CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Les scrutins européen, fédéral, régional et communautaire organisés le 26 mai 2019 ont donné lieu au renouvellement de chacune des assemblées parlementaires du pays, ainsi que de la représentation belge au Parlement européen  [1]. Dans un second temps, ils ont entraîné la mise en place de nouveaux gouvernements dans chacune des entités fédérées puis au niveau fédéral  [2]. Si la formation des gouvernements dans les entités fédérées a été plus lente que précédemment – sauf en Communauté germanophone et en Région de Bruxelles-Capitale –, la mise en place du gouvernement fédéral a connu un délai particulièrement long. Ce n’est en effet que 494 jours après les élections que, le 1er octobre 2020, le gouvernement dirigé par Alexander De Croo (Open VLD, coalition PS/MR/Écolo/CD&V/Open VLD/SP.A/Groen) a prêté serment.

2Cette très longue durée de formation du gouvernement fédéral rappelle celle du gouvernement Di Rupo (PS/MR/CD&V/SP.A/Open VLD/CDH) en 2010-2011  [3]. Mais si la constitution du gouvernement Di Rupo avait été précédée d’une longue phase de négociations ayant débouché sur la sixième réforme de l’État, rien de tel ne s’est déroulé en 2019-2020. En revanche, un facteur extérieur, la crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19, a influencé le déroulement des négociations, d’abord en les interrompant lors de la constitution du gouvernement de crise Wilmès II (MR/CD&V/Open VLD), puis en contribuant à les accélérer voire à les faire aboutir. La présente livraison du Courrier hebdomadaire retrace le déroulement de ce processus de négociations en distinguant deux phases, celle qui précède la mise en place du gouvernement Wilmès II et celle qui reprend deux mois après la constitution de ce gouvernement. Il s’ouvre sur un rappel des résultats du scrutin.

1. Le scrutin fédéral du 26 mai 2019

3Le 26 mai 2019 se tiennent les élections fédérales, régionales, communautaires et européennes. Les citoyens belges sont appelés à renouveler six assemblées de manière directe (la Chambre des représentants, le Parlement wallon, le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, le Parlement flamand, le Parlement de la Communauté germanophone et la représentation belge au Parlement européen) et cinq autres de manière indirecte (le Sénat, le Parlement de la Communauté française et les trois assemblées des Commissions communautaires en Région bruxelloise). La date du scrutin correspond à la fin de la législature fédérale et des législatures régionales et communautaires ; depuis 2014, toutes ces législatures sont de cinq ans, en étant calquées sur les élections du Parlement européen  [4].

4Toutefois, au niveau fédéral, la législature n’a pas pu se conclure normalement. Le gouvernement fédéral est minoritaire depuis le 9 décembre 2018 et en affaires courantes depuis le 21 décembre suivant. Pourtant, il n’a été pas décidé de convoquer des élections fédérales anticipées : la date initialement prévue, à savoir le 26 mai 2019, soit quelque cinq mois plus tard, a été maintenue.

5À la fin du mois d’octobre 2018, la N-VA, a fait savoir au Premier ministre, Charles Michel (MR), que son parti refusait que la Belgique approuve le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières (dit Pacte de Marrakech) alors en préparation à l’ONU. La crise politique qui s’en est suivie s’est conclue le dimanche 9 décembre, lorsque les trois ministres et les deux secrétaires d’État N-VA ont annoncé leur démission du gouvernement fédéral Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD), démission qui a été acceptée par le Roi le jour même.

6Le gouvernement Michel II (MR/CD&V/Open VLD) désormais à la tête du pays était minoritaire à la Chambre, puisque les trois partis qui le composaient n’y rassemblaient que 52 sièges sur 150. En dépit des demandes émanant de l’opposition, ce gouvernement n’a pas présenté de déclaration gouvernementale au Parlement et n’a pas réclamé de vote de confiance. Par ailleurs, le Premier ministre a indiqué que la convocation d’élections fédérales anticipées ne lui paraissait pas opportune en raison de l’approche du scrutin européen, régional et communautaire appelé à se tenir assurément le 26 mai 2019  [5]. Le gouvernement a alors tenté de convaincre l’opposition parlementaire de nouer « une coopération ». Le 18 décembre, cette démarche ayant échoué, C. Michel a présenté au Roi la démission de son gouvernement. Acceptant cette démission trois jours plus tard, le Roi a chargé le gouvernement d’expédier les affaires courantes jusqu’au scrutin du 26 mai 2019. Le jour des élections européennes, fédérales, régionales et communautaires, le gouvernement fédéral Michel II est déjà en affaires courantes depuis 156 jours.

1.1. Les résultats du scrutin

7Les résultats du scrutin fédéral du 26 mai 2019 constituent une défaite pour tous les partis de la majorité fédérale : le CD&V recule de – 2,7 %, le MR de – 2,0 % et l’Open VLD de – 1,3 % (cf. Tableau 1). À eux trois, ils ne totalisent plus que 25,0 % des suffrages (contre 31,0 % cinq ans plus tôt).

8Les partis des trois familles politiques traditionnelles – socialiste (PS et SP.A), libérale (MR et Open VLD) et de tradition sociale-chrétienne (CDH et CD&V) – perdent une proportion de voix telle que, fait inédit, le score additionné de ces six formations se trouve désormais sous le seuil des 50 %, avec 44,9 % des voix à l’échelle de la Belgique (alors qu’il était encore de 56,5 % en 2014)  [6]. Si l’on ajoute au calcul le score des partis de la famille écologiste (Écolo et Groen) – qui engrangent pour leur part une victoire, toutefois sans atteindre le raz-de-marée vert prédit par certains sondages –, le total est de 57,1 %, soit également un minimum historique.

9Cette évolution est particulièrement marquée en Flandre : dans cette région, le CD&V, l’Open VLD et le SP.A ne recueillent plus à eux trois que 38,5 % des votes (et 48,3 % avec Groen, soit, pour la première fois dans l’histoire électorale flamande, moins de la moitié des votes valablement exprimés). Toutefois, les deux autres régions enregistrent elles aussi des minima historiques pour les partis traditionnels. En Wallonie, le PS, le MR et le CDH totalisent 57,3 % des voix (72,2 % avec Écolo). En Région bruxelloise, les partis rouges, bleus et orange récoltent ensemble 46,4 % des suffrages (67,7 % avec les partis verts).

10Quant à elle, la N-VA perd un peu plus du cinquième de ses électeurs, tout en demeurant le premier parti de Flandre (et de Belgique).

11La plus forte progression est celle du parti d’extrême droite Vlaams Belang, qui multiplie par 3,1 son résultat du 25 mai 2014 : il devient ainsi la deuxième force politique de Flandre (et du pays). Le parti (national) de gauche radicale PTB-PVDA progresse également, faisant plus que doubler son score précédent (x 2,3).

Tableau 1. Élection de la Chambre des représentants (2014 et 2019). Résultats nationaux des principales formations politiques, en % des votes valables

Tableau 1. Élection de la Chambre des représentants (2014 et 2019). Résultats nationaux des principales formations politiques, en % des votes valables

Tableau 1. Élection de la Chambre des représentants (2014 et 2019). Résultats nationaux des principales formations politiques, en % des votes valables

1 En 2019, présence de candidats SP.A sur la liste PS dans les cantons bruxellois.
2 En 2014 et 2019, présence de candidats Groen sur la liste Écolo dans les cantons bruxellois.
3 Dans les cantons wallons, PTB (en 2014, PTB-GO!) ; dans les cantons flamands, PVDA (en 2014, PVDA+) ; dans les cantons bruxellois, PTB*PVDA (en 2014, PTB*PVDA-GO!).
4 En 2019, pas de liste dans les cantons bruxellois.
5 En 2014 et 2019, pas de liste dans les cantons bruxellois.

12La distribution des 150 sièges de la Chambre des représentants (cf. Tableau 2) laisse présager de la difficulté qu’il y aura à mettre en place un nouveau gouvernement fédéral. Notamment, on perçoit d’emblée que l’une des solutions traditionnellement retenues pour constituer un gouvernement fédéral dans une conjoncture difficile, à savoir la tripartite classique  [7], est impossible : si le PS, le MR et le CDH ont obtenu ensemble 39 des 61 sièges du groupe linguistique français (soit 63,9 %), le CD&V, l’Open VLD et le SP.A n’en ont décroché que 33 sur 89 dans le groupe linguistique néerlandais (soit 37,1 %), ce qui ne représente un total que de 72 sièges sur 150 (48,0 %).

13Avec 25 élus, la N-VA constitue le premier groupe de l’assemblée (celui-ci comptant seulement 24 membres, un siège étant occupé par un député indépendant : Jean-Marie Dedecker). Ensemble, les partis verts ont obtenu 21 sièges (12 pour Écolo et 9 pour Groen), ce qui fait de leur groupe commun le deuxième par ordre d’importance au sein de la Chambre, juste devant le groupe PS. Pour sa part, le Vlaams Belang a décroché 18 sièges, tandis que le PTB-PVDA en a remporté 12 (8 dans le groupe linguistique français et 4 dans le groupe linguistique néerlandais, où le parti de gauche radicale fait ainsi son entrée). Enfin, Défi a conservé ses 2 sièges.

Tableau 2. Chambre des représentants (2014 et 2019) . Représentation des partis politiques, en nombre de sièges

Tableau 2. Chambre des représentants (2014 et 2019) . Représentation des partis politiques, en nombre de sièges

Tableau 2. Chambre des représentants (2014 et 2019) . Représentation des partis politiques, en nombre de sièges

1 Le 18 janvier 2020, Emir Kir sera exclu du PS ; il siégera dès lors comme indépendant à la Chambre.
2 Dont un élu, Jean-Marie Dedecker, siégeant comme indépendant.
Graphique 1

Répartition des sièges à la Chambre des représentants au lendemain des élections du 26 mai 2019

Graphique 1. Répartition des sièges à la Chambre des représentants au lendemain des élections du 26 mai 2019

Répartition des sièges à la Chambre des représentants au lendemain des élections du 26 mai 2019

14Le gouvernement sortant est devenu encore davantage minoritaire, les trois partis qui le composent ne réunissant plus que 38 sièges sur 150. Mais la reconduction de la coalition dite suédoise, qui avait constitué le gouvernement Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD), n’est elle-même pas possible : ensemble, les quatre partis qui la constituaient n’obtiennent plus que 62 sièges (contre 85 en 2014).

1.2. Les principales coalitions envisagées au lendemain du scrutin

15La reconduction de la coalition sortante ou le retour de la coalition suédoise étant donc exclus, de même que la mise sur pied d’une tripartite traditionnelle (réunissant les familles socialiste, libérale et d’origine sociale-chrétienne – ici citées par ordre d’importance décroissante au sein de la nouvelle Chambre), les principales possibilités de coalition évoquées au lendemain du scrutin sont la bourguignonne et l’arc-en-ciel. Inspirée par la majorité qui dirige la ville d’Anvers suite aux élections locales du 14 octobre 2018 (N-VA/SP.A/Open VLD)  [8], une coalition bourguignonne (les couleurs de l’ancien duché de Bourgogne étaient le jaune, le rouge et le bleu) rassemblerait, autour d’un axe constitué par les deux partis arrivés en tête des principales communautés du pays, la N-VA et le PS, le SP.A et les deux partis libéraux ; elle pourrait compter sur une majorité de 80 sièges sur 150 et, accessoirement, sur une majorité dans chaque groupe linguistique (34 sièges sur 61 du côté francophone, et 46 sièges sur 89 du côté néerlandophone). Une coalition arc-en-ciel (en néerlandais « paars-groen », soit « violette-verte »), en référence au nom donné à la coalition ayant composé le gouvernement fédéral Verhofstadt I (VLD/PS/ Fédération PRL FDF MCC/SP/Écolo/Agalev, 1999-2003), réunirait les partis socialistes, libéraux et écologistes ; elle disposerait d’une majorité très courte de 76 sièges sur 150, mais n’aurait pas de majorité au sein du groupe linguistique néerlandais (29 sièges sur 89 seulement, contre 47 sièges sur 61 au sein du groupe linguistique français). Cette coalition pourrait toutefois être renforcée par l’appoint du CD&V et éventuellement du CDH. D’autres formules de coalition, inédites, sont évoquées, pour lesquelles aucun nom n’existe encore.

16Aucune disposition juridique n’impose qu’un gouvernement fédéral jouisse d’une majorité au sein de chacun des deux groupes linguistiques de la Chambre des représentants, la parité linguistique ne prévalant qu’au sein du Conseil des ministres (compte éventuellement non tenu du Premier ministre). Toutefois, sur le plan politique, il est souhaitable qu’un gouvernement dispose d’une assise solide au sein de chaque groupe. Exception notable, le gouvernement Michel I était largement minoritaire au sein du groupe linguistique français, puisque le seul parti francophone de la coalition, le MR, ne réunissait que 20 sièges sur les 63 sièges du groupe linguistique français. Avant lui, les gouvernements Leterme I, Van Rompuy, Leterme II et Di Rupo n’avaient pas de majorité au sein du groupe linguistique néerlandais, mais d’extrême justesse, avec chaque fois 43 sièges sur 88. En remontant plus loin dans le temps, on relèvera que le gouvernement Martens V (CVP/ PVV/PRL/PSC, 1981-1985), dit premier gouvernement Martens-Gol, ne disposait pas de la majorité dans le groupe linguistique français ni de la Chambre (42 sur 91) ni du Sénat (36 sur 79)  [9]. Après le scrutin du 26 mai 2019, compte tenu de la progression du Vlaams Belang – que tous les partis, francophones comme néerlandophones (à l’exception d’une frange de la N-VA), entendent tenir éloigné de l’exercice du pouvoir au nom du « cordon sanitaire » politique  [10] –, une coalition fédérale ne peut jouir d’une majorité au sein du groupe linguistique néerlandais de la Chambre, composé de 89 sièges, que de deux manières : soit en incluant la N-VA, soit en réunissant les cinq autres formations représentées dans le groupe linguistique néerlandais de la Chambre (le CD&V, l’Open VLD, le SP.A, Groen et le PVDA, qui totalisent 46 sièges). Autant dire que, au lendemain du scrutin, la N-VA apparaît difficilement contournable. Pour sa part, le groupe linguistique français compte 61 sièges  [11]. Avec ses 20 sièges, le PS apparaît difficilement contournable même si, arithmétiquement, des formules de coalition majoritaire dont ce parti serait absent sont possibles. Ainsi, une coalition comprenant le MR, Écolo et le CDH (ou le MR, Écolo et le PTB) disposerait d’une majorité au sein du groupe linguistique français.

17Jamais, sans doute, la répartition des sièges de la Chambre des représentants n’a-t-elle été autant commentée au lendemain d’une élection. Plusieurs médias proposent une infographie ou une animation permettant au lecteur ou à l’internaute de composer lui-même « sa » coalition fédérale et de tester sa majorité et sa représentation au sein des deux groupes linguistiques. In fine, le jeu politique paraît à la fois très ouvert et très fermé. Très ouvert, parce qu’aucune piste préférentielle ne se dessine. Très fermé, parce que, sur le plan de la cohérence entre les programmes des partis, toutes les coalitions envisagées paraissent très compliquées à mettre en place. Dès le 27 mai, le quotidien L’Écho titre : « Une Belgique plus ingouvernable que jamais »  [12].

1.3. Les premières réactions

18Dès le soir du scrutin, le président de la N-VA, Bart De Wever, affirme que son parti n’acceptera pas que le prochain gouvernement fédéral ne dispose pas d’une majorité au sein du groupe linguistique néerlandais à la Chambre des représentants, en ajoutant (en réponse à une question sur la possibilité d’un accord avec le Vlaams Belang pour la formation du gouvernement flamand) que son « seul vrai veto, qui est réel, c’est contre le PS et Écolo au niveau fédéral »  [13]. Dès le lundi 27 mai, le président du PS, Elio Di Rupo, réitère son opposition – qu’il avait déjà exprimée à maintes reprises au cours de la campagne électorale – à gouverner avec la N-VA au niveau fédéral et appelle à une coalition réunissant les six partis dits traditionnels et les écologistes : « La question est de savoir si l’Open VLD, le CD&V, Groen et le SP.A auront, à un moment donné, la force et la volonté politique de faire partie d’un gouvernement fédéral sans majorité flamande au Parlement »  [14]. Il est rejoint en cela par le co-président d’Écolo, Jean-Marc Nollet, qui estime qu’une coalition avec l’ensemble des partis en dehors du Vlaams Belang, de la N-VA et du PTB est possible. Les réactions de deux ténors de la N-VA, l’ex-secrétaire d’État fédéral Théo Francken et l’ex-vice-Premier ministre fédéral Jan Jambon, sont vives ; ils dénoncent un mépris pour le signal envoyé par l’électeur flamand.

19Dès ce moment, l’alternative est clairement posée : former un gouvernement fédéral avec une certaine cohérence idéologique, ou du moins sans ambition affirmée en matière de réformes institutionnelles (et donc ne comportant pas simultanément le PS et la N-VA), mais dépourvu de majorité dans le groupe linguistique néerlandais de la Chambre, ou privilégier l’obtention d’une majorité dans chacun des deux groupes linguistiques de l’assemblée au détriment de la compatibilité des programmes, au risque de s’embarquer dans une nouvelle réforme institutionnelle. Le journal Le Soir entrevoit quatre scénarios tous plus compliqués les uns que les autres : « Un gouvernement sans la N-VA ? La Flandre vous tombe dessus. Un gouvernement avec la N-VA ? Demandez aux socialistes et aux écologistes. Une négociation institutionnelle pour s’adapter à l’impact du vote nationaliste-séparatiste au nord ? Les francophones seraient mal inspirés… Le retour aux urnes ? C’est courir un risque majeur, celui de voir les radicaux se radicaliser davantage »  [15].

20Le 5 juin, le président du CDH, Maxime Prévot, annonce que son parti fait le choix de l’opposition à tous les niveaux de pouvoir (non seulement donc au niveau fédéral, mais également à la Région wallonne, à la Région bruxelloise et à la Communauté française  [16]), par suite des mauvais résultats du scrutin, afin de se consacrer à « un travail de refondation interne et de refonte doctrinale radicale »  [17]. Voilà donc 5 sièges avec lesquels il ne faudra plus compter pour constituer une majorité fédérale, du moins provisoirement.

2. La première phase des négociations fédérales (mai 2019 - mars 2020)

21La première phase des négociations en vue de la formation d’un gouvernement se déroule initialement selon une séquence classique : après avoir reçu en audience le Premier ministre et les présidents des assemblées parlementaires fédérales, puis avoir consulté tous les présidents de parti, le roi Philippe désigne deux informateurs, Didier Reynders (MR) et Johan Vande Lanotte (SP.A). Au terme de leur mission, longue de plus de quatre mois, ceux-ci sont remplacés par deux préformateurs, Geert Bourgeois (N-VA) et Rudy Demotte (PS). Toutefois, ceux-ci ne parviennent pas à avancer dans la voie de la formation du gouvernement et, moins d’un mois plus tard, en novembre 2019, c’est à nouveau un informateur que nomme le Roi : Paul Magnette (PS). De décembre 2019 à janvier 2020, une troisième mission d’information est ensuite confiée par le souverain à un duo formé de Georges-Louis Bouchez (MR) et Joachim Coens (CD&V). Deux autres missions royales se succèdent encore : l’une confiée à Koen Geens (CD&V) fin janvier 2020, et l’autre aux présidents du Sénat et de la Chambre des représentants, Sabine Laruelle (MR) et Patrick Dewael (MR), à la mi-février. Aucune avancée significative n’est enregistrée durant ces neuf premiers mois suivant les élections du 26 mai 2019.

2.1. La mission d’information de Didier Reynders et Johan Vande Lanotte (30 mai 2019 - 7 octobre 2019)

22Dès le lendemain du scrutin, le roi Philippe entame des consultations. Après avoir reçu le Premier ministre sortant, C. Michel (MR), qui lui remet formellement la démission de son gouvernement, le président de la Chambre des représentants, Siegfried Bracke (N-VA), et le président du Sénat, Jacques Brotchi (MR), le Roi entame la consultation des présidents de tous les partis politiques. Dès le lundi 27 mai, il reçoit B. De Wever pour la N-VA puis Elio Di Rupo pour le PS. Il s’agit des présidents des premières formations politiques du pays en nombre de sièges. Les consultations royales se poursuivent durant les deux jours suivants, avec les présidents des autres partis. La décision du roi Philippe de recevoir, pour la première fois, le président du Vlaams Belang, Tom Van Grieken (29 mai), suscite des remous, particulièrement du côté francophone où l’on dénonce une rupture du cordon sanitaire politique. Du côté néerlandophone, l’analyse met plutôt en avant une nécessaire neutralité du Palais royal et une équidistance entre le Vlaams Belang et le PTB, dont le président, Peter Mertens, est également reçu par le souverain (en 2014, ce dernier avait été reçu au Palais, contrairement à son homologue du Vlaams Belang).

23Le jeudi 30 mai, le Roi charge D. Reynders (MR) et J. Vande Lanotte (SP.A) d’une mission d’information. Le premier est alors vice-Premier ministre du gouvernement sortant ; ancien président du MR, il est ministre fédéral sans discontinuer depuis juillet 1999. Le second est ministre d’État, ancien président du SP.A et ancien vice-Premier ministre. Le choix de ces deux personnalités est globalement salué. Ni l’un ni l’autre ne nourrit plus d’ambitions personnelles au niveau fédéral, et chacun d’entre eux appartient à une tendance politique plus proche de la majorité de l’autre communauté. Le Palais aurait initialement voulu confier une mission au seul D. Reynders, qui aurait préféré ne pas être seul pour la remplir  [18].

24Les deux informateurs royaux devront « garder le contact avec les responsables des négociations dans les Régions et Communautés. Ils feront un premier rapport au Roi sur l’avancement de leur mission le 6 juin ». En effet, les négociations ont été entamées dans les différentes entités fédérées  [19]. En Communauté germanophone, l’accord scellant la reconduction du gouvernement dirigé par Oliver Paasch (ProDG) est conclu dès le 28 mai (coalition ProDG/SP/PFF). En Région bruxelloise, Groen, l’Open VLD et one.brussels-sp.a (branche bruxelloise du SP.A) décident dès le 31 mai d’entamer des négociations en vue de la formation de l’aile néerlandophone du gouvernement bruxellois, tandis que le PS, Écolo et Défi font de même le 14 juin s’agissant de l’aile francophone ; le gouvernement régional et les collèges des trois Commissions communautaires sont installés le 18 juillet. Dans les autres entités fédérées, les négociations vont être d’une longueur sans précédent. En Wallonie et en Communauté française, le PS et Écolo travaillent tout d’abord à l’élaboration d’un plan commun, le projet « coquelicot », après consultation de la société civile. Ne disposant toutefois pas d’une majorité parlementaire à eux deux, ils doivent impérativement convaincre le PTB ou le CDH de les rejoindre. Après le refus de ces deux partis, acté respectivement le 7 et le 9 juillet, PS et Écolo se tourneront vers le MR. En Flandre, la N-VA choisit d’ouvrir des négociations avec le Vlaams Belang. Bien qu’ils ne disposent pas d’une majorité au Parlement flamand et qu’aucune autre formation politique ne soit disposée à faire l’appoint, les discussions entre ces deux partis se poursuivront plusieurs semaines. Ce n’est finalement que le 12 août que, la piste d’une coalition avec le Vlaams Belang abandonnée, J. Jambon deviendra formateur d’un gouvernement flamand associant la N-VA, le CD&V et l’Open VLD. Malgré cette longueur, il deviendra rapidement clair que, pour tous les protagonistes, la priorité va à la formation des gouvernements régionaux et communautaires et non à celle de l’exécutif fédéral. En 2014, les négociations aux différents niveaux de pouvoir avaient été davantage imbriquées  [20].

25Le 6 juin, les deux informateurs présentent au Roi leur premier rapport et voient leur mission prolongée. « Ils continueront à œuvrer en vue de permettre la formation d’un gouvernement fédéral dans les meilleurs délais », indique le Palais. En dépit de cette feuille de route relativement optimiste, le duo d’informateurs ne progresse guère durant l’été. Toutefois, lors de la conférence de presse qui suit la remise de leur deuxième rapport au Roi, le 17 juin, D. Reynders fait savoir : « Avec tous les présidents de partis “utiles”, nous allons parler, durant quinze jours, budget, organisation de la concertation sociale, emploi, enjeux climatiques, pauvreté, sécurité, migration ». Pour sa part, J. Vande Lanotte précise : « Notre objectif reste d’avoir un budget pour octobre et de disposer d’une majorité pour l’approuver ». La mission des deux informateurs s’inscrit donc dans la durée. Elle sera effectivement prolongée encore à trois reprises : le 1er juillet, le 29 juillet et le 9 septembre (avec également des rapports intermédiaires les 12 juillet et 17 août). D. Reynders, qui espérait devenir secrétaire général du Conseil de l’Europe, n’a pas été élu à ce poste à la fin du mois de juin ; il peut donc poursuivre sa mission. L’objectif annoncé pour octobre ne sera toutefois pas atteint.

26Entre-temps, le 2 juillet, C. Michel est choisi comme président du Conseil européen par les chefs d’État et de gouvernement réunis en réunion extraordinaire. La presse s’interroge : un nouveau gouvernement fédéral sera-t-il formé et un nouveau Premier ministre nommé avant que C. Michel prenne ses nouvelles fonctions, le 1er décembre ? « Si aucun nouvel exécutif fédéral belge n’a encore été installé à ce moment-là, un nouveau Premier ministre prêtera serment entre les mains du roi Philippe, toujours pour gérer les affaires courantes. Il se pourrait, dans ce cas, que Didier Reynders (…) succède à Charles Michel », estime l’hebdomadaire Le Vif/L’Express [21].

27La veille de la fête nationale, dans un discours que l’historien Vincent Dujardin (UCLouvain) estimera le plus politique depuis sa prestation de serment, le Roi appelle à « comprendre l’autre dans ses convictions et ses choix, même si on ne les partage pas »  [22]. Le travail des deux informateurs, toutefois, ne semble guère progresser. Ce n’est que le 28 juillet qu’ils réunissent, pour la première fois, les présidents de sept partis retenus pour un premier tour de discussion : la N-VA, le PS, le MR, le CD&V, l’Open VLD, le SP.A et Groen (en revanche, bien qu’également invité, Écolo ne viendra pas). La réunion se déroule au Palais d’Egmont, de 18 à 21 heures. L’absence d’Écolo est très remarquée : le parti écologiste francophone a fait savoir par communiqué qu’il ne participerait pas à la réunion afin de rester « en pleine cohérence avec ce qu’il a annoncé aux informateurs à chacun de ses rendez-vous ». « Nous considérons qu’il n’y a pas la moindre option pouvant associer notre parti à la N-VA. Discuter avec eux autour d’une note pouvant servir de base aux futures discussions de préformation dans la perspective d’une formule majoritaire associant Écolo et la N-VA n’a dès lors aucun sens », commente le co-président d’Écolo, J.-M. Nollet  [23].

28La mission d’information Reynders - Vande Lanotte bat tous les records de longévité. Toutefois, elle ne parvient pas à réduire le fossé entre le PS et la N-VA. L’ancien secrétaire d’État T. Francken déclare à la mi-août : « Elio Di Rupo, qui a été Premier ministre, est un homme intelligent. Bart De Wever est également un homme très intelligent. Si vous les mettez ensemble dans une pièce et que vous y consacrez suffisamment de temps et d’énergie, il en sortira quelque chose »  [24]. La présidente de la fédération bruxelloise du PS, Laurette Onkelinx, lui rétorque : « C’est un niet absolu. PS et N-VA sont incompatibles, cela ne sert à rien d’essayer »  [25].

29Une échéance se présente aux négociateurs : la Belgique doit désigner son commissaire européen pour le 25 août. En 2014, la désignation de Marianne Thyssen (CD&V) à ce poste avait fait partie de la négociation autour de la répartition des postes au sein du futur gouvernement fédéral Michel I  [26]. Cette fois, impossible d’attendre la formation d’un nouvel exécutif. Les constitutionnalistes sont en désaccord quant à la possibilité pour le gouvernement fédéral en affaires courantes de procéder à une telle désignation : si, pour Marc Uyttendaele (ULB), il faut un vote à la Chambre des représentants, Christian Behrendt (ULiège) estime au contraire que la désignation du commissaire européen entre très clairement dans la catégorie des affaires urgentes, donc des affaires courantes  [27]. Une des pistes évoquées est alors de prolonger le mandat de M. Thyssen. Le Soir estime irréaliste la possibilité d’un tel intérim : M. Thyssen serait recalée par le Parlement européen lors de son audition. Plus vraisemblable apparaît la désignation de D. Reynders, dont le récent échec au Conseil de l’Europe est dans tous les esprits. Alors que le PS avance la possibilité d’une candidature de L. Onkelinx face à celle de D. Reynders, l’éditorialiste Béatrice Delvaux estime que « la Belgique atteint des sommets de désinvolture »  [28]. Le samedi 24 août, le gouvernement annonce finalement que D. Reynders (alors vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères et européennes, et de la Défense, chargé de Beliris et des Institutions culturelles fédérales) sera proposé pour le poste belge à pourvoir au sein de la Commission européenne. Si le Vlaams Belang annonce le dépôt d’un recours au Conseil d’État contre cette décision, la polémique va toutefois se tarir rapidement. Reste qu’il devient évident que l’un des deux informateurs royaux a désormais d’autres centres d’intérêt que sa mission d’information.

30Le 28 août a lieu une deuxième réunion des présidents de sept partis (N-VA, PS, MR, CD&V, Open VLD, SP.A et Groen). L’heure semble être à un optimisme mesuré. La Libre Belgique estime même que « le contexte international et le déficit budgétaire belge vont mettre la pression sur la N-VA et le PS. Ces partis pourraient mettre de l’eau dans leur vin et trouver un accord au fédéral plus vite que prévu »  [29].

31Pour leur part, les interlocuteurs sociaux appellent à la formation rapide d’un gouvernement fédéral. Dans une interview accordée à la presse, l’administrateur délégué de la Fédération des entreprises de Belgique (FEB), Pieter Timmermans, propose un « plan B » : « Soit on donne des pouvoirs supplémentaires au gouvernement en affaires courantes, soit on met sur pied un gouvernement de redémarrage (“doorstart regering”), c’est-à-dire une équipe limitée avec un programme limité, pour une période limitée. En cas de Brexit, il faut un ministre qui puisse agir comme un manager de crise. Parallèlement, les présidents de partis pourraient continuer à chercher un consensus, dans la discrétion et la sérénité, pour former un gouvernement de plein exercice. Il s’agit de donner le message aux citoyens, aux entreprises et à l’étranger, que l’on va gérer les principaux problèmes pendant trois ou six mois »  [30]. De son côté, le président de la Fédération générale du travail de Belgique (FGTB, syndicat socialiste), Robert Vertenueil, estime dans un autre média que le gouvernement Michel II est « en affaires cessantes, même fuyantes puisque tout le monde s’en va », et soumet aux informateurs royaux un « plan d’urgence national socio-climatique »  [31].

32Au début du mois de septembre, les journaux titrent sur le fait que la Belgique vit depuis « 100 jours sans gouvernement »  [32], ce qui est très inférieur à la réalité puisque plus du double de ce temps s’est déjà écoulé depuis la démission du gouvernement Michel II. Par ailleurs, le Comité de monitoring et le Bureau fédéral du plan (BFP) annoncent un déficit de 12 milliards d’euros en 2024 à politique inchangée  [33]. C. Michel appelle le PS et la N-VA à prendre leurs responsabilités, pendant que B. De Wever, en sa qualité de bourgmestre de la cité portuaire, reçoit le couple royal pour commémorer les 75 ans de la libération d’Anvers.

33Le lundi 9 septembre, les informateurs sont attendus au Palais royal pour une huitième rencontre et un sixième rapport. Peu d’informations filtrent sur le travail accompli par D. Reynders et J. Vande Lanotte. Les négociations fédérales semblent au point mort, en attendant que la situation se clarifie au niveau des deux principales entités fédérées : la Wallonie et la Flandre. Or celles-ci battent elles aussi des records de longueur pour la formation de leurs gouvernements respectifs, tandis que la Région de Bruxelles-Capitale dispose d’une nouvelle équipe depuis le 18 juillet : le gouvernement Vervoort III (PS/Écolo/Défi/Groen/Open VLD/one.brussels-sp.a). Bien que la presse avait cru savoir qu’une mission de préformation serait confiée par le Roi aux deux informateurs, c’est à un nouveau prolongement de leur mission d’information que l’on assiste finalement. Les discussions se poursuivent entre la N-VA, le PS, le MR, le CD&V, l’Open VLD et le SP.A. Groen n’est plus à la table des négociations, après avoir indiqué aux informateurs qu’il ne participerait pas à un gouvernement fédéral sans Écolo.

34Un rapport final est désormais attendu pour le début du mois d’octobre. « La phase d’information classique est terminée », indique D. Reynders, qui ajoute espérer pouvoir aboutir, au bout de cette mission d’information, à une proposition de formation  [34]. L’objectif est la mise sur pied d’une coalition dite bourguignonne dont le PS et la N-VA seraient l’axe central. Toutefois, il se dit que le PS et le SP.A ne veulent pas se retrouver dans une coalition qui rappellerait la suédoise et qu’ils n’accepteront de rejoindre une bourguignonne qu’à la condition que l’Open VLD soit évincé des négociations. D’après De Standaard, « ni l’un ni l’autre n’a envie de “dépanner la coalition suédoise” »  [35]. Le Soir pense également que les partis pressentis pour former un tel gouvernement sont trop nombreux : « Il faut 76 sièges à la Chambre pour atteindre la majorité. Les six partis en comptent 91. La N-VA (24 sièges) et le PS (20) sont incontournables. Le MR (14) aussi (sans lui, les cinq restants occuperaient 77 sièges, trop court). CD&V (12), [Open] VLD (12) et SP.A (9) en revanche ne sont pas indispensables. L’un d’eux sera, vraisemblablement, “éliminé”. D’où : les informateurs procéderont par bilatérales, testant chacun à tour de rôle. Pour finir à cinq. Si tout va bien »  [36].

35Toutefois, l’hypothèse d’un gouvernement sans la N-VA n’est pas écartée. Pour David Coppi, du journal Le Soir, « socialistes et écolos visent une coalition fédérale à dominante arc-en-ciel, sans la N-VA. Il faut attirer le VLD. Dur, dur. Peu y croient. Mais les grandes manœuvres ont commencé »  [37]. Néanmoins, à l’heure où la N-VA, le CD&V et l’Open VLD négocient le programme du futur gouvernement flamand, il n’est pas exclu que ces trois formations concluent un pacte qui lie leurs destins au niveau fédéral également.

36Les 13 et 17 septembre, des exécutifs « arc-en-ciel » (PS/MR/Écolo) se mettent en place respectivement à la Région wallonne (troisième gouvernement wallon présidé par Elio Di Rupo, PS) et à la Communauté française (gouvernement présidé par Pierre-Yves Jeholet, MR). Les négociations se poursuivent en Flandre. Un autre facteur qui retarde les négociations fédérales est la perspective d’un renouvellement à la tête de plusieurs partis. Du côté néerlandophone, le CD&V, l’Open VLD, le SP.A et Groen doivent chacun tenir une élection présidentielle. Du côté francophone, le PS, le MR, Écolo et Défi sont dans le même cas (au CDH, M. Prévot a succédé à Benoît Lutgen quelques mois avant les élections, en janvier 2019). Écolo ouvre le bal en élisant comme co-présidents J.-M. Nollet et Rajae Maouane, seuls candidats en lice, le 15 septembre. Le lendemain, P. Magnette, bourgmestre de Charleroi et par ailleurs ancien ministre fédéral, ancien ministre-président wallon et ancien président du PS faisant fonction, annonce sa candidature à la présidence du PS, tandis qu’un futur candidat à la présidence de l’Open VLD commence à se profiler : le chef du groupe Open VLD à la Chambre, Egbert Lachaert. Ce dernier estime, sur les ondes de Radio 1, que la coalition bourguignonne est « la seule réalisable » au niveau fédéral.

37Le 30 septembre, un accord de gouvernement est enfin conclu en Flandre. Questionné sur l’état d’avancement des négociations fédérales, B. De Wever botte en touche. Il déclare espérer une accélération, mais rappelle que l’initiative revient au souverain et que les différents niveaux de pouvoir sont indépendants  [38]. Le gouvernement flamand Jambon (N-VA/CD&V/Open VLD) est installé le 2 octobre.

38Alors que, dans une longue interview au Soir, le probable futur président du PS, P. Magnette, indique : « Avec la N-VA, on s’est beaucoup vu[s]. On [n’]est nulle part et d’accord sur rien »  [39], la mission des informateurs se termine le 7 octobre 2009, sur ce qu’il faut bien appeler un échec. D. Reynders, dont la nomination comme commissaire européen vient d’être approuvée par le Parlement européen  [40], annonce : « À nos yeux, il faut maintenant que les deux principales formations politiques dans leur communauté – le PS et la N-VA – puissent déterminer entre elles s’il est possible de trouver une base suffisante pour former un gouvernement »  [41].

39La mission des informateurs D. Reynders et J. Vande Lanotte est exceptionnellement longue ; elle ne se termine qu’au bout de quatre mois et une semaine (194 jours). Lorsque, après les élections du 10 juin 2007, le même D. Reynders avait été chargé d’une mission d’information, elle n’avait duré que 25 jours, avant qu’il cède sa place à Jean-Luc Dehaene (CD&V). Avant cela, la mission d’E. Di Rupo, nommé informateur après les élections du 18 mai 2003 avant de passer le relais au formateur Guy Verhofstadt (VLD), n’avait duré que 10 jours. Après cela, la mission d’information confiée à B. De Wever quelques jours après les élections du 13 juin 2010 avait duré 20 jours, avant qu’E. Di Rupo ne lui succède comme préformateur. La longueur de la mission de ce duo s’explique-t-elle par l’ampleur des travaux effectués et le nombre de rencontres menées par D. Reynders et J. Vande Lanotte ? Probablement pas. Certains acteurs de la société civile ont déploré de n’avoir pas été reçus par les deux hommes. Il semble bien que, contrairement à d’autres missions, l’information recherchée par le duo l’ait été essentiellement au sein du monde politique. Car, dès le début des négociations, chacun comprend que le nœud du problème se trouve dans les contours de la future coalition, singulièrement en Flandre. Dénouer ce nœud est la priorité, et non rechercher des idées neuves pour un programme de gouvernement. Par ailleurs, personne ne s’attend, à la fin du printemps 2019, à la constitution rapide d’un gouvernement fédéral. Il paraît alors normal d’attendre, de donner à la situation politique le temps de se décanter, et aux entités fédérées celui de se doter de gouvernements.

2. 2. La mission de préformation de Rudy Demotte et Geert Bourgeois (8 octobre 2019 - 4 novembre 2019)

40Le 8 octobre 2019, le Roi confie une mission de préformation à G. Bourgeois (N-VA) et R. Demotte (PS). Le premier est député européen, ancien ministre-président flamand et ancien président de son parti ; le second est président du Parlement de la Communauté française (depuis le 17 septembre précédent) et ancien ministre-président wallon et francophone  [42]. La mission qui leur est assignée est d’examiner « les bases concrètes en vue de la formation d’un gouvernement fédéral autour de leur parti respectif, et ceci avec les quatre autres partis impliqués dans les discussions », soit le MR, le CD&V, l’Open VLD et le SP.A. En désignant deux personnalités issues du PS et de la N-VA, le Palais royal indique que c’est bien la voie d’une coalition bourguignonne qu’il entend poursuivre. Par ailleurs, les deux ex-ministres-présidents présentent tous deux un profil de personnalités dépourvues d’ambitions personnelles au niveau fédéral. D’emblée, il leur est donné près d’un mois pour mener à bien leur mission, un rapport étant attendu le 4 novembre.

41Allier les nationalistes flamands et les socialistes francophones reste difficile. Pour l’ex-informateur J. Vande Lanotte, c’est toutefois la seule voie possible : « Quand on laisse la N-VA faire un gouvernement avec le VLD et le CD&V comme au niveau flamand, on se retrouve avec des accents beaucoup plus conservateurs. Je vais être un peu provocateur mais c’est pour ça qu’il faut faire une coalition avec les nationalistes. (…) Si on veut limiter l’influence des nationalistes, il faut soit s’allier contre eux, soit trouver une majorité alternative. Sauf que mathématiquement, avec les vetos qui ont été donnés par le CD&V et le VLD, l’alternative n’existe pas. Ces deux partis pèsent 13 %  [43] et sont dans une coalition avec les nationalistes au niveau flamand. On leur demande de prendre un risque que même un parti à 25 % hésiterait à prendre »  [44].

42Le 19 octobre, P. Magnette est élu président du PS (il prend ses fonctions dès le lendemain, en succession d’E. Di Rupo). Le même jour, Meyrem Almaci est réélue à la tête de Groen.

43Pendant la mission des deux préformateurs, la Commission européenne demande à la Belgique, dans une lettre adressée au vice-Premier ministre et ministre des Finances, Alexander De Croo (Open VLD), de revoir sa copie budgétaire. Depuis janvier 2019, la Belgique fonctionne en effet selon le système des douzièmes provisoires et le gouvernement fédéral en affaires courantes a remis à la Commission européenne un projet de budget 2020 sur la base d’une politique inchangée. Selon la Commission européenne, la mise en œuvre de ce projet de budget aboutirait à une détérioration de 0,3 % du produit intérieur brut (PIB) du déficit structurel de la Belgique, alors qu’il devrait être amélioré à hauteur de 0,6 % du PIB  [45]. La ministre du Budget, Sophie Wilmès (MR), indique à la Chambre qu’un nouveau budget devra être présenté sitôt qu’un nouvel exécutif fédéral aura pris ses fonctions.

44Sur ces entrefaites, le 25 octobre, C. Michel indique au Conseil des ministres qu’il souhaite pouvoir quitter ses fonctions de Premier ministre avant la fin du mois afin de se préparer à prendre la présidence du Conseil européen. C’est à S. Wilmès que, le lendemain, un Comité ministériel restreint confie le poste de Premier ministre, malgré la demande qu’aurait formulée le CD&V de voir le poste revenir à son vice-Premier ministre, K. Geens. Il est toutefois prévu que, lorsque D. Reynders quittera le gouvernement, K. Geens recevra la compétence des Affaires européennes, les autres restant attribuées à un ministre MR.

45Le 27 octobre, le Roi nomme S. Wilmès Première ministre  [46]. Elle est la première femme à endosser cette fonction en Belgique. Celle-ci confirme la démission du gouvernement fédéral et est chargée par le souverain « de la poursuite de l’expédition des affaires courantes » ; elle ne demande pas la confiance à la Chambre. Comme son prédécesseur Michel II, le gouvernement Wilmès I (MR/CD&V/Open VLD) est bien entendu minoritaire à la Chambre. Le portefeuille de ministre du Budget et de la Fonction publique, chargé de la Loterie nationale et de la Politique scientifique, est attribué à David Clarinval, jusqu’alors chef du groupe MR à la Chambre, qui prête serment devant le Roi le même jour.

46Le 2 novembre, l’un des candidats à la présidence du CD&V, J. Coens, propose de mettre sur pied un gouvernement fédéral de technocrates : « Cela a assez duré. Si les partis politiques sont incapables de former un gouvernement, laissons cette tâche à d’autres, à des experts », dit-il dans les colonnes de Het Laatste Nieuws [47].

47Au lendemain du congé de Toussaint, la mission de R. Demotte et G. Bourgeois s’achève dans un relatif désordre. Les préformateurs sont reçus au Palais le lundi 4 novembre en fin d’après-midi, et annoncent une conférence de presse dans la foulée. À la dernière minute, la conférence de presse est annulée et un communiqué du Palais royal annonce que le Roi réserve sa décision sur la suite des événements et qu’il va entamer des consultations. Faut-il continuer à explorer la piste d’un gouvernement associant le PS et la N-VA, alors que les difficultés n’ont pas pu être surmontées par les préformateurs, ou explorer une piste alternative, à savoir celle d’un arc-en-ciel associant les familles socialiste (PS et SP.A), libérale (MR et Open VLD) et écologiste (Écolo et Groen), qui disposeraient ensemble d’un siège de majorité à la Chambre, éventuellement avec le CD&V en renfort ?

2.3. La mission d’information de Paul Magnette (5 novembre 2019 - 9 décembre 2019)

48Le 5 novembre, le roi Philippe poursuit ses rencontres avec tous les négociateurs des partis qui pourraient former une coalition bourguignonne ou arc-en-ciel. La plupart du temps, ces négociateurs sont les présidents de parti eux-mêmes : B. De Wever (N-VA), P. Magnette (PS), le duo R. Maouane - J.-M. Nollet (Écolo), Gwendolyn Rutten (Open VLD), John Crombez (SP.A) et M. Almaci (Groen). Toutefois, deux partis au sein desquels se joue une élection présidentielle sont représentés par leur chef de file au gouvernement fédéral : le MR, avec la Première ministre S. Wilmès, et le CD&V, avec le vice-Premier ministre K. Geens. La Libre Belgique constate que l’impasse au niveau fédéral risque de conduire à des élections anticipées  [48]. La tension est en effet palpable entre les deux principaux partis candidats au pouvoir. Le président de la N-VA s’interroge sur Twitter : « Sur quelle planète vit P. Magnette ? », répliquant à ce dernier qui a indiqué ne pas vouloir discuter avec le parti nationaliste flamand entre autres « parce que la N-VA ne veut pas parler de social ». En fin de journée, c’est le président du PS qui est désigné informateur par le Roi.

49Exit donc les duos, c’est à un homme seul que le Palais confie une mission d’information. Même si le communiqué royal n’indique pas qu’une telle piste doive être privilégiée, pour les observateurs c’est plutôt l’option arc-en-ciel (réunissant socialistes, libéraux et écologistes) qui va être désormais explorée. Dans La Libre Belgique, Francis Van de Woestyne écrit que P. Magnette « répète qu’il est impossible, à ses yeux, de constituer un gouvernement fédéral réunissant le PS et la N-VA. Son hypothèse de travail devrait donc être de privilégier un arc-en-ciel écartant les nationalistes flamands. Le Roi l’a pris au mot », tout en estimant que, pour réussir, P. Magnette « doit convaincre les libéraux et les démocrates-chrétiens flamands de gouverner au fédéral sans la N-VA. Problème : ils n’en ont ni la force, ni l’envie. Donc, dans l’état actuel des choses, les chances de réussite de ce scénario arc-en-ciel sont proches de zéro »  [49]. La réussite de la mission de P. Magnette dépend donc de sa capacité à convaincre l’Open VLD et peut-être le CD&V de s’embarquer dans un gouvernement fédéral sans la N-VA, donc dans un gouvernement qui serait minoritaire dans le groupe linguistique néerlandais de la Chambre des représentants : un arc-en-ciel ne disposerait que de 29 sièges sur les 89 de ce groupe linguistique. En y ajoutant le CD&V, la coalition se rapprocherait d’une majorité sans toutefois l’atteindre : 41 sièges.

50Durant les premiers jours de la mission de P. Magnette, un vent d’optimisme souffle à la suite du plaidoyer du bourgmestre de Gand, Mathias De Clercq (Open VLD), en faveur d’une coalition avec les socialistes et les écologistes  [50]. Les observateurs francophones, en particulier, y détectent un signe favorable, tandis que la presse néerlandophone évoque un risque de schisme au sein du parti libéral flamand.

51L’informateur royal, qui dit estimer ses chances de réussite à 2 ou 3 sur une échelle de 10  [51], opte pour une nouvelle méthode. Il identifie des thèmes prioritaires (l’amélioration du taux d’emploi, les enjeux climatiques, l’amélioration du fonctionnement de la justice, la politique de migration et la lutte contre la pauvreté) à propos desquels il sonde dix partis : les socialistes, les libéraux et les écologistes, ainsi que la N-VA, le CD&V, le CDH et Défi.

52Simultanément, se déroulent des élections présidentielles au SP.A et au MR (ni J. Crombez ni C. Michel ne sont candidats à leur propre succession). Le 8 novembre, le député flamand Conner Rousseau est élu président des socialistes flamands. Quatre jours plus tard, le premier tour des élections internes au parti libéral francophone livre son résultat : un second tour verra s’affronter le ministre fédéral Denis Ducarme et le sénateur coopté et ex-député wallon Georges-Louis Bouchez. On dit alors le second plus favorable à la N-VA que le premier. In fine, c’est G.-L. Bouchez qui prendra la tête du parti libéral francophone, à la date du 29 novembre (en remplacement de C. Michel, qui deviendra président du Conseil européen deux jours plus tard).

53Le 18 novembre, lors de la conférence de presse qui suit la présentation de son rapport au Roi, P. Magnette se montre raisonnablement optimiste. Un média rapporte : « Détaillant le rapport qu’il a présenté au Roi, l’informateur, Paul Magnette, a fait sienne cette phrase de Winston Churchill : “Un pessimiste voit la difficulté dans chaque opportunité, un optimiste voit l’opportunité dans chaque difficulté”. Je suis, a dit le président du PS, du côté de l’optimiste car un vrai dialogue a commencé à se construire »  [52]. Selon l’informateur, un consensus se dégagerait sur le refinancement de la justice et de la police, sur la lutte contre les violences faites aux femmes et sur la lutte contre la cybercriminalité. Ce sont toutefois là des thèmes d’importance secondaire dans le cadre de la formation du gouvernement fédéral. Cependant, il est à noter que, parmi les thèmes prioritaires retenus par l’informateur, figure désormais la modernisation de l’État : cela impliquerait-il d’ouvrir la porte à une septième réforme de l’État ? La réponse à cette question n’apparaît alors pas de manière évidente.

54La mission de P. Magnette est prolongée jusqu’au lundi suivant, 25 novembre. Pendant ce temps, il apparaît qu’il y aura un second tour à la présidentielle du CD&V : J. Coens, CEO du port de Zeebrugge et bourgmestre de Damme, affrontera le président des Jong CD&V et conseiller communal à Vilvorde, Sammy Mahdi. Les deux candidats ont obtenu respectivement 26 % et 19 % des suffrages au premier tour. À ce moment, un ténor du parti, Eric Van Rompuy, président des CD&V-Senioren et ancien député fédéral, refuse de placer le parti dans une position d’arbitre s’agissant de la composition du futur exécutif fédéral. Il estime qu’« un gouvernement arc-en-ciel, ce serait suicidaire »  [53].

55Alors que la Commission européenne adresse à la Belgique un nouvel avertissement sur le plan budgétaire, les analyses des observateurs divergent. D. Coppi estime dans Le Soir que « le projet arc-en-ciel est fragilisé »  [54], tandis que Frédéric Chardon considère dans La Libre Belgique que « l’hypothèse d’un gouvernement fédéral sans la N-VA » se renforce  [55].

56La pression semble alors se placer sur l’Open VLD. Le Soir estime que le parti hésite devant la possibilité d’une coalition arc-en-ciel, en raison du fait que cette formule ne reposerait que sur une étroite majorité à la Chambre et n’aurait pas de majorité dans le groupe linguistique néerlandais de cette assemblée, et « parce qu’elle défierait politiquement et symboliquement le parti flamand qui fait la pluie et le beau temps ces dernières années, qui domine au nord et, par la force ces choses, à l’échelle belgo-belge, celui de Bart De Wever »  [56]. Vu ces obstacles, il se dit néanmoins que l’Open VLD pourrait se voir offrir, pour prix de sa participation, le poste de Premier ministre (poste pour lequel le journal évoque les noms de G. Rutten, d’A. De Croo ou de P. Dewael). Au sein du parti, la ministre fédérale Maggie De Block (en charge des Affaires sociales, de la Santé publique et de l’Asile et la Migration) déclare : « La N-VA se rapproche de plus en plus du Vlaams Belang... Ils font de la désinformation sur l’asile (…). La N-VA ne va pas aussi loin dans ses idées que le Vlaams Belang mais s’en rapproche de plus en plus. Il suffit de regarder sur Twitter et au sein du Parlement. Un axe Vlaams Belang/N-VA se forme »  [57]. Quant à lui, le ministre flamand Bart Somers (chargé notamment des Affaires intérieures) estime que « la N-VA a une trajectoire et une histoire qui montrent qu’ils fuient leur responsabilité au niveau fédéral »  [58]. Ces deux personnalités du parti libéral flamand semblent s’engager en faveur d’un arc-en-ciel. La N-VA réagit en les accusant d’affaiblir la position des Flamands au sein des négociations : « Notre intention est de calquer l’accord de majorité fédéral sur les Flamands et de mettre le cap sur le modèle des pays du nord de l’Europe. Somers, par ses déclarations, donne aujourd’hui de l’élan à Magnette et aux francophones pour nous amener vers le modèle des pays du sud de l’Europe. Les propositions de Magnette ne sont pas bonnes pour les Flamands. Ils veulent ouvrir le robinet des dépenses et de l’endettement », selon le vice-président de la N-VA, Lorin Parys  [59].

57De son côté, le CD&V est loin d’être convaincu par la formule arc-en-ciel. Aux réticences face à un gouvernement qui serait minoritaire dans le groupe linguistique néerlandais de la Chambre, s’ajoute désormais un agacement à l’égard des propositions de loi ayant trait à l’élargissement des conditions mises à l’interruption volontaire de grossesse (IVG), alors débattues dans l’assemblée fédérale.

58Alors que l’on approche de la barre des six mois écoulés depuis le scrutin, on commence à prendre la mesure de l’ampleur de la crise politique. Dans une interview croisée au journal Le Soir, le constitutionnaliste M. Uyttendaele et le philosophe Vincent de Coorebyter alertent sur « la première vraie crise existentielle que l’on traverse depuis des décennies »  [60]. Face à la passivité de l’opinion publique, M. Uyttendaele observe : « La crise est double. (…) Deux types de maladies convergent : la maladie belge et la maladie démocratique, l’indifférence du citoyen, qui se dit que finalement tout ça n’a pas beaucoup d’importance, ne le concerne pas, alors qu’il sera au bout du compte la première victime de ce qu’il croit être sans intérêt aujourd’hui. Alors, ce pourrait être le drapeau belge, le drapeau flamand, le drapeau wallon, un autre drapeau, peu importe, ce qui m’inquiète, c’est qu’il n’y a pas de drapeaux. Qu’il ne se passe rien, qu’on finisse par trouver l’anormalité normale, la non-gestion parfaitement supportable. Et que tout ça devienne vaseux ». Les deux analystes observent que, contrairement à la crise de 2010-2011, où il y avait des enjeux, des questions sur lesquelles il était entendu qu’il fallait débattre et trouver un accord, ici, la crise est engendrée par le fossé majeur dans la carte électorale entre le sud et le nord du pays. Ainsi que le résume V. de Coorebyter, « la grande difficulté de la situation actuelle chez nous, c’est que l’on demande à deux partis quasiment incompatibles de constituer un gouvernement tout en laissant ouverte l’hypothèse qu’il y aurait peut-être quand même une autre possibilité [le gouvernement arc-en-ciel], et là, alors, on cultive un certain immobilisme ».

59L’interview de ces deux professeurs de l’ULB suscite des réactions, et notamment celle de l’un des deux candidats au poste de président du MR, G.-L. Bouchez, qui estime : « Ces difficultés conjoncturelles ne traduisent pas, à mon sens, une impossibilité à s’entendre entre francophones et Flamands. Le vrai souci, c’est la montée de populismes, au nord comme au sud, le [Vlaams] Belang et le PTB. C’est cela qui est paralysant. Les sièges décrochés par [c]es deux formations privent les partis responsables de marge de manœuvre, ils réduisent le champ des possibles en termes de coalitions »  [61]. Dans La Libre Belgique, F. Van de Woestyne note que « la Belgique s’enfonce dans la crise politique, voire la crise de régime, dans l’indifférence la plus totale »  [62].

60Le rapport présenté au Roi par P. Magnette le 25 novembre 2019 prépare le chemin vers un gouvernement fédéral sans la N-VA  [63]. La Libre Belgique estime que la formule arc-en-ciel gagne en crédibilité  [64]. Interviewé dans Le Soir quelques jours plus tard, R. Vertenueil apporte son soutien au président du PS : « À Paul Magnette, je dis : Tiens bon, fais gaffe ! » Le président de la FGTB estime que « l’informateur travaille bien sur le fond, sur le contenu », et « salue cette façon de faire, cette méthode, qui permet d’avancer »  [65]. L’administrateur délégué de la FEB, P. Timmermans, réplique dans les colonnes du même journal le lendemain, et met en garde : « Il faut un gouvernement de plein exercice au plus vite, car le pays fait face à des chocs externes – pensez à l’état du commerce international –, aussi à des chocs internes, et là je pense à des débats au Parlement relatifs au salaire minimum, à l’impôt des sociétés, aussi au vote sur les blouses blanches (…). Là, je dis : avoir des accents sociaux, c’est oui ; avoir des accents écologiques, c’est oui ; mais envisager des politiques destructrices pour notre croissance, notre compétitivité, notre économie, c’est non. Or, nous courons ce risque. Je l’ai dit à Paul Magnette. (…) En tout état de cause, il est hors de question pour moi de revenir sur la loi de 1996 qui encadre la formation et l’évolution des salaires en Belgique »  [66].

61Le vendredi 29 novembre, G.-L. Bouchez est élu président du MR. Dès le lendemain, il procède à un remaniement ministériel. Il confie à Philippe Goffin, candidat malheureux au premier tour de l’élection présidentielle du MR et qui s’est rallié à lui au second tour, le poste de ministre des Affaires étrangères et de la Défense que laisse vacant D. Reynders, qui démissionne le même jour pour devenir commissaire européen à dater du 1er décembre  [67]. Les Affaires européennes sont toutefois attribuées au ministre de la Justice K. Geens (CD&V) et les Institutions culturelles fédérales et Beliris à la Première ministre S. Wilmès (MR). La fonction de vice-Premier ministre MR revient à David Clarinval, récemment nommé ministre fédéral du Budget et de la Politique scientifique.

62Le samedi 30 novembre, P. Magnette réunit les six partis susceptibles de constituer un gouvernement arc-en-ciel. Cette réunion « secrète » a été éventée dans la presse néerlandophone, et suscite les railleries du ministre Pieter De Crem (CD&V) et du président de la N-VA, B. De Wever. Si le CD&V n’a pas été invité, c’est parce qu’il a indiqué que la note de P. Magnette était « imbuvable » à ses yeux. Le lendemain, sur les antennes de la VRT, le vice-Premier ministre et négociateur du CD&V pour la formation d’un exécutif fédéral, K. Geens, redit la volonté de son parti de voir la N-VA impliquée, plaidant pour une mission de « co-information » menée par P. Magnette et B. De Wever : « Ce dont je voudrais convaincre les francophones, c’est que la N-VA est aussi incontournable pour les partis néerlandophones que le PS l’est pour l’instant pour les partis francophones ». Sur le plateau de RTL-TVi, E. Van Rompuy ne dit pas autre chose : « Le gouvernement arc-en-ciel est mort. Il faut une initiative sur une base commune des présidents du PS et de la N-VA ». B. De Wever lui-même annonce au journal télévisé de la VRT qu’il est disponible, tout en critiquant les initiatives prises par P. Magnette, qui est selon lui sorti de sa mission d’information  [68]. « L’heure d’un duo Magnette - De Wever a-t-elle sonné ? »  [69], s’interrogent les médias.

63Le 1er décembre, le député fédéral François De Smet succède à Olivier Maingain à la présidence de Défi, l’emportant avec 62,3 % des voix dans une élection où s’affrontaient quatre candidats  [70]. Dans sa première interview, le nouveau président plaide pour un gouvernement fédéral sans la N-VA  [71].

64Le lendemain, P. Magnette présente une version révisée de sa note, dans laquelle il identifie dix chantiers prioritaires. Alors que la nouvelle version de la note Magnette est plus favorable à l’Open VLD selon La LibreBelgique, DeTijd estime qu’il y a peu de changement par rapport à la précédente  [72].

65Le 6 décembre, J. Coens devient président du CD&V. Toutefois, il ne l’a emporté que par 53 % des voix contre son concurrent S. Mahdi. Le résultat du scrutin ne lui offre donc pas une assise aussi large qu’espérée.

66La possibilité d’une coalition de type arc-en-ciel ne se concrétise pas. Le 7 décembre, P. Magnette rend visite à B. De Wever à Anvers. À l’issue de cette entrevue, le président de la N-VA déclare à la VRT : « Les dégâts causés par le VLD sont énormes. J’ai rencontré M. Magnette et il a le goût de sa bouillie arc-en-ciel bien en bouche. (...) Il faudra beaucoup de dentifrice flamand pour se laver la bouche »  [73].

67Le 9 décembre, P. Magnette remet son rapport final au Roi et lui demande d’être déchargé de sa mission. Le souverain tient sa réponse en suspens. La presse évoque une mission pour B. De Wever.

2.4. La mission d’information de Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens (10 décembre 2019 - 31 janvier 2020)

68Toutefois, le 10 décembre, en fin de journée, ce sont les nouveaux présidents du MR, G.-L. Bouchez, et du CD&V, J. Coens, que le Roi désigne comme informateurs après avoir mis un terme à la mission de P. Magnette. « Deux novices pour sortir de la crise politique », titre Le Soir, « pour la mission de la dernière chance… »  [74].

69Après l’échec de la mission de P. Magnette, c’est à nouveau la piste d’un gouvernement autour d’un axe central constitué du PS et de la N-VA qui est explorée, tandis que la possibilité d’élections fédérales anticipées en cas d’échec est de plus en plus évoquée.

70Selon le journaliste Bertrand Henne (RTBF), la mission des deux informateurs consiste en réalité à clore définitivement l’option d’une participation de la N-VA au futur gouvernement fédéral : « Comme dans le film, on va rouvrir et fermer des portes et pendant ce temps, les convoyeurs attendent. L’idée étant de convaincre les derniers sceptiques au CD&V que les portes d’un gouvernement avec la N-VA sont bien fermées. Les autres, les directions du VLD, celles du MR, d’Écolo, de Groen, du SP.A, du PS et même de la N-VA savent déjà que ces portes sont fermées et qu’on est là dans la pure stratégie. Le gouvernement sans la N-VA n’est pas encore né, le gouvernement avec la N-VA n’est pas encore mort. Entre les deux surgissent J. Coens et G.-L. Bouchez. Telle est la seule voie possible pour eux, faire mourir définitivement l’idée d’un gouvernement avec la N-VA en démontrant, une nouvelle fois, que le PS et la N-VA sont incapables de s’entendre »  [75]. Pour De Standaard en revanche, tout reste possible, mais plus pour longtemps : « [Les deux informateurs] disposent d’une semaine pour parcourir toutes les pistes possibles mais aussi se convaincre eux-mêmes de ce que le MR et le CD&V veulent exactement : former une coalition arc-en-ciel avec les socialistes, les libéraux, les verts et le CD&V, ou explorer à nouveau la piste violette-jaune dans laquelle le PS et la N-VA gouverneraient ensemble. (…) Dans quelques jours, le choix qui se présente depuis le 26 mai devra être tranché : y aura-t-il un gouvernement avec ou sans la N-VA ? »  [76]

71À l’évidence, la trajectoire des négociations est tout sauf claire pour les observateurs, et la possibilité de nouvelles élections est de plus en plus envisagée. Toutefois, le baromètre politique publié le 13 décembre par Le Soir et RTL-TVi éloigne cette perspective : le Vlaams Belang s’envole à 27,3 % des intentions de vote, tandis que la N-VA se tasse à 22,1 %  [77]. La possibilité d’un gouvernement fédéral sans la N-VA semble dès lors reculer à nouveau. Invité sur La Première (RTBF), le député fédéral et ancien secrétaire d’État fédéral Hendrik Bogaert (CD&V) estime que le fait d’« avoir la N-VA et le Vlaams Belang dans l’opposition devrait alarmer tout le monde (au vu des récents sondages). Si j’étais francophone, je voudrais que la N-VA soit dans le gouvernement »  [78].

72L’urgence de la formation d’un gouvernement fédéral devient évidente alors que la Belgique s’apprête à aborder un deuxième exercice sans budget, en fonctionnant selon le système des douzièmes provisoires. Le vice-Premier ministre D. Clarinval (MR) dit ne voir que l’arc-en-ciel pour éviter la perspective d’élections anticipées, avant de faire marche arrière quelques heures plus tard  [79].

73Toutefois, l’atmosphère entre les hypothétiques futurs partenaires s’est détériorée. Réagissant aux propos de B. De Wever à propos de la « bouillie arc-en-ciel », le ministre wallon Jean-Luc Crucke (MR) déclare : « Clairement, moi j’en ai assez qu’on nous traite comme si on était des Untermensch, parce que nous sommes Wallons. Ça ne passe pas »  [80].

74Le 17 décembre, le contenu de la note des préformateurs R. Demotte (PS) et G. Bourgeois (N-VA) actant l’impossibilité pour eux d’envisager la formation d’un gouvernement réunissant leurs deux formations politiques fuite dans la presse. D’après le compte rendu du Soir, l’impossibilité de conclure un accord est manifeste sur chacun des grands thèmes abordés : le budget, le marché de l’emploi, la norme d’augmentation des salaires, les pensions, la sortie du nucléaire, l’immigration et les réformes institutionnelles  [81].

75À cette phase des discussions, la N-VA continue à faire état de sa disponibilité pour œuvrer à la mise sur pied d’une coalition fédérale avec le PS, tandis que ce dernier oppose une fin de non-recevoir et semble attendre que le tandem Bouchez - Coens acte cette impossibilité et reparte sur la piste d’un arc-en-ciel.

76Après la remise d’un premier rapport au Roi, le 20 décembre, G.-L. Bouchez et J. Coens écartent l’alternative entre une coalition bourguignonne et une coalition arc-en-ciel. « La seule solution possible se situera “au centre” », expliquent-ils au cours d’une conférence de presse  [82]. Certaines sources, relayées par Le Soir, affirment que G.-L. Bouchez propose un gouvernement qui associerait la N-VA, le PS, le MR, le CD&V et le SP.A (donc sans l’Open VLD). Dans ce scénario, seule la famille socialiste serait réunie et le poste de Premier ministre reviendrait à P. Magnette. Toutefois, La Libre Belgique écrit : « Nos contacts au fédéral démentent que cette piste ait été mise sur la table »  [83].

77Les commentateurs tournent alors leur attention vers une nouvelle possibilité de coalition, réunissant les partis socialistes, libéraux, démocrates-chrétiens et écologistes ; cette formule est rapidement baptisée la Vivaldi (en référence à l’auteur des Quatre saisons, puisqu’elle réunit les quatre familles politiques belges). Pour embarquer le CD&V dans cette aventure, le poste de Premier ministre pourrait lui être promis ; ce serait alors le vice-Premier ministre K. Geens qui obtiendrait le poste. Toutefois, à la veille de Noël, le principal intéressé réplique que la N-VA ne peut pas être exclue : « Le Nord payera la facture électorale, pas le Sud ». « [Hormis] le cas de Charles Michel », rappelle-t-il, « la coutume veut que le premier parti donne le Premier ministre ». « On n’aurait jamais eu droit à Marrakech si M. De Wever avait été au 16 », assure-t-il  [84]. Le fait que lui-même soit envisagé comme Premier ministre serait « le signe que les deux plus grands partis ne prennent pas leurs responsabilités dans leur pays ». Dans « des conditions normales », estime-t-il, c’est P. Magnette ou B. De Wever qui devrait « endosser ces responsabilités »  [85].

78La fin de l’année est l’occasion de prendre un peu de recul pour dresser un bilan de la situation. La question des réformes institutionnelles n’est plus un tabou. Pour V. de Coorebyter, interrogé dans L’Écho, « il y a une alternative : une Belgique à quatre. La Flandre, la Wallonie, Bruxelles et la Communauté germanophone recevraient chacune un territoire et toutes les compétences des Régions et des Communautés. On y est déjà pour une large part. Aller jusqu’au bout de cette logique aurait des vertus de simplification et de lisibilité »  [86]. Pour sa part, le constitutionnaliste et ancien député fédéral (élu sur liste N-VA) Hendrik Vuye déclare dans La Libre Belgique : « Sans réformes institutionnelles profondes, nous subirons un appauvrissement collectif ». Et d’enchaîner que « la Belgique souffre de trois maux essentiels : la mécanique institutionnelle y est inefficace ; le comportement court-termiste des partis politiques accentue ces blocages ; les hommes et femmes politiques francophones et néerlandophones ne se comprennent plus »  [87]. Dans Le Soir, les cinq nouveaux dirigeants de parti francophones – P. Magnette (PS), G.-L. Bouchez (MR), R. Maouane (Écolo), M. Prévot (CDH) et F. De Smet (Défi) – sont d’avis qu’une septième réforme de l’État s’impose ; la date de 2024 fait consensus  [88].

79À la rentrée de janvier 2020, les négociations reprennent, sans que la clarté ait pu être faite sur l’identité des futurs partenaires de la coalition. Les deux informateurs ont rédigé une note de base, que l’on dit être « plus de centre droit » que ne l’était la note de P. Magnette. Ils la présenteront aux dix partis susceptibles de monter dans un gouvernement fédéral (N-VA, PS, MR, Écolo, CD&V, Open VLD, SP.A, Groen, CDH et Défi). Toutefois, il n’y a pas de réunion collective : c’est un à un que les partis sont reçus par les informateurs.

80Si du côté flamand on pointe le refus du PS de gouverner avec la N-VA, du côté francophone, on se demande toujours si la N-VA est prête à s’engager. Le Soir note : « Les dernières déclarations du ministre-président flamand, Jan Jambon, ne donnent en tout cas pas l’impression que son parti trépigne à l’idée de monter dans un attelage fédéral. Certes, le numéro un flamand répète que “ce serait plus facile si les trois partenaires de la coalition flamande [N-VA, CD&V, Open VLD] collaboraient aussi au fédéral”. Mais il semble plutôt se réjouir du blocage actuel de la situation politique. Dans De Tijd, voici une semaine, il déclarait déjà : “Je vois que la Belgique ne fonctionne pas”. Et dans De Zondag ce dimanche, il appuyait : “De plus en plus de gens voient que ce pays est devenu ingouvernable” »  [89]. Toutefois, le Vlaams Netwerk van Ondernemingen (VOKA, organisation patronale flamande) – dont, en 2010, B. De Wever avait dit qu’elle était son « vrai patron » – insiste pour voir un gouvernement fédéral se mettre en place et préparer une réforme de l’État  [90].

81Les informateurs doivent remettre un premier rapport au Roi le 13 janvier. On espère alors voir les contours de la future coalition fédérale dessinés à ce moment-là. Le déblocage est attendu du côté du CD&V et de l’Open VLD : ces deux partis vont-ils accepter de former un gouvernement avec les socialistes et sans la N-VA ? S’ils n’ont certes pas été disposés à le faire sur la base de la note présentée par P. Magnette, peut-être accepteront-ils cette idée sur la base d’une note orientée plus à droite – ou moins à gauche – présentée par le duo Bouchez - Coens ? Toutefois, si le contenu de la note séduit le CD&V et l’Open VLD, il est alors fort peu probable qu’elle soit récusée par la N-VA. « Bart De Wever ne se mettra jamais hors-jeu tout seul, il faut le pousser vers la sortie », estime un négociateur  [91].

82Précisément, le contenu de la note Bouchez - Coens ne suscite pas l’enthousiasme une fois celle-ci présentée aux partis négociateurs. « “Inadmissible”, “Brouillonne”, “Indigente”, “À droite toute”, “Pas très emballante”, “Pleine de fautes d’orthographe” » sont des expressions qui reviennent souvent chez ceux qui en ont pris connaissance, écrit La Libre Belgique [92]. Toutefois, B. De Wever se dit « très agréablement surpris »  [93], tandis que le chef du groupe N-VA à la Chambre des représentants, Peter De Roover, estime que l’« on tient maintenant davantage compte de la réalité politique en Flandre. Ce qui est sur la table s’écarte de la note Magnette. Elle est plus réaliste »  [94].

83Le moment n’est donc pas venu de fermer la porte à la N-VA. Et cela d’autant moins que le vice-Premier ministre CD&V, K. Geens, pressenti pour occuper le poste de Premier ministre dans l’hypothèse d’une coalition Vivaldi, rappelle que le CD&V tient toujours à une coalition avec la N-VA à l’échelon fédéral. « Cela continue à jouir de la préférence de mon parti : avoir une large majorité en Flandre qui soutient la coalition », souligne-t-il avant d’ajouter : « Je l’ai dit en son temps et répété, et je ne suis pas quelqu’un qui change si facilement d’avis »  [95]. De même, lors de la réception de Nouvel An de la N-VA à Malines, B. De Wever insiste sur le fait que son parti est toujours dans la course pour la formation du gouvernement fédéral. À cette occasion, le président de la N-VA indique que les points d’accord sont nombreux : « Il y a le volet socio-économique. Nous sommes prêts à faire de nouvelles politiques sociales, si on peut augmenter le taux de participation sur le marché du travail, pour par exemple augmenter les taux de pensions. Nous sommes demandeurs pour cela. Sur le volet institutionnel, où on sait que tout n’est pas possible mais nous pouvons peut-être envisager des pas en avant. Quant au volet immigration et sécurité, je pense qu’un accord est bien possible ». Le problème, estime B. De Wever, réside dans l’Open VLD : « Gwendolyn Rutten avait donné le signal au PS, disant qu’elle était prête à entrer dans un gouvernement arc-en-ciel et, depuis, c’est normal que le PS n’a aucune envie de parler à la N-VA puisqu’ils ont vu une formule qui est beaucoup plus à gauche. Mais si cette formule ne fonctionne pas, si c’est impossible de convaincre le CD&V de rejoindre cette coalition, je pense que nous entrons dans une nouvelle phase »  [96].

84Le nœud se trouve davantage au sein de l’Open VLD que du CD&V. Le parti libéral flamand s’apprête à élire son nouveau président dans quelques semaines, et G. Rutten fait l’objet de contestations. Ceux qui sont en faveur d’une coalition avec la N-VA soupçonnent G. Rutten d’avoir voulu favoriser une coalition de type arc-en-ciel ou Vivaldi afin d’y obtenir le poste de Première ministre.

85Rien ne filtre de la rencontre des informateurs avec le Roi qui a lieu le 13 janvier. G.-L. Bouchez et J. Coens poursuivent leur mission dans une atmosphère difficile, où fusent rumeurs et contre-rumeurs. On rapporte que B. De Wever aurait annoncé aux informateurs la conclusion d’un accord entre son parti, le CD&V et le SP.A  [97] ; on évoque la possibilité d’un gouvernement fédéral dont serait absent le PS  [98]. Toutefois, dans une virulente interview à la RTBF, le député flamand Bruno Tobback (S.PA) – ancien président du parti et ancien ministre fédéral – dément et exprime sa préférence pour une coalition de centre-gauche : « À mon avis, ce qu’a proposé Bart De Wever n’a rien de sérieux. Il est en train d’essayer de freiner, avec la collaboration des infor-machins, de faire traîner »  [99].

86Le 18 janvier 2020, le député fédéral et bourgmestre de Saint-Josse-ten-Noode (et ancien secrétaire d’État régional bruxellois), Emir Kir, est exclu du PS ; il siégera dès lors comme indépendant à la Chambre des représentants. Le PS perd ainsi l’un de ses 20 sièges à la Chambre. Et par le fait même, une coalition associant les six partis socialistes, libéraux et écologistes ne disposerait plus d’une majorité de 76 sièges sur 150 – configuration que de nombreux acteurs et observateurs considéraient déjà comme trop fragile – et ne serait dès lors plus envisageable, ne comptant que 75 députés (à savoir 46 sièges sur 61 au sein du groupe linguistique français, et toujours 29 sièges sur 89 au sein du groupe linguistique néerlandais).

87Le 20 janvier 2020, « Blue Monday » ainsi que le souligne la presse  [100], les informateurs se rendent au Palais royal sans piste de solution. Leur seul viatique est un bouquet de fleurs pour la reine Mathilde dont c’est l’anniversaire. Répondant sur RTL-TVi à la question de savoir si la solution d’un gouvernement fédéral provisoire pouvait être envisagée, P. Magnette, répond une nouvelle fois par l’affirmative. De son côté, l’extrême droite, sentant la lassitude dans la population flamande, lance une pétition en faveur de nouvelles élections fédérales. À l’issue de leur entrevue avec le Roi, les deux informateurs sont prolongés dans leur mission pour une nouvelle semaine.

88Lors de la présentation des vœux de Nouvel An de Défi, le président F. De Smet fait offre de service pour une « coalition 77 », c’est-à-dire une formule qui associerait les partis des familles socialiste, libérale et écologiste ainsi que son propre parti  [101]. Dans La Libre Belgique, Étienne Dujardin, conseiller communal MR à Woluwe-Saint-Pierre, promeut quant à lui une autre coalition à 77 : N-VA, MR, CD&V, Open VLD, SP.A et CDH (soit sans le PS ni les partis écologistes)  [102].

89Si certains estiment qu’il faut impliquer B. De Wever, P. Magnette répète son refus d’une coalition réunissant le PS et la N-VA : « On a eu une trentaine de réunions avec la N-VA et ça ne mène à rien. Autour de la table, le PS est de bonne volonté mais Bart De Wever ne fait aucun compromis. À un moment, cela a assez duré ». Dès lors, P. Magnette ne voit pas l’intérêt d’une mission qui lui serait confiée en duo avec le président de la N-VA : « Ça ne servirait à rien », dit-il  [103].

90Le 28 janvier, au terme d’une entrevue exceptionnellement longue avec le Roi, et contre toute attente, G.-L. Bouchez et J. Coens voient leur mission prolongée d’une nouvelle semaine. La presse est sévère avec les informateurs et l’ensemble du processus, alors que la perspective d’élections fédérales anticipées est de plus en plus souvent évoquée.

2.5. La mission de Koen Geens (31 janvier 2020 - 14 février 2020)

91Lors des vœux aux corps constitués, le 30 janvier, le roi Philippe consacre l’entièreté de son discours à la crise politique et appelle à « laisser tomber les exclusives et installer un gouvernement de plein exercice ».

92Le lendemain, à la surprise générale et en contradiction avec ce que le Palais a annoncé trois jours plus tôt, G.-L. Bouchez et J. Coens sont déchargés de leur mission d’information, tandis que le vice-Premier ministre K. Geens (CD&V) est chargé par le Roi de « prendre les initiatives nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement de plein exercice ».

93L’octroi d’une mission à K. Geens à ce stade surprend à plus d’un titre. Notamment, les observateurs attendaient plutôt B. De Wever dans le rôle du prochain chargé de mission royale. La Libre Belgique explique que les informateurs et le Palais espéraient qu’un duo Magnette - De Wever puisse être lancé mais que cette piste a avorté. Certes, B. De Wever était prêt à endosser le costume de missionnaire royal, même seul. Et certes, les autres formations politiques n’étaient pas opposées à cette perspective, pensant que le CD&V pourrait finir par accepter une coalition Vivaldi si B. De Wever était d’abord « mouillé »  [104]. Mais le Palais aurait refusé cette piste, à la surprise du principal intéressé : « Je me tenais à Bruxelles avec des chaussures cirées prêtes à aller chez le Roi, car tous les présidents avaient souligné que c’était à moi de décider. Mais les choses se sont passées différemment »  [105]. Certains voient dans cette décision la main du chef de cabinet du Roi et ancien chef de cabinet de K. Geens, Vincent Houssiau. La désignation de K. Geens semble surprendre jusqu’au sein de son propre parti : le président du CD&V lui-même, J. Coens, admet n’avoir été au courant de rien.

94Alors que d’aucuns pensent que K. Geens va explorer une piste de type Vivaldi, son parti le recadre : c’est avec la N-VA ou rien (« Un petit tour et aucune mention de la Vivaldi », résume De Standaard [106]). « Plusieurs démocrates-chrétiens craignent que le vice-Premier ministre sacrifie les exigences de son parti (gouverner avec la N-VA) sur l’autel de ses ambitions personnelles » afin de devenir Premier ministre  [107]. La mission de K. Geens est toutefois prolongée par le Roi le 10 février.

95Le 5 février 2020, J. Coens déclare dans la presse : « La formation spontanée d’un gouvernement n’a pas réussi. Le gouvernement miroir est dès lors la seule solution logique pour une coalition qui soit soutenue des deux côtés de la frontière linguistique »  [108]. En l’occurrence, il préconise que les partis au pouvoir en Flandre (N-VA, CD&V et Open VLD, formant le gouvernement flamand Jambon) s’associent à ceux qui sont à la tête de la Wallonie (PS, MR et Écolo, composant le gouvernement wallon Di Rupo III) pour former le gouvernement fédéral. Au mois d’août suivant, la vice-ministre-présidente Hilde Crevits, qui est l’une des personnalités les plus influentes au sein du CD&V, tiendra des propos similaires. Aussitôt rendue publique, la solution défendue par J. Coens se voit opposer un refus catégorique de la part de divers partis francophones, dont certains la rejettent même de façon virulente  [109].

96La situation paraît bloquée, en dépit de nouvelles indications alarmantes relatives au déficit budgétaire  [110]. Les rumeurs d’élections anticipées se font plus insistantes. Selon DeStandaard, les partis francophones sont favorables à de nouvelles élections  [111] ; pour LeSoir, « les partis entrent discrètement en campagne »  [112].

97Par la voix du ministre de la Sécurité et de l’Intérieur, P. De Crem, le CD&V exclut toute coalition fédérale qui n’inclurait pas la N-VA : « Croire que le CD&V va finir par plier, c’est irréel »  [113]. Une enquête menée auprès des 123 bourgmestres CD&V révèle que ceux-ci se prononcent également en faveur d’une coalition comptant la N-VA parmi ses membres. Le bourgmestre de Deinze, Jan Vermeulen, propose d’ailleurs une nouvelle appellation pour un gouvernement associant le PS et la N-VA : la coalition Arizona (en référence au drapeau de cet État du sud-ouest des États-Unis d’Amérique) : « Une base bleue pour les libéraux, N-VA et PS qui doivent partager la lumière de l’étoile, au milieu, une étoile orange qui sera K. Geens. Ça sera difficile : c’est pour ça qu’il y a le Grand Canyon en Arizona. Il y a aussi beaucoup de déserts, mais si on réussit, la capitale de l’Arizona, c’est la ville de Phoenix. C’est de ça dont notre pays a besoin »  [114].

98Toutefois, P. Magnette réaffirme qu’il ne gouvernera pas avec la N-VA. « J’en ai marre », affirme-t-il dans des interviews publiées dans De Standaard et Het Nieuwsblad. Et le matin du 14 février, il déclare sur les ondes de Matin Première (RTBF) : « Nous en sommes à une cinquantaine de réunions, dont vingt-cinq directement avec Bart De Wever et moi, qui durent parfois trois ou quatre heures, parfois plus longtemps... À titre personnel, négocier avec des nationalistes avec lesquels nous n’avons rien à voir, cela devient un vrai supplice. (…) Combien de fois devrai-je encore dire que le PS n’a aucune envie de gérer avec eux ? »  [115] Cette sortie de P. Magnette conduit K. Geens à remettre sa démission au Roi le jour même. Le souverain accède à sa demande.

99Le dimanche 16 février, sur les plateaux du Zevende Dag (VRT) et de RTL-TVi, K. Geens apparaît très en colère contre P. Magnette. Il soutient qu’il était près d’aboutir. Surtout, il dénonce la manière dont a procédé le président du PS : « J’aurais aimé une sortie un peu plus élégante que le coup de sabot de vendredi matin. Personne ne mérite ça »  [116]. Le CD&V est plus loin que jamais de lâcher la N-VA.

2.6 La mission de Sabine Laruelle et Patrick Dewael (19 février 2020 - 15 mars 2020)

100Le Roi reprend des consultations. Le 19 février 2020, il charge la présidente du Sénat, S. Laruelle (MR), et le président de la Chambre des représentants, P. Dewael (Open VLD), d’une mission. C’est la première fois, dans l’histoire du pays, qu’une mission royale est confiée à une femme.

101Les contours de la mission confiée à S. Laruelle et P. Dewael sont imprécis. Officiellement, le nouveau duo royal pourra prendre toute initiative destinée à mettre en place un gouvernement fédéral de plein exercice. Il s’agit sans doute principalement de calmer le jeu, et d’attendre que les relations entre le PS et le CD&V s’apaisent. Peut-être s’agit-il également d’attendre que le nom du nouveau président de l’Open VLD soit connu. Par le passé, les missions confiées aux présidents des assemblées n’ont pas livré de résultats probants (Herman Van Rompuy et Armand De Decker en 2007-2008, André Flahaut et Danny Pieters en 2010) ; les profils de ce type n’étant pas personnellement engagés dans les négociations, il leur est sans doute délicat de faire progresser les discussions.

102Les options de coalition évoquées se suivent et, pour l’essentiel, se ressemblent. Si certains croient encore à la possibilité de voir aboutir une Vivaldi, on évoque également la « Flamande » soit une « Suédoise élargie » (N-VA, MR, CD&V, Open VLD, SP.A et CDH), et même l’« Autrichienne » (associant notamment les partis conservateurs et les écologistes, comme au sein du gouvernement fédéral autrichien récemment formé). En l’occurrence, une coalition réunissant la N-VA, le MR, Écolo, le CD&V, l’Open VLD et Groen représenterait 83 sièges sur 150. Politiquement, toutefois, il apparaît peu probable de voir les coprésidents des verts francophones, J.-M. Nollet et R. Maouane, changer d’avis au sujet de la N-VA.

103Alors que l’on commence à parler d’un nouveau coronavirus venu de Chine, J. Coens propose une coalition « Corona ». « Peut-être pouvons-nous parler d’une coalition “Corona” composée de ceux qui veulent mettre le budget en ordre, s’occuper de la compétitivité et améliorer le pouvoir d’achat des gens », lance-t-il sur les ondes de la VRT le 28 février. Lorsque, après le congé de Carnaval, le nombre de malades du nouveau coronavirus va commencer à augmenter en Belgique, une telle coalition sera effectivement à l’ordre du jour.

3. La mise en pause des négociations (mi-mars - mi-mai 2020)

104La nécessité de disposer d’un gouvernement fédéral de plein exercice pour prendre les mesures de lutte contre la pandémie de Covid-19 et ses conséquences socio-économiques va conduire à maintenir en place le gouvernement dirigé par Sophie Wilmès (MR). Le gouvernement Wilmès II (de composition identique au gouvernement Wilmès I : MR/ CD&V/Open VLD) prête serment le 17 mars 2020 et reçoit la confiance de la Chambre des représentants deux jours plus tard. La semaine suivante, ce gouvernement est en outre doté de pouvoirs spéciaux pour une durée de trois mois, renouvelable une fois  [117].

105Les négociations visant à former un nouveau gouvernement fédéral sur la base des résultats des élections du 26 mai 2019 sont alors suspendues, le Roi ne nommant personne pour succéder au duo Laruelle - Dewael. De prime abord en effet, et nonobstant la gravité de la crise sanitaire, il apparaît inutile de poursuivre de telles négociations puisqu’est installé un gouvernement fédéral de plein exercice – très minoritaire, il est vrai, mais bénéficiant d’un large soutien. Toutefois, la Première ministre, S. Wilmès, elle-même a limité l’action de ce gouvernement à six mois, et les partis qui soutiennent son gouvernement de l’extérieur ne sont pas non plus disposés à poursuivre l’exercice au-delà du temps strictement nécessaire. En outre, le gouvernement Wilmès II s’est engagé à limiter son action à ce qui se rapporte à la lutte contre la pandémie et la gestion de ses conséquences ; pour les autres domaines de compétences, la Première ministre a indiqué vouloir poursuivre une gestion d’affaires courantes.

3.1. La mise en place du gouvernement Wilmès II

106« Les mois passent. Pas grave, gardons la tête dans le sable, jouons les cigales, attendons les beaux jours, le muguet, la canicule, les feuilles mortes, la neige… De tous les peuples, les Belges ne sont-ils pas les plus braves… ? Le coût du Brexit n’a pas fait bouger le monde politique. Les 12 milliards de déficit non plus. Est-ce qu’une “petite” pandémie précipitera une solution ? », s’interroge F. Van de Woestyne dans La Libre Belgique le lundi 2 mars 2020, au retour des vacances de Carnaval  [118]. La réponse à sa question sera que la nécessité de lutter contre l’épidémie de Covid-19 (maladie due au coronavirus SARS-CoV-2) et ses conséquences s’apprête à influencer le déroulement des pourparlers devant mener à la formation d’un nouveau gouvernement fédéral.

107Le 9 mars, la mission de S. Laruelle et P. Dewael est prolongée par le Roi jusqu’au 16 mars, cette fois afin d’explorer les pistes qui pourraient conduire à mettre en place un gouvernement d’urgence. Deux jours plus tard, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) requalifie en pandémie l’épidémie de Covid-19 apparue quelques mois plus tôt en Chine (dès le 30 janvier précédent, le directeur général de l’OMS avait déclaré que la flambée de l’épidémie constituait une « urgence de santé publique de portée internationale »).

108Les premières mesures visant à limiter la propagation du virus sont adoptées par les trois Régions (limitation de l’accès aux salles de spectacle, annulation des voyages scolaires, fermeture ou protection des maisons de repos, etc.) ; une nécessité de coordonner l’action des différents niveaux de pouvoir se fait jour. Le 12 mars, se déroule la première réunion d’un Conseil national de sécurité (CNS) élargi de facto aux ministres-présidents des Régions et des Communautés  [119]. La Première ministre annonce les premières décisions de confinement : la fermeture des établissements scolaires au moins jusqu’aux vacances de Pâques et celle des restaurants et cafés au moins jusqu’au 3 avril. L’association des Régions et des Communautés à la décision fédérale par le biais du CNS constitue une première étape de la procédure de coordination. Une deuxième étape est constituée par l’adoption de l’arrêté ministériel de déclenchement de la phase fédérale, qui confie à l’Autorité fédérale la coordination de la gestion de la crise  [120]. Le renforcement du gouvernement fédéral, alors toujours minoritaire et en affaires courantes, sera la troisième étape.

109À ce moment-là, la piste privilégiée est celle de l’élargissement du gouvernement fédéral afin qu’il dispose d’une majorité parlementaire. La presse évoque des négociations entre le PS et la N-VA visant à mettre en place un gouvernement d’urgence  [121]. Parallèlement, dans un communiqué commun, les présidents du CDH, M. Prévot, et de Défi, F. De Smet, plaident pour la mise en place d’un gouvernement arc-en-ciel étendu à l’une de leurs formations : soit une « petite Vivaldi » (de 80 sièges sur 150) avec le CDH, soit une « coalition 77 » (de 77 sièges) avec Défi. Et ils s’engagent à s’abstenir lors du vote de confiance d’un gouvernement où l’autre serait représenté  [122].

110Les négociations entre le PS et la N-VA ne vont pas aboutir. Un premier problème se pose avec le choix du futur occupant du poste de Premier ministre : le MR, soutenu par le PS, veut maintenir S. Wilmès à la tête de l’exécutif, tandis que la N-VA voudrait que la fonction revienne à son président, B. De Wever  [123]. P. Magnette se verrait bien formateur, mais G.-L. Bouchez ne veut pas de cette solution  [124]. Les présidents des partis socialistes (PS et SP.A), libéraux (MR et Open VLD), de la N-VA et du CD&V se réunissent le samedi 14 mars. La réunion dure jusqu’à 2 heures du matin et on s’attend à voir ces négociations reprendre plus tard le dimanche. Cependant, réuni au matin du 15 mars par le moyen d’une visio-conférence, le bureau du PS refuse de constituer un gouvernement avec la N-VA. P. Magnette accuse alors B. De Wever d’avoir voulu « changer de Première ministre en pleine crise », de « monnayer une réforme de l’État en pleine crise sanitaire » et de « refuser de soutenir le gouvernement en affaires courantes »  [125]. Pour la seconde fois en un mois, le PS met donc un terme aux négociations. Les commentaires du côté néerlandophone sont durs, y compris dans le camp socialiste : le président du SP.A, C. Rousseau, confiera avoir été rarement en colère à ce point  [126].

111La nécessité de disposer d’un gouvernement fédéral de plein exercice pour gérer la crise sanitaire conduit à explorer une autre voie, à savoir celle d’un soutien (de l’extérieur, pour les formations autres que le MR, le CD&V et l’Open VLD) au gouvernement dirigé par S. Wilmès. Au soir du 15 mars, tous les partis représentés à la Chambre des représentants – hormis le Vlaams Belang et le PTB, manifestement tous deux tenus à l’écart des négociations – sont invités à soutenir un gouvernement Wilmès II (à la composition inchangée par rapport à l’exécutif en place, les mêmes ministres conservant leurs titres à l’identique  [127]). Après avoir reçu la confiance d’une majorité de députés, ce gouvernement demanderait des pouvoirs spéciaux pour lutter contre la crise sanitaire et ses conséquences. Outre le MR, le CD&V et l’Open VLD, qui participent au gouvernement, sept partis acceptent de s’engager dans cette voie : la N-VA, le PS, Écolo, le SP.A, Groen, le CDH et Défi. Toutefois, le lendemain, la N-VA précise qu’elle octroiera les pouvoirs spéciaux au gouvernement mais qu’elle refusera de lui accorder la confiance, ce qui semble juridiquement étrange. Il semble que le SP.A ait envisagé un temps d’adopter la même attitude avant de se raviser.

112Le 16 mars 2020, S. Wilmès est nommée formatrice par le Roi. C’est la première fois qu’une femme se voit confier cette fonction depuis la création de la Belgique.

113Dès le lendemain, le gouvernement Wilmès II (MR/CD&V/Open VLD) prête serment devant le Roi ; selon l’habitude, ses membres sont nommés par arrêté royal le même jour  [128]. Dans la déclaration gouvernementale que la Première ministre prononce juste après à la Chambre (devant un hémicycle très clairsemé : pour réduire les risques de contamination entre les députés fédéraux, ceux-ci ont été dispersés dans divers locaux du Palais de la Nation), elle s’engage à limiter l’action de son gouvernement à la gestion de la crise et à « redemand[er] la confiance du Parlement dans six mois au plus tard ». Ainsi, explicite-t-elle, « nous ne dépasserons pas le périmètre des affaires courantes pour les sujets extérieurs à cette crise »  [129]. En outre, S. Wilmès annonce que le Comité ministériel restreint (« kern », réunissant la Première ministre et les vice-Premiers ministres) sera régulièrement élargi aux « représentants des partis qui se sont engagés, afin de garantir la transparence de l’exécution des pouvoirs spéciaux ».

114Le 19 mars – la Constitution imposant un délai de minimum 48 heures entre le dépôt et le vote d’une motion de confiance –, le gouvernement Wilmès II obtient la confiance d’une majorité de membres de la Chambre (82 oui et 44 non, il n’y a pas d’abstention) : seuls la N-VA, le Vlaams Belang et le PTB votent contre la motion de confiance déposée l’avant-veille. Le chef du groupe N-VA à la Chambre, P. De Roover, justifie ce vote d’une double manière. D’une part, il fustige un gouvernement de plein exercice qui s’est constitué selon lui contre la N-VA. D’autre part, il soutient que la lutte contre le coronavirus pourrait être menée par un gouvernement en affaires courantes  [130].

115Il est à souligner que les restrictions de durée et de champ d’action que S. Wilmès pose à l’endroit du second gouvernement qu’elle dirige sont de nature politique et non juridique.

116Une semaine plus tard, le 26 mars, le gouvernement Wilmès II obtient une délégation de pouvoirs spéciaux  [131] pour trois mois à dater du 30 mars 2020  [132]. Cette délégation est votée par une majorité de députés fédéraux plus large que pour la confiance, puisque la N-VA vote cette fois en faveur de la proposition : 104 oui, contre 8 non et 16 abstentions. Les votes négatifs émanent des 7 députés PTB présents et de J.-M. Dedecker, député indépendant élu sur une liste N-VA ; les abstentions proviennent des 15 députés Vlaams Belang présents (sur 18) et de Cécile Thibaut (Écolo)  [133].

117L’irruption de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 met ainsi la crise politique en mode pause. Même si le contexte dans lequel le gouvernement Wilmès II a été formé laisse des traces entre certains protagonistes, particulièrement du côté néerlandophone, l’impression domine alors que les tensions politiques ont globalement fait place à une accalmie liée à la gravité de la situation sanitaire.

3.2. Les premières semaines du gouvernement Wilmès II

118L’objectif n’est pas ici d’analyser les politiques menées par le gouvernement Wilmès II mais de poser quelques balises à propos du soutien politique dont bénéficie cet exécutif. En effet, la situation de celui-ci est doublement inédite : il s’agit d’un gouvernement (très) minoritaire dans sa composition mais qui a bénéficié d’une large majorité parlementaire lors du vote de la confiance et qui est doté de pouvoirs spéciaux. Cela le conduit à chercher des moyens pour associer les partis politiques qui le soutiennent de l’extérieur à la gestion de la crise pour laquelle les pouvoirs spéciaux lui ont été octroyés, à savoir donc la lutte contre la pandémie et ses effets.

119Comme annoncé par la Première ministre, les réunions du kern sont élargies chaque samedi aux présidents des partis qui ont voté les pouvoirs spéciaux ; toutefois, la N-VA préfère y déléguer son chef de groupe à la Chambre, P. De Roover. Le kern élargi comprend donc en principe :

120

  • la Première ministre, S. Wilmès (MR) ;
  • les vice-Premiers ministres : D. Clarinval (MR), K. Geens (CD&V) et A. De Croo (Open VLD) ;
  • compte tenu de la nature de la crise, le ministre fédéral de l’Intérieur, P. De Crem (CD&V), et la ministre fédérale de la Santé publique, M. De Block (Open VLD) ;
  • les présidents de neuf partis : P. Magnette (PS), G.-L. Bouchez (MR), J.-M. Nollet ou R. Maouane (Écolo), J. Coens (CD&V), G. Rutten (Open VLD), C. Rousseau (SP.A), M. Almaci (Groen), M. Prévot (CDH) et F. De Smet (Défi) ;
  • le chef du groupe N-VA à la Chambre, P. De Roover.

121Cela fait donc 17 personnes, soit un kern élargi au point de dépasser le nombre de ministres du gouvernement fédéral (15).

122Peu d’informations quant au fonctionnement de ce kern élargi sont actuellement disponibles. S’agit-il d’un véritable lieu de prise de décision, ou d’une arène de débat, ou encore d’un simple lieu d’information des décisions déjà prises ou sur le point d’être prises ?

123La Première ministre met l’accent sur la prise de décision collective. Ainsi, les communiqués de presse de son cabinet évoquent des « accords » pris en kern élargi, notamment quant aux mesures de soutien du Plan fédéral de protection sociale et économique. Les mesures de soutien au secteur horeca (prolongation du droit passerelle, extension du chômage temporaire, réduction de la TVA à 6 %, dispense partielle du paiement du précompte professionnel) et les mesures plus transversales (comme le chèque consommation de 300 euros octroyé par l’employeur et le railpass de dix voyages SNCB gratuits) sont approuvées par tous les partis réunis au sein de ce kern [134].

124Toutefois, certains éléments laissent penser que le travail au sein du kern élargi n’est pas toujours approfondi. Ainsi, deux arrêtés royaux initiés par la ministre de la Santé publique, M. De Block, et pris sous le régime des pouvoirs spéciaux (l’un créant la possibilité de confier des actes infirmiers à du personnel non infirmier et l’autre permettant la réquisition du personnel soignant)  [135] sont contestés par des partis membres de ce kern après avoir provoqué la colère du personnel soignant soutenu par diverses organisations syndicales (la CGSP, la CNE et le SETCA) au point que divers préavis de grève ont été déposés  [136]. Lors d’une séance de questions-réponses à la Chambre, plusieurs partis présents dans le kern élargi (du côté francophone, il s’agit du PS, d’Écolo et du CDH) réclament le retrait de ces arrêtés royaux ; ils sont rejoints par des partis de la majorité  [137]. Selon M. De Block, ces deux arrêtés royaux ont pourtant été approuvés en kern élargi. Devant la force de la contestation, les arrêtés royaux sont réexaminés. « On verra comment ces personnes qui ont approuvé les arrêtés royaux réagiront », indique M. De Block  [138]. In fine, décision est prise lors de la réunion du kern élargi du 23 mai de suspendre les deux arrêtés royaux litigieux.

125Une autre arène de décision multipartite est le Conseil national de sécurité. On y retrouve, réunis autour de la Première ministre et des trois vice-Premiers ministres, le ministre fédéral de l’Intérieur, P. De Crem (CD&V), le ministre fédéral des Affaires étrangères et de la Défense, P. Goffin (MR), et les ministres-présidents des entités fédérées : le ministre-président du gouvernement wallon, E. Di Rupo (PS), celui du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale et du Collège réuni de la Commission communautaire commune (COCOM), Rudi Vervoort (PS), celui du gouvernement de la Communauté française, P.-Y. Jeholet (MR), celui du gouvernement flamand, J. Jambon (N-VA), et celui du gouvernement de la Communauté germanophone, O. Paasch (ProDG). On retrouve donc autour de la table cinq libéraux (quatre MR et un Open VLD), deux chrétiens-démocrates (tous deux CD&V), deux socialistes (tous deux PS), un nationaliste flamand (N-VA) et un régionaliste germanophone (ProDG). Les partis qui ne sont membres d’aucune coalition gouvernementale (Vlaams Belang, PTB et CDH) ne sont donc pas représentés au CNS, pas plus que Groen, le SP.A et Défi, qui participent au pouvoir en Région de Bruxelles-Capitale, et qu’Écolo, membre de plusieurs gouvernements dans les entités fédérées ; la ministre-présidente de la Commission communautaire française (COCOF), Barbara Trachte (Écolo), n’a pas été conviée, semble-t-il  [139]. Si donc le CNS consiste bien en une réunion des différentes composantes de l’État fédéral (Autorité fédérale, Régions et Communautés), cette union institutionnelle ne se double pas d’une union politique générale.

126Les séances de questions-réponses à la Chambre, qui se tiennent les jeudis après-midi, voient des députés des partis non représentés au sein du gouvernement Wilmès II interpeller de façon de plus en plus critique les membres de cet exécutif. À côté de l’opposition, incarnée par le Vlaams Belang et le PTB, le chef du groupe N-VA (groupe qui, pour rappel, n’a pas voté la confiance au gouvernement Wilmès II) mais également ceux des groupes PS, Écolo-Groen, SP.A, CDH et Défi critiquent l’action du gouvernement. Durant la phase aiguë de l’épidémie, la gestion du stock de masques, celle du matériel de dépistage et l’organisation de ce dépistage sont particulièrement critiquées. Dès la fin mars, est évoquée l’hypothèse de l’organisation future d’une commission d’enquête parlementaire. Enclenchée début mai, la phase de déconfinement fait également l’objet de critiques (et ce dès sa présentation, au soir du 24 avril, lors d’une conférence de presse dont la communication est jugée assez calamiteuse). Désormais, le choix des secteurs qui seront déconfinés en priorité et la composition des différents groupes d’experts conseillant les politiques s’ajoutent aux cibles des critiques de plus en plus nourries.

127Le chef du groupe N-VA à la Chambre, P. De Roover, ironise à ce propos : « Ici, il y a quelques semaines, une large majorité a accordé sa confiance au gouvernement. L’idylle a été courte car si ça, c’est de la confiance, quand j’entends ces questions, je me demande alors à quoi ressemblerait la méfiance »  [140].

3.3. Vers la fin des pouvoirs spéciaux et la reprise des négociations

128La gestion de la crise découlant de la pandémie de Covid-19 et de ses conséquences ainsi que l’utilisation des pouvoirs spéciaux doivent faire l’objet d’analyses spécifiques. Ici, on se bornera à remarquer que les pouvoirs spéciaux avaient été initialement annoncés pour une durée de six mois, la Première ministre ayant déclaré à la Chambre le 17 mars 2020 : « Ces objectifs, nous pouvons les atteindre en recourant notamment aux pouvoirs spéciaux pour une période de six mois, avec une évaluation au bout de trois mois »  [141]. Toutefois, les deux lois de pouvoirs spéciaux portent explicitement sur une période de trois mois seulement à dater de leur entrée en vigueur, soit le 30 mars  [142] : sans nouvelle adoption par la Chambre, les pouvoirs spéciaux prennent donc fin le 30 juin 2020. Bien avant cette échéance, l’ensemble des partis ayant voté les pouvoirs spéciaux estiment que leur prolongation n’est pas utile. Dès le 17 avril, la N-VA considère qu’il y a peu de raisons de renouveler l’octroi des pouvoirs spéciaux  [143]. D’autres partis expriment la même opinion dans la quinzaine qui suit.

129Le climat consensuel qui avait un temps prévalu entre les différentes formations politiques ayant soutenu la mise en place du gouvernement Wilmès II se dégrade assez rapidement. Alors que l’épidémie connaît un essoufflement et que le déconfinement s’engage début mai, la cause est entendue : le gouvernement Wilmès II, minoritaire et soutenu de l’extérieur au Parlement, ne pourra perdurer au-delà du 17 septembre 2020, ainsi que la Première ministre s’y est elle-même engagée.

130Des contacts entre partis en vue de former un nouveau gouvernement fédéral ont-ils continué au plus fort de la crise, et pendant la période de confinement ? La mise en place du kern élargi a peut-être porté l’espoir de la création d’une dynamique positive entre les présidents de parti qui permettrait de déboucher sur des négociations en vue d’un nouveau gouvernement. Toutefois, le déroulement des discussions ne semble pas permettre d’entretenir cette perspective. Il apparaît que la façon dont la reprise des discussions va être organisée à la mi-mai n’a pas fait l’objet d’un consensus préalable.

4. La seconde phase des négociations fédérales (mai 2020 - octobre 2020)

131La crise sanitaire met donc sur pause la crise politique ouverte en décembre 2018 et exacerbée au lendemain du scrutin du 26 mai 2019. Toutefois, ses effets sanitaires, économiques, sociaux et budgétaires renforcent la nécessité de retrouver rapidement un gouvernement fédéral majoritaire de plein exercice. La question du prochain exécutif fédéral n’est d’ailleurs pas éclipsée bien longtemps. Dès le 20 avril, sur les ondes de la chaîne publique flamande VRT, Bart De Wever (N-VA) est le premier président de parti à annoncer qu’il est prêt à reprendre les négociations pour la formation d’un gouvernement fédéral  [144]. Avant même que la première phase du déconfinement soit entamée, le 4 mai, les responsables de la plupart des partis politiques et la Première ministre elle-même, Sophie Wilmès (MR), admettent que la question de la formation d’un nouveau gouvernement fédéral est désormais posée  [145].

132Aussi, dans la seconde moitié du mois de mai 2020, soit un peu plus de deux mois après l’entrée en fonction du gouvernement Wilmès II, les pourparlers reprennent-ils, tout d’abord de façon informelle (c’est-à-dire sans intervention du Roi), suite à une initiative des présidents des deux partis constituant la première famille politique du pays, Paul Magnette (PS) et Conner Rousseau (SP.A). Les discussions ainsi conduites ne parvenant pas à débloquer la situation, les présidents des trois partis composant le gouvernement Wilmès II – Georges-Louis Bouchez (MR), Joachim Coens (CD&V) et Egbert Lachaert (Open VLD) – tentent alors à leur tour, toujours informellement, de relancer les négociations. À la veille de la fête nationale, le roi Philippe reprend l’initiative et – fait inédit dans l’histoire du pays – lance une mission d’information alors que le gouvernement fédéral en place n’est pas démissionnaire. Deux informateurs sont désignés : P. Magnette (PS) et B. De Wever (N-VA). Cette ultime tentative de constituer un gouvernement associant les socialistes francophones et les nationalistes flamands se solde également par un échec. Le Roi confie alors une nouvelle mission à E. Lachaert (Open VLD) et C. Rousseau (SP.A), d’abord comme informateurs puis comme préformateurs. Cette huitième mission royale est un succès ; elle est suivie d’une mission de formation confiée à P. Magnette (PS) et Alexander De Croo (Open VLD), qui permet finalement la mise en place du gouvernement De Croo le 1er octobre 2020.

4.1. L’initiative de Paul Magnette et Conner Rousseau (19 mai 2020 - 16 juin 2020)

133Le 19 mai, sur la base du fait que leurs partis constituent la première famille politique représentée à la Chambre, les présidents du PS et du SP.A entament des consultations afin de préparer la mise en place d’un nouveau gouvernement fédéral. Cette initiative, explique P. Magnette, s’inscrit dans le contexte de l’urgence de disposer d’un plan de relance face à la crise socio-économique : « Si on attend septembre pour un plan de relance, ce sera trop tard pour beaucoup de secteurs, des milliers d’emplois auront été perdus »  [146].

134Cette initiative des deux présidents socialistes surprend. Notamment, le président du MR, G.-L. Bouchez, estime que cette façon de contourner le rôle du Roi constitue « presque un petit coup d’État »  [147]. À cette assertion, les constitutionnalistes, Marc Verdussen comme M. Uyttendaele, répondent qu’il n’appartient au Roi de prendre une initiative que dans le cas où le gouvernement fédéral est démissionnaire. Or le gouvernement Wilmès II, certes minoritaire, est de plein exercice, ayant obtenu la confiance de la Chambre  [148]. La réaction est différente du côté de l’Open VLD, où G. Rutten, qui s’apprête à quitter la présidence, considère qu’il faut « réinventer la violette », soit l’alliance entre libéraux et socialistes  [149]. Dans une interview à l’hebdomadaire Knack, le président de la Chambre, P. Dewael (Open VLD), insiste également sur l’importance de l’axe bleu - rouge.

135P. Magnette et C. Rousseau discutent avec les présidents des huit autres partis ayant soutenu l’octroi des pouvoirs spéciaux au gouvernement Wilmès II ; le choix de ce critère permet d’inclure la N-VA, tout en maintenant l’exclusion tant du Vlaams Belang que du PTB.

136Le 22 mai, E. Lachaert, chef du groupe à la Chambre, est élu président de l’Open VLD au premier tour, avec 61 % des voix. Aux yeux du Soir, « l’Open VLD vire à droite toute » et l’arrivée d’E. Lachaert risque de compliquer la tâche du duo  [150]. Avec cette élection toutefois, ajoute le quotidien, les états-majors des partis francophones et néerlandophones sont tous stabilisés, et il n’y a donc « plus d’excuse » pour retarder la formation d’un gouvernement fédéral  [151].

137À la demande de la Première ministre, les deux présidents socialistes suspendent leurs travaux durant quinze jours afin que les dix partis appuyant le gouvernement Wilmès II puissent se concentrer sur les mesures de soutien. C’est finalement le 15 juin que P. Magnette et C. Rousseau remettent leur rapport à la Première ministre. Selon plusieurs commentateurs, le duo préconiserait de voir S. Wilmès reprendre la main dans le processus de formation du futur gouvernement fédéral. Il apparaît toutefois que les deux hommes n’ont pas réussi à dessiner les contours fermes d’une future coalition. Ils privilégient la piste d’une tripartite classique (associant donc les partis socialistes, libéraux et de tradition sociale-chrétienne, ou le seul CD&V pour cette dernière). Il s’agirait d’élargir immédiatement l’exécutif en place à leurs formations politiques. Un tel gouvernement serait toutefois minoritaire, puisqu’il ne réunirait que 66 ou 71 sièges sur 150 à la Chambre  [152]. Cependant, au moment de demander la confiance du Parlement en septembre, ce gouvernement serait rejoint par d’autres partenaires pour devenir majoritaire : soit la N-VA soit les écologistes  [153].

138Cette piste n’est pas retenue par les trois partis composant le gouvernement Wilmès II. Dans un communiqué commun publié le 17 juin 2020, les présidents du MR, du CD&V et de l’Open VLD indiquent qu’ils « prennent acte du fait que, suite au tour de consultations [mené par les deux présidents socialistes], il ne soit pas possible d’entamer des négociations gouvernementales autour d’une coalition représentée par une majorité absolue à la Chambre des représentants ». Ils ajoutent : « La famille socialiste a suggéré une alternative. Cette piste n’est pas privilégiée »  [154]. D’après l’analyse du politologue Carl Devos, la proposition de P. Magnette et C. Rousseau serait apparue aux libéraux comme un tremplin vers une coalition Vivaldi, les partis écologistes soutenant de l’extérieur le gouvernement  [155].

4.2. L’initiative de Georges-Louis Bouchez, Joachim Coens et Egbert Lachaert (17 juin 2020 - 20 juillet 2020)

139Les présidents des trois partis constituant le gouvernement Wilmès II prennent alors la main. G.-L. Bouchez, J. Coens et E. Lachaert – bientôt surnommés « les rois mages » dans la presse flamande –, se chargent de trouver une majorité fédérale en vue, selon le président du MR, de former un gouvernement pour la fête nationale (21 juillet). Particularité inédite, G.-L. Bouchez et J. Coens ont déjà été à la manœuvre précédemment, à savoir à la fin de l’année 2019 et au début de l’année 2020 en tant qu’informateurs nommés par le Palais. Pour E. Lachaert, c’est en revanche la première initiative de ce type et il ne s’agit pas d’une mission confiée par le Roi.

140À nouveau, une piste de coalition incluant le parti de B. De Wever est suivie. Devant l’apparente difficulté de concilier le PS et la N-VA, les trois présidents explorent la piste d’une coalition sans les socialistes francophones : cette coalition reçoit le nom d’Arizona, dans un sens toutefois différent de celui sous lequel cette appellation est apparue en février 2020 puisqu’elle associerait la N-VA, le MR, le CD&V et l’Open VLD (comme cela était le cas dans le gouvernement Michel I) ainsi que le SP.A et le CDH, mais pas le PS. Un tel gouvernement ne disposerait que d’une majorité très courte (76 sièges sur 150  [156]) et serait très minoritaire du côté francophone (19 sièges sur 61 au sein du groupe linguistique français  [157]). Dans une telle perspective, les partis réticents qu’il faut convaincre sont désormais le SP.A et le CDH.

141L’ancien missionnaire royal R. Demotte (PS) indique qu’il ne pense pas que le SP.A se lancera dans une telle aventure et n’entrevoit plus aucune autre solution qu’un retour aux urnes  [158]. Mais E. Lachaert est confiant : il souligne que G.-L. Bouchez, J. Coens et lui vont d’abord travailler avec six partis prêts à s’engager et qui n’ont pas lancé d’exclusive, et que le périmètre pourra ensuite être éventuellement élargi à d’autres formations  [159]. La séquence qui se déroule alors peut également être interprétée comme un moyen de pression sur le PS : alors que, depuis les élections fédérales du 26 mai 2019, ce parti est apparu incontournable quelle que soit la coalition envisagée (type bourguignonne ou Vivaldi), les présidents du MR, du CD&V et de l’Open VLD tentent de démontrer qu’il n’en est rien.

142Toutefois, un autre problème se présente au sein même du trio : la perspective de l’adoption par la Chambre de la proposition de loi assouplissant les conditions pour recourir à une interruption volontaire de grossesse (IVG). J. Coens évoque une rupture de la confiance. La proposition de loi amendée est renvoyée au Conseil d’État à la demande du CDH, du CD&V, de la N-VA et du Vlaams Belang. La N-VA soutient le CD&V dans son opposition au projet et dans la démarche d’en faire une question de gouvernement : « Que les partis qui veulent assouplir la législation sur l’IVG constituent un gouvernement, s’ils le peuvent », lance B. De Wever  [160]. Si, dans un premier temps, G.-L. Bouchez ne se montre pas impressionné et appelle au vote en séance plénière, les négociateurs tombent finalement d’accord sur un arrêt du processus parlementaire et sur un renvoi de la question de l’IVG aux négociations de formation du gouvernement fédéral.

143Entre-temps, le 6 juillet, le président du CDH, M. Prévot, s’est déclaré prêt à monter dans un gouvernement avec la N-VA et sans le PS, estimant que le temps des vetos est dépassé et que la crise du coronavirus a profondément changé la situation politique. Toutefois, une réunion des six partis prévue le 6 juillet est annulée : tant le SP.A que le CDH estiment que les conditions ne sont pas réunies.

144La formule Arizona est dépassée par les faits lorsque, le 14 juillet, le président du PS, P. Magnette, annonce que son parti est prêt à négocier avec la N-VA. Ce qui compte, déclare-t-il à la chaîne d’information en continu LN24, « c’est le contenu ».

145Durant le week-end des 18 et 19 juillet, les trois présidents des partis de la coalition Wilmès II ne réussissent pas à réunir une nouvelle fois les six partis pressentis pour la coalition Arizona. Ils mettent dès lors leurs travaux en mode pause, le temps de voir si PS et N-VA peuvent parvenir à accorder leurs violons. G.-L. Bouchez, J. Coens et E. Lachaert font savoir qu’ils attendent un rapport « dans quelques semaines ». Le Soir écrit qu’« il est probable à présent que de discrètes discussions vont démarrer, qui pourraient durer une bonne partie de l’été »  [161]. Toutefois, le Palais va prendre tout le monde de court.

4.3. La mission de préformation de Paul Magnette et Bart De Wever (20 juillet 2020 - 17 août 2020)

146Le rapprochement entre P. Magnette et B. De Wever paraît suffisamment prometteur pour que, à la veille de la fête nationale, le roi Philippe charge les deux hommes « de prendre les initiatives nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement qui s’appuie sur une large majorité au Parlement ». Bien que le Roi ne qualifie pas le rôle des deux présidents de parti, B. De Wever estime avoir été nommé préformateur. En effet, le stade de l’information semble être dépassé et le calendrier imposer des progrès rapides. Pour sa part, faisant apparemment référence à la date butoir du 17 septembre (correspondant à la fin de la période de six mois au terme de laquelle S. Wilmès s’est engagée à poser à la Chambre la question de la confiance en son gouvernement), P. Magnette déclare : « Il reste cinquante jours pour former un gouvernement, sinon il faudra convoquer des élections »  [162].

147Et l’improbable se produit : ce qui a été dit impossible pendant quinze mois advient. P. Magnette et B. De Wever s’entendent pour rédiger une note commune. Celle-ci contient apparemment une sorte d’échange entre une politique socio-économique reprenant des axes du programme des socialistes francophones et une réforme institutionnelle voulue par les nationalistes flamands. Avec le CD&V, le SP.A et le CDH, le PS et la N-VA constituent alors ce que la presse appelle une « bulle de cinq partis » (expression qui fait référence à la « bulle » de cinq personnes maximum que, selon la décision du Conseil national de sécurité du 27 juillet, chaque foyer belge peut fréquenter pendant quatre semaines dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19). Ces cinq partis détiennent ensemble 69, 70, voire 71 sièges  [163] sur les 150 que compte la Chambre ; il leur faut donc impérativement trouver au moins un autre partenaire. L’option la plus plausible semble être d’élargir la coalition aux partis libéraux : le MR et l’Open VLD, qui sont déjà tous deux membres du gouvernement Wilmès II. Toutefois, dès le 28 juillet, les deux partis bleus mettent en garde les missionnaires royaux : il n’est pas question pour eux « d’apposer leur signature au bas d’un accord de gouvernement qui aurait été négocié uniquement par les socialistes et la N-VA »  [164]. Les contacts n’évoluent donc pas favorablement.

148Le 31 juillet, P. Magnette et B. De Wever remettent un premier rapport au Roi, en tant que « préformateurs » selon la presse. Le même jour, interrogé par VTM, le président de la N-VA se dit persuadé à 99,9 % que la « bulle de cinq partis » peut former un gouvernement d’ici deux à trois semaines. Par ailleurs, B. De Wever attaque le parti libéral francophone en indiquant : « Plus personne ne veut encore du MR dans le gouvernement »  [165]. Il souhaite en effet que l’Open VLD fasse partie du futur gouvernement fédéral (de même qu’il est déjà membre, avec la N-VA et le CD&V, du gouvernement flamand), mais que le MR soit relégué dans l’opposition.

149Comme le souligne Jean Faniel (CRISP), le choix posé par B. De Wever indique un choix idéologique en faveur du nationalisme flamand plus qu’un choix stratégique dans l’intérêt du parti : « On pourrait penser que la N-VA a intérêt à faire sauter l’Open VLD des négociations pour se partager les postes entre trois partis flamands (avec le CD&V et le SP.A). Ce qui lui laisserait la moitié des portefeuilles, au vu des résultats électoraux. Ce calcul serait dans l’intérêt du parti qui s’arrogerait ainsi plus de responsabilités. En indiquant vouloir mettre les libéraux francophones hors-jeu, il place l’intérêt nationaliste flamand au-dessus de tout. La volonté est plutôt ici d’avoir un minimum de représentation francophone »  [166].

150Contrairement aux présidents du CDH et du CD&V (respectivement M. Prévot et J. Coens)  [167], ceux du MR et de l’Open VLD (G.-L. Bouchez et E. Lachaert) font savoir qu’ils n’envisagent pas de ne pas monter ensemble au gouvernement fédéral. Face au blocage avec les partis libéraux, le duo Magnette - De Wever décide de rencontrer les partis écologistes. Demeurés en dehors des discussions pour la formation du gouvernement fédéral en raison de l’exclusive réciproque posée entre eux et la N-VA, Écolo et Groen sont appelés pour explorer la piste d’une majorité sans le MR et l’Open VLD. « Ces derniers jours, le binôme De Wever - Magnette avait tenté de scinder la famille bleue en éjectant l’Opel VLD ou le MR des négociations. Sans succès. Ils font bloc. L’alternative consiste à agiter le chiffon vert en leur laissant entendre que, s’ils ne veulent pas que les écologistes prennent leur place dans le futur gouvernement, ils ont intérêt à mettre de l’eau dans leur vin », commente La Libre Belgique [168].

151Pressentant qu’ils sont contactés surtout afin de faire pression sur les partis libéraux en démontrant que ces derniers ne sont pas indispensables, Écolo et Groen posent leurs exigences, notamment en matière de lutte contre les changements climatiques, d’énergie ou de mobilité  [169]. Mais les exigences institutionnelles de la N-VA rebutent Écolo (comme cela a été le cas avec le MR) : la base de travail présentée par les missionnaires royaux organise l’« antichambre du confédéralisme », estime le co-président d’Écolo, J.-M. Nollet  [170].

152Le 7 août, P. Magnette et B. De Wever reçoivent à nouveau les présidents des partis libéraux. Tout espoir n’est pas perdu puisque, le lendemain, ils voient leur mission prolongée par le Roi. Trois jours plus tard, ils reçoivent à nouveau les présidents d’Écolo et de Groen.

153Se sentant vraisemblablement instrumentalisés par les missionnaires royaux, les quatre partis libéraux et écologistes, en une démarche inédite, mettent fin à ce va-et-vient en publiant un communiqué commun le jeudi 13 août : « Nous souhaitons exprimer notre inquiétude en ce qui concerne les projets des missionnaires. (…) Notamment pour ce qui est du volet institutionnel, leur schéma conduit à rendre les institutions plus complexes et moins lisibles : un modèle qui n’est pas le nôtre. (…) Les réformes institutionnelles ont toujours été pour nous un moyen, jamais un objectif en soi. (…) Nous voulons éviter que davantage de temps soit perdu et demandons aux missionnaires royaux de la clarté au sujet de la coalition qui a leur préférence et de faire le choix de solutions stables et solides. (…) Les familles libérales et écologistes refusent de prendre part à une surenchère qui les dresse l’une contre l’autre afin de déterminer qui peut rejoindre le prochain gouvernement »  [171]. Philippe Walkowiak (RTBF) commente : « Libéraux et écologistes viennent (…) d’exprimer leur mécontentement de devoir ainsi jouer dans un mauvais remake de Tournez Manège !, le jeu matrimonial de TF1 des 80’s »  [172].

154À la N-VA, le communiqué commun du MR, d’Écolo, de l’Open VLD et de Groen passe mal. Les critiques visent surtout le président du MR, qui chercherait à maintenir le gouvernement Wilmès II en selle.

155La situation à ce stade est ainsi résumée par l’éditorialiste Stavros Kelepouris dans De Morgen : « L’impasse est totale. Tant les libéraux que les verts ne veulent soutenir l’accord entre le PS et la N-VA que si leur volet institutionnel est largement abandonné. Mais, sans ce volet, il n’y a plus d’accord entre le PS et la N-VA. (…) L’ironie de l’histoire est que, après les élections, la plupart des partis ont insisté pendant des mois pour que le PS et la N-VA s’assoient autour de la table. (…) Et maintenant qu’un axe entre les deux ennemis jurés semble avoir pour la première fois une chance de succès, ils ne trouvent pas assez de partenaires pour donner vie à leur coalition »  [173]. Force est alors de constater qu’a peut-être été surestimée la demande d’ouverture de négociations entre le PS et la N-VA, qui était en fait avant tout portée par le CD&V, parti auquel la formule convenait sans doute assez bien.

156Le lendemain du communiqué commun des partis libéraux et écologistes, et après une réunion en matinée avec le MR et l’Open VLD, la réunion prévue avec Écolo et Groen l’après-midi est annulée. P. Magnette et B. De Wever annoncent qu’ils jettent l’éponge et recommandent que les bleus et les verts prennent la main. La presse annonce que « le duo aurait même souhaité l’annoncer au Roi dans la foulée, mais le souverain n’était pas disponible »  [174] ; en effet, le souverain était alors en vacances et le Palais n’a pas jugé opportun de modifier son emploi du temps. Rompant avec la logique d’un axe PS - N-VA qui serait indispensable, le président de l’Open VLD, E. Lachaert, déclare à la VRT que toutes les options demeurent ouvertes, tant une Vivaldi qu’une Arizona ou qu’un gouvernement minoritaire  [175].

157Le lundi 17 août, le duo Magnette - De Wever présente sa démission au Roi. Celui-ci tient en suspens sa décision et entame des consultations.

4.4. La mission d’information d’Egbert Lachaert (18 août 2020 - 4 septembre 2020)

158Tous les présidents de parti sont reçus par le Roi (à l’exception de ceux du Vlaams Belang et du PTB). Le président du CD&V, J. Coens, partisan d’une coalition incluant la N-VA, réclame un nouvel effort : « Ils ont dit de leur donner 50 jours et ils sont bloqués après 25 ! Je pense qu’il faut faire encore un effort pour pouvoir former une majorité »  [176], indique-t-il à la VRT. Alors que certains observateurs prédisent la nomination d’un duo libéral - vert, et que le Palais pense peut-être au rappel d’un vieux briscard pour déminer la situation  [177], le 18 août 2020, le chef de l’État charge le seul E. Lachaert, président de l’Open VLD, d’une mission formulée en termes similaires à ceux employés lors de la désignation de ses prédécesseurs : « Prendre les initiatives nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement qui s’appuie sur une large majorité au Parlement ».

159Toutefois, contrairement à la mission précédente, celle-ci ne semble pas d’emblée viser une coalition spécifique. Aussi la mission d’E. Lachaert n’est pas qualifiée de « préformation » : en termes de proximité temporelle avec la mise en place d’un nouveau gouvernement, c’est un recul. Pour La Libre Belgique, « le chef de l’État a considéré que le président libéral occupe une position relativement neutre qui lui permet de parler avec tout le monde sans exclure aucun des deux grands scénarios de majorité. Egbert Lachaert entretient de bons rapports avec Bart De Wever et pourra vérifier si la piste d’un gouvernement associant le PS et les nationalistes flamands reste possible. Si cette formule devait être définitivement enterrée, le président de l’Open VLD serait également bien placé pour réorienter les discussions vers le plan B, la majorité Vivaldi »  [178].

160Cependant, dès la fin de la première semaine de mission d’E. Lachaert, il devient clair que c’est la piste Vivaldi qui est à nouveau suivie. Les circonstances sont toutefois différentes de celles qui prévalaient lorsque le président du PS, P. Magnette, poursuivait cette même option à la fin de l’année 2019 : « Même si, vu depuis les vacances, on a l’impression que ça patine, ça a beaucoup évolué cet été. L’hypothèse PS - N-VA exigée à cor et à cri par une bonne partie du monde politique flamand, ses fédérations patronales et ses éditorialistes a été testée par P. Magnette et B. De Wever. Or, ce petit ange n’a même pas eu le temps d’échouer tout seul, il a été assassiné en plein vol, cette fois par une conjuration de partis bleus et verts, les libéraux et les écologistes du sud et surtout du nord, et surtout et en particulier l’Open VLD. Aujourd’hui, on ne peut plus dire que le PS et la N-VA, ça ne marche pas. On peut dire que les verts et les bleus ne veulent pas que le PS et la N-VA, ça marche. C’est une inversion complète du scénario », commente B. Henne (RTBF)  [179].

161Une autre évolution notable est le retour du CDH dans les négociations. La Libre Belgique écrit : « “À la fin de la mission Magnette - De Wever, on était dans la logique de l’exclusion du MR”, doit bien constater un libéral. Si l’Open VLD avait lâché son parti frère, on aurait eu un exécutif fédéral composé des seuls PS et CDH côté francophone. En Région wallonne et en Communauté française, la majorité PS/MR/Écolo aurait vacillé et la tentation aurait été grande de faire monter le CDH à la place du MR. Cela aurait permis d’avoir une plus grande symétrie entre les niveaux de pouvoir. Au MR, certains sont convaincus que MM. Magnette et Prévot (président du CDH) avaient déjà un deal en ce sens »  [180].

162L’apparente « conversion » d’E. Lachaert à l’option Vivaldi surprend. Ainsi, La Libre Belgique note : « Egbert Lachaert a été élu à la tête du parti libéral flamand en défendant une ligne plus à droite, alignée sur la vision socio-économique de la N-VA. Alors qu’un grand deal entre le PS et les nationalistes flamands a récemment été négocié par P. Magnette et B. De Wever, E. Lachaert ne suivrait donc plus la piste d’un exécutif associant les deux plus grands partis du pays, soit le “plan A” depuis le début de la crise politique. Étrange. D’autant plus qu’au sein de l’Open VLD, on nous assure au contraire que toutes les formules sont envisagées par le président libéral flamand, y compris la formule associant le PS et la N-VA. Pour un poids lourd du parti, la préférence supposée d’E. Lachaert à une Vivaldi (l’arc-en-ciel serait élargi au CD&V et éventuellement le CDH), relève de l’intox plutôt que de l’info : “C’est du spinning…” »  [181]. La solidité du lien entre le MR et l’Open VLD contribue peut-être à orienter E. Lachaert dans cette voie, au vu des relations exécrables qui existent désormais entre G.-L. Bouchez et B. De Wever. Toutefois, la viabilité de la Vivaldi dépend de la décision du CD&V de monter dans un gouvernement fédéral sans la N-VA.

163La dernière semaine du mois d’août voit se développer une polémique qui met en difficulté le ministre-président du gouvernement flamand, J. Jambon (N-VA), ancien vice-Premier ministre. L’affaire Chovanec, du nom d’un voyageur slovaque décédé dans une cellule de l’aéroport de Charleroi en février 2018, fait la une depuis qu’a été diffusée une vidéo montrant les violences policières dont cette personne a manifestement été victime ainsi que le salut nazi effectué au moment des faits par une agent de police également présente. Convoqué devant les commissions réunies de l’Intérieur et de la Justice de la Chambre des représentants, celui qui était alors ministre fédéral de la Sécurité et de l’Intérieur doit s’expliquer tant sur son absence de réaction à l’époque que sur des déclarations apparemment contradictoires qu’il a tenues au cours des jours précédents. L’affaire plonge la N-VA dans un certain embarras, susceptible de contribuer à inciter le CD&V à ne plus exiger que ce parti fasse partie du gouvernement fédéral  [182].

164Alors que la piste d’une coalition Vivaldi laissant de côté la N-VA se dessine, T. Francken met les négociateurs en garde : « L’arc-en-ciel, c’est jaune - noir en 2024 », écrit-il sur Twitter le 25 août, indiquant par là que cette coalition paverait la route d’une majorité associant la N-VA et le Vlaams Belang en 2024 (année, sauf élections anticipées dans l’entre-temps, du prochain scrutin fédéral). B. De Wever résume ainsi son point de vue sur la situation le 27 août : « La Flandre n’a jamais autant voté flamand et à droite, le prochain gouvernement pourrait n’avoir jamais été aussi francophone et à gauche. Le chagrin de la Flandre »  [183].

165Le 28 août, E. Lachaert présente un rapport intermédiaire au Roi. Le communiqué du Palais qui indique la poursuite de sa mission fait état de « pourparlers constructifs ». À la fin du week-end, le dimanche 30 août, E. Lachaert réunit pour la première fois les présidents des partis pressentis pour former le nouveau gouvernement fédéral : PS, MR, Écolo, CD&V, Open VLD, SP.A et Groen. Le CDH n’est pas invité, bien qu’une rencontre entre l’informateur et son président, M. Prévot, se soit, semble-t-il, déroulée le matin même. Il est vrai que la participation du CDH, si elle ferait grimper la majorité à 92 sièges au lieu de 87, renforcerait aussi sa composante francophone et réduirait le nombre de postes attribués au MR, au PS et à Écolo. Il ne s’agit toutefois, selon E. Lachaert, que d’une réunion d’information.

166L’échéance des six mois depuis la confiance accordée au gouvernement Wilmès II est désormais proche. Dans une interview au quotidien DeStandaard parue le 31 août, la Première ministre confie son intention de présenter sa démission à l’échéance initialement annoncée : la Belgique basculera à nouveau dans un régime d’affaires courantes le 17 septembre si un nouveau gouvernement fédéral ne voit pas le jour entre-temps  [184].

167La pression sur le CD&V se fait de plus en plus insistante. Un bureau du parti est attendu pour le soir du lundi 31 août. Il doit évaluer l’opportunité pour le CD&V d’entrer dans des négociations en fonction de la disposition des autres partenaires à discuter de ses exigences, notamment en matière éthique (gel de la proposition de loi relative à l’IVG), budgétaire (limiter la hausse de la dette) et institutionnelle (transférer ou préparer le transfert de nouvelles compétences aux entités fédérées). Sont également évoquées les exigences du CD&V de voir la coalition fédérale inclure le CDH et, surtout, d’obtenir le poste de Premier ministre. Toutefois, la décision attendue ne tombe pas ce soir-là. Le lendemain, Le Soir interpelle le parti chrétien-démocrate flamand : « Est-ce trop demander au CD&V que de se décider ? »  [185]

168C’est finalement le soir du 2 septembre que, s’exprimant sur les antennes de la VRT dans l’émission Terzake, le président du CD&V, J. Coens, annonce que son parti est prêt à entamer des discussions en vue de la formation d’un gouvernement fédéral, tout en précisant : « Nous ne voulons pas d’une Vivaldi, que viendrait compléter le CD&V, mais d’une Avanti, où nos points de programmes se trouvent »  [186]. Concrètement, le CD&V renonce à exiger que le futur gouvernement fédéral dispose d’une majorité dans le groupe linguistique néerlandais, ce qui représente un tournant majeur dans la crise politique. Les jours suivants, les commentateurs utiliseront « Vivaldi » et « Avanti » comme synonymes pour désigner la coalition qui semble se dessiner. Le lendemain, sur les ondes de la Première, S. Mahdi (CD&V) confirme cette rupture du lien avec la N-VA et confie sa déception personnelle à l’égard de ce parti : « L’éthique, c’est plus que l’IVG, c’est la manière dont on regarde l’humain et, sur cet aspect-là, j’ai été déçu. J’espère qu’il ira dans un autre sens car, en soi, c’est un parti démocratique qui a de bonnes propositions. Beaucoup de personnes au sein de mon parti ne se retrouvent pas du tout dans la vision de la N-VA »  [187].

169Le jeudi 3 septembre, une première réunion entre les désormais huit partis pressentis pour former le gouvernement ne permet pas de dégager un accord sur les points importants. Ils décident de se revoir le lendemain, jour où E. Lachaert est attendu au Palais. In extremis, le vendredi 4 septembre, un accord autour de l’ouverture de négociations est acquis. Toutefois, c’est un accord conclu entre sept partis : le CDH n’en sera pas. D’après son président, M. Prévot, « aucun des trois partis francophones ne lui offre la garantie de l’associer comme partenaire à part entière au gouvernement fédéral »  [188]. En effet, les 5 sièges apportés par le CDH sont estimés insuffisants pour justifier que l’un des trois autres partis francophones renonce à un poste de ministre. En outre, ajouter le CDH à la Vivaldi accentuerait la disproportion entre le pourcentage de sièges du groupe linguistique français et celui de sièges du groupe linguistique néerlandais représentés dans la majorité. Le CD&V n’a manifestement pas fait de la présence de son « parti frère » une condition sine qua non de formation du futur gouvernement fédéral  [189].

4.5. La mission de préformation d’Egbert Lachaert et Conner Rousseau (4 septembre 2020 - 23 septembre 2020)

170Le même jour, le Roi charge E. Lachaert et C. Rousseau d’une mission de préformation. On relèvera que c’est la première fois que le Roi confie une mission à plusieurs personnes émanant d’une seule et même communauté linguistique  [190]. À la une du Soir du lendemain, on peut lire en grand : « Le déblocage ». Pour F. Van de Woestyne, de La Libre Belgique, « un vent d’optimisme souffle rue de la Loi. Il est inédit depuis les élections de mai 2019. (…) Et l’on peut relever que trois éléments, indispensables à la conclusion d’un accord politique, sont enfin rassemblés : la volonté, la confiance et le respect »  [191]. Selon De Standaard, la Vivaldi est dans les starting blocks [192]. Les observateurs sont unanimes à estimer que, cette fois, la formation d’un nouveau gouvernement fédéral est à portée de main.

171Les réactions de la N-VA et du Vlaams Belang ne se font pas attendre. Ainsi, sur le plateau de l’émission De Zevende Dag (VRT), B. De Wever fustige la mise en place d’un gouvernement qui laisse le plus grand parti (flamand, mais aussi belge) de côté, et blâme principalement les libéraux qui ont fait échouer son accord avec le PS. Il déclare : « La Flandre réalise 83 % des exportations, nous payons 70 % des impôts, nous versons des milliards en transferts. Et pour nous dire merci, on nous rejette dans la minorité dans notre propre pays au moment où nous vivons une crise des plus sérieuses. Nulle part ailleurs dans le monde, on ne met les plus grands partis sur le côté. Au lieu de cela, nous aurons un gouvernement dominé par les francophones et la gauche »  [193].

172Alors que les grandes lignes de l’accord de gouvernement ne sont pas encore connues, ni même sans doute déterminées, la répartition des portefeuilles fait l’objet de vives discussions ; en particulier, l’identité du prochain Premier ministre fait débat. La Libre Belgique entrevoit un duel entre le président du PS et le vice-Premier ministre Open VLD  [194]. Toutefois, le président du MR, G.-L. Bouchez, estime que S. Wilmès doit rester Première ministre en raison de sa popularité et afin de maintenir l’équilibre d’une équipe « dans une coalition où il y a une majorité de parlementaires de gauche » : « Dans n’importe quel autre pays du monde, le fait de reconduire Sophie Wilmès ne serait même pas une question. Quand on voit les sondages d’opinion, elle est largement en tête du côté francophone. Ce serait bien de temps en temps de suivre ce que veut la population »  [195]. Le Soir estime toutefois que la Flandre a pris une option sur le poste, compte tenu du fait que le gouvernement fédéral ne disposera pas d’une majorité au sein du groupe linguistique néerlandais, situation qu’il convient donc de rééquilibrer aux yeux de l’opinion publique néerlandophone  [196]. En tout état de cause, comme le souligne B. Henne (RTBF), le poste semble très convoité  [197]. La gestion essentiellement fédérale de la crise du Covid-19 a redonné du lustre au niveau de pouvoir fédéral.

173Seule voix légèrement dissonante par rapport à l’enthousiasme général au sein des futurs partenaires, le président du CD&V, J. Coens, qui, après avoir déclaré le lendemain de la désignation du duo Lachaert - Rousseau que ce n’était en rien un oui sans condition de la part de son parti, rappelle dans DeStandaard le 7 septembre que les deux préformateurs devront tenir compte du CD&V, qui ne participera pas à l’aventure dans le cas contraire. Réelle hésitation face au menu proposé, ou volonté de faire monter les enchères ? En fin de journée, à l’issue du bureau de son parti, on apprend que J. Coens a demandé un entretien avec les préformateurs  [198]. « Joachim Coens s’apprête-t-il à “retirer la prise” des discussions ? », se demande La Libre Belgique [199]. Quant à lui, le Vlaams Belang organise une manifestation devant le siège bruxellois du CD&V, en reprochant à ce parti d’avoir trahi son engagement en faveur d’un gouvernement fédéral reposant sur une majorité du côté flamand.

174En fin de journée, les préformateurs font savoir que le différend avec le CD&V est aplani. Toutefois, le lendemain, La Libre Belgique évoque les fausses notes de la Vivaldi tandis que Le Soir parle d’étincelles  [200]. Ce serait en particulier encore et toujours la question de l’IVG qui inquiéterait les chrétiens-démocrates flamands. Dans une interview donnée au magazine Tertio, J. Coens rappelle l’opposition de son parti à un assouplissement de la loi sur l’avortement : « Sans le C [de “chrétien”], le CD&V n’a aucune raison d’être. La tradition chrétienne constitue la base sur laquelle je pratique la politique et il y a des principes et des visions clairs qui y sont attachés, comme défendre toute vie, en particulier celle qui est vulnérable »  [201]. C’est peut-être cette possibilité de peser de façon décisive sur la réforme de la législation concernant l’IVG qui a emporté la décision du parti de participer à la coalition Vivaldi. Toutefois, le CD&V reste très divisé : un grand nombre d’élus locaux préféreraient une formule incluant la N-VA. Certains auraient même tenté de faire opposition à la mise sur les rails de la coalition Vivaldi  [202]. Ces déchirures internes expliquent peut-être la séquence durant laquelle le président J. Coens a publiquement fait état de divergences avec les autres partenaires et exigé puis obtenu de nouvelles garanties.

175Le 8 septembre, l’annonce du test positif au coronavirus du préformateur E. Lachaert et la quarantaine d’un peu plus de dix jours qu’il doit observer en raison de ce résultat bousculent la poursuite des négociations. Dès le 10 septembre, un accord politique entre les sept partis de la future coalition Vivaldi conduit à prolonger le gouvernement Wilmès II jusqu’au 1er octobre, et non uniquement jusqu’à la date initialement prévue du 17 septembre.

176Le 11 septembre, les préformateurs font rapport au Roi par visio-conférence. Le communiqué du Palais annonce que leur rapport final est désormais attendu pour le 21 septembre, ce qui laisserait ensuite dix jours à un formateur pour finaliser les négociations et constituer l’équipe gouvernementale.

177Nonobstant les négociations pour la formation d’un gouvernement fédéral, le SP.A annonce un futur changement de nom : d’ici la fin de l’année, il s’appellera désormais Vooruit (« En avant »). Ce nom s’inscrit dans l’histoire du mouvement socialiste flamand, puisque le Vooruit était une coopérative ouvrière fondée à Gand à la fin du XIXe siècle, principalement par Edouard Anseele, et qui a également donné vie à un quotidien du même nom qui parut de 1884 à 1978. Ainsi que le résume C. Rousseau, ce changement de nom est « un clin d’œil au passé » avec « le regard tourné vers le futur ». Le nom ainsi annoncé ne peut manquer de faire écho au terme « Avanti » employé quelques jours plus tôt par J. Coens pour désigner la coalition à laquelle il donnait un accord apparemment décisif. C. Rousseau a pu voir dans cet enchaînement une opportunité pour dévoiler son intention de changer le nom de sa formation tout autant que la menace qu’un autre parti le précède dans ce sens. La rumeur circule d’ailleurs à ce moment que les libéraux flamands auraient eux aussi songé à une telle appellation, qui fait également écho au mouvement En marche lancé par Emmanuel Macron pour appuyer sa candidature à l’élection présidentielle française en 2017.

178L’établissement d’un budget, alors que les deux dernières années ont été placées sous le signe des douzièmes provisoires, constituera l’une des premières tâches du nouveau gouvernement avec le plan de relance pour faire face à la crise économique engendrée par la pandémie de Covid-19. Ce budget est d’ores et déjà au cœur des négociations pour la formation du gouvernement Vivaldi. Les prévisions du Bureau fédéral du Plan du 10 septembre 2020 prévoient un déficit de 44,5 milliards d’euros pour 2020. Selon La Libre Belgique, E. Lachaert proposerait de viser l’équilibre budgétaire à l’horizon 2030  [203].

179Le 17 septembre voit la reprise des séances plénières à la Chambre des représentants. Six mois auparavant exactement, la Première ministre s’était engagée devant l’assemblée à lui redemander la confiance endéans six mois. Bien que cette date précise n’ait alors pas été mentionnée, elle s’est progressivement imposée comme l’échéance incontournable du gouvernement Wilmès II. Et bien que la durée de vie de celui-ci ne soit pas juridiquement limitée, il est devenu progressivement acquis que la date du 17 septembre ne serait pas dépassée. Toutefois, l’accord intervenu entre les partis négociant la coalition Vivaldi de prolonger le statu quo jusqu’au 1er octobre, en raison du retard pris par les négociations suite à la contamination d’E. Lachaert au coronavirus, conduit finalement S. Wilmès à ne ni demander la confiance de la Chambre ni démissionner. Cette attitude lui est reprochée à la Chambre par des députés de la N-VA, du Vlaams Belang et du PTB. Finalement, une motion d’ordre est adoptée par les députés des partis négociant la coalition Vivaldi, afin de mettre une déclaration gouvernementale à l’ordre du jour de la séance plénière du 1er octobre. L’adoption de cette motion, par 79 voix contre 46 et 4 abstentions, constitue un véritable engagement des sept partis à aboutir pour cette date  [204].

180Le même jour, la fin de la quarantaine sanitaire imposée à E. Lachaert et l’annonce du résultat négatif du dépistage des autres présidents de parti de la future Vivaldi sonne par ailleurs la reprise des négociations du futur accord de gouvernement en présentiel. Toutefois, ces négociations sont alors perturbées par deux éléments : d’une part, la fuite du contenu de la note des préformateurs dans L’Écho et De Tijd et, d’autre part, la sortie du ministre fédéral de la Sécurité et de l’Intérieur, P. De Crem, qui, dans DeStandaard, fait part de ses fortes réticences quant à la participation de son parti à la coalition Vivaldi  [205]. Des interviews subséquentes du précédent et de l’actuel président du CD&V, Wouter Beke et J. Coens, réitèrent les exigences du CD&V tout en maintenant ouverte la porte aux négociations – négociations à la participation desquelles la réunion du groupe parlementaire CD&V marque son accord le même jour. Comme l’écrit La Libre Belgique, « ce mandat ne s’apparentera toutefois pas à un chèque en blanc et le CD&V devra obtenir de sérieux trophées pour monter à bord »  [206].

181Les préformateurs ayant triomphé des réticences du CD&V, la coalition Vivaldi semble être sur les rails. Mais une nouvelle crise secoue bientôt les pourparlers. Cette fois, c’est G.-L. Bouchez qui en fournit le détonateur, en ayant accordé au magazine flamand Humo une interview dans laquelle, notamment, il indique que le Premier ministre doit être S. Wilmès, et non P. Magnette, et se targue de ce que l’accord Vivaldi sera plus à droite que la note PS - N-VA  [207]. La publication en ligne de cet article, le dimanche 20 septembre, provoque une tempête lors de la réunion que les sept présidents de parti tiennent ce jour-là au Palais d’Egmont, à Bruxelles. La réunion a été convoquée pour aplanir quelques difficultés et s’accorder sur le nom du futur Premier ou de la future Première ministre, à la veille du rapport des préformateurs au Roi. Elle tourne à la confrontation entre G.-L. Bouchez et les autres négociateurs. La Première ministre est appelée à la rescousse, pour « cadrer » son président de parti  [208]. Ce n’est toutefois pas suffisant pour remettre la Vivaldi en marche et, le lundi 21 septembre, les préformateurs présentent leur démission au Roi. Les négociateurs auraient convenu de se donner 24 ou 48 heures de délai supplémentaire  [209]. Le souverain refuse la démission des préformateurs et leur donne deux jours pour rétablir un climat de confiance entre les partis. D’après le quotidien De Tijd, le bureau du SP.A est déterminé à ne pas monter dans une coalition avec le MR  [210]. Dans une conférence de presse qui suit cette entrevue royale, le préformateur C. Rousseau montre son dépit : « Beaucoup de gens sont dégoûtés de la politique, et je ne peux pas leur en vouloir après ce week-end. Ce matin, il semblait impossible de restaurer la confiance. Mais puisque le Roi le demande, je vais essayer de rendre possible l’impossible »  [211].

182La presse n’est pas tendre avec G.-L. Bouchez (qualifié d’« homme qui se prend en selfie sur le Titanic » par HetNieuwsblad [212]), ni avec le spectacle offert par l’ensemble du monde politique. La LibreBelgique évoque « la honte » éprouvée devant une situation que Le Soir qualifie d’« insupportable » ; L’Écho parle d’une « dispute digne d’une cour de récréation »  [213]. Du côté de la presse néerlandophone, De Standaard estime que les mandataires politiques « creusent leur propre tombe », de nouvelles élections fédérales risquant de sanctionner sévèrement les partis impliqués dans cette négociation qui tourne court  [214]. Le même jour, le président de Défi, F. De Smet, commente au micro de Bel RTL : « Ce n’est plus une formation fédérale, c’est une sorte de sitcom ». Rarement la crédibilité des responsables politiques est apparue aussi basse.

183Le mercredi 23 septembre, en fin d’après-midi, la presse rapporte que G.-L. Bouchez accepte le « texte de compromis ». La formation du gouvernement fédéral peut reprendre. Le duo de préformateurs fait rapport au Roi en fin de journée.

4.6. La mission de formation de Paul Magnette et Alexander De Croo (23 septembre 2020 - 30 septembre 2020)

184Le même jour, le chef de l’État désigne alors un duo de co-formateurs : A. De Croo (Open VLD) et P. Magnette (PS) – cela contre l’avis de G.-L. Bouchez, semble-t-il  [215]. Le choix du Premier ministre n’est pas encore décidé. Il reste une semaine pour former le gouvernement et respecter la date butoir du 1er octobre.

185Le même jour, et alors pourtant que les chiffres des contaminations au Covid-19 remontent, le Conseil national de sécurité décide de l’assouplissement d’un certain nombre de mesures, notamment relatives au port du masque dans l’espace public. Il s’agit « de calquer les mesures sur la réalité du terrain, pour permettre aux gens d’adhérer à ce qui est acceptable »  [216]. La coïncidence des deux événements, qui permet à la presse de souligner que c’est peut-être là le dernier CNS présidé par S. Wilmès, rappelle à tout le moins que l’épidémie n’est pas finie et que le nouveau gouvernement fédéral devra également définir sa stratégie de lutte contre le Covid-19.

186Les négociations entre les sept partis de la future Vivaldi se poursuivent durant le week-end des 26 et 27 septembre, au Palais d’Egmont. L’objectif est d’avoir un accord à présenter au Roi le lundi 28. Si plus aucun désaccord manifeste entre les sept partis ne filtre à l’extérieur de l’enceinte des négociations, la presse souligne le caractère « fragile » ou « instable » de l’équipe en formation, au sein de laquelle les « querelles » devraient être nombreuses  [217]. Elle s’intéresse également à la personnalité des deux Premiers ministrables, P. Magnette et A. De Croo  [218]. Le choix semble se résumer aux deux formateurs. Un temps évoquée, la possibilité de voir un membre du CD&V (éventuellement la vice-ministre-présidente flamande, H. Crevits) accéder au poste s’éloigne. Le vice-Premier ministre K. Geens, candidat sérieux au poste en début d’année, fait savoir qu’il renonce à être ministre dans le prochain gouvernement.

187L’opposition dure au nouveau gouvernement annoncée par le Vlaams Belang connaît une première concrétisation avec un « raid sur Bruxelles » le dimanche 27 septembre, jour de la fête de la Communauté française : environ 5 000 voitures pavoisées aux couleurs flamingantes et arborant des slogans du parti d’extrême droite se réunissent au parking C du Heysel, à Grimbergen  [219].

188En dépit de discussions qui se poursuivent loin dans la nuit, les négociateurs ne parviennent pas à boucler l’accord le lundi 28. Reçus à 18 heures au Palais, P. Magnette et A. de Croo demandent et obtiennent du Roi une prolongation de leur mission. Les négociations reprennent le mardi 29, mais certains commencent à douter de la possibilité de les conclure pour le surlendemain, date à laquelle il est prévu que le nouveau Premier ministre prononce sa déclaration gouvernementale devant les membres de la Chambre des représentants (dont on apprend qu’ils seront exceptionnellement réunis dans l’hémicycle du Parlement européen afin de respecter les mesures sanitaires) avant de rejoindre les chefs d’État réunis à Bruxelles pour un sommet européen. « Le délai du 1er octobre est-il encore tenable ? », se demande la RTBF, tandis que La Libre Belgique s’interroge : « Que fera Sophie Wilmès s’il n’y a pas de nouveau gouvernement le 1er octobre ? »  [220] Si la presse francophone retient son souffle, l’interminable formation du gouvernement fédéral semble moins intéresser la presse néerlandophone. L’édition du 29 septembre du journal De Standaard n’y fait même plus référence en première page.

189Dans la nuit du mardi 29 au mercredi 30 septembre, l’accord de gouvernement est conclu. Au matin du 30, les formateurs se rendent au Palais pour le présenter. P. Magnette et A. De Croo sont maintenus dans leur rôle de co-formateurs jusqu’à la nomination des membres du gouvernement. Lors de la conférence de presse qu’ils tiennent dans la foulée, il se confirme que le Premier ministre sera A. De Croo, une information qui circulait dans la presse depuis le début de la journée.

190La soirée du mercredi 30 septembre est occupée par les congrès de participation des différents partis. Les mesures sanitaires dictées par l’épidémie de Covid-19 imposent des précautions dans l’organisation de ces congrès, mais les modalités sont différentes. L’Open VLD choisit de tenir un congrès entièrement digital, tandis que le MR réunit ses militants sur le plateau du Heysel. Écolo et Groen optent chacun pour une assemblée générale éclatée en plusieurs lieux. Tous les congrès approuvent l’accord de gouvernement à une très large majorité, à l’exception de celui du CD&V, où les militants ne sont que 73,9 % à l’approuver  [221]. Au niveau des mandataires locaux du parti chrétien-démocrate flamand, de nombreuses voix s’étaient élevées pour affirmer leur préférence à une alliance avec la N-VA.

4.7. L’accord de gouvernement Vivaldi

191L’accord de gouvernement  [222] porte les marques de la largeur de la coalition qui le porte – sept partis, ce qui n’avait jamais été le cas en Belgique jusqu’alors – et du calendrier très serré auquel ont été tenus les négociateurs. Cela signifie que s’y retrouvent des mesures qui portent la marque de chacune des formations politiques, sans que l’ensemble ne présente une cohérence forte dans tous les chapitres, et quelques imprécisions.

192Le texte, qui s’intitule « Pour une Belgique prospère, solidaire et durable », est structuré en six chapitres :

  • « Un pays solidaire » ;
  • « Un pays prospère » ;
  • « Un pays durable » ;
  • « Un pays sûr » ;
  • « Un pays de coopération et de respect » ;
  • « La Belgique : une voix forte en Europe et dans le monde ».

193Le texte s’ouvre sur les mesures prévues en matière sociale et de soins de santé, un choix qui reflète les circonstances de la naissance de ce gouvernement, obligé de donner son attention en priorité à la gestion de la crise du Covid-19. Cette crise, qui a conduit la Commission européenne à relâcher la discipline budgétaire, a sans doute facilité l’accord entre des partis qui ont de la conduite budgétaire une vision assez différente. La nécessité d’investir, notamment en matière de soins de santé, mais également pour relancer l’économie et amortir les conséquences sociales de la crise, a relégué la discipline budgétaire prônée par les partis libéraux et par le CD&V à plus tard. Des efforts d’économie ne seront pas consentis avant 2022 et l’équilibre budgétaire n’est pas envisagé avant l’horizon 2030.

194Parmi les mesures phares de la Vivaldi – il y aurait, au total, 3,5 milliards de dépenses pour des politiques nouvelles d’ici 2024 –, figure donc un refinancement des soins de santé, avec une norme de croissance fixée à 2,5 % et non plus 1,5 % comme sous le gouvernement Michel I.

195L’objectif de réduction de l’empreinte carbone de la Belgique est confirmé, avec 55 % de réduction de gaz à effet de serre en moins en 2030 (par rapport à 1990), ainsi que celui de la sortie du nucléaire pour 2025. Ce second objectif est toutefois entouré d’une série de conditions qui ouvrent la porte à une prolongation de deux réacteurs si nécessaire. L’objectif de développement durable se concrétise également dans un refinancement du rail et des voitures de société « zéro émission ».

196La police et la justice devraient également être refinancées, avec de nouveaux engagements et des budgets pour la modernisation de l’équipement.

197En matière de réforme institutionnelle, le gouvernement Vivaldi renoue avec une habitude perdue sous les gouvernements Michel : deux ministres, un francophone et un néerlandophone, seront chargés de préparer la Belgique institutionnelle de demain. Toutefois, l’accord innove doublement : sur le plan méthodologique, en prévoyant d’organiser également un vaste débat ouvert à la société civile et, sur le plan du contenu, en évoquant « un renforcement des entités fédérées dans leur autonomie et du niveau fédéral dans son pouvoir »  [223], seul le premier terme semblant avoir guidé les six réformes institutionnelles précédentes.

198Il est à noter encore que la gestion de la crise du Covid-19 devrait être confiée à un commissaire spécial. Quant à la loi dépénalisant l’IVG, elle est renvoyée en commission ; les dossiers éthiques passeront par un consensus gouvernemental.

199En matière de pensions, l’âge de départ à la retraite demeure fixé à 67 ans. Toutefois, les partis se sont accordés pour augmenter la pension minimale pour une carrière complète à 45 ans.

200Si cet accord présente une série de points de rupture, principalement en rompant avec l’austérité budgétaire, il ne revient toutefois pas sur les mesures prises par les gouvernements Michel et se situe donc également dans une forme de continuité.

4.8. L’entrée en fonction du gouvernement De Croo

201Les journaux du jeudi 1er octobre sont unanimes à manifester leur soulagement devant la mise en place du nouveau gouvernement fédéral. La une de La Libre Belgique est entièrement occupée par un portrait du nouveau Premier ministre et titre « Après 16 mois, le gouvernement De Croo Ier », la présence de l’adjectif numéral ordinal paraissant d’emblée accorder au nouveau Premier ministre une option sur le 16, rue de la Loi pour les prochains gouvernements.

202En raison du timing extrêmement serré pour la mise en place de la nouvelle équipe, les observateurs ne découvrent l’intégralité de la composition du gouvernement De Croo que quelques instants avant la prestation de serment au Palais royal, le 1er octobre à 10 heures. Le tableau 3 présente la composition du gouvernement De Croo, qui compte, outre le Premier ministre, 7 ministres francophones et 7 ministres néerlandophones, ainsi que 5 secrétaires d’État : chaque parti compte deux postes de ministre (celui de Premier ministre compris ; premier parti de la coalition, le PS en obtient trois), et les cinq plus grandes formations occupent en outre un poste de secrétaire d’État.

203La composition du gouvernement De Croo se distingue par un taux de renouvellement très important. Sur les vingt ministres et secrétaires d’État, seuls six ont déjà occupé un poste dans un gouvernement fédéral ou fédéré, et seuls trois (A. De Croo, S. Wilmès et D. Clarinval) étaient membres du gouvernement Wilmès II (P.-Y. Dermagne était quant à lui ministre wallon, F. Vandenbroucke a été ministre fédéral puis ministre flamand, tandis que V. Van Quickenborne a été secrétaire d’État puis ministre fédéral). La rupture est manifeste.

Tableau 3. Composition initiale du gouvernement fédéral De Croo (1er octobre 2020)

Tableau 3. Composition initiale du gouvernement fédéral De Croo (1er octobre 2020)

Tableau 3. Composition initiale du gouvernement fédéral De Croo (1er octobre 2020)

Remarque : L’arrêté royal « Gouvernement - Nomination » adopté le 1er octobre 2020 (publié au Moniteur belge le 2 octobre 2020, avec effet au 1er octobre), qui précise les compétences des différents ministres et secrétaires d’État, a été modifié par un arrêté royal du 15 octobre 2020 (publié au Moniteur belge le 18 octobre 2020, avec effet au 1er octobre). Les titres précisés ici sont ceux résultant de cette modification.

204Ce gouvernement fédéral se caractérise également par un rajeunissement des effectifs. La moyenne d’âge de ses membres s’établit à 44 ans, ce qui fait très probablement de lui le gouvernement fédéral le plus jeune de l’histoire. C’est également la première fois que le gouvernement fédéral est paritaire : celui-ci compte dix femmes et dix hommes. Toutefois, au sein du Comité ministériel restreint (kern), qui rassemble les vice-Premiers ministres autour du Premier ministre et constitue l’enceinte de décision la plus importante, on ne trouve plus que deux femmes pour six hommes. On peut également remarquer que ce gouvernement compte trois membres issus de l’immigration extra-européenne : Z. Khattabi, M. Kitir et S. Mahdi. Enfin, P. De Sutter est signalée comme la première personne transgenre en Europe à devenir ministre.

205Les observateurs francophones soulignent que les partis néerlandophones ont reçu des compétences plus importantes que les partis francophones. La Libre Belgique note : « Les quatre partis flamands de la coalition ont mis la main sur les compétences les plus importantes (Justice, Intérieur, Finances, Budget, Affaires sociales… et le 16, rue de la Loi). (…) Sans doute fallait-il compenser le fait que l’aile néerlandophone de la Vivaldi n’a pas de majorité dans son groupe linguistique »  [224]. Pour sa part, B. Henne (RTBF) analyse : « La répartition des compétences ne fait clairement pas rupture avec la suédoise. Le déséquilibre est à nouveau confirmé. En 2014, les francophones représentés par le seul MR, héritent comme portefeuille important du poste de Premier, des Affaires étrangères et du Budget. En 2020, les mêmes libéraux gardent les Affaires étrangères mais perdent le 16 et le Budget. Faisons les comptes. Le 16, l’Intérieur, la Justice, la Santé, les Affaires sociales, les Finances, le Budget. Les postes régaliens, les postes stratégiques aussi sont pour beaucoup occupés par des néerlandophones. Les francophones héritent des deux plus petits postes régaliens, les Affaires étrangères et la Défense. Le PS hérite de l’Économie et de l’Emploi, deux matières très régionalisées. Avec le plan de relance qui se profile, ce n’est pas rien. Mais cela ne gomme pas l’évidente disproportion. C’est le prix du ralliement des partis flamands à une coalition où ils sont minoritaires »  [225].

206Par ailleurs, la répartition politique des portefeuilles ministériels apparaît assez convenue. Aux partis de centre-droit reviennent le maintien de l’ordre (exception faite de la Défense), les finances et le budget, ainsi que la défense des indépendants. Les socialistes reçoivent des portefeuilles de type social (liés à la sécurité sociale ou à l’intégration sociale) ou économique (l’économie ou la relance). Enfin, aux écologistes échoient les matières environnementales au sens large (en ce compris la mobilité ou l’énergie).

207Outre le retour en politique du ministre d’État et ancien président du SP, F. Vandenbroucke, les castings du CD&V, de Groen et du MR apparaissent surprenants. Les chrétiens-démocrates flamands ont choisi de faire monter uniquement de nouvelles personnalités au gouvernement fédéral. Si de nombreux observateurs pensaient en effet y retrouver S. Mahdi, président des Jong CD&V et challenger de J. Coens pour la présidence du parti en 2019, ils n’y attendaient ni V. Van Peteghem ni A. Verlinden, peu familiers au grand public. Si le premier, député au Parlement flamand et bourgmestre de De Pinte, est connu en politique depuis plusieurs années, ce n’est pas le cas de la seconde, l’avocate ayant exercé comme seul mandat politique celui de conseillère communale à Schoten jusqu’en 2012. Si les ex-ministres de la Justice K. Geens et de la Sécurité et de l’Intérieur P. De Crem ont déclaré n’être pas candidats à une nouvelle fonction ministérielle, ce n’est pas le cas de l’ex-ministre de l’Emploi et de l’Économie, Nathalie Muylle (CD&V), qui expose quelques jours plus tard sa déception et son dépit de n’avoir appris qu’en dernière minute, par la voix d’un journaliste, qu’elle ne serait plus ministre  [226]. Le choix du vice-Premier ministre Groen a également été compliqué. Alors que l’on attend le négociateur Kristof Calvo (également chef de groupe Écolo-Groen à la Chambre), c’est finalement la députée européenne P. De Sutter qui a été retenue. Mais c’est le choix du MR, annoncé par le président G.-L. Bouchez au matin du 1er octobre via les réseaux sociaux, qui déconcerte le plus. Le choix du président du collège provincial du Brabant wallon, M. Michel, frère de l’ancien Premier ministre et actuel président du Conseil européen, C. Michel, et fils du ministre d’État, ancien vice-Premier ministre et ancien commissaire européen, Louis Michel, suscite de l’étonnement et même de l’hostilité au sein même du parti. En outre, l’annonce des postes fédéraux est doublée par celle d’un changement au sein du gouvernement wallon : la ministre wallonne de la Fonction publique, du Tourisme, du Patrimoine et de la Sécurité routière, Valérie De Bue, doit céder son poste à D. Ducarme, désormais ex-ministre fédéral des Classes moyennes, des Indépendants, des PME, de l’Agriculture et de l’Intégration sociale. Cette dernière manœuvre va cependant échouer. Ainsi que plusieurs responsables politiques le font promptement remarquer, le décret spécial wallon du 2 mai 2019  [227] impose la présence d’un tiers de femmes au sein de l’exécutif wallon, une obligation qui ne serait plus rencontrée si D. Ducarme remplaçait V. De Bue. Ces maladresses dans le casting ministériel vont susciter une très forte critique de G.-L. Bouchez au sein de son parti, qui ira jusqu’à remettre en cause sa présidence ; finalement, au terme d’une réunion du bureau du MR et du groupe parlementaire, la décision sera prise d’encadrer G.-L. Bouchez par un « G11 » de personnalités du parti afin d’encourager une prise de décision collégiale.

208Après la prestation de serment devant le chef de l’État, le Premier ministre prononce la déclaration gouvernementale devant la Chambre des représentants, réunie pour l’occasion au Parlement européen afin de permettre la présence de tous ses membres tout en respectant les distances sanitaires prévues par les règles de lutte contre le Covid-19  [228].

209La composition de la Chambre connaît des modifications. Les ministres sortants de l’équipe Wilmès II qui n’intègrent pas le gouvernement De Croo reprennent le siège de député que leurs suppléants occupaient depuis les élections du 26 mai 2019. Au MR, Daniel Bacquelaine, P. Goffin, D. Ducarme et Marie-Christine Marghem reprennent leurs sièges, tandis que Mathieu Bihet, Magali Dock, Benoît Friart et Isabelle Galant redeviennent suppléants ; par ailleurs, F. Bellot réintègre le Parlement wallon tandis que Frederick Botin redevient suppléant. Au CD&V, K. Geens récupère son siège ; cela est toutefois sans incidence sur son suppléant, S. Mahdi étant devenu secrétaire d’État dans le nouveau gouvernement. N. Muyle retrouve également les bancs de la Chambre et Bercy Slegers redevient suppléante. À l’Open VLD, M. De Block reprend son siège occupé par Bram Delvaux ; Philippe De Backer n’avait pas été candidat lors du scrutin du 26 mai 2019, ayant annoncé dès le 24 janvier précédent son intention de quitter la vie politique.

210Par ailleurs, les nouveaux ministres et secrétaires d’État qui siégeaient à la Chambre laissent leur siège à leurs suppléants. C’est le cas de L. Dedonder (PS), remplacée par Leslie Leoni ; de G. Gilkinet, Z. Kattabi et S. Schlitz (Écolo), qui laissent leur siège à Cécile Cornet, Claire Hugon et Nicolas Parent ; de V. Van Quickenborne (Open VLD), remplacé par Jasper Pillen ; de M. Kitir (SP.A), suppléée par Bert Moyaers ; et de T. Van der Straeten (Groen), remplacée par Guillaume Defossé (Écolo). Ce dernier remplacement a pour conséquence de modifier la répartition linguistique des membres de la Chambre. En effet, T. Van der Straeten, membre de Groen, a été élue sur la liste Écolo dans la circonscription électorale de Bruxelles-Capitale. Ayant prêté serment premièrement en néerlandais, elle a été versée dans le groupe linguistique néerlandais. Son suppléant, G. Defossé, membre d’Écolo, prête serment tout d’abord en français, et est donc versé dans le groupe linguistique français  [229]. Les 87 sièges de majorité du gouvernement De Croo se répartissent donc finalement en 46 sièges francophones sur 62 et 41 sièges néerlandophones sur 88. Il jouit donc du soutien de 74,2 % des députés francophones et de 46,6 % des députés néerlandophones.

211Toujours réunis au Parlement européen, les membres de la Chambre des représentants débattent de la déclaration gouvernementale durant la journée du 2 octobre. Sans surprise, la N-VA, emmenée par son chef de groupe, P. De Roover, prend la tête de l’opposition. Si la séance s’éternise jusqu’aux petites heures du matin du lendemain, tant les nationalistes flamands de la N-VA que l’extrême droite du Vlaams Belang semblent avoir opté pour une opposition réfléchie, et la séance ne connaît pas de véritables incidents.

212Le vote de la confiance au gouvernement fédéral De Croo intervient le samedi 3 octobre. Réunis au Parlement européen, les députés accordent leur confiance à l’équipe par 87 voix contre 54 et 7 abstentions. Si 87, qui est le nombre de députés réunis par les sept partis de la coalition Vivaldi, est le chiffre attendu pour les votes favorables, on peut toutefois remarquer qu’il est atteint – malgré l’absence de Marc Goblet (PS), pour raison de santé – par le vote du député indépendant E. Kir (ex-PS) en faveur de la confiance. Sans surprise, les députés de la N-VA, du Vlaams Belang et du PTB votent contre la confiance. Ceux du CDH et de Défi choisissent l’abstention. La cheffe du groupe CDH, Catherine Fonck, s’en explique en ces termes : « Votre accord de gouvernement comporte de bonnes intentions, mais aussi beaucoup de nébuleuses derrière lesquelles se cache le meilleur comme le pire. La Vivaldi porte décidément bien son nom. On y trouve les quatre saisons, avec les promesses du printemps, de l’été, mais aussi le froid parfois glacial de l’automne et de l’hiver. Devant toutes ces nébuleuses, seul l’avenir nous dira ce qu’il en sera », tout en souhaitant bonne chance (« Good luck! ») au gouvernement. Pour Défi, Sophie Rohonyi, après avoir déclaré que « les partis qui ne veulent pas de ce gouvernement nous ont offert hier soir, cette nuit, un spectacle juste lamentable d’obstruction parlementaire », annonce que son « parti refuse de participer à cette opposition, tant sur le fond que sur la forme » et estime que « ce gouvernement doit réussir, et c’est pour cela que nous nous inscrivons dans une logique non pas d’opposition vociférante et destructrice, mais d’opposition constructive »  [230].

213Il reste alors théoriquement 1 331 jours (un peu moins de 3 ans et 8 mois) au gouvernement De Croo jusqu’aux élections fédérales prévues le 26 mai 2024 pour appliquer son programme et, selon les mots du Premier ministre, restaurer la confiance.

Conclusion

214On peut considérer que la formation du gouvernement De Croo met fin à la plus longue crise politique de l’histoire de la Belgique. Bien qu’il ne se soit écoulé « que » 494 jours entre les élections fédérales du 26 mai 2019 et la prestation de serment du 1er octobre 2020, soit un délai moins long que celui de 540 jours qui a séparé les élections du 13 juin 2010 et la mise en place du gouvernement Di Rupo le 5 décembre 2011  [231], le point de départ de la crise est bien la chute du gouvernement Michel I, le 9 décembre 2018. Dès ce moment en effet, la Belgique ne dispose plus d’un gouvernement majoritaire et de plein exercice. Il en sera ainsi pendant 662 jours.

215Cette crise apparaît en outre comme plus profonde. Contrairement à la crise de 2010-2011 – qui avait largement pour objet la sixième réforme de l’État, dont la conclusion ouvrira la voie à la mise en place du gouvernement Di Rupo –, la crise politique de 2019-2020 est plus structurelle : elle ne porte pas sur un désaccord à propos d’une réforme institutionnelle.

216La difficulté à constituer une coalition majoritaire à la Chambre résulte d’une combinaison de facteurs. Premier facteur, l’émiettement de la représentation à la Chambre. Après les élections du 26 mai 2019, douze partis sont représentés à la Chambre. En moyenne, chacun détient donc 12,5 sièges. Vingt ans plus tôt, après les élections du 13 juin 1999, ils n’étaient que onze partis à se partager les sièges (soit une moyenne de 13,5 sièges). Mais surtout, alors qu’en 1999 les trois familles politiques traditionnelles (sociale-chrétienne, libérale et socialiste) et les écologistes détenaient ensemble 84,0 % des sièges (126 sur 150), en 2019 les huit formations de ces quatre familles ne détiennent plus que 62,0 % des sièges (93 sur 150). Tournant historique, en 2019, pour la première fois, les six partis des familles traditionnelles n’ont plus, ensemble, une majorité à la Chambre : ils réunissent 72 sièges (48,0 %) contre 106 en 1999 (70,7 %). Deuxième facteur, la montée en puissance de l’extrême droite en Flandre et de la gauche radicale dans toutes les régions. Le cordon sanitaire établi officiellement à l’égard de la première, et officieusement à l’égard de la seconde, fait que 30 sièges (20,0 % de l’hémicycle) ne sont pas mobilisables pour constituer une majorité. En 1999, le Vlaams Blok (15 sièges) et le FN (1 siège) n’occupaient que 10,7 % des sièges. Troisième facteur, le score de la N-VA. Le parti nationaliste flamand a remporté 25 sièges  [232], soit un huitième de l’hémicycle et 28,1 % des 89 sièges que comptait le groupe linguistique néerlandais avant la formation du gouvernement De Croo. Le Vlaams Belang et le PTB (en néerlandais, PVDA) étant écartés, il n’est donc plus possible de constituer un gouvernement fédéral qui jouisse d’une majorité au sein du groupe linguistique néerlandais sans la N-VA. Or, ainsi que le démontrera l’épisode des négociations entre le président de ce parti, Bart De Wever, et le président du PS, Paul Magnette, en juillet et août 2020, la N-VA a un programme de réformes institutionnelles qui est difficilement compatible avec celui de plusieurs autres formations politiques démocratiques. Quatrième facteur, lié au précédent, la volonté de l’Open VLD et plus encore du CD&V de néanmoins chercher un accord avec la N-VA. Elle a empêché la constitution d’une majorité sans les nationalistes flamands pendant plus d’un an. Pour constituer un gouvernement fédéral, il fallait soit trouver un terrain d’entente avec la N-VA, soit renoncer à l’idée de disposer d’un gouvernement représentatif de chaque côté de la frontière linguistique. Entre mai 2019 et septembre 2020, la balance a penché tantôt en faveur de la première solution, avec un gouvernement qui serait constitué autour d’un axe formé par le PS et la N-VA, chacun premier parti au sein de son groupe linguistique mais aux antipodes l’un de l’autre sur le plan programmatique, tantôt en faveur de la seconde, avec une coalition sans la N-VA, appelée arc-en-ciel ou Vivaldi, qui rassemblerait un grand nombre de partis autour d’un projet politique plus ou moins cohérent et sans disposer d’une majorité dans le groupe linguistique néerlandais de la Chambre. Ce n’est qu’après qu’a été clairement acté l’échec de la première solution, à la mi-août 2020, que la formation du nouveau gouvernement autour de la coalition Vivaldi a pu être sérieusement entamée. In fine, la force du nationalisme flamand, qu’il s’incarne dans une version démocratique (la N-VA et le CD&V) ou non (le Vlaams Belang) représente sans doute le défi le plus important qu’il a fallu affronter pour constituer le gouvernement De Croo, et qu’il faudra sans doute affronter à nouveau après le prochain scrutin fédéral.

217La deuxième phase de la formation du gouvernement De Croo s’est déroulée pendant la crise sanitaire sévère du Covid-19. La pandémie a-t-elle ralenti ou accéléré la formation du gouvernement fédéral ? Lorsque le Covid-19 s’impose à l’agenda politique à la mi-mars, les discussions relatives à la formation d’un gouvernement fédéral sont au point mort. Dix mois après les élections, la présidente du Sénat, Sabine Laruelle (MR), et le président de la Chambre, Patrick Dewael (Open VLD), ont été chargés par le Roi d’une mission de temporisation. Il faut rasséréner les esprits après l’échec retentissant de la mission de Koen Geens (CD&V). Cette mission va être interrompue par la crise sanitaire, qui voit la mise en place du gouvernement Wilmès II (MR/CD&V/Open VLD), de plein exercice quoique minoritaire ; la crise sanitaire a donc poussé les partis en négociation à s’accorder sur la formation d’un gouvernement recevant la confiance d’une majorité de députés, fût-ce pour une durée et un champ d’action limités. Après cela, pendant deux mois, les négociations politiques pour former un nouveau gouvernement sont en mode pause. Elles vont toutefois reprendre avec une volonté d’aboutir plus forte qu’avant le déclenchement de la crise sanitaire. Progressivement, on s’achemine vers une situation où, pour chaque formation politique, former un gouvernement fédéral semble devenir plus important que maintenir ses exclusives, voire que défendre les points fondamentaux de son programme. C’est ce qui permettra à P. Magnette de revenir sur sa décision de ne pas négocier avec la N-VA. Toutefois, c’est peut-être davantage la possibilité de voir se constituer un gouvernement « Arizona » sans le PS que la crise due au coronavirus qui motive P. Magnette à entamer des discussions avec B. De Wever. Mais c’est indubitablement l’urgence sanitaire qui conduit ces deux hommes, qui étaient des adversaires politiques confirmés, à jeter les bases d’un accord. Cet accord ne parviendra cependant pas à rassembler sur sa base une majorité parlementaire, ce qui conduira les partis libéraux et le CD&V à se rallier à une formule Vivaldi qui rassemblera également les socialistes et les écologistes. La séquence qui se déroule à partir du 20 juillet 2020, quand P. Magnette et B. De Wever entament leur mission, est fortement influencée par la présence de la crise sanitaire et de l’impératif de disposer d’un gouvernement fédéral majoritaire à la rentrée, lorsque l’équipe Wilmès II aura atteint sa date de péremption politique annoncée. Cette pression ne suffit toutefois pas à dégager la voie vers un accord, comme le montre l’échec de ce duo. Mais cet échec ne peut justifier un nouveau coup d’arrêt des négociations et, rapidement, la piste d’une coalition Vivaldi est mise sur les rails, cette fois de manière décisive. En l’absence de la double pression que constituent alors la crise sanitaire et le terme annoncé du gouvernement en place, on ne sait pas quel élément aurait pu débloquer les négociations fédérales, ni quand. Par ailleurs, il faut relever que, rapidement après son arrivée sur le continent européen, la pandémie et ses conséquences ont poussé les institutions européennes à mettre de côté l’impératif d’équilibre budgétaire qui prévalait depuis le début de l’Union économique et monétaire. En Belgique, cela a sans doute permis à des formations faisant de la lutte contre le déficit un leitmotiv, telles que la N-VA, le CD&V ou les deux partis libéraux, d’accepter les revendications d’autres, socialistes ou écologistes, impliquant plus de souplesse sur le plan budgétaire. En définitive, le déroulement des négociations fédérales après les élections du 26 mai 2019 permet de nourrir une forme d’inquiétude quant au déroulement de futures négociations, en l’absence d’une crise grave qui viendrait débloquer le processus de l’extérieur.

218Inédites par leur longueur, les négociations fédérales l’ont également été au niveau de leurs modalités. Le rôle du chef de l’État, notamment, apparaît modifié, et peut-être fragilisé. D’une part, le choix de certaines personnalités à qui une mission royale a été confiée a été loin de faire l’unanimité. C’est le cas en particulier de la mission donnée à Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens, tout juste élus à la tête du MR et du CD&V et peu expérimentés, le 10 décembre 2019, puis de celle confiée à K. Geens (CD&V) le 31 janvier 2020. D’autre part, les négociations ont repris en mai 2020 à l’initiative des présidents du PS, P. Magnette, et du SP.A, Conner Rousseau, sans que le Roi n’intervienne dans ce processus. Le chef de l’État n’est pas intervenu non plus dans la mission remplie ensuite par les présidents des trois partis constituant le gouvernement Wilmès II, G.-L. Bouchez, J. Coens et Egbert Lachaert (Open VLD). Par ailleurs, on a pu observer à différentes reprises durant les négociations que la décision du chef de l’État était annoncée dans la presse bien avant la diffusion du communiqué du Palais qui en faisait état. Globalement, si personne ne soutient que le Roi a eu une influence négative sur le processus de formation du gouvernement, il n’apparaît pas non plus qu’il en ait facilité l’aboutissement. Si à l’avenir les négociations fédérales se déroulaient directement entre présidents de parti, à l’instar de ce qui se pratique déjà – avec succès – dans les entités fédérées, rien n’indique qu’elles en seraient compliquées ou (encore) plus lentes.

219Remarquons par ailleurs que jamais autant de missions royales ne s’étaient succédé. Pas moins de 10 missions royales (et 2 missions dépourvues du seing du Palais), confiées à 14 personnalités politiques (certaines d’entre elles occupant plusieurs fois ce rôle), ont été nécessaires pour arriver à la mise en place du gouvernement De Croo. L’ensemble des négociations paraissent s’être déroulées essentiellement au sein du monde politique, presque en vase clos, sans faire intervenir les représentants du monde syndical, du monde patronal ou de la société civile.

220Le gouvernement fédéral mis en place au terme de 16 mois de négociations présente un certain nombre d’innovations. En ce qui concerne sa composition, c’est la première heptapartite de l’histoire de la Belgique. Le pays avait déjà connu des hexapartites, soit avec une coalition composée des six partis constituant les trois familles politiques traditionnelles, souvent appelée « tripartite classique » (tel le dernier en date, le gouvernement Di Rupo, 2011-2014), soit avec une autre formule (telle la coalition arc-en-ciel de Verhofstadt I, 1999-2003), mais jamais une coalition n’avait réuni sept partenaires.

221D’autre part, c’est là une nouvelle confirmation qu’il est dorénavant admis qu’un parti puisse faire partie du gouvernement fédéral sans son alter ego de l’autre côté de la frontière linguistique. Tel était déjà le cas, entre 2014 et 2020, dans les gouvernements Michel I et II ainsi que Wilmès I et II, qui comprenaient le CD&V mais pas le CDH, et, avant cela, entre 2008 et 2011, dans les gouvernements Leterme I, Van Rompuy et Leterme II, qui comprenaient le PS mais pas le SP.A.

222C’est également la première fois que le Premier ministre n’est pas issu d’un des partis les plus importants de la majorité gouvernementale : l’Open VLD n’est que le cinquième parti de la coalition en termes de sièges. Habituellement, c’est le parti qui détient le plus grand nombre de sièges qui remplit le poste, ce qui a notamment conduit à une succession ininterrompue de Premiers ministres issus du CVP pendant 25 ans (de 1974 à 1999). Toutefois, en 2014, c’est le MR, deuxième parti de la coalition mais premier francophone, qui avait fourni le Premier ministre du gouvernement Michel I, le premier parti (la N-VA) ne souhaitant pas recevoir ce poste.

223Du côté néerlandophone, on a souligné que le gouvernement De Croo ne disposait pas d’une majorité au sein du groupe linguistique néerlandais. En effet, il ne bénéficie que du soutien de 41 députés sur 88, soit 46,6 %. Ce n’est toutefois pas la première fois que cela se produit. Le gouvernement Di Rupo, notamment, était minoritaire dans le groupe linguistique néerlandais (43 sièges sur 88, soit 48,9 %). Rappelons que le gouvernement le plus déséquilibré sur le plan linguistique demeure l’exécutif Michel I, avec 20 sièges sur 63 au sein du groupe linguistique français (soit 31,7 %). L’idée qu’il est nécessaire de disposer d’un gouvernement représentatif de chaque communauté linguistique a toutefois pris de l’ampleur ces dernières années. Elle a notamment donné vie, côté flamand, à l’idée d’une coalition miroir qui réunirait les partis des coalitions déjà constituées dans les principales entités fédérées. Disposer d’une majorité dans chaque groupe linguistique à la Chambre et au Sénat sera par ailleurs sans doute indispensable pour mener à bien une réforme de l’État en 2024, même si un soutien de l’extérieur reste possible.

224Reste que le cordon sanitaire à l’égard du Vlaams Belang et l’échec des tentatives faites pour intégrer la N-VA dans la coalition gouvernementale ont pour résultat d’écarter les deux principaux partis de Flandre (et du pays) de la majorité, alors que les trois plus importants partis francophones en font partie. Il existe en outre une adéquation entre la composition du gouvernement wallon et de celui de la Communauté française avec celle de l’aile francophone du gouvernement fédéral, tandis que le gouvernement flamand réunit deux des quatre membres de l’aile néerlandophone du gouvernement fédéral et la N-VA. Ce déséquilibre pourrait nuire à la concertation dont le caractère indispensable est renforcé par la lutte contre la pandémie de Covid-19.

225Au-delà du caractère convenu de la répartition politique des portefeuilles ministériels, le casting du gouvernement De Croo présente également quelques particularités. Composé de quinze ministres et de cinq secrétaires d’État, le gouvernement est paritaire au niveau du genre : il se compose de dix femmes et de dix hommes. Toutefois, cette parité est loin d’être atteinte au niveau du Comité ministériel restreint (kern), qui rassemble le Premier ministre et les vice-Premiers ministres : il n’y a là que deux femmes pour six hommes. Signalons également que, heptapartite oblige, c’est la première fois que ce kern compte huit membres (un vice-Premier ministre par parti et le Premier ministre) : les vice-Premiers ministres sont aussi nombreux que les autres ministres (sept). Si la composition du gouvernement respecte évidemment le prescrit constitutionnel de parité linguistique, Premier ministre excepté, ce n’est pas le cas du kern, puisque le Premier ministre est néerlandophone et qu’il y a quatre partis néerlandophones pour trois partis francophones dans la majorité. Il y a donc cinq membres néerlandophones et trois francophones au sein du kern. Le caractère inédit de l’équipe De Croo est également manifeste dans la jeunesse de ses membres, dont la moyenne d’âge est de 44 ans, et dans leur relative inexpérience, puisque seuls six d’entre eux ont une expérience préalable au sein d’un exécutif.

226Le caractère novateur du gouvernement De Croo a contribué à générer une dynamique de changement, qui s’est incarnée également dans le contenu et le ton de la déclaration gouvernementale. Cette dynamique parviendra-t-elle à redonner une forme de confiance au citoyen et à triompher des facteurs d’instabilité politique au niveau fédéral en Belgique ? On remarquera à cet égard que, pour la première fois, deux ministres (l’un francophone, l’autre néerlandophone) reçoivent parmi leurs compétences le Renouveau démocratique.

227Depuis une vingtaine d’années, une forme d’instabilité préside à la constitution des gouvernements fédéraux. Si, à la fin des années 1970 et au début des années 1980, la durée de vie des gouvernements était relativement courte, depuis le début du XXIe siècle, c’est plutôt la durée de constitution des gouvernements qui est longue. Dans la foulée des facteurs de complexification relevés plus haut, on peut souligner la plus grande diversité des majorités gouvernementales. Entre 1980 et 1999, seules deux majorités gouvernementales ont été employées : celle qui associait les sociaux-chrétiens et les socialistes (éventuellement avec la Volksunie) et celle qui associait les mêmes sociaux-chrétiens avec les libéraux  [233]. Depuis juillet 1999, sept compositions gouvernementales différentes ont été expérimentées  [234].

228Le Premier ministre A. De Croo a situé l’action de son gouvernement au-delà de la fin de la législature, à l’horizon 2030. S’il parvient effectivement à reconduire son équipe en 2024, il cassera ainsi la dynamique en place depuis deux décennies.

Annexes

Annexe 1. Chronologie des principaux événements

229Le tableau ci-dessous présente les principales dates de la crise politique. Les deux colonnes de droite indiquent le nombre de jours qui les séparent de la constitution du gouvernement minoritaire Michel II le 9 décembre 2018 (colonne A) et le nombre de jours qui les séparent des élections du 26 mai 2019 (colonne B).

Annexe 2. Communiqués du Palais royal relatifs à la formation du gouvernement fédéral

23030 mai 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte et les a chargés d’une mission d’information visant à identifier les défis à relever par notre pays, et les possibilités ainsi que les conditions nécessaires en vue de former un gouvernement fédéral. Dans le cadre de cette mission, ils garderont le contact avec les responsables des négociations dans les régions et communautés. Messieurs Reynders et Vande Lanotte ont accepté cette mission. Ils feront un premier rapport au Roi sur l’avancement de leur mission le 6 juin.

2316 juin 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte. Les informateurs ont fait rapport au Roi. Sur leur proposition, la mission a été prolongée et ils feront à nouveau rapport au Roi le lundi 17 juin. Ils continueront à œuvrer en vue de permettre la formation d’un gouvernement fédéral dans les meilleurs délais.

23217 juin 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte. Les informateurs ont fait rapport au Roi. Sur leur proposition, la mission a été prolongée et ils feront à nouveau rapport au Roi le lundi 1er juillet. Ils continueront à œuvrer en vue de permettre la formation d’un gouvernement fédéral dans les meilleurs délais.

2331er juillet 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte. Les informateurs ont fait rapport au Roi. Le Roi a demandé aux informateurs d’établir, dans la poursuite de leurs échanges, une note pouvant servir de base aux futures discussions de préformation. Les informateurs feront un premier rapport le 12 juillet et un suivant le 29 juillet.

23412 juillet 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte. Les informateurs ont fait un rapport intermédiaire au Roi. Ils feront un nouveau rapport le 29 juillet.

23529 juillet 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte. Les informateurs ont fait rapport au Roi sur les discussions en cours en vue de former un gouvernement fédéral. Ils feront à nouveau rapport au Roi le 17 août et le 9 septembre.

23617 août 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte. Les informateurs ont fait un rapport intermédiaire au Roi. Ils feront un nouveau rapport le 9 septembre 2019.

2379 septembre 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte. Les informateurs ont fait rapport au Roi. Le Roi les a chargés de dégager des points de convergence en vue d’entamer prochainement la formation du gouvernement fédéral. Les informateurs feront un rapport final au plus tard début octobre.

2387 octobre 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu Messieurs Didier Reynders et Johan Vande Lanotte en audience au Palais de Bruxelles. Les informateurs ont exposé leur rapport final. Le Roi a mis fin à leur mission et a exprimé son appréciation pour leurs efforts et pour le travail réalisé au cours des mois écoulés. Le Roi tient sa décision en suspens quant à la poursuite de la formation gouvernementale.

2398 octobre 2019 : Sa Majesté le Roi a chargé Messieurs Geert Bourgeois et Rudy Demotte d’une mission de préformation. Ils examineront les bases concrètes en vue de la formation d’un gouvernement fédéral autour de leur parti respectif, et ceci avec les quatre autres partis impliqués dans les discussions. Ils feront rapport au Roi le lundi 4 novembre.

2405 novembre 2019 : Sa Majesté le Roi a pris acte des conclusions des préformateurs Geert Bourgeois et Rudy Demotte qui constatent que les bases pour engager une phase de formation sont insuffisantes. Le Roi a mis fin à la mission des préformateurs. Le Roi a désigné Monsieur Paul Magnette en tant qu’informateur. Monsieur Magnette a accepté cette mission. Il fera rapport au Roi le 18 novembre.

24118 novembre 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles M[onsieu]r Paul Magnette. L’informateur a fait un rapport intermédiaire au Roi. Il fera un nouveau rapport le 25 novembre.

24225 novembre 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Monsieur Paul Magnette. L’informateur a fait un rapport intermédiaire sur les discussions avec les différentes formations politiques. Il fera rapport au Roi le 9 décembre.

2439 décembre 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu Monsieur Paul Magnette en audience au Palais de Bruxelles. Il a remis au Roi un rapport final et a demandé d’être déchargé de sa mission. Le Roi tient sa décision en délibéré et entame des consultations.

24410 décembre 2019 : Sa Majesté le Roi a pris acte du rapport final de l’informateur Paul Magnette. Le Roi a mis fin à sa mission et a exprimé son appréciation pour le travail réalisé. Le Roi a désigné Messieurs Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens en tant qu’informateurs. Messieurs Bouchez et Coens ont accepté cette mission. Ils feront rapport au Roi le 20 décembre.

24520 décembre 2019 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens. Les informateurs ont fait un rapport intermédiaire au Roi. Ils feront un nouveau rapport au plus tard le 13 janvier 2020.

24613 janvier 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens. Les informateurs ont fait rapport au Roi. Le Roi leur a demandé de poursuivre leur mission en vue de clarifier davantage les différentes positions. Ils feront part de leurs conclusions au plus tard le 28 janvier et feront un rapport intermédiaire le 20 janvier.

24720 janvier 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens. Les informateurs ont fait un rapport intermédiaire au Roi.

24828 janvier 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens. Les informateurs ont remis au Roi un rapport. Ils vérifieront certains éléments et déposeront leurs conclusions finales le 4 février 2020.

24931 janvier 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens. Les informateurs ont remis au Roi leurs conclusions finales. Le Roi a mis fin à la mission des informateurs et les a remercié[s] pour le travail réalisé.

25031 janvier 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Monsieur Koen Geens. Le Roi a constaté que les discussions entre partis n’ont pas encore permis de former une coalition soutenue par une majorité parlementaire. Il a chargé Monsieur Koen Geens de prendre les initiatives nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement de plein exercice. Monsieur Geens a accepté cette mission. Il fera rapport au Roi le 10 février.

25110 février 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu Monsieur Koen Geens en audience au Palais de Bruxelles. Il a fait un rapport intermédiaire au Roi. Il fera à nouveau rapport le 17 février.

25214 février 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu Monsieur Koen Geens en audience au Palais de Bruxelles. Il a remis au Roi un rapport final et a demandé d’être déchargé de sa mission. Le Roi a accepté sa démission et exprimé son appréciation pour ses efforts et le travail réalisé. Le Roi entamera lundi des consultations.

25319 février 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles les présidents de la Chambre des représentants Monsieur Patrick Dewael et du Sénat Madame Sabine Laruelle. Le Roi leur a demandé de prendre les contacts politiques nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement de plein exercice. Ils ont accepté cette mission. Ils feront rapport au Roi au plus tard le 9 mars.

2549 mars 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu Monsieur Patrick Dewael et Madame Sabine Laruelle en audience au Palais de Bruxelles. Ils ont fait un rapport intermédiaire au Roi. Le Roi a chargé Monsieur Dewael et Madame Laruelle de continuer à prendre les initiatives nécessaires en vue de la mise sur pied rapide d’un gouvernement. Celui-ci s’attellera en priorité à répondre aux problèmes urgents auxquels notre pays doit faire face. Ils remettront leur rapport final au plus tard le 16 mars.

25516 mars 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu Monsieur Patrick Dewael et Madame Sabine Laruelle en audience au Palais de Bruxelles. Ils ont remis un rapport final au Roi dont il ressort que le gouvernement démissionnaire dispose d’un soutien suffisant au Parlement lui permettant de poursuivre la gestion des problèmes urgents auxquels notre pays doit faire face. Le Roi a mis fin à la mission de Monsieur Dewael et Madame Laruelle et a exprimé son appréciation pour le travail réalisé. Le Roi a chargé Madame Sophie Wilmès de former le gouvernement. Elle a accepté cette mission.

25620 juillet 2020 : Sa Majesté le Roi, après consultation téléphonique avec les présidents des partis ayant été impliqués dans les discussions politiques après les élections, a reçu conjointement en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Bart De Wever et Paul Magnette. Le Roi les a chargés de prendre les initiatives nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement qui s’appuie sur une large majorité au Parlement. Ils ont accepté cette mission. Ils feront régulièrement rapport au Roi et une première fois le 31 juillet.

25731 juillet 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu Messieurs Bart De Wever et Paul Magnette en audience au Palais de Bruxelles. Ils ont fait un rapport intermédiaire au Roi sur leur mission de préformation. Le Roi leur a demandé de réunir au plus vite les présidents de partis pouvant offrir une large assise à la formation d’un gouvernement. Ils feront un nouveau rapport le 8 août.

2588 août 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu Messieurs Bart De Wever et Paul Magnette en audience au Palais de Bruxelles. Ils ont fait un rapport intermédiaire au Roi sur leur mission de préformation. Ils feront un nouveau rapport le 17 août. Le Roi invite les partis concernés à faire preuve d’un grand sens des responsabilités afin de pouvoir conclure rapidement un accord de gouvernement.

25917 août 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu Messieurs Bart De Wever et Paul Magnette en audience au Palais de Bruxelles. Les préformateurs ont présenté leur rapport final au Roi et remis leur démission. Le Roi tient sa décision en délibéré et il entame des consultations avec les présidents des partis ayant été impliqués dans les discussions politiques après les élections.

26018 août 2020 : Sa Majesté le Roi a clôturé ses consultations avec les présidents des partis ayant été impliqués dans les discussions politiques après les élections. Sur la base des éléments apportés lors de ces discussions, Sa Majesté le Roi a accepté la démission de Messieurs Bart De Wever et Paul Magnette. Le Roi a chargé Monsieur Egbert Lachaert de prendre les initiatives nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement qui s’appuie sur une large majorité au Parlement. Monsieur Lachaert a accepté cette mission et fera un premier rapport au Roi le 28 août.

26128 août 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Monsieur Egbert Lachaert. Monsieur Lachaert a fait un rapport intermédiaire au Roi faisant état de pourparlers constructifs en vue de la formation d’un gouvernement majoritaire. Il fera un nouveau rapport au plus tard le 4 septembre.

2624 septembre 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Monsieur Egbert Lachaert. Monsieur Lachaert a fait rapport au Roi sur sa mission et sur les réunions plénières avec les présidents des partis politiques impliqués dans les discussions en cours. Le Roi a chargé Messieurs Egbert Lachaert et Conner Rousseau d’une mission de préformation. Ils feront rapport au plus tard le 11 septembre.

26311 septembre 2020 : Un entretien téléphonique a eu lieu aujourd’hui entre Sa Majesté le Roi et les préformateurs, Messieurs Egbert Lachaert et Conner Rousseau. Ils ont fait rapport sur leur mission. Le Roi recevra en audience les deux préformateurs le 21 septembre pour leur rapport final.

26421 septembre 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Egbert Lachaert et Conner Rousseau. Les préformateurs ont remis leur démission au Roi. Le Roi a refusé leur démission et leur a demandé de poursuivre leur tâche. Le Roi demande à tous les partis concernés de rétablir au plus vite la confiance. Les préformateurs feront à nouveau rapport au Roi au plus tard le mercredi 23 septembre.

26523 septembre 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Egbert Lachaert et Conner Rousseau. Les préformateurs ont remis leur rapport final. Le Roi a mis fin à leur mission et a exprimé son appréciation pour le travail accompli. Sur base leur rapport [sic], le Roi a désigné Messieurs Paul Magnette et Alexander De Croo co-formateurs. Ils ont accepté cette mission et feront rapport au Roi le 28 septembre.

26628 septembre 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Alexander De Croo et Paul Magnette. Les formateurs ont fait rapport sur leur mission. Ils remettront dans les plus brefs délais leur rapport final au Roi.

26730 septembre 2020 : Sa Majesté le Roi a reçu en audience au Palais de Bruxelles Messieurs Alexander De Croo et Paul Magnette. Les formateurs ont fait rapport sur l’accord de gouvernement intervenu entre les partenaires de la future coalition. Leur mission est prolongée jusqu’à la nomination du gouvernement. La prestation de serment du Premier ministre et des membres du gouvernement aura lieu demain jeudi 1er octobre 2020 à 10h00.

2681er octobre 2020 : Prestation de serment du gouvernement fédéral. Sa Majesté le Roi a reçu ce matin en audience au Palais de Bruxelles Mme Sophie Wilmès, Première ministre, et a nommé M. Alexander De Croo Premier ministre. Le Roi a ensuite reçu en audience M. Alexander De Croo et a accepté la démission de Mme Wilmès de ses fonctions de Première ministre ainsi que celle des membres de l’ancien gouvernement.

269M. De Croo a présenté au Roi les noms des ministres et secrétaires d’État du nouveau gouvernement. Les membres du gouvernement ont ensuite prêté serment. Vous trouvez ci-dessous la liste des ministres et secrétaires d’État nommés par le Roi :

270

M. Alexander De Croo Premier ministre ;
M. Pierre-Yves Dermagne vice-Premier ministre et ministre de l’Économie et du Travail ;
Mme Sophie Wilmès vice-Première ministre et ministre des Affaires étrangères, des Affaires européennes et du Commerce extérieur, et des Institutions culturelles fédérales ;
M. Georges Gilkinet vice-Premier ministre et ministre de la Mobilité ;
M. Vincent Van Peteghem vice-Premier ministre et ministre des Finances, chargé de la Lutte contre la fraude fiscale ;
M. Frank Vandenbroucke vice-Premier ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique ;
Mme Petra De Sutter vice-Première ministre et ministre de la Fonction publique et des Entreprises publiques ;
M. Vincent Van Quickenborne vice-Premier ministre et ministre de la Justice, chargé de la Mer du Nord ;
M. David Clarinval ministre des Classes moyennes, des Indépendants, des PME et de l’Agriculture, des Réformes institutionnelles et du Renouveau démocratique ;
Mme Karine Lalieux ministre des Pensions et de l’Intégration sociale, chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre la pauvreté ;
Mme Ludivine Dedonder ministre de la Défense ;
Mme Zakia Khattabi ministre du Climat, de l’Environnement, du Développement durable et du Green Deal ;
Mme Annelies Verlinden ministre de l’Intérieur et des Réformes institutionnelles ;
Mme Meryame Kitir ministre de la Coopération au développement, chargée des Grandes villes ;
Mme Tinne Van der Straeten ministre de l’Énergie ;
M. Thomas Dermine secrétaire d’État pour la Relance et les Investissements stratégiques, chargé de la Politique scientifique, adjoint au ministre de l’Économie et du Travail ;
M. Mathieu Michel secrétaire d’État à la Digitalisation, chargé de la Simplification administrative, de la Protection de la vie privée et de la Régie des bâtiments, adjoint au Premier ministre ;
Mme Sarah Schlitz secrétaire d’État à l’Égalité des genres et à l’Égalité des chances, adjointe au ministre de la Mobilité ;
M. Sammy Mahdi secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, chargé de la Loterie nationale, adjoint à la ministre de l’Intérieur et des Réformes institutionnelles ;
Mme Eva De Bleeker secrétaire d’État au Budget et à la Protection des consommateurs, adjointe au ministre de la Justice, chargé de la Mer du Nord.

Annexe 3. Lexique des différentes coalitions évoquées

271Arc-en-ciel

272Coalition rassemblant les partis socialistes (PS et SP.A), les partis libéraux (MR et Open VLD) et les partis écologistes (Écolo et Groen). En néerlandais, elle porte le nom de « paars-groen » (violette-verte).

273Ce surnom a initialement été donné au gouvernement fédéral Verhofstadt I (VLD/PS/ Fédération PRL FDF MCC/SP/Écolo/Agalev, juillet 1999 - mai 2003), ainsi qu’aux gouvernements wallon Di Rupo I et Van Cauwenberghe I (PS/Fédération PRL FDF MCC/ Écolo, juillet 1999 - juin 2004), de la Communauté française Hasquin (Fédération PRL FDF MCC/PS/Écolo, juillet 1999 - juillet 2004) et de la Communauté germanophone Lambertz I (SP/PFF/Ecolo, juillet 1999 - juillet 2004).

274Des coalitions arc-en-ciel se sont mises en place en Région wallonne et à la Communauté française après les élections du 26 mai 2019 : gouvernement Di Rupo III et gouvernement Jeholet (tous deux PS/MR/Écolo).

275Arc-en-ciel élargi

276Coalition qui accueillerait le CD&V en sus des partis socialistes, libéraux et écologistes.

277Nom initialement donné à la Vivaldi.

278Arizona

279Coalition qui serait composée de la N-VA, des partis libéraux (MR et Open VLD), des partis de tradition sociale-chrétienne (CDH et CD&V) et du SP.A.

280Ce nom est proposé en février 2020 par un bourgmestre CD&V pour désigner une coalition qui inclurait également le PS. Il fait référence au drapeau de l’État d’Arizona (États-Unis d’Amérique).

281En juillet 2020, le nom s’impose définitivement pour désigner la piste explorée par les présidents des trois partis qui composent le gouvernement fédéral Wilmès II (MR, CD&V et Open VLD), qui cette fois exclut le PS. Cette piste fait long feu dans le courant de ce même mois.

282Avanti

283Nom donné par le président du CD&V Joachim Coens à la coalition Vivaldi à partir du 2 septembre 2020.

284Bourguignonne (ou Anversoise)

285Coalition qui rassemblerait la N-VA, les partis socialistes (PS et SP.A) et les partis libéraux (MR et Open VLD). Ce nom fait référence aux couleurs de l’ancien duché de Bourgogne, qui étaient le jaune, le rouge et le bleu, ainsi qu’à la coalition mise en place à l’automne 2018 pour gouverner la Ville d’Anvers. En néerlandais, elle porte aussi le nom de « paars-geel » (violette-jaune).

286Dans les scénarios évoqués après les élections du 26 mai 2019, le nom Bourguignonne a parfois été employé pour désigner toute coalition construite autour d’un axe PS - N-VA.

287Dewael

288Autre nom donné à une coalition de type arc-en-ciel évoquée initialement par Paul Magnette (PS) à la fin du mois de juillet 2019, en référence aux partis qui ont porté Patrick Dewael (Open VLD) à la présidence de la Chambre des représentants.

289Diables rouges

290Coalition qui rassemblerait la N-VA, le PS, le MR, le CD&V et le SP.A. Elle a été évoquée dans les colonnes du quotidien économique De Tijd en janvier 2020.

291Miroir

292Coalition qui rassemblerait les partis qui constituent le gouvernement wallon (PS, MR et Écolo) et ceux qui composent le gouvernement flamand (N-VA, CD&V et Open VLD) Cette proposition est avancée par le président du CD&V, Joachim Coens en février 2020. Elle est rapidement critiquée par les partis francophones : outre qu’elle est soupçonnée de constituer une nouvelle étape vers le « confédéralisme », elle nie l’existence institutionnelle de la Région bruxelloise.

293En août 2020, la vice-ministre-présidente flamande Hilde Crevits (CD&V) propose également cette formule, mais en associant les partis au pouvoir en Flandre et en Communauté française (qui, dans ce second cas, sont les mêmes que ceux composant le gouvernement wallon).

294Olivier

295Coalition qui rassemble les socialistes, les écologistes et les centristes, en référence aux gouvernements italiens dirigés par Romano Prodi (1996-1998 et 2006-2008) et rassemblant divers partis du centre et de gauche. Une telle coalition a composé le gouvernement wallon et celui de la Communauté française Demotte II en 2009-2014. L’hypothèse d’un nouvel olivier pour ces deux gouvernements a été évoquée après les élections du 26 mai 2019 avant que le refus du CDH ne la rende impossible.

296Orange bleue

297Coalition qui rassemble les partis sociaux-chrétiens (oranges) et libéraux (bleus). Bien que cette coalition ait déjà constitué à de nombreuses reprises la majorité gouvernementale, ce terme ne s’est imposé qu’à partir des négociations ayant suivi les élections fédérales du 10 juin 2007. Une telle coalition (sans le CDH) compose les gouvernements fédéraux Michel II, Wilmès I et Wilmès II, ainsi que le gouvernement wallon Borsus (juillet 2017 - juin 2019).

298Septante-sept

299Coalition qui accueillerait Défi en sus des partis d’un arc-en-ciel (socialistes, libéraux et écologistes).

300Elle est proposée en janvier 2020 par le président de Défi, François De Smet. Les partis socialistes, libéraux, écologistes et Défi disposent alors ensemble de 77 sièges à la Chambre des représentants.

301Suédoise

302Coalition rassemblant la N-VA, les partis libéraux (MR et Open VLD) et le CD&V.

303Ce surnom a été donné au gouvernement fédéral Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD, octobre 2014 - décembre 2018), en référence au drapeau de la Suède, de fond bleu traversé par une croix jaune. Le bleu est la couleur distinctive de la communication politique des partis libéraux, le jaune celle utilisée par la N-VA, tandis que la croix symbolise la présence dans ce gouvernement du CD& V.

304Tripartite classique

305Coalition rassemblant les partis composant les familles politiques dites traditionnelles dans l’histoire politique de la Belgique depuis la fin du XIXe siècle, à savoir les partis socialistes (PS et SP.A), libéraux (MR et Open VLD) et de tradition sociale-chrétienne (CDH et CD&V).

306Le dernier gouvernement fédéral à avoir été ainsi constitué est le gouvernement Di Rupo (décembre 2011 - octobre 2014).

307Vivaldi

308Coalition rassemblant les partis de l’arc-en-ciel (socialistes, libéraux et écologistes) ainsi que le CD&V et/ou le CDH. La plupart du temps, cette piste a été évoquée en 2019-2020 pour inclure le CD&V, mais sans le CDH.

309Elle est ainsi dénommée car, composée de quatre tendances idéologiques, elle évoque les Quatre saisons du compositeur italien ; elle reçoit ce nom en décembre 2019.

310Parfois, on parle également de « petite Vivaldi » pour désigner une coalition où le CDH remplacerait le CD&V, et de « grande Vivaldi » dans le cas où tant le CD&V que le CDH rejoindraient la coalition.

Notes

  • [1]
    À ce propos, cf. B. Biard, P. Blaise, J. Faniel, C. Istasse, C. Sägesser, « Les résultats des élections régionales et communautaires du 26 mai 2019 » et « Les résultats des élections fédérales et européennes du 26 mai 2019 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2414-2415 et n° 2433-2434, 2019. Pour une perspective sur le temps long, cf. C. Istasse, « Les évolutions électorales des partis politiques (1944-2019). I. Analyse par région » et « Les évolutions électorales des partis politiques (1944-2019). II. Analyse nationale », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2416-2417 et n° 2418-2419, 2019.
  • [2]
    La mise en place des nouveaux gouvernements dans les entités fédérées a été analysée dans B. Biard, P. Blaise, J. Faniel, S. Govaert, C. Istasse, « La formation des gouvernements régionaux et communautaires après les élections du 26 mai 2019 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2444-2445, 2019.
  • [3]
    Cf. S. Govaert, « Les négociations communautaires et la formation du gouvernement Di Rupo (juin 2010-décembre 2011) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2144-2145, 2012.
  • [4]
    Il résulte de la révision des articles 46, 65, 117 et 118 de la Constitution (opérée dans le cadre de la sixième réforme de l’État) un alignement des élections fédérales et des élections régionales et communautaires. En effet, il est prévu que la durée d’une législature fédérale est de cinq ans, et que l’élection de la Chambre des représentants se déroule le même jour que l’élection des représentants belges au Parlement européen (et, donc, que les élections régionales et communautaires). En outre, l’article 46, alinéa 6 de la Constitution garantit le caractère simultané de ces scrutins en cas de dissolution anticipée de la Chambre et de nouvelle élection fédérale (à savoir que cette disposition prévoit que la nouvelle législature fédérale courra uniquement jusqu’au jour des élections pour le Parlement européen suivant cette dissolution). Toutefois, en raison d’une disposition transitoire à laquelle est soumis l’article 46 de la Constitution, cette règle n’est, à ce jour, pas entrée en vigueur ; cela nécessiterait l’adoption d’une loi spéciale. Dès lors, en l’état actuel de la législation, si une dissolution anticipée de la Chambre des représentants intervient, les élections fédérales et les élections régionales et communautaires ne présenteront plus un caractère simultané, et ce pour une durée potentiellement illimitée.
  • [5]
    C. Michel a dit estimer « que la fuite en avant vers des élections fédérales dans quelques dizaines de jours – quarante jours, par hypothèse – représenterait une certitude pratiquement absolue d’un immobilisme tout au long de l’année 2019 » (Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 263, 18 décembre 2018, p. 48).
  • [6]
    Cf. C. Istasse, « Les évolutions électorales des partis politiques (1944-2019). III. Les familles politiques », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2435, 2019.
  • [7]
    Par tripartite, il faut en fait entendre au niveau fédéral l’association de trois familles politiques (et, dès lors, de six partis politiques).
  • [8]
    Cf. P. Blaise, C. Sägesser, « Les résultats des élections communales du 14 octobre 2018 en Flandre », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2396-2397, 2018, p. 57-59.
  • [9]
    Cette situation valut à ce gouvernement d’être qualifié par le président du PS, Guy Spitaels, de « gouvernement belgo-flamand » (X. Mabille, « La législature 1981-1985 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1088, 1985, p. 15).
  • [10]
    Sur cette notion, cf. V. Demertzis, « Cordon sanitaire : un dispositif visant l’extrême droite », Les @nalyses du CRISP en ligne, 6 février 2018, http://www.crisp.be/.
  • [11]
    À l’occasion des élections du 26 mai 2019, le groupe linguistique français a perdu 2 sièges au profit du groupe linguistique néerlandais : deux candidats élus dans la circonscription électorale de Bruxelles-Capitale, l’un sur la liste Écolo (qui accueillait des candidats de Groen) et l’autre sur la liste bilingue PTB*PVDA, ont prêté serment d’abord en néerlandais.
  • [12]
    « Une Belgique plus ingouvernable que jamais », L’Écho (en ligne), 27 mai 2019.
  • [13]
    Propos tenus sur VTM et repris par la presse, notamment : « Bart De Wever serait-il prêt à s’allier au Vlaams Belang ? “Mon seul vrai veto, c’est le PS et Écolo au niveau fédéral” », RTL Info, 26 mai 2019.
  • [14]
    « Élections 2019 : une coalition fédérale sans la N-VA est-elle possible ? », La Libre Belgique (en ligne), 28 mai 2019.
  • [15]
    « Élections 2019 : les quatre scénarios au fédéral, plus compliqués les uns que les autres », Le Soir (en ligne), 4 juin 2019. Il est à noter qu’une version actualisée de cet article sera publiée par le journal le 9 septembre suivant sous le titre « Quatre scénarios au fédéral, toujours aussi compliqués les uns que les autres », l’identité du contenu trahissant l’absence de progrès enregistré durant l’été.
  • [16]
    En Communauté germanophone, un accord a été conclu dès le 28 mai 2019 par ProDG, le SP et le PFF (les deux derniers partis cités étant respectivement les ailes germanophones du PS et du MR) ; dans cette entité fédérée, le CSP (aile germanophone du CDH) se trouve donc maintenu dans l’opposition. Cf. B. Biard, P. Blaise, J. Faniel, S. Govaert, C. Istasse, « La formation des gouvernements régionaux et communautaires après les élections du 26 mai 2019 », op. cit., p. 6-12.
  • [17]
    « Le CDH ira dans l’opposition à tous les niveaux de pouvoir : “Le travail de refonte doctrinale radicale va devoir s’effectuer” », La Libre Belgique (en ligne), 5 juin 2019.
  • [18]
    « Le récit de 16 mois de négociations (1/6). Aux premiers jours, le Roi pousse une formule PS/N-VA », La Libre Belgique, 28 octobre 2020.
  • [19]
    Sur la formation des gouvernements des entités fédérées, cf. B. Biard, P. Blaise, J. Faniel, S. Govaert, C. Istasse, « La formation des gouvernements régionaux et communautaires après les élections du 26 mai 2019 », op. cit.
  • [20]
    Cf. V. Demertzis, J. Faniel, S. Govaert, C. Istasse, « La formation des gouvernements après les scrutins du 25 mai 2014 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2275-2276, 2015.
  • [21]
    « Charles Michel désigné président du Conseil européen », Le Vif/L’Express (en ligne), 3 juillet 2020.
  • [22]
    « “Il faut relever les défis sans tarder” : le discours très politique du Roi pour la Fête nationale », Le Soir (en ligne), 20 juillet 2019.
  • [23]
    « La rencontre des informateurs réunissant plusieurs partis s’achève sans commentaires », RTBF Info, 28 juillet 2019.
  • [24]
    « Theo Francken appelle le PS à négocier avec la N-VA : “Bart De Wever et Elio Di Rupo sont des hommes intelligents” », La Libre Belgique (en ligne), 18 août 2019.
  • [25]
    « Coalition fédérale : les sollicitations de la N-VA plongent le PS dans l’embarras », Le Soir (en ligne), 18 août 2019.
  • [26]
    26 V. Demertzis, J. Faniel, S. Govaert, C. Istasse, « La formation des gouvernements après les scrutins du 25 mai 2014 », op. cit., p. 60-62 .
  • [27]
    « La désignation de notre commissaire européen divise les constitutionnalistes : le gouvernement minoritaire en affaires courantes en a-t-il seul le pouvoir ? », La Libre Belgique (en ligne), 19 août 2019.
  • [28]
    « Commissaire européen : la Belgique atteint des sommets de désinvolture », Le Soir, 23 août 2019.
  • [29]
    « Un nouveau gouvernement fédéral pour novembre ? Avec quelle coalition ? », La Libre Belgique (en ligne), 28 août 2019.
  • [30]
    « Pieter Timmermans (FEB) : “Il faut un gouvernement de redémarrage, parallèlement aux négociations” », La Libre Belgique, 30 août 2019.
  • [31]
    « Robert Vertenueil au Soir : “Le PTB a confisqué les voix de ses électeurs” », Le Soir, 30 août 2019.
  • [32]
    « Cela fait 100 jours que l’on a voté et déjà deux records battus », La Libre Belgique, 3 septembre 2019 ; « Élections 2019 : 100 jours sans gouvernements, pourquoi tout ce temps ? », Le Soir (en ligne), 3 septembre 2019 ; « 100 dagen regeringsvorming: verlengd wegens grote flop », De Morgen (en ligne), 3 septembre 2019.
  • [33]
    « L’enjeu des négociations : résoudre une équation budgétaire insoluble », Le Soir (en ligne), 2 septembre 2019.
  • [34]
    « Les informateurs vont entamer une nouvelle phase de leur mission avec 6 partis, sans les écologistes », La Libre Belgique, 9 septembre 2019.
  • [35]
    « Geen van beiden heeft zin om “de Zweedse coalitie te depanneren” » (« PS en SP.A willen Open VLD federaal dumpen », De Standaard, 11 septembre 2019).
  • [36]
    « Coalition fédérale : il n’y aura pas de réunions à six partis », Le Soir (en ligne), 11 septembre 2019.
  • [37]
    « Négociations au fédéral : le plan pour éviter la N-VA », Le Soir, 12 septembre 2019.
  • [38]
    « Bart De Wever veut accélérer les négociations fédérales », Le Soir (en ligne), 1er octobre 2019.
  • [39]
    « Gouvernement fédéral : “Avec la N-VA, on s’est beaucoup vu. On est nulle part et d’accord sur rien” », Le Soir (en ligne), 3 octobre 2019.
  • [40]
    Le 9 septembre, la future présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a validé la liste des commissaires qui lui avait été soumise par les États membres de l’Union européenne. Le 2 octobre suivant, le Parlement européen a approuvé la désignation de D. Reynders comme commissaire européen à la Justice et à la Protection des consommateurs. Le départ prochain de D. Reynders – dont le nom avait été un temps cité pour succéder à C. Michel à la tête du gouvernement fédéral belge – pour la Commission européenne est dès lors confirmé.
  • [41]
    « Coalition fédérale : pour Reynders, “au PS et à la N-VA de voir s’ils peuvent former un gouvernement” », Le Soir (en ligne), 7 octobre 2019.
  • [42]
    G. Bourgeois a cessé d’être ministre-président flamand le 2 juillet 2019 (date à laquelle il a démissionné pour siéger au Parlement européen, assemblée dans laquelle il a été élu le 26 mai, laissant sa place pour l’intérim à Liesbeth Homans, N-VA). R. Demotte a été ministre-président de la Communauté française jusqu’au 17 septembre 2019 (jour où il a laissé sa place à P.-Y. Jeholet).
  • [43]
    Référence semble faite ici aux élections du Parlement flamand du 26 mai 2019 : pour ce scrutin, l’Open VLD a obtenu 13,1 % et le CD&V 15,4 %.
  • [44]
    « Johan Vande Lanotte au Soir : “Les coalitions homogènes, c’est fini !” », Le Soir, 16 octobre 2019.
  • [45]
    « L’Europe demande à la Belgique de revoir rapidement sa copie pour son budget 2020 », La Libre Belgique (en ligne), 22 octobre 2019.
  • [46]
    Le 22 septembre 2015, celle-ci a intégré le gouvernement Michel I en tant que ministre du Budget, chargée de la Loterie nationale ; depuis le 9 décembre 2018, elle était ministre du Budget et de la Fonction publique, chargée de la Loterie nationale et de la Politique scientifique au sein du gouvernement Michel II.
  • [47]
    « Joachim Coens (CD&V) wil regering van experten: “Of dit, of nieuwe verkiezingen” », Het Laatste Nieuws (en ligne), 4 novembre 2019.
  • [48]
    « Impasse au niveau fédéral : tous les chemins mènent aux élections anticipées », La Libre Belgique (en ligne), 4 novembre 2019.
  • [49]
    « Édito : Paul Magnette informateur, un choix pertinent », La Libre Belgique, 6 novembre 2019.
  • [50]
    « Pleidooi voor paars-groen », De Standaard, 7 novembre 2019.
  • [51]
    « Formation fédérale : “Sur une échelle de 1 à 10, j’évalue mes chances de réussite de 2 à 3”, estime Paul Magnette », Le Soir, 7 novembre 2019.
  • [52]
    « Édito sur la mission de Paul Magnette : “Oui, c’est possible…” », La Libre Belgique, 19 novembre 2019.
  • [53]
    Interview à Matin Première (RTBF) le 21 novembre 2019.
  • [54]
    « La tâche se complique pour Paul Magnette, le projet arc-en-ciel fragilisé », Le Soir (en ligne), 20 novembre 2019.
  • [55]
    « L’hypothèse d’un gouvernement fédéral sans la N-VA se renforce », La Libre Belgique (en ligne), 20 novembre 2019.
  • [56]
    « Négocier un gouvernement arc-en-ciel ? Les libéraux flamands ont la clé », Le Soir, 22 novembre 2019.
  • [57]
    « Maggie De Block : “La N-VA se rapproche de plus en plus du Vlaams Belang... Ils font de la désinformation sur l’asile” », La Libre Belgique (en ligne), 23 novembre 2019.
  • [58]
    Propos tenus sur VTM et repris dans : « Bart Somers (Open VLD): “Blinde ziet dat N-VA naar oppositie wil” », De Morgen, 24 novembre 2019.
  • [59]
    « Négociations au fédéral : pour Bart Somers (Open VLD), la N-VA “ne veut pas se mouiller” », RTBF Info, 24 novembre 2019.
  • [60]
    « De Coorebyter et Uyttendaele : “On finit par trouver la non-gestion parfaitement supportable” », Le Soir, 24 novembre 2019.
  • [61]
    « Crise politique : Bouchez fustige Uyttendaele et de Coorebyter, pas Prévot », Le Soir (en ligne), 24 novembre 2019.
  • [62]
    « Édito sur le blocage au fédéral : “Devinez qui payera la facture ?” », La Libre Belgique (en ligne), 25 novembre 2019.
  • [63]
    « Paul Magnette décoche un programme N-VA-incompatible », Le Soir (en ligne), 27 novembre 2019.
  • [64]
    « Pourquoi l’Open VLD et le CD&V ont peur de se déscotcher de la N-VA », La Libre Belgique (en ligne), 26 novembre 2019.
  • [65]
    « Robert Verteneuil : “À Paul Magnette, je dis : tiens bon, fais gaffe !” », Le Soir, 28 novembre 2019.
  • [66]
    « Pieter Timmermans au Soir : “Il faut un gouvernement vite, la Belgique risque un triple black-out” », Le Soir, 29 novembre 2019. Référence est faite ici à la loi du 26 juillet 1996 relative à la promotion de l’emploi et à la sauvegarde préventive de la compétitivité, revue sous le gouvernement Michel I (loi du 19 mars 2017 : Moniteur belge, 29 mars 2017) dans un sens vivement dénoncé par les syndicats, qui considèrent qu’elle bride la libre négociation des salaires en faveur des positions patronales. Durant la campagne électorale, le PS a soutenu la demande syndicale de revoir la loi de 2017 ayant modifié la loi de 1996. Par ailleurs, la FGTB mène campagne pour une révision à la hausse du salaire minimum afin qu’il passe d’un peu moins de 10 euros par heure actuellement à 14 euros par heure.
  • [67]
    D. Reynders interrompt ainsi l’une des carrières ministérielles les plus longues de l’histoire récente du pays puisqu’il était ministre fédéral sans discontinuer depuis le 12 juillet 1999 et qu’il a participé à dix gouvernements successifs.
  • [68]
    68 VRT Journaal, 1er décembre 2019.
  • [69]
    « L’heure d’un duo Magnette - De Wever a-t-elle sonné ? », La Libre Belgique (en ligne), 1er décembre 2019.
  • [70]
    « Les cinq défis du nouveau président de Défi, François De Smet », Le Soir (en ligne), 1er décembre 2019.
  • [71]
    « François De Smet, nouveau président de Défi au Soir : “PS et N-VA ensemble, ça ne marche pas !” », Le Soir (en ligne), 1er décembre 2019.
  • [72]
    « Weinig extra blauwe stippen in nieuwe nota-Magnette », De Tijd (en ligne), 3 décembre 2019.
  • [73]
    « Bart De Wever : “Paul Magnette a le goût de sa bouillie arc-en-ciel, il faudra beaucoup de dentifrice flamand” », RTBF Info, 9 décembre 2019.
  • [74]
    « Bouchez - Coens : deux novices pour sortir de la crise politique », Le Soir (en ligne), 10 décembre 2019.
  • [75]
    « Mission Bouchez - Coens : les convoyeurs attendent », RTBF Info, 11 décembre 2019.
  • [76]
    « Co-informateurs moeten vooral zichzelf overtuigen », De Standaard, 11 décembre 2019.
  • [77]
    « Grand baromètre : le Vlaams Belang s’envole en Flandre avec 27,3 % des intentions de vote », Le Soir (en ligne), 13 décembre 2019.
  • [78]
    « Hendrik Bogaert (CD&V) : “Si j’étais francophone, je voudrais que la N-VA soit dans le gouvernement” », Le Soir (en ligne), 18 décembre 2019.
  • [79]
    « David Clarinval rectifie : “Le PS et la N-VA restent la première priorité de travail” », RTBF Info, 14 décembre 2019.
  • [80]
    « Jean-Luc Crucke : “J’en ai assez qu’on nous traite comme si on était des Untermensch, parce que nous sommes Wallons” », RTBF Info, 16 décembre 2020.
  • [81]
    « Coalition fédérale : la note Demotte [sic] qui actait un désaccord profond entre PS et N-VA », Le Soir (en ligne), 17 décembre 2019.
  • [82]
    « La mission de Bouchez et Coens prolongée : les informateurs écartent l’idée d’une coalition arc-en-ciel », La Libre Belgique, 20 décembre 2019.
  • [83]
    « Au fédéral, la méfiance s’installe entre les négociateurs : “Ça devient vraiment n’importe quoi” », La Libre Belgique, 20 décembre 2019.
  • [84]
    Référence est ici faite au 16 rue de la Loi à Bruxelles, siège du cabinet et des services administratifs du Premier ministre.
  • [85]
    « Pour Koen Geens (CD&V), la N-VA ne peut pas être exclue : “Le Nord payera la facture électorale, pas le Sud” », La Libre Belgique, 24 décembre 2019.
  • [86]
    L’Écho, 28 décembre 2019. Cf. V. de Coorebyter (interviewé par M. Colleyn), « “En Belgique, on a sous-estimé l’importance de l’utopie en politique” », Les @nalyses du CRISP en ligne, 28 décembre 2019, http://www.crisp.be/.
  • [87]
    « La Belgique rêvée d’Hendrik Vuye : “Sans réformes institutionnelles profondes, nous subirons un appauvrissement collectif” », La Libre Belgique, 30 décembre 2019.
  • [88]
    « Le grand débat des présidents de partis : la Belgique va-t-elle disparaître ? », Le Soir, 30 décembre 2019.
  • [89]
    « Négociations fédérales : mais que veut vraiment la N-VA ? », Le Soir, 5 janvier 2020.
  • [90]
    VOKA, « Nu werken aan volwaardige federale regering voor groei en jobs », Communiqué, 6 janvier 2020, www.voka.be.
  • [91]
    « La coalition fédérale connue cette semaine ? », La Libre Belgique (en ligne), 7 janvier 2020.
  • [92]
    « “Inadmissible”, “Indigente”, “Pas très emballante” : la note des informateurs recalée par certains partis, peut-être pas par la N-VA », La Libre Belgique (en ligne), 8 janvier 2020.
  • [93]
    « Pension universelle, réforme de l’État, migration... : la note des informateurs recalée à gauche », Le Soir, 8 janvier 2019.
  • [94]
    « Négociations fédérales : la situation est grave mais pas désespérée », Le Soir (en ligne), 9 janvier 2020.
  • [95]
    « Le vice-Premier ministre CD&V Koen Geens tient toujours à une coalition avec la N-VA », RTBF Info, 10 janvier 2020.
  • [96]
    « Vœux de la N-VA : Bart De Wever fait un appel du pied au PS et tape sur l’Open VLD », RTBF Info, 11 janvier 2020.
  • [97]
    « Coulisses politiques : vendredi dernier, Bart De Wever annonce aux informateurs un deal N-VA/ CD&V/SP.A… », La Libre Belgique (en ligne), 14 janvier 2020.
  • [98]
    « Un gouvernement sans le PS au fédéral ? Le scénario circule », La Libre Belgique (en ligne), 15 janvier 2020.
  • [99]
    « Bruno Tobback (SP.A) critique le travail des “informachins” », RTBF Info, 16 janvier 2020.
  • [100]
    Le « Blue Monday » est depuis quelques années le nom donné au troisième lundi de janvier, supposé être le jour le plus déprimant de l’année.
  • [101]
    « François De Smet (Défi) sur la crise fédérale : “Négocions la coalition 77” », Le Soir, 25 janvier 2020.
  • [102]
    « Et si une solution était la coalition à 77… sans le PS et Écolo ? », La Libre Belgique (en ligne), 30 janvier 2020.
  • [103]
    « Paul Magnette : “La N-VA ne fait aucune ouverture, ça a assez duré” », La Libre Belgique (en ligne), 27 janvier 2020.
  • [104]
    « Comment le Palais a recalé Bart De Wever pour confier une mission à Koen Geens », La Libre Belgique, 3 février 2020.
  • [105]
    « Quand le CD&V dévoile la Couronne », RTBF Info, 4 février 2020.
  • [106]
    « Een kort rondje en geen sprake van Vivaldi » (« Geens al gekortwiekt door eigen CD&V », De Standaard, 4 février 2020).
  • [107]
    « Le récit de 16 mois de négociations (3/6). Sur fond de pandémie, PS et N-VA amorcent leur réconciliation », La Libre Belgique, 30 octobre 2020.
  • [108]
    « Spontaan een regering vormen is niet gelukt. De afspiegelingsregering is dan de enige logische oplossing voor een coalitie die aan de twee kanten van de taalgrens gedragen is » (« CD&V-voorzitter Coens pleit voor afspiegelingsregering », De Morgen (en ligne), 5 février 2020).
  • [109]
    Sur cet épisode, cf. C. Istasse, « La “coalition miroir” comme modalité de formation du gouvernement fédéral », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2466, 2020, p. 7-11.
  • [110]
    « La BNB juge urgent de réduire le déficit, même en affaires courantes », Le Soir (en ligne), 14 février 2020.
  • [111]
    « Niemand wil verkiezingen, maar... », De Standaard (en ligne), 13 février 2020.
  • [112]
    « Négociations fédérales : les partis entrent discrètement en campagne », Le Soir, 12 février 2020.
  • [113]
    « Négociations fédérales : “Croire que le CD&V va finir par plier, c’est irréel”, réaffirme Pieter De Crem », Le Soir (en ligne), 12 février 2020.
  • [114]
    « Fédéral : un bourgmestre CD&V propose la coalition “Arizona” », RTBF Info, 9 février 2020.
  • [115]
    « Paul Magnette excédé : “Négocier avec des nationalistes, cela devient un vrai supplice” », RTBF Info, 14 février 2020.
  • [116]
    « Ik had toch graag een iets elegantere sortie gekregen dan de ezelsstamp van vrijdagmorgen. Dat verdient niemand » (« Na de “ezelsstamp” van Paul Magnette (PS): wat nu? “We zijn een stukje dichter bij nieuwe verkiezingen gekomen” », VRT NWS, 17 février 2020).
  • [117]
    Sur cette période, cf. F. Bouhon, A. Jousten, X. Miny, E. Slautsky, « L’État belge face à la pandémie de Covid-19 : esquisse d’un régime d’exception », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2446, 2020 ; J. Faniel, C. Sägesser, « La Belgique entre crise politique et crise sanitaire (mars-mai 2020) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2446, 2020. Ces pouvoirs spéciaux ne seront finalement pas prolongés en juin 2020 (cf. infra).
  • [118]
    « Édito : on se réveille ? », La Libre Belgique, 2 mars 2020.
  • [119]
    Institué au sein du gouvernement fédéral, le CNS est présidé par le Premier ministre. Il comprend ce dernier, les ministres en charge de la Justice, de la Défense, de l’Intérieur et des Affaires étrangères, ainsi que les vice-Premiers ministres titulaires d’un autre portefeuille. Les autres membres du gouvernement fédéral peuvent y être conviés si les dossiers traités les concernent. Cf. « Conseil national de sécurité (CNS) », Vocabulaire politique, CRISP, www.vocabulairepolitique.be.
  • [120]
    Arrêté ministériel du 13 mars 2020 portant le déclenchement de la phase fédérale concernant la coordination et la gestion de la crise coronavirus Covid-19 (Moniteur belge, 13 mars 2020). Sur les mesures juridiques prises pour gérer la crise, cf. F. Bouhon, A. Jousten, X. Miny, E. Slautsky, « L’État belge face à la pandémie de Covid-19 : esquisse d’un régime d’exception », op. cit.
  • [121]
    « PS et N-VA discutent d’un gouvernement d’urgence », L’Écho (en ligne), 13 mars 2020.
  • [122]
    « Le CDH et Défi plaident ensemble pour un gouvernement de plein exercice : “Il ne faut pas un gouvernement d’urgence, il faut d’urgence un gouvernement” », La Libre Belgique (en ligne), 12 mars 2020.
  • [123]
    Pour rappel, en 2014, alors que son parti était le plus important du gouvernement fédéral en formation suite au scrutin du 25 mai, B. De Wever n’avait pas souhaité endosser cette fonction, ouvrant ainsi la voie à l’accession de C. Michel au poste de Premier ministre.
  • [124]
    « Le récit de 16 mois de négociations (3/6). Sur fond de pandémie, PS et N-VA amorcent leur réconciliation », La Libre Belgique, 30 octobre 2020.
  • [125]
    « Coronavirus : Paul Magnette dit non au gouvernement d’urgence avec la N-VA », Le Soir (en ligne), 15 mars 2020.
  • [126]
    « SP.A-voorzitter Conner Rousseau na de vuurdoop van dit weekend: “Hij heeft me voor schut gezet” », Het Laatste Nieuws (en ligne), 19 mars 2020.
  • [127]
    Seul le titre du ministre en charge de la Mobilité, François Bellot (MR), est adapté à l’occasion du nouvel arrêté royal de nomination, la dénomination Belgocontrol cédant le pas au nom Skeyes.
  • [128]
    Arrêté royal du 17 mars 2020, Moniteur belge, 18 mars 2020.
  • [129]
    Chambre des représentants, Compte rendu analytique, n° 29, 17 mars 2020, p. 4.
  • [130]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 30, 19 mars 2020, p. 12.
  • [131]
    Rappelons que la technique des pouvoirs spéciaux consiste à confier au gouvernement des prérogatives qui sont en principe de la compétence du parlement (cf. « Pouvoirs spéciaux », Vocabulaire politique, CRISP, www.vocabulairepolitique.be).
  • [132]
    Loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (I), Moniteur belge, 30 mars 2020 ; Loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (II), Moniteur belge, 30 mars 2020.
  • [133]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 33, 26 mars 2020, p. 70.
  • [134]
    « Accord en kern+10 sur des mesures de soutien au pouvoir d’achat des Belges et aux secteurs les plus en difficultés », Communiqué de presse, 6 juin 2020, www.premier.be.
  • [135]
    Arrêté royal du 19 avril 2020 n° 9 portant exécution de l’article 5, § 1, 2°, de la loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (II), en vue de permettre temporairement l’exercice de l’art infirmier par des professionnels de soins de santé non qualifiés, Moniteur belge, 4 mai 2020 ; Arrêté royal du 29 avril 2020 n° 16 portant exécution de l’article 5, § 1, 2°, de la loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (II), aux fins de réquisition des professionnels de soins de santé, Moniteur belge, 4 mai 2020.
  • [136]
    « Coronavirus en Belgique : De Block et les arrêtés qui passent mal auprès du personnel soignant », RTBF Info, 6 mai 2020.
  • [137]
    « Le MR demande également le retrait des arrêtés contestés par le personnel soignant », Le Soir (en ligne), 20 mai 2020.
  • [138]
    « Le “kern élargi” se prononcera sur les arrêtés royaux qui fâchent le personnel soignant », RTBF Info, 19 mai 2020.
  • [139]
    Et cela bien qu’elle dirige, elle aussi, l’organe exécutif d’une entité fédérée dotée de compétences en matière de santé.
  • [140]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 38, 30 avril 2020, p. 13.
  • [141]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 29, 17 mars 2020, p. 4.
  • [142]
    Lois du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19, Moniteur belge, 30 mars 2020.
  • [143]
    « N-VA ziet “erg weinig redenen” om volmachten van regering-Wilmès in juni te verlengen », VRT NWS, 17 avril 2020.
  • [144]
    « Pour Bart De Wever, “les discussions pour un nouveau gouvernement fédéral peuvent débuter en juin” », Le Soir (en ligne), 20 avril 2020.
  • [145]
    « On a déconfiné la N-VA », RTBF Info, 4 mai 2020.
  • [146]
    « Le PS veut d’urgence un plan de relance de 30 à 50 milliards », L’Écho (en ligne), 19 mai 2020.
  • [147]
    « “Presque un petit coup d’État” : Georges-Louis Bouchez accuse les socialistes de contourner le Roi pour la formation fédérale », La Libre Belgique (en ligne), 20 mai 2020.
  • [148]
    « Gouvernement fédéral : le Roi n’a pas à prendre d’initiative pour former une coalition », Le Soir (en ligne), 22 mai 2020.
  • [149]
    « Au fédéral, on prend les mêmes et on recommence », L’Écho (en ligne), 19 mai 2020.
  • [150]
    « L’Open VLD vire à droite toute avec Egbert Lachaert », Le Soir (en ligne), 22 mai 2020.
  • [151]
    « Gouvernement fédéral : tous les présidents sont là, les négociations peuvent commencer », Le Soir (en ligne), 22 mai 2020.
  • [152]
    « Le duo Magnette - Rousseau veut hisser PS et SP.A dans une tripartite classique minoritaire », Le Soir, 16 juin 2020.
  • [153]
    « Note transmise à Sophie Wilmès : voici la proposition des socialistes pour former un gouvernement », RTBF Info, 16 juin 2020.
  • [154]
    « Sophie Wilmès à la proposition du duo Magnette - Rousseau : merci mais... NON », RTL Info, 17 juin 2020.
  • [155]
    « Drie partijvoorzitters op zoek naar “een meerderheid”: wat zijn de slaagkansen van deze nieuwste formatiepoging? », VRT NWS, 1er juin 2020.
  • [156]
    Ou 77 sièges, si l’on compte sur l’appui de J.-M. Dedecker.
  • [157]
    Pour rappel, sous la législature précédente, le gouvernement Michel I en comptait 20 sur 63 (tous MR).
  • [158]
    « PS-kopstuk Rudy Demotte gelooft niet in de federale formatie: “Ik zie geen oplossing, tenzij verkiezingen” », VRT NWS, 28 juin 2020.
  • [159]
    « Lachaert (Open VLD), Coens (CD&V) en Bouchez (MR) willen deze week inhoudelijke nota klaar hebben », VRT NWS, 29 juin 2020.
  • [160]
    « Bart De Wever (N-VA): “Als partijen die abortuswet willen versoepelen regering kunnen vormen, moeten ze dat maar doen” », VRT NWS, 11 juillet 2020.
  • [161]
    « Négociations fédérales : l’heure de Paul Magnette et Bart De Wever a sonné », Le Soir (en ligne), 19 juillet 2020.
  • [162]
    « “Il reste 50 jours pour former un gouvernement, sinon il faudra convoquer des élections”, insiste Paul Magnette après avoir été chargé de la mission royale », La Libre Belgique (en ligne), 20 juillet 2020.
  • [163]
    Selon que l’on inclut ou non dans le décompte les députés E. Kir (indépendant exclu du PS) et J.-M. Dedecker (indépendant élu sur une liste N-VA).
  • [164]
    « Magnette et De Wever “déconfinent” les négociations fédérales et rencontrent les autres partis », La Libre Belgique (en ligne), 28 juillet 2020.
  • [165]
    « Bart De Wever : “Plus personne ne veut encore du MR dans le gouvernement” », L’Écho (en ligne), 31 juillet 2020.
  • [166]
    « Jean Faniel, directeur du CRISP : “En voulant mettre le MR hors-jeu, les intérêts nationalistes priment sur ceux du parti” », La Libre Belgique (en ligne), 3 août 2020.
  • [167]
    À ce sujet, cf. B. Biard, « Les partis frères en Belgique : les relations entre le CDH et le CD&V », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2467-2468, 2020, p. 26-27 et 30-32.
  • [168]
    « Négociations fédérales : et si les écologistes revenaient dans le coup à la place des libéraux ? », La Libre Belgique (en ligne), 1er août 2020.
  • [169]
    « Les verts rejettent la note des préformateurs De Wever et Magnette dans sa forme actuelle », La Libre Belgique (en ligne), 4 août 2020.
  • [170]
    Matin Première (RTBF), 5 août 2020.
  • [171]
    « Fédéral : retour sur la mission des informateurs royaux », 13 août 2020, www.ecolo.be ; « Communiqué de presse à propos de la formation d’un gouvernement fédéral », 13 août 2020, www.mr.be.
  • [172]
    « Magnette - De Wever : la fin du début ou le début de la fin ? », RTBF Info, 13 août 2020.
  • [173]
    « De impasse is totaal. Zowel de liberalen als de groenen willen het bestand tussen PS en N-VA enkel ondersteunen als hun institutionele plannen grotendeels van tafel geveegd worden. Maar zonder dat institutionele luik is er geen bestand meer tussen PS en N-VA. (…) De ironie van het verhaal zit ‘m hierin: na de verkiezingen hebben de meeste partijen er maandenlang op gehamerd dat PS en N-VA samen rond de tafel moesten gaan zitten. (…) En nu een as tussen de twee gezworen vijanden voor het eerst een kans op slagen lijkt te hebben, vinden ze niet voldoende partners om hun coalitie leven in te blazen » (« Standpunt. De impasse is totaal », De Morgen, 14 août 2020).
  • [174]
    « C’est la fin pour le duo Magnette - De Wever : les préformateurs jettent l’éponge », La Libre Belgique (en ligne), 14 août 2020.
  • [175]
    « Preformateurs gooien handdoek in de ring », De Standaard (en ligne), 14 août 2020.
  • [176]
    Terzake (VRT), 17 août 2020.
  • [177]
    « Le Roi à la recherche d’un démineur : le retour d’Herman Van Rompuy ? », La Libre Belgique (en ligne), 18 août 2020.
  • [178]
    « Négociations fédérales : pourquoi le Roi a choisi Egbert Lachaert pour déminer la situation », La Libre Belgique (en ligne), 18 août 2020.
  • [179]
    « L’été politique, faire et défaire », RTBF Info, 24 août 2020.
  • [180]
    « Des libéraux unis pour (aussi) sauver leur tête dans les Régions », La Libre Belgique (en ligne), 24 août 2020.
  • [181]
    « Négociations fédérales : vers une coalition “arc-en-ciel” ? La prudence est de mise », La Libre Belgique (en ligne), 21 août 2020.
  • [182]
    « L’affaire Chovanec fait s’entrechoquer CD&V et N-VA », titre Le Soir le 27 août 2020.
  • [183]
    « Vlaanderen stemde nog nooit zo Vlaams en rechts, de komende federale regering wordt mogelijk nog nooit zo Franstalig en links. Het verdriet van Vlaanderen » (B. De Wever, Twitter, 27 août 2020, 19h12). La dernière phrase fait clairement référence au célèbre ouvrage d’Hugo Claus, Le chagrin des Belges (Het verdriet van België dans sa version originale).
  • [184]
    « “Me opwinden? Ik heb mijn energie nodig voor nuttige dingen” », De Standaard, 31 août 2020.
  • [185]
    « Est-ce trop demander au CD&V que de se décider ? », Le Soir (en ligne), 1er septembre 2020.
  • [186]
    « Négociations : le CD&V fait monter les enchères », Le Soir (en ligne), 2 septembre 2020.
  • [187]
    « Le CD&V pencherait pour une coalition “Avanti” avec le CDH : “On ne demande rien, mais notre porte reste ouverte” », La Libre Belgique (en ligne), 3 septembre 2020.
  • [188]
    « Le CDH ne montera pas dans une Vivaldi : “Aucun des partis francophones ne garantit notre présence” », BX1, 4 septembre 2020, www.bx1.be.
  • [189]
    Cf. B. Biard, « Les partis frères en Belgique : les relations entre le CDH et le CD&V », op. cit.
  • [190]
    Le 17 juillet 2008, le roi Albert II avait certes nommé médiateurs les francophones François-Xavier de Donnea et Raymond Langendries, mais ils étaient accompagnés du germanophone Karl-Heinz Lambertz.
  • [191]
    « Ils n’ont plus le droit à l’échec », La Libre Belgique, 5 septembre 2020.
  • [192]
    « Vivaldi uit de startblokken. De kansen, de valkuilen, de portefeuilles », De Standaaard, 5-6 septembre 2020.
  • [193]
    « Bart De Wever sur la coalition Vivaldi : “La Flandre verse des milliards en transferts et le plus grand parti du pays est écarté” », RTBF Info, 6 septembre 2020.
  • [194]
    « Vers un match Magnette - De Croo pour le poste de Premier ministre », La Libre Belgique, 5 septembre 2020.
  • [195]
    « Pour Bouchez, Sophie Wilmès doit rester Première ministre », Le Vif/L’Express (en ligne), 6 septembre 2020.
  • [196]
    « La Flandre prend une option sur le Seize », Le Soir (en ligne), 6 septembre 2020.
  • [197]
    « Le retour en grâce du 16 rue de la Loi », RTBF Info, 7 septembre 2020.
  • [198]
    « Négociations fédérales : mécontent, Joachim Coens (CD&V) demande un entretien avec les préformateurs », Le Soir (en ligne), 7 septembre 2020.
  • [199]
    « Joachim Coens s’apprête-t-il à “retirer la prise” des discussions ? “J’ai pris contact avec les préformateurs” », La Libre Belgique (en ligne), 7 septembre 2020.
  • [200]
    « Déjà des fausses notes au sein de la Vivaldi », La Libre Belgique, 8 septembre 2020 ; « Négociations fédérales : de nouvelles étincelles autour de la Vivaldi », Le Soir (en ligne), 8 septembre 2020.
  • [201]
    « Zonder C heeft de CD&V geen bestaansreden. De christelijke traditie vormt voor mij de basis om aan politiek te doen en daar hangen duidelijke principes en visies aan vast, zoals het verdedigen van alle leven, vooral het kwetsbare leven » (« “Waardegedreven politiek komt terug” », Tertio, n° 1074, 9 septembre 2020).
  • [202]
    « Le CD&V entre le marteau et l’enclume », La Libre Belgique, 9 septembre 2020.
  • [203]
    « Budget : le retour de la rigueur en 2022, l’équilibre en 2030 », La Libre Belgique, 11 septembre 2020.
  • [204]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 55, 17 septembre 2020, p. 58.
  • [205]
    « Pieter De Crem hypothekeert heropstart Vivaldi-overhandelingen », De Standaard, 7 septembre 2020.
  • [206]
    « Après une réunion de groupe, le CD&V décide de poursuivre les négociations », La Libre Belgique (en ligne), 17 septembre 2020.
  • [207]
    « “Een jaar geleden was ik niemand en Bart De Wever de grote strateeg. En kijk nu”. Rechtdoorzee met MR-voorzitter Georges-Louis Bouchez », Humo, 22 septembre 2020.
  • [208]
    « “Ah, voilà Georges-Louis XVI” : les coulisses des négociations fédérales », Le Vif/L’Express (en ligne), 23 septembre 2020.
  • [209]
    « Le récit de 16 mois de négociations (6/6). De Croo sorti Premier des épreuves du Palais Egmont », La Libre Belgique, 3 novembre 2020.
  • [210]
    « SP.A wil niet meer onderhandelen met MR », De Tijd (en ligne), 21 septembre 2020.
  • [211]
    « Heel wat mensen hebben een degout van de politiek, en ik kan ze na dit weekend geen ongelijk geven. Vanochtend leek het onmogelijk om het vertrouwen te herstellen. Maar als de koning dat vraagt, probeer ik het onmogelijke mogelijk te maken » (« Vivaldi heeft twee dagen om het “onmogelijke mogelijk te maken” », De Standaard (en ligne), 22 septembre 2020).
  • [212]
    « N-VA, CD&V, PS, SP.A, Open VLD, de groenen: allemaal hebben ze al hun nek uitgestoken. Alleen Bouchez staat op de Titanic een selfie te nemen », Het Nieuwsblad (en ligne), 21 septembre 2020.
  • [213]
    « Édito. La honte », La Libre Belgique, 22 septembre 2020 ; « Édito. Insupportable », Le Soir, 22 septembre 2020 ; « Édito. Se rendent-ils compte ? », L’Écho, 22 septembre 2020.
  • [214]
    « Commentaar. Beschamende wending in eindeloze politieke soap », De Standaard, 22 septembre 2020.
  • [215]
    « Négociations fédérales : Magnette et De Croo nommés co-formateurs… contre l’avis de Bouchez », Le Soir (en ligne), 23 septembre 2020.
  • [216]
    Selon les mots du médecin Philippe Devos (« Philippe Devos au Soir : “Aux soins intensifs, le risque de décès a diminué d’un tiers” », Le Soir (en ligne), 29 septembre 2020).
  • [217]
    « La Vivaldi advient, bonjour les querelles », Le Soir, 24 septembre 2020 ; « Le casting d’un gouvernement fragile » et « Attention, gouvernement instable en gestation », La Libre Belgique, 25 septembre 2020 ; « Dit zou weleens een kibbelcabinet bis kunnen worden », De Morgen, 26 septembre 2020.
  • [218]
    « De Croo versus Magnette. Leurs amis, leurs amours, leurs emmerdes », La Libre Belgique, 26 septembre 2020 ; « Duel de quadras au sommet de l’État », La Libre Belgique, 26 septembre 2020.
  • [219]
    « Vlaams Belang maakt zwart-gele vuist tegen veelkleurig Vivaldi », De Standaard, 28 septembre 2020.
  • [220]
    « Formation d’un gouvernement fédéral : le délai du 1er octobre est-il tenable ? Qu’est-ce qui coince encore ? », RTBF Info, 29 septembre 2020 ; « Que fera Sophie Wilmès s’il n’y a pas de nouveau gouvernement le 1er octobre ? », La Libre Belgique (en ligne), 29 septembre 2020.
  • [221]
    « Les militants des sept partis ont donné leur accord pour la Vivaldi », La Libre Belgique (en ligne), 30 septembre 2020.
  • [222]
    Le texte définitif de l’accord devrait être disponible sur le site Internet www.belgium.be.
  • [223]
    Point V, 19, 269 de l’accord.
  • [224]
    « Les partis flamands raflent les plus importants portefeuilles ministériels », La Libre Belgique, 1er octobre 2020.
  • [225]
    « Le retour du retour du cœur », RTBF Info, 1er octobre 2020.
  • [226]
    « Nathalie Muylle (CD&V) vernam via journalist dat ze geen minister werd: “Moeilijkste 10 minuten van politieke loopbaan” », VRT NWS, 6 octobre 2020.
  • [227]
    Décret spécial wallon du 2 mai 2019 modifiant les articles 60 et 64 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles en vue de garantir une présence équilibrée de femmes et d’hommes au sein du gouvernement wallon, Moniteur belge, 22 mai 2019.
  • [228]
    On trouvera le texte de cette déclaration sur le site du CRISP : www.crisp.be/documents-politiques/gouvernements/gouvernements-nationaux-federaux.
  • [229]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 57, 1er octobre 2020, p. 1-3.
  • [230]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 61, 3 octobre 2020, p. 9-11.
  • [231]
    Si l’on prend pour point de départ de la crise en 2010-2011 la chute du gouvernement Leterme II provoquée par Alexander De Croo le 22 avril 2010, la durée totale de cette crise est alors de 592 jours, soit toujours moins que la crise de 2019-2020.
  • [232]
    Le député Jean-Marie Dedecker a été élu sur une liste N-VA mais siège toutefois comme indépendant.
  • [233]
    Le gouvernement a été composé des partis sociaux-chrétiens et socialistes d’octobre 1980 à septembre 1981, de mai 1988 à septembre 1991 (avec la VU), et de septembre 1991 à juin 1999. Il a été composé des partis sociaux-chrétiens et libéraux de décembre 1981 à décembre 1987.
  • [234]
    De juillet 1999 à juillet 2003, le gouvernement incluait les partis libéraux, socialistes et écologistes ; de juillet 2003 à décembre 2007, les partis libéraux et socialistes ; de décembre 2007 à décembre 2011, les partis libéraux, les partis de tradition sociale-chrétienne et le parti socialiste francophone ; de décembre 2011 à octobre 2014, les partis socialistes, libéraux et de tradition sociale-chrétienne ; d’octobre 2014 à décembre 2018, les partis libéraux, la N-VA et le CD&V ; de décembre 2018 à octobre 2020, les partis libéraux et le CD&V ; depuis octobre 2020, les partis socialistes, libéraux, écologistes et le CD&V.
  1. Introduction
  2. 1. Le scrutin fédéral du 26 mai 2019
    1. 1.1. Les résultats du scrutin
    2. 1.2. Les principales coalitions envisagées au lendemain du scrutin
    3. 1.3. Les premières réactions
  3. 2. La première phase des négociations fédérales (mai 2019 - mars 2020)
    1. 2.1. La mission d’information de Didier Reynders et Johan Vande Lanotte (30 mai 2019 - 7 octobre 2019)
    2. 2. 2. La mission de préformation de Rudy Demotte et Geert Bourgeois (8 octobre 2019 - 4 novembre 2019)
    3. 2.3. La mission d’information de Paul Magnette (5 novembre 2019 - 9 décembre 2019)
    4. 2.4. La mission d’information de Georges-Louis Bouchez et Joachim Coens (10 décembre 2019 - 31 janvier 2020)
    5. 2.5. La mission de Koen Geens (31 janvier 2020 - 14 février 2020)
    6. 2.6 La mission de Sabine Laruelle et Patrick Dewael (19 février 2020 - 15 mars 2020)
  4. 3. La mise en pause des négociations (mi-mars - mi-mai 2020)
    1. 3.1. La mise en place du gouvernement Wilmès II
    2. 3.2. Les premières semaines du gouvernement Wilmès II
    3. 3.3. Vers la fin des pouvoirs spéciaux et la reprise des négociations
  5. 4. La seconde phase des négociations fédérales (mai 2020 - octobre 2020)
    1. 4.1. L’initiative de Paul Magnette et Conner Rousseau (19 mai 2020 - 16 juin 2020)
    2. 4.2. L’initiative de Georges-Louis Bouchez, Joachim Coens et Egbert Lachaert (17 juin 2020 - 20 juillet 2020)
    3. 4.3. La mission de préformation de Paul Magnette et Bart De Wever (20 juillet 2020 - 17 août 2020)
    4. 4.4. La mission d’information d’Egbert Lachaert (18 août 2020 - 4 septembre 2020)
    5. 4.5. La mission de préformation d’Egbert Lachaert et Conner Rousseau (4 septembre 2020 - 23 septembre 2020)
    6. 4.6. La mission de formation de Paul Magnette et Alexander De Croo (23 septembre 2020 - 30 septembre 2020)
    7. 4.7. L’accord de gouvernement Vivaldi
    8. 4.8. L’entrée en fonction du gouvernement De Croo
  6. Conclusion

La formation du gouvernement fédéral De Croo (PS/MR/Écolo/CD&V/Open VLD/SP.A/Groen) a mis fin à la plus longue crise politique de l’histoire de la Belgique. Certes, il ne s’est écoulé « que » 494 jours entre les élections fédérales du 26 mai 2019 et la prestation de serment du 1er octobre 2020 – soit un délai moins long que celui de 540 jours qui avait séparé les élections du 13 juin 2010 et la mise en place du gouvernement Di Rupo le 5 décembre 2011. Cependant, le point de départ a bien été la chute du gouvernement Michel I, le 9 décembre 2018. Dès ce moment en effet, la Belgique n’a plus été dirigée par un gouvernement majoritaire et de plein exercice. Il en a été ainsi pendant pas moins de 662 jours.

Surtout, la crise politique de 2019-2020 est apparue profonde et structurelle : contrairement à celle de 2010-2011, elle n’a pas porté sur un désaccord à propos d’une réforme de l’État. La situation de blocage a résulté d’une combinaison de facteurs, dont l’émiettement de la représentation à la Chambre, la montée en puissance de l’extrême droite en Flandre et de la gauche radicale dans toutes les régions, et la détermination de l’Open VLD et plus encore du CD&V de voir la N-VA, en tant que premier parti flamand, être membre du futur exécutif fédéral.

À ces éléments est venue s’ajouter la crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19. La survenance de cet élément a tout d’abord mis le processus sur pause et a poussé les partis en négociation à s’interrompre pour mettre en place un gouvernement de plein exercice quoique minoritaire, pour une durée et un champ d’action limités : le gouvernement Wilmès II (MR/CD&V/Open VLD). Ensuite, la crise sanitaire a accru les volontés de constituer une coalition majoritaire à la Chambre.

Mis en ligne sur Cairn.info le 23/11/2020
https://doi.org/10.3917/cris.2471.0005
ISBN 9782870752487
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