CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1 Le 11 mars 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) requalifie en pandémie l’épidémie de Covid-19 apparue quelques mois plus tôt en Chine. Au même moment, la Belgique est plongée dans une crise politique qui semble d’une gravité sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : depuis plus d’un an, le pays est dirigé par des gouvernements fédéraux en affaires courantes et minoritaires et, depuis près de dix mois, le monde politique cherche en vain à mettre en place un gouvernement fédéral de plein exercice et disposant d’une majorité au sein de la Chambre des représentants issue des élections du 26 mai 2019.

2 Le 9 décembre 2018, refusant que la Belgique approuve le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières (dit Pacte de Marrakech) alors en préparation au sein de l’Organisation des Nations unies (ONU), les cinq membres N-VA du gouvernement fédéral Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD, entré en fonction le 11 octobre 2014) ont annoncé leur démission, qui a été acceptée par le roi Philippe le même jour. Dans la foulée, a été constitué le gouvernement fédéral Michel II (MR/CD&V/Open VLD), qui est un exécutif minoritaire puisque la nouvelle coalition au pouvoir ne rassemble que 52 des 150 membres de la Chambre.

3 En dépit des demandes émanant de l’opposition, le gouvernement Michel II n’a pas présenté de déclaration gouvernementale au Parlement et n’a pas réclamé de vote de confiance. Le Premier ministre, Charles Michel (MR), a en outre indiqué à la Chambre, le 18 décembre, que la convocation d’élections fédérales anticipées ne lui semblait pas opportune en raison de l’approche du scrutin européen, régional et communautaire appelé à se tenir le 26 mai 2019 et que la mise sur pied d’une nouvelle majorité lui paraissait peu vraisemblable. Ayant échoué à convaincre l’opposition de travailler selon les modalités d’« une coopération entre le gouvernement, qui ne dispose pas de la majorité (…), et le Parlement », C. Michel s’est rendu le même 18 décembre auprès du roi pour lui présenter la démission de son gouvernement. Trois jours plus tard, le roi Philippe a accepté la démission du gouvernement Michel II et l’a chargé d’expédier les affaires courantes jusqu’au scrutin fédéral du 26 mai 2019.

4 Le lendemain de ces élections, le Premier ministre a renouvelé son offre de démission au roi, qui a chargé le gouvernement « de la poursuite de la gestion des affaires courantes ». Le gouvernement fédéral Michel II est sorti du scrutin en étant plus minorisé encore : les partis qui le composent ne totalisent plus que 38 sièges à la Chambre.

5 Le 26 octobre 2019, entérinant une proposition du MR, un comité ministériel restreint (kern) a décidé de promouvoir Sophie Wilmès (MR) à la tête de l’exécutif fédéral. En effet, C. Michel avait indiqué la veille en Conseil des ministres qu’il souhaitait quitter ses fonctions de Premier ministre avant la fin du mois, étant appelé (conformément à la décision prise lors de la réunion extraordinaire du Conseil européen du 2 juillet précédent) à devenir président du Conseil européen à partir du 1er décembre. Le gouvernement fédéral Wilmès I (MR/CD&V/Open VLD), minoritaire et en affaires courantes, est entré en fonction le lendemain, 27 octobre.

6 Sur le plan politique, l’année 2020 a commencé en Belgique comme la précédente s’était terminée, soit sur la tentative de constituer un gouvernement fédéral de plein exercice et majoritaire. Pour la seconde année consécutive, le pays fonctionne sous le régime des douzièmes provisoires et l’on redoute la sanction de la Commission européenne face au large dérapage budgétaire annoncé, malgré les mesures d’austérité adoptées par le gouvernement Michel I, notamment dans le domaine de la santé. Si la durée de la période des affaires courantes n’atteint alors pas encore le record enregistré en 2010-2011  [1], la crise politique semble plus profonde et insurmontable que celle survenue une décennie plus tôt, incitant au plus grand pessimisme quant à la sortie de crise.

7 En mars 2020, l’irruption de la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 (maladie due au coronavirus SARS-CoV-2) met la crise politique en mode pause. Afin de gérer la pandémie, un gouvernement fédéral Wilmès II (MR/CD&V/Open VLD) prête serment devant le roi le 17 mars 2020, puis obtient successivement la confiance d’une majorité de membres de la Chambre (le 19 mars) et une délégation de pouvoirs spéciaux par une majorité plus large encore de députés fédéraux (le 26 mars)  [2]. La Première ministre, S. Wilmès, s’engage à borner son action à la gestion de la crise et à ses conséquences, et à revenir demander la confiance de l’assemblée dans un délai de six mois. Les pouvoirs spéciaux sont accordés pour une période de trois mois, renouvelables une fois. La crise politique peut donc apparaître temporairement résolue ; toutefois, à mesure que l’urgence sanitaire s’estompe, elle refait surface.

8 Sans prétendre à l’exhaustivité concernant la présentation des développements de la gestion de la crise sanitaire et de ses conséquences d’ordre socio-économique, le présent Courrier hebdomadaire fait le point sur la situation politique fédérale après huit semaines de gouvernement Wilmès II et trace des pistes de réflexion pour l’avenir politique au niveau fédéral.

9 La situation présentée est celle arrêtée au 10 mai 2020.

1. La crise politique masque la crise sanitaire

10 Contrairement à l’épisode de 2010-2011 – qui avait été largement consacré à la négociation de la sixième réforme de l’État, dont la conclusion avait ouvert la voie à la mise en place du gouvernement fédéral Di Rupo (PS/CD&V/MR/SP.A/Open VLD/CDH) –, la crise politique de 2019-2020 est plus structurelle et, à l’heure d’écrire ces lignes, aucune discussion de fond n’a été réellement entamée sur une réforme institutionnelle.

11 Cette crise-ci ne résulte pas d’un désaccord sur une réforme institutionnelle mais d’un net affaiblissement des partis traditionnels, et plus largement des partis de pouvoir  [3], ainsi que d’une incompatibilité idéologique entre les formations majoritaires du sud et du nord du pays. Pour constituer un gouvernement fédéral après les élections du 26 mai 2019, il faut renoncer soit à un minimum de cohérence idéologique et programmatique entre les partis de la future coalition fédérale, soit à l’idée de disposer d’un gouvernement représentatif de chaque côté de la frontière linguistique, soit même à ces deux éléments. Entre mai 2019 et février 2020, la balance penche, pour l’essentiel, tantôt en faveur de la première solution, avec un gouvernement qui serait constitué autour d’un axe formé par le PS et la N-VA, chacun premier parti au sein de son groupe linguistique mais aux antipodes l’un de l’autre sur le plan programmatique, tantôt en faveur de la seconde, avec une coalition sans la N-VA, appelée arc-en-ciel élargi ou Vivaldi  [4], qui rassemblerait un grand nombre de partis (7 ou 8) autour d’un projet politique plus ou moins cohérent sans disposer toutefois d’une majorité dans le groupe linguistique néerlandais de la Chambre.

12 Quand débute l’année 2020, la recherche d’une formule susceptible de conduire à la formation d’un nouveau gouvernement fédéral est entre les mains du président du MR, Georges-Louis Bouchez, et de celui du CD&V, Joachim Coens. Ceux-ci ont été chargés, le 10 décembre 2019, d’une mission d’information par le roi Philippe. Avant eux, cinq autres hommes ont déjà été chargés d’une mission par le souverain, sans succès : Johan Vande Lanotte (SP.A) et Didier Reynders (MR) s’étaient vu confier une mission d’information le 30 mai 2019, Geert Bourgeois (N-VA) et Rudy Demotte (PS) une mission de préformation le 8 octobre, et Paul Magnette (président du PS) une mission d’information le 5 novembre.

13 Mi-février 2020, l’impasse semble totale. Le 31 janvier, constatant « que les discussions entre partis n’ont pas encore permis de former une coalition soutenue par une majorité parlementaire », le roi Philippe a mis fin à la mission d’information de G.-L. Bouchez et J. Coens, en chargeant le vice-Premier ministre et ministre de la Justice, chargé de la Régie des bâtiments, et ministre des Affaires européennes, Koen Geens (CD&V), « de prendre les initiatives nécessaires permettant la mise en place d’un gouvernement de plein exercice »  [5]. Ce dernier a tenté une nouvelle fois de réunir le PS et la N-VA autour d’une table de négociation. Cette tentative tourne court le 14 février : le président du PS, P. Magnette, réitère dans la presse francophone et néerlandophone son opposition ferme à un gouvernement fédéral associant son parti et la N-VA. Cette sortie médiatique n’apporte rien de nouveau sur le fond mais, vu les termes assez tranchants utilisés (« J’en ai marre »), elle est très mal reçue en Flandre, d’autant que K. Geens soutient avoir réalisé de substantiels progrès. Le jour même, le vice-Premier ministre CD&V demande au souverain à être déchargé de sa mission royale ; il expliquera deux jours plus tard avoir ressenti l’attitude de P. Magnette comme « un coup de sabot » peu élégant. Le fossé entre francophones et néerlandophones est alors plus large que jamais.

14 Le 19 février, le roi confie à la présidente du Sénat, Sabine Laruelle (MR)  [6], et au président de la Chambre, Patrick Dewael (Open VLD), une mission aux contours peu définis ; il s’agit surtout de calmer le jeu et de temporiser jusqu’au-delà des vacances de Carnaval qui arrivent, avant peut-être de décider d’un retour aux urnes, scénario évoqué avec de plus en plus d’insistance dans la presse ainsi que par divers acteurs politiques  [7].

15 Alors que le monde politique belge est englué dans cette crise, la menace sanitaire commence à poindre. Le jeudi 23 janvier 2020, en séance plénière de la Chambre, la chef du groupe CDH, Catherine Fonck  [8], est la première parlementaire à poser une question relative au coronavirus à la ministre fédérale des Affaires sociales et de la Santé publique, et de l’Asile et la Migration, Maggie De Block (Open VLD)  [9]. Se voulant rassurante sur les réactions de son administration, et indiquant que des recommandations seront formulées à différents acteurs en cas d’expansion de l’épidémie, la ministre clôt sa réponse en ces termes : « Je pense qu’à ce stade, rien n’indique l’expansion d’une crise sanitaire chez nous. Nous devons garder notre sang-froid. En tant que responsables politiques, nous nous devons de ne pas semer la panique. Inutile d’effrayer inutilement les citoyens ».

16 Une semaine plus tard, le directeur général de l’OMS déclare que la flambée de l’épidémie constitue une urgence de santé publique de portée internationale  [10], ce qui constitue un événement rare et d’une gravité particulière. Interpellée un mois plus tard par le docteur Marc Wathelet, virologue spécialiste des coronavirus, qui reproche dans une lettre ouverte à la ministre sa minimisation de la dangerosité du Covid-19, M. De Block poste le 28 février un tweet cinglant (et retiré par la suite) : « Nog een dramaqueen » (c’est-à-dire : « Encore une personne qui dramatise tout »).

17 Le lundi 2 mars, jour de rentrée scolaire après les vacances de Carnaval, l’arrivée du coronavirus dans le pays se précise. La veille, une patiente rentrée de France a été testée positive en Belgique. Les réactions restent néanmoins mesurées. La barre des cinquante morts a été franchie en Italie, indique le journal Le Soir ; le Parlement européen décide d’annuler toutes les réunions publiques durant trois semaines (une décision qui est alors critiquée comme injustifiée par le bourgmestre de Bruxelles, Philippe Close (PS), rapporte le quotidien). Le lendemain, en commission de la Santé et de l’Égalité des chances de la Chambre, la ministre De Block présente les dispositifs et concertations régulières mis en place pour faire face à la détection de nouveaux cas d’infection. Pour sa part, accompagnant la ministre, le virologue Steven Van Gucht, directeur du Comité scientifique coronavirus récemment mis sur pied, estime que le pire des scénarios envisagés pour la propagation du coronavirus en Belgique impliquerait l’hospitalisation de 2 000 à 3 000 personnes, dont 700 en soins intensifs, soit des chiffres comparables à ceux d’une « grosse épidémie de grippe »  [11]. Le 5 mars, en séance plénière, la ministre parle à nouveau de « grippe nouvelle mais légère »  [12].

18 Manifestement, comme bien d’autres pays, la Belgique tarde à prendre la mesure de la sévérité de l’épidémie mondiale en cours et de la menace que celle-ci pose sur les services hospitaliers, qui pourraient être rapidement débordés. Ainsi, de grands rassemblements, tels le salon de la construction Batibouw (du 29 février au 8 mars) et la Foire du Livre (du 5 au 8 mars) se déroulent normalement, si ce n’est la mise à disposition des visiteurs de gel désinfectant et la recommandation de s’abstenir de contacts rapprochés, telles les poignées de main. Le 8 mars, plusieurs milliers de personnes prennent encore part à Bruxelles à la marche organisée à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes.

2. La crise sanitaire suspend la crise politique

19 Les choses s’accélèrent durant la semaine du 9 mars 2020. Alors que l’on assiste à un premier bond dans les achats de denrées alimentaires non périssables (dont les pâtes et le riz) et de papier hygiénique par les particuliers, la mission de S. Laruelle et de P. Dewael est prolongée d’une semaine. Il semble que, du côté du Palais royal, on souhaite cette fois explorer les pistes qui pourraient conduire à mettre en place un « gouvernement d’urgence »  [13]. Le mardi 10 mars, alors qu’un expert de la Katholieke Universiteit Leuven (KU Leuven) estime que le nombre de contaminations au Covid-19 est sous-évalué en Belgique  [14], le gouvernement fédéral adopte une série de recommandations, dont l’annulation des rassemblements de plus de 1 000 personnes, le report des fêtes et voyages scolaires et l’adoption, dans la mesure du possible, du télétravail  [15]. De son côté, le conseil national de l’Ordre des médecins met en place, pour les médecins généralistes, une procédure de consultation par téléphone et de délivrance de certificats médicaux à distance.

20 Les trois Régions adoptent également des mesures pour limiter la propagation du virus. La Région de Bruxelles-Capitale limite l’accès aux salles de spectacle à 1 000 personnes maximum, interdit tous les voyages scolaires jusqu’à Pâques et ferme les maisons de repos aux visiteurs. Cette dernière mesure est adoptée également en Wallonie, tandis que la Flandre se contente de limiter ces visites. « Ce qui apparaît clairement, c’est que chaque Région a sa propre politique pour lutter contre ce virus. Les décisions prises ne sont pas toutes similaires, ne sont pas de même proportion et ne suivent pas toutes les recommandations du fédéral », note la RTBF  [16].

21 La difficulté de coordonner l’action des différents niveaux de pouvoir apparaît particulièrement au soir du jeudi 12 mars quand, au terme d’une réunion visiblement éreintante du Conseil national de sécurité (CNS)  [17] élargi aux ministres-présidents des Régions et des Communautés, la Première ministre annonce de nouvelles décisions, dont deux mesures phares : la fermeture des écoles au moins jusqu’aux vacances de Pâques (ce qui constitue une décision à laquelle le gouvernement flamand n’était initialement pas favorable), et celle des restaurants et cafés jusqu’au 3 avril au moins. Il est alors évident que la prise de décision doit impérativement être revue afin que la Belgique affronte la crise de manière coordonnée. L’association des Régions et des Communautés à la décision fédérale par le biais du CNS est un volet de cette démarche, déjà décidé. Le renforcement du gouvernement fédéral, alors toujours minoritaire et en affaires courantes, en est l’autre.

22 À ce moment-là, la piste privilégiée est celle de l’élargissement du gouvernement fédéral afin qu’il dispose d’une majorité parlementaire. Le rapport final du duo Laruelle/Dewael est attendu pour le lundi 16 mars. La presse évoque les négociations qui se déroulent entre le PS et la N-VA pour mettre en place un gouvernement d’urgence  [18]. Ces négociations ne vont pas aboutir. Un premier problème se pose avec le choix du futur occupant du poste de Premier ministre : le MR, soutenu par le PS  [19], veut maintenir S. Wilmès à la tête de l’exécutif, tandis que la N-VA voudrait que la fonction revienne à son président, Bart De Wever  [20]. Les présidents des partis socialistes (PS et SP.A), libéraux (MR et Open VLD), de la N-VA et du CD&V se réunissent le samedi 14 mars. La réunion dure jusqu’à 2 heures du matin et on s’attend à voir ces négociations reprendre plus tard le dimanche  [21]. Cependant, réuni au matin du dimanche 15 mars (par le moyen d’une visio-conférence), le bureau du PS refuse de monter dans un gouvernement avec la N-VA. Pour la seconde fois en un mois, le PS met donc un terme aux négociations. P. Magnette accuse la N-VA d’avoir voulu « changer de Première ministre en pleine crise », de « monnayer une réforme de l’État en pleine crise sanitaire » et de « refuser de soutenir le gouvernement en affaires courantes »  [22]. Les commentaires du côté néerlandophone sont durs, y compris dans le camp socialiste  [23]. Cependant, la nécessité de disposer d’un gouvernement fédéral apte à gérer la crise sanitaire l’emporte et les discussions pour sortir de l’impasse reprennent.

23 Une autre voie est alors envisagée, qui aboutit à un accord le soir même du 15 mars. Hormis le PTB et le VB, manifestement tenus à l’écart de toutes les tractations, tous les partis représentés au Parlement fédéral sont invités à soutenir, de l’extérieur pour les formations autres que le MR, le CD&V et l’Open VLD, un gouvernement Wilmès II à la composition inchangée par rapport à l’exécutif alors en place mais recevant la confiance d’une majorité de députés et doté en outre des pouvoirs spéciaux pour lutter contre la crise sanitaire et ses conséquences, notamment socio-économiques. Outre les trois partis participant au gouvernement, sept partis acceptent cette solution (la N-VA, le PS, Écolo, le SP.A, Groen, le CDH et Défi) ; le lendemain, la N-VA précise cependant qu’elle octroiera les pouvoirs spéciaux au gouvernement mais qu’elle refusera de lui accorder sa confiance  [24].

24 Le mardi 17 mars 2020, le roi Philippe nomme par arrêté royal les membres du gouvernement fédéral Wilmès II  [25].

25 Dans la déclaration gouvernementale qu’elle prononce le même jour devant un hémicycle de la Chambre très clairsemé pour réduire les risques de contamination entre les députés fédéraux (ceux-ci ayant été dispersés dans divers locaux du Palais de la Nation)  [26], la Première ministre s’engage à limiter l’action de son gouvernement à la gestion de la crise et à « redemand[er] la confiance du Parlement dans six mois au plus tard. Ainsi, nous ne dépasserons pas le périmètre des affaires courantes pour les sujets extérieurs à cette crise ». En outre, S. Wilmès indique avoir proposé que le Comité ministériel restreint (kern) « se réunisse à intervalles réguliers et, chaque fois que cela s’avérera nécessaire, qu’il se réunisse de surcroît avec les représentants des partis qui se sont engagés, afin de garantir la transparence de l’exécution des pouvoirs spéciaux »  [27]. Appelant à faire perdurer l’union nationale, la Première ministre invite les formations politiques à « se montrer dignes de l’accord conclu, en optant systématiquement pour le dialogue, des approches constructives et le sens de la mesure des événements »  [28].

26 Deux jours plus tard – la Constitution imposant un délai de minimum 48 heures entre le dépôt et le vote d’une motion de confiance –, la confiance est accordée au gouvernement Wilmès II  [29]. Seuls la N-VA, le VB et le PTB votent contre la motion de confiance déposée l’avant-veille. Pour le porte-parole et chef de groupe de ce dernier parti à la Chambre, Raoul Hedebouw, il s’agit de « rester une voix d’opposition constructive dans ce débat (…), même si nous n’avons pas été consultés par les partis traditionnels »  [30]. Le chef du groupe N-VA, Peter De Roover, justifie quant à lui ce vote d’une double manière. D’une part, il fustige un gouvernement de plein exercice qui s’est constitué selon lui contre la N-VA. D’autre part, il soutient que la lutte contre le coronavirus pouvait être menée par un gouvernement en affaires courantes  [31]. La veille, en effet, les mesures de confinement ont été renforcées : un nouvel arrêté ministériel  [32] a été pris par Pieter De Crem (CD&V), ministre de la Sécurité et de l’Intérieur, chargé du Commerce extérieur, d’un gouvernement nouvellement nommé par le roi mais n’ayant pas encore reçu la confiance de la Chambre.

27 Il faut attendre une semaine encore pour que le gouvernement Wilmès II reçoive des pouvoirs spéciaux  [33] pour trois mois à dater du 30 mars 2020, renouvelables une fois. La Chambre adopte deux lois de pouvoirs spéciaux  [34], issues d’une proposition de loi déposée par des membres des neuf partis qui ont voté la confiance au gouvernement Wilmès II et par le chef du groupe N-VA  [35]. Bien que les développements de la proposition évoquaient l’obligation, pour le gouvernement fédéral, de faire périodiquement rapport à la Chambre sur les mesures prises en vertu de l’habilitation, ces obligations ne sont pas formalisées dans le texte des deux lois. En revanche, le champ de leur action est borné à la gestion de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques et sociales  [36]. En outre, sont explicitement exclus du champ d’application des deux lois le pouvoir d’achat des familles et la protection sociale existante. Les arrêtés royaux de pouvoirs spéciaux ne peuvent pas adapter, abroger, modifier ou remplacer les cotisations de sécurité sociale, les impôts, les taxes et les droits, notamment la base imposable, le tarif et les opérations imposables  [37].

3. La crise sanitaire masque la crise politique

28 Le 26 mars, les pouvoirs spéciaux sont adoptés à la Chambre des représentants par 104 « oui », contre 8 « non » et 16 abstentions  [38]. Les votes négatifs émanent des 7 députés PTB présents (sur 12) et de Jean-Marie Dedecker, député indépendant élu sur une liste N-VA ; les abstentions proviennent des 15 députés VB présents (sur 18) et de Cécile Thibaut (Écolo). Bien que large, l’unité autour du gouvernement Wilmès II n’est donc pas totale.

29 Alors qu’il avait initialement annoncé l’abstention de son groupe  [39], R. Hedebouw (PTB) justifie le refus des pouvoirs spéciaux en pointant les atteintes à la démocratie et aux droits sociaux qu’ils pourraient permettre : « Le point 5 de l’article 5 [de la loi d’habilitation] accorde au gouvernement un blanc-seing pour une modification du droit du travail et de la sécurité sociale. L’urgence est invoquée afin d’écarter le débat politique. Les mesures qui seront prises par arrêtés royaux renferment toutefois un choix politique – de gauche ou de droite. Les intérêts des patrons des grands secteurs ne sont pas les mêmes que ceux des travailleurs. L’arrêté ministériel du 13 mars relatif aux secteurs cruciaux prévoit que ces secteurs ne peuvent pas être fermés en cas de non-respect des règles. La première liste a entre-temps quadruplé, si bien que 2 des 3 millions de travailleurs travaillent dans un secteur crucial. Il s’agit d’une discussion politique par excellence. (…) Oui, il faut prendre des mesures urgentes et nous ne jouerons pas l’opposition stérile. Mais je ne comprends pas pourquoi nous devrions déléguer pour trois à six mois tous les pouvoirs du Parlement au gouvernement. Le PTB votera donc contre ces pouvoirs spéciaux mais il sera toujours disponible pour appuyer des mesures constructives »  [40].

30 L’attitude de la N-VA, qui vote les pouvoirs spéciaux au gouvernement Wilmès II après lui avoir refusé la confiance, s’avère pour sa part surprenante. En effet, des pouvoirs spéciaux n’auraient pu que difficilement être octroyés à un gouvernement en affaires courantes. Comme l’indiquent plusieurs juristes, « on aurait (…) beaucoup de peine à trouver, dans la Constitution ou ailleurs, une règle qui l’en empêcherait expressis verbis. Toutefois, une réponse affirmative (…) paraît difficile à concevoir : comment imaginer en effet qu’un gouvernement aux attributions limitées à l’expédition des affaires courantes et dont les attributions sont, partant, plus réduites que celles d’un gouvernement de plein exercice puisse jouir de pouvoirs exorbitants par rapport à ceux dont dispose normalement l’exécutif ? Par ailleurs, le fait pour la Chambre des représentants de conférer des prérogatives supplémentaires au gouvernement semble supposer à tout le moins que l’assemblée lui fasse confiance »  [41].

31 Plus largement, la stratégie de la N-VA face à la crise sanitaire paraît hésitante et peu assurée ; même la communication du parti nationaliste flamand, généralement considérée comme percutante, manque alors de clarté. Ainsi, le 10 mars, le bourgmestre d’Anvers (et président du parti), B. De Wever, fait savoir qu’il n’envisage pas d’interdire quelque événement dans sa commune « uniquement sur la base d’un avis », c’est-à-dire après la recommandation du gouvernement fédéral d’annuler les événements réunissant plus de 1 000 personnes à l’intérieur  [42]. Toutefois, quelques jours plus tard, son parti réclame des mesures plus fermes  [43]. Dans un autre dossier, l’attitude de la N-VA fait polémique, à savoir la création d’un fonds européen pour lutter contre les conséquences économiques de la pandémie. D’une part, le 26 mars 2020, les trois eurodéputés N-VA sont parmi les très rares membres du Parlement européen  [44] à ne pas soutenir ce projet  [45]. Quelques jours plus tard, le 30 mars, la Belgique est le seul État membre à s’abstenir lors du vote au Conseil européen relatif à ce dossier ; la raison en est que le gouvernement flamand – ou, du moins, sa composante N-VA – a souhaité dénoncer ainsi la répartition régionale des moyens, peu favorable à sa Région en raison de la clé retenue, à savoir celle en vigueur pour les fonds de cohésion  [46].

32 Néanmoins, et même si les conditions dans lesquelles le gouvernement Wilmès II a été formé ont laissé des traces entre certains protagonistes, particulièrement du côté néerlandophone, l’impression domine alors que les tensions politiques ont globalement cédé la place à une accalmie liée à la gravité de la situation sanitaire, au consensus politique qui entoure finalement le confinement en vigueur depuis le 18 mars, et au large soutien accordé à l’exécutif fédéral. L’approche des vacances de Pâques contribue sans doute aussi à une certaine baisse de la tension politique.

33 En outre, deux comités ministériels fédéraux font l’objet d’un aménagement particulier afin de gérer la crise sanitaire et ses retombées en tentant de préserver l’unité politique dégagée à la mi-mars.

34 D’une part, le kern est ouvert, une fois par semaine environ, aux présidents des dix partis qui ont accordé les pouvoirs spéciaux au gouvernement fédéral. Il s’agit de Paul Magnette (PS), Joachim Coens (CD&V), Gwendolyn Rutten (Open VLD), Georges-Louis Bouchez (MR), Jean-Marc Nollet ou Rajae Maouane (Écolo), Conner Rousseau (SP.A), Meyrem Almaci (Groen), Maxime Prévot (CDH) et François De Smet (Défi) ; seule la N-VA délègue plutôt le chef de son groupe à la Chambre (P. De Roover). Ni le PTB ni le VB ne sont conviés à ces réunions.

35 D’autre part, le Conseil national de sécurité (CNS) – qui a pris en 2015, dans le contexte des attentats djihadistes, la succession du Comité ministériel du renseignement et de la sécurité, et dont sont membres de droit la Première ministre, les vice-Premiers ministres  [47] et les ministres en charge de l’Intérieur  [48] et des Affaires étrangères et de la Défense  [49] (cf. supra) – invite à chacune de ses réunions les ministres-présidents des Régions et des Communautés, soit Jan Jambon (N-VA) pour le gouvernement flamand (N-VA/CD&V/Open VLD), Pierre-Yves Jeholet (MR) pour le gouvernement de la Communauté française (PS/MR/Écolo), Oliver Paasch (ProDG) pour le gouvernement de la Communauté germanophone (ProDG/SP/PFF), Elio Di Rupo (PS) pour le gouvernement wallon (PS/MR/Écolo) et Rudi Vervoort (PS) pour le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale et le Collège réuni de la Commission communautaire commune (COCOM) (PS/Écolo/Défi/Groen/Open VLD/one.brussels-sp.a)  [50].

36 Parallèlement à la mise en place du kern élargi, l’adoption des pouvoirs spéciaux s’est accompagnée de la création à la Chambre d’une commission « chargée du contrôle de la mise en œuvre des lois du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 ». Cette commission se compose de 17 membres effectifs et de 26 suppléants. Les membres effectifs sont : pour le groupe N-VA, Peter De Roover, Frieda Gijbels et Joy Donné ; pour le groupe Écolo-Groen, Kristof Calvo, Georges Gilkinet et Laurence Hennuy ; pour le groupe PS, Sophie Thémont, Éliane Tillieux et André Flahaut ; pour le groupe VB, Barbara Pas et Dries Van Langenhove ; pour le groupe MR, Benoît Piedboeuf et Kattrin Jadin ; pour le groupe CD&V, Servais Verherstraeten ; pour le groupe PVDA-PTB, Sofie Merckx ; pour le groupe Open VLD, Egbert Lachaert ; pour le groupe SP.A, Meryame Kitir  [51]. Signe de l’importance accordée à cette commission, les partis ont, à l’exception du PS et du PTB, choisi de déléguer à la commission leurs chefs de groupe. Remarquons que, en application du règlement, le CDH et Défi, bien qu’ayant voté les pouvoirs spéciaux, ne sont pas représentés au sein de la commission. La commission, qui est présidée par S. Verherstraeten, examine les différents arrêtés royaux pris en exécution des pouvoirs spéciaux et interpelle les ministres responsables quant à leur contenu. Il s’agit toutefois d’interpellations a posteriori.

37 Enfin, le Comité de concertation, organe qui réunit des ministres fédéraux, régionaux et communautaires  [52] (essentiellement dans le but de tenter de prévenir ou de régler les conflits d’intérêts et certains des conflits de compétence qui surviennent entre des composantes de l’État fédéral belge), se réunit nettement plus souvent qu’à l’accoutumée, de même que des comités interministériels, en particulier celui de la Santé. Il est à noter que, eu égard au fait que, depuis la sixième réforme de l’État  [53], le Comité de concertation est légalement défini comme « le point central de concertation, de coopération et de coordination entre l’État [comprendre : l’Autorité fédérale], les Communautés et les Régions pour réaliser des objectifs communs ou individuels, dans le respect des compétences de chacun »  [54], d’aucuns avaient initialement considéré que cet organe était susceptible d’occuper une place de premier plan durant la crise sanitaire  [55] ; rapidement, il s’est avéré que le Comité de concertation restera largement dans l’ombre du CNS.

4. La gestion de la crise sanitaire connaît des tensions

38 La coordination des pouvoirs publics surprend quelque peu dans un pays habitué aux divisions et querelles intestines. Le 25 mars, le quotidien britannique Financial Times cite même en exemple les briefings quotidiens qui sont mis en place en Belgique pour faire le point sur l’évolution de la pandémie dans le pays, en précisant toutefois que ceux-ci sont effectués par des scientifiques et des hauts fonctionnaires et non par des représentants politiques  [56].

39 La gestion politique de la crise sanitaire, elle, est très vite mise sur la sellette. Le 23 mars, l’hebdomadaire Le Vif/L’Express révèle que, pour des motifs manifestement budgétaires, la ministre De Block a laissé périmer le stock de masques de protection respiratoire individuelle de type FFP2 – c’est-à-dire des masques filtrants dont le port est requis pour le personnel soignant au contact de personnes infectées et qui font alors cruellement défaut – et ne l’a pas reconstitué après l’avoir fait détruire. Ce stock avait été constitué en 2006 puis étoffé en 2009 suite à la menace de propagation des grippes A(H5N1) et A(H1N1)  [57]. La ministre explique avoir manqué de temps pour reconstituer ce stock puis en avoir été empêchée par la chute du gouvernement fédéral dirigé par C. Michel, intervenue fin 2018. Le 25 avril, toutefois, RTL-TVi démontre que cette destruction a débuté dès 2015, ce qui aurait laissé suffisamment de temps à M. De Block pour reconstituer le stock de masques  [58].

40 La veille des premières révélations, Philippe De Backer (Open VLD à l’instar de M. De Block), ministre fédéral de l’Agenda numérique, des Télécommunications et de la Poste, chargé de la Simplification administrative, de la Lutte contre la fraude sociale, de la Protection de la vie privée et de la Mer du Nord, se voit chargé par la Première ministre de diriger la task force « en charge de la gestion des dispositifs médicaux et des médicaments », qui « est l’une des deux forces opérationnelles principales dans la lutte contre le coronavirus avec celle des capacités hospitalières »  [59]. Ce glissement de compétence sonne comme un désaveu de la ministre de la Santé publique. Il ne suffit toutefois pas à résoudre les problèmes en cours et l’approvisionnement en masques connaît de nombreux autres ratés, alors que la demande de ce matériel hospitalier explose à l’échelle mondiale : la proposition d’un intermédiaire louviérois de fournir une importante réserve de masques FFP2 stockée à l’étranger est manifestement acceptée puis rompue par le cabinet de la ministre De Block  [60], une commande passée à l’étranger à une société véreuse n’est jamais livrée malgré le déblocage de fonds publics  [61], ou encore des masques FFP2 sont livrés mais ne répondent pas aux normes de qualité requises et, de ce fait, sont impossibles à utiliser comme tels  [62]. Au point que même l’agence de presse Belga, qui use habituellement d’un ton plutôt neutre, entame l’une de ses dépêches par cette formule : « Dans la saga des masques, rien ne nous sera épargné »  [63].

41 Par ailleurs, la communication du gouvernement fédéral quant à la nécessité ou non pour le grand public de porter un masque est marquée, comme dans d’autres pays, par une valse-hésitation – alimentée, il est vrai, par les incertitudes et controverses du monde scientifique et médical. Ce n’est que le 24 avril que le port du masque dans l’espace public est recommandé par le CNS et rendu obligatoire dans les transports publics, à partir du 4 mai. Cette décision, liée à l’engagement alors annoncé de fournir au moins un masque à chaque habitant, s’accompagne, elle aussi, d’une certaine cacophonie. Le vice-Premier ministre K. Geens, chargé pour sa part de coordonner l’approvisionnement de la population en masques en tissu  [64], admet dès le lendemain de la réunion du CNS que cette distribution ne pourra pas être accomplie pour le 4 mai comme annoncé  [65]. Membre de plein droit du CNS, peut-être K. Geens ne s’y est-il pas exprimé, ou n’y a-t-il pas été écouté, ou ne s’est-il aperçu que tardivement que la tâche qui lui incombait était irréaliste.

42 Le faible nombre de tests réalisés sur les patients potentiellement porteurs du coronavirus ou sur le personnel soignant ou assimilé suscite également interrogations, polémiques et interpellations  [66]. Ces tests peuvent être effectués à domicile, en cabinet médical, en maison de repos, dans les foyers pour personnes handicapées ou enfants placés, ou encore en milieu hospitalier. Concernant cette dernière situation, deux médecins demandent le 22 mars, dans une lettre ouverte à la Première ministre, des dépistages systématiques des patients et du personnel soignant  [67]. Dans les maisons de repos, les tests ne commencent à être menés à large échelle qu’à partir du 7 avril. Au-delà des enjeux matériels, qui renvoient à la capacité du système scientifique, pharmaceutique et médical belge à concevoir, produire, réaliser et analyser les tests, se pose une question politique : « Le 3 mars, jour où seuls 284 [tests] furent réalisés, Maggie De Block, ministre de la Santé [publique], assure en commission parlementaire de la Chambre que “notre capacité en termes de tests est plus que suffisante”. Pour certains, au-delà de la difficulté de multiplier les tests et les laboratoires testeurs, il y avait aussi un manque de volonté politique à multiplier ces tests », note ainsi la RTBF  [68]. Cette situation met également en évidence les difficultés de coordination de l’action de l’Autorité fédérale et des Régions ou Communautés, ouvrant la voie à des accusations réciproques face aux lenteurs et aux ratages dans l’administration des tests.

43 Le manque de matériel de protection et de tests, de même que certains problèmes de coordination entre niveaux de pouvoir, rejaillissent tout particulièrement sur le secteur des maisons de repos, dont on perçoit peu à peu qu’il représente un foyer majeur de contaminations et de décès. Début mai, on peut relever que quelque 53 % des 8 016 décès enregistrés en Belgique l’ont été en maison de repos, pour 46 % en milieu hospitalier ; trois semaines plus tôt, sur 4 168 décès, ce rapport était inverse. Ici également, outre la gestion de la situation elle-même  [69], la communication politique est vivement critiquée. Tandis que le CNS décide le 15 avril d’autoriser à nouveau les visites dans les maisons de repos, dès le lendemain, fédération sectorielle, syndicats, autres acteurs de terrain et certains mandataires communaux dénoncent virulemment cette décision et refusent de l’appliquer, faute de précautions suffisantes pour limiter les risques de contamination  [70]. La décision du CNS, motivée par la volonté de renouer les contacts sociaux, s’avère avoir été décidée en déconnexion des acteurs de terrain. En outre, devant le tollé suscité par cette annonce, les ministres responsables au niveau régional – Christie Morreale (PS) en Wallonie, Alain Maron (Écolo) en Région bruxelloise et Wouter Beke (CD&V) en Flandre – annoncent qu’ils ne l’appliqueront pas ou pas immédiatement  [71]. Lors de la séance de questions-réponses qui se déroule lors de la séance plénière du 16 avril à la Chambre, la décision est vivement critiquée  [72]. La Première ministre annonce la tenue d’un Comité de concertation consacré à la question le lendemain. À l’issue de celui-ci, la décision annoncée deux jours plus tôt est revue, dans ce que certains observateurs qualifient de « virage à 180 degrés »  [73] : les visites ne sont pas encore autorisées dans les maisons de repos et la décision est renvoyée aux Régions.

44 Globalement, la communication des ministres De Block et De Backer ainsi que, du côté néerlandophone surtout, de la Première ministre  [74] est critiquée dans la presse et par des personnalités issues de formations politiques qui ont soutenu le gouvernement Wilmès II. Ainsi, le 1er avril, dans une interview à La Libre Belgique, la députée fédérale C. Fonck critique le gouvernement « qui a longtemps minimisé le problème » et déplore que, en ce qui concerne le dépistage, le matériel de protection ou le stock de médicaments, « on a l’impression que le gouvernement ne sait pas où il va »  [75]. Le refus exprimé par la ministre de la Santé publique de garantir le financement des hôpitaux malgré l’arrêt des consultations scandalise plusieurs acteurs, a fortiori au moment où leur rôle apparaît crucial  [76]. L’attitude de M. De Block à l’égard du personnel soignant est perçue comme méprisante, ce qui lui vaut notamment un appel à la démission de la part de la CSC-Services publics, dès le 31 mars, et le dépôt d’une plainte auprès de l’Ordre des médecins (M. De Block étant elle-même médecin), trois semaines plus tard. Début mai, l’adoption de certains arrêtés lui vaut de nouveau de vifs reproches du monde médical et syndical, un manque de concertation étant en particulier souligné  [77].

45 Face à ces couacs à répétition, l’organisation future d’une commission d’enquête parlementaire est évoquée dès le mois de mars  [78]. La chef du groupe CDH à la Chambre relaie bientôt une telle demande  [79]. Étonnamment, le président du CD&V, J. Coens, se rallie également à cette idée, alors même que le ministre flamand du Bien-être, de la Santé publique, de la Famille et de la Lutte contre la pauvreté, W. Beke, son prédécesseur à la présidence du parti, a été mis sur la sellette par rapport à la situation dans les maisons de repos en Flandre  [80]. Autre parti de la coalition fédérale, le MR admet également l’idée de mettre sur pied une telle commission  [81].

46 Le volet socio-économique de la gestion de la crise puis du déconfinement met à son tour en évidence tensions et contradictions d’ordre notamment politique. Rapidement, le gouvernement Wilmès II met sur pied différents groupes de travail spécifiques  [82]. Au Risk Management Group (RMG), « qui se concentre sur l’aspect sanitaire de la crise »  [83], vient s’ajouter l’Economic Risk Management Group (ERMG), qui se réunit pour la première fois le 19 mars, sous la présidence du gouverneur de la Banque nationale de Belgique (BNB), Pierre Wunsch, et de l’ancien président du Boerenbond, Piet Vanthemsche. Ce groupe « a pour objectif d’assurer la gestion des risques économiques et macroéconomiques liée à la propagation du Covid-19 en Belgique »  [84]. À la différence, par exemple, du Conseil central de l’économie (CCE), organisme paritaire qui aurait peut-être pu endosser ce rôle, la composition des huit groupes de travail constitués au sein de l’ERMG, qui semble s’être opérée sur une base essentiellement volontaire, fait apparaître une nette sous-représentation du monde syndical : sur les 66 noms recensés fin avril, 36 représentent une organisation patronale  [85], 9 proviennent du monde syndical  [86], tandis que les autres sont attachés à la BNB (9 personnes), au Bureau fédéral du plan (7 personnes), à un autre organisme fédéral (2 personnes) ou à une université (3 personnes). Deux semaines plus tard, le gouvernement fédéral annonce la mise sur pied du Groupe d’experts en charge de l’exit strategy (GEES) : composé de 10 membres, on y trouve 5 spécialistes médicaux et 5 personnes issues du monde socio-économique  [87]. Tandis qu’Écolo, notamment, pointe l’absence parmi eux de spécialistes issus des sciences humaines (psychologue ou anthropologue), le PTB relève la présence de représentants du monde patronal mais d’aucun syndicaliste ; au contraire, B. De Wever estime que le groupe aurait davantage dû pencher vers le versant économique.

47 Au-delà de ces éléments, le gouvernement fédéral et, dans certains cas, le CNS sont soupçonnés ou accusés par des représentants syndicaux ou de partis politiques de gauche de faire passer la relance de l’économie avant la santé de la population, et en particulier celle des salariés. Ainsi, l’usage qui est fait des pouvoirs spéciaux accordés au gouvernement fédéral a notamment pour effet d’introduire temporairement, dans certains secteurs, plusieurs mesures de flexibilité réclamées de longue date par le banc patronal et récusées avec vigueur par le banc syndical : élargissement des horaires d’ouverture des commerces  [88], extension du nombre d’heures supplémentaires prestées sans motif ni information de la délégation syndicale ou de l’inspection sociale, extension du travail des étudiants, dérogation à l’interdiction de mettre du personnel à disposition, ou encore possibilité de conclure des contrats à durée déterminée (CDD) successifs sans que cela conduise à leur transformation en contrats à durée indéterminée (CDI)  [89].

48 Cette marginalisation des acteurs syndicaux dans l’ERMG et le GEES et de leurs préoccupations dans les décisions prises en vertu des pouvoirs spéciaux, ainsi que la surreprésentation des organisations patronales dans ces organes et la satisfaction de certaines de leurs demandes récurrentes donnent le sentiment que le gouvernement Wilmès II appréhende la concertation sociale comme le faisait la coalition N-VA/MR/ CD&V/Open VLD depuis 2014  [90]. Cette vision semble davantage répandue du côté francophone que du côté néerlandophone.

49 Avant que les différentes étapes du déconfinement soient décidées par le CNS, le vendredi 24 avril, les recommandations du GEES fuitent dans la presse dès le mercredi 22 avril  [91].

5. La stratégie de préparation du déconfinement essuie des critiques

50 Le vendredi 24 avril 2020, au terme d’une longue réunion du Conseil national de sécurité (CNS), la Première ministre, encadrée par les ministres-présidents des Régions et des Communautés, présente un plan de déconfinement assez complexe. L’heure tardive (la présentation démarre vers 22h30), la répétition d’une bonne partie du discours à la fois en français et en néerlandais, l’utilisation malhabile d’un diaporama compliquant inutilement l’exposé et la prise de parole, parfois redondante, de plusieurs ministres-présidents (dont O. Paasch, en allemand, sans qu’une traduction vers les deux autres langues n’ait été prévue) engendrent de vives critiques quant à la forme du message. Tandis que, lors de l’annonce des mesures de confinement – parfois qualifiées de lockdown –, la communication de S. Wilmès avait été saluée comme rassurante et empathique, générant même le début d’une « Wilmèsmania »  [92], la présentation des mesures de déconfinement suscite des commentaires globalement négatifs  [93]. Ainsi que l’écrit Le Vif/L’Express, « la longue présentation, tardive et confuse, de la Première ministre (…) a laissé beaucoup de Belges sur leur faim. Soit parce que les réponses n’étaient pas assez claires, soit parce que des sujets sont restés en souffrance, soit tout simplement parce que le phasage du plan pose question »  [94].

51 Au-delà de l’aspect formel, la décision de rouvrir les commerces dès le 11 mai sans permettre la reprise des contacts sociaux, et donc des visites familiales, avant le 18 mai est fort mal reçue. Le vice-Premier ministre Open VLD, Alexander De Croo, est ainsi moqué sur les réseaux sociaux pour avoir concédé que l’on pourrait rencontrer sa famille dans les allées d’un magasin. La perspective de ne pouvoir rencontrer sa famille lors de la fête des mères (le dimanche 10 mai) fâche particulièrement, tant et si bien que le ministre-président flamand, J. Jambon, indisposé aussi par le fait que les fleuristes n’auront alors pas encore pu rouvrir leur commerce, propose de déplacer la date de cette fête, pour ce qui concerne la Flandre, à la semaine suivante  [95], proposition soutenue par l’UNIZO  [96]. La décision de rouvrir les magasins le 11 mai mais de n’autoriser à nouveau les contacts sociaux qu’une semaine plus tard est d’autant plus mal reçue que les recommandations du GEES, diffusées dans la presse l’avant-veille de la décision du CNS, préconisaient une reprise des contacts sociaux au sein d’un cercle de dix personnes maximum dès le 4 mai.

52 Plusieurs formations politiques d’opposition reprochent au CNS et à la Première ministre, ce dont celle-ci se défend, d’avoir fait passer la reprise économique avant celle des contacts sociaux, voire avant la santé dans la stratégie de déconfinement élaborée et présentée le 24 avril. La députée fédérale Ludivine Dedonder (PS) pose clairement : « Pour le PS, la santé des travailleurs est et restera la priorité absolue. L’humain doit passer avant l’économie. Nous avons déjà connu plus de 7 000 décès. Des personnes sont encore à l’hôpital, en soins intensifs. Nous ne pouvons prendre aucun risque. Le retour au travail ne peut avoir lieu que si la sécurité des travailleurs, de leurs familles, de la population est garantie dans l’entreprise »  [97]. Pour le PTB, R. Hedebouw résume : « Vous avez pris deux décisions. Suite à la première, nous reverrons tous nos patrons avant de revoir nos familles. Suite à la deuxième, toutes les conditions de sécurité qui devaient être garanties dans les entreprises ne devront plus l’être »  [98]. Georges Gilkinet (Écolo) met en garde : « Les aspects sanitaires de la pandémie sont essentiels. Les dimensions économiques nous préoccupent tout autant mais nous souhaitons que le gouvernement s’occupe aussi, à présent, avec la même force, des conséquences psychologiques et sociales de cette crise. Le risque est grand que de nombreux Belges aient perdu “la patate”, le moral, cette volonté de se battre et d’agir, et qu’ils plongent dans la précarité. Nous devons être attentifs à cela »  [99].

53 À l’inverse, des personnalités politiques comme P. De Roover et J.-M. Dedecker mettent l’accent sur la nécessité de rouvrir les commerces sans discrimination basée sur la taille des enseignes ou des surfaces commerciales, tandis que le chef du groupe MR, B. Piedboeuf, refuse d’opposer « économie et santé. Il ne faut quand même pas oublier que le redémarrage de l’économie consiste aussi à faire repartir ce qui fait vivre les gens, car ils doivent travailler pour que leurs besoins soient satisfaits »  [100]. Le président de la N-VA, B. De Wever, avait tenu des propos allant dans le même sens quelques jours plus tôt : « Rien n’est plus faux que l’opposition entre l’économie et la santé. L’effondrement du bien-être coûte aussi énormément d’années de vie en bonne santé. Nous devons veiller à ce que la réaction à la crise, dans la durée, ne cause pas plus de dégâts que la crise elle-même »  [101].

54 Plus largement, dès la fin des vacances scolaires de Pâques, et de manière croissante à mesure qu’approche la levée des mesures de confinement, il apparaît que les divergences et les dissensions politiques reprennent le dessus, dans ce que plusieurs journalistes qualifient de « déconfinement politique ». Avec ironie, le chef du groupe N-VA à la Chambre constate : « Ici, il y a quelques semaines, une large majorité a accordé sa confiance [au] gouvernement [Wilmès II]. L’idylle a été courte car si ça, c’est de la confiance, quand j’entends ces questions, je me demande alors à quoi ressemblerait de la méfiance »  [102].

55 Face à ces critiques, le CNS décide, le mercredi 6 mai, d’adopter de nouvelles mesures dans le cadre de la stratégie de déconfinement, et en particulier d’autoriser les rencontres familiales ou amicales dès le dimanche 10 mai (jour de la fête des mères), de façon limitée : quatre personnes, toujours les mêmes, et qui ne pourront pas visiter une autre maison. L’arrêté ministériel traduit cela comme suit : « Un ménage, peu importe sa taille, est autorisé à accueillir à son domicile jusqu’à quatre personnes. Ces quatre personnes sont toujours les mêmes. Celles-ci font partie ou non d’un même ménage. Quand une personne d’un ménage est invitée au domicile d’une autre personne, c’est l’ensemble de son ménage qui s’engage et même si elle se rend seule au rendez-vous. Les membres du nouveau “groupe” ainsi constitué ne peuvent pas recevoir à leur domicile d’autres personnes ou être reçus par d’autres personnes. Pour l’application du présent article, on entend par “ménage” : des personnes vivant sous le même toit. Les règles de distanciation sociale sont d’application entre les différents ménages »  [103]. La complexité de la nouvelle règle entraîne les journaux dans des explications détaillées, schémas à l’appui, mais est globalement bien accueillie. Les commentaires relatifs tant au fond qu’à la forme de la communication de la Première ministre lors de la conférence de presse du 6 mai sont positifs, d’autant plus qu’elle s’est excusée, avec autodérision, pour les erreurs d’appréciation et de communication qui avaient été commises le 24 avril  [104].

56 Le lendemain, en séance plénière de la Chambre, l’atmosphère s’en trouve améliorée. Les inquiétudes concernent alors en priorité la disponibilité des masques, dont l’obligation du port dans les transports en commun ainsi qu’aux arrêts et gares est entrée en vigueur depuis trois jours. Par ailleurs, quelques regrets et incompréhensions sont formulés par les députés à propos des choix opérés pour les différentes étapes du déconfinement. F. De Smet déplore que les marchés soient toujours interdits, tandis que J.-M. Dedecker, par ailleurs bourgmestre de la commune côtière de Middelkerke, dit ne pas comprendre que l’interdiction de se rendre dans sa résidence secondaire ait été maintenue et annonce que, dans sa commune, la police ne verbalisera plus les propriétaires occupant leur seconde résidence  [105].

57 La gestion chaotique de la disponibilité des masques et des tests, ainsi qu’un certain flottement dans les décisions prises et leur annonce ont suscité de nombreuses critiques (cf. supra). En outre, assez tôt, il apparaît que les acteurs politiques ont une vision différente de l’avenir à moyen ou à long terme et des mesures qui devront être adoptées pour faire évoluer la société une fois la pandémie endiguée. En atteste, dès la première quinzaine d’avril, la série d’interviews des présidents ou représentants des six partis francophones représentés à la Chambre que publie La Libre Belgique [106]. Une ligne de fracture gauche-droite est assez perceptible. Ce n’est pas la seule. « En Belgique, Flamands et francophones réagissent la plupart du temps comme deux mondes politiques et médiatiques séparés ; il n’y avait pas de raison que la crise du coronavirus et sa gestion fassent exception à cette règle », estime peu après Pâques un hebdomadaire français  [107]. En effet, des différences d’appréciation entre francophones et néerlandophones sont perceptibles dans la gestion de la crise, s’exprimant notamment à travers la presse. Plusieurs figures de proue de la N-VA insistent en particulier sur des approches différentes, soulignant la volonté qu’auraient les Flamands de relancer l’économie ou de rouvrir les écoles face à des francophones moins volontaires voire laxistes face à la situation, sur la nécessité d’une nouvelle réforme de l’État favorisant des politiques plus différenciées encore, ou sur la mise « en quarantaine politique » de la majorité des Flamands (le gouvernement Wilmès II n’ayant pas reçu la confiance de la moitié des députés néerlandophones le 19 mars à la Chambre)  [108].

58 On peut supposer que ces tensions et divergences politiques rejaillissent dans les cénacles politiques mobilisés pour faire face à la pandémie, soit le CNS, le kern élargi, voire le Comité de concertation. En effet, si le détail des discussions dans ces instances n’est pas connu, les déclarations de certains acteurs après leurs réunions laissent toutefois entrevoir parfois des dissensions. Ainsi, fin avril, piqué au vif par des mandataires CDH soulignant qu’il participe à des gouvernements représentés au CNS, Écolo réplique, d’une part, qu’il ne dispose pas de représentants directs au CNS et n’est informé des décisions de cet organe que par voie de presse, et, d’autre part, que, s’il s’est ému de la reprise des activités économiques avant celle des contacts sociaux  [109], c’est aussi parce que, selon le parti vert, un accord politique était intervenu au sein du kern élargi, préalablement au CNS du 24 avril, afin d’autoriser à nouveau les réunions de famille  [110]. Il est à noter que ni Écolo ni l’intéressée n’ont relevé l’absence d’invitation faite à B. Trachte de participer aux réunions du CNS, en dépit de sa qualité relevée plus haut de ministre-présidente d’une entité fédérée, la COCOF  [111].

59 Au sein de la commission de la Chambre chargée du suivi de l’usage des pouvoirs spéciaux, dite commission Covid-19, les débats ne s’avèrent pas aussi intenses. Pourtant, pas moins de vingt arrêtés royaux de pouvoirs spéciaux sont promulgués entre le 30 mars, date de l’entrée en vigueur des pouvoirs spéciaux, et le 10 mai, soit environ à mi-parcours de la première période de trois mois pour laquelle les pouvoirs spéciaux ont été accordés au gouvernement fédéral. Les questions adressées en commission aux ministres responsables ne le sont souvent pas par les chefs de groupe. On observe par ailleurs que le questionnement qui vise à remettre en cause le bien-fondé des décisions prises peut venir tout aussi bien d’un parti de la majorité gouvernementale que d’une formation de l’opposition qui a accordé les pouvoirs spéciaux. C’est ainsi que Tim Vandenput (Open VLD) se montre aussi critique que Khalil Aouasti (PS) à propos des nouvelles sanctions administratives communales (SAC) prévues pour sanctionner les infractions aux mesures prises pour lutter contre le coronavirus  [112]. Toutefois, sur le même sujet, le chef du groupe MR, B. Piedboeuf, soutient le gouvernement  [113].

60 Par ailleurs, les arrêtés de pouvoirs spéciaux sont en principe approuvés en amont par les présidents des partis consultés au sein du kern élargi (cf. supra). Le vice-Premier ministre CD&V et ministre de la Justice, K. Geens, en témoigne devant la commission lors d’une discussion à propos de l’arrêté royal n° 15 relatif au sursis temporaire en faveur des entreprises des mesures d’exécution et autres mesures : « Les arrêtés royaux de pouvoirs spéciaux sont discutés au sein du gouvernement – ce qui n’est pas toujours évident – avant d’être approuvés par le cabinet restreint [le kern] et les présidents des dix partis. Ils sont ensuite soumis au Conseil d’État, qui doit formuler un avis, avant d’être publiés au Moniteur belge. Pour l’arrêté royal en question, on a perdu une semaine parce qu’il ne suscitait pas unanimement l’enthousiasme »  [114]. Dans ce mode de fonctionnement, les questions posées au sein de la commission Covid-19 par des députés dont le parti est représenté au sein du kern élargi peuvent paraître inutiles ou susceptibles de comporter le risque de traduire un manque de communication interne au sein des partis.

61 Si la situation des partis qui sont associés à l’exécutif au sein du kern élargi mais ne font pas partie du gouvernement lui-même et participent à son contrôle depuis les bancs de la Chambre (ou depuis leur domicile par écran interposé) peut paraître ambivalente, elle n’est pas nécessairement dénuée d’intérêt pour eux. Le juriste Lucien Rigaux fait observer que « cette composition du kern pose question du point de vue de la solidarité gouvernementale puisque des partis qui n’engagent pas leur responsabilité devant la Chambre participent au processus de décision. Il leur est donc plus simple de tenir un double discours au gouvernement, d’une part, et à la Chambre et dans les médias, d’autre part. Ils peuvent plus facilement critiquer une décision collégiale [dont] ils peuvent par la suite se dédouaner »  [115].

62 C’est plutôt en commission de la Santé et de l’Égalité des chances que les plus vives critiques sont essuyées par le gouvernement Wilmès II : la ministre M. De Block répond, par visioconférence, aux questions des députés à propos de l’organisation des tests, de l’approvisionnement en médicaments et en masques, et de la situation dans les hôpitaux et les maisons de repos. Son absence à une réunion et son manque de disponibilité sont également critiqués, y compris par le président de la commission, Thierry Warmoes (PTB), qui rappelle l’importance du contrôle parlementaire du travail du gouvernement, quelles que soient les circonstances  [116]. Le fait que la commission de la Santé soit présidée par un député de l’opposition (dont la formation ne participe en outre pas au kern élargi) contribue manifestement à la virulence des échanges en son sein.

63 Remarquons que la coexistence de la commission Covid-19 avec les commissions permanentes soulève des questions, qui n’ont pas été tranchées, quant à la répartition des compétences entre les commissions. Ainsi, le ministre des Finances, A. De Croo, s’étonne-t-il de devoir répondre aux mêmes questions en commission des Finances puis en commission Covid-19 à propos des mesures en matière de report des paiements de crédit hypothécaire  [117].

64 Les débats à la Chambre et les déclarations faites dans la presse, dont certains extraits ont été cités plus haut, attestent que la critique de l’action gouvernementale venant des bancs de l’opposition est nourrie tant par les partis qui n’ont pas été sollicités pour accorder leur confiance au gouvernement Wilmès II (le PTB et le VB) que par celui qui la lui a refusée tout en lui accordant les pouvoirs spéciaux (la N-VA) ou par ceux qui ont soutenu tant la motion de confiance que les deux lois d’habilitation sans pour autant intégrer le gouvernement (le PS, Écolo, le SP.A, Groen, le CDH et Défi). La position de ces six derniers partis est inédite : alors qu’ils ont accordé leur confiance au gouvernement, ils n’y comptent pas de représentant.

6. La crise sanitaire n’est pas finie mais la crise politique est à nouveau en vue

65 La Première ministre a d’emblée inscrit l’action de son gouvernement dans une temporalité limitée : « Je reviendrai au plus tard dans six mois pour redemander votre confiance »  [118]. À la mi-avril, S. Wilmès insiste elle-même sur la nécessité de former un exécutif fédéral reposant sur une majorité forte à la Chambre pour faire face à la crise économique une fois l’épreuve sanitaire franchie : « Je reste convaincue qu’un gouvernement disposant en son sein d’une majorité parlementaire est nécessaire. Cela reste ma conviction. Certes, cela nécessite des discussions préalables entre ceux qui privilégieront les taxes et les autres qui préféreront la flexibilité du travail. En tout cas, ma certitude est que la vérité se trouve souvent – sinon toujours – au milieu »  [119].

66 Il ne faut toutefois qu’un mois pour que le remplacement du gouvernement Wilmès II soit inscrit à l’ordre du jour. Le 20 avril, le président de la N-VA, B. De Wever, annonce sur les ondes de la chaîne publique flamande VRT qu’il est prêt à reprendre les négociations pour la formation d’un gouvernement fédéral « qui ne serait pas basé sur le PS et Écolo. (…) Pour moi, les discussions pour un nouveau gouvernement fédéral peuvent débuter en juin, au plus tard en septembre »  [120]. Le président du MR, parti le moins éloigné idéologiquement de la N-VA du côté francophone, rejette d’abord cette idée, estimant que la rentrée de septembre est une échéance « plus naturelle »  [121]. D’aucuns reprochent à G.-L. Bouchez, ce dont il se défend, de vouloir profiter le plus longtemps possible d’une situation dans laquelle le MR dispose de sept portefeuilles ministériels fédéraux, dont celui de Première ministre (outre la présidence du Sénat). Après quelques jours d’hésitation ou de dénégations, cependant, et avant même que la phase 1a du déconfinement soit entamée, le 4 mai, les responsables de la plupart des partis politiques et la Première ministre elle-même admettent que la question de la formation d’un nouveau gouvernement fédéral est désormais posée  [122].

67 Même le renouvellement pour trois mois des pouvoirs spéciaux accordés au gouvernement fédéral à partir du 30 mars, qui semblait presque aller de soi au début du confinement, est désormais tenu pour non avenu  [123]. Dès le 17 avril, la N-VA estime qu’il y a peu de raisons de prolonger les pouvoirs spéciaux  [124]. D’autres partis expriment la même opinion dans la quinzaine qui suit. Le 3 mai, dans le journal dominical De Zondag, S. Wilmès affirme s’en réjouir : « Ces pouvoirs spéciaux ne sont pas très démocratiques. S’ils ne sont pas nécessaires, ils ne devraient pas être prolongés. J’espère même que ce ne sera pas le cas. Cela signifierait que la situation n’est plus critique »  [125].

68 Constater qu’il faudra former un nouveau gouvernement fédéral, si possible avant le 19 septembre, date à laquelle l’engagement pris par S. Wilmès arrivera à échéance, ne signifie pas que la tâche sera simple. Rien n’indique en effet à ce stade que l’équation compliquée livrée par les résultats de l’élection fédérale du 26 mai 2019 trouvera une solution plus aisément qu’avant la crise du coronavirus. Au contraire, sans doute.

69 Des visions de société divergentes, conjuguées à une arithmétique électorale délicate et à des différences d’approche communautaires persistantes, sous-tendaient déjà le blocage du processus de formation du gouvernement fédéral avant la pandémie. Selon P. Magnette, le PS n’a « rien en commun » avec la N-VA. Et les priorités des écologistes étaient alors déjà différentes de celles des libéraux. Or les problèmes posés par la pandémie et ses conséquences humaines, économiques ou sociales ne semblent guère avoir rapproché les points de vue, et leur ampleur risque de compliquer encore un peu plus la tâche des futurs négociateurs.

70 La place à accorder dans le futur aux services publics et, plus largement, aux services à la collectivité et à leurs travailleurs, qui ont été mis au premier plan par la crise en cours, pourrait logiquement représenter une ligne de division entre formations de gauche et de droite. Le sort à réserver en particulier au monde médical et hospitalier pourrait complexifier ce rapport, une partie des médecins étant réputés traditionnellement plus sensibles aux thèses libérales ou conservatrices. Le resteront-ils toutefois si la ministre libérale M. De Block, en charge de la Santé publique, demeure inflexible à l’égard, par exemple, du financement des hôpitaux ?

71 Le financement dans la durée des aides accordées à différents secteurs et acteurs activera sans doute aussi des clivages classiques, comme la Première ministre n’a pas manqué de le souligner déjà de manière acerbe en se référant à « ceux qui privilégieront les taxes ». L’endettement de la Belgique s’accroîtra de manière significative : le taux d’endettement passera vraisemblablement de 98,6 % à 115 % du produit intérieur brut (PIB)  [126], sans toutefois nécessairement que le service de la dette s’en trouve grandement accru en raison de la faiblesse persistante des taux d’intérêt. Combien de temps la suspension des règles budgétaires rapidement décidée par les instances européennes se poursuivra-t-elle ? Quelles seront les mesures adoptées par la Commission européenne pour relancer l’économie et soulager les finances publiques ? Quels milieux ou secteurs seront mis à contribution par le futur gouvernement fédéral belge pour réduire le déficit escompté ?

72 La sélection des secteurs à aider et les conditions à assortir éventuellement à ces aides ont déjà mis en évidence des différences d’approche. Le vice-Premier ministre Open VLD et ministre des Finances, A. De Croo, a proposé d’exclure du bénéfice de l’avantage lié au versement anticipé les sociétés « qui effectuent un rachat de leurs actions ou parts propres ou une diminution de capital, (…) ou qui paient ou attribuent des dividendes, au cours de la période allant du 12 mars 2020 au dernier jour de la période imposable concernée »  [127]. Sous la pression du PTB, de Groen et du SP.A, le ministre s’est engagé à étendre cette exclusion aux sociétés ayant un lien avec des paradis fiscaux  [128]. Il est toutefois à noter que l’organisation non gouvernementale (ONG) Oxfam juge cette extension peu efficace et préconise des mesures de transparence fiscale plus poussées de la part des entreprises percevant des aides de l’État belge  [129].

73 Un éventuel soutien financier de l’État belge à la compagnie aérienne Brussels Airlines, réclamé par la maison-mère allemande Lufthansa à hauteur, selon les sources, de 290 ou de 390 millions d’euros, au moment où sa filiale belge s’apprête à annoncer la suppression d’un millier d’emplois, suscite des prises de position et un débat quant à son opportunité  [130] – à l’heure où la lutte contre le dérèglement climatique d’origine anthropique remet en question le modèle en vigueur dans le domaine du transport aérien  [131] – et à ses modalités – une telle aide pouvant être assortie ou non d’une prise de participation de l’État belge au sein de la compagnie belge, voire au sein du holding allemand.

74 Vu les caractéristiques de la Belgique, où même une piste cyclable est matière à polémique institutionnelle  [132], ces dossiers sont en outre toujours susceptibles de faire l’objet d’une approche communautaire.

75 En matière de santé, l’attribution des numéros INAMI permettant aux diplômés d’exercer la profession de médecin  [133] empoisonne depuis plus d’une décennie les relations entre francophones et néerlandophones, entre l’Autorité fédérale et la Communauté française, et entre socialistes francophones et libéraux flamands en particulier. Sous la législature fédérale 2014-2019, cette opposition s’est cristallisée entre la ministre fédérale de la Santé publique, M. De Block, et Jean-Claude Marcourt (PS), ministre de la Communauté française en charge de l’Enseignement supérieur. Cette situation semble avoir contribué à la pénurie de médecins généralistes en Wallonie, officiellement actée en 2016 par l’Office wallon de la formation professionnelle et de l’emploi (FOREM)  [134]. La crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 ravivera-t-elle ces tensions et rouvrira-t-elle les débats ?

76 La gestion des finances publiques risque également de susciter de vigoureuses oppositions communautaires. Les entités fédérées seront-elles autorisées à différer largement le retour à l’équilibre budgétaire – pour autant que celui-ci demeure un objectif ? On sait que la situation antérieure à la crise sanitaire présentait un contraste important entre un budget flamand à l’équilibre, ou au déficit limité, et une situation bien moins confortable dans les Régions wallonne et de Bruxelles-Capitale ou en Communauté française. Au niveau fédéral, les solutions qui seront mises en œuvre pour faire face aux difficultés seront également appréhendées sous l’angle de leur impact régional et non uniquement en fonction des catégories sociales ou des secteurs qu’elles toucheront.

77 Plus largement, la réorganisation même des structures institutionnelles suite à la crise sanitaire suscite déjà des prises de position. Dès le début du mois de mars, la coexistence de neuf ministres différents en charge de l’une ou l’autre compétence ayant trait à la santé (dont trois en Région bruxelloise et deux en Communauté française) interpelle. Le fait que la répartition des compétences entre les différents niveaux de pouvoir a engendré de graves problèmes dans la gestion de la crise sanitaire a été évoqué avec prudence par la ministre wallonne de la Santé, C. Morreale (PS)  [135]. Plusieurs voix se sont déjà élevées pour réclamer une remise à plat de cette situation. Le député wallon et bourgmestre de Huy, Christophe Collignon (PS), estime ainsi que le morcellement des compétences « est très compliqué à gérer et c’est un régionaliste convaincu qui vous le dit. On a dépecé l’État en fonction des demandes sans trop réfléchir à l’homogénéité des compétences. Il faudra rectifier cela, que l’on refédéralise certaines d’entre elles ou réalise le transfert complet aux Régions d’autres, le but étant d’être plus efficace. On n’évitera pas une nouvelle réforme de l’État »  [136].

78 Mais trouver un terrain d’entente ne sera une fois de plus pas simple. Tandis que le président du CD&V, J. Coens, ou le ministre-président flamand, J. Jambon (N-VA), plaident pour une défédéralisation plus poussée des compétences dans le domaine de la santé, les libéraux plaident plutôt pour une refédéralisation  [137]. Alors qu’il avait déjà exprimé de telles positions à l’été 2018, comme certains libéraux francophones  [138], A. De Croo (Open VLD) estime ainsi que « la régionalisation a désormais montré ses limites »  [139]. En matière de réformes institutionnelles, les positionnements des partis néerlandophones pourraient à l’avenir séparer l’Open VLD, le SP.A et Groen d’un bloc constitué de la N-VA, du CD&V et du VB. Il convient toutefois de rappeler que l’Open VLD, qui apparaît ainsi comme un parti charnière, est engagé dans un processus de renouvellement de sa présidence dont la conclusion a été retardée par la crise sanitaire. Le nouveau président du parti devrait être connu le 22 ou le 29 mai, suivant qu’un second tour s’avère ou non nécessaire pour départager les quatre candidats (Els Ampe, Egbert Lachaert, Stefaan Nuytten et Bart Tommelein). Le positionnement futur de l’Open VLD en matière de réformes institutionnelles dépendra donc partiellement de l’issue de ce scrutin interne.

7. La constitution d’un gouvernement fédéral majoritaire revient à l’agenda

79 On le voit, non seulement la crise sanitaire n’a mis que temporairement et de manière incomplète un terme à la crise politique ouverte en décembre 2018 et exacerbée au lendemain du scrutin multiple du 26 mai 2019. Mais ses effets humains, économiques et sociaux devraient en outre compliquer encore un peu plus la tâche des dirigeants des partis politiques susceptibles de rouvrir des négociations pour former un gouvernement fédéral à même de remplacer celui dirigé par S. Wilmès.

80 La forme que prendront ces négociations pose question. Le maintien de règles de distanciation physique (dites de « distanciation sociale ») ne facilite pas – voire interdit – des rencontres associant de nombreux participants (présidents de parti, techniciens, etc.). De plus, on ne sait qui prendra l’initiative de telles rencontres ou les coordonnera. Le gouvernement Wilmès II n’étant pas démissionnaire, le roi Philippe – resté assez discret depuis son unique et brève allocution diffusée le 16 mars – chargera-t-il une ou plusieurs personnes d’une mission d’information ou de formation, ou bien les partis politiques se passeront-ils de son intervention ? Devant le blocage de la situation après les élections du 26 mai 2019 et des choix du Palais qui n’avaient pas toujours unanimement convaincu, l’idée de se passer de l’intervention royale pour constituer le gouvernement fédéral conduirait à un fonctionnement semblable à ce qui se passe dans les entités fédérées.

81 La mise en place du kern élargi portait peut-être l’espoir pour certains acteurs de la création d’une dynamique positive entre les présidents de parti – dont certains, nouveaux venus, se connaissaient peu ou mal  [140] – qui aurait permis de déboucher sur des négociations en vue d’un nouveau gouvernement de type Vivaldi. Toutefois, l’ambiance au sein de ce cénacle ne semble pas permettre d’entretenir cette perspective. Selon les acteurs politiques interviewés par Le Soir, « le “kern + 10”, qui réunit le samedi les dix partis ayant voté les pouvoirs spéciaux, ne convainc plus grand monde et se réduit à la portion congrue »  [141].

82 Reprendre des négociations en vue de former un gouvernement fédéral n’est pas simple. Sera-t-il possible, sans choquer l’opinion publique, de les entamer alors que la pandémie de Covid-19 n’est pas encore enrayée et que le décompte macabre des victimes de la maladie se poursuit quotidiennement ? Comment les partis politiques éviteront-ils de donner l’impression que, alors que bien des secteurs sont encore confinés ou sont touchés de plein fouet par le confinement et ses conséquences économiques et sociales, ils reprennent « simplement » le fil de leurs discussions antérieures ? À l’inverse, comment mettre au mieux à profit les quelques mois restants avant que le mandat défini par S. Wilmès vienne à son terme ? Si la Première ministre a indiqué ne pas souhaiter s’impliquer personnellement dans de telles négociations, il n’en demeure pas moins que mener des négociations pour former un nouveau gouvernement alors que le gouvernement en place n’est pas démissionnaire est un exercice délicat.

83 L’issue des négociations constitue évidemment le point le plus compliqué et le plus imprévisible. À supposer que le déconfinement se déroule sans difficulté majeure, les tensions politiques revenant à l’avant-plan ne provoqueront-elles pas la chute du gouvernement Wilmès II avant même le mois de septembre ? Si tel est le cas, un nouvel exécutif sera-t-il apte à prendre la relève sans délai ? Inversement, que se passera-t-il si le gouvernement Wilmès II se maintient jusqu’en septembre mais que, à ce moment-là, la situation politique paraît toujours aussi bloquée ? La reconduction de ce gouvernement sera-t-elle envisagée ? Ou, au contraire, celui-ci sera-t-il amené à présenter sa démission au roi qui, s’il l’accepte, le chargerait d’expédier les affaires courantes, le ramenant ainsi à la situation du gouvernement Wilmès I ? Le calendrier va par ailleurs coïncider avec les vacances parlementaires, qui se tiendront normalement entre le 21 juillet et le deuxième mardi d’octobre. Si le gouvernement Wilmès II n’a pas été mis en minorité avant la fête nationale, la Chambre sera-t-elle convoquée dès la mi-septembre afin que S. Wilmès pose la question de confiance à ce moment-là, comme elle s’y est engagée ? Ou bien cette question sera-t-elle postposée à la rentrée parlementaire, fixée constitutionnellement au deuxième mardi d’octobre, c’est-à-dire en 2020 au 13 octobre ?

84 Pour tenter de résoudre la crise politique, la convocation d’élections fédérales anticipées  [142] a été évoquée très peu de temps après le scrutin du 26 mai 2019, puis à nouveau, avec une insistance croissante, durant l’hiver 2019-2020. L’arrivée de la pandémie de Covid-19 en Belgique a brutalement exclu un tel scénario. Prévues pour mai, les élections sociales ont quant à elles été reportées. Le 23 avril 2020, la Chambre a approuvé à l’unanimité une proposition de loi visant à réglementer la suspension de la procédure des élections sociales de l’année 2020 suite à la pandémie du coronavirus Covid-19  [143]. L’article 6 de ce texte charge le Roi, sur avis du Conseil national du travail (CNT), de fixer la nouvelle date des élections. Dans une déclaration du 17 mars consignée ensuite dans un avis unanime du CNT  [144], le Groupe des dix avait suggéré que le scrutin se tienne durant la période « du 16 au 29 novembre 2020, sous réserve de l’évolution de la situation sanitaire liée au coronavirus ».

85 La progressive maîtrise de la pandémie a ravivé la possibilité de convoquer un scrutin fédéral anticipé. Toutefois, l’évoquant le 30 avril puis à d’autres reprises, P. Magnette a aussitôt indiqué qu’elle ne pouvait être envisagée à l’heure actuelle  [145]. Mener une campagne électorale et les opérations de vote paraît difficile tant que le déconfinement n’est pas totalement achevé. Or une remontée du nombre d’infections lors d’une « seconde vague » reste possible mais imprévisible, celle-ci pouvant se produire, selon les hypothèses, en juin, à l’automne voire au début de l’année 2021. Dans ce contexte, tabler sur l’organisation d’un scrutin à relativement brève échéance demeure hasardeux. Ce constat ne va pas sans poser question quant aux conséquences de la situation actuelle sur le fonctionnement de la démocratie, venant s’ajouter au recours aux pouvoirs spéciaux et à l’utilisation de ceux-ci pour limiter temporairement une série de libertés fondamentales  [146].

86 De nouvelles élections fédérales pourraient être convoquées suivant deux modalités. Soit après une dissolution de la Chambre par le roi consécutive à la démission du gouvernement Wilmès II (démission faisant elle-même suite à la perte de sa majorité parlementaire par ce gouvernement). Soit, version la plus habituelle en Belgique depuis 1978, après l’adoption d’une déclaration de révision de la Constitution conjointement par la Chambre des représentants, le Sénat et le gouvernement fédéral. Cette seconde option implique l’organisation d’un débat suivi d’un vote à la Chambre et au Sénat et est donc plus lente. Elle implique également que se dégage une majorité à propos des dispositions à ouvrir à révision, ce qui constitue déjà en soi un moment d’affrontement politique délicat. Par ailleurs, la position du gouvernement Wilmès II est incertaine : très minoritaire, osera-t-il faire comme son prédécesseur, le gouvernement Michel II, et restreindre la liste des dispositions ouvertes à révision afin de prévenir le développement d’un vaste chantier institutionnel ?

87 En outre, si de nouvelles élections devaient être tenues, ce qui n’interviendrait vraisemblablement pas avant le mois de novembre 2020 et qui pourrait interférer avec le calendrier actuellement envisagé pour la tenue des élections sociales, le résultat en serait plus imprévisible que jamais. Comment l’action des trois partis qui composent actuellement le gouvernement fédéral (MR, CD&V et Open VLD) serait-elle jugée ? Sortiraient-ils indemnes, récompensés ou au contraire affaiblis du scrutin ? Par ailleurs, ces trois formations se situent au centre-droit. Or le contexte actuel peut laisser penser que les thématiques qui seraient au cœur de la campagne s’avéreraient globalement plus favorables aux partis de gauche. Ainsi, la crise sanitaire a illustré la nécessité de réinvestir dans les services publics, en particulier dans l’infrastructure hospitalière et la politique de santé. Elle laissera aussi dans un état de précarité ou de vulnérabilité beaucoup de travailleurs indépendants et de travailleurs salariés qui auront vu leurs revenus diminuer par suite de maladie ou de chômage temporaire. Selon toute vraisemblance, il y aura donc une forte attente de mesures sociales, traditionnellement portées par la gauche. À cet égard, les interpellations du chef du groupe PVDA-PTB à la Chambre, lors des séances plénières du jeudi, semblent rencontrer un large écho, en dépit de l’extension de facto du « cordon sanitaire » qui a été appliquée à ce parti au cours des dernières semaines (extension réclamée de longue date par le MR, jusque-là en vain). Par ailleurs, de nombreux acteurs ont réclamé que ce moment soit l’occasion de revoir un certain nombre d’orientations de base, notamment en matière environnementale, la mise en veilleuse d’une large part des activités économiques durant le confinement ayant permis d’observer les effets bénéfiques de cette diminution de la pollution. Cet aspect pourrait davantage bénéficier aux partis écologistes. Au contraire, les thématiques habituellement plus porteuses pour la droite, telles que la liberté d’entreprendre, la sécurité ou le contrôle de l’immigration, sont passées à l’arrière-plan durant la crise sanitaire.

88 À l’extrême droite, le VB, qui caracolait en tête du sondage réalisé une semaine avant le confinement  [147], ne paraît guère tirer parti de la situation de crise multiple, en dépit d’une communication intensive  [148]. On ne peut cependant exclure une évolution des événements, si par exemple des incidents survenaient, qui nourriraient des préoccupations à caractère sécuritaire. Par ailleurs, on sait qu’une situation de crise socio-économique peut être récupérée par l’extrême droite à son avantage, notamment en usant d’un discours aux allures sociales. Ainsi, le président du VB, Tom Van Grieken, a demandé au gouvernement Wilmès II, dès la constitution de celui-ci, que les indemnités pour chômage temporaire, relevées de 65 % à 70 % (d’un salaire plafonné) durant la période de crise, le soient nettement plus : « L’indemnité octroyée pour le chômage technique devrait être portée à 100 % du salaire brut afin d’éviter aux travailleurs de connaître des situations difficiles. La crise sanitaire que nous traversons actuellement ne doit pas se muer en une crise sociale »  [149].

89 On sait que, en Belgique, il existe, à côté de l’axe idéologique, un second axe structurant de la vie politique, qui est l’axe linguistique. Depuis une cinquantaine d’années, le conflit autour de cet axe a donné naissance à une succession de réformes de l’État. La longue crise politique ouverte en décembre 2018 et approfondie par le scrutin du 26 mai 2019 laissait entrevoir la perspective d’une septième réforme de l’État, même si le dossier institutionnel n’avait guère été présent dans les débats politiques avant et après les élections. Cette question constituerait-elle un enjeu de nouvelles élections fédérales ? La gestion de la crise sanitaire a montré la nécessité au minimum d’une meilleure coordination des politiques entre l’Autorité fédérale et les entités fédérées et, aux yeux de certains, celle d’une revalorisation de l’autorité du niveau de pouvoir fédéral (cf. supra). Le gouvernement fédéral lui-même, qui semblait être une institution en perte de vitesse avant cette crise sanitaire, a vu son rôle fortement revalorisé durant la crise, même s’il a aussi été exposé à de fortes critiques. Toutes les formations politiques ne voient évidemment pas cette évolution du même œil. La N-VA et le VB s’en méfient, et concluent à la nécessité pour la Flandre de disposer de plus d’autonomie pour développer sa propre politique, notamment en matière de relance économique ou en ce qui concerne la suspension et la reprise des cours dans les écoles  [150]. La réception de ce discours dépendra de la façon dont se poursuivra la sortie de crise.

90 De même, si la grande majorité de la population de toutes les régions du pays accepte aujourd’hui les mesures sévères de restriction de leurs libertés au nom de la protection de la santé, il n’est pas certain que cette adhésion continue dans la même proportion si les mesures de confinement persistent durant l’été, privant notamment ceux qui en ont les moyens de passer leurs vacances à l’étranger. Un débat autour de l’opportunité du maintien de ces restrictions pourrait se développer alors que, jusqu’à présent, les mesures imposées par le gouvernement fédéral avaient été globalement bien accueillies par la population  [151]. En cas de persistance de la menace du virus pendant un temps long, un nouveau clivage, à caractère plutôt culturel, pourrait s’installer, qui opposerait les tenants du principe de précaution et du maintien des restrictions d’activités, d’une part, aux partisans d’un retour à la vie normale, d’autre part. Dans cette hypothèse, l’opinion publique en faveur d’une restauration de la liberté de mouvement serait peut-être plus forte en Flandre, où la population jouit d’un niveau de vie plus élevé. Une évolution différente entre francophones et néerlandophones refléterait par ailleurs un contraste déjà mis en évidence entre le sud de l’Europe, qui est davantage enclin à considérer la vie humaine et la santé comme des valeurs supérieures, et le nord du continent, qui se veut plus pragmatique et est soucieux de maximiser le bien-être de l’ensemble de la population en évitant des mesures trop fortes de restriction des libertés et des activités économiques. En Belgique, une évolution divergente de part et d’autre de la frontière linguistique pourrait nourrir le soutien à l’autonomie accrue de la Flandre.

Conclusion

91 Le 18 mars, jour du début du confinement, le philosophe Vincent de Coorebyter évoque dans Le Soir la mise entre parenthèses de la crise politique fédérale par la crise sanitaire. En conclusion, il s’interroge sur la durabilité de cette mise en suspens : « On doit conclure logiquement au risque d’un retour de la tempête après le calme, c’est-à-dire après la période de soutien au gouvernement fédéral en matière économique et sanitaire. Mais le pire n’est pas toujours sûr. Il est possible que l’expérience d’une large collaboration autour d’une cause commune d’importance majeure retisse des liens de confiance entre des partis qui ont eu tant de mal à s’accorder depuis bientôt dix mois, et qui pourraient alors surmonter leurs divisions. Dans cette hypothèse, une crise en résoudrait une autre, ce qui serait typiquement belge. Mais ce n’est pas acquis »  [152].

92 Près de deux mois plus tard, force est de constater que si « le pire n’est pas toujours sûr », c’est la version pessimiste de ces scénarios qui semble avoir pris le dessus. La gestion de la pandémie avant et durant la phase de confinement laisse de nombreuses questions irrésolues à ce jour, et le soutien large apporté au nouveau gouvernement fédéral n’a, à aucun moment, empêché des critiques politiques de s’exprimer. La phase de déconfinement progressif entamée ensuite est encore plus l’occasion de tiraillements entre les partis politiques et entre les niveaux de pouvoir. En outre, les décisions politiques nécessaires à la sortie de la crise (sous toutes ses formes) seront de grande ampleur. Pour mettre en œuvre de tels changements, on pourrait estimer qu’un mandat clair de l’électeur soit nécessaire. Les enjeux d’aujourd’hui étant différents de ceux qui ont orienté les élections de l’an dernier, les résultats d’un nouveau scrutin pourraient s’avérer différents, eux aussi. Par ailleurs, tirer le bilan de la gestion de la crise « Covid-19 » passera très probablement par une commission d’enquête parlementaire. Si cette dernière était mise en place dès la fin de l’été, elle pourrait compliquer le calendrier électoral. Bien évidemment, elle peut également être décidée par la nouvelle Chambre. Si le politologue Régis Dandoy estime que « les personnes qui siégeront dans cette commission d’enquête ne peuvent pas être celles que nous avons élues en mai 2019 [car il] faut éviter que les mêmes individus soient juges et parties »  [153], une autre logique pourrait conduire à souhaiter que les personnes qui ont le mieux connu le déroulement de la crise soient associées à son évaluation, sachant que, de toute façon, dans le contexte des pouvoirs spéciaux, l’essentiel si pas la totalité de la responsabilité dans la gestion de la crise repose sur le gouvernement fédéral.

93 Si l’on ne peut exclure que de nouvelles élections se profilent dans un avenir relativement proche, cette éventualité demeure incertaine, tout comme ses résultats, notamment en raison de l’évolution de la pandémie et de ses conséquences.

94 Si la piste de nouvelles élections fédérales devait demeurer impraticable, pour des raisons politiques ou pour des motifs sanitaires, il resterait alors à envisager le remplacement du gouvernement Wilmès II selon une équation bien connue, basée sur les résultats du scrutin du 26 mai 2019 à la Chambre des représentants. Mais dont certains termes pourraient toutefois avoir été modifiés à la marge par la crise sanitaire. Certains signes ont montré que la N-VA pourrait émerger politiquement affaiblie de cette crise. Par ailleurs, la sortie de crise ne s’annonce ni proche ni totale ; un sentiment d’urgence pourrait amener les différentes formations politiques qui ont voté la confiance au gouvernement Wilmès II en mars à réitérer cette confiance en septembre, moyennant un élargissement de l’équipe gouvernementale. La possibilité d’un gouvernement Wilmès III élargi aux partis socialistes et écologistes n’est pas totalement exclue  [154]. Un tel gouvernement disposerait d’une majorité de 87 sièges sur 150. Toutefois, il ne disposerait pas d’une majorité au sein du groupe linguistique néerlandais. Pour l’Open VLD, ou même pour le CD&V, qui avait fermé la porte à un gouvernement fédéral sans la N-VA avant l’arrivée de la pandémie en Belgique, cette situation serait peut-être rendue plus acceptable par la perspective d’élargissement d’un exécutif existant plutôt que de mise en place d’un gouvernement fédéral entièrement nouveau. Rien n’indique encore toutefois que le CD&V soit effectivement prêt à lâcher la N-VA, l’un de ses partenaires au gouvernement flamand.

95 Inquiétudes sanitaires persistantes, attentes de la population difficiles à appréhender, incertitudes renforcées quant aux choix économiques et sociaux qui s’imposeront pour l’avenir, définition de priorités peut-être différentes au sud et au nord du pays lors de la sortie de la crise sanitaire, etc. Autant d’ingrédients réunis pour compliquer un peu plus, s’il le fallait encore, la situation politique au niveau fédéral belge.

Annexe 1. Composition initiale du gouvernement fédéral Wilmès II (17 mars 2020)

96 Tripartite : MR/CD&V/Open VLD

97 13 ministres
Sophie Wilmès, MR : Première ministre, chargée de Beliris et des Institutions culturelles fédérales

98 Koen Geens, CD&V : vice-Premier ministre, ministre de la Justice, chargé de la Régie des bâtiments, et ministre des Affaires européennes

99 Alexander De Croo, Open VLD : vice-Premier ministre, ministre des Finances, chargé de la Lutte contre la fraude fiscale, et ministre de la Coopération au développement

100 David Clarinval, MR : vice-Premier ministre, ministre du Budget et de la Fonction publique, chargé de la Loterie nationale et de la Politique scientifique

101 Pieter De Crem, CD&V : ministre de la Sécurité et de l’Intérieur, chargé du Commerce extérieur

102 Maggie De Block, Open VLD : ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, et de l’Asile et la Migration

103 Daniel Bacquelaine, MR : ministre des Pensions

104 Marie-Christine Marghem, MR : ministre de l’Énergie, de l’Environnement et du Développement durable

105 François Bellot, MR : ministre de la Mobilité, chargé de skeyes et de la Société nationale des chemins de fer belges

106 Denis Ducarme, MR : ministre des Classes moyennes, des Indépendants, des PME, de l’Agriculture et de l’Intégration sociale, chargé des Grandes villes

107 Philippe De Backer, Open VLD : ministre de l’Agenda numérique, des Télécommunications et de la Poste, chargé de la Simplification administrative, de la Lutte contre la fraude sociale, de la Protection de la vie privée et de la Mer du Nord

108 Nathalie Muylle, CD&V : ministre de l’Emploi, de l’Économie et des Consommateurs, chargée de la Lutte contre la pauvreté, de l’Égalité des chances et des Personnes handicapées

109 Philippe Goffin, MR : ministre des Affaires étrangères et de la Défense

Annexe 2. Déclaration de gouvernement lue par la Première ministre Sophie Wilmès devant la Chambre des représentants le 17 mars 2020

110 Ce matin, le gouvernement a prêté serment devant le roi. Ce fut un moment solennel et important, à la lumière de la gravité de la situation que nous vivons. Le mode de fonctionnement tout à fait inhabituel du Parlement ces jours-ci en témoigne d’ailleurs. Je me trouve aujourd’hui devant la Chambre, lucide, déterminée et entièrement dévouée à la mission qui s’impose à nous.

111 Le monde, l’Europe et la Belgique traversent actuellement une période sans précédent. Le Covid-19 constitue un grave péril pour la santé de la population. Il nécessite la prise de mesures inédites et exceptionnelles pour protéger tout un chacun. C’est pourquoi nous devons collaborer dans un esprit d’unité nationale, main dans la main.

112 La relation entre le Parlement et le gouvernement doit être forte et être forgée dans la confiance réciproque. Face à l’extrême urgence de la situation, il est devenu évident, pour une très grande majorité de partis de cette assemblée, qu’un gouvernement devait être investi dans les plus brefs délais.

113 Cette grande union est à la hauteur de la situation actuelle, situation que le personnel soignant vit en première ligne quand il accueille et prend en charge nos malades. Ces femmes et ces hommes restent mobilisés malgré les circonstances difficiles. Leur dévouement est remarquable et leur courage est exemplaire. Ils ne sont pas seuls.

114 Que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, nombre de nos concitoyens poursuivent leur travail quotidien pour garantir à la Belgique de continuer de fonctionner. Ils le font car ils sont investis du sens du devoir alors qu’eux-mêmes sont pour la plupart inquiets. Nous le savons et nous leur en sommes infiniment reconnaissants.

115 Ces personnes doivent nous inspirer au quotidien et nous insuffler un sentiment de responsabilité tant individuelle que collective. Elles doivent nous faire prendre conscience de la nécessité absolue de respecter les règles, de ne pas nous mettre en danger ni de contaminer les autres et, ainsi, de ne pas prendre le risque que nos hôpitaux atteignent un point de saturation. Nous sommes tous concernés par cette pandémie, sans distinction. Il nous incombe à présent de faire preuve de discernement, de sens civique et de solidarité.

116 L’évolution du Covid-19 dans notre pays est suivie jour après jour, heure après heure, par nos services, comme c’est le cas depuis plusieurs semaines. Notre première priorité reste de trouver les moyens d’assurer l’ensemble des ressources en personnel, pour que les hôpitaux puissent se concentrer sur la seule tâche de prise en charge des malades.

117 Le gouvernement et l’ensemble des autorités responsables de la chaîne de soins sont mobilisés également sur la question de la disponibilité du matériel médical et des dispositifs de soins.

118 Nous sommes en discussion permanente avec nos experts scientifiques et médicaux mais aussi avec le Centre de crise afin d’appréhender au mieux la situation et de prendre les bonnes décisions au bon moment.

119 À cet égard, je vous informe que, dès la fin de cette séance, le kern et moi-même nous réunirons avec les entités fédérées, les ministres et services compétents au sein du Conseil national de sécurité pour évaluer le dernier rapport du Risk Management Group et prendre rapidement les mesures additionnelles qui pourraient s’imposer afin de préserver la santé de tous nos citoyens.

120 Nous savons que les décisions prises ont également des conséquences socioéconomiques évidentes. C’est pourquoi nous avons déjà pris une première série de mesures et que nous travaillons à des mesures visant à limiter autant que possible l’impact pour l’ensemble des acteurs économiques. À cet effet, un groupe de monitoring macroéconomique a été créé, l’Economic Risk Management Group (ERMG). Ce groupe est chargé de mieux évaluer les conséquences économiques et sociales de la pandémie pour les entreprises et les personnes qui y travaillent.

121 La Belgique dispose d’atouts qu’elle devra utiliser. Je suis pleinement convaincue que chacun y contribuera.

122 Ce gouvernement en affaires courantes a pris directement la mesure de la situation en Belgique par rapport à la pandémie. Nous avons agi. Nos actions dans la lutte contre le virus seront d’autant plus fortes qu’elles seront largement soutenues. Notre première priorité a été de réunir les différents niveaux de pouvoir. C’est dans cet esprit que nous avons rapidement mis en place des réunions régulières du Comité de concertation. Nous avons également fait en sorte d’inclure les ministres-présidents au sein du Conseil national de sécurité. La concertation avec les entités fédérées a été importante dès le début des événements, et je salue ici les responsables des entités fédérées pour le rôle décisif qu’ils exercent dans la réponse de notre pays à la pandémie.

123 Nous avons aujourd’hui besoin d’une majorité parlementaire stable pour lutter ensemble contre ce virus. Mon équipe et moi-même sommes conscientes que l’accord obtenu dimanche dernier par une majorité des partis politiques de notre pays implique une lourde responsabilité.

124 Cette unité est basée sur un principe capital : donner, par un vote de confiance, au gouvernement actuel l’entière capacité pour gérer cette crise avec succès. Ce faisant, nous nous engageons non seulement à gérer la situation sanitaire durant cette crise du coronavirus et à maintenir l’ordre public, mais également à alléger les problèmes socioéconomiques des salariés et des indépendants.

125 Nous proposons de voter sur les douzièmes provisoires avec un seul amendement : une provision interdépartementale d’un milliard d’euros, laquelle sera consacrée exclusivement à la lutte contre le coronavirus. Il nous faudra aussi, pas à pas, préparer l’évolution de la situation économique et la relance économique dès que cette crise sera derrière nous.

126 Ces objectifs, nous pouvons les atteindre en recourant notamment aux pouvoirs spéciaux pour une période de six mois, avec une évaluation au bout de trois mois, sur le plan de la santé publique, des affaires sociales – dont le droit du travail –, de la sécurité et de l’économie.

127 Tous ces thèmes, nous les clarifierons et les affinerons avec les représentants respectifs des partis politiques avant qu’ils soient – comme il se doit – soumis au vote de la Chambre des représentants. La mise en œuvre des pouvoirs spéciaux devra en tout cas être contrôlée par la Chambre à la fin de cette période.

128 Étant donné qu’il s’agit d’une situation exceptionnelle, j’ai également proposé que le cabinet restreint se réunisse à intervalles réguliers et, chaque fois que cela s’avérera nécessaire, qu’il se réunisse de surcroît avec les représentants des partis qui se sont engagés, afin de garantir la transparence de l’exécution des pouvoirs spéciaux.

129 La confiance entre Parlement et gouvernement doit être confirmée ce jeudi par le biais de l’adoption formelle d’une motion. Cette adoption permettra au gouvernement d’exercer ses prérogatives en plein exercice. Nous exercerons cette confiance loyalement dans l’optique de la lutte contre le coronavirus et dans le cadre que je viens d’esquisser. De plus, je redemanderai la confiance du Parlement dans six mois au plus tard. Ainsi, nous ne dépasserons pas le périmètre des affaires courantes pour les sujets extérieurs à cette crise.

130 Notre but doit demeurer la formation à terme d’un gouvernement fédéral disposant d’une majorité parlementaire afin d’élaborer un projet global et positif pour notre pays.

131 Monsieur le président, chers collègues, l’heure est à l’unité et au rassemblement. Ce rassemblement dépasse les rangs de cette assemblée. C’est tout un pays qui doit s’allier dans cette épreuve. L’union nationale ne se décrète pas un dimanche soir, elle se construit chaque jour et chaque heure en ces temps difficiles qui s’annoncent. Les formations politiques doivent se montrer dignes de l’accord conclu, en optant systématiquement pour le dialogue, des approches constructives et le sens de la mesure des événements.

132 Vous pourrez compter à tout moment sur l’attention de ce gouvernement envers toutes les idées de réforme, toutes les mesures et toutes les propositions constructives destinées à contribuer à cet effort national. Ensemble, nous devons désormais prouver chaque jour que nous dépassons les querelles idéologiques stériles dans lesquelles nous nous sommes trop perdus ces derniers mois.

133 Comme je vous l’ai dit à l’entame de cette déclaration, je me tiens devant vous, consciente du contexte qui m’y amène, mais aussi plus déterminée que jamais, avec un objectif simple et unique : protéger la santé de notre population. Ce n’est pas un point de programme, c’est notre devoir le plus fondamental. Nous le remplirons, je le souhaite, avec la confiance de ce Parlement.

134 Source : Chambre des représentants, Compte rendu analytique, n° 29, 17 mars 2020, p. 1-5.

Notes

  • [1]
    In fine, les gouvernements Michel II et Wilmès I seront restés au total 451 jours d’affilée en affaires courantes, à savoir du 21 décembre 2018 au 17 mars 2020 inclus, contre 588 jours pour le gouvernement Leterme II (CD&V/MR/PS/Open VLD/CDH), qui avait été dans une telle position du 26 avril 2010 au 5 décembre 2011 inclus (cf. S. Govaert, « Les négociations communautaires et la formation du gouvernement Di Rupo (juin 2010 - décembre 2011) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2144-2145, 2012).
  • [2]
    Cf. F. Bouhon, A. Jousten, X. Miny, E. Slautsky, « L’État belge face à la pandémie de Covid-19 : esquisse d’un régime d’exception », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2446, 2020.
  • [3]
    Cf. B. Biard, P. Blaise, J. Faniel, C. Istasse, C. Sägesser, « Les résultats des élections fédérales et européennes du 26 mai 2019 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2433-2434, 2019.
  • [4]
    On a baptisé « Vivaldi » une formule de coalition qui réunirait des partis appartenant à quatre familles politiques différentes, symbolisés dès lors par quatre couleurs (rouge pour les socialistes, bleu pour les libéraux, vert pour les écologistes et orange pour les partis de tradition sociale-chrétienne), évoquant Les quatre saisons du compositeur italien. Vu le nombre de sièges dont dispose chacun des partis impliqués, on a nommé « petite Vivaldi » la coalition formée des socialistes (PS et SP.A), des libéraux (MR et Open VLD), des écologistes (Écolo et Groen) et du CDH, et « Vivaldi » (tout court) celle formée par les six premiers partis et le CD&V, avec ou sans le CDH en sus.
  • [5]
    Palais royal, Communiqué, 31 janvier 2020.
  • [6]
    Dans l’histoire de la formation des gouvernements belges, S. Laruelle est la première femme à se voir confier une mission royale.
  • [7]
    RTL indique le 13 février que « plusieurs partis politiques nous ont confié se préparer secrètement à de nouvelles élections ». Le 17 février, le président de la N-VA, Bart De Wever, estime que « les élections sont de plus en plus inévitables ».
  • [8]
    Il est à noter que, tout comme la ministre M. De Block, C. Fonck est docteure en médecine.
  • [9]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 21, 23 janvier 2020, p. 29-31. La question de C. Fonck se termine ainsi : « Madame la ministre, de quelle manière informez-vous les soignants ? Quelle est la stratégie de contrôle qui a été mise en place au niveau du pays pour dépister le plus tôt possible des infections potentielles, que ce soit aux points d’entrée (aéroports, ports, etc.), mais également au niveau des soignants ? Une réunion de l’OMS s’est tenue hier à Genève. La Belgique y était-elle représentée ? Quelles ont été les conclusions qui ont été tirées à cette occasion ? Quelle est la coordination internationale, mais également européenne – cette dernière est indispensable – mise en place ? »
  • [10]
    Une urgence de santé publique de portée internationale est définie par l’OMS comme « un événement extraordinaire dont il est déterminé qu’il constitue un risque pour la santé publique dans d’autres États en raison du risque de propagation internationale de maladies et qu’il peut requérir une action internationale coordonnée ».
  • [11]
    Chambre des représentants, Commission de la Santé et de l’Égalité des Chances, Compte rendu intégral, n° 121, 3 mars 2020, p. 40.
  • [12]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 26, 5 mars 2020, p. 22 : « Nommons les choses telles qu’elles sont. Il s’agit d’une grippe nouvelle mais légère qui poursuivra son chemin sur notre planète avant de devenir une grippe saisonnière comme nous en avons déjà connu. Je vous demande donc de la placer dans cette perspective. Protégez les personnes vulnérables. Les enfants y semblent moins sensibles. Les femmes enceintes semblent vulnérables, et surtout les personnes âgées et celles atteintes de maladie chronique. Considérons les choses uniquement de cette manière » (« Laten wij de zaken echter benoemen zoals ze zijn. Het gaat om een nieuwe, maar milde griep die verder zal reizen over de aardbol en die vervolgens een seizoensgriep zal worden, zoals we er net ook een hebben gehad. Ik vraag u dus om het in perspectief te plaatsen. Bescherm de kwetsbare mensen. Kinderen lijken minder gevoelig te zijn. Zwangeren zijn ook kwetsbaar, maar vooral mensen op leeftijd en mensen met chronische aandoeningen zijn kwetsbaar. Laten wij de zaken enigszins op die manier bekijken »).
  • [13]
    « Négociations fédérales : le Roi insiste sur l’urgence, les partis temporisent », Le Soir (en ligne), 9 mars 2020, www.lesoir.be.
  • [14]
    « Coronavirus : les chiffres de contaminations sont “sous-évalués”, selon un expert de la KU Leuven », Le Soir (en ligne), 10 mars 2020, www.lesoir.be.
  • [15]
    « Coronavirus en Belgique : les rassemblements couverts de plus de 1 000 personnes déconseillés, les écoles restent ouvertes », RTBF (en ligne), 10 mars 2020, www.rtbf.be.
  • [16]
    « Bruxelles, Wallonie, Flandre : voici les mesures prises pour endiguer l’épidémie de coronavirus », RTBF (en ligne), 10 mars 2020, www.rtbf.be.
  • [17]
    Dans sa forme actuelle, le CNS est un comité mis en place au sein du gouvernement fédéral en 2015 dans le contexte de la menace terroriste. Il comprend le Premier ministre, les ministres fédéraux en charge de la Justice, de la Défense, de l’Intérieur et des Affaires étrangères, ainsi que les vice-Premiers ministres titulaires d’un autre portefeuille. D’autres ministres fédéraux et des hauts fonctionnaires peuvent être conviés à ses réunions en fonction de l’ordre du jour. Durant la crise sanitaire actuelle, et sans que l’arrêté royal du 28 janvier 2015 qui a créé cet organe ne le prévoie, le CNS est élargi de facto aux ministres-présidents des différentes Régions et Communautés du pays. Cf. « Conseil national de sécurité », CRISP, www.vocabulairepolitique.be.
  • [18]
    « PS et N-VA discutent d’un gouvernement d’urgence », L’Écho (en ligne), 13 mars 2020, www.lecho.be.
  • [19]
    « Le PS ne veut pas changer de Premier ministre en pleine crise », 7sur7 (en ligne), 14 mars 2020, www.7sur7.be.
  • [20]
    « Négociations en cours : Sophie Wilmès resterait la Première ministre d’un gouvernement PS/N-VA », La Libre Belgique (en ligne), 14 mars 2020, www.lalibre.be.
  • [21]
    « Coronavirus : PS et N-VA négocient pour la formation d’un gouvernement d’urgence », Le Soir, 15 mars 2020.
  • [22]
    « Coronavirus : Paul Magnette dit non au gouvernement d’urgence avec la N-VA », Le Soir (en ligne), 15 mars 2020, www.lesoir.be.
  • [23]
    Comme en atteste l’interview du président du SP.A, Conner Rousseau, parue une semaine plus tard dans l’édition du journal De Standaard du 21 mars 2020.
  • [24]
    Durant quelques heures, le SP.A a envisagé d’adopter la même attitude.
  • [25]
    Arrêté royal du 17 mars 2020, Moniteur belge, 18 mars 2020.
  • [26]
    Afin de permettre à la Chambre de fonctionner en dépit de la situation sanitaire, son président, P. Dewael, dépose le 19 mars une proposition de modification du règlement (Chambre des représentants, Proposition modifiant le règlement de la Chambre des représentants [en vue d’]adapter la manière dont la Chambre délibère à la suite d’une situation grave et exceptionnelle qui menace la santé publique et qui empêche les membres de la Chambre d’être physiquement présents, n° 1100/1, 19 mars 2020) qui organise le vote électronique à distance. Cette modification est adoptée à l’unanimité lors de la séance plénière du 26 mars.
  • [27]
    Chambre des représentants, Compte rendu analytique, n° 29, 17 mars 2020, p. 4.
  • [28]
    Ibidem, p. 5.
  • [29]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 31, 19 mars 2020, p. 2.
  • [30]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 30, 19 mars 2020, p. 12.
  • [31]
    Ibidem, p. 2 : « Que nous devions nous trouver aujourd’hui à cette tribune avec cet agenda et que nous ne soyons pas en train de traiter du coronavirus me paraît surréaliste et incompréhensible. (…) La question d’accorder la confiance à Wilmès II offre un vif contraste avec le fait que ce projet a été conçu sur la méfiance à l’égard de la N-VA par quelques partis francophones, comme cela est apparu ce week-end. (…) Mardi soir, des décisions importantes ont été approuvées pour lutter contre le coronavirus. S’agirait-il donc d’une décision pour laquelle le statut d’affaires courantes aurait représenté un obstacle ? La réponse est non » (« Dat wij hier vandaag met deze agenda op de tribune moeten staan en dat we het hier niet over corona gaan hebben, lijkt mij surrealistisch en onbegrijpelijk. (…) De vraag om het vertrouwen uit te spreken in Wilmès II in schril contrast staat met het feit dat dit project verwekt werd uit wantrouwen tegen de N-VA bij enkele Franstalige partijen, zoals dit weekend is gebleken. (…) Dinsdagavond werden belangrijke beslissingen uitgevaardigd ter bestrijding van het coronabeest. Zat daar een beslissing tussen waarvoor het statuut van lopende zaken een hinderpaal zou zijn geweest? Het antwoord is neen »).
  • [32]
    L’arrêté ministériel du 13 mars 2020 portant des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus Covid-19 (Moniteur belge, 14 mars 2020) a été remplacé par des versions modifiées du même texte à deux reprises : le 18 mars et le 23 mars. L’arrêté du 23 mars, premier à être pris après le vote de confiance, ne sera plus remplacé mais modifié (à ce jour, le 24 mars, le 3 avril, le 17 avril, le 30 avril et le 8 mai ; tous ces arrêtés modifiés ont été publiés au Moniteur belge le jour même de leur adoption).
  • [33]
    Rappelons que la technique des pouvoirs spéciaux consiste à confier au gouvernement des prérogatives qui sont en principe de la compétence du parlement (cf. « Pouvoirs spéciaux », CRISP, www.vocabulairepolitique.be).
  • [34]
    Loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (I), Moniteur belge, 30 mars 2020 ; Loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (II). Moniteur belge, 30 mars 2020.
  • [35]
    Chambre des représentants, Proposition de loi habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19, déposée par Kristof Calvo (Groen), Peter De Roover (N-VA), François De Smet (Défi), Catherine Fonck (CDH), Georges Gilkinet (Écolo), Meryame Kitir (SP.A), Ahmed Laaouej (PS), Egbert Lachaert (Open VLD), Benoît Piedboeuf (MR) et Servais Verherstraeten (CD&V), n° 1104/1, 21 mars 2020. La proposition a été scindée suite à une observation du Conseil d’État (cf. F. Bouhon, A. Jousten, X. Miny, E. Slautsky, « L’État belge face à la pandémie de Covid-19 : esquisse d’un régime d’exception », op. cit., p. 20-22).
  • [36]
    Article 5 de la loi du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (II).
  • [37]
    Articles 3 et 4 de la même loi du 27 mars 2020.
  • [38]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 33, 26 mars 2020, p. 70.
  • [39]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 30, 19 mars 2020, p. 13 : « Madame la Première ministre, comme je vous l’ai dit, nous ne pourrons pas vous accorder une confiance aveugle, mais nous serons plus nuancés s’agissant des pouvoirs spéciaux. Vous allez les demander. Il nous paraît clair qu’il convient d’accélérer certaines procédures. Quand on parle de la nécessité d’un permis de bâtir pour construire un hôpital, il est évident qu’il faudra le donner. (…) Bien sûr, il faut pouvoir prendre des mesures en urgence. Cependant, je regretterais que le débat dans ce Parlement ne puisse pas continuer. (…) C’est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons au sujet des pouvoirs spéciaux ».
  • [40]
    Chambre des représentants, Compte rendu analytique, n° 33, 26 mars 2020, p. 47-48.
  • [41]
    F. Bouhon, A. Jousten, X. Miny, E. Slautsky, « L’État belge face à la pandémie de Covid-19 : esquisse d’un régime d’exception », op. cit., p. 20-21.
  • [42]
    « Coronavirus en Belgique : la N-VA de Bart De Wever réticente à appliquer les recommandations du Fédéral », Le Soir (en ligne), 10 mars 2020, www.lesoir.be.
  • [43]
    « Coronavirus : la N-VA réclame un couvre-feu et une interdiction de rassemblement », RTBF (en ligne), 16 mars 2020, www.rtbf.be.
  • [44]
    Seul un eurodéputé a voté contre (un parlementaire d’extrême droite tchèque) et quatre se sont abstenus (un parlementaire d’extrême droite estonien et les trois membres de la N-VA : l’ancien ministre-président flamand Geert Bourgeois, Assita Kanko et l’ancien ministre fédéral Johan Van Overtveldt). En revanche, les trois eurodéputés du VB ont soutenu le texte.
  • [45]
    Résolution législative du Parlement européen n° C9-0083/2020 du 26 mars 2020 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n° 1303/2013, le règlement (UE) n° 1301/2013 et le règlement (UE) n° 508/2014 en ce qui concerne des mesures spécifiques visant à mobiliser des investissements dans les systèmes de soins de santé des États membres et dans d’autres secteurs de leur économie en réaction à l’épidémie de Covid-19 (Initiative d’investissement en réaction au coronavirus).
  • [46]
    Sur les quelque 37 millions d’euros revenant à la Belgique (pour un total de 37 milliards d’euros à l’échelle des 27 États membres de l’Union européenne), environ 16 millions iront à la Wallonie, 4,3 millions à la Région bruxelloise, 9,6 millions à la Communauté française et 6,5 millions à la Flandre (« Soutien financier européen contre le coronavirus : à cause de la N-VA, la Belgique s’abstient », RTBF (en ligne), 31 mars 2020, www.rtbf.be).
  • [47]
    Soit Koen Geens (CD&V), par ailleurs ministre de la Justice, Alexander De Croo (Open VLD), en charge des Finances, et David Clarinval (MR), chargé notamment du Budget.
  • [48]
    Pieter De Crem (CD&V).
  • [49]
    Philippe Goffin (MR).
  • [50]
    Il est à noter que la ministre-présidente de la Commission communautaire française (COCOF), Barbara Trachte (Écolo), n’est pas conviée à ces réunions bien qu’elle dirige, elle aussi, l’organe exécutif d’une entité fédérée dotée de compétences en matière de santé.
  • [51]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 33, 26 mars 2020, p. 68.
  • [52]
    Le Comité de concertation est composé de douze représentants des différents gouvernements du pays (le gouvernement fédéral et les gouvernements régionaux et communautaires), dans le respect d’une double parité : parité linguistique (six membres francophones et six membres néerlandophones) et parité entre membres désignés par l’Autorité fédérale et membres désignés par les entités fédérées (six membres au total de part et d’autre). Plus précisément, le Comité de concertation est composé comme suit : le Premier ministre (qui préside les réunions) et cinq autres membres du gouvernement fédéral désignés par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres (à savoir, selon l’appartenance linguistique du Premier ministre, deux ministres francophones et trois ministres néerlandophones ou l’inverse) ; le ministre-président du gouvernement wallon ; deux membres du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale (le ministre-président et un ministre de l’autre régime linguistique) ; le ministre-président du gouvernement de la Communauté française ; deux membres du gouvernement flamand (dont le ministre-président). Quant au gouvernement de la Communauté germanophone, la loi ne lui accorde pas de représentant au Comité de concertation, hormis dans le cas d’un conflit d’intérêts auquel est partie la Communauté germanophone ; ce gouvernement est alors représenté par son ministre-président, avec voix délibérative. Dans les faits cependant, le ministre-président de la Communauté germanophone est à chaque fois invité et présent aux réunions du Comité de concertation (tout en ne disposant effectivement que de son droit de vote clairement circonscrit). Cf. « Comité de concertation », CRISP, www.vocabulairepolitique.be.
  • [53]
    Article 61 de la loi spéciale du 6 janvier relative à la sixième réforme de l’État (Moniteur belge, 31 janvier 2014).
  • [54]
    Article 31/1 de la loi ordinaire de réformes institutionnelles du 9 août 1980 (Moniteur belge, 15 août 1980).
  • [55]
    Cf. l’opinion du constitutionnaliste Marc Uyttendaele : « Marc Uyttendaele : “Covid-19 : les Régions otages du gouvernement fédéral” », Le Soir (en ligne), 28 avril 2020, www.lesoir.be.
  • [56]
    « Coronavirus crisis brings fragmented Brussels together », Financial Times (en ligne), 25 mars 2020, www.ft.com.
  • [57]
    « Quand Maggie De Block faisait détruire six millions de masques contre le coronavirus... sans les remplacer », Le Vif/L’Express (en ligne), 23 mars 2020, www.levif.be.
  • [58]
    RTL-TVi, Reporters, 25 avril 2020.
  • [59]
    SPF Chancellerie du Premier ministre, 22 mars 2020, www.premier.be.
  • [60]
    « Pourquoi Maggie De Block a-t-elle renoncé à 3 millions de masques FFP2 ? », Paris Match Belgique (en ligne), 28 mars 2020, www.parismatch.be.
  • [61]
    « Commande avortée de 5 millions de masques : que s’est-il réellement passé ? », RTBF (en ligne), 30 mars 2020, www.rtbf.be.
  • [62]
    Le 29 avril 2020, le quotidien Le Soir titre en une : « 40 % des masques FFP2 testés sont non conformes ».
  • [63]
    Belga, 22 avril 2020.
  • [64]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 34, 2 avril 2020, p. 5.
  • [65]
    VTM Nieuws, 25 avril 2020.
  • [66]
    Cf., en particulier, « Zappés par De Backer, les labos agréés dénoncent une faute stratégique », Le Soir, 28 avril 2020 ; RTBF, Investigations, 6 mai 2020.
  • [67]
    « Coronavirus : des tests systématiques réclamés à la Première ministre par deux chirurgiens belges », RTBF (en ligne), 22 mars 2020, www.rtbf.be.
  • [68]
    « Coronavirus : pourquoi la Belgique avait si peu de tests de dépistage au début de l’épidémie ? », RTBF (en ligne), 22 avril 2020, www.rtbf.be.
  • [69]
    « Coronavirus et effets en cascade dus au manque de matériel dans les homes : les langues se délient », RTBF (en ligne), 9 mai 2020, www.rtbf.be.
  • [70]
    « L’autorisation des visites dans les homes, histoire d’une gaffe », Le Soir, 17 avril 2020.
  • [71]
    « Minister Beke schiet bezoekrecht rusthuizen af », De Tijd (en ligne), 15 avril 2020, www.tijd.be ; « Entre interdiction et concertation, les familles devront encore patiente », Le Soir, 17 avril 2020.
  • [72]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 36, 16 avril 2020.
  • [73]
    « Visites dans les maisons de repos : elles restent interdites pour le moment », RTBF (en ligne), 17 avril 2020, www.rtbf.be.
  • [74]
    « Hallo Premier ? Où êtes-vous ? », Le Soir, 16 avril 2020.
  • [75]
    « “Face à la crise, on a l’impression que le gouvernement ne sait pas où il va” », La Libre Belgique (en ligne), 1er avril 2020, www.lalibre.be.
  • [76]
    « Les syndicats du personnel de soin “consternés” par l’attitude de la ministre Maggie De Block », RTBF (en ligne), 22 mars 2020, www.rtbf.be.
  • [77]
    « Coronavirus en Belgique : De Block et les arrêtés qui passent mal auprès du personnel soignant », RTBF (en ligne), 6 mai 2020, www.rtbf.be ; « Fronde contre Maggie De Block. Le secteur infirmier se joint au mécontentement syndical », La Libre Belgique, 8 mai 2020.
  • [78]
    « L’incroyable saga des masques méritera une commission d’enquête », Le Vif/L’Express (en ligne), 23 mars 2020, www.levif.be.
  • [79]
    « Coronavirus : pour Catherine Fonck (CDH), “il y aura une commission d’enquête” », Le Soir (en ligne), 31 mars 2020, www.lesoir.be.
  • [80]
    « Le président du CD&V plaide pour une commission d’enquête parlementaire sur la crise du coronavirus », RTBF (en ligne), 11 avril 2020, www.rtbf.be.
  • [81]
    « Pour le président du MR bruxellois, “Maggie De Block devra rendre des comptes” », RTBF (en ligne), 26 avril 2020, www.rtbf.be.
  • [82]
    Face à la multiplication de ces groupes, le commissaire au Plan, Philippe Donnay, estime même que des doublons ont été créés (« “Il y a des groupes de travail à foison. Et donc des doublons” », La Libre Belgique, 27 avril 2020).
  • [83]
    Composé de représentants des autorités sanitaires de l’Autorité fédérale et des entités fédérées, le RMG décide des mesures à prendre en matière de protection de la santé publique. Pour ce faire, il se base sur les avis émis par le Risk Assessment Group (RAG), qui est composé des autorités sanitaires, de médecins épidémiologistes de l’institut scientifique fédéral Sciensano et d’experts, et qui analyse les risques pour la population sur la base de données épidémiologiques et sanitaires.
  • [84]
    SPF Chancellerie du Premier ministre, 18 mars 2020, www.premier.be.
  • [85]
    Le document que nous avons pu consulter renseigne 7 personnes différentes déléguées par la Fédération des entreprises de Belgique (FEB), 7 par l’Union wallonne des entreprises (UWE), 6 par le Vlaams Netwerk van Ondernemingen (VOKA), 1 par le Brussels Enterprises Commerce and Industry (BECI, présent uniquement dans le groupe « Communication »), 2 par le Boerenbond, 10 d’organisations de classes moyennes (4 de l’Union des classes moyennes - UCM, 4 de l’Unie van Zelfstandige Ondernemers - UNIZO et 2 du Syndicat neutre pour indépendants - SNI) et les 3 restants de fédérations sectorielles (la Fédération belge du secteur financier - Febelfin et l’Union des entreprises à profit social - Unisoc).
  • [86]
    Dont 4 ne sont membres que du groupe « Communication », tandis que l’on ne trouve de représentant syndical ni dans le groupe « Prévisions macroéconomiques et scénarios », ni dans le groupe « Implications budgétaires : vue globale et chiffrage des mesures », dans lesquels on trouve par contre des représentants du VOKA et de l’UNIZO.
  • [87]
    On y retrouve, sous la présidence de la professeure Erika Vlieghe (chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital universitaire d’Anvers), Emmanuel André (professeur de microbiologie clinique à la KU Leuven et porte-parole interfédéral pour la crise Covid-19), Inge Bernaerts (juriste, ex-chef de cabinet de Marianne Thyssen), Mathias Dewatripont (économiste, ULB), Marius Gilbert (épidémiologiste, ULB), Niel Hens (biostatisticien, universités d’Anvers et de Hasselt), Céline Nieuwenhuys (secrétaire générale de la Fédération des services sociaux - FDSS), Johnny Thijs (administrateur de sociétés, président du conseil d’administration d’Engie Electrabel), Marc Van Ranst (virologue, KU Leuven) et Pierre Wunsch (gouverneur de la BNB). La composition du groupe reflète un équilibre entre francophones et néerlandophones. Cf. SPF Chancellerie du Premier ministre, 6 avril 2020, www.premier.be.
  • [88]
    Arrêté ministériel du 18 mars 2020 portant des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus Covid-19, Moniteur belge, 18 mars 2020.
  • [89]
    Arrêté de pouvoirs spéciaux n° 14 du 27 avril 2020 pris en exécution de l’article 5, § 1, 5°, de la loi du 27 mars 2020 accordant des pouvoirs au Roi afin de prendre des mesures dans la lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19 (II) visant à garantir la bonne organisation du travail dans les secteurs critiques, Moniteur belge, 28 avril 2020.
  • [90]
    Sur ce déséquilibre entre les interlocuteurs sociaux, cf. I. Gracos, « Grèves et conflictualité sociale en 2014 », « Grèves et conflictualité sociale en 2015 », « Grèves et conflictualité sociale en 2016 », « Grèves et conflictualité sociale en 2017 » et « Grèves et conflictualité sociale en 2018 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2246-2247 (2015), n° 2291-2292 (2016), n° 2341-2342 (2017), n° 2383-2384 (2018), et n° 2422-2423 et 2424-2425 (2019).
  • [91]
    « Déconfinement : voici les recommandations des experts, étape par étape », Le Soir (en ligne), 22 avril 2020, www.lesoir.be.
  • [92]
    Cf. par exemple les portraits de la Première ministre belge dressés dans De Standaard du 21 mars 2020 ou dans le quotidien français Les Échos du 23 avril 2020.
  • [93]
    « La communication de Sophie Wilmès, un faux pas en ouverture du déconfinement », Le Soir, 25 avril 2020.
  • [94]
    « Déconfinement : voici les sujets qui fâchent », Le Vif/L’Express (en ligne), 27 avril 2020, www.levif.be.
  • [95]
    « Jambon: “Laat ons Moederdag een week uitstellen” », De Standaard, 25 avril 2020.
  • [96]
    UNIZO, « UNIZO schaart zich achter voorstel minister-president Jan Jambon om moederdag een week op te schuiven », Communiqué de presse, 25 avril 2020.
  • [97]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 38, 30 avril 2020, p. 2.
  • [98]
    Ibidem, p. 4.
  • [99]
    Ibidem, p. 8.
  • [100]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 38, 30 avril 2020, p. 7.
  • [101]
    « Pour Bart De Wever, “les discussions pour un nouveau gouvernement fédéral peuvent débuter en juin” », Le Soir (en ligne), 20 avril 2020, www.lesoir.be.
  • [102]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 38, 30 avril 2020, p. 13 : « Enkele weken geleden heeft een ruime meerderheid hier het vertrouwen in [de] regering [Wilmès II] uitgesproken. Die idylle was kort, want als dit vertrouwen is, als ik deze vragen hoor, dan vraag ik mij af hoe wantrouwen er dan wel zou uitzien ».
  • [103]
    Arrêté ministériel du 8 mai 2020 modifiant l’arrêté ministériel du 23 mars 2020 portant des mesures d’urgence pour limiter la propagation du coronavirus Covid-19, Moniteur belge, 8 mai 2020.
  • [104]
    « Le mea culpa de Sophie Wilmès sur la communication lors du précédent CNS », Le Vif/L’Express (en ligne), 6 mai 2020, www.levif.be.
  • [105]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 39, 7 mai 2020.
  • [106]
    Interviews de G.-L. Bouchez (MR), F. De Smet (Défi), P. Magnette (PS), R. Maouane et J.-M. Nollet (Écolo), M. Prévot (CDH) et R. Hedebouw (PTB), publiées du 7 au 14 avril 2020 inclus.
  • [107]
    « En Belgique, le déconfinement s’annonce chaotique », Courrier international, 16 avril 2020.
  • [108]
    Leo. Magazine van de N-VA, n° 3, 2020, p. 8.
  • [109]
    Écolo, « Déconfinement : pour Écolo, priorité à l’humain ! », 25 avril 2020, https://ecolo.be.
  • [110]
    « Coronavirus en Belgique : Écolo en faveur des réunions en familles mais “nous ne siégeons pas au CNS” », RTBF (en ligne), 26 avril 2020, www.rtbf.be.
  • [111]
    Rappelons que, contrairement à la Commission communautaire flamande (VGC), la COCOF est une entité fédérée dotée du pouvoir législatif (à savoir pour les compétences dont l’exercice lui a été transféré par la Communauté française en région bilingue de Bruxelles-Capitale).
  • [112]
    Chambre des représentants, Commission chargée du contrôle de la mise en œuvre des lois du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19, Compte rendu analytique, n° 145, 14 avril 2020, p. 4-5.
  • [113]
    Ibidem, p. 7.
  • [114]
    Chambre des représentants, Commission chargée du contrôle de la mise en œuvre des lois du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19, Compte rendu analytique, n° 166, 29 avril 2020, p. 4.
  • [115]
    L. Rigaux, « Le gouvernement minoritaire Wilmès II. Les étapes de la formation d’un gouvernement minoritaire d’un nouveau genre », Carnet de crise, ULB, Centre de droit public, n° 8, 7 avril 2020, https://droit-public.ulb.ac.be.
  • [116]
    Chambre des représentants, Commission de la Santé et de l’Égalité des chances, Compte rendu analytique, n° 148, 17 avril 2020, p. 2.
  • [117]
    Chambre des représentants, Commission chargée du contrôle de la mise en œuvre des lois du 27 mars 2020 habilitant le Roi à prendre des mesures de lutte contre la propagation du coronavirus Covid-19, Compte rendu analytique, n° 158, 27 avril 2020, p. 11.
  • [118]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 30, 19 mars 2020, p. 22.
  • [119]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 36, 16 avril 2020, p. 11.
  • [120]
    « Pour Bart De Wever, “les discussions pour un nouveau gouvernement fédéral peuvent débuter en juin” », Le Soir (en ligne), 20 avril 2020, www.lesoir.be.
  • [121]
    « Bouchez : “Pas de négociation gouvernementale alors qu’on n’a pas de certitude sur la sortie de crise sanitaire” », Le Soir (en ligne), 20 avril 2020, www.lesoir.be.
  • [122]
    « On a déconfiné la N-VA », RTBF (en ligne), 4 mai 2020, www.rtbf.be.
  • [123]
    « L’été politique s’annonce explosif », La Libre Belgique, 4 mai 2020.
  • [124]
    « N-VA ziet “erg weinig redenen” om volmachten van regering-Wilmès in juni te verlengen », VRT (en ligne), 17 avril 2020, www.vrt.be.
  • [125]
    « Sophie Wilmès espère que les pouvoirs spéciaux ne seront pas prolongés », Belga, 3 mai 2020.
  • [126]
    « La crise du Covid-19 coûtera 45 milliards d’euros à la Belgique en 2020 », L’Écho (en ligne), 8 avril 2020, www.lecho.be. Il est à noter que l’augmentation attendue du taux d’endettement (dette publique/PIB) sera, en 2020, la résultante de deux effets convergents : d’une part, la hausse nette de l’endettement du pays (notamment afin de financer des mesures pour faire face aux crises sanitaire et économique) et, d’autre part, la contraction du PIB (conséquence de cette même crise économique). Il conviendra donc d’être prudent lors des comparaisons avec les années antérieures voire avec les suivantes.
  • [127]
    Chambre des représentants, Projet de loi portant diverses mesures fiscales urgentes en raison de la pandémie du Covid-19, n° 1174/1, 24 avril 2020, p. 129 (article 5).
  • [128]
    Chambre des représentants, Commission des Finances et du Budget, Compte rendu analytique, n° 153, 21 avril 2020, p. 10-11 et 24.
  • [129]
    « Pas d’aide en cas de présence dans un paradis fiscal. Est-ce efficace ? », La Libre Belgique, 6 mai 2020.
  • [130]
    Chambre des représentants, Commission des Finances et du Budget, Compte rendu analytique, n° 153, 21 avril 2020, p. 11, 19, 21 et 23.
  • [131]
    « Faut-il vraiment sauver les compagnies aériennes européennes de la faillite ? », RTBF (en ligne), 23 avril 2020, www.rtbf.be.
  • [132]
    « La piste cyclable de la discorde », RTBF (en ligne), 6 mai 2020, rtbf.be.
  • [133]
    L’INAMI est l’Institut national d’assurance maladie-invalidité.
  • [134]
    « Médecin généraliste, métier officiellement en pénurie en Wallonie », Belga, 18 juillet 2016. Une telle situation s’était déjà produite en 2010.
  • [135]
    « “En Wallonie, nous voulons que tout le monde puisse être testé” », La Libre Belgique, 30 avril 2020.
  • [136]
    « Collignon (PS) : “Sans les pouvoirs locaux, ça aurait été pire” », Sudpresse, 27 avril 2020.
  • [137]
    « Sortir des tranchées politiques », Le Soir, 7 mai 2020 ; « Nous n’embrassons pas pareil, séparons-nous », Le Soir (en ligne), 7 mai 2020, www.lesoir.be.
  • [138]
    En janvier 2020, dans une interview publiée par le magazine Wilfried, G.-L. Bouchez s’est dit attaché à titre personnel à une Belgique unitaire.
  • [139]
    « Alexander De Croo : “La régionalisation a désormais montré ses limites” », Belga, 10 mai 2020.
  • [140]
    Rappelons que, après les élections du 26 mai 2019 et pendant le déroulement des négociations fédérales, de nombreux partis ont changé de président. En septembre, Rajae Maouane a remplacé Zakia Khattabi à la co-présidence d’Écolo, exercée en duo avec Jean-Marc Nollet ; en octobre, Paul Magnette a succédé à Elio Di Rupo à la tête du PS ; en novembre, Conner Rousseau a remplacé John Crombez à la tête du SP.A et Georges-Louis Bouchez a succédé à Charles Michel à la tête du MR ; en décembre, François De Smet a remplacé Olivier Maingain à la tête de Défi et Joachim Coens a remplacé Wouter Beke à la tête du CD&V.
  • [141]
    « Gouvernement fédéral : les quatre phases du déconfinement… politique », Le Soir, 8 mai 2020.
  • [142]
    Pour rappel, en l’état actuel du droit belge, la convocation d’élections anticipées n’est possible qu’au niveau fédéral.
  • [143]
    Chambre des représentants, Projet de loi visant à réglementer la suspension de la procédure des élections sociales de l’année 2020 suite à la pandémie du coronavirus Covid-19. Texte adopté par la séance plénière et soumis à la sanction royale, n° 1146/6, 23 avril 2020 (en attente de parution au Moniteur belge).
  • [144]
    CNT, « Suspension temporaire de la procédure des élections sociales 2020 », Avis n° 2 160, 24 mars 2020.
  • [145]
    « Des élections à la rentrée ? “Il y aurait une logique, mais c’est matériellement impossible” », Le Soir, 30 avril 2020. Cf. aussi RTL-TVi, C’est pas tous les jours dimanche, 10 mai 2020.
  • [146]
    F. Bouhon, A. Jousten, X. Miny, E. Slautsky, « L’État belge face à la pandémie de Covid-19 : esquisse d’un régime d’exception », op. cit., p. 35-38.
  • [147]
    Le baromètre des intentions de vote Ipsos-RTL-Le Soir, réalisé entre le 4 et le 9 mars et publié le 14 mars, plaçait le VB à 28,0 % des intentions de vote en Flandre, soit + 9,3 % par rapport aux élections du 26 mai 2019.
  • [148]
    Le VB se montre particulièrement actif sur les réseaux sociaux et dans la presse. Par ailleurs, il poursuit sa stratégie de normalisation, dont un récent succès est aux yeux de certains la parution d’une interview de son président dans les colonnes du magazine Wilfried, ce qui constitue une première dans la presse francophone, qui s’était jusqu’alors abstenue d’une telle publication en vertu du « cordon sanitaire médiatique ».
  • [149]
    Chambre des représentants, Compte rendu intégral, n° 30, 19 mars 2020, p. 7.
  • [150]
    Tandis que le gouvernement de la Communauté française, manifestement inspiré par des considérations de prudence, préparait une rentrée scolaire limitée à partir du 18 mai, le ministre flamand de l’Enseignement, des Sports, du Bien-être des animaux et du Vlaamse Rand, et vice-ministre-président du gouvernement flamand, Ben Weyts (N-VA), a annoncé la reprise des cours en Flandre dès le 15 mai, ce qui a été observé du côté francophone comme une affirmation d’un volontarisme flamand contrastant avec un supposé laxisme francophone et une mise au défi du CNS. Lors de la réunion de ce dernier tenue le 24 avril, la solution de compromis retenue est que les écoles rouvriront le lundi 18 mai mais que celles qui le souhaitent pourront effectuer une journée de test dès le vendredi 15 mai.
  • [151]
    Le samedi 9 mai, la police a toutefois dispersé à Anvers une manifestation non autorisée de quelques dizaines de personnes opposées à « la dictature du confinement » et a procédé à une douzaine d’arrestations administratives.
  • [152]
    V. de Coorebyter, « Crise politique fédérale : vers un apaisement durable ? », Le Soir, 18 mars 2020.
  • [153]
    « Une commission d’enquête parlementaire ? Oui, mais d’abord des élections ! », Le Soir (en ligne), 28 avril 2020, www.lesoir.be.
  • [154]
    Le 12 mars, les présidents du CDH et de Défi, M. Prévot et F. De Smet, ont proposé ensemble que l’une de leurs deux formations remplace éventuellement le CD&V pour former une « petite Vivaldi » (avec le CDH) ou une « Coalition 77 » (avec Défi).

Au début du mois de mars 2020, la Belgique rejoint la liste des pays touchés par la pandémie de Covid-19, maladie infectieuse apparue quelques mois plus tôt en Chine et provoquée par le coronavirus SARS-CoV-2. Or, à ce moment-là, la Belgique est plongée dans une crise politique qui semble d’une gravité sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : depuis plus d’un an, le pays est dirigé par des gouvernements fédéraux en affaires courantes et minoritaires et, depuis près de dix mois, le monde politique cherche en vain à mettre en place un gouvernement fédéral de plein exercice et disposant d’une majorité au sein de la Chambre des représentants issue des élections du 26 mai 2019.

La Belgique entre crise politique et crise sanitaire (mars-mai 2020)Cette irruption soudaine d’une crise sanitaire majeure met la crise politique en mode pause. Afin de gérer la pandémie, un gouvernement fédéral Wilmès II (MR/CD&V/Open VLD) prête serment devant le roi le 17 mars 2020, puis obtient successivement la confiance d’une majorité de membres de la Chambre des représentants (le 19 mars) et une délégation de pouvoirs spéciaux par une majorité plus large encore de députés fédéraux (le 26 mars). La Première ministre, Sophie Wilmès (MR), s’engage à borner son action à la gestion de la crise et à ses conséquences, et à revenir demander la confiance de l’assemblée dans un délai de six mois. Les pouvoirs spéciaux sont accordés pour une période de trois mois, renouvelables une fois. La crise politique peut donc apparaître temporairement résolue ; toutefois, à mesure que l’urgence sanitaire s’estompe, elle refait surface. Dans ce Courrier hebdomadaire, le CRISP relève les principales tensions qui ont émaillé la gestion de la crise et les critiques que celle-ci a suscitées, puis fait le point sur la situation politique fédérale après huit semaines de gouvernement Wilmès II et trace des pistes de réflexion pour l’avenir politique au niveau fédéral.

Mis en ligne sur Cairn.info le 19/05/2020
https://doi.org/10.3917/cris.2447.0005
ISBN 9782870752340
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour CRISP © CRISP. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...