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Introduction

1Premier pays d’Europe occidentale à adopter une telle mesure, la Belgique reconnaît le culte islamique dès 1974. Toutefois, plus de trente ans s’écoulent ensuite avant que les premières mosquées soient reconnues et que les premiers imams voient leur traitement pris en charge par l’État belge. Plusieurs raisons expliquent ce long délai. La plus importante d’entre elles est la difficulté ayant été rencontrée pour constituer un organe représentatif pour le culte islamique. Les autres pays européens dans lesquels est présente une communauté musulmane importante se heurtent d’ailleurs à la même difficulté.

2Les autorités politiques des États européens ont parfois reculé devant la complexité de la tâche. En outre, le financement des mosquées n’était pas un thème particulièrement porteur auprès du grand public, ce qui a contribué à la frilosité des gouvernements. Toutefois, depuis les attentats islamistes qui ont endeuillé l’Europe en 2015-2016, le processus de reconnaissance et de financement de l’islam connaît une nouvelle dynamique, dans un contexte où les responsables politiques souhaitent désormais encourager le développement d’un islam européen, c’est-à-dire une religion modérée, respectueuse de la démocratie et de valeurs telles que l’égalité hommes-femmes.

3Cette livraison du Courrier hebdomadaire retrace l’évolution des politiques publiques menées à l’égard du culte islamique en Belgique depuis 1974. Il examine successivement la reconnaissance du culte islamique proprement dite, le processus de mise en place de son organe représentatif (l’Exécutif des musulmans de Belgique, EMB), la reconnaissance et le financement des communautés islamiques locales (organisées autour des mosquées) par les Régions, la prise en charge du traitement des ministres du culte (les imams) par l’Autorité fédérale, la mise en œuvre des aumôneries musulmanes et l’organisation des cours de religion islamique. Sont laissées en dehors du champ de la présente étude les questions relatives au port du hijab  [1], à l’abattage rituel  [2] ou au halal  [3] ; bien qu’importantes pour les musulmans de Belgique, elles ne concernent pas le financement public du culte. Enfin, un dernier chapitre évoque en contrepoint le développement des politiques publiques en matière d’organisation et de financement public du culte islamique dans d’autres États de l’Union européenne.

1. La reconnaissance du culte islamique

4En Belgique, l’islam a été reconnu par la loi du 19 juillet 1974, qui a inscrit le culte islamique parmi les bénéficiaires de la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes reconnus  [4]. Ainsi, la Belgique devenait le premier État européen moderne  [5] à inscrire l’islam parmi les religions reconnues.

1.1. L’islam en Belgique

5Jusqu’après la Seconde Guerre mondiale, la présence de musulmans en Belgique est très marginale, le pays ne disposant pas de colonies avec une proportion significative de population musulmane. Dans les années 1960, le besoin de main-d’œuvre entraîne l’immigration de nombreux travailleurs, venus d’abord d’Italie et de Grèce, puis du Maroc et de la Turquie. Des conventions sont signées en 1964 avec ces deux derniers pays. Si initialement cette immigration ne concerne que des adultes de sexe masculin, rapidement elle fait venir des familles qui vont s’établir durablement en Belgique. Après la fin de l’immigration, la population musulmane de Belgique continue à augmenter essentiellement par le biais de l’accroissement naturel et du regroupement familial (les mariages avec un ressortissant ou une ressortissante du pays d’origine).

6Les estimations du nombre de musulmans les plus fréquemment citées sont celles proposées par le sociologue Jan Hertogen, qui se basent sur les pays d’origine des citoyens inscrits aux registres de la population. En 2017, J. Hertogen avançait le chiffre de 859 223 personnes musulmanes soit 7,6 % de la population  [6]. D’autres observateurs considèrent que ces chiffres sont trop élevés, sans toutefois proposer d’estimations alternatives  [7].

7La population musulmane est une population essentiellement urbaine ; les zones rurales sont peu concernées. C’est en Région bruxelloise qu’elle est la plus présente  [8]. Les bassins industriels, et donc les régions de Charleroi, de La Louvière, de Liège et de Mons, constituent d’autres zones de concentration des populations musulmanes. Deux groupes sont majoritaires au sein de l’islam en Belgique : les personnes d’origine marocaine constituent le plus grand groupe, et celles d’origine turque le second  [9]. La population d’origine turque est plus présente en Flandre qu’en Wallonie, notamment en raison d’une forte concentration de main-d’œuvre turque à Anvers et dans les anciennes mines du Limbourg. Les autres Belges de confession islamique sont issus essentiellement des autres pays du Maghreb, d’Albanie, de l’Afrique subsaharienne, du Proche et Moyen-Orient et du Pakistan. Par ailleurs, on estime à environ 30 000 le nombre de Belges de souche convertis à l’islam. Enfin, l’islam alevi  [10] compte de 15 000 à 30 000 fidèles dans le pays  [11].

1.2. Le système de financement public des cultes en Belgique

8Le système de financement public des cultes en Belgique est largement hérité du régime français organisé après la conclusion du Concordat de 1801, qui a restauré le culte catholique dans la France post-révolutionnaire  [12]. Ce système a été pensé initialement pour l’Église catholique, un culte qui disposait depuis longtemps d’un clergé hiérarchisé et d’un maillage territorial complet, avec de très nombreux lieux de culte, pour certains établis depuis plusieurs siècles. Les cultes protestant, israélite et anglican, admis au bénéfice du financement public dès les premières années de l’indépendance belge, ont été contraints de s’adapter, et notamment de se doter d’un organe représentatif central à même de jouer le rôle dévolu aux évêques pour le culte catholique. La législation d’origine française a été complétée par la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes  [13], qui a organisé le contrôle des fabriques d’église, qui sont les établissements publics chargés de la gestion des biens des paroisses  [14].

9La reconnaissance d’un nouveau culte – le terme de « reconnaissance » est communément utilisé bien qu’il n’ait pas de définition juridique précise – consiste depuis lors à inscrire ce culte parmi les bénéficiaires de la loi du 4 mars 1870. En effet, si les dix-sept premiers articles de cette loi organisent les budgets et les comptes des fabriques du culte catholique, un dix-huitième article indique que les dispositions précédentes sont « également applicables aux administrations des Églises protestante, anglicane et israélite (sic) ». De même, la loi du 19 juillet 1974 dite de reconnaissance de l’islam a ajouté un article 19bis portant que :

10

« Les administrations propres au culte islamique sont organisées de même manière sur la base territoriale provinciale. La tutelle de ces administrations est exercée par le ministre de la Justice. Cependant, leur création ainsi que les opérations civiles qu’elles effectuent et l’acceptation des libéralités qui leur sont faites sont soumises à l’autorisation du Roi. Dans tous les cas, l’avis des députations permanentes des conseils provinciaux intéressés est requis. Les interventions financières incombant aux communes en faveur des ministres et des administrations des cultes visés aux articles précédents incombent, en ce qui concerne le culte islamique, aux provinces. »

11Ainsi, contrairement aux cultes précédemment reconnus, il a été prévu que le culte islamique soit organisé et financé sur une base provinciale et non communale. La raison de ce choix du législateur n’est pas complètement explicitée. D’après le rapport de la commission de la Justice du Sénat qui a examiné la proposition de loi de reconnaissance du culte islamique, l’organisation sur une base provinciale aurait été demandée par le « grand-imam de Belgique » (c’est-à-dire l’imam du Centre islamique et culturel de Belgique) lors d’une entrevue  [15]. Cet ajout d’une charge financière aux provinces n’a pas été unanimement salué. En mars 1988, réagissant à la reconnaissance du culte orthodoxe intervenue également sur une base provinciale  [16], le député Claude Erdekens (PS) déposera à la Chambre des représentants une proposition de loi visant à transférer cette charge financière à l’État central, estimant qu’« il conviendrait que, de plus en plus, le décideur soit le payeur. Dès lors, l’État, dans la mesure où il décide de reconnaître ou de promouvoir les cultes islamique et orthodoxe, doit assumer les conséquences financières des décisions qu’il prend, et ce sans transfert à charge d’autres pouvoirs tels que communes ou provinces »  [17]. La proposition ne sera pas adoptée.

1.3. Les premières propositions de reconnaissance

12Le processus de reconnaissance du culte islamique est initié en juin 1967, à l’occasion d’une visite du roi Fayçal d’Arabie saoudite en Belgique. Le pavillon oriental du parc du Cinquantenaire, un bâtiment de style orientalisant datant de l’Exposition internationale de Bruxelles de 1897, est alors promis aux communautés musulmanes. En mai 1968, la personnalité juridique est octroyée au Centre islamique et culturel de Belgique (CICB)  [18]. Ce centre, émanation de la Ligue islamique mondiale (LIM), une institution internationale créée en 1962 à l’initiative de l’Arabie saoudite, est administré par un conseil qui regroupe les ambassadeurs des pays musulmans accrédités en Belgique. En 1969, une convention est conclue entre le CICB et le gouvernement belge, représenté par le ministre des Travaux publics Jos De Saeger (CVP). La convention prévoit formellement la cession pour 99 ans du pavillon oriental du parc du Cinquantenaire. D’après le sociologue Felice Dassetto (UCLouvain), ce geste de l’État belge a deux objectifs  [19]. D’une part, soutenir la politique internationale et commerciale belge de l’époque, dans le cadre de négociations avec l’Arabie saoudite de contrats de construction d’infrastructures à réaliser par des entreprises belges. D’autre part, en particulier dans les milieux politiques flamands proches du parti démocrate-chrétien flamand, le CVP, accueillir positivement les populations musulmanes qui viennent alors d’arriver en Belgique.

13L’installation du CICB au Cinquantenaire anticipe ainsi sur la reconnaissance du culte islamique par le Parlement. Lors du débat parlementaire, il est d’ailleurs dit qu’une reconnaissance de facto est déjà intervenue  [20]. C’est au Sénat que s’ouvre le débat. La première proposition de reconnaissance du culte islamique est déposée à l’initiative du sénateur Albert Smet (CVP) en mars 1971  [21]. Devenue caduque, elle est redéposée, à la suite du décès de son initiateur, par quatre sénateurs du même parti en février 1972  [22]. Quelques semaines plus tard, des sénateurs libéraux, socialistes et VU déposent une proposition de loi qui vise à octroyer au culte islamique les mêmes droits et avantages que ceux dont bénéficient les cultes reconnus par la loi du 4 mars 1870  [23]. La commission de la Justice du Sénat examine conjointement ces deux propositions de loi. Son rapport synthétise les arguments exprimés en faveur de la reconnaissance du culte islamique  [24] : les fidèles sont nombreux à s’être établis dans le pays depuis quelques années (le chiffre de plus de 100 000 musulmans est avancé) ; des plaintes sont formulées fréquemment à propos de la difficulté qu’ils éprouvent à observer leurs obligations et coutumes religieuses ; la reconnaissance de leur religion permettrait à beaucoup de travailleurs immigrés de confession musulmane de vivre dans de meilleures conditions et de « se sentir mieux intégrés dans notre communauté nationale » ; la reconnaissance faciliterait aux intéressés l’exercice de leur culte, ils pourraient se procurer des lieux d’inhumation, la question de l’enseignement de la religion islamique pourrait être résolue, l’article 117 de la Constitution relatif aux traitements et pensions des ministres du culte leur serait applicable, etc.

14Plusieurs membres de la commission et le ministre de la Justice (Herman Vanderpoorten, PVV) estiment que la question de la reconnaissance des communautés philosophiques laïques – également concernée par la seconde proposition de loi examinée – doit être traitée séparément. Il est décidé de scinder les deux sujets  [25]. Certains membres de la commission formulent alors la crainte de voir « les cultes les plus divers revendiquer les mêmes avantages et la même reconnaissance », ce à quoi il est objecté qu’il n’est pas « question de reconnaître un culte qui ne soit pratiqué que par un petit nombre de personnes ou qui ne puisse encore s’appuyer suffisamment sur la tradition et sur l’histoire »  [26]. La dissolution des Chambres intervenue le 31 janvier 1974 rend à nouveau caduque la proposition de reconnaissance.

1.4. L’adoption de la loi du 19 juillet 1974

15Le 2 mai 1974, quatre sénateurs du CVP déposent au Sénat une proposition de loi qui reprend in extenso le texte approuvé par la commission de la Justice sous la précédente législature  [27]. La commission de la Justice réexamine la proposition et y apporte des modifications à la demande du ministre de la Justice, H. Vanderpoorten  [28]. D’une part, l’intitulé devient « Proposition de loi portant reconnaissance des administrations chargées de la gestion du temporel du culte islamique ». D’autre part, à propos des obligations financières à l’égard du culte à reconnaître, les mots « les grosses réparations aux mosquées pour la quote-part qui n’est couverte ni par leurs ressources propres » sont substitués dans le texte du rapport à « la construction des mosquées pour la quote-part qui n’est couverte ni par leurs ressources propres » : en effet, la législation existante prévoit l’intervention des pouvoirs publics pour les grosses réparations aux édifices du culte, mais non pour leur construction. Étant donné le caractère récent de l’implantation de l’islam en Belgique, on aurait pu concevoir une adaptation des règles en vigueur afin de permettre à ce culte de bénéficier d’un soutien public obligatoire pour la construction de ses lieux de culte (ce qui aurait peut-être pu éviter le recours ultérieur à des financements venus de l’étranger). Comme pour des interventions en faveur des autres cultes et des établissements laïques, une intervention des pouvoirs publics pour soutenir la construction de nouveaux édifices est possible mais elle n’est pas obligatoire, contrairement au financement des réparations. L’insertion du terme « construction » aurait obligé les pouvoirs locaux à financer les constructions, sans marge de manœuvre. Cependant, l’égalité entre les différents cultes, quant aux mécanismes de financement, a été préférée. Il est toutefois à noter que rien dans les documents parlementaires ne permet de conclure que l’opportunité ou non de soutenir financièrement la construction des mosquées – et non simplement leur réparation et leur entretien – ait fait l’objet d’un questionnement. La modification apportée au texte du rapport paraît être une correction évidente de mise en accord avec la législation existante ; elle ne suscite pas de débat.

16En séance plénière du 20 juin 1974, le Sénat adopte la proposition à l’unanimité des 155 membres présents. Lors du court débat qui précède le vote, seuls s’expriment les députés Marcel Vandewiele (CVP), Willy Calewaert (PSB), Guido Van In (Volksunie) et le ministre de la Justice H. Vanderpoorten. Soulignant la présence tant de travailleurs étrangers que du personnel des ambassades, M. Vandewiele, à l’initiative de la proposition de loi, estime que « l’un des liens les plus forts et peut-être l’élément le plus réel de formation d’une communauté parmi ces personnes provient de leur fidélité au culte islamiste »  [29]. Il insiste particulièrement sur la nécessité de fournir aux musulmans installés en Belgique la possibilité d’y éduquer leurs enfants dans leur foi et de pouvoir y ensevelir leurs morts : « Savez-vous que les travailleurs immigrés font parfois transférer le corps de leurs parents décédés dans leur pays d’origine à leurs propres frais, et que, pour rester fidèles à leurs convictions, ils font ainsi de lourds sacrifices financiers pendant des années ? »  [30] Pour sa part, W. Calewaert insiste sur la nécessité, dans un souci d’équité, d’organiser rapidement le financement de la communauté non confessionnelle.

17Transmis à la Chambre des représentants, le projet est également adopté à l’unanimité des 174 députés présents, le 17 juillet 1974  [31]. Durant la courte discussion générale qui précède le vote  [32], Fernand Vandamme (CVP), qui avait déposé une proposition de loi similaire  [33], se réjouit de l’adoption rapide de la proposition au Sénat, ce qui constitue un témoignage de tolérance grandissante en matière religieuse, mais également « une expression de l’hospitalité élémentaire vis-à-vis des plus de 100 000 musulmans vivant dans notre pays, qui peuvent être trouvés surtout parmi les travailleurs que nous avons invités pour maintenir notre économie. Nous leur devions bien cela »  [34]. Il ajoute toutefois qu’il y a un motif moins noble à ce vote rapide : « Il y a un côté sombre dans le projet, à savoir qu’il a apparemment été accéléré en réponse à la crise pétrolière et dans une certaine mesure pour plaire à nos fournisseurs, les pays arabes et les leaders de la foi islamique »  [35]. Les annales parlementaires précisent toutefois à cet endroit que le discours est ponctué d’un geste de dénégation du ministre. Le député André Degroeve (PSB) répète ensuite la nécessité de considérer rapidement le financement de la communauté philosophie laïque.

1.5. Les premières conséquences de la reconnaissance

18L’inscription du culte islamique parmi les bénéficiaires de la loi du 4 mars 1870 doit avoir trois conséquences : le paiement des traitements et pensions des ministres du culte islamique (imams) en application de l’article 117 de la Constitution  [36], le soutien financier aux communautés locales (organisées autour d’une mosquée) par les provinces, et l’organisation de cours de religion islamique dans les écoles officielles.

19Les discussions parlementaires, très brèves il est vrai, n’évoquent pas le premier aspect. Seuls le second et le troisième sont mentionnés. Le ministre de la Justice indique aux membres de la commission de la Justice du Sénat qu’il se propose « d’examiner avec des représentants du culte islamique quelles seront les conséquences pratiques de la reconnaissance demandée. Il s’informera à ce sujet auprès des ambassadeurs des pays intéressés, ce qui lui permettra d’élaborer des propositions concrètes »  [37]. Dans une séance ultérieure de la commission, le ministre précise : « Il était résulté d’un entretien avec le grand-imam du culte islamique en Belgique que la reconnaissance de ce culte entraînerait la nécessité de construire des bâtiments adaptés et de créer des administrations adéquates à son intention, et ce à Bruxelles, Gand, Anvers, Liège, Namur et dans le Limbourg. En fait, il y a déjà là des mosquées et des ministres du culte. Comme il n’est prévu ni construction de bâtiments ni travaux de réparation dans les cinq à six années à venir, il n’est pas nécessaire de prévoir immédiatement des subsides. Les travaux d’achèvement en cours à la grande mosquée de Bruxelles sont à la charge de différents États arabes »  [38].

20On aperçoit là à nouveau le fait qu’il n’est pas très clair, aux yeux du législateur de l’époque, si la reconnaissance ouvre ou non le droit à des subsides pour la construction de nouveaux lieux de culte, sans doute parce que les pouvoirs publics se sont fréquemment investis pour conduire ou soutenir la construction de nouvelles églises ; ils l’ont toutefois fait à titre volontaire. On lit également dans la réponse du ministre une mise en avant du coût budgétaire faible, voire inexistant dans l’immédiat, d’une mesure qui apparaît alors comme surtout symbolique. Effectivement, le coût budgétaire de la reconnaissance du culte islamique restera très faible – voire inexistant en ce qui concerne le budget du Ministère de la Justice, chargé de payer le traitement de ministres du culte – vu la lenteur et les difficultés d’organisation du culte nouvellement reconnu.

21Aucun nouveau culte n’avait été admis au financement public depuis 1870. À l’époque, la loi était venue sanctionner ce qui existait déjà, à savoir des communautés protestantes, anglicanes et israélites, organisées et pourvues d’un organe représentatif, du moins en ce qui concernait le culte protestant et le culte israélite  [39]. Des arrêtés royaux étaient venus réorganiser l’administration des communautés existantes  [40]. L’État veut suivre la même voie en ce qui concerne le culte islamique.

22Un projet d’arrêté royal portant organisation des comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues est soumis au Conseil d’État par le ministre de la Justice plus de deux ans après la promulgation de la loi, le 15 décembre 1976. L’avis que le Conseil d’État rend le 9 mars 1977 porte notamment sur les notions de « comité » et de « communauté » introduites dans le projet d’arrêté. Le Conseil d’État attire l’attention sur le fait que la création d’un comité postule la reconnaissance préalable de la communauté islamique pour une ou plusieurs provinces déterminées et que c’est au Roi (c’est-à-dire au gouvernement) qu’il revient de conférer cette reconnaissance. Il examine ensuite la question du nombre des membres des comités et des modalités de leur élection. Sur tous ces points, l’avis du Conseil d’État est suivi par le ministre et le projet d’arrêté royal est modifié en conséquence.

23L’arrêté royal du 3 mai 1978 prévoit notamment que des communautés islamiques pourront être reconnues par arrêté royal pour une ou plusieurs provinces déterminées  [41]. La reconnaissance d’une communauté autorisera alors celle-ci à créer un comité chargé de la gestion de ses intérêts temporels. Ce comité comprendra l’imam premier en rang (ou son délégué) et entre 4 et 8 membres élus (entre 6 et 8 pour le comité du Brabant, entre 4 et 6 pour les autres). C’est au CICB qu’il revient d’organiser les premières élections. Par la suite, chacun des comités sortants déterminera le nombre de mandats à pourvoir et se chargera de l’organisation de ces élections. L’arrêté royal dispose que les qualités requises pour être électeur comprennent l’inscription depuis un an au moins au registre d’une mosquée. Les dispositions prévues pour la constitution des comités sont analogues à celles qui existent pour les conseils d’administration des communautés protestantes et israélites. Contrairement aux conseils des fabriques d’église, dont les membres se cooptent, les administrateurs des communautés des autres cultes sont élus par l’assemblée des fidèles.

24Cet arrêté royal n’est toutefois pas suivi d’effet : les arrêtés royaux reconnaissant les communautés islamiques ne voient pas le jour, aucune communauté musulmane, semble-t-il, ne demandant sa reconnaissance, et les élections ne sont donc pas organisées. Par conséquent, les ministres du culte islamique ne reçoivent ni traitement ni pension, contrairement aux dispositions contenues dans l’article 117 de la Constitution, et ce bien que, dès 1981, les montants des rémunérations des imams soient inscrits dans la loi  [42]. En 1989, les traitements des imams sont à nouveau prévus par la législation  [43]. En revanche, l’organisation des cours de religion islamique se met, elle, en place à la fin des années 1970 (cf. infra).

25En 1985 (pour la reconnaissance du culte orthodoxe), en 1991 et en 1999 (pour renforcer les procédures de tutelle et introduire la Région de Bruxelles-Capitale à côté des provinces), l’article 19bis de la loi du 4 mars 1870 est modifié  [44]. En 2001, à la veille de la régionalisation de la législation, cet article se lit comme suit :

26

« Les administrations propres aux cultes islamique et orthodoxe sont organisées de la manière prévue par l’article 19 sur le territoire des provinces et de l’arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale.
Les rapports avec l’autorité civile sont assurés par l’organe représentatif du culte islamique et l’organe représentatif de l’église orthodoxe.
La tutelle de ces administrations est exercée par le ministre de la Justice de la manière prévue par les dispositions du chapitre IIbis. Cependant, leur création, ainsi que les opérations civiles qu’elles effectuent et l’acceptation des libéralités qui leur sont faites, sont soumises à l’autorisation du Roi après avis des députations permanentes des conseils provinciaux intéressés.
À cet effet, les demandes de création d’une administration sont transmises au ministre de la Justice par l’organe représentatif du culte. Les délibérations relatives aux opérations civiles et aux libéralités sont communiquées aux députations permanentes du conseil provincial qui donnent leur avis dans le mois de cette communication. Copie de ces délibérations est communiquée au ministre de la Justice. Les avis sont réputés favorables s’ils n’ont pas été donnés dans ce délai.
Toutefois, les opérations civiles et l’acceptation des libéralités dont le montant ne dépasse pas 10 000 euros sont soumises à la tutelle générale. La liste de ces actes est transmise au ministre de la Justice par les administrations propres au culte à l’issue de chaque trimestre civil.
Le Roi peut adapter à l’évolution monétaire le montant fixé à l’alinéa précédent.
Les interventions financières incombant aux communes en faveur des ministres et des administrations des cultes visés aux articles précédents incombent, en ce qui concerne les cultes islamique et orthodoxe, aux provinces et à la Région de Bruxelles-Capitale. »

2. La mise en place de l’Exécutif des musulmans de Belgique

27Le système belge exige que chaque culte reconnu dispose d’un organe représentatif, usuellement dénommé « chef de culte », qui est l’interlocuteur de l’État. Il est principalement chargé, d’une part, de transmettre au ministre de la Justice les noms des ministres du culte nommés aux places reconnues et dont le traitement sera payé par l’État et, d’autre part, d’exercer une tutelle sur les communautés locales. C’est également l’organe représentatif qui introduit les dossiers de reconnaissance des communautés locales. Pour le culte catholique, ce rôle est rempli par les évêques ; pour le culte protestant-évangélique, il est dévolu au Conseil administratif du culte protestant et évangélique (CACPE) ; pour le culte israélite, au Consistoire central israélite de Belgique (CCIB) ; pour le culte anglican, au Comité central du culte anglican ; pour le culte orthodoxe, au métropolite-archevêque du patriarcat œcuménique de Constantinople. La reconnaissance de l’islam imposait donc de trouver semblable interlocuteur pour le culte islamique.

28Le législateur de l’époque ne semble pas s’être préoccupé de la question. Le rapport de la commission de la Justice du Sénat indique : « La hiérarchie des cultes reconnus, et c’est également le cas pour l’islamisme, est définie d’une manière précise. Les croyants sont soumis aux règles qu’elle édicte et sont censés remplir les obligations que cela comporte »  [45]. Cette considération était mise en avant pour contraster la situation des religions avec celle des organisations laïques, une communauté religieuse obéissant forcément à un clergé hiérarchisé selon le rapporteur, alors que semblable organe représentatif serait difficile à trouver chez les libres penseurs. En réalité, l’organe représentatif du culte islamique se révélera tout aussi difficile à déterminer par les autorités.

2.1. Le Centre islamique et culturel de Belgique

29Pendant le processus de reconnaissance de l’islam, le principal interlocuteur de l’État est le Centre islamique et culturel de Belgique (CICB), qui occupe depuis 1969 le pavillon oriental (la « grande mosquée ») du Cinquantenaire. Tout naturellement, le rôle d’organe représentatif lui est de facto confié au terme du processus en 1974. Toutefois, aucune mosquée ne sera présentée à la reconnaissance par le CICB et aucun traitement d’imam ne sera donc réclamé.

30Les années 1980 voient le dossier relégué à l’arrière-plan. Les gouvernements Martens V, VI et VII (CVP/PRL/PVV/PSC), dits Martens-Gol, n’en font pas une priorité politique, tandis que des courants xénophobes voient le jour, tels le nolsisme  [46] à Schaerbeek, en région bruxelloise. Lors de la rentrée de l’année scolaire 1989-1990, un débat éclate autour de l’opportunité de permettre ou non le port du foulard islamique dans les écoles  [47]. Dans les mois qui suivent, l’imam-directeur du CICB se fait remarquer par des propos critiques à l’égard de la loi civile ; dans une « déclaration du Centre islamique relative au voile », adressée aux enseignants de religion islamique, on peut lire : « Les textes coraniques et les paroles prophétiques prescrivent à la femme musulmane de s’habiller décemment, à savoir couvrir son corps du haut de la tête aux chevilles. (…) Si un commandement divin ou un précepte prophétique se trouve en conflit avec la loi humaine, il appartient au croyant et à la croyante de se conformer aux commandements divins, sinon il est qualifié de désobéissant »  [48]. Le 14 février 1990, trois députés libéraux déposent une proposition de résolution visant à demander au gouvernement Martens VIII (CVP/ PS/SP/PSC/VU) de dénoncer l’accord avec le CICB et d’accorder la compétence de la désignation des professeurs de religion islamique ainsi que de la gestion du temporel du culte islamique à une autre institution représentative  [49]. La question est traitée par la commission de la Justice à huis clos ; la proposition de résolution n’est pas présentée au vote.

31En novembre 1989, le Commissariat royal à la politique des immigrés  [50] remet un premier rapport semestriel. Dans son chapitre relatif à l’islam, il propose de créer un « conseil supérieur des musulmans de Belgique » composé de 17 membres, dont 12 seraient élus via les mosquées et 5 cooptés pour leur autorité morale, intellectuelle ou scientifique. Tant le chiffre de 17 membres que l’idée de cooptation de certaines personnalités seront retenus par les tentatives successives de constitution de cet organe représentatif. Le CICB reprend l’initiative et appelle les musulmans de 18 ans au moins résidant en Belgique depuis un an à s’inscrire comme électeurs dans les mosquées.

2.2. Les élections du 13 décembre 1998

32Par l’arrêté royal du 16 novembre 1990, le gouvernement crée un « Conseil provisoire des sages pour l’organisation du culte islamique en Belgique »  [51]. Sur les recommandations de celui-ci, est instituée en 1993 l’Assemblée générale des musulmans de Belgique (AGMB), qui est une assemblée constituante chargée de mettre sur pied un Exécutif des musulmans provisoire. Cet Exécutif est officiellement reconnu comme interlocuteur de l’État en novembre 1994  [52].

33Cette instance propose aux pouvoirs publics d’organiser des élections au sein de la communauté musulmane en vue de la constitution d’un Exécutif des musulmans définitif. Les élections ont lieu le 13 décembre 1998 ; près de 45 000 musulmans sur 74 000 inscrits participent au vote, dans une mosquée ou un autre endroit public. L’AGMB issue de ces élections est composée de 51 membres, auxquels sont joints 17 cooptés. Ensemble, ils doivent désigner en leur sein les 17 membres du futur organe représentatif, choisis notamment en fonction d’un équilibre prédéterminé entre musulmans d’origine marocaine, musulmans d’origine turque, Belges convertis et autres communautés. Fin février 1999, 16 personnes sont acceptées sur une liste finale de 17 noms, qui a été soumise à un screening de la Sûreté de l’État pour écarter les éventuels « intégristes ». L’Exécutif des musulmans de Belgique (EMB) est reconnu par un arrêté royal du 3 mai 1999  [53], puis ses 16 membres par un arrêté royal du lendemain  [54].

34La mise en place de l’EMB doit permettre la reconnaissance des communautés islamiques locales et la prise en charge du traitement de leurs ministres du culte. Ce processus va cependant être retardé, en raison de la régionalisation partielle du temporel des cultes au 1er janvier 2002 (cf. infra) mais aussi de difficultés internes de l’EMB.

35L’AGMB, dont le rôle devait se borner à désigner les membres de l’EMB, ne l’entend pas ainsi. Se considérant comme la seule instance véritablement représentative du culte islamique, car démocratiquement élue, elle décide de retirer sa confiance à l’EMB, qu’elle accuse d’être une émanation du gouvernement fédéral. Devant cette décision de l’AGMB, l’EMB présente sa démission en janvier 2001. Toutefois, le ministre de la Justice du gouvernement Verhofstadt I (VLD/PS/Fédération PRL FDF MCC/SP/Écolo/Agalev), Marc Verwilghen (VLD), la refuse, faisant valoir que le mandat de l’EMB est de cinq ans. Devant le blocage de l’institution, deux sénateurs Philippe Moureaux (PS, par ailleurs bourgmestre de Molenbeek-Saint-Jean et ministre d’État) et Meryem Kaçar (Agalev, d’origine turque), sont désignés comme médiateurs en mai 2002. Après de longues négociations, un nouvel Exécutif temporaire est mis en place par arrêté royal en avril 2003, avec un mandat limité  [55]. Ce mandat prend fin le 31 mai 2004.

2.3. Les élections du 20 mars 2005

36La ministre de la Justice du gouvernement Verhofstadt II (VLD/PS/MR/SP.A–Spirit), Laurette Onkelinx (PS), décide de l’organisation de nouvelles élections. En dépit de l’opposition de l’EMB, une commission chargée d’organiser ce scrutin est mise sur pied. Un avant-projet d’arrêté royal « portant création d’une commission chargée de l’organisation du renouvellement des organes du culte musulman » fait l’objet d’un avis très critique de la section de législation du Conseil d’État, qui dénie toute base légale à l’avant-projet  [56]. C’est alors une proposition de loi déposée en urgence par des parlementaires de la majorité et du CD&V  [57] et amendée par le gouvernement qui devient la loi du 20 juillet 2004  [58].

37La commission chargée du renouvellement des organes du culte islamique ainsi mise sur pied doit être composée de deux magistrats honoraires de rôles linguistiques différents, de deux représentants de la communauté musulmane (un francophone et un néerlandophone) et d’un expert en matière électorale. L’EMB ne donne pas suite à la demande de présentation de candidats adressée par la ministre. Lucien François (francophone) et Raymond Decoux (néerlandophone), magistrats émérites, Hassan Boussetta (francophone) et Ayse Öz (néerlandophone), et Jacques Pieron (expert) sont désignés. La politique à l’égard de la représentation du culte islamique suscite alors de nombreuses critiques au sein de certaines associations musulmanes. L’une d’elles, Vigilance musulmane, proteste contre les « nombreuses dérives du processus d’institutionnalisation de l’islam en Belgique » et « les ingérences et les discriminations dont est victime le culte musulman »  [59].

38La loi du 20 juillet 2004 fait l’objet d’un recours auprès de la Cour d’arbitrage (actuelle Cour constitutionnelle), contestant l’ingérence des pouvoirs publics dans l’organisation du culte islamique. Ce recours est introduit par le Conseil fédéral des musulmans de Belgique, une asbl constituée par les membres de l’AGMB issue des élections du 13 décembre 1998, et par de très nombreuses mosquées et fédérations de mosquées. Le Conseil fédéral des musulmans de Belgique considère qu’il est le représentant légitime du culte islamique, l’EMB n’étant qu’un conseil d’administration, appelé à répondre devant l’AGMB. Le 28 septembre 2005, la Cour d’arbitrage déboute le Conseil fédéral des musulmans de Belgique. Estimant que « le législateur peut raisonnablement exiger des cultes reconnus qu’ils présentent une structure minimum en vue de la désignation d’une instance susceptible de constituer l’interlocuteur des autorités publiques dans les relations privilégiées que les cultes reconnus entretiennent avec celles-ci », la Cour indique que, « en adoptant la loi attaquée, le législateur entendait donc conférer une portée concrète à la reconnaissance du culte musulman et permettre à ce dernier de bénéficier, au même titre que les autres cultes reconnus, des avantages financiers liés à un tel statut » et que, partant, la loi du 20 juillet 2004 ne constitue pas une ingérence disproportionnée dans la liberté des cultes  [60].

39Outre sur la légitimité du processus électoral, des musulmans s’interrogent également sur les modalités retenues. En particulier, la répartition des candidats entre quatre catégories (« turc », « marocain », « converti » et « autre ») est critiquée, puisqu’elle renvoie à un statut d’étranger. De même, le screening organisé par la Sûreté de l’État afin d’éliminer les candidats et les élus islamistes est critiqué comme discriminatoire et contraire à la liberté religieuse et à l’autonomie des cultes. Des procédures en référé auprès du tribunal de première instance et une requête en annulation auprès du Conseil d’État n’aboutissent cependant pas. Le président du tribunal de première instance de Bruxelles se déclare sans juridiction pour connaître de la demande. Le Conseil d’État, statuant sur la demande introduite par Abdelghani Ben Moussa, dont la candidature avait été rejetée au motif qu’il avait refusé de choisir sur son formulaire de candidature l’une des quatre catégories proposées, rejette le recours principalement au vu de l’absence de contestation introduite par le candidat à un stade antérieur du processus et de l’existence d’une catégorie « à première vue tout à fait neutre », la quatrième  [61].

40Par ailleurs, en décembre 2002, un projet d’arrêté royal « portant création d’une commission ad hoc en ce qui concerne les avis négatifs relatifs aux candidats à un mandat au sein de l’Exécutif des musulmans de Belgique » a été soumis au Conseil d’État. Ce texte prévoyait, conformément à la loi organique du 30 novembre 1998 des services de renseignement et de sécurité  [62], de soumettre de manière systématique et préalable les candidats à une enquête de sécurité. Or ce projet d’arrêté royal a été recalé par le Conseil d’État le 11 février 2003, pour cause de manque de fondement légal  [63]. Deux ans plus tard, le gouvernement fédéral dépose deux projets de loi à la Chambre, modifiant la législation en la matière. Bien que l’avis du Conseil d’État demeure critique, les deux lois sont promulguées le 3 mai 2005  [64].

41Les secondes élections pour constituer une assemblée des musulmans de Belgique ont lieu le 20 mars 2005 ; elles mobilisent moins d’électeurs et moins de candidats qu’en 1998. Lassés par les difficultés de l’EMB et par les vicissitudes du processus de renouvellement, une partie des citoyens d’origine marocaine boycottent le scrutin. Toutefois, contrairement aux élections du 13 décembre 1998, le processus électoral de 2005 est davantage soutenu par la communauté belgo-turque. Il apparaît que la victoire de l’Adalet ve Kalkınma Partisi (AKP, Parti de la justice et du développement) de Recep Tayyip Erdogan aux élections législatives turques du 3 novembre 2002 a développé l’intérêt de la Diyanet İşleri Başkanlığı (Diyanet : administration turque, s’apparentant à un ministère, en charge des affaires religieuses) pour le processus d’intégration de l’islam en Europe.

42Les résultats attribuent, au sein de l’AGMB, 40 sièges aux Belgo-Turcs, 20 aux Belgo-Marocains, 2 aux convertis et 6 aux autres appartenances culturelles. Cette répartition relance la polémique à propos de la représentativité de l’institution.

43La nouvelle Assemblée est installée le 26 avril 2005. Le 2 octobre 2005, elle élit les 17 membres du nouvel Exécutif, dont la composition est reconnue par arrêté royal peu après  [65]. Pour la première fois, l’EMB est organisé en deux collèges, l’un francophone et l’autre néerlandophone.

44Avant que le processus de reconnaissance des communautés locales puisse être entamé, une crise vient, à nouveau, paralyser l’action de l’EMB : l’AGMB émet un vote de défiance à l’égard de huit de ses membres tandis que deux autres démissionnent. Le ministre de la Justice du gouvernement Leterme I (CD&V/MR/PS/Open VLD/CDH), Jo Vandeurzen (CD&V), suspend le paiement des subsides  [66], jusqu’à l’approbation par l’Assemblée de la composition d’un nouvel Exécutif. Celui-ci est reconnu en mai 2008 par le gouvernement, à titre intérimaire, jusqu’au 31 mars 2009  [67]. Le mandat des membres de l’EMB sera prorogé deux fois, jusqu’à la fin du mois de mars 2011, le ministre de la Justice attendant vainement une proposition pour le renouvellement de l’instance.

45Devant la nécessité d’assurer la gestion des affaires courantes, un arrêté royal du 28 août 2011 confie cette tâche aux président et vice-présidents de l’Exécutif sortant  [68]. Sa validité expire le 31 décembre 2011, et il n’est pas renouvelé. Se crée alors un vide juridique, qu’il appartient au gouvernement Di Rupo (PS/CD&V/MR/SP.A/Open VLD/CDH), mis en place le 5 décembre 2011, et à la nouvelle ministre de la Justice, Annemie Turtelboom (Open VLD), de combler.

2.4. La réforme de 2014

46Le mécanisme de l’élection générale pour constituer l’organe représentatif du culte islamique n’ayant pas livré de résultats stables, d’autres pistes sont désormais explorées. En attendant, la ministre A. Turtelboom débloque progressivement un subside réduit pour assurer le fonctionnement de l’EMB en 2012  [69].

47Deux propositions pour renouveler l’EMB sont mises sur la table de la ministre : la première, soutenue par une majorité des membres de l’ancien Exécutif, propose d’organiser la représentation des musulmans sur la base des mosquées ; celles-ci enverraient un délégué pour constituer un Conseil général des musulmans de Belgique, duquel serait issue l’AGMB, puis l’EMB. La seconde proposition, portée par la plateforme Alternative démocratique des musulmans de Belgique et par l’ancienne vice-présidente de l’EMB, Isabelle Praile, maintient le principe d’élections générales, où les électeurs et les candidats seraient regroupés par collèges (marocains, turcs, convertis, minorités, groupes émergents) afin de garantir la représentation équilibrée de tous les groupes  [70]. La ministre A. Turtelboom décide de soutenir la première proposition. En décembre 2013, elle accorde à une nouvelle association, l’asbl « de renouvellement de l’organe représentatif du culte musulman de Belgique », créée en juin 2013, une subvention de 100 000 euros  [71]. Les membres fondateurs de l’asbl sont Salah Echallaoui, inspecteur de religion islamique et président de l’asbl Rassemblement des musulmans de Belgique, Coskun Beyazgül, ancien président de l’EMB et porte-parole de la Belçika Diyanet Vakfi (Diyanet de Belgique), Semsettin Ugurlu, président de l’Exécutif sortant, Tahar Chahbin, président de l’Unie van moskeeën en islamitische vereniging van Limburg, et Rashidi Makanga Abibu, directeur de l’Association islamique africaine de Belgique  [72].

48La désignation des membres du nouvel Exécutif se déroule ainsi en trois temps. Primo, les 284 mosquées ayant accepté de s’inscrire dans le processus envoient un délégué. Secundo, ces délégués constituent une assemblée de 60 membres, qui élit en son sein 15 membres de l’EMB le 8 mars 2014. Tertio, deux membres supplémentaires sont cooptés. Cette reconstitution de l’EMB sur la base des mosquées suit donc un processus analogue à celui qui est en place pour la constitution d’autres organes chefs de culte, tels le CCIB israélite et le CACPE protestant-évangélique.

49L’EMB porte à sa tête Noureddine Smaïli, professeur de religion islamique à Verviers. Un vice-président néerlandophone lui est adjoint, Mohamed Achaibi, président de l’Union des mosquées et centres islamiques de Flandre occidentale et de Flandre orientale. La nouvelle équipe est officiellement présentée le 30 mars 2014 et un arrêté royal du 2 avril 2014 reconnaît le nouvel Exécutif  [73]. Pour prévenir le risque d’une fronde de l’AGMB, et peut-être également parce que d’autres noms avaient été attendus à la tête de l’EMB, l’arrêté royal du 2 avril 2014 précise : « Les membres de l’Exécutif des musulmans de Belgique collaborent, dans le cadre du processus décisionnel et de la gestion financière de l’Exécutif des musulmans de Belgique, avec le bureau de l’Assemblée générale des musulmans de Belgique, composé de : 1. Devre Huru (présidente de l’AG) ; 2. Echallaoui Salah (vice-président de l’AG) ; 3. Topbag-Redzepi Selim (vice-président de l’AG) ».

50Le nouvel Exécutif a pour mission de stabiliser l’organisation du culte islamique et de faire progresser des dossiers importants, en particulier la reconnaissance des mosquées. Toutefois, de nouvelles critiques sont immédiatement formulées, mettant en cause la non-représentativité d’un Exécutif où les minorités et les femmes sont peu présentes, et où les représentants des États du Maroc et de la Turquie conservent une grande influence. Le déroulement du processus de désignation des membres de l’EMB, via un vote à main levée, est également contesté. Par la suite, le président de l’EMB, N. Smaïli, fait l’objet de vives critiques, et, selon lui, d’intimidations qui l’amènent à porter plainte. L’EMB est à nouveau dans une phase de quasi-paralysie.

51En outre, l’arrêté royal du 2 avril 2014 reconnaissant les membres de l’EMB fait l’objet d’un recours auprès du Conseil d’État. Prenant les devants, le ministre de la Justice du gouvernement Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD), Koen Geens (CD&V), réorganise l’institution par un arrêté royal du 15 février 2016  [74]. Celui-ci abroge tant l’arrêté contesté du 2 avril 2014 que l’arrêté royal du 3 mai 1999 (qui avait reconnu le premier Exécutif, issu des élections du 13 décembre 1998). Le nouveau dispositif reconnaît l’institution, et non plus ses membres. Dorénavant, les membres de l’EMB ne sont plus nommés par un arrêté royal, mais leurs noms sont simplement communiqués au ministre de la Justice, lequel en prend acte. Cette procédure est de rigueur pour les autres cultes reconnus, à l’exception du culte anglican ; pour des raisons historiques, les membres du Comité central du culte anglican sont en effet toujours nommés par arrêté royal  [75].

52Cette nouvelle procédure implique que les membres de l’EMB ne sont plus soumis, comme auparavant, au screening préalable de la Sûreté de l’État. Autre élément novateur, l’EMB est dorénavant composé d’un collège francophone et d’un collège néerlandophone. C’est là le premier organe représentatif d’un culte reconnu à disposer ainsi de sections linguistiques organisées par les pouvoirs publics  [76]. L’arrêté royal précise que le collège francophone est compétent pour les dossiers de la partie francophone du pays, et le collège néerlandophone pour les dossiers de la partie néerlandophone du pays, ce qui peut sembler étrange vu que la gestion du temporel des cultes reconnus est une matière régionale et non communautaire.

53L’adoption de cet arrêté royal permet de procéder à un remaniement au sein de l’EMB le mois suivant : le 18 mars, une majorité des membres de l’EMB désigne Sallah Echallaoui à la présidence, en remplacement de N. Smaïli  [77]. Inspecteur des cours de religion islamique en Communauté française, S. Echallaoui était attendu à la tête de l’EMB par certains observateurs dès 2014 car il avait été l’une des chevilles ouvrières de la réorganisation de l’institution ; il avait dû alors se contenter de la présidence de l’AGMB. L’accession de S. Echallaoui, d’origine marocaine, à la présidence de l’EMB est accompagnée d’un accord avec la communauté d’origine turque aux termes duquel il cédera sa place au bout de deux ans à l’un de leurs représentants. En mai 2018, Mehmet Üstün, responsable de la mosquée Sultan Ahmet à Zolder (dans le Limbourg) devient dès lors le huitième président de l’EMB.

54Un recours est déposé auprès du Conseil d’État à propos de l’arrêté royal du 15 février 2016. Le 18 avril 2017, un nouvel arrêté royal vient modifier les termes de celui-ci. Il fait notamment de l’EMB l’interlocuteur de toutes les communautés islamiques qui « en relèvent », et non plus des seules communautés islamiques reconnues, et supprime toute référence à des co-présidents  [78].

Tableau 1. Présidents successifs de l’Exécutif des musulmans de Belgique, 1993-2020

Tableau 1. Présidents successifs de l’Exécutif des musulmans de Belgique, 1993-2020

Tableau 1. Présidents successifs de l’Exécutif des musulmans de Belgique, 1993-2020

2.5. L’évolution des subsides octroyés à l’Exécutif des musulmans de Belgique

55Le financement public des cultes reconnus ne connaît en principe pas de subventions en faveur des organes représentatifs  [79]. Toutefois, certains postes de personnel affectés à l’organe représentatif sont pris en charge au titre de paiement des traitements des ministres des cultes. En ce qui concerne le culte islamique, dont l’organisation du financement se caractérise par un long processus de mise en place de l’organe représentatif préalablement à la reconnaissance des communautés locales et à la prise en charge des traitements, il a été décidé d’accorder une subvention à l’EMB dès sa création. Celle-ci a été maintenue après le début du paiement des traitements des ministres du culte islamique, parce que le culte islamique était dépourvu des ressources matérielles et en particulier immobilières nécessaires au fonctionnement d’une administration. L’arrêté royal du 3 juillet 1996 relatif à l’Exécutif des musulmans de Belgique a instauré une subvention couvrant « la rémunération du personnel, le coût d’achat, de location et d’aménagement des locaux, le coût d’acquisition des équipements et fournitures nécessaires ainsi que tous les autres frais de fonctionnement, directs et indirects, se rapportant à la structuration de l’activité de l’Exécutif »  [80]. L’essentiel de ces dispositions a été maintenu par la suite, plusieurs arrêtés royaux précisant la ventilation des affectations.

56Le montant de la subvention de 468 000 euros octroyée pour l’exercice 2019 a été affecté de la manière suivante  [81] :

57

  • frais de fonctionnement, 180 500 euros ;
  • traitements et charges sociales, 65 000 euros ;
  • loyers et charges locatives, 136 000 euros ;
  • frais de téléphone et de communication, 12 000 euros ;
  • frais de comptabilité et assistance juridique, 14 500 euros ;
  • frais de déplacement et jetons de présence, 30 000 euros ;
  • frais extraordinaires, 30 000 euros.

58Pour l’exercice 2020, la subvention a été portée à 583 000 euros afin de permettre le financement d’activités de formation dans la grande mosquée du Cinquantenaire. Le subside est ainsi ventilé  [82] :

59

  • frais de fonctionnement, 134 400 euros ;
  • traitements et charges sociales, 65 000 euros ;
  • loyers et charges locatives, 136 000 euros ;
  • frais de téléphone et de communication, 12 000 euros ;
  • frais de comptabilité et assistance juridique, 14 500 euros ;
  • frais de déplacement et jetons de présence, 30 000 euros ;
  • frais extraordinaires, 30 000 euros ;
  • grande mosquée, 161 100 euros.

60Outre l’octroi de ce subside, l’EMB bénéficie du paiement des salaires du personnel qui lui est attaché au titre du financement des traitements des ministres du culte (article 181, alinéa 1er de la Constitution) : le SPF Justice prend en charge le paiement des traitements de deux secrétaires généraux, quatre conseillers, neuf théologiens, neuf prédicateurs, neuf secrétaires et trois secrétaire-adjoints  [83]. Les postes de président et de vice-président de l’EMB ne sont pas rémunérés.

61Le tableau 2 présente l’évolution des subsides octroyés par l’Autorité fédérale à l’EMB depuis sa reconnaissance en 1999  [84]. Il présente pour chaque année les crédits initialement prévus au budget, ainsi que les montants réalisés.

Tableau 2. Évaluation des subsides octroyés à l’Exécutif des musulmans de Belgique, 1999-2019 (en euros)

Tableau 2. Évaluation des subsides octroyés à l’Exécutif des musulmans de Belgique, 1999-2019 (en euros)

Tableau 2. Évaluation des subsides octroyés à l’Exécutif des musulmans de Belgique, 1999-2019 (en euros)

* Montants convertis à partir des francs belges.
** Le montant proposé pour 2019 était de 647 000 euros. Toutefois, le projet de loi budgétaire n’a pu être adopté en raison de la démission du gouvernement fédéral Michel II. L’exercice 2019 s’est donc déroulé avec le même budget que le précédent.
Source : Lois budgétaires adoptées par la Chambre des représentants (montants indiqués à la division 59 « Cultes et laïcité » du SPF Justice, article 2.12.4, « Subvention pour la reconnaissance du culte islamique »).

62Les entités fédérées ont également la possibilité d’octroyer des subsides à l’EMB. C’est ainsi que la Région de Bruxelles-Capitale a régulièrement octroyé un soutien financier à l’EMB. En 2019, ce soutien, destiné à financer deux postes administratifs et « un accompagnement budgétaire, comptable et juridique », s’est monté à 172 500 euros  [85]. En outre, toujours en 2019, le gouvernement régional bruxellois a octroyé un montant supplémentaire de 50 000 euros pour la reprise en main de la gestion de la grande mosquée du Cinquantenaire  [86]. Ces soutiens financiers font de l’organe représentatif du culte islamique l’organe chef de culte le mieux financé. Il faut toutefois observer que ce financement n’étant pas prévu par la loi, il est mis en œuvre par les différents gouvernements sur une base facultative et peut donc être en tout temps revu, ce qui lui confère une certaine fragilité.

3. La reconnaissance et l’organisation du financement des communautés islamiques locales par les Régions wallonne, bruxelloise et flamande et la Communauté germanophone

63À partir du 1er janvier 2002, les Régions sont devenues compétentes pour la reconnaissance et le financement des communautés cultuelles locales, tandis que l’Autorité fédérale est restée compétente pour le paiement des traitements et pensions des ministres du culte (cf. infra), ainsi que pour la reconnaissance des cultes et celle de leurs organes représentatifs (cf. supra)  [87]. Un accord de coopération assure notamment qu’aux communautés reconnues et subsidiées par les Régions correspondent des postes rémunérés par l’Autorité fédérale  [88]. Par ailleurs, la Région wallonne a transféré l’exercice de cette compétence à la Communauté germanophone pour la région de langue allemande à dater du 1er janvier 2005  [89].

64L’EMB se trouve donc face à cinq interlocuteurs au lieu d’un seul. Il est également contraint de disposer désormais de collaborateurs tant francophones que néerlandophones (voire éventuellement, à l’avenir, germanophones).

Tableau 3. Répartition des compétences entre l’Autorité fédérale et les Régions (et la Communauté germanophone) en ce qui concerne les cultes reconnus

Tableau 3. Répartition des compétences entre l’Autorité fédérale et les Régions (et la Communauté germanophone) en ce qui concerne les cultes reconnus

Tableau 3. Répartition des compétences entre l’Autorité fédérale et les Régions (et la Communauté germanophone) en ce qui concerne les cultes reconnus

(*) Jusqu’à présent, seule l’Autorité fédérale subventionne de manière récurrente un organe représentatif d’un culte reconnu, l’EMB. Toutefois, il n’est pas interdit aux entités fédérées de le faire (ainsi, des financements sont accordés à l’EMB par la Région de Bruxelles-Capitale, cf. supra).
(**) Cette question fait l’objet d’une controverse, certains auteurs ayant retenu l’hypothèse d’une compétence fédérale en matière de logement, eu égard au caractère constitutif du traitement de cet avantage en nature. Toutefois, les législations régionales prévoient bien l’octroi de cet avantage par les communes ou les provinces (ou la Région de Bruxelles-Capitale).

65Le culte islamique est le seul dont aucune implantation locale n’avait été reconnue au moment de la régionalisation. Les premières communautés islamiques ont été reconnues en juin 2007, par la Région wallonne.

66Chaque entité fédérée a adopté des instruments législatifs et réglementaires différents.

3.1. L’évolution en Région wallonne (région de langue française)

67La législation wallonne a évolué en trois temps. Dès octobre 2005, le gouvernement wallon a organisé les communautés islamiques locales par la voie de trois arrêtés, ce qui a permis la reconnaissance des premières mosquées en 2007. Ensuite, dans le cadre d’une réforme plus générale dont l’objectif premier était de réviser les règles relatives aux fabriques d’église, l’organisation de la tutelle a été modifiée par un décret du 13 mars 2014 (dit décret Furlan). Enfin, des critères de reconnaissance des communautés locales ont été adoptés par le décret du 18 mai 2017 ; cette seconde réforme visait en premier lieu les communautés islamiques, dans un contexte marqué par les préoccupations sécuritaires liées au radicalisme violent.

68L’exercice de la compétence ayant été transféré à la Communauté germanophone pour la région de langue allemande, les évolutions de la législation wallonne décrites ci-dessous ne concernent que la région de langue française.

3.1.1. La reconnaissance des communautés islamiques (2005)

69Le 13 octobre 2005, le gouvernement wallon prend trois arrêtés destinés à permettre la reconnaissance de communautés islamiques, sans attendre que le processus de réforme de la législation sur l’ensemble des cultes ait abouti (cf. infra) ; ces trois textes organisent le fonctionnement des communautés islamiques locales  [90]. La communauté islamique locale est définie comme l’ensemble des personnes de confession islamique qui ont recours aux services de la mosquée déterminée. Chaque communauté islamique doit élire cinq représentants, qui, avec l’imam ou son délégué, constitueront le comité chargé de la gestion du temporel de la communauté. Les électeurs de ce comité sont les membres de la communauté islamique locale âgés d’au moins 16 ans, musulmans, inscrits depuis au moins un an dans le registre de la mosquée et résidant depuis au moins un an également sur le territoire de la commune où est situé le lieu de culte. Pour être éligibles en tant que membres du comité, les candidats doivent résider depuis au moins deux ans sur le territoire de la commune. Il revient à l’EMB d’organiser le processus électoral au sein de chaque communauté islamique reconnue, dans un délai de trois à six mois après la reconnaissance de la communauté. Un seul critère de reconnaissance est prévu par la réglementation wallonne : un minimum de 200 fidèles inscrits au registre de la communauté locale est imposé avant d’envisager la reconnaissance de celle-ci.

70Sur la base de cette réglementation, le 22 juin 2007, le ministre wallon des Affaires intérieures, Philippe Courard (PS), reconnaît 43 mosquées : 21 dans le Hainaut, 12 en province de Liège, 4 dans le Brabant wallon, 4 en province de Luxembourg et 2 en province de Namur. Parmi ces mosquées, 26 sont plutôt turcophones et 17 plutôt arabophones.

71L’un des trois arrêtés du 13 octobre 2005, à savoir celui portant organisation des comités islamiques, est modifié à deux reprises par la suite. Une première fois en 2009, afin de prolonger le délai dans lequel les élections doivent être organisées après la reconnaissance de la communauté, le portant au 31 décembre de l’année qui suit cette reconnaissance  [91]. Une seconde fois en 2019, pour porter à six le nombre de membres du comité, outre l’imam – ce qui permet, avec un nombre impair de membres, de dégager une majorité lors de la prise de décisions – et pour organiser un renouvellement partiel, et non plus total, des membres du comité, afin de garantir la transmission de l’expertise  [92]. Le texte initial prévoyait que les membres du comité étaient élus pour cinq ans, renouvelables. Dans sa version modifiée, le comité se renouvelle par moitié tous les trois ans, de façon analogue aux dispositions en vigueur pour les fabriques d’église. Il semblerait toutefois que plusieurs communautés islamiques éprouvent des difficultés à respecter le prescrit réglementaire à cet égard.

3.1.2. La tutelle sur les établissements publics (2014)

72Le gouvernement wallon Demotte II (PS/Écolo/CDH, 2009-2014) entreprend une réforme générale de la législation sur le temporel des cultes. La majorité éprouve des difficultés à trouver un accord sur les réformes à opérer. C’est en fin de législature que le décret dit Furlan, du nom du ministre des Pouvoirs locaux et de la Ville, Paul Furlan (PS), est adopté par le Parlement wallon.

73Daté du 13 mars 2014, le décret wallon insère dans le Code de la démocratie locale et de la décentralisation (CDLD) les dispositions relatives à la tutelle administrative sur les établissements publics chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus, mais il ne modifie ni la procédure de reconnaissance des nouvelles communautés ni l’organisation des établissements publics  [93]. Parmi les nouveautés, figure le fait que les budgets et les comptes des fabriques d’église sont désormais soumis à l’approbation – et non plus seulement à l’avis – des conseils communaux.

74Ce décret, qui vise à la simplification des procédures et au renforcement de la tutelle, est considéré par certains représentants du culte catholique comme faisant perdre leur spécificité aux établissements cultuels, assimilés à d’autres établissements publics tels que les centres publics d’action sociale (CPAS). Dès lors, il fait l’objet d’un recours en annulation déposé par les évêques wallons et plusieurs fabriques d’église. Dans son arrêt du 1er octobre 2015, la Cour constitutionnelle maintient le décret wallon, à l’exception d’une disposition secondaire  [94].

75Outre l’insertion des dispositions relatives à la tutelle sur les établissements publics des cultes reconnus dans le CDLD, le décret wallon du 13 mars 2014 remanie profondément la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes. L’objectif principal est de moderniser des dispositifs relatifs à la tutelle sur les fabriques d’église. En ce qui concerne le temporel du culte islamique, le décret toilette l’article 18bis, qui se lit désormais comme suit en Région wallonne : « Les dispositions applicables aux fabriques d’église cathédrale en matière de budgets et de comptes s’appliquent, mutatis mutandis, aux établissements cultuels des cultes orthodoxe et islamique »  [95].

76Le décret abroge également les articles 17 à 25 de l’arrêté du 13 octobre 2005 portant organisation des comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues, qui concernent les budgets et les comptes.

Tutelle d’approbation

77Bien que le décret du 13 mars 2014 établisse une tutelle d’approbation de la commune sur les budgets et les comptes des établissements financés au niveau communal (à savoir les fabriques d’église du culte catholique et les établissements assimilés des cultes protestant, israélite et anglican), il n’établit pas de tutelle d’approbation des provinces sur les budgets et les comptes des établissements financés au niveau provincial (à savoir les établissements des communautés islamiques, les fabriques d’église du culte orthodoxe et les fabriques d’église cathédrale pour le culte catholique) : c’est le gouvernement wallon qui exerce directement la tutelle d’approbation, après avoir recueilli l’avis de la province concernée  [96].

78En ce qui concerne les établissements publics du culte islamique, la tutelle sur les budgets et les comptes est exercée par l’EMB et par le gouvernement wallon. De ce fait, en cas de non-approbation par le gouvernement régional, l’établissement concerné ne dispose pas d’un droit de recours auprès d’une instance supérieure : il ne peut alors se tourner que vers le Conseil d’État. Budgets et comptes sont également transmis au conseil provincial, qui remet son avis au gouvernement wallon.

Tutelle d’annulation

79Le gouvernement wallon peut annuler la délibération d’un comité islamique, qu’il s’agisse d’une délibération dont la transmission est obligatoire ou d’une délibération dont il a demandé la communication. Doivent obligatoirement être transmises les délibérations qui portent sur des travaux ou fournitures qui dépassent certains plafonds, sur des dons et legs supérieurs à 10 000 euros, sur les opérations immobilières supérieures à ce même montant et sur la construction d’un immeuble à affecter à l’exercice du culte ou au logement d’un ministre du culte.

3.1.3. Les critères de reconnaissance (2017)

80Le 13 octobre 2015, le Parlement wallon confie au député Pierre-Yves Jeholet (MR) la mission de rédiger un rapport introductif sur le financement public des cultes en Région wallonne. Le rapport, déposé le 17 mai 2016, évoque différentes pistes de réforme possibles  [97].

81Après ce dépôt, le Parlement wallon met en place un groupe de travail consacré à la question des cultes. Toutefois, un projet de décret relatif à la reconnaissance et aux obligations des établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus, déposé par le gouvernement Magnette (PS/CDH) le 27 mars 2017, s’impose dans le débat parlementaire  [98]. Le texte s’inscrit dans le cadre des préoccupations sécuritaires nées dans la foulée des divers attentats terroristes islamistes ayant récemment endeuillé l’Europe (dont ceux perpétrés à Paris les 7-9 janvier 2015 et 13 novembre 2015, et à Bruxelles et Zaventem le 22 mars 2016). L’exposé des motifs indique : « Par sa stratégie de prévention du radicalisme, la Wallonie tente d’apporter des réponses durables aux causes de fond de la radicalisation tout en veillant à ne créer aucun amalgame, et ce dans le respect des valeurs fondamentales du vivre-ensemble. Dans ce cadre, une piste intéressante pour prévenir la radicalisation revendiquée au nom des cultes a été d’établir, au travers d’un décret, une procédure de reconnaissance des établissements de gestion du temporel des cultes ainsi qu’un encadrement plus strict des communautés reconnues. En effet, si les croyances philosophiques reconnues en Belgique ne sont pas à l’origine de comportements de radicalisme violent, un certain nombre d’individus trouvent refuge dans des discours radicaux, violents et haineux prononcés au nom d’un culte »  [99]. Le texte projeté a ainsi pour objectif de durcir les conditions de reconnaissance d’une nouvelle communauté cultuelle locale. Si les mots « mosquée » ou « communauté locale islamique » n’apparaissent pas dans le texte, l’intention du gouvernement wallon est évidente.

82Outre des critères de reconnaissance – et de maintien de cette reconnaissance –, le projet de décret prévoit l’obligation pour chacun des membres des organes de gestion de l’établissement public, y compris le ministre du culte, de prêter serment  [100] entre les mains du bourgmestre (pour les cultes financés au niveau communal) ou du président du collège provincial (pour les cultes financés au niveau provincial). Le projet innove également en prévoyant une procédure de retrait de la reconnaissance et l’obligation pour toutes les communautés cultuelles non reconnues ou dont la reconnaissance a été retirée de s’enregistrer : « Toute communauté, non reconnue ou dont la reconnaissance a été retirée en application du chapitre III, et au sein de laquelle s’exerce une activité cultuelle, adresse au gouvernement wallon une déclaration d’enregistrement ». Cette obligation est justifiée, dans l’exposé des motifs, par « l’objectif d’élaboration d’un cadastre des lieux de cultes par les communes ». Par ailleurs, par le biais de cette disposition, est introduit un délai avant de pouvoir demander la reconnaissance : parmi les documents à fournir pour toute demande de reconnaissance d’une nouvelle communauté, figure une attestation d’enregistrement depuis 3 ans. Toujours selon l’exposé des motifs, « l’attestation d’enregistrement délivrée par le gouvernement wallon est destinée à apprécier la capacité de gestion administrative de la communauté puisque cet enregistrement a nécessité un minimum de démarches et de collecte d’informations qui témoignent déjà d’une maîtrise d’une partie de l’arsenal juridique ».

83Le 19 septembre 2016, la section de législation du Conseil d’État rend un avis critique sur plusieurs points  [101]. Elle souligne notamment que la Région wallonne ne dispose pas de compétences lui permettant d’imposer la connaissance de la langue française par les membres des organes de gestion des établissements en charge du temporel des cultes. Le Conseil d’État fait également observer que la Région n’étant compétente que pour les fabriques d’église et autres établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus, elle est donc sans compétence pour prévoir un système d’enregistrement qui, au-delà des cultes d’ores et déjà reconnus par l’Autorité fédérale, s’étendrait de manière générale à toutes les communautés au sein desquelles s’exerce une activité cultuelle. Le Conseil d’État s’interroge également sur la compatibilité de certaines mesures avec la liberté religieuse. Rappelant, d’une part, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en ce qui concerne le droit pour les individus eux-mêmes et pour la communauté cultuelle qu’ils forment d’exprimer leurs convictions, et, d’autre part, le droit pour cette communauté de voir respecter son autonomie organisationnelle, notamment dans le choix de ses dirigeants, le Conseil d’État estime que le critère de « respect, par l’ensemble des fidèles, des valeurs démocratiques », qui impliquerait le devoir pour une communauté cultuelle locale d’exclure tout fidèle ne respectant pas les valeurs démocratiques, n’est pas admissible. En particulier, « une communauté cultuelle ne peut être « sanctionnée » par un défaut de reconnaissance, ou par la perte de celle-ci, pour la seule raison qu’elle compte en son sein des fidèles qui ne respecteraient pas les « valeurs démocratiques ».

84Lors de son exposé devant une commission du Parlement wallon, le ministre des Pouvoirs locaux, Pierre-Yves Dermagne (PS), présente le texte comme s’insérant dans le cadre de la prévention du radicalisme en Wallonie, à propos de laquelle une note a été adoptée par le gouvernement wallon le 29 janvier 2015. Parmi ses objectifs, figure le fait d’« éviter au maximum l’existence d’une pratique cultuelle dans la clandestinité, avec toutes les difficultés de contrôle, notamment des messages véhiculés, qui en découlent »  [102]. Approuvant le dépôt du projet de décret, au sujet duquel existe un accord politique, P.-Y. Jeholet (MR) rappelle certaines possibilités qui avaient été explorées par son rapport mais qui n’ont pas été reprises par le gouvernement, tel le fait de conditionner l’exemption du paiement du précompte immobilier à l’enregistrement, afin d’éviter l’écueil de l’impossibilité de contraindre les communautés cultuelles de cultes non reconnus à s’enregistrer. Josy Arens (CDH) souligne que, « à cause du radicalisme qui se développe au sein de certains cultes, et ce malgré eux, ce sont tous les cultes qui sont touchés par ce projet de décret. On voit toute la difficulté (…) d’apporter un cadre efficace de lutte contre le radicalisme, tout en essayant de préserver au maximum la liberté de culte consacrée dans notre Constitution ». Aussi s’inquiète-t-il de la capacité de l’ensemble des églises catholiques à recevoir l’attestation de conformité des pompiers. Rappelant que la laïcité organisée relève de l’Autorité fédérale, J. Arens demande enfin si des discussions se tiennent avec le niveau de pouvoir fédéral « concernant un contrôle semblable vis-à-vis de la laïcité »  [103].

85Des amendements sont apportés au projet initial lors de la discussion parlementaire. Certains d’entre eux sont adoptés, dont l’un relatif au remplacement de la prestation de serment des administrateurs des lieux de culte entre les mains du bourgmestre par une déclaration sur l’honneur écrite. Dans son avis, l’Union des villes et communes de Wallonie (UVCW) a estimé que la prestation de serment poserait trop de difficultés pratiques  [104].

86Le projet de décret ainsi amendé est adopté à l’unanimité des 70 membres présents en séance plénière le 17 mai 2017, moins une voix. Le député indépendant André-Pierre Puget (élu sur la liste PP de la circonscription de Liège en 2014) s’est abstenu  [105].

87Le décret du 18 mai 2017  [106] liste le contenu de la demande de reconnaissance d’une communauté locale, adressée par l’organe représentatif au gouvernement wallon :

88

« 1° la structure juridique actuelle de la communauté cultuelle locale ;
2° un listing des communes de la province qui seront desservies par l’établissement chargé de la gestion du temporel des cultes reconnus ;
3° l’identification de toutes les personnes physiques qui exerceront les fonctions de membres du premier organe de l’établissement chargé de la gestion du temporel des cultes reconnu et, pour chacune d’elles, un extrait de casier judiciaire vierge ;
4° un extrait de la matrice cadastrale du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte, reprenant le nom et l’adresse du propriétaire actuel, la nature du bien, la section, le numéro parcellaire, l’année de construction, la superficie de la parcelle, le revenu cadastral non indexé ;
5° une copie du permis d’urbanisme du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte, délivré spécifiquement dans le cadre de l’activité cultuelle envisagée ;
6° un rapport d’architecte ou notaire ou géomètre concernant l’état général du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte, et indiquant notamment la superficie ;
7° une copie des contrats d’assurances incendie et responsabilité civile du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte ;
8° l’attestation du commandant des pompiers, datée de moins de douze mois par rapport à la date d’introduction de la demande de reconnaissance, sur la conformité aux normes de sécurité en vigueur, du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte ;
9° une note signée par les personnes visées au 3° spécifiant la nature des droits réels, sur le bâtiment ou les bâtiments utilisés comme lieu de culte, dont disposera l’établissement chargé de la gestion du temporel des cultes reconnus ainsi que tout document probant, ou à défaut, lorsque le bâtiment ou les bâtiments utilisés comme lieu de culte n’appartiennent pas à un pouvoir public, une copie de la convention d’utilisation du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte conclue avec le propriétaire ;
10° une note signée par les personnes visées au 3° confirmant l’adéquation de la superficie du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte au regard du nombre réel de membres de la communauté cultuelle locale ;
11° une note signée par les personnes visées au 3° contenant une projection du nombre de membres de la communauté cultuelle locale au cours des six prochaines années et, en cas d’insuffisance de la superficie du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte, au regard de la progression attendue de la communauté cultuelle locale, les solutions envisagées pour y faire face ;
12° une déclaration écrite par laquelle les personnes visées au 3° dont le ou les ministres du culte s’engagent à respecter la législation sur l’emploi des langues en matière administrative ;
13° pour les personnes visées au 3° dont le ou les ministres du culte, une déclaration sur l’honneur, dûment signée par chacun d’entre eux et attestant qu’ils s’engagent à :
  • a) respecter la Constitution, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’ensemble des législations existantes ;
  • b) ne pas collaborer à des actes contraires à la Constitution, à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et aux législations existantes ;
  • c) déployer les efforts nécessaires à ce que la communauté cultuelle locale dont elles sont membres ne soit pas associée à des propos ou à des actes contraires à la Constitution et à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
14° un état détaillé de la situation patrimoniale (patrimoine financier, patrimoine immobilier – le dossier titre – ...) ;
15° les budgets et comptes des trois dernières années de la structure juridique reprise au 1° ;
16° une projection budgétaire à trois ans, sincère et réaliste, basée sur des éléments objectifs, notamment sur l’état patrimonial et qui concrétisera la progression attendue de la communauté cultuelle locale ;
17° l’attestation d’enregistrement visée à l’article 17, portant une date antérieure d’au minimum trois années par rapport à la date de demande de reconnaissance visée à l’article 3 ;
18° tout autre document estimé pertinent par l’organe représentatif agréé. »

89Le gouvernement wallon transmet une copie du dossier à la province concernée et à la commune sur le territoire de laquelle est situé le lieu de culte. Dans les 60 jours, le conseil provincial de la province concernée et le conseil communal de la commune sur le territoire de laquelle est situé le lieu de culte transmettent leur avis. Ce délai est prorogeable de même durée et à deux reprises. Dès réception de l’avis du conseil provincial et du conseil communal, ou à défaut de transmission d’avis dans le délai, dès l’expiration de ce dernier, le gouvernement wallon transmet une copie du dossier complet au ministre fédéral de la Justice, qui rend un avis. L’article 8 du décret énonce les critères d’évaluation de la demande par le gouvernement wallon :

90

« 1° l’existence d’un lieu de culte conforme à l’usage auquel il est destiné et adapté à la taille de la communauté cultuelle locale ;
2° l’existence d’une structure juridique adaptée au statut public sollicité et répondant à des obligations légales ;
3° l’absence de violation, par les membres des organes de gestion de l’établissement cultuel dont le ou les ministres du culte, de la Constitution, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’ensemble des législations existantes, ainsi que la démonstration de leur capacité de gestion administrative et financière. »

91La décision du gouvernement wallon est notifiée à l’organe représentatif, à la communauté locale, au ministre fédéral de la Justice, à la province concernée et à la commune sur le territoire de laquelle est situé le lieu de culte. La décision du gouvernement wallon est publiée par extrait au Moniteur belge.

92L’article 10 du décret organise le contrôle des établissements qui doivent continuer à remplir les critères posés lors de leur reconnaissance, et les articles 11, 12 et 13 organisent la procédure de retrait de la reconnaissance.

93Les articles 15, 16 ou 17 organisent la procédure d’enregistrement des communautés non reconnues : toute communauté au sein de laquelle s’exerce une activité cultuelle, non reconnue ou dont la reconnaissance a été retirée, adresse au gouvernement wallon une déclaration d’enregistrement. Celle-ci comprend :

94

« 1° le nom de la communauté ;
2° l’adresse du ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte ;
3° la structure juridique actuelle de la communauté ;
4° les coordonnées du responsable (nom, prénoms, nationalité, adresse postale, coordonnées téléphoniques, courriel, numéro national) ;
5° les coordonnées du ministre du culte (nom, prénoms, nationalité, adresse postale, coordonnées téléphoniques, courriel, numéro national) ;
6° le nombre de personnes fréquentant le ou les bâtiments utilisés comme lieu de culte ;
7° une copie du permis d’urbanisme du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte délivré spécifiquement dans le cadre de l’activité cultuelle envisagée ;
8° une copie des contrats d’assurances incendie et responsabilité civile du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte ;
9° l’attestation du commandant des pompiers sur la conformité aux normes de sécurité en vigueur, du bâtiment ou des bâtiments utilisés comme lieu de culte. »

95Dès réception de l’ensemble des éléments, le gouvernement wallon adresse à la communauté une attestation d’enregistrement datée. Le décret précise que le gouvernement régional arrête les modèles de déclaration et d’attestation d’enregistrement. À ce jour, de tels modèles n’ont pas été publiés, peut-être parce que le dispositif d’enregistrement faisait l’objet d’un recours auprès de la Cour constitutionnelle.

Le recours auprès de la Cour constitutionnelle

96Le 14 décembre 2017, le décret wallon du 18 mai 2017 fait l’objet d’un recours auprès de la Cour constitutionnelle introduit par quatre asbl (Association musulmane culturelle albanaise de Belgique, Association culturelle albanaise de Namur, Fédération islamique de Belgique et Union des mosquées de la province de Liège) et par l’Association internationale Diyanet de Belgique (aisbl). Estimant que le décret viole la liberté de religion et discrimine le culte islamique dans la mesure où il a pour objectif réel de lutter contre le radicalisme et donc d’influencer le contenu du culte lui-même, les requérants soutiennent que la Région wallonne a outrepassé ses compétences et demandent l’annulation des dispositions du décret relatives à l’enregistrement des communautés non reconnues, à la déclaration sur l’honneur des gestionnaires de respecter diverses normes juridiques fondamentales ainsi qu’à l’emploi des langues.

97Dans son arrêt du 19 décembre 2019  [107], la Cour constitutionnelle déboute les requérants en ce qui concerne la majorité de leurs demandes, ne faisant droit que partiellement à la demande visant la procédure d’enregistrement : la Région n’étant compétente que pour le temporel des cultes reconnus, il y a lieu de ne pas étendre la procédure d’enregistrement aux communautés locales des cultes non reconnus par l’Autorité fédérale.

98La Cour constitutionnelle ne retient pas autrement l’argument de dépassement des compétences régionales ou de discrimination à l’égard du culte islamique. Elle souligne que « la circonstance que le décret du 18 mai 2017 s’inscrit dans la mise en œuvre de la stratégie de prévention du radicalisme poursuivie par la Région wallonne et qu’il entend contribuer, à titre accessoire, à la réalisation d’objectifs qui sont également poursuivis par l’Autorité fédérale et les Communautés ne peut entraîner à elle seule une violation des règles répartitrices de compétences »  [108]. En ce qui concerne l’emploi des langues, la Cour relève toutefois que l’engagement de respecter l’emploi des langues en matière administrative ne peut s’appliquer au ministre du culte que dans ses activités administratives, en tant que membre de l’organe de gestion, et non dans ses activités proprement cultuelles.

99Une fois encore, la Cour constitutionnelle rappelle les limites, d’une part, de la liberté de religion et, d’autre part, des mesures d’organisation du culte : « La liberté de religion et de culte ne s’oppose pas à ce que l’autorité prenne des mesures positives permettant l’exercice effectif de cette liberté. L’organisation, par le législateur compétent, de la reconnaissance des communautés cultuelles locales des cultes reconnus et des obligations des établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus est susceptible de contribuer à la jouissance effective de la liberté de culte. Ceci n’empêche cependant pas que de telles mesures doivent être considérées comme des ingérences dans le droit des cultes reconnus de régler de manière autonome leur fonctionnement. De telles ingérences sont admissibles pourvu qu’elles constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la satisfaction d’un besoin social impérieux visé à l’article 9 de la Convention européenne des droits de l’homme et que ces mesures fassent l’objet d’une réglementation suffisamment accessible et précise. Il doit exister un lien raisonnable de proportionnalité entre le but légitime poursuivi, d’une part, et la limitation de cette liberté, d’autre part »  [109].

100En dépit de cette modernisation de la législation régionale, le gouvernement wallon ne reconnaît pas de nouvelles mosquées. Au contraire, il retire l’agrément de 4 d’entre elles, ce qui porte à 39 le nombre de mosquées actuellement reconnues en Région wallonne : 19 dans le Hainaut, 10 dans la province de Liège, 4 dans le Brabant wallon, 4 dans la province de Luxembourg et 2 dans la province de Namur.

3.1.4. Les montants pris en charge par les provinces wallonnes

101Outre les obligations auxquelles elles sont tenues – à savoir la prise en charge du déficit des communautés islamiques, le financement des grosses réparations aux édifices du culte et la fourniture du logement aux imams premier en rang –, les provinces wallonnes peuvent financer de façon facultative la construction de lieux de culte ou soutenir des communautés islamiques non encore reconnues.

102Le tableau 4 présente l’évolution des subsides provinciaux en faveur du culte islamique en Wallonie en 2015-2019. Il montre que les interventions provinciales restent modestes dans cette région. Par exemple, en 2019, elles ont concerné 18 établissements, avec un montant moyen s’élevant à un peu moins de 6 000 euros par mosquée en ce qui concerne l’intervention ordinaire (c’est-à-dire la couverture du déficit).

Tableau 4. Évolution des interventions financières des provinces wallonnes en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2015-2019), montant annuel en euros pour les cinq provinces

Tableau 4. Évolution des interventions financières des provinces wallonnes en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2015-2019), montant annuel en euros pour les cinq provinces

Tableau 4. Évolution des interventions financières des provinces wallonnes en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2015-2019), montant annuel en euros pour les cinq provinces

Remarques :
- Il s’agit des montants dus par les provinces pour chaque exercice, et non des montants ayant été réellement payés à ce moment-là. En raison des délais nécessaires au contrôle des comptes des établissements, les subventions ne sont parfois liquidées que deux ou trois années plus tard, voire pas du tout.
- Les montants mentionnés ne concernent pas l’ensemble des établissements des communautés islamiques ; quelques-uns ne déposent pas leurs budgets ou leurs comptes.
Source : Données communiquées par le Service public de Wallonie (SPW) Intérieur et Action sociale.

3.2. L’évolution en Région bruxelloise

103La Région bruxelloise présente une particularité institutionnelle, celle de l’absence de l’échelon provincial. Aussi, pour le culte islamique, le déficit des communautés locales est pris en charge par la Région, qui est également le niveau de pouvoir édictant la législation en la matière.

104Après la régionalisation de la loi communale au 1er janvier 2002, le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale adopte, dans un premier temps (juillet 2002), deux ordonnances qui ont essentiellement pour effet de moderniser et de mettre en adéquation avec la réalité institutionnelle actuelle la législation sur les fabriques d’église  [110]. Dans un second temps (juin 2006), une ordonnance vient donner un cadre à la reconnaissance et à la mission des communautés islamiques  [111]. Celles-ci y sont définies comme « un organisme public doté de la personnalité juridique qui est géré par un comité. (…) La communauté islamique est chargée du soin des conditions matérielles qui rendent possible l’exercice du culte. (…) La communauté islamique est chargée de l’entretien et de la conservation de la mosquée ainsi que de la gestion des biens et des moyens financiers qui lui appartiennent ou qui sont destinés à l’exercice du culte ». Le comité islamique est l’organe de gestion de la communauté islamique. Il se compose de cinq membres élus par les membres de la communauté, qui doivent être inscrits depuis un an au moins dans son registre et avoir atteint l’âge de 18 ans accomplis. L’ordonnance ne prévoit pas que l’imam de la mosquée soit repris comme membre du comité. Comme en Région wallonne, la demande de reconnaissance ne peut être introduite que lorsque la mosquée peut faire état d’un minimum de 200 fidèles inscrits au registre de la mosquée.

105Le 8 février 2007, un arrêté d’application définit le contenu du dossier de reconnaissance à déposer  [112] : outre la justification du nombre de fidèles, le dossier doit comprendre l’avis du collège des bourgmestre et échevins de la commune sur le territoire de laquelle se trouve le bâtiment de la mosquée, et la preuve que le bâtiment de la mosquée « répond aux normes de sécurité et à la législation urbanistique en vigueur ». Cette dernière exigence se révèle difficile à rencontrer pour de nombreuses mosquées installées dans des habitations particulières transformées.

106Le 13 décembre 2007, le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale reconnaît cinq premières mosquées bruxelloises : Fatih Camii (Schaerbeek), ASCTTB (Anderlecht), Al Karam (Forest), Badr (Molenbeek-Saint-Jean) et le Bangladesh Islamic Cultural Centre (Ixelles). Par la suite, d’autres mosquées sont reconnues : 3 en 2010, 2 en 2011, 4 en 2013, 3 en 2017, 2 en 2018 et 2 en 2019, portant à 21 le nombre de communautés islamiques locales reconnues en Région bruxelloise. Bien qu’elle n’ait pas réformé sa législation sur les cultes en profondeur, la Région de Bruxelles-Capitale est la seule région du pays à avoir poursuivi régulièrement la reconnaissance des mosquées.

107Le tableau 5 présente l’évolution des subsides régionaux en faveur des communautés islamiques en Région bruxelloise en 2014-2020. Il permet d’observer une augmentation du budget régional consacré au financement des communautés locales du culte islamique. Cette augmentation est imputable principalement à la hausse du nombre de communautés reconnues et à l’augmentation des interventions extraordinaires. Le montant moyen de l’intervention ordinaire par communauté a connu également une hausse, demeurée toutefois aux alentours de 22 % (soit environ 15 % en tenant compte de l’inflation). En 2014, le montant moyen de l’intervention par communauté était de 7 106 euros ; en 2020, il est prévu qu’il atteigne 8 713 euros. Il s’agit donc d’un montant environ 50 % plus élevé qu’en Région wallonne.

Tableau 5. Évolution des interventions financières de la Région de Bruxelles-Capitale en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2014-2020), montant annuel en euros

Tableau 5. Évolution des interventions financières de la Région de Bruxelles-Capitale en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2014-2020), montant annuel en euros

Tableau 5. Évolution des interventions financières de la Région de Bruxelles-Capitale en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2014-2020), montant annuel en euros

Remarque : Les montants mentionnés ne concernent pas l’ensemble des établissements des communautés islamiques ; quelques-uns ne déposent pas leurs budgets ou leurs comptes.
Source : Données communiquées par Direction des Finances locales de Bruxelles Pouvoirs locaux (BPL, administration du Service public régional de Bruxelles).

108Un projet d’ordonnance relatif à la gestion du temporel des communautés cultuelles locales reconnues, comprenant des critères de reconnaissance nouveaux, a été préparé par le gouvernement bruxellois Vervoort II (PS/FDF/CDH/Open VLD/SP.A/CD&V) durant la législature régionale 2014-2019 ; il n’a toutefois pas été déposé au Parlement. Le dossier a été repris par le gouvernement Vervoort III (PS/Écolo/Défi/Groen/Open VLD/ one.brussels-sp.a) et un avant-projet d’ordonnance « organique de la gestion des intérêts matériels des communautés cultuelles locales » a été approuvé par le gouvernement et envoyé pour examen à la section de législation du Conseil d’État le 24 mars 2020. La réforme de la législation régionale sur laquelle le Parlement est appelé à se pencher comporte deux éléments de rupture importants  [113]. D’une part, la gestion de tous les cultes serait ramenée au niveau régional (et non plus communal pour les cultes catholique, protestant-évangélique, anglican et israélite). D’autre part, les interventions financières de la Région seraient plafonnées à 30 ou 40 % des dépenses ordinaires des établissements. L’adoption de critères de reconnaissance des communautés locales similaires à ceux qui sont déjà en vigueur dans les deux autres Régions fait également partie des changements envisagés.

3.3. L’évolution en Région flamande

109La Région flamande est la première entité fédérée à procéder à une refonte de la législation sur le temporel des cultes. Dès le mois de mai 2004, elle adopte un décret relatif aux cultes, qui remplace la loi du 4 mars 1870 tout en reprenant les principaux mécanismes de celle-ci, et notamment l’organisation (et le financement) du culte islamique comme du culte orthodoxe sur une base provinciale, et non pas communale comme pour les autres cultes  [114]. Le décret contient des dispositions particulières pour chaque culte reconnu. Le titre IV - chapitre II est consacré aux « dispositions particulières relatives au culte islamique ». Le comité de gestion de la communauté islamique se compose de 5 membres élus et de l’imam premier en rang ou son suppléant. Parmi les principales innovations du décret flamand, figure la rédaction d’un plan budgétaire pluriannuel par le comité, la création d’une administration centrale dans les provinces où plus de quatre communautés islamiques locales sont reconnues, l’obligation de dépôt des procès-verbaux des réunions du conseil d’administration de l’établissement auprès du gouverneur de la province et l’introduction de critères de reconnaissance pour les nouvelles communautés locales, critères à préciser dans un arrêté d’application.

110Le 30 septembre 2005, les critères de reconnaissance des nouvelles communautés cultuelles locales sont définis par un arrêté d’application  [115] porté par le ministre des Affaires intérieures du gouvernement flamand Leterme (CD&V/VLD/SP.A/Spirit/N-VA), Marino Keulen (VLD), en charge de l’intégration et des cultes. La volonté de subordonner la reconnaissance des mosquées à leur engagement à ne pas prêcher des idées extrémistes, à s’exprimer en néerlandais vis-à-vis des autorités et à témoigner leur ouverture est manifeste dans la détermination des éléments du dossier de reconnaissance à introduire : outre les éléments classiques relatifs à l’identification de la mosquée, de ses gestionnaires et de son bâtiment, un inventaire du patrimoine et un plan financier, y figure une série de déclarations écrites de la part des responsables de la mosquée par lesquelles ils s’engagent à respecter la législation sur l’usage des langues, à respecter les droits fondamentaux et la Constitution, à ne pas soutenir d’activité contraire à ceux-ci et, enfin, à ne pas permettre l’occupation des locaux de la communauté islamique locale par des individus dont les activités (ou les intentions) seraient contraires à la Constitution. Les critères définis par la réglementation flamande seront d’ailleurs une source d’inspiration pour le législateur wallon lors de l’élaboration du décret du 18 mai 2017 (cf. supra).

111Par la suite, le décret flamand du 7 mai 2004 est modifié à deux reprises, en particulier pour faciliter les regroupements de fabriques du culte catholique, sans que les dispositions relatives à la gestion du culte islamique en soient fondamentalement modifiées  [116].

112Le 22 décembre 2007, le ministre M. Keulen, qui a indiqué un an auparavant avoir reçu 34 dossiers, reconnaît les six premières mosquées de Flandre : Assounah (Desselgem), Beraat (Diest), Mehmet Akif (Anvers), Selimiye (Heusden-Zolder), Yavuz (Gand) et Noor Ul Haram (Anvers). D’autres reconnaissances suivent, portant le total des mosquées reconnues en Région flamande à 27.

113Toutefois, depuis quelques années, plus aucune nouvelle mosquée n’a été reconnue par le gouvernement flamand. En septembre 2017, la ministre des Affaires intérieures du gouvernement flamand Bourgeois (N-VA/CD&V/Open VLD), Lisbeth Homans (N-VA), a confirmé le gel de la reconnaissance de toute nouvelle mosquée, en dépit d’un accord favorable reçu de l’Autorité fédérale sur les dossiers de 20 nouvelles communautés  [117]. Simultanément, le gouvernement flamand a procédé au retrait de la reconnaissance de la mosquée de Beringen, un retrait qui a été validé par le Conseil d’État dans son arrêt déboutant le recours introduit par l’établissement  [118]. Le retrait a été motivé, semble-t-il, non pas par un risque de radicalisation religieuse mais bien par des soupçons d’activités d’espionnage au profit du gouvernement turc.

114En revanche, la mosquée Al Ihsaan de Louvain, suspectée de tendances extrémistes, conservera finalement sa reconnaissance, a annoncé le ministre de l’Administration intérieure du gouvernement flamand Jambon (N-VA/CD&V/Open VLD), Bart Somers (Open VLD), en décembre 2019. La procédure de retrait initiée en juillet par L. Homans n’a pas abouti faute de motifs suffisants  [119].

115Le gouvernement Jambon, constitué le 2 octobre 2019, a annoncé l’adoption de nouveaux critères de reconnaissance plus stricts, notamment en ce qui concerne le financement et l’influence étrangère et en imposant un stage d’attente de quatre ans entre la demande de reconnaissance et la décision  [120]. Par ailleurs, le screening des communautés confessionnelles candidates à la reconnaissance devrait être confié à un nouveau service ad hoc spécifiquement flamand – plutôt qu’à la Sûreté de l’État, qui est un organe fédéral –, qui sera également chargé de veiller à la pratique du néerlandais. Le président de l’EMB, Mehmet Üstün, a réagi négativement à cette annonce. Sans objection à propos d’une surveillance des mosquées par les autorités, M. Üstün a toutefois déploré qu’elle s’effectue préalablement à la reconnaissance et non postérieurement à celle-ci, estimant le trop long délai de quatre ans annoncés avant de pouvoir obtenir cette reconnaissance  [121].

116Le tableau 6 présente l’évolution des subsides régionaux en faveur des communautés islamiques en Région flamande en 2015-2017 (malheureusement, les montants relatifs aux interventions provinciales pour 2018 et 2019 ne sont pas disponibles). Dans cette région, la moyenne de l’intervention financière provinciale ordinaire est de 33 000 euros ; elle est environ 5 fois plus élevée qu’en Région wallonne et 4 fois plus élevée qu’en Région bruxelloise. Étant donné que les mécanismes de financement et les dépenses admissibles sont sensiblement les mêmes dans les trois régions, cette différence demeure à ce stade inexpliquée.

Tableau 6. Évolution des interventions financières des provinces flamandes en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2015-2017), montant annuel en euros pour les cinq provinces

Tableau 6. Évolution des interventions financières des provinces flamandes en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2015-2017), montant annuel en euros pour les cinq provinces

Tableau 6. Évolution des interventions financières des provinces flamandes en faveur des établissements publics de gestion des communautés islamiques reconnues (2015-2017), montant annuel en euros pour les cinq provinces

Remarque : Contrairement à la situation prévalant en Région wallonne et en Région bruxelloise, ces chiffres concernent tous les établissements des communautés islamiques reconnues : ils déposent tous leurs budgets et leurs comptes.

3.4. L’évolution en Communauté germanophone

117La Communauté germanophone, à qui la Région wallonne a transféré l’exercice de la compétence sur les communautés et établissements cultuels locaux pour la région de langue allemande, modifie sa législation en deux temps. Dans un premier temps (décembre 2004), un décret organisant la tutelle administrative ordinaire sur les communes organise également la tutelle sur les fabriques d’église et organismes assimilés  [122]. En cette matière, le texte modifie le décret impérial du 30 décembre 1809 sur les fabriques d’église et la loi du 4 mars 1870 pour les adapter à la situation institutionnelle de la Communauté germanophone. Dans un second temps (janvier 2006), la loi du 4 mars 1870 est modifiée à nouveau par un décret, qui ne concerne toutefois pas les administrations du culte islamique, dont aucune communauté locale n’est alors reconnue en Communauté germanophone  [123].

118En mai 2008, un nouveau décret relatif à l’organisation matérielle et au fonctionnement des cultes reconnus est adopté par le Parlement de la Communauté germanophone  [124]. Il ne concerne toutefois que les cultes catholique et protestant. Il est toutefois à noter que, la même année, est constitué en asbl l’Islamische Zentrum Eupen (Attawba-Moschee), qui entretient des contacts réguliers avec les autorités publiques de la Communauté germanophone.

119À ce jour, aucune communauté islamique n’est reconnue en Communauté germanophone (et, plus largement, aucune n’a introduit de demande en ce sens auprès du gouvernement).

4. Les ministres du culte islamique

120Héritage direct du Concordat de 1801, la prise en charge des traitements du « clergé » constitue l’une des pierres angulaires du régime belge des cultes ; elle est prévue par la Constitution à l’article 181 (anciennement article 117)  [125].

4.1. La prise en charge du traitement des ministres du culte islamique

121Les ministres du culte islamique dont le traitement est pris en charge par l’Autorité fédérale (à savoir, plus précisément, par le SPF Justice) sont nommés auprès des communautés islamiques reconnues par les Régions. Au 1er janvier 2019, le nombre de ministres du culte islamique était de 87. À côté des fonctions d’imams, un certain nombre de postes sont financés auprès de l’EMB. Le tableau 7 présente le nombre de postes financés avec le salaire annuel brut non indexé correspondant.

Tableau 7. Ministres du culte islamique financés par le SPF Justice et traitements versés (situation au 20 février 2020)

Tableau 7. Ministres du culte islamique financés par le SPF Justice et traitements versés (situation au 20 février 2020)

Tableau 7. Ministres du culte islamique financés par le SPF Justice et traitements versés (situation au 20 février 2020)

Source : Données communiquées par le SPF Justice.

122Chaque mosquée reconnue a droit, en théorie, à un poste d’imam premier en rang. Si la mosquée compte un nombre de fidèles plus important, un imam deuxième en rang peut lui être affecté, voire également un imam troisième en rang. Les rémunérations des ministres des cultes sont fixes et n’évoluent pas en cours de carrière. L’imam premier en rang bénéficie en outre d’un logement mis à sa disposition, ou, plus fréquemment, d’une indemnité de logement payée par la province ou par la Région de Bruxelles-Capitale. Les traitements des ministres du culte islamique sont comparables à ceux en vigueur pour les autres cultes. Ainsi, ils correspondent respectivement aux traitements payés aux premiers pasteurs, seconds pasteurs et pasteurs auxiliaires du culte protestant.

123Le nombre de postes de ministres du culte islamique est appelé à croître. En dépit de la situation du gouvernement fédéral Michel II (MR/CD&V/Open VLD), en affaires courantes depuis le 21 décembre 2018, le ministre de la Justice K. Geens a souhaité aller de l’avant avec le renforcement de l’EMB. L’arrêté royal du 12 juillet 2019 met à la charge du Trésor public 2 places de secrétaire général, 4 places de conseiller, 9 places de théologien, 9 places de prédicateur, 9 places de secrétaire et 3 places de secrétaire adjoint au sein de l’EMB  [126]. Si l’équipe administrative avait déjà été antérieurement prévue et que le nombre de ses membres avait été régulièrement augmenté  [127], c’est la première fois que des postes de théologiens et de prédicateurs, c’est-à-dire du personnel religieux – et non plus seulement administratif –, sont prévus au sein de l’EMB. Cet arrêté royal a été rendu possible par la loi du 5 mai 2019  [128], dont l’article 114 modifie l’article 29bis de la loi du 2 août 1974 relative aux traitements des titulaires de certaines fonctions publiques, des ministres des cultes reconnus et des délégués du Conseil central laïque  [129], pour introduire les fonctions de conseiller, prédicateur et théologien. L’exposé des motifs de la proposition de loi (déposée par des parlementaires de la majorité du gouvernement démissionnaire et de la N-VA), indique qu’il s’agit là de la réponse apportée à une demande de l’EMB datant du 15 novembre 2017, visant à permettre le recrutement de femmes aux postes de théologiennes et de prédicatrices  [130]. Le traitement des théologiennes correspond à celui d’un imam premier en rang et celui des prédicatrices, à celui d’un imam deuxième en rang. Toutefois, la formulation des postes dans la loi n’est pas genrée, puisqu’elle crée des postes de théologiens et de prédicateurs qui pourraient être occupés par des hommes également. Cette formulation a été adoptée suite à un avis de la section de législation du Conseil d’État qui a estimé qu’il y avait lieu « de prendre en compte la neutralité de l’État, qui requiert notamment que celui-ci, dans la législation qu’il adopte, respecte de principe de l’égalité des femmes et hommes, consacré par les articles 10, alinéa 3, et 11bis, de la Constitution »  [131]. En ce qui concerne le poste de conseiller, il répond à un besoin de faire appel à de nouveaux collaborateurs, titulaires d’un diplôme de maîtrise pour assurer le suivi et l’exécution de trois grands chantiers : l’Institut supérieur pour l’islam, le renouvellement de l’EMB et la réforme du Conseil des théologiens et de l’enseignement coranique. L’EMB souhaite également disposer d’un porte-parole bilingue.

124L’asbl Justice and Democracy a annoncé le dépôt d’un recours contre l’arrêté royal du 12 juillet 2019 auprès du Conseil d’État, au motif qu’il « revient à conférer à [l’]organe chargé de la gestion du temporel – et uniquement du temporel – du culte islamique un rôle spirituel ». L’asbl, qui est une initiative du think tank Vigilance musulmane  [132], estime dans un communiqué intitulé « Contre la vaticanisation de l’islam, Justice and Democracy saisit la justice » que la décision du ministre de la Justice constitue une immixtion dans le fonctionnement du culte islamique, contraire à la liberté de religion et discriminatoire puisque semblable mesure n’est pas prise à l’égard des autres cultes : cet arrêté royal « permet à cette “administration du culte”, reconnue par l’État belge pour gérer les aspects temporels du culte islamique, de recruter des théologien·ne·s et des prédicateur·trice·s suivant les critères et modalités de son choix et de privilégier ainsi telle ou telle conception de l’islam, sans considération pour les règles de fonctionnement propres à ce culte (qui n’est pas organisé autour d’un clergé) et indépendamment de toute demande d’une communauté locale islamique (c’est-à-dire une mosquée reconnue) »  [133]. Étant donné que la création de ces postes de prédicateurs et théologiens répond à une demande formulée à plusieurs reprises par l’EMB lui-même, il est peu probable qu’un tel recours puisse aboutir auprès du Conseil d’État. Rappelons en outre que des postes attribués à du personnel religieux bénéficiant de traitements du SPF Justice existent auprès d’autres organes représentatifs.

125Le tableau 8 présente l’évolution du budget consacré au paiement des traitements des ministres du culte islamique par le SPF Justice.

126Ce tableau permet de constater que les montants prévus au budget ne sont jamais dépensés. La différence entre prévisions et dépenses est souvent importante. Cette différence s’explique partiellement par le retard pris par le processus de reconnaissance des mosquées. Mais elle s’explique également par le fait que si toutes les mosquées reconnues ont droit à une place d’imam rémunéré, toutes ne sont pas désireuses de la solliciter. Les mosquées turcophones qui bénéficient d’un imam turc envoyé et rémunéré par la Diyanet (le ministère des affaires religieuses de Turquie) ne désirent le plus souvent pas d’autre imam, qui serait payé par le SPF Justice. La volonté politique du gouvernement fédéral est toutefois de mettre fin à cette situation. En février 2016, le ministre de la Justice K. Geens a annoncé la prise en charge du traitement de 80 nouveaux imams, dans le cadre du plan antiterrorisme du gouvernement fédéral  [134]. Il devait s’agir tant d’imams affectés à des mosquées déjà reconnues que de postes créés auprès de mosquées en passe d’être reconnues ; cependant, l’annonce n’a guère été suivie d’effets, les mosquées reconnues n’ayant pas sollicité de nouveaux imams et les Régions n’ayant pas reconnu de nouvelles mosquées.

Tableau 8. Budget affecté au paiement des traitements pour les ministres du culte islamique, 2005-2019

Tableau 8. Budget affecté au paiement des traitements pour les ministres du culte islamique, 2005-2019 Tableau 8. Budget affecté au paiement des traitements pour les ministres du culte islamique, 2005-2019

Tableau 8. Budget affecté au paiement des traitements pour les ministres du culte islamique, 2005-2019

* Le montant proposé pour 2019 était de 6 400 000 euros. Toutefois, le projet de loi budgétaire n’a pu être adopté en raison de la démission du gouvernement fédéral Michel II. L’exercice 2019 s’est donc déroulé avec un budget correspondant aux dépenses de l’année précédente.
Source : Documents parlementaires.

4.2. La formation des imams

127Au sein des premières communautés musulmanes établies en Europe au XXe siècle, le rôle d’imam était fréquemment tenu par des membres de la communauté plus âgés ou plus instruits. Graduellement, la fonction s’est « professionnalisée » et a été confiée à des imams venus de l’étranger, où ils avaient été formés. Divers États étrangers – dont les principaux pays d’origine des musulmans de Belgique, le Maroc et la Turquie, mais également l’Arabie saoudite – ont envoyé des imams auprès des communautés de la diaspora musulmane. Les pouvoirs publics, en Belgique comme ailleurs, n’ont longtemps pas prêté attention à la question de la formation des ministres du culte islamique. Si, pour le culte catholique, la formation du clergé est organisée de longue date avec le soutien des pouvoirs publics, via principalement les séminaires diocésains et interdiocésains – et avec le concours des facultés de théologie des universités catholiques –, pour les autres cultes, les ministres sont traditionnellement formés à l’étranger. En Belgique, il existe toutefois une faculté universitaire de théologie protestante et deux instituts de théologie orthodoxe (Institut de théologie orthodoxe Apôtre Paul et Institut orthodoxe Saint-Jean-le-Théologien), même si ces institutions sont insuffisantes pour former les ministres de ces deux cultes  [135]. En revanche, il n’existe pas en Belgique de cursus d’études pour devenir rabbin ou pasteur anglican. Longtemps, la situation du culte islamique en la matière n’est donc pas apparue comme singulière. Des facilités pour l’obtention de visas ont été accordées aux ministres du culte islamique, comme à ceux des autres cultes reconnus, pour venir exercer leur ministère en Belgique.

128L’attention portée au problème de la radicalisation religieuse a modifié cet état de choses. Progressivement, les autorités publiques belges ont accordé plus d’attention à la formation des ministres du culte islamique. Dans un premier temps, il s’est agi de former les imams exerçant déjà en Belgique. Des formations ont été organisées par l’EMB à destination des imams, couvrant principalement des sujets profanes, tels que la législation belge, afin de familiariser ces ministres du culte avec la réalité du pays où ils exercent. En Région bruxelloise, un financement régional a même été octroyé à l’EMB à cet effet.

129Si l’enseignement supérieur relève des compétences des Communautés, la formation de ministres des cultes reconnus peut être considérée comme une compétence fédérale, ainsi que l’a rappelé le Conseil d’État dans son arrêt concernant le décret wallon du 13 mars 2014 (cf. supra). L’Autorité fédérale est donc compétente pour apporter un soutien financier à la formation des imams. Nonobstant cela, les entités fédérées se sont également saisies de la problématique. Plusieurs rapports ont été commandés pour faire le point sur cette question  [136].

130En octobre 2017, le dernier volet du rapport de la commission d’enquête parlementaire mise sur pied par la Chambre des représentants après les attentats terroristes islamistes du 22 mars 2016  [137], consacré au radicalisme, a formulé diverses recommandations relatives au financement public du culte islamique (dont la plus médiatisée a concerné le changement d’attribution de la grande mosquée du Cinquantenaire)  [138]. En matière de formation des imams, la commission d’enquête a noté : « Une meilleure formation des “cadres” musulmans, générale, d’abord, et spécifique (en matière de radicalisme), ensuite, a été dépeinte comme indispensable »  [139]. La commission a recommandé « que la formation de ces représentants du culte soit approfondie, par la création d’un authentique cursus menant à l’exercice de ces professions. Leur exercice devrait, en outre, idéalement être subordonné à la maîtrise d’au moins une des langues nationales, et à la connaissance des valeurs fondamentales de l’État belge et des principes de droit en résultant »  [140].

131Depuis 2017, des restrictions quant à l’octroi des visas aux imams étrangers seraient imposées. Selon les requérants en annulation du décret wallon du 18 mai 2017, l’Autorité fédérale aurait en effet décidé de restreindre l’octroi des visas aux imams affectés à des mosquées reconnues  [141].

132Sans attendre les recommandations de la commission d’enquête parlementaire « attentats » de la Chambre des représentants, les Communautés ont pris des initiatives. En Communauté française, un Institut de promotion des formations sur l’islam (IPFI) a été mis sur pied en octobre 2017. Il s’agit de l’aboutissement d’une des recommandations de la commission dite « commission Marcourt », qui avait été chargée en mars 2015, par le ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et des Médias du gouvernement de la Communauté française Demotte III (PS/CDH), Jean-Claude Marcourt (PS), de « faire des propositions en vue de favoriser le développement et la reconnaissance d’un islam moderne en Fédération Wallonie-Bruxelles »  [142]. Cette commission, co-présidée par les professeurs Andrea Rea (ULB) et Françoise Tulkens (UCLouvain), comptait 17 membres, représentants de l’EMB, issus du monde académique ou de celui des médias  [143]. Sur la base des travaux de la commission, dont le rapport final a été déposé en décembre 2015  [144], le ministre J.-C. Marcourt avait retenu huit mesures politiques :

133

1) des cours de langue française pour les imams déjà reconnus ;
2) des formations pour les conseilleurs islamiques, dans les prisons, les hôpitaux, les institutions publiques de protection de la jeunesse (IPPJ), etc. ;
3) le soutien à l’initiative conjointe de l’EMB et de l’Université catholique de Louvain (UCLouvain) du certificat universitaire didactique de l’enseignement religieux pour la religion musulmane (CDER-Islam) ;
4) un soutien à la formation en « sciences religieuses et sociales consacrée à l’islam dans le monde contemporain » organisé par l’UCLouvain et l’Université Saint-Louis - Bruxelles (USLB) ;
5) la création d’un « Institut de promotion et de coordination des initiatives relatives aux formations sur l’islam  », qui aurait pour rôle de centraliser toutes les formations déjà existantes, d’une part, et d’en organiser de nouvelles, d’autre part ;
6) la création d’une chaire interuniversitaire d’islamologie ;
7) la mise en place d’une émission concédée à l’islam sur les antennes de la Radio-télévision belge de la Communauté française (RTBF) ;
8) l’instauration d’un « quota » de femmes dans les comités de gestion des mosquées.

134J.-C. Marcourt avait alors précisé que les cinq premières mesures devraient recevoir une concrétisation durant l’année 2016  [145]. L’IPFI a été créé par un décret le 14 décembre 2016  [146]. Il a pour missions :

135

1) d’identifier les formations existantes sur l’islam en Communauté française et plus largement en Belgique ;
2) de proposer, soutenir et financer des formations à destination des imams, des maîtres et professeurs de religion islamique, des conseillers islamiques, des acteurs socio-culturels ou tout autre public intéressé par l’islam ;
3) d’assurer la mise en réseau de ces formations ;
4) d’organiser des conférences et des conférences-débats ;
5) de travailler à la création d’un bachelier en sciences religieuses et sociales et d’un master en théologie musulmane ;
6) de préparer les modifications à apporter aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
7) de préparer les accords de coopération nécessaires ;
8) de travailler à la création, soutenir et financer une « chaire interuniversitaire d’islamologie pratique » annuelle visant l’analyse réflexive, critique de la pensée arabo-musulmane dans ses dimensions historiques et contemporaines.

136L’IPFI a donc essentiellement une mission de soutien aux initiatives existantes au sein de l’enseignement supérieur. Initialement, il était également chargé de travailler à la création de formations de type bachelier et master, et de poursuivre la réflexion au sujet de la création d’une « faculté de théologie musulmane », si possible en collaboration avec la Communauté flamande. Ce n’est toutefois pas la voie qui a été privilégiée (cf. infra). Le budget de l’IPFI est assuré par une subvention annuelle de 400 000 euros afin de couvrir les dépenses de personnel, de fonctionnement et d’équipement.

137L’IPFI est hébergé au sein de l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur (ARES) et est géré par un comité de direction composé comme suit : 2 coprésidents (les professeurs Andrea Rea et Françoise Tulkens), 3 représentants de l’EMB (Mina Bouselmati, Salah Echallaoui et Semsettin Ugurlu), 3 représentants de l’enseignement supérieur (Édouard Delruelle, Hugues Dumont et Anne Verbeke), 2 représentants du ministre de l’Enseignement supérieur (François De Smet et Louis-Léon Christians), 1 représentant du ministre-président de la Communauté française (Valérie Dejardin), le président du conseil d’administration de l’ARES et l’administrateur de l’ARES  [147].

138Par ailleurs, l’IPFI est doté d’un comité scientifique, chargé de formuler des propositions de formations et de recherches. Il se compose de quatre personnalités issues du monde académique (Hassan Bousetta, Éric Geoffroy, Nadia Fadil et Cécile Vanderpelen), de quatre personnalités reconnues dans le domaine des études sur l’islam (Yadh Ben Achour, Iman Lechkar, Kim Lecoyer et Fatima Zibouh) et des deux coprésidents du comité de direction  [148]. En octobre 2018, l’islamologue Radouane Attiya (ULiège) a été nommé au poste de directeur de l’IPFI  [149].

139En 2019, l’IPFI a retenu trois missions prioritaires : la création d’une chaire interuniversitaire d’islamologie pratique, la proposition d’« actions prioritaires » par le comité scientifique et la prise en charge de formations à destination des imams  [150]. De son côté, l’EMB a rappelé que le contenu des formations théologiques relevait exclusivement de la compétence des autorités cultuelles  [151].

140C’est sur la base de cette répartition des compétences réservant aux autorités religieuses la formation théologique que les projets de formation des imams ont été élaborés dans les deux principales Communautés du pays. Fin 2019, la presse a annoncé l’inauguration du premier cursus destiné à former des imams néerlandophones à la Katholieke Universiteit Leuven (KULeuven) en février 2020 et celle du premier cursus francophone à l’UCLouvain en septembre 2020. À la KULeuven, l’enseignement sera donné en néerlandais et en arabe, et durera six ans : deux années d’enseignement général à la KULeuven, comprenant des cours de droit, de sciences politiques, de sociologie et d’histoire seront suivies de quatre ans de formation théologique à l’Académie de formations et de recherches en études islamiques (AFOR). Du côté francophone, les deux certificats intitulés « Religions et sociétés » et « Islam et vivre-ensemble » dispensés par l’UCLouvain constituent le volet civil de la formation. Le certificat « Religions et sociétés » comportera les enseignements suivants : introduction à la psychologie sociale, introduction à la sociologie religieuse, laïcités et sécularisations en Europe, citoyenneté et religion, histoire et actualité du binôme politique-religion. Le certificat « Islam et vivre-ensemble » portera sur les droits de l’homme, l’analyse du discours religieux sur Internet, l’histoire des conflits religieux, etc.  [152] Le volet théologique de la formation sera dispensé par l’AFOR.

141Créée en concertation avec l’EMB  [153], l’asbl AFOR a été constituée le 1er avril 2019. Son siège est établi dans la grande mosquée du Cinquantenaire. Elle a pour objet « de permettre à la communauté musulmane vivant en Belgique et en Europe de progresser dans les domaines religieux, caritatifs, scientifiques, sociaux, culturels et éducatifs, d’effectuer des activités en vue d’aider la communauté musulmane de Belgique à s’épanouir sur le plan éthique et spirituel et à exercer la pratique religieuse de manière sereine en tenant compte de la diversité culturelle et du contexte des sociétés belges et européennes. (…) L’académie a également pour buts l’enseignement, la recherche et le service à la société. Les missions d’enseignement visent la formation des imams et des cadres religieux islamiques en Belgique, dans le champ de la théologie et des sciences religieuses, ainsi que la formation permanente dans ces domaines, et toute formation annexe utile à l’exercice de leurs fonctions »  [154]. Les statuts énoncent également les « principes fondamentaux de l’académie », dont le premier est le suivant : « L’académie accomplit ses services et activités en gardant à l’esprit un principe fondamental qui consiste à respecter minutieusement les lois de l’Union européenne, les lois des pays membres de l’Union européenne et les droits de l’homme tels que régis par la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tout en restant dévoué au régime démocratique libre »  [155]. L’AFOR bénéficie du soutien financier de l’Autorité fédérale via l’EMB (cf. supra).

142Les membres fondateurs de l’AFOR sont au nombre de dix, par ailleurs représentants du Conseil de coordination des institutions islamiques de Belgique (CIB). On y retrouve notamment Salah Echallaoui, Coskun Beyazgül et Mehmet Üstün. Tous trois font par ailleurs partie du comité exécutif de l’AFOR. La gestion journalière de l’AFOR est assurée par S. Echallaoui (président), C. Beyazgül (vice-président), Abd Nasseur Habbachich (trésorier) et M. Üstün (secrétaire).

143Dès le mois de mai 2019, l’AFOR a modifié ses statuts. L’article 1er s’ouvre désormais sur un préambule qui énonce que l’EMB – organisme auquel l’arrêté royal du 18 avril 2017 confie explicitement la compétence en matière d’organisation de la formation des ministres du culte, des enseignants de religion islamique et des conseillers islamiques  [156] –, en concertation avec le CIB, reconnaît l’AFOR « pour la formation des imams et des cadres religieux islamiques en Belgique, dans le champ de la théologie et des sciences religieuses ainsi que la formation continue dans ces domaines »  [157]. Les statuts ont été une nouvelle fois modifiés et toilettés en juillet 2019, et le préambule indique désormais que l’AFOR opère en collaboration avec des partenaires privilégiés, à savoir « les universités belges, centres de recherche et autres institutions de l’enseignement supérieur en Belgique »  [158].

144Les parcours de formation annoncés sont d’une durée relativement longue. En attendant les premiers diplômés, les mosquées belges devront continuer à faire appel à des imams venus de l’étranger. Par ailleurs, la nomination de ces imams diplômés en Belgique au sein des mosquées reconnues ne pourra pas être garantie. Il est en effet constitutionnellement impossible que l’État impose une telle condition de diplomation aux ministres du culte. Ce sera donc impérativement à l’EMB de proposer prioritairement ces imams à la nomination ; encore faudra-t-il que les différentes communautés islamiques acceptent ces candidats. Une expérience similaire a tourné court aux Pays-Bas (cf. infra) ; il est vrai que l’absence de financement public et d’organe représentatif néerlandais rendait l’expérience plus compliquée à mettre en œuvre. Dans le cadre belge, le succès de l’expérience repose avant tout sur l’autorité de l’EMB.

145L’annonce des nouvelles formations a déjà suscité une réaction négative de la part de mosquées anversoises, qui ont estimé que l’organisation de la formation en collaboration avec l’EMB indiquait que celle-ci demeurait sous influence étrangère  [159].

5. Les aumôneries islamiques

146Les organisations convictionnelles reconnues bénéficient d’un soutien des pouvoirs publics pour l’organisation de l’assistance spirituelle dans des lieux spécifiques tels que l’armée, les établissements pénitentiaires et les hôpitaux.

147L’armée comprend jusqu’à présent des aumôniers catholiques, protestants et israélites et des conseillers moraux, mais pas de conseillers ou d’aumôniers islamiques, orthodoxes ou anglicans. Le cadre de ce service est fixé par des arrêtés royaux d’avril 2003 ; il est constitué de 10 aumôniers catholiques, 1 aumônier protestant et 1 aumônier israélite ainsi que 4 conseillers moraux  [160]. Durant l’année 2016, il a été annoncé que l’armée allait procéder au recrutement d’un aumônier islamique  [161]. L’aumônerie musulmane fait bien partie du Service d’assistance religieuse et morale intégré (SARM), mais son existence n’a pas encore été confirmée par un arrêté royal.

148Dans les établissements pénitentiaires, la présence de conseillers islamiques aux côtés des représentants des autres organisations convictionnelles est acquise depuis plusieurs années. Dans le contexte actuel de prévention de la radicalisation et dans la mesure où les prisons abritent de nombreux détenus considérés comme radicalisés, regroupés dans les implantations de Bruges et d’Ittre, le rôle de ces conseillers est considéré par les responsables politiques comme capital. En avril 2016, le cadre a été étendu par un arrêté royal, « afin de pouvoir organiser efficacement la lutte contre le radicalisme en prison »  [162], à 26 conseillers islamiques et un chef de service, soit un niveau de personnel comparable à celui du culte catholique (24 aumôniers et 1 aumônier en chef). En mai 2019, le service a été réorganisé par un nouvel arrêté royal, dont « le projet s’inscrit dans le cadre des recommandations formulées par la commission d’enquête parlementaire sur les attentats terroristes, plus particulièrement en ce qui concerne l’amélioration de l’accompagnement religieux et non confessionnel » ; il a maintenu le cadre existant de 26 conseillers islamiques et un chef de service  [163].

149L’organisation de l’aumônerie dans les établissements hospitaliers n’a pas fait l’objet d’une réglementation spécifique. Elle est souvent organisée par des bénévoles. Toutefois, les institutions sont autorisées à défrayer les aumôniers et conseillers et à porter la dépense dans leur budget.

6. Les cours de religion islamique dans les établissements scolaires organisés par les pouvoirs publics et les écoles islamiques

150Depuis la loi du Pacte scolaire (1959), les écoles officielles offrent à leurs élèves le choix entre un cours de l’une des religions reconnues en Belgique  [164] et un cours de morale non confessionnelle, à raison de 2 heures par semaine, pendant toute la durée de l’instruction obligatoire  [165]. Récemment, en Communauté française, le nombre d’heures hebdomadaire a été réduit à une, et s’est ajoutée à la liste des choix la possibilité de suivre un cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté.

151La mise en œuvre d’un cours de religion islamique a été la première conséquence concrète de la reconnaissance du culte islamique en 1974. La création d’écoles confessionnelles islamiques est plus récente.

6.1. Les cours de religion islamique

152Le 31 juillet 1975, le ministre de l’Éducation nationale et de la Culture française du gouvernement Tindemans II (CVP/PSC/PLP-PVV/RW), Antoine Humblet (PSC), instaurait le cours de religion islamique, dès la rentrée de l’année scolaire 1975-1976, sans attendre la modification ad hoc de la loi du Pacte scolaire. Par diverses circulaires, le Ministère de l’Éducation nationale confirmait alors le rôle du Centre islamique et culturel de Belgique (CICB) comme autorité religieuse. Par la suite, la pratique a été reconduite d’année en année d’attribuer au directeur du CICB la désignation des enseignants de religion islamique. Les ministres de l’Éducation nationale ont ainsi attribué au directeur du CICB un rôle de chef du culte qu’aucune disposition légale ne lui conférait, en l’absence d’organe représentatif reconnu. Désormais, c’est l’EMB qui assure ce rôle.

153La communautarisation de l’enseignement en 1989 n’a pas enlevé aux organes chefs de culte la compétence de sélectionner les professeurs et les inspecteurs de religion islamique et d’élaborer le programme des cours de religion islamique.

154Sur le plan de la législation, la loi du Pacte scolaire du 29 mai 1959 a été modifiée par la loi du 20 février 1978  [166]. Son article 4 inclut désormais la religion islamique parmi les cours philosophiques.

155En 1989, deux communes bruxelloises, Saint-Gilles et Schaerbeek, ont refusé d’organiser les cours de religion islamique dans leurs écoles. Des parents ont intenté une action en justice. Les deux communes se déclaraient dans l’impossibilité d’organiser ces cours de religion islamique car il n’existait pas d’autorité islamique habilitée à proposer des candidats aux postes de maître de religion islamique  [167]. Le juge du tribunal de première instance a toutefois ordonné aux communes d’organiser cet enseignement.

156Parmi les critères à respecter par un établissement scolaire pour les membres de son personnel, la loi du Pacte scolaire prévoit qu’ils doivent être de nationalité belge. Or, dans les premières années de cet enseignement, la plupart des enseignants de religion islamique recrutés étaient de nationalité étrangère et ont dû recevoir une dérogation. Une circulaire datée du 25 août 1986 et émanant du ministre de l’Éducation nationale du gouvernement Martens VI, André Damseaux (PRL), détermine les conditions d’octroi de la dérogation : « La condition de nationalité belge est la règle (...). Des dérogations peuvent toutefois être accordées (...) avec parcimonie et trouver [leur] justification dans des circonstances tout à fait particulières ».

157L’élaboration du statut des professeurs de religion islamique a rencontré des difficultés. En 1982, la base de la rémunération des enseignants de religion islamique a été ainsi fixée : dans l’enseignement primaire, la rémunération du maître de religion islamique était fixée au niveau de l’échelle de l’institutrice maternelle ; l’échelle barémique de maître de religion dans l’enseignement primaire était octroyée aux professeurs de religion islamique pour l’enseignement secondaire inférieur, et celle de professeur de religion du secondaire inférieur pour l’enseignement secondaire supérieur. Cette disposition a été d’application aussi longtemps que n’ont pas été déterminés les titres des professeurs de religion islamique.

158En 1988, le député Claude Erdekens (PS), s’inquiétant de voir certains cours « confiés à des musulmans intégristes » ou dispensés en arabe, a proposé d’imposer l’usage de la langue de l’établissement d’enseignement à l’exclusion de toute autre langue pour les cours de religion  [168]. Le Conseil d’État a fait remarquer que la législation existante imposait déjà l’usage des langues nationales et que, au surplus, l’emploi des langues dans l’enseignement relevait désormais des compétences des Communautés  [169].

6.1.1. La formation des enseignants

159La question du programme du cours de religion islamique et celle de la formation des enseignants ont fait l’objet d’une attention soutenue de la part des autorités.

160En Communauté française, le statut des enseignants des cours de religion dans l’enseignement officiel a été organisé par un décret du 10 mars 2006  [170]. Les conditions de désignation sont les suivantes : être Belge ou ressortissant d’un autre État membre de l’Union européenne, sauf dérogation accordée par le gouvernement ; être de conduite irréprochable ; jouir des droits civils et politiques ; être porteur du titre requis en rapport avec la fonction à conférer ; satisfaire aux dispositions légales et réglementaires relatives au régime linguistique ; satisfaire aux lois sur la milice ; ne pas faire l’objet d’une suspension par mesure disciplinaire, d’une suspension disciplinaire, d’une mise en disponibilité par mesure disciplinaire ou d’une mise en non-activité disciplinaire infligée par le pouvoir organisateur dont on relève ou par un autre pouvoir organisateur. Toutefois, il peut être temporairement sursis à la condition relative au titre requis en cas de pénurie, la liste des titres requis figurant en annexe à l’arrêté royal du 25 octobre 1971 fixant le statut des maîtres de religion, des professeurs de religion et des inspecteurs de religion des religions catholique, protestante, israélite, orthodoxe et islamique des établissements de la Communauté française  [171].

161Le 8 juin 1999, cet arrêté royal a été modifié par le gouvernement de la Communauté française en ce qui concerne les titres requis pour devenir enseignant de religion islamique (cf. Tableau 9)  [172]. En pratique, devant l’absence de formation reconnue pour devenir enseignant de religion islamique en Belgique jusqu’à il y a peu, la Communauté française se contente du certificat délivré par l’EMB.

162Comme ceux des autres cours de religion, les inspecteurs du cours de religion islamique sont également nommés sur proposition de l’organe chef de culte.

163Le décret du 10 mars 2006 prévoit par ailleurs les obligations à respecter par les professeurs de religion. Figurent notamment celles de ne pas « exposer les élèves à des actes de propagande politique, religieuse ou philosophique, ou de publicité commerciale », et de ne se livrer « à aucune activité qui est en opposition avec la Constitution et les lois du peuple belge, qui poursuit la destruction de l’indépendance du pays ou qui met en danger la défense nationale ou l’exécution des engagements de la Belgique en vue d’assurer sa sécurité. Ils ne peuvent adhérer, ni prêter leur concours à un mouvement, groupement, organisation ou association ayant une activité de même nature ».

Tableau 9. Titres légalement requis pour devenir enseignant de religion islamique (Communauté française)

Tableau 9. Titres légalement requis pour devenir enseignant de religion islamique (Communauté française) Tableau 9. Titres légalement requis pour devenir enseignant de religion islamique (Communauté française)

Tableau 9. Titres légalement requis pour devenir enseignant de religion islamique (Communauté française)

* Diplôme délivré par une université, un institut ou une faculté de théologie islamique.
** Diplôme délivré, après quatre années d’études au moins, par une université, un centre universitaire, un institut ou une haute école en Belgique ou à l’étranger.
*** Diplôme délivré, après deux années d’études au moins, par une université, un centre universitaire, un institut ou une haute école en Belgique.
Source : Arrêté du gouvernement de la Communauté française du 8 juin 1999 modifiant la réglementation relative au statut administratif des maîtres de religion, des professeurs de religion et des inspecteurs de religion des religions catholique, protestante, israélite et orthodoxe des établissements d’enseignement de la Communauté française, Moniteur belge, 9 septembre 1999.

164Une formation des enseignants de religion islamique a finalement vu le jour en septembre 2015. Au sein de sa faculté de Théologie, l’UCLouvain organise, en partenariat avec l’EMB et l’Institut supérieur des études et de recherches Averroès (INSEA) à Bruxelles, un « certificat universitaire de didactique de l’enseignement religieux » pour le cours de religion islamique (CDER-Islam) destiné aux futurs professeurs de religion islamique. Toutefois, la diminution de moitié du nombre d’heures de religion dans l’enseignement officiel en conséquence de l’introduction du cours de philosophie et de citoyenneté (à partir de 2016-2017 pour l’enseignement primaire et de 2017-2018 pour l’enseignement secondaire) a eu pour effet de diminuer le nombre d’étudiants inscrits dans cette filière.

165En Communauté flamande, les titres requis et le statut pécuniaire des professeurs de religion sont régis par un arrêté du gouvernement flamand du 26 septembre 1990  [173], plusieurs fois modifié  [174]. Tout comme en Communauté française, la liste des titres requis est assortie d’une possibilité de dérogation offerte à l’organe représentatif.

166La ministre de l’Enseignement du gouvernement flamand Bourgeois, Hilde Crevits (CD&V), a signé le 9 novembre 2016 un engagement avec l’EMB visant à assurer la formation des futurs professeurs de religion islamique dans un cadre universitaire ou supérieur  [175]. Il s’agit là de l’aboutissement d’un processus entamé au début de l’année, après qu’une étude a notamment révélé que seuls 16 % des professeurs de religion islamique au niveau primaire disposaient d’un diplôme en rapport avec leur fonction  [176]. Est notamment prévue une réforme du Centrum voor Islam Onderwijs, chargé de l’élaboration des programmes.

167La nécessité de former adéquatement les professeurs de religion islamique est bien présente, eu égard entre autres au fait que la fréquentation des cours de religion islamique dans les écoles des réseaux officiels augmente régulièrement.

168En Communauté germanophone, les titres requis sont également toujours régis par l’arrêté royal du 25 octobre 1971 fixant le statut des maîtres de religion, des professeurs de religion et des inspecteurs de religion des religions catholique, protestante, israélite, orthodoxe, islamique et anglicane, plusieurs fois modifié  [177].

6.1.2. La fréquentation des cours de religion islamique dans l’enseignement officiel

169En Communauté française, le cours de religion islamique est le deuxième cours de religion le plus suivi au niveau primaire (derrière le cours de religion catholique) et le premier au niveau secondaire. Si l’on prend en considération l’ensemble des cours philosophiques, il est le troisième cours au niveau primaire (derrière le cours de religion catholique et celui de morale non confessionnelle) et le deuxième au niveau secondaire (derrière le cours de morale non confessionnelle). Sa fréquentation est en croissance continue depuis sa création.

170Le tableau 10 présente le pourcentage d’élèves inscrits dans les différents cours philosophiques dans les établissements qui offrent le choix entre ces cours – c’est-à-dire les élèves qui fréquentent un établissement d’un des réseaux officiels (enseignement de la Communauté française ou enseignement officiel subventionné : organisé par une province ou une commune) ou l’un des quelques établissements du réseau libre non confessionnel – en 2019-2020.

Tableau 10. Communauté française (réseaux officiels et réseau libre non confessionnel : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques *, 2019-2020

Tableau 10. Communauté française (réseaux officiels et réseau libre non confessionnel : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques *, 2019-2020

Tableau 10. Communauté française (réseaux officiels et réseau libre non confessionnel : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques *, 2019-2020

* Outre l’heure de cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté (CPC) commune à tous les élèves.
Source : Données communiquées par l’Administration générale de l’enseignement (AGE) du Ministère de la Communauté française.

171En Communauté flamande, le pourcentage d’élèves inscrits au cours de religion islamique est similaire. Compte tenu de l’importance relative plus élevée du réseau libre confessionnel en Flandre, ces proportions correspondent toutefois à un nombre d’élèves inférieur.

172Le tableau 11 présente le pourcentage d’élèves inscrits dans les différents cours philosophiques dans les établissements des réseaux officiels (enseignement de la Communauté flamande ou enseignement officiel subventionné) en 2017-2018.

Tableau 11. Communauté flamande (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2017-2018

Tableau 11. Communauté flamande (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2017-2018

Tableau 11. Communauté flamande (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2017-2018

* Pour l’enseignement secondaire, cette catégorie comprend tant les élèves qui ont obtenu une dispense que ceux qui n’ont pas de choix de cours philosophique à poser, ce qui est le cas dans certaines années de quelques rares options de l’enseignement professionnel.

173La Région bruxelloise a été davantage concernée par l’immigration que le reste du pays, ce qui a fortement diversifié les religions qui y sont présentes. Ce phénomène peut se lire à travers la fréquentation des différents cours philosophiques dans les écoles bruxelloises. Le tableau 12 présente les pourcentages d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques dans les écoles bruxelloises francophones des réseaux officiels (enseignement de la Communauté française ou enseignement officiel subventionné) ou du réseau libre non confessionnel en 2019-2020, tandis que le tableau 13 fait de même pour les écoles bruxelloises néerlandophones des réseaux officiels (enseignement de la Communauté flamande ou enseignement officiel subventionné) en 2017-2018.

174Qu’il s’agisse de l’enseignement francophone ou de l’enseignement néerlandophone, on constate que le cours de religion islamique est le plus suivi dans les écoles des réseaux officiels en Région bruxelloise, au point de figurer au programme de plus de la moitié des élèves.

Tableau 12. Région bruxelloise (réseaux officiels et réseau libre non confessionnel : enseignement ordinaire primaire et secondaire francophone) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques *, 2019-2020

Tableau 12. Région bruxelloise (réseaux officiels et réseau libre non confessionnel : enseignement ordinaire primaire et secondaire francophone) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques *, 2019-2020

Tableau 12. Région bruxelloise (réseaux officiels et réseau libre non confessionnel : enseignement ordinaire primaire et secondaire francophone) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques *, 2019-2020

* Outre l’heure de cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté (CPC) commune à tous les élèves.
Source : Données communiquées par l’Administration générale de l’enseignement (AGE) du Ministère de la Communauté française.

Tableau 13. Région bruxelloise (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire néerlandophone) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2017-2018

Tableau 13. Région bruxelloise (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire néerlandophone) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2017-2018

Tableau 13. Région bruxelloise (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire néerlandophone) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2017-2018

* Pour l’enseignement secondaire, cette catégorie comprend tant les élèves qui ont obtenu une dispense que ceux qui n’ont pas de choix de cours philosophique à poser.

175En Communauté germanophone, le cours de religion islamique est suivi par respectivement 12,7 % et 7,5 % des élèves au niveau primaire et au niveau secondaire, soit loin derrière le cours de religion catholique (cf. Tableau 14).

Tableau 14. Communauté germanophone (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2019-2020

Tableau 14. Communauté germanophone (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2019-2020

Tableau 14. Communauté germanophone (réseaux officiels : enseignement ordinaire primaire et secondaire) : proportion d’élèves inscrits aux différents cours philosophiques, 2019-2020

Source : Données communiquées par le Ministère de la Communauté germanophone.

6.2. Les écoles libres confessionnelles islamiques

176Le cadre constitutionnel de la liberté d’enseignement permet l’organisation, l’agrément et la subsidiation d’écoles confessionnelles islamiques à côté du vaste réseau de l’enseignement confessionnel catholique et des quelques écoles confessionnelles juives et protestantes.

177À ce jour, la Communauté française subsidie quatre écoles primaires et une école secondaire islamiques, toutes situées en Région bruxelloise : El Ghazali à Etterbeek, fondée en 1989, La Plume à Molenbeek-Saint-Jean, ouverte en 2011, La Vertu à Schaerbeek, créée en 2012 (et ayant ouvert une section secondaire en 2015-2016), et, dernière venue, El Hikma-La Sagesse à Forest, ouverte en 2017. Ces écoles suivent le programme défini par la Communauté française, tout en s’inscrivant dans un projet pédagogique qui met l’accent sur la connaissance et la pratique de la religion islamique. Trois d’entre elles (El Ghazzali, La Plume et La Vertu) dépendent d’un même pouvoir organisateur, l’asbl Enseignement confessionnel islamique en Belgique (ECIB). Les écoles suivent le calendrier scolaire établi par la Communauté française ; cependant, elles ont obtenu une dérogation pour pouvoir fermer leurs portes à l’occasion de certaines fêtes religieuses. Afin de bénéficier d’un support pédagogique, ces écoles ont signé une convention avec le Secrétariat général de l’enseignement catholique (SEGEC). La Fédération islamique de Belgique (FIB) développe un projet à Charleroi, où devrait s’ouvrir la première école islamique de Wallonie. Contrairement au réseau d’écoles confessionnelles catholiques, qui est organisé en liaison avec l’Église catholique de Belgique, les écoles islamiques sont totalement indépendantes de l’EMB, avec lequel elles n’entretiennent pas de lien.

178À ce jour, il n’existe pas d’enseignement confessionnel subsidié islamique en Communauté flamande, où la question fait débat. Fin août 2019, la ministre de l’Enseignement du gouvernement flamand en affaires courantes Homans (N-VA/CD&V/Open VLD), H. Crevits, a refusé d’agréer l’école Selam qui devait, selon le souhait de ses promoteurs, ouvrir à la rentrée 2019-2020 à Genk, devenant la première école islamique du nord du pays  [178]. L’accord de gouvernement flamand 2019-2024 prévoit que de nouvelles normes de reconnaissance pour les écoles libres, plus strictes, entreront en vigueur, afin de s’assurer que « les écoles flamandes appliquent strictement les droits fondamentaux et les droits de l’homme. En cas de doute sur la radicalisation, la sécurité de l’État ou les ingérences étrangères, un audit approfondi sera réalisé »  [179].

179Il n’existe pas non plus d’enseignement confessionnel subsidié islamique en Communauté germanophone.

7. Perspectives européennes

180L’importance des communautés musulmanes dans les différents pays européens est très variable. Outre quelques-uns où elle est très ancienne (dans les Balkans et en Grèce essentiellement  [180]), les pays européens ont été concernés à des degrés divers par l’immigration en provenance de pays musulmans dans la seconde moitié du XXe siècle. Les pays de l’Europe de l’Est n’ont pas ouvert leurs frontières  [181], tandis que ceux de l’Europe de l’Ouest ont activement recouru à une immigration souhaitée pour combler un déficit de main-d’œuvre durant la période de forte croissance économique des années 1950 et 1960. Depuis lors, l’immigration s’est poursuivie, principalement selon les procédures d’asile et de regroupement familial. Les estimations du nombre d’habitants de confession musulmane ne sont pas toujours aisées à établir, et le tableau 15 est proposé à titre indicatif. On y trouve les pourcentages de population de confession musulmane par rapport à la totalité de la population du pays, proposés par deux sources différentes : d’une part, les estimations figurant dans la 10e édition du Yearbook of Muslims in Europe, parue en 2019  [182], et, d’autre part, celles publiées par le Pew Research Institute, qui concernent l’année 2016  [183]. Nous avons choisi de ne retenir que les pays membres de l’Union européenne (UE).

181Tous les pays de l’UE ayant une population musulmane significative sont confrontés aux mêmes difficultés pour organiser le culte islamique. Celles-ci sont principalement : déterminer le ou les interlocuteurs représentatifs ; émanciper le culte et son financement de la tutelle des États étrangers ; assurer la formation des ministres du culte et des enseignants. À ces trois préoccupations, s’est ajoutée depuis quelques années la prévention du terrorisme islamiste. Prévenir la radicalisation religieuse était déjà une motivation qui sous-tendait les politiques en matière de reconnaissance, de financement du culte et de formation du personnel religieux depuis longtemps ; elle est cependant fortement montée en puissance depuis les attentats des années 2010 sur le sol européen. Désormais, les politiques publiques s’attachent prioritairement à favoriser l’émergence d’un « islam européen » ou d’une forme nationale, tel l’« islam de Belgique ».

Tableau 15. Proportion de population musulmane au sein des États membres de l’Union européenne

Tableau 15. Proportion de population musulmane au sein des États membres de l’Union européenne Tableau 15. Proportion de population musulmane au sein des États membres de l’Union européenne

Tableau 15. Proportion de population musulmane au sein des États membres de l’Union européenne

* Il s’agit de la partie sud de l’île, qui constitue la République de Chypre, membre de l’Union européenne.
** La Croatie ne fait pas partie des pays traités dans le volume.

7.1. L’identification des interlocuteurs

182Quel que soit le système de relations Église/État  [184] que connaisse le pays, identifier des interlocuteurs représentatifs est toujours nécessaire. Dans certains cas, c’est pour mettre en place une véritable institutionnalisation du culte, comme en Belgique ; dans d’autres, il s’agit simplement d’identifier des personnes ou des organismes avec lesquels engager un dialogue sur différents aspects, qui peuvent être liés à la sécurité, à l’enseignement, à l’urbanisme ou encore à la sécurité alimentaire (avec la question des abattages conformes aux rites religieux).

183Il n’est pas simple de déterminer une seule organisation représentative pour des populations musulmanes d’origines nationales différentes (sans oublier les différents courants de l’islam : sunnisme, chiisme, alévisme, etc.). Si la Belgique maintient sa détermination de rassembler toutes les communautés musulmanes sous une seule coupole, à la tête de laquelle alternent des personnalités issues des communautés belgo-marocaine et belgo-turque, d’autres pays ont fait le choix de la diversité.

184En Allemagne, deux organisations revendiquent une représentativité : l’Islamrat für die Bundesrepublik Deutschland (IRD, Conseil islamique pour la République fédérale d’Allemagne) et le Zentralrat der Muslime in Deutschland (ZMD, Conseil central des musulmans en Allemagne). Ces deux organisations ont tenté de mettre sur pied un organe représentatif conjoint. En outre, les alévis disposent de leur propre représentation : l’Alevitische Gemeinde Deutschland (en turc, Almanya Alevi Birlikleri Federasyonu, AABF : Communauté alévie d’Allemagne). L’Autriche a également reconnu trois communautés religieuses islamiques : l’Islamische Glaubensgemeinschaft in Österreich (IGGiÖ : Communauté confessionnelle islamique en Autriche) en 1979, l’Islamische-Schiitische Glaubensgemeinschaft in Österreich (SCHIA, Communauté confessionnelle islamique chiite en Autriche) en 2013 et l’Islamisch Alevitische Glaubensgemeinschaft in Österreich (IAGÖ : Communauté confessionnelle islamique alévie en Autriche) également en 2013.

185Si des organisations peuvent se constituer en raison de divergences religieuses (par exemple, chiite versus sunnite) ou d’origines différentes (par exemple, Algérie versus Maroc), dans d’autres cas des conflits entre les membres peuvent entraîner des scissions et la formation d’institutions concurrentes. En Suède, la Förenade Islamiska Föreningar i Sverige (FIFS, Union des congrégations islamiques en Suède) créée en 1974 a connu une scission en 1982 qui a conduit à la mise sur pied de la Sveriges Muslimska Förbund (SMF, Union musulmane de Suède). Au sein de cette dernière, un nouveau désaccord a ensuite entraîné la création de l’Islamiska Kulturcenterunionen i Sverige (IKUS, Union des centres culturels islamiques en Suède).

186Les États fédéraux voient le plus souvent, contrairement à la Belgique, une organisation se développer dans chacune des entités fédérées. C’est le cas en Espagne  [185], où, à côté de la Federación Española de Entidades Religiosas Islámicas (FEERI, Fédération des entités religieuses islamiques) créée en 1989, et dépassée aujourd’hui en termes d’affiliations par l’Unión de Comunidades Islámicas de España (UCIDE, Union des communautés islamiques d’Espagne) fondée en 1991, il existe de nombreuses organisations coupoles au niveau régional, telle la Federación Islámica de Cataluña (Fédération islamique de Catalogne) ou la Federación Islámica de Andaluciá (Fédération islamique d’Andalousie). En Allemagne également, les compétences en matière de relations avec les cultes appartiennent principalement aux entités fédérées. Par exemple, la ville de Brême a conclu un accord avec la communauté des Alévis, rejoignant le Bade-Wurtemberg, la Rhénanie du Nord-Westphalie, la Bavière et la Hesse, qui donnent accès à l’organisation de l’enseignement de la religion alévie dans les écoles.

187Au Royaume-Uni, où la question de l’immigration a d’emblée été envisagée selon des catégories ethniques, les musulmans ont construit leurs réseaux associatifs sur une base plutôt ethno-nationale sans formuler de projet commun. Par ailleurs, la loi octroyant les droits politiques et sociaux aux ressortissants du Commonwealth installés au Royaume-Uni a profité aux immigrés venus d’Inde, du Pakistan, de Jamaïque ou d’États africains. Contrairement à ceux du continent, les immigrés musulmans au Royaume-Uni ont donc rapidement interagi avec les institutions politiques ; par exemple, ils ont obtenu des carrés musulmans dans les cimetières ou la disponibilité de repas halal dans toutes les institutions publiques.

188Identifier un interlocuteur représentatif se révèle particulièrement difficile pour les États appliquant une stricte séparation de l’Église et de l’État. La France, républicaine et laïque, cherche de longue date à disposer d’un interlocuteur représentatif pour l’islam de France. Le gouvernement français a ainsi soutenu la création d’une Fondation de l’islam de France (FIF), instituée par décret en décembre 2016 et reconnue comme établissement d’utilité publique. Cet organisme a succédé à la Fondation des œuvres de l’islam de France (FOIF), créée en 2005 par le ministre de l’Intérieur Dominique de Villepin. La FIF soutient des projets éducatifs, culturels et sociaux mais, dans le respect des principes de la laïcité, elle n’a pas de rôle religieux. Parallèlement, un Conseil français du culte musulman (CFCM), association régie par la loi de 1901, a été créé en 2003 avec pour objectif de représenter les musulmans de France auprès des autorités pour les questions relatives à la pratique religieuse, avec l’encouragement du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy.

7.2. Le financement du culte

189Tous les États européens partagent désormais la même préoccupation de limiter les influences étrangères sur leurs communautés islamiques. Cette influence s’exerçant notamment par le biais d’un soutien financier, les autorités politiques cherchent à le remplacer par des sources de financement indigènes.

190En Autriche, les financements venus de l’étranger sont interdits dans le cadre d’une législation spécifique. L’Empire austro-hongrois ayant abrité, dès le XIXe siècle, une importante minorité musulmane sur son territoire, une loi sur l’islam (Islamgesetz) y avait été adoptée dès le 15 juillet 1912 : il s’agissait là de la première organisation légale d’un islam européen. C’est cette ancienne loi de 1912, jusqu’alors restée en vigueur, que le Parlement autrichien a adaptée le 25 février 2015 pour créer un nouveau cadre juridique pour les musulmans d’Autriche. Cette rénovation fondamentale de la loi de 1912 renforce le caractère autrichien de l’islam local, notamment en interdisant le financement par des fonds étrangers. La loi a organisé un service d’aumônerie musulmane dans l’armée, les prisons et les hôpitaux, autorisé expressément des cimetières spécifiques et l’abattage rituel des animaux, et engagé les services publics à tenir compte des jours fériés propres à l’islam. Toutefois, cette loi a suscité des critiques sévères venues de l’étranger, particulièrement de la Turquie, qui assurait le paiement du salaire d’environ un imam sur cinq en Autriche. En application de cette législation, le gouvernement autrichien a annoncé l’expulsion d’une soixantaine d’imams de nationalité turque avec leur famille en juin 2018  [186].

191On pourrait penser que les États qui organisent un financement des cultes sous la forme du prélèvement d’un impôt permettent plus facilement d’inclure le culte islamique parmi les bénéficiaires. Toutefois, on observe qu’en Italie, où les contribuables peuvent affecter 0,8 % de leur impôt à l’une des communautés religieuses reconnues  [187], la communauté islamique italienne n’est pas encore parvenue à conclure un accord avec l’État pour figurer parmi les bénéficiaires de la collecte. En Allemagne, la constitution fédérale permet aux religions de se constituer en collectivité de droit public, afin de participer à la collecte d’un impôt d’Église (Kirchensteuer). Bien que de nombreuses voix s’élèvent pour que l’islam allemand se voie appliquer ce système, ce qui permettrait de réduire l’influence des pays musulmans étrangers, ce projet n’a pas encore reçu de concrétisation.

192La Belgique et son voisin le Grand-Duché de Luxembourg sont probablement les États où le financement public des lieux du culte islamique et des imams est le plus avancé. Le régime des cultes luxembourgeois est d’inspiration concordataire : l’État conclut avec les différents cultes des conventions, en application de l’article 22 de la Constitution. La Shoura (Conseil, rassemblant des délégués des différentes communautés islamiques), fondée en 2003, est l’interlocuteur unique du culte musulman face à l’État luxembourgeois, avec lequel elle a signé en 2015 une convention qui lui accorde environ 450 000 euros annuellement.

7.3 La formation des ministres du culte et des enseignants

193La formation des ministres du culte et des enseignants de religion islamique fait l’objet de débats et de propositions dans de nombreux pays européens. C’est l’un des piliers des projets de construction d’un « islam européen ». Toutefois, l’implication des pouvoirs publics dans l’organisation de la formation des imams se heurte à un principe fermement établi dans la plupart des États européens : la formation du clergé relève de la seule compétence des autorités religieuses. En effet, l’indépendance des Églises a constitué le quid pro quo de la laïcisation des institutions, du retrait du religieux de la sphère des affaires publiques. Comment établir une exception pour le culte islamique ? L’obstacle est bien souvent autant politique que juridique, les communautés islamiques n’étant pas forcément disposées à se laisser ainsi « gallicaniser »  [188].

194L’intervention des autorités publiques est plus facile dans les États de tradition protestante et dans ceux qui ont un régime des cultes basé sur l’existence de conventions avec les communautés religieuses. En Allemagne et en Autriche, c’est l’insertion de la théologie islamique au sein des universités établies et en parallèle aux enseignements de théologie catholique ou protestante qui a été la voie privilégiée, et non la fondation d’une faculté de théologie islamique autonome. En Allemagne, plusieurs Länder organisent un enseignement de la religion islamique dans les écoles, au nom de l’égalité de traitement des religions ; la nécessité de disposer d’enseignants pour ces cours a entraîné le développement de projets de formation des professeurs de religion (ainsi que des imams) au sein des instituts de théologie islamique intégrés dans plusieurs universités allemandes depuis 2012. Les études en théologie islamique dépendent des facultés de théologie protestante et catholique : la dimension du dialogue entre les différentes religions est clairement privilégiée en Allemagne, où le gouvernement fédéral n’a pas voulu soutenir le développement d’une faculté de théologie islamique indépendante, mais bien inscrire la théologie islamique au sein des enseignements existant dans les universités. En Autriche, l’université de Vienne propose désormais un master en théologie islamique.

195Naturellement, l’initiative peut venir des établissements d’enseignement eux-mêmes, mais ce cas est peu fréquent. Au Royaume-Uni, des formations supérieures en sciences islamiques sont organisées dans une quinzaine d’établissements, parmi lesquelles celles dispensées à l’Oxford Centre for Islamic Studies et au Cambridge Muslim College. Des initiatives à caractère strictement privé sont également possibles : en Espagne, le projet de création d’une université islamique à San Sebastián (Pays basque) est l’initiative d’une université états-unienne privée, l’Islamic University of Minnesota. Il est à noter qu’il existe de très nombreuses structures d’enseignement de la religion islamique au sein de ou à côté des mosquées. Toutefois, ces écoles coraniques ont pour objectif d’instruire les fidèles et non de former les imams.

196La question de la formation des cadres de l’islam a été abordée en France par les pouvoirs publics dès les années 1990, sous l’influence de la perception d’un risque de radicalisation lié à la guerre civile algérienne. Laïcité oblige, seules ont été retenues à l’époque des formations « à l’intégration ». Des diplômes universitaires, focalisés sur la connaissance des lois de la République, ont été organisés dans plusieurs villes. Pour sa part, la formation théologique des imams a fait l’objet de nombreuses recommandations du monde académique ou du monde politique  [189]. En Alsace-Moselle, le projet d’un « concordat avec l’islam » a été étudié, mais il n’a jamais abouti. Il aurait permis de créer une faculté de théologie musulmane localisée à l’université de Strasbourg, la seule université publique française à disposer de facultés de théologie (catholique et protestante). La question de la formation des imams français continue à mobiliser l’attention, dans le contexte de la prévention du radicalisme violent. Au lendemain des attentats perpétrés à Paris et dans sa périphérie le 13 novembre 2015, le Sénat français a créé une mission d’information sur l’islam en France. Dans son rapport, déposé en juillet 2016, la mission a porté son attention sur les imams étrangers : elle a pointé la présence importante d’imams venus d’Algérie, du Maroc et de Turquie dans le cadre officiel d’accords bilatéraux avec ces pays  [190]. Dans sa conclusion, le rapport suggère « des pistes de transition vers un islam de France, adapté au contexte français, à la fois compatible avec les valeurs de la République française et pris en charge par la communauté elle-même », et appelle à la mise en place de chaires universitaires d’islamologie.

197Bien que connaissant également une séparation de l’Église et de l’État, les Pays-Bas ont très tôt pris des initiatives pour organiser des formations en théologie islamique. La Vrije Universiteit Amsterdam offre depuis 2005 un programme de formation qui comprend la théologie islamique, l’arabe classique, les sciences islamiques, l’islam aux Pays-Bas et la pastorale. L’Universiteit Leiden lui a emboîté le pas. Entre 2006 et 2012, une haute école (la Hogeschool Inholland) a proposé une formation spécifique pour les imams néerlandais, surnommés dans la presse les « polder-imams » : l’initiative a été abandonnée vu le faible succès rencontré.

198D’une manière transversale, la problématique posée par la formation des imams d’Europe peut se résumer à deux observations. Primo, dans le contexte des relations Église/État en Europe, la formation théologique relève de la responsabilité des autorités religieuses. Or ces autorités religieuses sont parfois absentes ou peu légitimes. En outre, en l’absence de formation existant en Europe, la première génération d’enseignants en théologie islamique devra forcément avoir été largement formée à l’étranger ; l’islam européen ne pourra donc pas s’émanciper de sa dépendance vis-à-vis de l’étranger du jour au lendemain. Secundo, la formation séculière des imams, que l’on pourrait appeler une éducation à la citoyenneté, peut aisément être organisée par les autorités publiques. Toutefois, le cas néerlandais l’a illustré, les pouvoirs publics sont dans l’impossibilité de contraindre les imams à suivre cette formation ou les communautés islamiques à recruter des imams diplômés d’un institut désigné.

Conclusion

199L’arrivée de l’islam parmi les communautés religieuses organisées en Europe occidentale conduit les États à repenser leurs relations avec celles-ci. On peut à cet égard parler d’une « question musulmane », tant les problématiques se ressemblent dans les différents pays : organisation et représentation du culte islamique, financement de ce culte, formation de ses cadres religieux, relations avec les pays d’origine des fidèles, telles sont les principales questions auxquelles sont confrontées les autorités politiques. Et cela si l’on met de côté la question délicate de la présence dans l’espace public de certains éléments visibles de l’identité religieuse de ces nouveaux Européens, en particulier le port du hijab par les femmes.

200À cet égard, la situation en Belgique ne diffère guère de celle observée dans les pays voisins. Pionnière dans la reconnaissance formelle du culte islamique, la Belgique a ensuite éprouvé beaucoup de difficultés à concrétiser cette reconnaissance, la mise en place d’un organe représentatif pour le culte islamique s’avérant particulièrement longue et ardue. L’Exécutif des musulmans de Belgique (appellation retenue pour cet organe en 1999) constitue en effet le rouage essentiel de l’organisation du culte islamique dans le système belge. À l’instar des organes représentatifs (« organes chefs de culte ») des autres religions reconnues, l’EMB est chargé d’instruire les dossiers de reconnaissance des communautés locales (les mosquées) et de les introduire auprès des autorités régionales, puis d’exercer un rôle de tutelle sur les communautés reconnues, de transmettre les noms des imams dont le salaire doit être pris en charge par le SPF Justice, de sélectionner les professeurs et les inspecteurs de religion islamique dans les écoles, d’élaborer le programme des cours de religion islamique et de mettre en place une formation pour les imams.

201Les tâches dévolues à l’EMB sont particulièrement lourdes pour une structure qui n’a jusqu’à présent guère bénéficié d’une stabilité et pour un personnel souvent inexpérimenté, confronté en outre à la répartition des compétences entre les différents niveaux de pouvoir de l’État fédéral belge. En effet, ses interlocuteurs sont l’Autorité fédérale, les Régions, les Communautés et les provinces. C’est là en effet un élément curieux dans l’organisation du régime belge des cultes. Pays soumis à un processus centrifuge de distribution des compétences aux entités fédérées depuis plus de quarante ans, la Belgique, devenue fédérale, a fait des cultes une compétence partagée tout en conservant au niveau fédéral la compétence principale de reconnaissance des cultes et de leur organe représentatif (outre le paiement des traitements des ministres des cultes). Les communautés musulmanes de Belgique sont donc confrontées à une double contrainte d’organisation unitaire. D’une part, elles doivent réunir dans une même structure des communautés de tendances religieuses et d’origines nationales diverses. D’autre part, elles doivent, au sein de cette même structure, développer des relations avec différentes autorités publiques, tant en français qu’en néerlandais (voire en allemand), et s’adapter à des dispositifs législatifs régionaux différents. L’intégration de l’islam au sein du système de financement public en Belgique présente ainsi une série de défis spécifiques.

202La présence de communautés musulmanes religieusement dynamiques en Europe conduit, premièrement, à interroger la perspective de l’inéluctabilité de la sécularisation que l’on pensait acquise depuis les années 1970, et, deuxièmement, à restituer à la question des relations Église/État toute sa pertinence. Les sociétés d’Europe occidentale qui ont traversé un processus de sécularisation depuis la fin des années 1960 ont ainsi été confrontées à deux réalités qui contrastent avec ce processus principal. D’une part, en Europe centrale et orientale, la laïcisation imposée par un pouvoir hostile à la religion n’a pas eu raison de celle-ci, et différents pays ont expérimenté une forme de retour du religieux après 1989. D’autre part, en Europe occidentale, les populations d’origine immigrée ont conservé avec la religion un lien généralement plus fort que les populations d’origine indigène. Cela se vérifie avec des communautés chrétiennes d’Afrique subsaharienne ou d’Europe centrale et orientale, et bien évidemment aussi avec les musulmans, qui constituent la nouvelle communauté souvent la plus nombreuse et toujours la plus visible. Ce dynamisme religieux remet la question des relations entre les autorités publiques et les communautés religieuses au premier plan des préoccupations. C’est ainsi que le droit des cultes, discipline juridique que l’on a crue un temps vouée aux exercices purement historiques, se redéploie dans la plupart des États européens, à la recherche de solutions pour intégrer l’islam parmi les cultes reconnus et/ou financés. Remarquons que, dans un processus miroir, les communautés musulmanes européennes doivent créer de nouvelles formes de vie religieuse dans un contexte où leur religion est minoritaire et ne bénéficie pas d’un statut privilégié aux yeux des autorités politiques.

203In fine, la séparation de l’Église et de l’État, considérée comme un acquis de la modernité et une avancée démocratique, constitue un défi pour l’organisation du financement public du culte islamique en Europe.

Notes

  • [1]
    Cf. notamment P. Blaise, V. de Coorebyter, « L’islam et l’école. Anatomie d’une polémique », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1270-1271, 1990 ; P. Fannes, B. Vranckx, F. Simon, M. Depaepe, « L’enseignement en Communauté flamande (1988-2013) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2186-2187, 2013, p. 85-90.
  • [2]
    Cf. C. Sägesser, « Les débats autour de l’interdiction de l’abattage rituel », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2385, 2018.
  • [3]
    Cf. ibidem.
  • [4]
    Loi du 19 juillet 1974 portant reconnaissance des administrations chargées du temporel du culte islamique, Moniteur belge, 23 août 1974.
  • [5]
    Certains pays d’Europe orientale abritent de longue date une communauté musulmane, à l’égard de laquelle des dispositions législatives ont parfois été prises. Ainsi, l’annexion de la Bosnie-Herzégovine en 1908 avait conduit l’Empire austro-hongrois à adopter une loi sur l’islam dès 1912 ; cette législation est ensuite restée en vigueur dans la République autrichienne, qui l’a adaptée en 2015 (cf. infra).
  • [6]
    Cité par J.-F. Husson, « Belgium », in O. Scharbrodtet al. (dir.), Yearbook of Muslims in Europe, volume 10, Leyde/Boston, Brill, 2019, p. 119.
  • [7]
    C. Torrekens, « Combien de musulmans en Belgique ? », Observatoire des religions et de la laïcité (ORELA), 30 mars 2018, www.o-re-la.org.
  • [8]
    F. Dassetto, L’iris et le croissant. Bruxelles et l’islam au défi de la co-inclusion, Louvain-la-Neuve, Presses universitaires de Louvain, 2011, p. 21 et suivantes.
  • [9]
    Les pourcentages de population musulmane d’origine marocaine et turque s’établiraient respectivement à 46,4 % et 25,8 % selon J. Hertogen (cf. J.-F. Husson, « Belgium », op. cit., p.120).
  • [10]
    L’alévisme constitue un courant religieux minoritaire au sein du monde islamique, distinct tant de l’islam sunnite que de l’islam chiite dont il est cependant plus proche. Il est souvent regardé comme un courant libéral au sein de l’islam. Certains estiment toutefois qu’il s’agit en fait d’une philosophie ou d’une croyance distincte de l’islam. L’alévisme est principalement répandu en Turquie.
  • [11]
    « Alévis en Belgique. Approche générale et étude de cas », Cahiers Migrations, juin 2012 ; A. Servantie, « Les Alévis en Belgique. En quête d’une reconnaissance au-delà de l’islam », Anatoli, n° 6, 2015, p. 191-211.
  • [12]
    Pour une description du régime belge des cultes, cf. C. Sägesser, Cultes et laïcité en Belgique, Bruxelles, CRISP (Dossier n° 78), 2011.
  • [13]
    Moniteur belge, 9 mars 1870.
  • [14]
    À propos des fabriques d’église, cf. P. Wynants, « Les pouvoirs publics et les fabriques d’église en Belgique. Aperçu historique », Les cahiers du CHIREL BW, n° 16, 2012 ; J.-F. Husson (dir.), Les fabriques d’église en Wallonie. De Napoléon au 21e siècle, Wauthier-Braine, Vanden Broele, 2017.
  • [15]
    Sénat, Commission de la Justice, Proposition de loi portant reconnaissance de la religion mahométane en Belgique. Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique ainsi que de la philosophie laïque. Rapport, n° 104, 11 décembre 1973, p. 7.
  • [16]
    Loi du 17 avril 1985 portant reconnaissance des administrations en charge du temporel du culte orthodoxe, Moniteur belge, 11 mai 1985.
  • [17]
    Chambre des représentants, Proposition de loi modifiant l’article 19bis de la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, n° 213/1, 3 mars 1988.
  • [18]
    Moniteur belge, 16 mai 1968.
  • [19]
    F. Dassetto, « Le Centre islamique et culturel de Belgique au Cinquantenaire : Un tournant ? Lequel ? », 13 mars 2018, www.felicedassetto.eu.
  • [20]
    Propos du sénateur Marcel Vandewiele (CVP) : Sénat, Annales parlementaires, n° 16, 20 juin 1974, p. 414.
  • [21]
    Sénat, Proposition de loi portant reconnaissance de la religion mahométane en Belgique, n° 348, 24 mars 1971. Les signataires sont A. Smet, César Heylen et M. Vandewiele (tous CVP).
  • [22]
    Sénat, Proposition de loi portant reconnaissance de la religion mahométane en Belgique, n° 179, 3 février 1972. Outre C. Heylen et M. Vandewiele, la proposition est signée par Wim Verleysen et Constant De Clercq (CVP également).
  • [23]
    Sénat, Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique ainsi que de la philosophie laïque, n° 293, 13 avril 1972. Les signataires sont Willy Calewaert (SP), Georges Dejardin (PS), Jef Ramaekers (SP), Herman Vanderpoorten (PVV), Maurita Vanhaegendoren (VU) et Jan Bascour (PVV).
  • [24]
    Sénat, Commission de la Justice, Proposition de loi portant reconnaissance de la religion mahométane en Belgique. Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique ainsi que de la philosophie laïque. Rapport, n° 104, 11 décembre 1973.
  • [25]
    La reconnaissance et le financement des organisations philosophiques non confessionnelles ne recevront leur plein effet que 30 ans plus tard, avec la loi du 21 juin 2002 relative au Conseil central des communautés philosophiques non confessionnelles de Belgique, aux délégués et aux établissements chargés de la gestion des intérêts matériels et financiers des communautés philosophiques non confessionnelles reconnues (Moniteur belge, 22 octobre 2002). Cf. C. Sägesser, J.-F. Husson, « La reconnaissance et le financement de la laïcité », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1756 et 1760, 2002.
  • [26]
    Sénat, Commission de la Justice, Proposition de loi portant reconnaissance de la religion mahométane en Belgique. Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique ainsi que de la philosophie laïque. Rapport, n° 104, 11 décembre 1973, p. 3.
  • [27]
    Sénat, Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique, n° 56/1, 2 mai 1974. Les signataires sont M. Vandewiele, C. De Clercq, Nora Staels-Dompas et W. Verleysen (tous CVP).
  • [28]
    Sénat, Commission de la Justice, Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique. Rapport, n° 56/2, 28 mai 1974.
  • [29]
    « Een van de sterkste banden en misschien het meest reël gemeenschapsvormend element onder deze mensen, ontstaat uit hun trouw aan de islamitische cultus » (Sénat, Annales parlementaires, n° 16, 20 juin 1974, p. 414).
  • [30]
    « Weet u dat gastarbeiders, zelfs op eigen kosten, soms hun overleden familieleden naar hun vaderland laten overbrengen en dat zij zich darmee, om trouw te blijven aan hun geloofsovertuiging, gedurende jaren zware financiële opofferingen getroosten? » (Ibidem, p. 414).
  • [31]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, n° 44, 17 juillet 1974, p. 1450. L’extrême droite réclamera à plusieurs reprises l’abolition de la reconnaissance du culte islamique (cf. notamment cette initiative du Vlaams Blok : Chambre des représentants, Proposition de loi modifiant la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes et portant le texte néerlandais officiel de la dite loi, n° 756/1, 19 avril 1989).
  • [32]
    Chambre des représentants, Annales parlementaires, n° 44, 17 juillet 1974, p. 1415-1416.
  • [33]
    Chambre des représentants, Proposition de loi complétant la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, n° 73/1, 23 février 1972. F. Vandamme estimait cette reconnaissance nécessaire étant donné que « de nombreux immigrés mahométans sont venus s’établir en Belgique » et que leur nombre est plus élevé que celui de l’ensemble des protestants, anglicans et israélites séjournant en Belgique.
  • [34]
    « Een uiting van elementaire gastvrijheid ten opzichte van de meer dans 100.000 islamieten, in ons land woonachtig, en die voral te vinden zijn onder de gastarbeiders die wie hebben angetrokken om onze economie op peil te hounden. Wij waren hen dit verplicht » (Chambre des représentants, Annales parlementaires, n° 44, 17 juillet 1974, p. 1415).
  • [35]
    « Er is een schaduwzijde aan het ontwerp, namelijk dat het blijkbaar versneld is behandeld geworden naar aanleiding van de oliecrisis en om onze leveranciers, de Arabische landen en beleiders van de islamitische godsdienst, enigszins tegemoet te komen » (Ibidem, p. 1415).
  • [36]
    Cet article dit : « Les traitements et pensions des ministres des cultes sont à la charge de l’État ; les sommes nécessaires pour y faire face sont annuellement portées au budget ». Depuis 1993, il est complété d’un second paragraphe qui indique : « Les traitements et pensions des délégués des organisations reconnues par la loi qui offrent une assistance morale selon une conception philosophique non confessionnelle sont à la charge de l’État ; les sommes nécessaires pour y faire face sont annuellement portées au budget ». Il a été renuméroté 181.
  • [37]
    Sénat, Commission de la Justice, Proposition de loi portant reconnaissance de la religion mahométane en Belgique. Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique ainsi que de la philosophie laïque. Rapport, n° 104, 11 décembre 1973, p. 5.
  • [38]
    Ibidem, p. 7.
  • [39]
    Pour les protestants : le Synode de l’union des Églises évangéliques. Pour les israélites : le Consistoire israélite de Belgique (cf. notamment C. Sägesser, « Les structures du monde juif en Belgique », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1615, 1998). Pour le culte anglican, il fallut trouver un nouvel organe représentatif : le Conseil central du culte anglican, établi par l’arrêté royal du 17 janvier 1875.
  • [40]
    Arrêté royal du 23 février 1871 (Églises protestantes et israélites. Existence civile. Organisation), Moniteur belge, 24 janvier 1875 ; Arrêté royal du 17 janvier 1875 (Église anglicane. Administration), Moniteur belge, 18 janvier 1875.
  • [41]
    Arrêté royal du 3 mai 1978 portant organisation des comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues, Moniteur belge, 6 mai 1978.
  • [42]
    Loi du 23 janvier 1981 modifiant la loi du 2 août 1974 relative aux traitements des titulaires de certaines fonctions publiques et des ministres des cultes, Moniteur belge, 8 avril 1981.
  • [43]
    Loi du 4 janvier 1989 relative aux traitements des titulaires de certaines fonctions publiques et des ministres des cultes, Moniteur belge, 4 février 1989.
  • [44]
    Loi du 17 avril 1985 portant reconnaissance des administrations en charge du temporel du culte orthodoxe, Moniteur belge, 11 mai 1985 ; Loi du 18 juillet 1991 modifiant la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, Moniteur belge, 26 juillet 1991 ; Loi du 10 mars 1999 modifiant la loi du 5 avril 1962 reconnaissant les modifications de l’archevêché de Malines et la création de l’évêché d’Anvers, la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes et le décret impérial du 30 décembre 1809 concernant les fabriques des églises, Moniteur belge, 23 avril 1999.
  • [45]
    Sénat, Commission de la Justice, Proposition de loi portant reconnaissance de la religion mahométane en Belgique. Proposition de loi portant reconnaissance du culte islamique ainsi que de la philosophie laïque. Rapport, n° 104, 11 décembre 1973, p. 5.
  • [46]
    Du nom du bourgmestre de Schaerbeek Roger Nols (1922-2004), député du FDF puis du PRL avant de terminer sa carrière politique au FN. Il délaisse les quartiers historiques de sa commune où se sont établies les populations immigrées, tout en conduisant des campagnes électorales démagogiques et xénophobes.
  • [47]
    À ce sujet, cf. P. Blaise, V. de Coorebyter, « L’islam et l’école. Anatomie d’une polémique », op. cit.
  • [48]
    Ibidem, p. 9.
  • [49]
    Chambre des représentants, Proposition de résolution relative à la reconnaissance d’un organe représentatif de la communauté islamique de Belgique, n° 1088/1, 14 février 1990. Les signataires sont Willem Draps et Jacques Pivin (tous deux PRL) et Eduard Beysen (PVV).
  • [50]
    « Ancêtre » du Centre interfédéral pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (actuel Unia), le Commissariat royal à la politique des immigrés (1989-1993) est créé par le gouvernement Martens VIII dans un contexte qui voit la montée en puissance électorale d’un nouveau parti politique d’extrême droite, le Vlaams Blok. Deux commissaires sont à la manœuvre : le francophone Bruno Vinikas (PS) et la néerlandophone Paula D’Hondt (CVP).
  • [51]
    Moniteur belge, 24 novembre 1990.
  • [52]
    Cette reconnaissance sera rétrospectivement officialisée par l’arrêté royal du 3 juillet 1996 relatif à l’Exécutif des musulmans de Belgique (Moniteur belge, 9 juillet 1996).
  • [53]
    Arrêté royal du 3 mai 1999 portant reconnaissance de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 20 mai 1999.
  • [54]
    Arrêté royal du 4 mai 1999 portant reconnaissance des membres de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 1er juin 1999.
  • [55]
    Arrêté royal du 18 juillet 2003 portant reconnaissance des membres de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 25 juillet 2003. Cet arrêté royal abroge l’arrêté royal du 4 mai 1999 portant reconnaissance des membres de l’Exécutif des musulmans de Belgique.
  • [56]
    Conseil d’État, Section de législation, Avis n° 37.484/2, 2 juillet 2004.
  • [57]
    Chambre des représentants, Proposition de loi portant création d’une commission chargée du renouvellement des organes du culte musulman, n° 1275/1, 8 juillet 2004. Les signataires sont Thierry Giet (PS), Tony Van Parys (CD&V), Hendrik Daems (VLD), Daniel Bacquelaine (MR) et Dirk Van Der Maelen (SP.A–Spirit).
  • [58]
    Loi du 20 juillet 2004 portant création d’une commission chargée du renouvellement des organes du culte islamique, Moniteur belge, 30 juillet 2004.
  • [59]
    C. Sägesser, C. Torrekens, « La représentation de l’islam », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1996-1997, 2008.
  • [60]
    Cour d’arbitrage, Arrêt n° 148/2005, 28 septembre 2005.
  • [61]
    Conseil d’État, Arrêt n° 141.851, 10 mars 2005.
  • [62]
    Moniteur belge, 18 décembre 1998.
  • [63]
    Conseil d’État, Avis n° 34.547/AG, 11 février 2003.
  • [64]
    Loi du 3 mai 2005 modifiant la loi du 11 décembre 1998 relative à la classification et aux habilitations de sécurité, Moniteur belge, 27 mai 2005 ; Loi du 3 mai 2005 modifiant la loi du 11 décembre 1998 portant création d’un organe de recours en matière d’habilitations de sécurité, Moniteur belge, 27 mai 2005.
  • [65]
    Arrêté royal du 7 octobre 2005 portant reconnaissance des membres, titulaires d’un mandat au sein de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 14 octobre 2005.
  • [66]
    Arrêté royal du 27 mars 2008 portant suspension des articles 4 à 9 de l’arrêté royal du 3 mai 1999 portant reconnaissance de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 11 avril 2008.
  • [67]
    Arrêté royal du 9 mai 2008 portant reconnaissance des membres, titulaires d’un mandat au sein de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 19 mai 2008.
  • [68]
    Arrêté royal du 28 août 2011 modifiant l’arrêté royal du 9 mai 2008 portant reconnaissance des membres, titulaires d’un mandat au sein de l’Exécutif des musulmans de Belgique, modifié par les arrêtés royaux des 30 mars 2009 et 22 décembre 2010, Moniteur belge, 14 septembre 2011.
  • [69]
    Arrêtés royaux du 19 janvier 2012 (Moniteur belge, 3 février 2012), du 29 mars 2012 (Moniteur belge, 20 avril 2012), du 15 août 2012 (Moniteur belge, 11 septembre 2012) et du 27 décembre 2012 (Moniteur belge, 18 janvier 2013). Le montant total du subside alloué en 2012 est de 322 500 euros.
  • [70]
    C. Sägesser, « Un nouvel Exécutif des musulmans de Belgique », Observatoire des religions et de la laïcité (ORELA), 5 avril 2014, www.o-re-la.org.
  • [71]
    Arrêté royal du 21 décembre 2013 relatif à l’attribution d’un subside de 100 000 euros pour le renouvellement de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 5 février 2014.
  • [72]
    Acte de constitution de l’asbl de renouvellement de l’organe représentatif du culte musulman de Belgique, 27 juin 2013 (numéro d’entreprise 541.554.067), Annexes du Moniteur belge, 13 novembre 2013.
  • [73]
    Arrêté royal du 2 avril 2014 portant reconnaissance des membres de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 18 avril 2014.
  • [74]
    Arrêté royal du 15 février 2016 portant reconnaissance de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 19 février 2016.
  • [75]
    C’est pour mettre fin à l’ingérence étrangère – du Foreign Office britannique, en l’occurrence – que le gouvernement belge avait mis sur pied un Comité central du culte anglican par l’arrêté royal du 17 janvier 1875 (Moniteur belge, 24 janvier 1875), au sein duquel il a ensuite distingué un président (cf. l’arrêté royal du 11 juillet 1923 portant que le comité central du culte anglican est composé d’un président et de deux membres, tous trois désignés par le ministre de la Justice, Moniteur belge, 30 juillet 1923).
  • [76]
    Le Conseil central laïque (CCL), organe représentatif de la seule organisation philosophique non confessionnelle reconnue à ce jour, se compose de deux ailes : le Centre d’action laïque (CAL, francophone) et l’Unie Vrijzinnige Verenigingen (UVV, néerlandophone).
  • [77]
    C. Sägesser, « Salah Echallaoui à la tête de l’Exécutif des musulmans de Belgique », Observatoire des religions et de la laïcité (ORELA), 21 mars 2016, www.o-re-la.org.
  • [78]
    Arrêté royal du 18 avril 2017 portant modification de l’arrêté royal du 15 février 2016 portant reconnaissance de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 11 mai 2017.
  • [79]
    Contrairement à la laïcité organisée, pour laquelle le financement du CCL est établi par la loi du 21 juin 2002.
  • [80]
    Moniteur belge, 9 juillet 1996.
  • [81]
    Arrêté royal du 20 décembre 2019 relatif à l’attribution d’un subside de 468 000 euros pour le fonctionnement de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 17 janvier 2020.
  • [82]
    Arrêté royal du 26 mars 2020 relatif à l’attribution d’un subside de 468 000 euros pour le fonctionnement de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 7 avril 2020.
  • [83]
    Arrêté royal du 12 juillet 2019 modifiant l’arrêté royal du 1er mai 2006 relatif aux places de secrétaire général, de secrétaire et de secrétaire adjoint auprès de l’Exécutif des musulmans de Belgique, modifié par l’arrêté royal du 26 janvier 2017, Moniteur belge, 19 août 2019.
  • [84]
    Des montants ont toutefois régulièrement été provisionnés à partir de 1990.
  • [85]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 14 mars 2019, Moniteur belge, 10 avril 2019.
  • [86]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 3 mai 2019, Moniteur belge, 8 juillet 2019.
  • [87]
    Loi spéciale du 13 juillet 2001 portant transfert de diverses compétences aux Régions et aux Communautés, Moniteur belge, 3 août 2001. Cf. C. Sägesser, « Le temporel des cultes depuis sa régionalisation », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1968, 2007.
  • [88]
    Accord de coopération du 27 mai 2004 entre l’Autorité fédérale, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale en ce qui concerne la reconnaissance des cultes, les traitements et pensions des ministres des cultes, les fabriques d’église et les établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus, Moniteur belge, 14 juin 2004, élargi à la Communauté germanophone en 2008 : Accord de coopération du 2 juillet 2008 modifiant l’accord de coopération du 27 mai 2004 entre l’Autorité fédérale, la Communauté germanophone, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale en ce qui concerne la reconnaissance des cultes, les traitements et pensions des ministres des cultes, les fabriques d’église et les établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus (cet accord de coopération n’ayant pas été approuvé par les différentes assemblées parlementaires, il n’est pas considéré comme valide par le Conseil d’État).
  • [89]
    Décret wallon du 27 mai 2004 relatif à l’exercice, par la Communauté germanophone, de certaines compétences de la Région wallonne en matière de pouvoirs subordonnés, Moniteur belge, 16 juin 2004 ; Décret de la Communauté germanophone du 1er juin 2004 relatif à l’exercice, par la Communauté germanophone, de certaines compétences de la Région wallonne en matière de pouvoirs subordonnés, Moniteur belge, 19 octobre 2004.
  • [90]
    Arrêté du gouvernement wallon du 13 octobre 2005 portant l’organisation des comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues, Moniteur belge, 27 octobre 2005 ; Arrêté du gouvernement wallon du 13 octobre 2005 fixant le modèle de règlement d’ordre intérieur des comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues, Moniteur belge, 27 octobre 2005 ; Arrêté du gouvernement wallon du 13 octobre 2005 fixant les modèles des budgets et comptes à dresser par les comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues, Moniteur belge, 27 octobre 2005.
  • [91]
    Arrêté du gouvernement wallon du 6 mars 2009 modifiant l’arrêté du gouvernement wallon du 13 octobre 2005 portant organisation des comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues, Moniteur belge, 26 mars 2009.
  • [92]
    Arrêté du gouvernement wallon du 14 mars 2019 modifiant l’arrêté du gouvernement wallon du 13 octobre 2005 portant organisation des comités chargés de la gestion du temporel des communautés islamiques reconnues, Moniteur belge, 8 avril 2019.
  • [93]
    Décret wallon du 13 mars 2014 modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation et diverses dispositions relatives à la tutelle sur les établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus, Moniteur belge, 4 avril 2014.
  • [94]
    La Cour constitutionnelle annule l’article 34, portant sur les séminaires, au motif que la compétence n’en a pas été transférée aux Régions (Cour constitutionnelle, Arrêt n° 135/2015, 1er octobre 2015).
  • [95]
    Article 56 du décret wallon du 13 mars 2014 modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation et diverses dispositions relatives à la tutelle sur les établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus (Moniteur belge, 4 avril 2014).
  • [96]
    L’avis négatif d’une province n’empêche pas la Région wallonne d’approuver les budgets et les comptes si elle l’estime opportun. La Province de Namur a ainsi introduit un recours contre l’arrêté du gouvernement wallon du 8 novembre 2017 approuvant le compte 2013 de la mosquée Haxhi-Zeka.
  • [97]
    Parlement wallon, Rapport introductif sur la tutelle et le financement public des cultes par les autorités locales et régionales wallonnes, n° 495/1, 17 mai 2016.
  • [98]
    Parlement wallon , Projet de décret relatif à la reconnaissance et aux obligations des établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus, n° 770/1, 27 mars 2017.
  • [99]
    Ibidem, p. 3.
  • [100]
    « Je jure : a) de respecter la Constitution, la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’ensemble des législations existantes ; b) de ne pas collaborer à des actes contraires à la Constitution, à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et aux législations existantes ; c) de déployer les efforts nécessaires à ce que ma communauté cultuelle locale, en ce compris l’ensemble de ses membres, ne soit pas associée à des propos ou à des actes contraires à la Constitution et à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »
  • [101]
    Conseil d’État, Avis n° 59.638/4, 19 septembre 2016.
  • [102]
    Parlement wallon, Commission des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives, Compte rendu intégral, n° 169, 4 mai 2017, p. 2.
  • [103]
    Ibidem, p. 6.
  • [104]
    Parlement wallon, Commission des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives, Projet de décret relatif à la reconnaissance et aux obligations des établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus. Rapport, n° 770/4, 4 mai 2017, p. 7.
  • [105]
    Parlement wallon, Compte rendu intégral, n° 20, 17 mai 2017, p. 69.
  • [106]
    Décret wallon du 18 mai 2017 relatif à la reconnaissance et aux obligations des établissements chargés de la gestion du temporel des cultes reconnus, Moniteur belge, 16 juin 2017.
  • [107]
    Cour constitutionnelle, Arrêt n° 203/2019, 19 décembre 2019.
  • [108]
    Ibidem, p. 18.
  • [109]
    Ibidem, p. 29.
  • [110]
    Ordonnance bruxelloise du 18 juillet 2002 portant diverses réformes en vertu de la loi spéciale du 13 juillet 2001 portant transfert de diverses compétences aux Régions et aux Communautés, Moniteur belge, 7 août 2002 ; Ordonnance bruxelloise du 19 février 2004 portant modification du décret impérial du 30 décembre 1809 concernant les fabriques d’église, Moniteur belge, 18 mars 2004.
  • [111]
    Ordonnance bruxelloise du 29 juin 2006 relative à l’organisation et au fonctionnement du culte islamique, Moniteur belge, 7 juillet 2006 (et erratum, 18 juillet 2006).
  • [112]
    Arrêté du gouvernement bruxellois du 8 février 2007 relatif aux demandes de reconnaissance des communautés islamiques et à l’autorisation de création des comités islamiques, Moniteur belge, 8 février 2007.
  • [113]
    Le Soir en ligne, 26 février 2020, www.lesoir.be.
  • [114]
    Décret flamand du 7 mai 2004 relatif à l’organisation matérielle et au fonctionnement des cultes reconnus, Moniteur belge, 6 septembre 2004.
  • [115]
    Arrêté du gouvernement flamand du 30 septembre 2005 établissant les critères d’agrément des communautés d’églises et religieuses locales des cultes reconnus, Moniteur belge, 16 décembre 2005.
  • [116]
    Décret flamand du 20 janvier 2006 modifiant le décret du 7 mai 2004, Moniteur belge, 17 février 2006 ; Décret flamand du 6 juillet 2012 modifiant diverses dispositions du décret du 7 mai 2004 relatif à l’organisation matérielle et au fonctionnement des cultes reconnus, Moniteur belge, 16 août 2012.
  • [117]
    De Standaard, 29 septembre 2017.
  • [118]
    Conseil d’État, Arrêt n° 242.994, 20 novembre 2018.
  • [119]
    De Morgen, 12 décembre 2019.
  • [120]
    Gouvernement flamand, « Regeerakkoord », s.d. [2 octobre 2019], p. 10.
  • [121]
    De Standaard, 4 octobre 2019.
  • [122]
    Décret de la Communauté germanophone du 20 décembre 2004 organisant la tutelle administrative ordinaire sur les communes de la région de langue allemande, Moniteur belge, 18 mars 2005.
  • [123]
    Décret de la Communauté germanophone du 30 janvier 2006 portant modification de la loi du 4 mars 1870 sur le temporel des cultes, Moniteur belge, 28 mars 2006.
  • [124]
    Décret de la Communauté germanophone du 19 mai 2008 relatif à l’organisation matérielle et au fonctionnement des cultes reconnus, Moniteur belge, 1er septembre 2008.
  • [125]
    Cf. M. Beumier, « Le statut social des ministres des cultes et des délégués laïques », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1918, 2006.
  • [126]
    Arrêté royal du 12 juillet 2019 modifiant l’arrêté royal du 1er mai 2006 relatif aux places de secrétaire général, de secrétaire et de secrétaire adjoint auprès de l’Exécutif des musulmans de Belgique, modifié par l’arrêté royal du 26 janvier 2017, Moniteur belge, 19 août 2019.
  • [127]
    Cf. l’arrêté royal du 26 janvier 2017 modifiant l’arrêté royal du 1er mai 2006 relatif aux places de secrétaire général, de secrétaire et de secrétaire adjoint auprès de l’Exécutif des musulmans de Belgique, modifié par l’arrêté royal du 2 avril 2014 (Moniteur belge, 3 février 2017).
  • [128]
    Loi du 5 mai 2019 portant des dispositions diverses en matière pénale et en matière de cultes, et modifiant la loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie et le Code pénal social, Moniteur belge, 24 mai 2019.
  • [129]
    Moniteur belge, 19 septembre 1974 (l’intitulé actuel de cette loi date du 21 juin 2002).
  • [130]
    Chambre des représentants, Proposition de loi portant des dispositions diverses en matière pénale et en matière de cultes, n° 3515/1, 6 février 2019, p. 138. Les signataires sont Sophie De Wit (N-VA), Raf Terwingen (CD&V), Philippe Goffin (MR), Carina Van Cauter (Open VLD), Gautier Calomne (MR), Sonja Becq (CD&V) et Kristien Van (N-VA).
  • [131]
    Conseil d’État, Avis n° 62 229/1-2-3-4, 3 octobre 2018. Il est toutefois à noter que le respect du principe de l’égalité entre hommes et femmes n’a pas conduit, jusqu’à présent, à exiger que tous les postes de la nomenclature des cultes (curé, évêque, rabbin, imam, etc.) soient également ouverts aux femmes.
  • [132]
    Ainsi qu’elle l’indique sur son site Internet : « Qui sommes-nous ? », www.justicedemocracy.org.
  • [133]
    Justice and Democracy, « Contre la vaticanisation de l’islam, Justice and Democracy saisit la justice », Communiqué, 24 octobre 2019 (publié sur la page Facebook du think tank Vigilance musulmane : www.facebook.com/Think.tank.Vigilance.musulmane).
  • [134]
    RTBF info, 18 février 2016, www.rtbf.be.
  • [135]
    Cf. S. Model, « L’Église orthodoxe en Belgique », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2399-2400, 2018, p. 39-40.
  • [136]
    Cf. en particulier J.-F. Husson, Pour une formation des imams en Belgique. Points de référence en Belgique et en Europe, Bruxelles, Fondation Roi Baudouin, 2006 ; J.-F. Husson,La formation des imams en Europe. État des lieux, Bruxelles, Fondation Roi Baudouin, 2007 ; J. Debeer, P. Loobuyck, P. Meier, « Imams en islamconsulenten in Vlaanderen: achtergrond en activiteiten in kaart gebracht », Steunpunt Gelijkekansenbeleid Consortium Universiteit Antwerpen en Universiteit Hasselt, 2011 ; J.-F. Husson, J. Mandin, « Étude de faisabilité en vue de la création d’un Institut public d’étude de l’islam (IPEI) », juin 2014.
  • [137]
    Cf. Chambre des représentants, Proposition visant à instituer une commission d’enquête parlementaire chargée d’examiner les circonstances qui ont conduit aux attentats terroristes du 22 mars 2016 dans l’aéroport de Bruxelles-National et dans la station de métro Maelbeek à Bruxelles, y compris l’évolution et la gestion de la lutte contre le radicalisme et la menace terroriste. Texte adopté en séance plénière, n° 1752/5, 14 avril 2016.
  • [138]
    Chambre des représentants, Enquête parlementaire chargée d’examiner les circonstances qui ont conduit aux attentats terroristes du 22 mars 2016 dans l’aéroport de Bruxelles-National et dans la station de métro Maelbeek à Bruxelles, y compris l’évolution et la gestion de la lutte contre le radicalisme et la menace terroriste. Quatrième rapport intermédiaire sur le volet radicalisme, n° 1752/9, 23 octobre 2017.
  • [139]
    Ibidem, p. 40.
  • [140]
    Ibidem, p. 54.
  • [141]
    Cour constitutionnelle, Arrêt 203/2019, 19 décembre 2019, p. 5.
  • [142]
    « Marcourt pose les jalons d’un “islam moderne” en Belgique francophone », Belga, 18 mars 2015.
  • [143]
    Outre les co-présidents A. Rea et F. Tulkens : Radouane Attiya et Brigitte Maréchal, co-rapporteurs ; Ibrahim Bouhna, Salah Echallaoui, Abdelaziz El Ouahabi, Delphine Laroche, Nouredine Smaïli et Semsettin Ugurlu, titulaires d’une fonction à l’EMB ; Louis-Léon Christians, Édouard Delruelle, Hugues Dumont, Corinne Torrekens et Cécile Vanderpelen, du monde académique ; Christian Laporte et Ricardo Gutierrez, du monde des médias.
  • [144]
    Commission chargée par le ministre J.-C. Marcourt de faire des propositions en vue de favoriser le développement et la reconnaissance d’un islam moderne en Fédération Wallonie-Bruxelles, « Rapport de la Commission concernant la formation des cadres musulmans et les émissions concédées », 18 mars - 4 décembre 2015, disponible sur le site Internet de l’UCLouvain : https://cdn.uclouvain.be
  • [145]
    Le Soir, 7 décembre 2015.
  • [146]
    Décret de la Communauté française du 14 décembre 2016 portant sur la création d’un Institut de promotion des formations sur l’islam, Moniteur belge, 25 janvier 2017.
  • [147]
    Arrêté du gouvernement de la Communauté française du 30 août 2017 portant désignation des membres du comité de direction de l’Institut de promotion des formations sur l’islam, Moniteur belge, 3 novembre 2017.
  • [148]
    Arrêté du gouvernement de la Communauté française du 20 février 2019 portant désignation des membres du comité scientifique de l’Institut de promotion des formations sur l’islam, Moniteur belge, 27 mars 2019.
  • [149]
    La Libre Belgique en ligne, 2 octobre 2018, www.lalibre.be.
  • [150]
    Parlement de la Communauté française, Commission de l’Enseignement supérieur, de l’Enseignement de promotion sociale, de la Recherche et des Médias, Question orale de Valérie Dejardin au ministre Jean-Claude Marcourt, 26 mars 2019.
  • [151]
    M. Üstün, « Mise au point concernant la formation des imams », Communiqué de presse, 4 octobre 2018, www.embnet.be.
  • [152]
    K. Geens, « La formation civile d’imams prévue à l’UCLouvain en septembre 2020 », Communiqué de presse, 31 janvier 2020, www.koengeens.be.
  • [153]
    VRT, 26 décembre 2019, www.vrt.be ; Het Laatste Nieuws en ligne, 26 décembre 2019, www.hln.be ; Le Soir en ligne, 26 décembre 2019, www.lesoir.be.
  • [154]
    154 Article 4 des statuts déposés le 14 avril 2019 au greffe du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles .
  • [155]
    Article 5 des statuts déposés le 14 avril 2019 au greffe du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles.
  • [156]
    Arrêté royal du 18 avril 2017 portant modification de l’arrêté royal du 15 février 2016 portant reconnaissance de l’Exécutif des musulmans de Belgique, Moniteur belge, 11 mai 2017.
  • [157]
    Modifications aux statuts de l’AFOR, déposées au greffe du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles le 21 mai 2019.
  • [158]
    Modifications aux statuts de l’AFOR, déposées au greffe du tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles le 24 juillet 2019.
  • [159]
    Antwerpse Televisie, 26 décembre 2019, www.atv.be.
  • [160]
    Arrêté royal du 8 avril 2003 modifiant l’arrêté royal du 9 février 1995 portant fixation du cadre organique du service des conseillers moraux en temps de paix, Moniteur belge, 25 avril 2003 ; Arrêté royal du 8 avril 2003 modifiant l’arrêté royal du 9 février 1995 portant fixation du cadre organique du service de l’aumônerie en temps de paix, Moniteur belge, 25 avril 2003.
  • [161]
    RTBF Info, 15 août 2016, www.rtbf.be.
  • [162]
    Arrêté royal du 10 avril 2016 modifiant l’arrêté royal du 25 octobre 2005 fixant le cadre des aumôniers et des conseillers islamiques appartenant à l’un des cultes reconnus ainsi que des conseillers moraux de philosophie non confessionnelle du Conseil central laïque auprès des établissements pénitentiaires et fixant leurs échelles de traitement, Moniteur belge, 19 avril 2016.
  • [163]
    Arrêté royal du 17 mai 2019 relatif aux aumôniers, aux conseillers des cultes et aux conseillers moraux auprès des prisons, Moniteur belge, 11 juin 2019.
  • [164]
    Il est à noter que le cours de religion anglicane n’est pas organisé en Communauté française.
  • [165]
    Cf. C. Sägesser, « Les cours de religion et de morale dans l’enseignement obligatoire », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2140-2141, 2012.
  • [166]
    Loi du 20 février 1978 modifiant les lois du 29 mai 1959 et du 11 juillet 1973, modifiant certaines dispositions de la législation de l’enseignement, ainsi que les lois sur l’enseignement primaire, coordonnées par l’arrêté royal du 20 août 1957, Moniteur belge, 11 mars 1978.
  • [167]
    P. Blaise, V. de Coorebyter, « L’islam et l’école. Anatomie d’une polémique », op. cit., p. 11.
  • [168]
    168 Chambre des représentants, Proposition de loi qui apporte des modifications à la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l’enseignement, n° 330/1, 24 mars 1988.
  • [169]
    Chambre des représentants, Proposition de loi qui apporte des modifications à la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l’enseignement. Avis du Conseil d’État, n° 330/2, 27 mai 1988.
  • [170]
    Décret de la Communauté française du 10 mars 2006 relatif aux statuts des maîtres de religion et professeurs de religion, Moniteur belge, 19 mai 2006.
  • [171]
    Moniteur belge, 12 janvier 1972 (l’intitulé actuel de cet arrêté royal date du 8 juin 1999).
  • [172]
    Arrêté du gouvernement de la Communauté française du 8 juin 1999 modifiant la réglementation relative au statut administratif des maîtres de religion, des professeurs de religion et des inspecteurs de religion des religions catholique, protestante, israélite et orthodoxe des établissements d’enseignement de la Communauté française, Moniteur belge, 9 septembre 1999.
  • [173]
    Arrêté du gouvernement flamand du 26 septembre 1990 relatif aux titres, aux échelles de traitement et au statut pécuniaire des maîtres de religion et des professeurs de religion, Moniteur belge, 15 février 1991.
  • [174]
    En dernier lieu par l’arrêté du gouvernement flamand du 10 mai 2019 modifiant diverses dispositions de l’arrêté du gouvernement flamand du 26 septembre 1990 relatif aux titres, aux échelles de traitement et au statut pécuniaire des maîtres de religion et des professeurs de religion (Moniteur belge, 29 août 2019).
  • [175]
    H. Crevits, « Engagementsverklaring voor een kwalitatief islamonderwijs », Communiqué de presse, 9 novembre 2016, www.hildecrevits.be.
  • [176]
    De Morgen en ligne, 12 avril 2016, www.demorgen.be.
  • [177]
    En dernier lieu par le décret de la Communauté germanophone du 6 mai 2019 portant des mesures en matière d’enseignement (Moniteur belge, 11 juillet 2009).
  • [178]
    VRT, 31 août 2019, www.vrt.be.
  • [179]
    « Voor nieuwe scholen komen er strengere erkenningsvoorwaarden. Een school oprichten kan nog enkel na formele goedkeuring door de Vlaamse Regering. We willen er zeker van zijn dat Vlaamse scholen de grond- en mensenrechten strikt toepassen. Bij twijfel over radicalisering, veiligheid van de staat of buitenlandse inmenging voeren we een grondige audit uit » (Gouvernement flamand, « Regeerakkoord », op. cit., p. 11).
  • [180]
    Seuls l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo ont des populations majoritairement musulmanes.
  • [181]
    Depuis lors, ces pays ont également été concernés par l’immigration en provenance de pays musulmans mais dans une proportion bien moindre. Une monographie récente est consacrée spécifiquement aux communautés musulmanes dans les anciens pays du bloc de l’Est et aux politiques publiques mises en place à leur égard : E. Račius, Muslims in Eastern Europe, Édimbourg, Edinburgh University Press, 2018.
  • [182]
    O. Scharbrodt et al. (dir.), Yearbook of Muslims in Europe, volume 10, Leyde/Boston, Brill, 2019. Cet ouvrage collectif publié en 2019 fournit des estimations de la population musulmane dans chaque pays ; toutefois, les enquêtes ou recensements sur lesquels se basent lesdites estimations sont toutes antérieures à 2019.
  • [183]
    « Muslmis make up 4,9 % of Europe’s population in 2016 », Pew Research Center, 29 novembre 2017, www.pewforum.org.
  • [184]
    Traditionnellement, on distingue le modèle de la séparation (comme en France), le modèle de l’Église d’État (comme en Angleterre) et le modèle coopératif, qu’il soit concordataire ou non (comme en Allemagne ou en Belgique).
  • [185]
    Il est à noter que l’Espagne n’est pas à proprement parler un État fédéral, mais un État régional (comme le sont également, par ailleurs, l’Italie et le Royaume-Uni).
  • [186]
    Le Figaro en ligne, 8 juin 2018, www.lefigaro.fr.
  • [187]
    Le système, connu sous le nom de « otto per mille », a été institué en 1986. Douze organisations religieuses sont actuellement conventionnées pour figurer parmi les choix proposés.
  • [188]
    Cette expression se réfère au gallicanisme, une doctrine religieuse et politique qui a pour objectif d’ancrer l’Église catholique de France dans la réalité nationale au détriment de ses liens avec Rome (le gallicanisme s’oppose à l’ultramontanisme).
  • [189]
    Commission de réflexion sur l’application du principe de laïcité dans la République, « Rapport au président de la République », 2003, www.vie-publique.fr ; J.-P. Machelon, « Les relations des cultes avec les pouvoirs publics », Ministère de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire, 2006, www.vie-publique.fr ; F. Messner, La formation des cadres religieux musulmans », Ministère de l’Intérieur / Ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, 2015.
  • [190]
    Sénat, De l’islam en France à un islam de France, établir la transparence et lever les ambigüités. Rapport d’information fait au nom de la mission d’information sur l’organisation, la place et le financement de l’Islam en France et de ses lieux de culte, n° 757, 5 juillet 2016, www.senat.fr.
  1. Introduction
  2. 1. La reconnaissance du culte islamique
    1. 1.1. L’islam en Belgique
    2. 1.2. Le système de financement public des cultes en Belgique
    3. 1.3. Les premières propositions de reconnaissance
    4. 1.4. L’adoption de la loi du 19 juillet 1974
    5. 1.5. Les premières conséquences de la reconnaissance
  3. 2. La mise en place de l’Exécutif des musulmans de Belgique
    1. 2.1. Le Centre islamique et culturel de Belgique
    2. 2.2. Les élections du 13 décembre 1998
    3. 2.3. Les élections du 20 mars 2005
    4. 2.4. La réforme de 2014
    5. 2.5. L’évolution des subsides octroyés à l’Exécutif des musulmans de Belgique
  4. 3. La reconnaissance et l’organisation du financement des communautés islamiques locales par les Régions wallonne, bruxelloise et flamande et la Communauté germanophone
    1. 3.1. L’évolution en Région wallonne (région de langue française)
      1. 3.1.1. La reconnaissance des communautés islamiques (2005)
      2. 3.1.2. La tutelle sur les établissements publics (2014)
        1. Tutelle d’approbation
        2. Tutelle d’annulation
      3. 3.1.3. Les critères de reconnaissance (2017)
        1. Le recours auprès de la Cour constitutionnelle
      4. 3.1.4. Les montants pris en charge par les provinces wallonnes
    2. 3.2. L’évolution en Région bruxelloise
    3. 3.3. L’évolution en Région flamande
    4. 3.4. L’évolution en Communauté germanophone
  5. 4. Les ministres du culte islamique
    1. 4.1. La prise en charge du traitement des ministres du culte islamique
    2. 4.2. La formation des imams
  6. 5. Les aumôneries islamiques
  7. 6. Les cours de religion islamique dans les établissements scolaires organisés par les pouvoirs publics et les écoles islamiques
    1. 6.1. Les cours de religion islamique
      1. 6.1.1. La formation des enseignants
      2. 6.1.2. La fréquentation des cours de religion islamique dans l’enseignement officiel
    2. 6.2. Les écoles libres confessionnelles islamiques
  8. 7. Perspectives européennes
    1. 7.1. L’identification des interlocuteurs
    2. 7.2. Le financement du culte
    3. 7.3 La formation des ministres du culte et des enseignants
  9. Conclusion

Longtemps, l’organisation et le financement public du culte islamique n’ont pas constitué un thème porteur auprès du grand public, ce qui n’a guère incité les États européens à légiférer dans cette matière complexe. Cependant, depuis les attentats islamistes qui ont endeuillé l’Europe en 2015-2016, le processus de reconnaissance et de financement de l’islam connaît une nouvelle dynamique, dans un contexte où les responsables politiques souhaitent désormais encourager le développement d’un islam européen, c’est-à-dire une religion modérée, respectueuse de la démocratie et de valeurs telles que l’égalité femmes-hommes.

En 1974, la Belgique a été le premier pays d’Europe occidentale à reconnaître le culte islamique. Toutefois, plus de trente ans se sont écoulés ensuite avant que les premières mosquées soient reconnues et que les premiers imams voient leur traitement pris en charge par l’État belge. Ce long délai est dû en particulier à la difficulté qui a été rencontrée pour constituer un organe représentatif du culte islamique.

Ce Courrier hebdomadaire retrace l’évolution des politiques publiques menées à l’égard du culte islamique en Belgique. Il examine successivement la reconnaissance du culte islamique proprement dite, le processus de mise en place de son organe représentatif (l’Exécutif des musulmans de Belgique), la reconnaissance et le financement des communautés islamiques locales (organisées autour des mosquées) par les Régions, la prise en charge du traitement des imams par l’Autorité fédérale, la formation des imams, la mise en œuvre des aumôneries musulmanes et l’organisation des cours de religion islamique. En contrepoint, il évoque la situation prévalant dans d’autres États européens.

Mis en ligne sur Cairn.info le 31/08/2020
https://doi.org/10.3917/cris.2459.0005
ISBN 9782870752418
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