Cf. « Populisme. Nouvelle vague », La Chronique de la Ligue des droits de l’homme, n° 162, 11 juin 2014, www.liguedh.be. Cf. également La Libre Belgique, 1er février 2013. A. Deswaef y dénonce une manière de légiférer « irréfléchie et irrationnelle », via l’adoption de « textes de circonstance », qui est alors prônée par le gouvernement fédéral, ce dernier participant, selon lui, à un « populisme pénal de bas étage ».
  • [183]
    Ibidem.
  • [184]
    CSJ, « Avis sur l’avant-projet de loi modifiant le Code pénal, introduisant une nouvelle base de récidive et modifiant la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine », 25 octobre 2012, www.hrj.be.
  • [185]
    La Libre Belgique, 30 janvier 2013.
  • [186]
    D. Vandermeersch, « Le point sur la libération conditionnelle », Justice en ligne, 7 mars 2019, www.justice-en-ligne.be.
  • [187]
    Cour constitutionnelle, Arrêt n° 185/2014, 18 décembre 2014.
  • [188]
    Cour constitutionnelle, Arrêt n° 6663/2017, 26 juillet 2017.
  • [189]
    Loi du 5 mai 2019 insérant dans le Code pénal un article 55bis, en ce qui concerne la récidive, Moniteur belge, 28 mai 2019.
  • [190]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 303.
  • [191]
    Ibidem (l’auteure se réfère à la position exprimée par A. Beernaert, D. Vandermeersch, « La loi du 5 mai 2019 insérant dans le Code pénal un article 55bis : un nouvel essai manqué pour pallier les discriminations épinglées par la Cour constitutionnelle en matière de récidive », Journal des tribunaux, 2019, p. 491).
  • [192]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 205.
  • [193]
    Ibidem, p. 206.
  • [194]
    Ibidem.
  • [195]
    Cf. l’ancienne formulation de l’article 71, alinéa 3, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine.
  • [196]
    Cf. l’ancienne formulation de l’article 71, alinéa 4, de la même loi du 17 mai 2006.
  • [197]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 217.
  • [198]
    Ibidem, p. 218.
  • [199]
    Sénat, Projet de loi modifiant le Code judiciaire et la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, Amendements, n° 1953/2, 18 février 2013, p. 14-16.
  • [200]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 209, note 46.
  • [201]
    Ibidem, p. 209.
  • [202]
    Article 30, § 2, et 50, § 2, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, tels que modifiés par les articles 8 et 13 de la loi du 17 mars 2013.
  • [203]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant le Code d’instruction criminelle et modifiant la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, n° 2603/1, 16 janvier 2013, p. 9.
  • [204]
    Comité des ministres du Conseil de l’Europe, Recommandation (2003)22 aux États membres concernant la libération conditionnelle, 24 septembre 2003, point 17. Cf. notamment O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 311 ; C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 211.
  • [205]
    Ibidem, p. 211.
  • [206]
    Ibidem, p. 212 ; M.-A. Beernaert, R. de Béco, « Un désastreux avant-projet de loi en matière de récidive et de libération conditionnelles », Journal des tribunaux, 2012, p. 662.
  • [207]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 212.
  • [208]
    Ibidem, p. 212-213.
  • [209]
    Ibidem, p. 213. Cf. Sénat, Commission de la Justice, Projet de loi modifiant le Code judiciaire et la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine. Rapport, 20 février 2013, n° 1953/3, p. 5. Cf. les articles 78 et 92bis du Code judiciaire.
  • [210]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 213.
  • [211]
    Article 54, § 2, alinéa 1er, de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe, tel qu’inséré par l’article 16 de la loi du 17 mars 2013.
  • [212]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant le Code d’instruction criminelle et la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, n° 2603/1, 16 janvier 2013, p. 15.
  • [213]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 214. Dans le même sens, cf. O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 137-140.
  • [214]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant le Code d’instruction criminelle et la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, n° 2603/1, 16 janvier 2013, p. 15.
  • [215]
    Article 96 de la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe, tel que modifié par l’article 20 de la loi du 17 mars 2013.
  • [216]
    C. Mulier, M. Giacometti, « Le durcissement du régime de la libération conditionnelle », op. cit., p. 216.
  • [217]
    Ibidem, p. 204.
  • [218]
    Ibidem, p. 201. Dans le même sens, cf. notamment M.-A. Beernaert, R. de Béco, « Un désastreux avant-projet de loi en matière de récidive et de libération conditionnelle », op. cit., p. 661.
  • [219]
    B. Biard, « How do radical right populist parties influence resurging debates over the stripping of citizenship? », International Political Science Review, volume 41, n° 2, 2020, p. 224-237 ; C. Thomas, « L’organisation fédérale de la lutte antiterroriste en Belgique », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2463-2464, 2020. Cf. aussi S. Govaert, « La participation des nationalistes flamands au pouvoir dans les gouvernements fédéraux, 1977-2016 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2314-2315, 2016, p. 35-39.
  • [220]
    Chambre des représentants, Questions et réponses écrites, n° 115, 24 avril 2017, p. 113-114.
  • [221]
    Chancellerie du Premier ministre, « Accord de gouvernement », 9 octobre 2014, p. 117-118, www.premier.be.
  • [222]
    Le Soir en ligne, 14 mai 2017, https://plus.lesoir.be.
  • [223]
    RTBF Info, 14 mai 2017, www.rtbf.be.
  • [224]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive concernant l’arrestation immédiate et introduisant une période de sûreté, n° 2731/1, 23 octobre 2017.
  • [225]
    La Libre Belgique, 9 novembre 2017.
  • [226]
    Entretien avec un cadre du MR réalisé le 30 mai 2017.
  • [227]
    Entretien avec un cadre du PS réalisé le 30 août 2017.
  • [228]
    Chambre des représentants, Proposition de loi modifiant le Code pénal, le Code d’instruction criminelle et la loi du 17 mai 2006 relative au statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, concernant l’instauration de périodes de sûreté, n° 1779/1, 5 octobre 2011.
  • [229]
    Loi du 21 décembre 2017 modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté et modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive en ce qui concerne l’arrestation immédiate, Moniteur belge, 11 janvier 2018. Une erreur typographique affecte le titre de cette loi, telle qu’elle a été publiée au Moniteur belge, le terme de « sécurité » ayant été repris au lieu de celui de « sûreté ». Un erratum sera publié dans le Moniteur belge du 27 août 2018.
  • [230]
    La Libre Belgique, 9 novembre 2017.
  • [231]
    Avocats.be, « Avis sur le projet de loi modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive concernant l’arrestation immédiate et introduisant une période de sûreté », 6 novembre 2017.
  • [232]
    Ce recours est inscrit au rôle de la Cour constitutionnelle sous le numéro 6983 (cf. www.const-court.be).
  • [233]
    Cour constitutionnelle, Arrêt n° 147/2020, 19 novembre 2020.
  • [234]
    Cf. la loi du 26 avril 2007 relative à la mise à disposition du tribunal de l’application des peines (Moniteur belge, 13 juillet 2007), entrée en vigueur le 1er février 2012.
  • [235]
    F. Vansiliette, « La mise à disposition du tribunal d’application des peines », op. cit.
  • [236]
    B. Dayez, Pourquoi libérer Dutroux ? Pour un humanisme pénal, Bruxelles, Samsa, 2018.
  • [237]
    F. Kuty, « La loi du 21 décembre 2017 modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté. La peine irrémédiable, la loi de la désillusion ? », Revue de droit pénal et de criminologie, volume 98, n° 5, 2018, p. 585-588.
  • [238]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive concernant l’arrestation immédiate et introduisant une période de sûreté, n° 2731/1, 23 octobre 2017, p. 31.
  • [239]
    F. Kuty, « La loi du 21 décembre 2017 modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté », op. cit., p. 584.
  • [240]
    Moniteur belge, 19 février 2016.
  • [241]
    Cour constitutionnelle, Arrêt n° 148/2017, 21 décembre 2017.
  • [242]
    Le cadre restreint de cette étude nous interdit de préciser ces différentes implications. Pour un examen plus détaillé, cf. F. Kuty, « La loi du 21 décembre 2017 modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté », op. cit., p. 589-591 ; L. Van den Steen, « De wet van 21 december 2017 met betrekking tot de invoering van een beveiligingsperiode en wijzigingen inzake de onmiddellijke aanhouding: veel geblaat, weinig wol », Rechtskundig Weekblad, n° 30, 2019-2020, p. 1162-1171.
  • [243]
    Chambre des représentants, Projet de loi modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive concernant l’arrestation immédiate et introduisant une période de sûreté, n° 2731/1, 23 octobre 2017, p. 7.
  • [244]
    Chambre des représentants, Commission de la Justice, Projet de loi modifiant la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive concernant l’arrestation immédiate et introduisant une période de sûreté. Rapport de la deuxième lecture, n° 2731/5, 8 décembre 2017, p. 4-6.
  • [245]
    F. Kuty, « La loi du 21 décembre 2017 modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté », op. cit., p. 582-583 ; J.-F. Funck, « Libération conditionnelle : les nouvelles périodes de sûreté », Cahier du CRID&P, n° 2, février 2018.
  • [246]
    Une décision fait de la période de sûreté un élément qui participe à la gravité de la peine : Tribunal correctionnel francophone de Bruxelles, 23 avril 2018 (Revue de droit pénal et de criminologie, 2019, p. 173). Cf. D. de Beco, A. De Brouwer, C. Guillain, « Commentaire du jugement du tribunal correctionnel de Bruxelles du 23 avril 2018 dans l’affaire “Abdeslam” : quand l’exception devient la règle », Revue de droit pénal et de criminologie, 2019, p. 173. S’est prononcée en sens inverse : Cour d’appel de Liège, 26 février 2019, RG 2018/CO/747, inédit (cité par O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 165).
  • [247]
    Cour constitutionnelle, Arrêt n° 147/2020, 19 novembre 2020, p. 19.
  • [248]
    F. Kuty, « La loi du 21 décembre 2017 modifiant diverses dispositions en vue d’instaurer une période de sûreté », op. cit., p. 601.
  • [249]
    K. Beyens, E. Maes, « Het lappendeken van tien jaar strafuitvoering in België », Panopticon, volume 41, n° 1, 2020, p. 10-41.
  • [250]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 340. Cf. T. Slingeneyer, « Les sanctions et mesures appliquées dans la communauté au stade postsentenciel : analyse de la situation belge au regard des recommandations du Conseil de l’Europe », in Y. Cartuyvels, C. Guillain, T. Slingeneyer (dir.), Les alternatives à la détention en Belgique : un état des lieux, à l’aune du Conseil de l’Europe, Bruxelles, La Charte, 2017, p. 109.
  • [251]
    Ibidem, p. 111.
  • [252]
    J.-F. Funck, « Libération conditionnelle », op. cit. Cf. aussi O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 356.
  • [253]
    La Libre Belgique, 20 décembre 2019 ; De Standaard, 23 décembre 2019.
  • [254]
    Le Soir, 1er octobre 2019.
  • [255]
    Le Vif/L’Express, 5 mai 2020.
  • [256]
    RTBF Info, 21 octobre 2020, www.rtbf.be.
  • [257]
    La Libre Belgique, 21 octobre 2019.
  • [258]
    RTBF Info, 18 octobre 2019, www.rtbf.be.
  • [259]
    Cf. C. Sägesser, « La formation du gouvernement De Croo (mai 2019 - octobre 2020) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2471-2472, 2020.
  • [260]
    « Le pouvoir judiciaire est le gardien naturel de la liberté et des droits fondamentaux et la procédure judiciaire offre davantage de garanties que la procédure administrative. La liberté ne doit pas s’inscrire dans le registre des faveurs mais dans celui du droit, protégé par [le] juge » (O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 357).
  • [261]
    M. van de Kerchove, « Les réactions législatives aux disparitions d’enfants. “L’affaire Dutroux”, paradigme de l’accélération du temps juridique ? », in P. Gérard, F. Ost, M. van de Kerchove (dir.), L’accélération du temps juridique, Bruxelles, Presses de l’Université Saint-Louis, 2000, p. 1-37, http://books.openedition.org.
  • [262]
    O. Nederlandt, Les juges de l’application des peines face à la réinsertion des personnes condamnées, op. cit., p. 358.
  • [263]
    Ibidem, p. 359.
  • [264]
    D. Fassin, Punir. Une passion contemporaine, Condé-sur-Noireau, Seuil, 2017.
  • [265]
    C. Guillain, « Actualités de droit pénal général : nouveautés en matière de récidive et de concours d’infractions », in C. Guillain, F. Kuty (dir.), Actualités en droit pénal et exécution des peines, op. cit., p. 77. Cf. SPF Justice, Direction générale des Établissements pénitentiaires, « Rapport annuel 2007 », p. 134-136 et « Rapport annuel 2017 », p. 56-57, https://justice.belgium.be.
  • [266]
    Ibidem.
  • [267]
    U. Beck, La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Paris, Flammarion, 2008.
  • [268]
    P. Martens, « La loi “pot-pourri II” : un recul de civilisation ? », Le Pli juridique, n° 36, 2016, p. 17-18 ; M.-A. Beernaert, « L’individualisation dans le prononcé et l’exécution de la peine : machine arrière toute ? », in M. Cadelli, T. Moreau (dir.), La loi “pot-pourri II” : un recul de civilisation ?, Limal, Anthemis, 2016, p. 181-197 ; O. Nederlandt, « L’exécution des peines en réforme. La réinsertion, un horizon toujours plus lointain ? », Revue de droit pénal et de criminologie, 2016, p. 1026.
  • [269]
    D. Salas, La volonté de punir. Essai sur le populisme pénal, Paris, Hachette, 2005.
  • [270]
    Le Vif/L’Express en ligne, 10 août 2012, www.levif.be ; N. Thirion, « Malaise dans la civilisation. À propos de la libération conditionnelle de Michelle Martin », Journal des tribunaux, n° 6488, 2012, p. 585-586.
  • [271]
    M.-A. Beernaert, « La libération conditionnelle dans la tourmente », op. cit., p. 62-63.
  1. Introduction
  2. 1. La loi du 31 mai 1888
    1. 1.1. Le contexte politique et intellectuel
    2. 1.2. Les principes posés dans la loi du 31 mai 1888
  3. 2. De la loi du 31 mai 1888 à l’affaire Dutroux
  4. 3. Le choc de l’affaire Dutroux
  5. 4. Les lois des 5 et 18 mars 1998
    1. 4.1. En amont de la réforme : la mise sur pied d’une commission d’enquête parlementaire
    2. 4.2. Les lois des 5 et 18 mars 1998 : de la mise à l’agenda à l’adoption
    3. 4.3. Les principales modifications apportées par les lois des 5 et 18 mars 1998 sur le plan juridique
      1. 4.3.1. L’instauration de commissions de libération conditionnelle
      2. 4.3.2. La place des victimes dans la procédure
  6. 5.. Les deux lois du 17 mai 2006
    1. 5.1. De la mise en place de la commission Holsters au dépôt de deux projets de loi
    2. 5.2. Le processus législatif
    3. 5.3. Le positionnement de la société civile
    4. 5.4. Les principales modifications apportées par les lois du 17 mai 2006 sur le plan juridique
      1. 5.4.1. L’instauration des tribunaux de l’application des peines (TAP)
      2. 5.4.2. Le statut externe des condamnés
      3. 5.4.3. Les droits des victimes
  7. 6. La loi du 17 mars 2013
    1. 6.1. Le contexte
    2. 6.2. L’évolution législative
    3. 6.3. Le positionnement de la société civile
    4. 6.4. Les principales modifications apportées par la loi du 17 mars 2013 sur le plan juridique
      1. 6.4.1. Les seuils d’admissibilité à la libération conditionnelle relevés et le délai d’épreuve prolongé pour certaines catégories de détenus
      2. 6.4.2. La suppression du caractère automatique de la procédure de libération conditionnelle
      3. 6.4.3. Les modifications apportées au fonctionnement et à la composition du TAP
  8. 7. La loi du 21 décembre 2017
    1. 7.1. Le contexte
    2. 7.2. L’évolution législative
    3. 7.3. Le positionnement de la société civile
    4. 7.4. Les principales modifications apportées par la loi du 21 décembre 2017 sur le plan juridique
  9. 8. L’automne 2019 : une fenêtre d’opportunité pour une nouvelle réforme de la libération conditionnelle ?
  10. Conclusion
Benjamin Biard
Vincent Lefebve
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En 1888, la Belgique introduit dans son système pénal un mécanisme innovant : la libération conditionnelle. Il s’agit d’un mode d’exécution de la peine privative de liberté qui permet au condamné de subir sa peine en dehors de la prison, moyennant le respect des conditions qui lui sont imposées pendant un délai d’épreuve déterminé. Durant plus de cent ans, ce système ne connaît guère de modifications. En revanche, le séisme né de l’affaire Dutroux marque un véritable tournant.

Depuis lors, les évolutions législatives sont marquées par diverses tensions. En effet, la compétence d’accorder ou de refuser une mesure de libération conditionnelle fait l’objet d’un encadrement institutionnel et procédural croissant, une judiciarisation de ce processus décisionnel étant progressivement instaurée. Mais dans le même temps, les conditions d’accès à la libération conditionnelle sont durcies. La loi navigue ainsi entre, d’une part, une approche progressiste – qui insuffle un surcroît de sécurité juridique – et humaniste – qui apporte des réponses à la crise de légitimité de la prison – et, d’autre part, ce que certains qualifient de populisme pénal – qui vise à satisfaire l’opinion publique par une sévérité accrue à l’égard des crimes les plus graves.

Ce Courrier hebdomadaire analyse ces différentes évolutions et les tensions qui en résultent. Il accorde une attention particulière au contexte dans lequel ont été adoptées les réformes successives, aux processus législatifs qui y ont conduit, au positionnement de la société civile et des partis politiques à ces multiples occasions ainsi qu’aux principaux effets induits par ces réformes sur le plan juridique.

Mis en ligne sur Cairn.info le 25/02/2021
https://doi.org/10.3917/cris.2480.0005
ISBN 9782870752548
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