CAIRN.INFO : Matières à réflexion

INTRODUCTION

1La loi tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme a été promulguée le 25 février 2003 et est entrée en vigueur le 27 mars 2003 [1].

2La loi a pour objectif d’interdire toute discrimination, directe ou indirecte, portant non seulement sur l’accès à l’emploi et les conditions de travail, sur la fourniture des biens et services, mais aussi sur la participation à toute activité économique, sociale, culturelle ou politique accessible au public.

3Elle élargit la compétence du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme aux discriminations non raciales, à l’exception de la discrimination fondée sur le sexe, qui est de la compétence de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes.

4La loi anti-discrimination est l’aboutissement d’une discussion de près de quatre ans. Elle se trouve à la rencontre de deux processus. L’un, dû à l’initiative de parlementaires et d’associations de promotion de l’égalité des droits, visait à renforcer l’arsenal législatif belge tout en contribuant à l’évolution des mentalités vers plus d’acceptation des différences. L’autre, soutenu par le gouvernement fédéral, avait pour objet la transposition de deux directives européennes.

5Après avoir brièvement exposé le contenu de la loi anti-discrimination (première partie), on en retracera la genèse (deuxième partie) et le processus parlementaire (troisième partie). On présentera ensuite l’accueil réservé à la loi, l’arrêt de la Cour d’arbitrage qui a annulé certaines dispositions de la loi, et le projet d’arrêté d’application organisant les tests de situation (quatrième partie). On examinera encore l’application de la loi depuis son entrée en vigueur, notamment à travers l’action du Centre pour l’égalité des chances, et celle de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes. Dans une dernière partie on se penchera sur deux questions fondamentales qui se posent à propos de la loi anti-discrimination : la loi transpose-t-elle adéquatement les directives européennes ? La loi est-elle entièrement de la compétence du législateur fédéral ? Nous conclurons en abordant les perspectives d’évolution de cette loi.

1. LE CONTENU DE LA LOI

6La loi du 25 février 2003 interdit la discrimination, directe ou indirecte, lorsque cette discrimination porte sur :

  • la fourniture ou la mise à disposition du public de biens et services ;
  • les conditions d’accès au travail salarié, non salarié ou indépendant, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d’activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion, les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, tant dans le secteur privé que public ;
  • la nomination ou la promotion d’un fonctionnaire ou l’affectation d’un fonctionnaire à un service ;
  • la mention dans une pièce officielle ou un procès-verbal ;
  • l’accès, la participation et tout autre exercice d’une activité économique, sociale, culturelle ou politique accessible au public.
La loi votée interdirait également la diffusion, la publication ou l’exposition en public d’un texte, d’un avis, d’un signe ou de tout autre support comportant une discrimination, mais cette disposition a été annulée par la Cour d’arbitrage.

1.1. LES DÉFINITIONS

7La discrimination directe est définie par la loi comme une différence de traitement qui manque de justification objective et raisonnable. La discrimination indirecte est définie comme une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre qui a un résultat dommageable pour des personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne repose sur une justification objective et raisonnable.

8La loi votée définit la discrimination comme une différence de traitement illégitime fondée sur l’un des motifs suivants : le sexe, une prétendue race, la couleur, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique, l’orientation sexuelle, l’état civil, la naissance, la fortune, l’âge, la conviction religieuse ou philosophique, l’état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique. Cependant, la Cour d’arbitrage a annulé cette liste, considérant que limiter les critères de discrimination était en soi discriminatoire, puisque le but de la loi était de combattre la discrimination en général.

9La loi assimile à une discrimination le harcèlement et l’injonction à la discrimination et l’absence d’aménagements raisonnables pour les personnes handicapées.

10La loi comporte un volet pénal et un volet civil.

1.2. LES DISPOSITIONS PÉNALES

11Les dispositions pénales punissent quiconque incite à la discrimination dans l’une des circonstances prévues à l’article 444 du Code pénal [2]. La loi votée prévoyait également de punir des mêmes peines ceux qui donnaient une publicité à leur intention de recourir à la discrimination, mais cette disposition a été annulée par la Cour d’arbitrage. La loi prévoyait des peines deux fois plus sévères pour les fonctionnaires qui se rendraient coupables de discrimination dans l’exercice de leurs fonctions. Cette disposition a également été annulée par la Cour d’arbitrage. Par modification du Code pénal, la loi prévoit le doublement du minimum de la peine pour les auteurs de certains délits motivés par la haine, le mépris ou l’hostilité basés sur l’un des motifs de discrimination de la loi. C’est la clause dite du motif abject. L’acte discriminatoire lui-même n’est pas visé par les dispositions pénales.

1.3. LES DISPOSITIONS CIVILES

12Les dispositions civiles instaurent la possibilité pour le président du tribunal de première instance (ou le tribunal du travail ou le tribunal du commerce, selon les cas)

13d’ordonner la cessation immédiate d’une discrimination constatée (action en cessation, instruite comme l’action en référé).

14Elles prévoient que lorsqu’une victime de discrimination invoque devant la juridiction compétente des faits qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination, la charge de la preuve de l’absence de discrimination incombe à la partie adverse. C’est le principe dit du « renversement » de la charge de la preuve (valable uniquement au civil, pas au pénal).

15La loi dit également que la preuve de la discrimination peut être fournie au moyen d’un test de situation, dont les modalités d’exécution seront définies par arrêté royal.

16Des dispositions particulières s’appliquent au cas de discrimination au travail. Le travailleur qui a porté plainte pour discrimination contre son employeur bénéficie d’une protection contre le licenciement. La loi prévoit le paiement d’indemnités dans une série de cas de licenciement et de discrimination avérée.

17Les dispositions civiles prévoient également que sont nulles les clauses d’un contrat contraire aux dispositions de la loi, de même que celles qui prévoient qu’un ou plusieurs contractants renoncent par avance aux droits garantis par la présente loi.

1.4. AUTRES DISPOSITIONS

18La loi modifie la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme pour confier au Centre la mission de combattre la discrimination basée sur l’orientation sexuelle, l’état civil, la naissance, la fortune, l’âge, la conviction religieuse ou philosophique, l’état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique [3]. Elle lui confère également le droit de représenter en justice les victimes de discrimination (sauf en ce qui concerne la discrimination basée sur le sexe) moyennant leur accord.

19La discrimination basée sur le sexe est de la compétence de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes.

20Sont également habilitées à ester en Justice dans ces litiges les organisations représentatives des employeurs, des travailleurs et des indépendants, et les associations de défense des droits de l’homme ou de lutte contre la discrimination, moyennant l’accord des victimes.

2. LA GENÈSE DE LA LOI

21La loi trouve son origine dans une proposition de loi déposée au Sénat le 14 juillet 1999, proposition dont la rédaction avait elle-même été influencée par des associations de promotion de l’égalité des droits. Durant la discussion parlementaire du texte, deux directives européennes furent adoptées : la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique, et la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail. Le gouvernement décida alors de réaliser la transposition de ces directives dans le texte de la proposition de loi anti-discrimination déposée au Sénat. Cette double origine de la loi est un facteur d’explication de la lenteur du processus parlementaire et des nombreux changements apportés au texte.

2.1. LES PREMIÈRES PROPOSITIONS DE LOI

22Depuis le milieu des années 1980, les mouvements de défense des droits des homosexuels luttaient pour obtenir une loi générale interdisant la discrimination. L’objectif était d’interdire la discrimination non plus seulement par les autorités publiques, mais également entre les citoyens, par exemple pour la location d’un logement ou l’obtention d’un emploi. Rejoints par la Liga voor Mensenrechten, ils obtinrent un premier relais politique au sein du SP, dont les représentants déposèrent à la Chambre les premières propositions de loi, en 1985,1988 et 1992.

23D’autre part, lors d’un colloque tenu à l’Université libre de Bruxelles en 1994 intitulé « Le droit, un défi au sida », des propositions de textes de loi interdisant la discrimination sur la base d’une série de critères dont l’état de santé futur furent avancées [4].

24En 1996 le soutien politique s’élargit et une nouvelle proposition de loi fut déposée par Renaat Landuyt (SP) et Luc Willems (CVP). Cette proposition rencontra une opposition au sein des milieux catholiques flamands, et le remplacement de Johan Van Hecke par Marc Van Peel à la présidence du CVP contribua à la perte du soutien du CVP à la proposition. Suite à cet échec, la Federatie Werkgroepen Homoseksualiteit prit l’initiative de constituer un groupe de travail avec des collaborateurs parlementaires du Sénat afin d’élaborer un nouveau projet qui bénéficierait d’un soutien politique plus large [5].

25De fait, le 31 mars 1999, une proposition de loi tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme fut déposée au Sénat, antérieurement donc à l’adoption des directives européennes interdisant la discrimination [6].

26Rédigée par les sénateurs Roger Lallemand (PS) et Nadia Merchiers (SP), la proposition portait en outre les signatures de Guy Verhofstadt (VLD), Pierre Jonckheer (Écolo), Eddy Boutmans (Agalev), Bert Anciaux (Volksunie), Fred Erdman (SP) et Philippe Mahoux (PS). Les auteurs de la proposition soulignaient leur volonté de traduire en texte de loi des normes déjà prévues par la Constitution et des instruments internationaux.

27La proposition prévoyait l’interdiction de toute discrimination sur la base d’un des motifs suivants (article 2) :

  • le sexe ;
  • l’orientation sexuelle ;
  • l’état civil ;
  • la naissance ;
  • l’âge ;
  • l’état de santé actuel ou futur ;
  • le handicap ou une caractéristique physique.

28Par discrimination il fallait entendre notamment (article 8) :

29

  • le refus de fournir un bien ou un service ;
  • l’entrave à l’exercice normal d’une activité économique, sociale, culturelle ou politique ;
  • le refus d’établir un contrat de travail ou la résiliation d’un contrat de travail ;
  • l’entrave à la poursuite d’une carrière professionnelle, ou la détermination des conditions de travail ;
  • le refus de nommer un fonctionnaire ou la détermination de son affectation de service ;
  • la diffusion, la publication ou l’exposition en public d’un texte, d’un avis, d’un signe, ou de tout autre support comportant une discrimination ;
  • une mention dans un acte officiel ou un procès verbal.
Les auteurs expliquaient leur choix de limiter les motifs de discrimination de deux manières : d’une part, ils voulaient viser la discrimination sur la base de caractéristiques qui s’imposent aux personnes et qu’elles ne maîtrisent pas ; d’autre part, en excluant la discrimination opérée sur la base des orientations politiques, philosophiques ou religieuses, ils voulaient empêcher que des partis extrémistes ou des organisations intégristes puissent invoquer la loi.

30Le texte prévoyait une exception pour la différence de traitement objective et en rapport proportionnel avec le but poursuivi, c’est-à-dire une différence de traitement qui ne pourrait pas être remplacée par une autre mesure d’efficacité comparable et plus respectueuse des personnes concernées. Dans ce cas, il appartenait à l’auteur de l’infraction potentielle de prouver qu’il s’agissait bien d’une distinction objective pour laquelle n’existait pas d’alternative (art. 3).

31La proposition prévoyait des sanctions, et notamment un doublement des peines pour toutes les infractions dont la discrimination était le mobile (article 5). Il s’agissait de la disposition dite du « motif abject » qui existait notamment dans le droit allemand.

32La proposition confiait au Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme la mission de combattre la discrimination définie par la future loi (article 14), et lui permettait de se pourvoir en justice dans les litiges nés de son application (article 12). D’autres associations de défense des droits de l’homme ou de lutte contre la discrimination ainsi que les organisations représentatives de travailleurs et d’employeurs recevaient également ce droit.

33La dissolution des Chambres rendit la proposition caduque. Seul auteur de la proposition à siéger dans la nouvelle assemblée sénatoriale après les élections législatives fédérales du 13 juin 1999, Philippe Mahoux (PS) redéposa immédiatement la proposition de loi [7]. Le texte était co-signé par Iris Van Riet (VLD), Chokri Mahassine (SP), Marie Nagy (Ecolo) et Frans Lozie (Agalev). La proposition initialement déposée par des parlementaires socialistes de la majorité et libéraux flamands, écologistes et Volksunie de l’opposition était maintenant défendue par des sénateurs de partis qui constituaient la nouvelle majorité. À noter qu’aucune des deux propositions ne portait la signature d’un parlementaire social-chrétien ou libéral francophone.

2.2. LE CADRE EUROPÉEN ET INTERNATIONAL

34L’article 13 du traité CE, entré en vigueur le 1er mai 1999, autorise le Conseil de l’Union européenne à prendre les mesures nécessaires pour combattre la discrimination fondée sur le sexe, la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

35Le Conseil européen de Tampere (15 et 16 octobre 1999) a invité la commission à faire rapidement des propositions concrètes de mise en œuvre de cet article en ce qui concerne la lutte contre le racisme et la xénophobie. Cette décision intervenait peu après la victoire électorale du parti d’extrême droite FPO et de son leader Jorg Haider en Autriche. L’Union européenne a par ailleurs élaboré un programme de lutte contre la discrimination pour la période 2000-2006 [8]. En 2003 une campagne d’information « Pour la diversité. Contre les discriminations » a également été lancée.

36Deux directives ont été adoptées :

  • d’une part, la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000, qualifiée de « verticale », relative à la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique. Cette directive interdit toute discrimination en matière d’emploi, de formation, d’éducation, de sécurité sociale et de soins de santé, d’accès et de fourniture de biens et services ;
  • d’autre part, la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000, qualifiée d’« horizontale » et portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail. Cette directive interdit en ces matières la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, le handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.
Les dates limites de transposition des directives étaient respectivement le 19 juillet 2003 et le 2 décembre 2003, avec un délai prolongé pour répondre aux exigence relatives à la discrimination basée sur l’âge ou le handicap en matière d’égalité au travail. La perspective d’adoption de la proposition de loi Lallemand-Merchiers, devenue en juillet 1999 la proposition Mahoux, s’inscrivait donc dans le calendrier prévu.

37La discrimination basée sur le sexe fait l’objet d’une législation européenne spécifique. En matière d’emploi, la directive 76/207/CE sur l’égalité homme-femme datant de 1976 a été renforcée par la directive 2002/73/CE. En décembre 2004, le Conseil a adopté la directive 2004/113/CE qui met en œuvre le principe de l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès à des biens et services et la fourniture de biens et services [9].

38Le cadre européen force les États membres à modifier leur législation. En effet, aucune législation nationale ne prévoyait les niveaux de protection requis par les directives avant leur transposition [10].

39Le Parlement européen a décidé de faire de 2007 l’année européenne de l’égalité des chances pour tous. Cette décision s’accompagne de l’adoption d’une stratégie-cadre pour la non-discrimination et l’égalité des chances pour tous, visant à garantir la pleine application de la législation antidiscriminatoire européenne.

40Il existe d’autres instruments internationaux qui interdisent la discrimination dont les principaux sont l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme et son protocole additionnel n° 12 [11], l’article 26 du pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations unies, et la convention n° 111 de l’Organisation internationale du travail.

2.3. LA POLITIQUE DU GOUVERNEMENT VERHOFSTADT I

41L’accord de gouvernement Verhofstadt I (7 juillet 1999) prévoyait l’évaluation des légalisations existantes contre le racisme et le négationnisme et le développement de la lutte contre toute forme de discrimination.

42La ministre de l’Égalité des chances, Laurette Onkelinx, par ailleurs ministre de l’Emploi et du Travail, élabora un plan d’action contre la discrimination, adopté par le gouvernement le 17 mars 2000, et dont les objectifs essentiels étaient :

  • adopter une législation générale contre toutes les formes de discrimination ;
  • modifier la loi tendant à réprimer l’incitation à la haine raciale afin d’en accroître l’efficacité ;
  • améliorer l’accueil des victimes de discrimination ;
  • stimuler les autorités judiciaires à poursuivre les auteurs de discriminations ;
  • renforcer la cohérence de tous les dispositifs d’action positive en la matière et entre les différents niveaux de pouvoir ;
  • se doter d’une institution publique indépendante pour la prise en charge de toutes les victimes de discrimination et chargée d’évaluer les politiques de mise en œuvre
    (élargissement des compétences du Centre pour l’égalité des chances).
Bien que l’adoption d’une loi anti-discrimination ait figuré parmi ses objectifs, le gouvernement choisit de s’inscrire dans le cadre du processus de discussion de la proposition de loi déposée au Sénat et de travailler par la voie d’amendements à ce texte. Il est possible que cette décision ait été prise pour laisser la paternité de la future loi au premier signataire de la proposition [12].

3. LE PROCESSUS PARLEMENTAIRE

43Le texte de la proposition de loi fut longuement débattu, puisque l’ensemble de la discussion parlementaire dura près de quatre ans. Il fit l’objet de centaines de propositions d’amendements, qui émanaient tant du gouvernement que de parlementaires. In fine, ce fut un texte très différent de la proposition initiale qui fut adopté, la proposition ayant été substantiellement amendée tant à la Chambre qu’au Sénat. Nous nous proposons d’évoquer les principaux thèmes abordés par les discussions parlementaires et les principales modifications apportées à la proposition initiale [13].

3.1. LA LISTE DES DISCRIMINATIONS INTERDITES

3.1.1. L’opportunité de conserver le sexe parmi les motifs de discrimination visés

44Au vu de l’inclusion du sexe parmi les motifs de discrimination visés par la proposition de loi, la commission de la Justice du Sénat sollicita l’avis du comité d’avis du Sénat pour l’égalité des chances entre les femmes et les hommes [14]. Les discussions au sein du comité, nourries par des auditions, concernèrent l’opportunité ou non de conserver le sexe parmi les motifs de discrimination visés par la loi. Une majorité d’intervenantes estimaient en effet que les discriminations dont les femmes faisaient l’objet étaient fondamentalement d’un ordre différent. Le souhait de voir mis sur pied un Institut pour l’égalité des chances entre hommes et femmes et donc de ne pas confier dans ce domaine une mission au Centre pour l’égalité des chances était également exprimé. Le comité sollicita l’avis du bureau du Conseil de l’égalité des chances entre hommes et femmes et celui de la Direction de l’Égalité des chances du Ministère de l’Emploi et du Travail [15]. Le bureau du Conseil souligna le caractère transversal de la discrimination fondée sur le sexe, exprima des « objections fondamentales quant à l’insertion du sexe au même titre que les autres motifs de discrimination dans une loi générale » et « demanda que le sexe en tant que motif de discrimination soit retiré de la proposition de loi et qu’il fasse l’objet d’une législation spécifique et indépendante [16] ». La Direction de l’Égalité des chances rappela que les femmes constituaient au moins la moitié de la population et que dès lors on ne pouvait plus parler de discrimination à l’égard d’une minorité. Elle exprima la crainte que le fait de regrouper sous une seule appellation la discrimination sexuelle et les autres formes de discrimination débouche sur une dévaluation, y compris budgétaire, de la politique d’égalité des chances entre hommes et femmes. Selon elle, la préparation d’une nouvelle directive européenne en la matière [17] justifiait également de ne pas légiférer en cette matière immédiatement. L’avis dénonçait également l’absence de coordination avec la loi du 7 mai 1999 sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne les relations de travail. Il protestait également contre le projet de confier au Centre pour l’égalité des chances la lutte contre la discrimination sexuelle [18].

45L’avis du comité, adopté par sept voix contre une, recommandait la suppression du sexe comme motif de discrimination couvert par la proposition de loi [19]. Il citait quatre raisons : le caractère transversal de cette discrimination, l’existence d’une réglementation européenne visant spécifiquement cette discrimination, l’insertion future du droit à l’égalité homme-femme dans la Constitution et les problèmes de cohérence avec la loi du 7 mai 1999 sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes sur le plan du droit social.

46Suite à cet avis, les sénateurs Nathalie de T’Serclaes (MR), Anne-Marie Lizin (PS), Paul Galand (Écolo) et Sabine de Bethune (CD&V) déposèrent un amendement visant à retirer le sexe de la liste des discriminations visées [20]. Dans son avis du 16 novembre 2000, le Conseil d’État laissait au législateur le soin d’apprécier l’opportunité d’adopter cet amendement, vu l’avis du bureau du Conseil de l’égalité des chances et les difficultés de coordination avec la loi de 1999 [21].

47Le gouvernement proposa trois amendements visant à établir que pour la discrimination fondée sur le sexe en matière d’emploi et de travail, la loi du 7 mai 1999 demeurait d’application et à modifier l’article 14 qui concernait les missions du Centre pour l’égalité des chances pour ne pas lui confier une compétence en ce qui concerne la discrimination basée sur le sexe [22].

48Le comité d’avis pour l’égalité des chances entre les femmes et les hommes estima alors opportun de rendre un nouvel avis [23]. Une solution de compromis se dessina en son sein autour des propositions du gouvernement : la proposition de loi retiendrait dans sa liste la discrimination basée sur le sexe mais le Centre pour l’égalité des chances ne serait pas chargé du traitement des plaintes en rapport avec cette discrimination. Un institut spécialisé en matière d’égalité entre hommes et femmes serait créé à cette fin. L’avis était unanime au sujet de la création d’un tel institut mais divisé sur l’opportunité de conserver le sexe dans la liste des discriminations interdites.

49À la suite de cet avis, un nouvel amendement réclamant la suppression du sexe (sous-amendement à la proposition d’amendement du gouvernement) fut déposé par Nathalie de T’Serclaes (MR), Anne-Marie Lizin (PS), Paul Galand (Écolo) et Sabine de Bethune (CD&V) [24]. Un amendement visant à insérer dans la loi la création de l’Institut pour l’égalité des hommes et des femmes fut déposé par Sabine de Bethune (CD&V), Mia De Schamphelaere (CD&V), Hugo Vandenberghe (CD&V), Clotilde Nyssens (PSC) et Nathalie de T’Serclaes (MR) [25]. Ce dernier sera rejeté, le gouvernement ayant indiqué que la création de l’Institut ferait l’objet d’une loi spécifique [26].

50Philippe Mahoux (PS) déposa également un amendement visant à permettre à la loi du 7 mai 1999 de s’appliquer, ainsi que d’autres législations dans le futur : « La présente loi s’applique sans préjudice des législations ayant pour objet de lutter contre des discriminations spécifiques, notamment : la loi du 7 mai 1999 (…) la loi du 30 juillet 1981 (…) [27]. » Il s’agissait d’une nouvelle formulation de l’idée contenue dans l’amendement n° 10 du gouvernement.

51Lors du vote en commission de la Justice, les amendements n° 1 et n° 118 visant à supprimer le sexe furent rejetés par 9 voix contre 4, deux membres s’étant abstenus. Les amendements du gouvernement sur ce sujet furent l’un retiré parce qu’il était devenu sans objet, l’autre rejeté : le texte proposé par les auteurs de la proposition fut jugé mieux rédigé et adopté. Le sexe demeurait dans la liste des motifs de discrimination visés par la loi, mais le Centre pour l’égalité des chances n’était pas compétent en la matière et la loi du 9 mai 1999 continuait à s’appliquer.

52Après l’adoption du rapport de la commission, deux amendements visant à supprimer le sexe de la liste des motifs furent à nouveau déposés par deux sénateurs de la majorité, Nathalie de T’Serclaes (MR) et Anne-Marie Lizin (PS) [28]. Lors du vote en séance plénière, ils furent rejetés par respectivement 38 voix contre 20, cinq sénateurs s’étant abstenus, et 40 voix contre 18, cinq sénateurs s’étant abstenus. Durant la discussion en séance plénière, Clotilde Nyssens (PSC) exposa le souhait de son parti de voir le sexe retiré des motifs de discrimination et le projet amendé à la Chambre, y compris sur d’autres points. Iris Van Riet (CD&V) souligna pour sa part que le maintien du sexe parmi la liste des motifs de discrimination permettrait aux victimes de cette discrimination d’user de la procédure judiciaire en cessation qu’instaurerait la loi [29].

53La Chambre décida de solliciter un nouvel avis du Conseil d’État, en urgence, sur le texte voté par le Sénat. À propos de la discrimination basée sur le sexe, et par analogie avec les nouvelles dispositions du projet concernant la discrimination dite raciale, l’avis du Conseil d’État releva l’existence de définitions différentes dans le projet et dans la loi du 7 mai 1999 sur l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes. Il recommanda l’abrogation de cette dernière et l’insertion de dispositions spécifiques en matière de lutte contre la discrimination basée sur le sexe dans le projet à l’examen [30]. La Chambre demanda également l’avis du Conseil national du travail (CNT). Celui-ci souligna également le manque de cohérence entre, d’une part, le texte en préparation et, d’autre part, la loi de 1999, le projet de loi en discussion sur le harcèlement et deux conventions collectives de travail : les conventions collectives de travail du CNT n° 25 sur l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins et n° 38 concernant le recrutement et la sélection des travailleurs [31].

54Lors de l’examen du projet à la commission de la Justice de la Chambre, le gouvernement proposa un amendement visant à répondre à l’objection du Conseil d’État et déjà relayée par des sénateurs et des députés à propos du manque de cohérence entre les dispositions du projet et la loi du 7 mai 1999 sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes [32]. L’amendement fut adopté par 9 voix contre 4, et un article 4bis fut ainsi inséré : « À l’exception du chapitre II et de l’article 11, §§ 3 et 4 de la présente loi, qui restent d’application aux discriminations fondées sur sexe et qui ont trait aux matières décrites à l’article 2, § 3,2e et 3e tiret de la présente loi, les discriminations précitées sont régies exclusivement par la loi du 7 mai 1999 sur l’égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne les conditions de travail, l’accès à l’emploi et les possibilités de promotion, l’accès à une profession indépendante et les régimes complémentaires de sécurité sociale. » Concrètement, les discriminations fondées sur le sexe restaient visées par le volet pénal de la loi anti-discrimination ; elles rentraient également dans le champ du volet civil, sauf en ce qui concerne l’emploi, le travail et la sécurité sociale, matières pour lesquelles s’applique la loi de 1999. Cette disposition ne devrait pas empêcher des tests de situation ou des données statistiques d’être invoqués dans le cadre de discriminations basées sur le sexe dans un domaine couvert par la loi de 1999.

55Par ailleurs, des amendements furent à nouveau déposés pour enlever le sexe de la liste des discriminations [33]. Ils étaient proposés par Joseph Arens (CDH) et furent rejetés par 9 voix, trois membres s’étant abstenus.

56À la Chambre, il n’y eut plus d’amendement relatif à la discrimination basée sur le sexe après le dépôt du rapport de la commission de la Justice. Le Sénat vota le texte du projet amendé par la Chambre.

3.1.2. Le motif de l’origine ethnique ou raciale

57La proposition de loi initiale ne mentionnait pas l’origine ethnique ou raciale dans la liste des motifs de discrimination, parce que celle-ci était déjà interdite et réprimée par la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie, dite loi Moureaux.

58Dans son premier avis, le Conseil d’État regretta la perspective de trouver dans l’arsenal législatif deux définitions différentes de la discrimination, rappelant que la loi de 1981 modifiée par la loi du 12 avril 1994, contenait une définition de la discrimination qui ne se limitait pas aux distinctions fondées sur la race ou l’origine ethnique [34] : « Dans la présente loi, il y a lieu d’entendre par discrimination toute distinction, exclusion, restriction ou préférence ayant ou pouvant avoir pour but ou pour effet de détruire, de compromettre ou de limiter la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, dans des conditions d’égalité, des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social ou culturel ou dans tout autre domaine de la vie sociale [35]. » Le Conseil d’État estima qu’il serait donc préférable d’étendre le champ d’application de la loi du 30 juillet 1981 par une loi modificative, ce qui n’empêcherait pas d’établir éventuellement certaines règles particulières à certains types de discrimination.

59Le gouvernement déposa un amendement qui visait entre autres à introduire l’origine raciale ou ethnique dans la liste des motifs de discrimination [36] : « Il y a discrimination directe si une distinction dans un traitement est directement fondée sur (…) une prétendue race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique…(…) » Cette introduction était justifiée par la volonté de transposer la directive 2000/43/CE, et de permettre aux procédures civiles (action en cessation) introduites par la future loi antidiscrimination de s’appliquer aux cas de discrimination motivée par l’origine raciale ou ethnique. Le choix des termes de sa rédaction était expliqué ainsi : « L’utilisation du terme de race pouvant dans les faits donner l’impression que le législateur légitime l’existence de différentes races, alors qu’il s’agit en fait d’un concept ne correspondant à aucune réalité scientifique, il est préférable de faire accompagner le terme race de l’adjectif ‘prétendue’, ceci afin de bien appuyer le fait que cette distinction n’existe que dans l’esprit du raciste et qu’elle ne correspond pas à la réalité. »

60Le gouvernement proposait également de réserver les sanctions pénales pour discrimination fondée sur l’origine raciale ou ethnique à la loi du 30 juillet 1981, qui serait elle-même ultérieurement modifiée pour y insérer le motif abject [37]. D’autres amendements furent encore déposés pour mettre d’autres articles de la proposition en cohérence avec l’insertion du motif de l’origine raciale ou ethnique. Lors de leurs auditions, les représentants du Centre pour l’égalité des chances se prononcèrent pour le maintien de deux législations différentes pour la discrimination raciale d’une part et pour la discrimination non raciale de l’autre, en raison notamment de la notoriété acquise par la loi Moureaux, et de la spécificité de la discrimination raciale et de sa répression [38].

61L’amendement du gouvernement introduisant l’origine raciale ou ethnique parmi les motifs de discrimination fut adopté en commission de la Justice par 9 voix contre 5, un membre s’étant abstenu, après avoir été sous-amendé par une proposition signée notamment par Philippe Mahoux et qui visait principalement à inverser l’ordre des paragraphes de l’article 2 pour que la liste des motifs figure avant le champ d’application [39].

62Une disposition finale avait également été insérée par l’article 21 (nouveau) pour assurer que la nouvelle législation ne porterait pas atteinte aux dispositions existantes en matière de lutte contre le racisme (et de promotion de l’égalité entre hommes et femmes) : la loi s’appliquerait sans préjudice des législations ayant pour objet de lutter contre des discriminations spécifiques, notamment la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie. Cette disposition avait été proposée par le gouvernement pour constituer un article 3quater, mais les auteurs de la proposition préférèrent le déplacer en fin de texte et élargir sa portée en introduisant le terme « notamment [40] ».

63Durant l’examen du projet par la Chambre, un nouvel avis fut demandé au Conseil d’État. Dans celui-ci, le Conseil d’État examina la modification des critères de discrimination apportée par le Sénat par l’ajout des mots « une prétendue race, la couleur, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique » et par le nouvel article 21. Il souligna que la définition de la discrimination était différente dans le projet examiné et dans la loi du 30 juillet 1981. Il observa également d’autres incohérences entre les deux textes, concluant que « de telles incohérences compromettent l’application de l’article 12 de la Constitution qui exige que les comportements incriminés soient indiqués de manière claire, prévisible et précise [41] ». Le Conseil d’État préconisait dès lors l’abrogation de la loi de 1981 et l’insertion dans la loi en projet d’un chapitre qui reprendrait les dispositions spécifiques en matière de lutte contre le racisme et la xénophobie. Le Conseil national du travail souligna aussi le manque de cohérence entre les divers instruments.

64Le gouvernement répondit partiellement à l’objection du Conseil d’État en déposant en commission de la Justice de la Chambre des amendements visant à sortir la discrimination raciale du volet pénal du projet de loi : celle-ci ne serait plus régie au plan pénal que par la loi de 1981. Le gouvernement résumait ainsi le nouvel objectif du projet examiné : « Le présent projet forme donc le siège du volet pénal des discriminations autres que raciales, ainsi que du volet civil de l’ensemble des discriminations à l’exception des discriminations fondées sur le genre et dans la matière de l’emploi, qui se trouvent déjà régies par la loi du 7 mai 1999 (…) [42]. » Ces amendements furent adoptés en commission de la Justice par 9 voix contre 4 et 9 voix contre 2, deux membres s’étant abstenus dans les deux cas. L’article 21, devenu sans objet, fut supprimé.

65La discussion sur l’opportunité d’inclure l’origine ethnique ou raciale ne se poursuivit pas. Il est vrai que l’enjeu principal de la loi en projet était clairement d’étendre l’interdiction aux discriminations non raciales. C’est pour permettre à la loi envisagée d’être en conformité avec les directives européennes que ce motif avait été ajouté par le gouvernement. Ce faisant, il a ouvert aux victimes de discrimination raciale l’accès à une procédure judiciaire accélérée au civil.

3.1.3. Le handicap

66Le handicap figure dans la liste des motifs de discrimination interdite depuis le texte original de la proposition. Initialement, il n’a pas été l’objet de beaucoup de discussion ; son inclusion réunissait un consensus. Cependant, l’interdiction de la discrimination basée sur le handicap ouvrait la perspective de répercussions très importantes, notamment sur le plan financier, eu égard au coût des aménagements nécessaires pour rendre tous les lieux ouverts au public accessible. De plus, la politique des handicapés étant une matière communautaire, son traitement par une loi fédérale pose question. Consulté sur l’opportunité d’inclure le sexe, le bureau du Conseil de l’égalité des chances avait suggéré de consulter aussi les représentants des autres groupes visés, dont le Conseil supérieur national des handicapés. Il ne fut apparemment pas entendu sur ce point.

67Durant l’examen de la proposition par la commission de la Justice du Sénat, trois amendements furent déposés en rapport avec le motif du handicap. La sénatrice Fatma Pehlivan (SP) voulut s’assurer que des mesures destinées à protéger les personnes handicapées et le public puissent toujours être prises. Elle proposa d’ajouter une disposition dans ce but : « Lorsque le handicap ou l’état de santé d’une personne est susceptible de porter préjudice à cette personne ou à un tiers dans des circonstances données, le traitement désavantageux visant à prévenir dans une mesure raisonnable un tel préjudice ne constitue pas une discrimination [43]. » L’amendement fut retiré suite à l’adoption des amendements modifiant la proposition notamment pour admettre les différences de traitement objectives et raisonnables.

68La sénatrice Mia De Schamphelaere (CD&V) proposa un amendement destiné à mettre la proposition de loi en harmonie avec les dispositions de la directive 2000/78 en ce qui concernait le handicap. Le texte serait complété ainsi : « Afin de garantir le respect du principe de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail à l’égard des personnes handicapées, l’employeur doit prendre les mesures appropriées pour permettre à une personne handicapée d’accéder à un emploi, de l’exercer ou d’y progresser, ou pour qu’une formation lui soit dispensée, sauf si ces mesures imposent à l’employeur une charge disproportionnée. Cette charge n’est pas disproportionnée lorsqu’elle est compensée de façon suffisante par des mesures existantes en faveur des personnes handicapées [44]. » L’amendement fut rejeté par 9 voix contre 4, deux membres s’étant abstenus au motif qu’il empiétait sur les compétences des communautés. Ph. Mahoux et la ministre de l’Égalité des chances, tout en approuvant le contenu de l’amendement proposé, jugeaient qu’il n’avait pas sa place dans le cadre d’une loi prévoyant un dispositif général contre la discrimination [45]. Un troisième amendement, visant à définir le handicap, fut retiré, pour éviter une interprétation trop restrictive de celui-ci [46]. Ainsi, sur le plan du handicap, la proposition ne fut pas modifiée au Sénat.

69La commission de la Justice de la Chambre décida d’auditionner Greet Van Gool, commissaire du gouvernement adjointe au ministre des Affaires sociales et des Pensions, sur la problématique des handicapés. Lors de son audition, Greet Van Gool défendit l’opportunité de prévoir des mesures contraignantes pour adapter l’environnement aux handicapés. Le gouvernement déposa alors un amendement qui reprenait le contenu de l’amendement proposé par Mia De Schamphelaere au Sénat, mais l’étendait à l’ensemble des circonstances et non plus seulement à l’emploi et au travail et se gardait d’indiquer des obligations précises aux employeurs, ce qui empièterait sur les compétences des communautés [47]. Ce faisant, le texte était mis en conformité sur ce point avec la directive européenne 2000/78/CE qui prévoit que le fait de ne pas prévoir d’aménagements raisonnables constitue une discrimination. La directive ne s’applique cependant qu’en matière d’emploi et de travail. Le texte proposé par le gouvernement, adopté par 11 voix contre une, introduit un troisième paragraphe à l’article deux du projet : « L’absence d’aménagements raisonnables pour la personne handicapée constitue une discrimination au sens de la présente loi. Est considéré comme aménagement raisonnable l’aménagement qui ne représente pas une charge disproportionnée, ou dont la charge est compensée de façon suffisante par des mesures existantes. »

70Joke Schauvliege (CD&V) proposa de définir ce que l’on entendait d’une part par « handicap », d’autre part par « aménagements raisonnables [48] ». Lors de la discussion de cette proposition, on estima qu’il était préférable de ne pas définir les aménagements raisonnables, dans la mesure où ceux-ci dépendaient du contexte. On rappela également que contrairement à la directive, le projet de loi tel qu’amendé sur proposition du gouvernement imposerait de tels aménagements à tous les domaines de la société (par exemple les restaurants) et non pas seulement au monde du travail. L’amendement fut retiré.

71Le motif du handicap et la disposition particulière relative aux aménagements raisonnables dont l’absence constituait une discrimination ne furent plus remis en question et figurent dans le texte de la loi adoptée.

3.1.4. Les orientations philosophiques et les opinions politiques

72La proposition initiale ne prévoyait ni les convictions philosophiques et religieuses ni les opinions politiques parmi les motifs de discrimination interdite. Philippe Mahoux s’en expliquait ainsi : « (…) La prise en compte de tels critères peut faire problème. Dans des pays où des législations plus générales existent, des partis extrémistes ou des organisations intégristes s’appuient en effet sur la loi pour tenter d’interdire toute critique ou toute mise en cause publiques de leurs choix politiques ou des conséquences politiques de leurs choix religieux. Or, nous devons précisément, sur ces questions, garantir la possibilité du débat public et de la critique, aussi sévère soit-elle [49]. »

73Tout au long des débats, tant au Sénat qu’à la Chambre, le Vlaams Blok réclamera, en vain, l’inclusion des opinions politiques parmi la liste des motifs.

74Le Conseil d’État critiqua l’absence des orientations politiques, philosophiques et religieuses et rappela que la proposition de directive européenne retenait la religion et les convictions [50].

75Durant leurs auditions devant la commission de la Justice du Sénat, les représentants du Centre pour l’égalité des chances furent questionnés sur l’opportunité d’inclure ces motifs de discriminations. En ce qui concernait les convictions religieuses et philosophiques, ils expliquèrent avoir soutenu leurs inclusions puis changé d’avis : « (…) parce que cela résoudrait probablement moins de problèmes que cela n’en créerait. En effet, après un conflit relatif au port du tchador par certaines élèves d’une école bruxelloise, la question s’est posée de savoir si une telle disposition discriminatoire (sic) n’aurait pas pu être invoquée, ce qui aurait pour effet de détourner la loi de son objectif [51]. » Quant à la conviction politique, le Centre n’avait pas adopté de position en la matière.

76Pour répondre à la critique du Conseil d’État et rencontrer le prescrit de la directive européenne entretemps adoptée, le gouvernement inséra la conviction religieuse ou philosophique en même temps que l’origine ethnique ou raciale dans l’amendement modifiant la liste des discriminations interdites, amendement qui fut accepté [52]. L’inclusion de la conviction religieuse ou philosophique nourrira un débat autour de l’opportunité de prévoir des dispositions exemptant les communautés religieuses et assimilées de l’application de la loi [53].

3.1.5. L’âge

77Interdire la discrimination sur la base de l’âge est délicat, étant donné qu’il existe beaucoup de dispositions, particulièrement en matière de sécurité sociale et de droit du travail, où un traitement différencié est appliqué en fonction de l’âge (par exemple les prépensions, le crédit temps, etc.). La directive 2000/78/CE prévoit d’ailleurs un nombre important de dérogations au principe de l’égalité de traitement basée sur l’âge. Ce point fut souligné lors des débats parlementaires, et dans son avis, le Conseil national du travail suggéra de compléter le projet en explicitant une série de cas où des différences de traitement basées sur l’âge ne constituaient pas une discrimination, notamment en ce qui concerne l’accès à l’emploi et à la formation ou l’octroi de certains avantages sociaux [54]. Cet avis ne fut pas suivi.

78Des amendements d’origine parlementaire furent déposés tardivement à la Chambre après le dépôt du rapport et au Sénat lors de l’examen final du projet. À la Chambre, Joseph Arens (CDH) proposait d’ajouter une liste de différences de traitement basées sur l’âge qui seraient admises, parmi lesquelles les conditions d’accès à la formation, les conditions de rémunération et de licenciement, l’admissibilité aux prestations de retraite ou d’invalidité [55]. L’amendement fut rejeté en séance plénière, par 84 voix contre 44,4 membres s’étant abstenus après que la ministre de l’Égalité des chances eut expliqué que ces exceptions étaient désormais couvertes par l’exception générale au profit des différences de traitement objectives et raisonnables. Le contenu de cet amendement fut repris par Clotilde Nyssens (CDH) dans un amendement déposé au Sénat lors de l’examen final du projet. Cette dernière argumentait que la justification objective et raisonnable avait été définie dans le domaine des relations de travail comme étant « une exigence professionnelle essentielle et déterminante » (art. 2, § 5) ce qui ne rencontrait pas l’ensemble des distinctions légitimes basées sur l’âge qui pouvaient se rencontrer dans le domaine [56]. L’amendement fut rejeté par 8 voix contre 2, un membre s’étant abstenu.

79Après le dépôt du rapport de la commission de la Justice, un amendement au contenu similaire fut déposé par trois sénateurs libéraux flamands (André Geens, Jean-Marie Dedecker et Vincent Van Quickenborne). Cet amendement fut lui aussi rejeté.

80On peut penser que c’est surtout la volonté de voir le processus parlementaire aboutir et d’éviter de renvoyer le texte à la Chambre qui conduisit à laisser le texte en l’état sur le plan du motif de l’âge. Il semble en effet qu’il aurait gagné à être clarifié sur ce point.

3.1.6. La liste définitive des motifs de discrimination

81La proposition de loi initiale comprenait certains motifs de discrimination qui ne figuraient pas dans les directives européennes. Ce sont le sexe (mais il existe d’autres instruments européens qui couvrent la discrimination sur la base du sexe), l’état civil, la naissance, la fortune et la caractéristique physique. Dans son avis, le Conseil national du travail s’était étonné de la présence de critères de discrimination non prévus par les directives européennes (à propos de l’élaboration desquelles il avait été consulté, tandis que la consultation sur le projet de loi anti-discrimination s’est faite tardivement et dans l’urgence) et avait réclamé, en vain, une enquête sur l’impact probable de l’ajout de ces motifs de discrimination à ceux prévus par le droit du travail.

82Il n’y eut cependant de remise en cause de ces critères que pour l’un d’entre eux : la fortune. Ce critère fut supprimé par l’adoption, en commission de la Justice du Sénat, d’un amendement du gouvernement. Cette impression était justifiée par le fait qu’il n’était pas clairement établi que la fortune fasse partie de l’identité d’une personne [57]. Le critère fut réintroduit via l’adoption d’un amendement déposé par Meryem Kaçar (Agalev), Paul Galand (Écolo) et Philippe Mahoux (PS), qui considéraient que la fortune était historiquement l’une des bases les plus importantes de la discrimination et qu’elle était expressément prévue au protocole n° 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales [58].

83Le tableau ci-dessous présente les motifs figurant dans la proposition initiale, dans la directive 2000/78/CE (qui ne s’applique, rappelons-le, qu’en matière d’emploi et de travail), et dans la loi du 25 février 2003. Il ne faut cependant pas perdre de vue que la Cour d’arbitrage a annulé cette liste.

tableau im1
Proposition Directive Loi Sexe oui non 1 oui Origine ethnique ou raciale non non 2 oui Orientation sexuelle oui oui oui État civil oui non oui Naissance oui non oui Fortune oui non oui Âge oui oui oui Conviction religieuse ou philosophique non oui oui État de santé actuel ou futur oui non oui Handicap oui oui oui Caractéristique physique oui non oui 1 L’interdiction de la discrimination sur la base du sexe est couverte par d’autres directives européennes, dont les directives 76/207/CEE et 2004/113/CE. 2 L’interdiction de la discrimination sur la base de l’origine ethnique ou raciale est couverte par la directive 200/43/CE qui s’applique dans tous les domaines et pas seulement dans celui de l’emploi ou des relations de travail.
1 L’interdiction de la discrimination sur la base du sexe est couverte par d’autres directives européennes, dont les directives 76/207/CEE et 2004/113/CE.
2 L’interdiction de la discrimination sur la base de l’origine ethnique ou raciale est couverte par la directive 200/43/CE qui s’applique dans tous les domaines et pas seulement dans celui de l’emploi ou des relations de travail.

3.2. LE CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI

84La proposition de loi énonçait dans l’article citant les motifs de discrimination le champ d’application général de la loi : « les domaines politique, économique, social ou culturel ». En introduction au chapitre concernant les dispositions civiles, la proposition indiquait une série de comportements discriminatoires interdits :

85

« Toute discrimination est interdite, et notamment lorsqu’elle consiste en :
  • le refus de fournir un bien ou un service ;
  • l’entrave à l’exercice normal d’une activité économique, sociale, culturelle ou politique ;
  • le refus d’établir un contrat de travail ou la résiliation d’un contrat de travail ;
  • l’entrave à la poursuite d’une carrière professionnelle, ou la détermination des conditions de travail ;
  • le refus de nommer un fonctionnaire ou la détermination de son affectation de service ;
  • la diffusion, la publication ou l’exposition en public d’un texte, d’un avis, d’un signe, ou de tout autre support comportant une discrimination ;
  • une mention dans un acte officiel ou un procès-verbal. »

86 Le Conseil d’État jugea le champ d’application de la loi imprécis. Dans un amendement qui proposait de modifier la liste des motifs de discrimination, le gouvernement proposa d’inclure la liste des circonstances dans lesquelles la discrimination sur la base de ces motifs était interdite [59] :

87

  • « la fourniture de biens et de services à la disposition du public ;
  • les conditions d’accès à l’emploi, aux activités non salariées et au travail, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d’activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion ;
  • les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération ;
  • la nomination d’un fonctionnaire ou l’affectation d’un fonctionnaire à un service ;
  • la mention dans une pièce officielle ou dans un procès verbal ;
  • la diffusion, la publication ou l’exposition en public d’un texte, d’un avis, d’un signe ou de tout autre support comportant une discrimination ;
  • tout autre exercice d’une activité économique, sociale, culturelle ou politique accessible au public. »

88 La liste était cette fois un énoncé complet et plus seulement une liste à valeur exemplative. Le champ d’application de la future loi demeurait très large, surtout en application du dernier alinéa. Des amendements ont amélioré la rédaction du texte relatif au champ d’application, sans le changer sur le fond. Enfin, ont été rejetés des amendements de Hugo Vandenberghe et de Mia De Schamphelaere, de Joseph Arens, et de Joke Schauvliege visant à restreindre l’application de la loi aux relations de travail ou à en supprimer le dernier alinéa englobant toutes les activités économiques, sociales, culturelles et politiques accessibles au public [60].

89Les circonstances qui ont suscité le plus de débats durant la discussion parlementaire postérieure à l’adoption de cette liste sont, d’une part, l’incrimination de la simple diffusion et la possible intrusion de la loi dans les relations privées, en ce qu’elles pourraient constituer des violations des libertés fondamentales, et, d’autre part, les dispositions particulières aux relations de travail. Une autre question en rapport avec le champ d’application de la loi fut également discutée abondamment : l’application de la loi aux cultes, pour lesquels une exception avait été prévue dans la proposition de loi puis évacuée par l’adoption d’amendements. Le législateur souhaita également se prémunir contre un possible effet pervers de la loi : l’interdiction de la discrimination positive.

3.2.1. Le respect des libertés fondamentales

90La critique la plus importante formulée par le Conseil d’État dans son premier avis concernait la compatibilité du projet avec le respect des libertés fondamentales [61]. Le Conseil s’inquiétait à propos du respect de la vie privée, de la liberté d’expression, de la liberté d’association et de la liberté des cultes. En ce qui concerne la liberté des cultes, le débat porta à la fois sur le respect de cette liberté mais aussi sur une exemption plus générale à apporter aux cultes (cf. infra).

91Il était clair pour les auteurs de la proposition de loi que celle-ci ne visait pas les relations privées : « La loi ne vise évidemment pas les relations entièrement privées entre les individus, en ce compris celles qui naissent de l’association entre des personnes, pour des raisons qui leur sont propres et sur base de critères qui leur sont communs [62]. » Le Conseil d’État estima cependant qu’il fallait préciser dans la loi que celle-ci ne s’appliquait pas aux relations privées.

92À propos de la liberté d’expression, le Conseil d’État estimait que l’on ne pouvait « limiter le droit des citoyens d’exprimer, même sur le ton vif et polémique qui caractérise parfois les débats publics, des opinions relatives, par exemple, aux rôles respectifs de l’homme et de la femme dans la société ou dans le couple, à l’âge de la majorité, aux droits des couples homosexuels, (…) même si ces opinions heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population. De même, il serait excessif de sanctionner l’expression d’une plaisanterie sexiste ou d’une caricature liée à l’orientation sexuelle ou à une caractéristique physique d’une personnalité connue, pour autant que les limites de l’injure, de la calomnie, de la diffamation ou de l’atteinte à la vie privée ne soient pas franchies [63]. »

93En ce qui concerne la liberté d’association, les auteurs de la proposition de loi avaient précisé qu’ils ne visaient « évidemment pas (…) l’association entre des personnes, pour des raisons qui leur sont propres et sur base de critères qui leur sont communs ». Le Conseil d’État, rappelant que des associations culturelles, folkloriques, caritatives, philanthropiques ou autres pouvaient être réservées à certaines personnes, suggérait d’indiquer dans la loi l’intention des auteurs de la proposition.

94Durant la discussion en commission de la Justice du Sénat, Clotilde Nyssens (PSC) déposa un amendement visant à garantir le respect des libertés fondamentales en des termes inspirés par les remarques du Conseil d’État :

95

« Elle [la présente loi] ne s’applique pas aux relations privées.
Elle ne peut porter atteinte à la liberté d’expression en ce qu’elle ne vise pas à sanctionner l’expression d’opinions, de plaisanteries ou de caricatures liées aux critères énumérés à l’article2, § 2, pour autant que les limites de l’injure, de la calomnie, de la diffamation ou de l’atteinte à la vie privée ne soient franchies.
Elle ne porte pas préjudice à la liberté qu’ont les personnes de s’associer pour des raisons qui leur sont propres et sur base de critères énumérés à l’article2, § 2, qui leur sont communs [64]. »

96 L’amendement fut retiré suite à l’adoption d’un amendement déposé par Hugo Vandenberghe et Mia De Schamphelaere (CD&V) qui offrait une garantie similaire dans une formulation plus concise : « La présente loi ne porte pas atteinte à la protection et à l’exercice des libertés et des droits fondamentaux qui sont mentionnés dans la Constitution et les conventions internationales des droits de l’homme [65]. » Cette formulation, coulée en un article 3, est sans doute rassurante. Elle est cependant un peu étonnante, dans la mesure où une loi ne peut en aucune manière déroger à la Constitution ou aux normes de droit international.

97L’introduction d’un texte garantissant plus explicitement le respect des relations privées et la liberté d’expression fut cependant reproposée (et rejetée) par Joseph Arens (CDH) lors de la discussion en commission de la Justice de la Chambre.

3.2.2. L’exception en faveur des cultes

98La question de l’opportunité d’exempter les organisations cultuelles de l’application de la loi fit l’objet de longs débats, ainsi que l’ampleur à donner à cette exemption. Rétrospectivement, il apparaît que cette exemption pouvait se concevoir sur trois plans différents. Tout d’abord, celui, plus général de la liberté religieuse. Ensuite, celui de l’interdiction faite à l’État par la Constitution de s’immiscer dans la nomination des ministres des cultes : elle l’empêche d’interdire aux cultes d’établir certaines distinctions (de sexe, d’état civil…) qui s’appliqueraient au recrutement de ces ministres. Enfin, dès lors que la conviction religieuse avait été introduite parmi les motifs de discrimination visés dans la loi, se posait la question de la possibilité pour des organisations cultuelles ou même seulement d’inspiration religieuse de déroger à la loi, afin notamment de maintenir un filtre à la sélection de leurs employés ou de leurs affiliés sur la base du motif religieux.

99À l’origine, une exemption figurait dans la proposition de loi : « La présente loi ne s’applique pas à l’organisation interne des communautés religieuses et des organisations philosophiques, reconnues par le Roi [66]. » Les auteurs avaient précisé que cette disposition visait à éviter de mettre en cause des relations, y compris des relations de travail, qui étaient directement liées à la conviction religieuse ou philosophique des personnes [67].

100La ministre de l’Égalité des chances ne voyait pas de raison de conserver cette exemption et la combinaison des amendements modifiant l’article 2 déposés par le gouvernement aboutissait initialement à la faire disparaître. Le Conseil d’État, en revanche, suggérait des aménagements « pour veiller à ce que l’organisation de congrégations et d’associations philosophiques composées uniquement d’hommes ou de femmes, d’une part, et l’exclusion des femmes de la prêtrise, d’autre part, ne tombent pas sous le coup de l’article 2, § 1er, et ce afin de ne porter atteinte ni à la liberté d’association ni à la liberté des cultes [68] ». Le gouvernement déposa dès lors un amendement réintroduisant l’exemption dans des termes identiques à ceux de la proposition initiale [69]. Voulant éviter que l’exemption s’applique à des établissements organisés par des autorités religieuses (écoles, hôpitaux, etc.) Meryem Kaçar (Agalev) déposa un sous-amendement précisant : « Par organisation interne, on ne peut en aucun cas entendre les fonctions assurant des services dans le domaine social [70]. » Nathalie de T’Serclaes et Philippe Monfils (MR) proposèrent une autre rédaction de l’article, remplaçant le terme « communautés religieuses » par celui de « congrégations religieuses » et le terme « reconnus par le Roi » par « reconnus par la loi », estimant qu’il était de la compétence du législateur de reconnaître de nouveaux cultes [71].

101Dans une logique inverse, Hugo Vandenberghe et Mia De Schamphelaere (CD&V) déposèrent d’autres amendements visant à élargir l’application de l’exemption. Ils proposèrent de préciser qu’en ce qui concernait les activités professionnelles des cultes, des organisations ou des communautés religieuses dont l’éthique était fondée sur la religion ou les convictions, « une discrimination basée sur la religion ou les convictions d’une personne ne constitue pas une discrimination lorsque, par la nature de ces activités ou par le contexte dans lequel elles sont exercées, la religion ou les convictions constituent une exigence professionnelle essentielle, légitime et justifiée eu égard à l’éthique de l’organisation [72] ». Clotilde Nyssens (PSC) déposa également des amendements de même nature [73]. Un article de la directive 2000/73/CE proposait, il est vrai, aux États membres d’instaurer une exception à la règle dans des termes très proches. L’enjeu de cette disposition était perçu par certains comme étant celui de la liberté du réseau d’enseignement libre de choisir des professeurs dont les convictions correspondaient à celles du pouvoir organisateur.

102Hugo Vandenberghe et Mia De Schamphelaere (CD&V) souhaitèrent également modifier le texte proposé en remplaçant « à l’organisation interne des cultes etc. » par « aux cultes etc. » afin que la pratique externe du culte échappe elle aussi à l’application de la loi, et supprimer les mots « reconnues par le Roi » afin de mettre tous les cultes hors champ d’application [74].

103Durant la discussion au sein de la commission de la Justice du Sénat, les auteurs de la proposition et la ministre de l’Égalité des chances défendirent l’idée que la règle générale prévoyant que les différences de traitement basées sur une justification objective et raisonnable ne constituaient pas une discrimination devait suffire à garantir l’organisation interne des cultes. Les partisans d’un texte plus précis voyaient dans le texte une menace pour la liberté religieuse, en permettant à des non-croyants de se prononcer sur l’admissibilité d’une distinction faite par des croyants : « L’objectif du projet paraît clair. Par cette loi sur les discriminations, on souhaite poursuivre au pénal les ministres des cultes et les conceptions religieuses [75]. »

104La commission de la Justice adopta un amendement garantissant l’exercice des libertés et droits fondamentaux (cf. supra) ; il fut considéré par la majorité des membres de la commission que la liberté des cultes et de leur organisation était suffisamment assurée par cette disposition.

105Après le dépôt du rapport, Hugo Vandenberghe déposa un nouvel amendement visant l’admission de la conviction religieuse comme exigence professionnelle essentielle pour certains employeurs [76]. Il fut rejeté par 42 voix contre 20.

106Lors de l’examen du projet par la Chambre, un amendement identique fut proposé par Joke Schauvliege (CD&V) et rejeté par 9 voix contre 4 abstentions [77]. Des amendements visant le même objectif furent redéposés (et rejetés) par des sénateurs du CD&V et du CDH lors de l’examen final du projet au Sénat [78].

3.2.3. Les relations de travail

107La proposition initiale donnait comme exemples de comportement discriminatoire interdit le refus d’établir un contrat de travail ou la résiliation d’un contrat de travail ainsi que l’entrave à la poursuite d’une carrière professionnelle, ou la détermination des conditions de travail.

108Le gouvernement proposa d’expliciter l’interdiction de discriminer en matière d’emploi de la manière suivante :

109

  • « les conditions d’accès à l’emploi, aux activités non salariées et au travail, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d’activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion ;
  • les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération ; »

110Le texte fut ensuite retravaillé et se lit dans la version finale :

111

« Les conditions d'accès au travail salarié, non salarié ou indépendant, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d'activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion, les conditions d'emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, tant dans le secteur privé que public. »

112 L’application de la loi aux relations de travail demandait en outre une attention particulière, d’une part en raison de l’existence d’autres instruments, comme la directive 2000/78/CE, la loi du 7 mai 1999 concernant l’égalité entre hommes et femmes, et certaines conventions collectives, d’autre part en raison de la nécessité de maintenir certaines différences de traitement légitimes dans les relations de travail.

113Le gouvernement déposa un amendement visant à permettre le maintien d’un traitement différentié « lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle. Le Roi fixe les cas dans lesquels une telle caractéristique constitue une condition déterminante selon la nature ou les conditions d’exercice de l’emploi par un arrêté délibéré en Conseil des ministres [79]. » Cet amendement fut néanmoins retiré, suite à l’adoption d’un amendement des auteurs de la proposition, qui stipulait que les différences de traitement fondées sur une distinction objective et raisonnable ne constituaient pas des discriminations. La discussion en commission de la Justice se poursuivit néanmoins, certains de ses membres estimant que l’idée d’une justification objective et raisonnable ne correspondait pas au concept d’« exigences essentielles » de la directive européenne.

114C’est à la Chambre que le concept fut réintroduit dans le projet, via l’adoption d’un amendement déposé par le gouvernement afin de mettre le texte en harmonie avec les directives européennes qui n’admettent la dérogation au principe de l’égalité de traitement dans les relations de travail que s’il s’agit d’exigences professionnelles essentielles [80]. Un nouveau paragraphe fut donc inséré, pour préciser dans quelles conditions une différence de traitement était acceptable dans le domaine des relations de travail : « Dans le domaine des relations de travail telles que définies au 2e et 3e tiret du § 3, une différence de traitement repose sur une justification objective et raisonnable lorsque, en raison de la nature d’une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, pour autant que l’objectif soit légitime et que l’exigence soit proportionnée. »

115Le gouvernement avait rédigé également un nouvel article précisant l’application de la loi dans les relations entre employeur et travailleur, conformément au prescrit de la directive européenne 2000/43/CE. Cet article organisait la protection du travailleur qui engageait une action en justice sur base de la loi. Il avait été adopté en commission de la Justice du Sénat [81].

116La Chambre sollicita, tardivement, l’avis du Conseil national du travail. Celui-ci examina dans un même avis le projet de loi tendant à lutter contre la discrimination et le projet de loi relatif au renforcement de la lutte contre le racisme. Le CNT avait déjà émis un avis lors de l’élaboration des directives européennes dont les textes proposés s’inspiraient au moins partiellement. Il demandait d’être associé étroitement à la suite du processus et à la transposition des directives en droit belge. Constatant qu’il n’était consulté qu’en fin de parcours parlementaire de ces textes, il jugea qu’il s’agissait « d’un procédé inacceptable [82] ». D’une manière générale, le CNT estimait que les textes à l’examen prévoyaient de trop lourdes sanctions pénales et n’accordaient pas l’importance requise à la prévention. Il jugeait important d’éviter le phénomène de judiciarisation des conflits tel que le connaissaient les pays anglo-saxons. Il soulignait aussi le manque de cohérence entre les divers instruments : loi anti-discrimination, loi de 1981, loi de 1999, projet de loi en discussion sur le harcèlement, et également les conventions collectives de travail n° 25 sur l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins et n° 38 concernant le recrutement et la sélection des travailleurs. Le CNT s’étonnait également de l’ajout de critères de discrimination non prévus par les directives européennes (la fortune, l’état de santé actuel ou futur et les caractéristiques physiques). Le CNT formula trois propositions concrètes de modifications du projet de loi sur la discrimination. Premièrement, il suggérait de compléter le projet en explicitant une série de cas où des différences de traitement basées sur l’âge ne constituaient pas une discrimination, notamment en ce qui concernait l’accès à l’emploi et à la formation ou l’octroi de certains avantages sociaux. Deuxièmement, le CNT réclamait que les modalités d’exécution des tests de situation soient explicitées dans la loi et non pas renvoyées à un arrêté d’application. Enfin, le CNT souhaitait voir préciser que dans les litiges relatifs au droit du travail, outre le Centre pour l’égalité des chances, seules les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs étaient autorisées à ester en justice. Il ne fut entendu sur aucun de ces trois points.

117Un amendement du gouvernement, introduit à la Chambre et destiné à étendre aux témoins la protection consentie au travailleur ayant introduit une plainte sur la base de la future loi a été rejeté, en raison du nombre potentiellement très élevé de témoins dans certaines affaires [83].

118Des articles 17bis et 17ter furent introduits, sur proposition du gouvernement, afin de confier aux tribunaux du travail toutes les contestations relatives aux discriminations en matière de travail [84]. Ainsi, les litiges concernant les conditions d’embauche, de sélection, de promotion, deviendraient des compétences des tribunaux du travail, même en l’absence de contrat de travail.

119Un article 20bis fut introduit, sur proposition du gouvernement, pour rendre possible l’intervention du Ministère public dans les litiges relatifs aux discriminations en matière d’emploi [85].

3.2.4. Le souci de ne pas interdire les actions positives

120Un effet pervers possible de la loi envisagée eut été d’empêcher la prise de mesures dites de discrimination positive, c’est-à-dire des mesures favorisant un groupe dans le but précisément de remédier aux effets d’une discrimination dont ce groupe a été ou est l’objet. Le Conseil d’État avait souligné cette possibilité [86]. Pour tenir compte de ses remarques et dans le but de conserver la possibilité de prendre des mesures dites de discrimination positive à l’égard de groupes minoritaires, le gouvernement proposa d’insérer un article disant que « les dispositions de cette loi ne constituent aucunement un empêchement à la prise de mesures ayant pour but la promotion de l’égalité des chances et en vue desquelles des avantages spécifiques sont institués ou maintenus afin, en relation avec des personnes pour lesquelles un motif de discrimination mentionné à l’article 2 peut être retenu, de prévenir ou de compenser des difficultés [87] ». Cet amendement fut adopté par la commission de la Justice du Sénat par 11 voix, 4 membres s’étant abstenus.

3.3. LES PROCÉDURES JUDICIAIRES

3.3.1. L’incrimination de la discrimination indirecte

121La proposition de loi ne distinguait pas la discrimination directe et la discrimination indirecte. Le gouvernement proposa de préciser la distinction entre discrimination directe et indirecte : la discrimination directe est une distinction directement fondée sur l’un des critères énoncés. Elle n’est justifiée en aucune circonstance. La discrimination indirecte consiste en une disposition apparemment neutre qui a un résultat dommageable pour des personnes auxquelles s’applique un des motifs énoncés. Une telle disposition est interdite sauf si elle est justifiée par un objectif légitime qui ne pourrait être atteint par une autre disposition [88]. L’amendement du gouvernement fut modifié par l’adoption d’un amendement des auteurs de la proposition, qui introduisit la possibilité d’une différence de traitement objective et raisonnable directement fondée sur l’un des motifs de discrimination interdite [89].

122Le texte adopté en commission de la Justice du Sénat prévoyait donc :

123

  • « Il y a discrimination directe si une distinction de traitement qui manque de justification objective et raisonnable est directement fondée sur [liste des motifs]
  • il y a discrimination indirecte lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre a en tant que tel un résultat dommageable pour des personnes auxquelles s’applique un des motifs de discrimination visés au § 1er, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne repose sur une justification objective et raisonnable. »

124 Un débat eut lieu sur l’opportunité de prévoir l’incrimination pénale de la discrimination indirecte. Les auteurs de la proposition de loi souhaitaient la maintenir, tout au moins lorsqu’elle était commise par un agent des pouvoirs publics. Les opposants soulignaient que la notion, trop vague, pouvait créer une incertitude chez le citoyen quant à la légalité des actes qu’il posait, et que l’application de la loi pourrait donner lieu à de nombreux abus, le moindre dysfonctionnement d’un service public (bâtiment non accessible, etc.) pouvant donner lieu à des poursuites pénales. Le ministre de la Justice se prononça en faveur de la suppression de la pénalisation des discriminations indirectes : « (…) En ce qui concerne les discriminations indirectes, il n’est pas admissible qu’un citoyen soit poursuivi pour avoir posé un acte dont il ne pouvait savoir, en le posant, qu’il commettait une infraction, un délit ou un crime [90]. »

125Un amendement déposé en commission de la Justice par Hugo Vandenberghe et Mia De Schamphelaere (CD&V) fut adopté par 9 voix contre 4, un membre s’étant abstenu. Il remplaçait systématiquement le mot « discrimination » par les mots « discrimination directe » dans les articles traitant des dispositions pénales de la proposition. La discrimination indirecte ne serait plus susceptible de poursuites pénales mais seulement d’une procédure au civil.

3.3.2. L’injonction à discriminer

126La proposition initiale visait à réprimer pénalement « les comportements discriminatoires les plus critiquables » :

  • les incitations à la discrimination, ou la publicité donnée à celle-ci ;
  • les discriminations commises par des fonctionnaires publics ;
  • les infractions motivées par une attitude discriminatoire.
Il était donc proposé de poursuivre au pénal l’incitation à la discrimination, mais pas la discrimination elle-même.

127Les articles relatifs aux poursuites pénales furent modifiés pour que seule la discrimination directe soit visée (cf. supra). Cependant, un débat eut lieu à propos de l’opportunité de punir ce que certains décrivaient comme l’intention de discriminer, alors que le droit pénal exige qu’une infraction ait été commise. Les auteurs de la proposition défendirent l’idée que ce n’était pas l’intention qui était visée, mais la publicité donnée à celle-ci. À la Chambre, l’article 2 du projet fut modifié par l’adoption d’un amendement proposé par le gouvernement, pour faire de l’injonction à discriminer une discrimination, en accord avec le prescrit des directives européennes : « Tout comportement consistant à enjoindre à quiconque de pratiquer une discrimination à l’encontre d’une personne, d’un groupe, d’une communauté ou de leurs membres pour un des motifs visés au § 1 est considéré comme une discrimination au sens de la présente loi [91]. »

128Le texte fut encore modifié, toujours sur proposition du gouvernement, pour incriminer l’incitation à la discrimination directe et indirecte, et non plus seulement directe [92].

3.3.3. Le « renversement » de la charge de la preuve

129La proposition de loi initiale définissait la discrimination comme une différence de traitement dénuée de justification objective et sans rapport raisonnable avec le but poursuivi. Elle ajoutait ensuite que « la preuve du caractère objectivement justifié d’une distinction et du rapport raisonnable et proportionnel avec le but poursuivi par son auteur est toujours à charge de celui-ci ». Cette disposition introduisait si pas un renversement de la charge de la preuve, du moins un glissement de celle-ci : dans le cas d’une différence de traitement avérée, il appartenait à l’auteur de la différence de prouver que celle-ci ne constituait pas une discrimination. Un tel dispositif est prévu par les directives européennes, l’un des obstacles les plus importants de la lutte contre les discriminations étant la difficulté à les établir devant un tribunal.

130Le Centre pour l’égalité des chances était lui aussi en faveur d’imposer la charge de la preuve à la partie défenderesse une fois que la partie demanderesse avait apporté la preuve matérielle de l’existence d’un traitement moins favorable nourrissant une présomption raisonnable de discrimination [93].

131En commission de la Justice du Sénat, le gouvernement déposa des amendements visant à énoncer que cette disposition n’était pas applicable en matière pénale [94]. Le gouvernement souhaitait maintenir la règle fondamentale de preuve en matière pénale qui en met la charge au Ministère public, en conformité avec la Convention européenne des droits de l’homme. Plusieurs intervenants avaient également souligné l’impossibilité de renverser la charge de la preuve au pénal.

132Dans son avis du 16 novembre 2000, le Conseil d’État trouva cet amendement justifié.

133Le principe du renversement de la charge de la preuve avait ainsi été limité dans son application et renvoyé dans le chapitre de la loi concernant les dispositions civiles. Le gouvernement proposa de déplacer l’article concernant la charge de la preuve dans le chapitre sur les dispositions civiles et de le préciser tout en introduisant les tests de situation (cf. infra) [95] :

134« Lorsque la victime de la discrimination ou un des groupements visés à l’article 12 invoque devant la juridiction compétente des faits, tels que des données statistiques ou des tests de situation, qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, la charge de la preuve de l’absence de discrimination incombe à la partie défenderesse.
La preuve de la discrimination (…) peut être fournie par un constat d’huissier au moyen d’un test de situation.
(…)
le Roi détermine par un arrêté royal délibéré en Conseil des ministres les modalités ultérieures relatives à l’exécution du test de situation (…). »

135 Dans son second avis, le Conseil d’État fit part de ses réticences vis-à-vis de ces nouvelles dispositions. Constatant que les directives européennes le prévoyaient, il estima qu’il fallait mieux l’encadrer, et notamment ne pas laisser à un simple arrêté royal le soin de régler l’organisation de tests de situation [96].

3.3.4. Les tests de situation

136Un test de situation est réalisé au moyen de deux groupes, identiques autant que possible sauf en ce qui concerne la caractéristique sur la base de laquelle on suspecte une discrimination. La différence de traitement est alors observée vis-à-vis des membres de chacun des groupes. On peut notamment l’utiliser en vue de détecter la discrimination à l’embauche, ou la discrimination dans l’accès aux loisirs (discothèque, etc.).

137La recevabilité des tests de situation comme moyen de preuve est prévue par les directives européennes. Le Centre pour l’égalité des chances était également en faveur de l’utilisation de ces tests pour établir la présomption de la discrimination.

138En commission de la Justice du Sénat, le gouvernement proposa d’introduire cette possibilité en complétant les dépositions civiles : la preuve d’une discrimination pourrait être fournie par un test de situation organisé par un huissier, et lorsque la victime d’une discrimination invoquait de tels tests ou des données statistiques, la preuve de l’absence de discrimination incomberait à la partie défenderesse [97]. Clotilde Nyssens (PSC) proposa d’imposer la réalisation du test de situation par un fonctionnaire du Centre pour l’égalité des chances, selon une procédure qui serait déterminée ultérieurement par arrêté royal [98].

139Les tests de situation suscitèrent les critiques de ceux qui estimaient la procédure peu respectueuse de la vie privée ou susceptible de dérives. On critiqua également le fait de confier à l’exécutif l’organisation d’un nouveau moyen de preuve. La commission demanda alors une audition complémentaire d’un expert du Centre pour l’égalité des chances à propos des tests de situation. Celui-ci souligna l’utilité de tels tests et se réjouit de leur inclusion dans le texte à l’examen et de leur lien avec le déplacement de la charge de la preuve.

140Il fut envisagé de définir les modalités d’administration du test de situation dans la loi, ou de les laisser à l’appréciation de la jurisprudence. Le maintien du recours à l’arrêté royal fut décidé ; selon la ministre de l’Égalité des chances il offrait « souplesse et sécurité juridique ».

141Lors de l’examen du texte à la Chambre, la possibilité d’avoir recours aux tests de situation fut modifiée pour rendre apparent que le constat par huissier était une possibilité et non pas une obligation : les mots « peut être fournie par un constat d’huissier au moyen d’un test de situation » furent remplacés par « peut être fournie au moyen d’un test de situation qui peut être établi par constat d’huissier [99] ». En effet, il s’était avéré à la réflexion que la présence de l’huissier se révélerait impraticable dans un certain nombre de cas (entretien d’embauche notamment).

142Un amendement déposé par le sénateur Josy Dubié (Écolo) l’avait déjà proposé au Sénat mais il avait été rejeté. La ministre avait alors plaidé pour le maintien de l’huissier, de nature à « rassurer la profession sur la légalité de tels constats ».

143Le « renversement » de la charge de la preuve et le recours aux tests de situation constituent une pierre angulaire de la loi anti-discrimination. L’opposition, réelle mais modérée qu’ils suscitèrent lors de la discussion parlementaire contraste avec l’hostilité que ces principes rencontreront après l’adoption de la loi.

3.3.5. Le harcèlement

144Pour mettre le texte proposé en conformité avec les directives européennes, la notion de harcèlement fut introduite sur la base d’un amendement gouvernemental : le harcèlement constituait une forme de discrimination lorsque le comportement était lié aux motifs de discrimination énoncés [100]. Le CD&V ne se ralliait pas à cette définition, estimant que le harcèlement ne pouvait constituer automatiquement une discrimination et déposa un amendement visant à supprimer cette disposition [101]. La possibilité d’exclure le harcèlement sexuel de la loi fut évoquée en raison de l’existence d’autres instruments le réprimant [102]. On souligna également l’incohérence de cette disposition avec les dispositions pénales du projet : le harcèlement ne serait réprimé pénalement que si son auteur était un fonctionnaire ou qu’il donnait une publicité à son acte.

145Le Conseil d’État estimait inutile d’interdire le harcèlement dans la mesure où celui-ci était déjà prohibé par d’autres instruments, dont le Code pénal.

146La disposition fut cependant maintenue dans la loi anti-discrimination afin d’assurer la correspondance avec les directives européennes. La ministre de l’Égalité des chances souligna qu’une législation globale sur le harcèlement était en préparation, et soumise aux interlocuteurs sociaux.

3.4. LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES

147Le Conseil de l’égalité des chances entre hommes et femmes estima que la législation proposée couvrirait des champs de compétences partiellement attribués aux régions et communautés (politique culturelle, politique des handicapés, politique du troisième âge…) et qu’il était donc nécessaire de solliciter l’avis du Conseil d’État afin de prévenir l’aboutissement d’éventuels recours en annulation devant la Cour d’arbitrage.

148Dans son avis du 16 novembre 2000 [103], le Conseil d’État rappela que le législateur fédéral ne pouvait pas édicter de règles qui imposeraient des conditions aux communautés et aux régions pour l’exercice des compétences qui leurs sont conférées par la Constitution et la loi spéciale. Et ce, même si ces conditions résultaient de l’existence de normes juridiques supérieures (comme les traités européens). Ainsi, la loi envisagée ne devait être comprise que comme s’appliquant aux matières relevant de la compétence de l’Autorité fédérale. À ce niveau, le Conseil d’État soulignait que si l’Autorité fédérale ne pouvait pas interdire les discriminations dans les nombreuses matières communautaires ou régionales (par exemples la politique des handicapés, la formation professionnelle, l’aide à la jeunesse etc.), une telle interdiction pouvait résulter des compétences de l’État fédéral en matière de droit civil, de droit commercial, de droit du travail ou de droit pénal.

3.5. L’ADOPTION DE LA LOI

149La proposition de loi fut examinée par le Sénat en séance plénière les 20 et 21 décembre 2001. Elle fut adoptée en séance plénière par 39 voix contre 6. Il y eut 17 abstentions [104]. Le Vlaams Blok avait annoncé qu’il voterait contre la proposition, et les membres du CD&V et de la VU-ID qu’ils s’abstiendraient. Hugo Vandenberghe avait expliqué que les sanctions prévues par la loi étaient trop fortes et que le texte contenait encore des incohérences juridiques, un diagnostic partagé par Patrik Vankrunkelsven (VU-ID). Clotilde Nyssens avait expliqué que certains membres du groupe PSC approuveraient la proposition tandis qu’elle-même s’abstiendrait essentiellement en raison du traitement réservé à la problématique du sexe mais aussi en raison d’un manque de cohérence entre la définition de la discrimination proposée et celle déjà en vigueur dans d’autres textes. Olivier de Clippele (MR) s’abstenait pour marquer son regret de n’avoir pas vu la langue retenue parmi les critères de discrimination punissables.

150À la Chambre, la discussion générale se déroula les 16 et 17 octobre 2002 [105]. Le projet de loi amendé fut adopté par 93 voix contre 13. Il y eut 25 abstentions. Tous les groupes politiques avaient apporté leur soutien au projet, à l’exception du Vlaams Blok qui avait annoncé qu’il voterait contre et du CD&V qui par la voix de Joke Schauvliege avait annoncé qu’il s’abstiendrait, bien que favorable au principe, estimant que le projet allait beaucoup trop loin, notamment en renversant la charge de la preuve. Après le vote, deux députés du CDH, Richard Fournaux et André Smets, expliquèrent s’être abstenus en raison des nouvelles contraintes que la loi ferait peser sur les entreprises [106].

151Le projet amendé par la Chambre fut renvoyé au Sénat, où il fut définitivement adopté par 40 voix contre 5. Il y eut 14 abstentions. Au moins l’une de ces abstentions (celle de Vincent Van Quickenborne, VU-ID) était motivée par l’impression prématurée par le Service fédéral d’Information d’une brochure présentant la loi comme adoptée [107].

152Le texte adopté diffère largement de la proposition initiale, essentiellement parce que le gouvernement a fait le choix d’assurer la transposition de deux directives européennes via l’amendement de la proposition.

153Ce choix peut être compris en regard du fait que la loi belge va à certains égards plus loin que les obligations européennes : elle interdit par exemple toute discrimination dans la fourniture de biens et services, ce que ne prévoyaient les dispositions européennes qu’en matière de discrimination sur la base de l’origine raciale ou ethnique [108]. Philippe Mahoux a loué la qualité de la collaboration entre le gouvernement et le Parlement en cette matière [109]. Cependant, cette technique d’élaboration de la loi paraît à l’examen compliquée et a sans doute engendré un délai plus long. Elle ne paraît pas non plus faciliter la production d’un texte cohérent et lisible.

4. L’ACCUEIL RÉSERVÉ À LA LOI

4.1. LES PREMIÈRES RÉACTIONS

154Le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme s’est félicité de l’adoption de la loi, en soulignant qu’elle permettrait également une meilleure lutte contre la discrimination raciale puisque celle-ci était désormais susceptible de poursuites au civil et par des actions en cessation [110].

155La presse a rapporté l’adoption de la loi et son caractère novateur, parlant d’une loi historique qui allait mettre fin à toute une série de pratiques, comme les propriétaires qui refusent de louer à un couple de lesbiennes, les portiers qui empêchent les jeunes d’origine étrangère d’entrer dans les discothèques et les employeurs qui refusent d’engager des personnes handicapées [111]. La presse a également souligné les difficultés d’application de la future loi et les questions posées par les innovations que constituaient le renversement de la charge de la preuve au civil et l’instauration des tests de situation. Assistait-on à une judiciarisation croissante de la société [112] ? À propos du renversement de la charge de la preuve, qui « faisait de chacun un suspect un puissance », on a évoqué La ferme des animaux de Georges Orwell [113].

156La crainte de voir l’efficacité du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme se diluer dans ses nouvelles compétences a également été exprimée [114].

157La Fédération des entreprises de Belgique s’est montrée très critique suite à l’adoption de la loi anti-discrimination. Un communiqué de presse parlait d’une loi « dangereuse pour les entreprises » et invitait à un séminaire « pour informer les employeurs correctement sur la nouvelle loi anti-discrimination et sur la manière dont elle a été réalisée, sur ses vrais motifs politiques sous-jacents, son contenu et ses conséquences négatives éventuelles pour le personnel de l’entreprise [115] ». Durant ce séminaire, on aurait évoqué une « guerre à outrance contre les discriminations » en qualifiant les promoteurs de la loi « d’ayatollahs de l’égalité de traitement [116] ». Le Syndicat des propriétaires s’est également opposé à une loi qui empêcherait le propriétaire de choisir librement son locataire, parlant de loi aberrante et inéquitable à l’égard des bailleurs comme des employeurs [117].

4.2. LES RECOURS EN ANNULATION

158Deux recours en annulation partielle ou totale de la loi du 25 février 2003 ont été introduits auprès de la Cour d’arbitrage les 9 et 17 septembre 2003. Les deux recours ont été examinés simultanément par la Cour. Le premier recours émanait de parlementaires du Vlaams Blok, le deuxième recours était déposé par le professeur de droit Matthias Storme, figure de proue du mouvement flamand et membre du bureau de la N-VA. Parmi leurs arguments principaux, les parties requérantes exposaient que la loi compromettait la liberté d’expression, violant en cela l’article 19 de la Constitution, que la liste des critères de discrimination punissables était elle-même discriminatoire parce que limitée (en particulier elle n’avait pas retenu la conviction politique) et violait en cela les articles 10 et 11 de la Constitution, et que le texte n’était pas suffisamment clair en établissant ce qui constituaient des infractions punissables au pénal, violant en cela les articles 10,11,12 et 14 de la Constitution et l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme.

159La Cour a estimé les recours recevables et fondés. Dans son arrêt du 6 octobre 2004 [118], elle a estimé qu’en fonction de l’objectif général de lutte contre toutes les formes de discrimination énoncé par les auteurs de la loi et de la définition ouverte de la discrimination, il convenait d’annuler dans l’article 2 la limitation des motifs de discrimination. Cet article se lit désormais : « Il y a discrimination directe si une différence de traitement manque de justification objective et raisonnable. » Dorénavant la loi s’applique à tout type de discrimination ; elle s’en trouve ainsi profondément modifiée. Selon une analyse, « la Cour a en effet utilisé le principe d’annulation partielle pour réécrire, purement et simplement, la loi. On ne sait s’il faut taxer cette manière d’agir comme violant le sacro-saint principe de séparation des pouvoirs. Il faut plutôt y voir un ressac de la fonction législative au sens strict, de la fonction parlementaire, qui s’efface de plus en plus au bénéfice de l’influence des ‘douze juges’ [119]. »

160La Cour a estimé également nécessaire d’annuler l’article 6, § 1er, deuxième tiret qui réprimait pénalement la publicité donnée à l’intention de recourir à la discrimination : celui-ci violait effectivement la liberté d’expression. Elle a annulé le § 2 de l’article 6 de la loi qui prévoyait des sanctions pénales spécifiques pour les fonctionnaires coupables de discrimination.

161La Cour a également apporté certaines interprétations pour d’autres dispositions, sans pour autant en modifier totalement leur portée. Ainsi en est-il par exemple de « l’incitation à la discrimination,… » où la Cour a précisé que cela ne concernait que les discriminations directes et intentionnelles.

162La Cour a rejeté les autres recours dont celui dirigé contre l’ensemble de la loi.

163La loi se trouve donc amputée de la liste des discriminations qu’elle entendait interdire. Du coup, la définition résiduelle de la discrimination est à la fois trop lâche et trop étroite. Trop lâche, car toute différence de traitement non objective et raisonnable, quelle qu’en soit la base, peut être incriminée désormais. Trop étroite, car toute différence de traitement objective et raisonnable est licite (sauf en matière d’emploi, où seules échappent les différences de traitement qui constituent des exigences professionnelles essentielles). Une telle définition ne peut satisfaire à la transposition des directives européennes (cf. infra).

164La discrimination sur la base de la langue ou de la conviction politique est donc désormais punissable, ainsi que l’ont souligné les commentateurs dans la presse [120]. C’était là une des revendications du Vlaams Blok, dont on peut craindre une tentative d’exploitation de la loi anti-discrimination ainsi modifiée. Le Blok avait également cherché à vider la loi de son contenu, en demandant l’annulation de toute une série de dispositions (renversement de la charge de la preuve, motif abject, etc.). Ces requêtes ont été rejetées par la Cour d’arbitrage qui a ainsi en quelque sorte validé d’importantes dispositions de la loi anti-discrimination.

165Le Centre pour l’égalité des chances considère que ses missions restent inchangées, conformément aux types de discrimination énumérés dans la loi créant le Centre pour l’égalité des chances : « Le Centre a pour mission de promouvoir l'égalité des chances et de combattre toute forme de distinction, d'exclusion, de restriction ou de préférence fondée sur : 1° une prétendue race, la couleur, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique ; 2° l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, l'âge, la conviction religieuse ou philosophique, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique. » Cependant, l’arrêt de la Cour d’arbitrage énonce que les dispositions des articles 18 à 31 de la loi anti-discrimination sont dès lors applicables à toutes les discriminations. Or, c’est l’article 23 qui confère au Centre sa compétence d’agir en matière de discrimination autre que raciale en modifiant précisément la loi créant le centre pour l’Égalité des chances. De plus, l’article 31 de la loi indique que le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme peut ester en justice dans les litiges auxquels son application donnerait lieu sauf si la discrimination contestée repose sur le sexe. Dans ces conditions, il semble que juridiquement, le Centre soit compétent pour toute forme de discrimination, celles qui sont énumérées dans la loi et les autres (y compris une discrimination basée sur la langue ou l’opinion politique). En pratique, le Centre se limite cependant aux causes de discriminations pour lesquelles une mission lui est explicitement confiée par la loi.

4.3. L’ARRÊTÉ D’APPLICATION ORGANISANT LES TESTS DE SITUATION

166L’article 19 de la loi prévoit qu’un arrêté royal organise les modalités des tests de situation qui peuvent être utilisés pour prouver une discrimination.

167Aucun projet de texte n’a été élaboré avant que l’arrêt de la Cour d’arbitrage n’ait été rendu : le recours en annulation concernait l’ensemble de la loi et la Cour aurait pu invalider le principe de ces tests.

168Un projet d’arrêté a été préparé par le ministre de l’Égalité des chances Christian Dupont. Il prévoyait des normes à respecter pour les testeurs et les responsables (organisateurs) des tests. Les testeurs devaient impérativement être âgés de 21 ans au moins et disposer du certificat de l’enseignement secondaire supérieur. Ils ne pouvaient avoir aucun conflit d’intérêts avec les personnes testées. Les responsables des tests pouvaient être soit des huissiers de justice soit des personnes agréées au terme d’une formation spécifique organisée par le Centre pour l’égalité des chances. Cette formation comprendrait un volet juridique, un volet pratique et un volet déontologique. De plus, les responsables devaient être âgés de 21 ans au moins et titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur de type court ou justifier d’une expérience professionnelle de trois ans au moins dans le domaine de la lutte contre la discrimination. Le projet d’arrêté royal détaillait également les conditions d’exécution des tests de situation : rédaction d’un protocole décrivant l’objectif et la procédure, rapport écrit, etc.

169Le projet a été discuté et rejeté au Conseil des ministres du 24 mars 2005. Il a suscité l’opposition d’organisations patronales et du Syndicat des propriétaires. L’UNIZO a parlé de la création d’« espions du racisme » et dénoncé le coût pour les employeursrecruteurs qui devraient tester des candidats fictifs aux emplois proposés [121]. Le VLD, relayant ces critiques, s’est opposé au projet d’arrêté royal [122]. Au mois de mai, le Premier ministre Guy Verhofstadt (VLD) a réitéré son opposition lors du congrès de son parti [123]. Le ministre flamand de l’Intérieur, Marino Keulen (VLD), a exprimé le même rejet, estimant que l’amélioration de la formation des allochtones et la sensibilisation des employeurs constituaient les deux seules méthodes possibles pour lutter contre la discrimination à l’embauche [124]. En quelque sorte, le projet d’arrêté royal semble avoir agi en révélateur de la loi, le dossier n’ayant pas été suivi très attentivement par les organisations patronales lors de la discussion parlementaire. Aujourd’hui les critiques semblent se concentrer sur le principe même du test de situation, pourtant prévu dans la loi.

170La position conjointe du MRAX, de la Ligue des droits de l’homme et de la Liga voor Mensenrechten est celle d’un soutien au principe du test de situation et d’une volonté de ne pas voir le dispositif mis en place alourdi inutilement. Ces associations considèrent toutefois que l’adoption d’un arrêté n’est pas nécessaire pour pouvoir invoquer un test de situation devant un tribunal, la recevabilité du moyen de la preuve étant laissée à l’appréciation du juge. D’autres pays comme la France admettent d’ailleurs le test de situation sans disposer d’une législation spécifique [125]. Cependant, la loi prévoyant l’adoption de cet arrêté, il est possible que le juge estime qu’en son absence les tests de situation ne soient pas recevables.

171Un nouveau projet d’arrêté est en cours d’élaboration après une large consultation des partenaires sociaux et du secteur associatif. Parmi les pistes envisagées se trouverait la possibilité de créer une commission chargée du contrôle de ces tests et réunissant les acteurs concernés. Il est possible aussi que l’organisation des tests de situation dans le cadre des relations de travail fasse l’objet d’une réglementation distincte.

5. L’APPLICATION DE LA LOI

172La loi est entrée en vigueur le 27 mars 2003.

173De nombreux cas de discrimination au sens de la nouvelle loi ont été recensés. Seuls une très petite minorité d’entre eux ont donné lieu à une action judiciaire.

5.1. L’ACTION DU CENTRE POUR L’ÉGALITÉ DES CHANCES

174Le Centre pour l’égalité des chances est un organisme public autonome mis sur pied pour lutter contre le racisme dans la foulée de l’action du Commissariat royal à la politique des immigrés [126]. Il est également chargé de la lutte contre l’exclusion sociale et la pauvreté. La loi du 25 février 2003 a élargi ses missions. Consulté pendant son élaboration, le Centre avait exprimé quelques réserves, étant particulièrement soucieux de ne pas voir sa charge de travail augmentée sans allocation de moyens proportionnés. Par ailleurs, il exprima également des réserves quant à l’interdiction de la discrimination basée sur l’âge : il lui semblait indispensable de prévoir expressément des exceptions liées au marché de l’emploi, ainsi que le permettait la directive européenne [127].

175Le Centre a dû restructurer ses activités et faire face à la démission de son directeur Johan Leman en août 2003, remplacé en mars 2004 par Jozef De Witte. Des moyens supplémentaires ont été alloués au Centre et un nouveau service, celui des discriminations non raciales, développé. Il est opérationnel depuis septembre 2003. Le service des discriminations raciales a lui aussi vu ses missions évoluer suite à l’adoption de la loi anti-discrimination, puisque la discrimination sur une base « raciale » ou ethnique est désormais passible de poursuites civiles également. Plus de cent personnes travaillent au Centre.

176Pour toutes les formes de discrimination, le Centre a une mission d’information du public en général et d’accueil et d’écoute des victimes en particulier. Dans un deuxième temps, le Centre est habilité à ester en justice aux côtés des victimes. En pratique, le Centre s’est imposé comme un conciliateur dans les conflits ayant pour objet la discrimination ; en effet, les plaintes qui débouchent sur une action en justice sont actuellement peu nombreuses.

177Le Centre pour l’égalité des chances a évalué l’application de la loi dans ses rapports annuels 2003 et 2004 [128]. En ce qui concerne la discrimination non raciale, le Centre a ouvert 267 dossiers au cours de l’année 2003. Le service n’était cependant opérationnel qu’au dernier quadrimestre. Au cours de l’année 2004, le Centre a ouvert 374 dossiers en rapport avec des « discriminations non raciales ». Cette diminution relative par rapport à 2003 s’explique, semble-t-il, par une ouverture plus sélective des dossiers : seules les plaintes réellement fondées selon les termes de la loi sont prises en compte. Tant en 2003 qu’en 2004, environ un cinquième des plaintes reçues n’entraient pas dans le champ d’application de la loi.

178En 2003 les plaintes les plus nombreuses concernaient le handicap (30,5 %) ou l’état de santé (19,1 %), puis l’orientation sexuelle (13 %), l’âge et la religion (7,5 % chacun). En 2004, les plaintes les plus nombreuses concernaient le handicap (26,7 %) et l’orientation sexuelle (19,8 %). Les motifs de discrimination santé (11,8 %), âge (9,6 %) et religion (5,9 %) suivaient. Tant en 2003 qu’en 2004, les discriminations basées sur la fortune, la caractéristique physique, l’état civil ou la naissance ont fait l’objet de très peu de plaintes. La grande majorité des plaignants (environ 90 % d’entre eux) sont des particuliers. La plupart des plaintes font l’objet d’un conseil à la victime et/ou d’une médiation du Centre. Dans ce dernier cas le Centre parvient le plus souvent à faire cesser la discrimination, parfois involontaire. À titre d’exemple, un parc d’attractions a lancé une action promotionnelle offrant une entrée gratuite à toute personne accompagnée d’un membre du sexe opposé. Suite à la l’intervention du Centre, la promotion a été ouverte aux amis du même sexe et la direction du parc s’est excusée.

179Les secteurs visés par les plaintes en discrimination varient en fonction du type de discrimination. En ce qui concerne la discrimination basée sur le handicap, c’est la fourniture de biens et services qui est le plus souvent concernée, en raison d’un manque d’accessibilité des locaux ou des événements. En ce qui concerne l’orientation sexuelle, les plaintes concernent surtout les médias (internet, magazines, etc., où se lisent des propos homophobes) et les autorités, dans la mesure où sont visées des dispositions réglementaires discriminatoires. Pour la discrimination liée à l’âge, c’est le secteur emploi qui fait l’objet du nombre le plus élevé de plaintes. Pour celle concernant la santé, ce sont les biens et services (essentiellement les assurances). Les plaintes pour discrimination sur la base des convictions religieuses concernaient à part égale les médias, le travail et l’emploi et l’enseignement. Parmi les 22 plaintes pour ce motif de discrimination, 7 étaient en relation avec le port du voile islamique.

180Seule une petite minorité de cas débouchent sur une procédure judiciaire : sur les cinq cas recensés en 2004, la victime a déposé plainte elle-même dans trois cas, le Centre s’en est chargé dans les deux autres (cf. infra).

181Certaines plaintes dépassant le cas individuel révèlent des problèmes structurels, tels que la discrimination par les assurances, l’aménagement des accès pour les personnes handicapées, la sélection des donneurs de sang, etc. Dans ces cas, le Centre s’engage dans un dialogue structurel avec les différentes parties impliquées dans ces dossiers. La création d’une société sans discrimination demande en effet l’adoption de politiques positives d’envergure, particulièrement en ce qui concerne la non-discrimination des personnes handicapées.

182D’autre part, le Centre a constaté que certaines plaintes pour discrimination étaient issues de situations où deux droits ou libertés fondamentaux s’opposaient : le principe de non-discrimination peut entrer en conflit avec la liberté d’expression, la liberté contractuelle, la liberté religieuse, etc. Ce problème se rencontre également dans l’application de la loi anti-racisme ou dans celle d’égalité entre hommes et femmes.

183L’autre volet de l’application de la loi anti-discrimination pour le Centre est l’instauration d’une procédure civile concernant les plaintes pour discrimination raciale. En 2004, le Centre a ouvert 925 dossiers suite à une plainte pour racisme et enregistré 1 681 demandes d’information. La majorité de ces dossiers sont cependant basés sur la loi antiracisme de 1981. Les plaintes en rapport avec l’emploi constituent 17 % d’entre elles, tandis que 14 % des plaintes concernent la vie en société en général et 13 % les services publics. La discrimination au logement est visée par 9 % des plaintes, et le secteur horeca par 9 % des plaintes également [129]. Dans ce domaine également, la médiation est le moyen d’action préféré par le Centre, en particulier dans les cas de discrimination involontaire ou de discrimination qui ne présente pas de gravité tel que le recours en justice soit inévitable.

184La loi anti-discrimination innove dans le domaine de la discrimination dite d’origine raciale en prévoyant le renversement de la charge de la preuve au civil et l’invocation des tests de situation comme preuve. Cependant, l’absence d’arrêté d’application sur ce point a rendu la loi inefficace ou à tout le moins découragé d’intenter des actions en justice sur cette base. Les instruments les plus utilisés dans la lutte contre le racisme demeurent la loi de 1981 contre le racisme et la loi de 1995 contre le négationnisme [130].

185La discrimination à l’embauche sur base de l’origine ethnique est sans doute le problème le plus aigu, comme l’a illustré récemment le cas d’une entreprise qui livre et place des portes de garage et dont la politique de recrutement a été dénoncée en avril 2005 : la société n’engage pas de personnel d’origine étrangère, arguant du refus de ses clients de voir arriver chez eux des monteurs de portes d’origine étrangère [131]. Un dialogue engagé entre l’entreprise, l’UNIZO (l’organisation des classes moyennes en Région flamande) et le Centre pour l’égalité des chances a permis de dégager un accord pour l’avenir : l’entreprise s’est engagée à ne pas tenir compte de l’origine des prochains candidats aux emplois vacants.

5.2. L’INSTITUT POUR L’ÉGALITÉ DES FEMMES ET DES HOMMES

186L’Institut existe depuis le 1er juillet 2003. Il a été créé par la loi du 16 décembre 2002 [132]. Il a reçu le personnel de l’ancienne Direction de l’Égalité des chances du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale. L’Institut a pour objet de veiller au respect de l’égalité des femmes et des hommes, de combattre toute forme de discrimination et d’inégalité basée sur le sexe et d’élaborer des instruments et stratégies fondés sur une approche intégrée de la dimension du genre. Dans ce but, il est chargé notamment de :

  • développer ou soutenir des études et des recherches ;
  • adresser des recommandations aux pouvoirs publics (notamment en vue de l’amélioration des dispositifs légaux) et aux personnes et institutions privées ;
  • organiser le soutien aux associations actives en matière d’égalité entre les hommes et les femmes ;
  • aider toute personne sollicitant une consultation sur ses droits en cette matière ;
  • préparer et appliquer les décisions du gouvernement en cette matière ;
  • assurer le suivi des politiques européennes et internationales.
L’Institut est placé sous la tutelle du ministre qui a l’Égalité des chances dans ses attributions.

187L’Institut est chargé du traitement des plaintes pour discrimination basée sur le sexe en application de la loi anti-discrimination. En ce qui concerne cette mission, l’Institut n’est réellement opérationnel que depuis octobre 2004, avec la mise en place de la cellule juridique. Le nombre de plaintes traitées à ce jour est donc relativement faible, même s’il est en augmentation : 24 plaintes ont été enregistrées pour le premier trimestre de l’année 2005. Le plus grand nombre de plaintes concernent la discrimination à l’embauche ou au travail, domaines qui étaient déjà couverts par la législation antérieure à l’adoption de la loi anti-discrimination. Le volet le plus novateur de cette loi en ce qui concerne la discrimination de genre est l’interdiction d’une discrimination dans la fourniture de biens et services ; elle ne fait l’objet que de peu de plaintes.

188Sauf cas de discrimination trop flagrante, l’Institut cherche à mettre en place prioritairement une procédure de conciliation ; aucune action en justice n’a été entreprise à ce jour.

189Pour améliorer l’efficacité de son action, l’Institut constitue un réseau d’appui avec les associations de terrain. Des accords de collaboration avec les organisations syndicales sont également prévus.

190L’Institut a adopté un plan de développement pour 2005-2007. Son objectif premier est de veiller au respect de l’égalité des femmes et des hommes et de combattre toute forme de discrimination et d’inégalité basée sur le sexe. « Le grand enjeu pour la période à venir est la mise en place d’un service de réception, suivi et traitement des plaintes, y compris l’action en justice. À l’issue de la période 2005-2007, l’objectif que se fixe l’Institut est d’accorder à chaque demande individuelle un suivi rapide, efficace et approprié (conseil, médiation, action en justice, interpellation de l’autorité compétente). Ce service devra être coordonné avec l’action du Centre pour l’Egalité des chances, des syndicats et des services compétents du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale [133]. »

191Il est également prévu d’organiser une campagne de médiatisation de l’Institut et des dispositions légales.

192Actuellement il est donc prématuré de dresser un bilan de l’action de l’Institut en matière d’application de la loi du 25 février 2003.

5.3. LES AUTRES ACTEURS

193Des protocoles de collaboration ont été conclus entre le Centre pour l’égalité des chances et diverses associations actives dans le domaine de la lutte contre la discrimination : Fédération des associations gayes et lesbiennes, Tels Quels, Association chrétienne des invalides et handicapés, Association socialiste de la personne handicapée, Handiplus, Katholieke Vereniging Gehandicapten, Vlaamse Federatie van Gehandicapten, Ligue braille, Œuvre nationale des aveugles, West-Vlaams Bureau voor Gelijke Kansen en Toegankelijkheid. Des protocoles avec d’autres associations sont en cours d’élaboration. Des protocoles de collaboration ont également été conclus avec les organisations syndicales.

194De plus, une collaboration informelle mais très active s’est développée avec d’autres associations (Ligue des droits de l’homme, MRAX,) généralement selon un principe de subsidiarité : les associations laissent le Centre se saisir des plaintes et n’envisageraient un suivi particulier que dans des dossiers qui leur tiennent particulièrement à cœur.

195La loi permet aux organisations représentatives des travailleurs d’ester en justice dans les litiges auxquels l’application de la loi donne lieu et relatifs à des matières qui figurent dans leurs fins statutaires. Or, en cette matière, il existe des dispositions spécifiques au droit du travail : la convention collective n° 38 conclue au sein du Conseil national du travail en 1983 fixait déjà le principe de non-discrimination dans le recrutement. En 1998 une convention 38ter a été adoptée et le principe de non-discrimination a été rendu obligatoire par arrêté royal [134]. Le champ d’application en est légèrement différent : plus large, puisqu’aux critères de discrimination mentionnés dans la loi il ajoute celui de l’affiliation à une organisation syndicale ou autre ; plus étroit, parce contrairement à la loi, la convention ne prévoit pas d’appliquer l’interdiction de la discrimination à la promotion et aux conditions de travail.

196La lutte contre la discrimination à l’embauche et au travail est un axe qui a été intégré par les trois grandes organisations syndicales. Il existe cependant des freins à un renforcement de leur action. Certaines dispositions de la loi anti-discrimination sont difficilement applicables en matière de droit du travail ; en particulier le principe d’interdiction de la discrimination basée sur l’âge pose problème. En effet, la promotion se base souvent sur l’ancienneté, et des dispositions spécifiques (prépension, etc.) concernent les travailleurs âgés. Par ailleurs, il paraît difficile d’évacuer totalement le critère de l’âge du recrutement. Ensuite, la coexistence d’une convention collective et d’une loi dont l’application en matière de droit du travail échappe très largement aux interlocuteurs sociaux est difficile. Enfin, la lutte contre la discrimination ne constitue peut-être pas une priorité pour les organisations syndicales dans un contexte économique difficile qui génère une situation concurrentielle entre les travailleurs.

5.4. LES ACTIONS JUDICIAIRES

197Actuellement, la loi n’a donné lieu qu’à un petit nombre d’actions judiciaires.

198Trois décisions emblématiques de l’application de la nouvelle loi sont cependant tombées au printemps 2005.

199La première décision concerne une discrimination basée sur l’âge. Fin mars 2005, un assureur a été condamné par le tribunal de commerce de Bruxelles sur la base de la loi anti-discrimination à la suite d’une plainte déposée par une association de consommateurs et qui concernait une assurance-hospitalisation. Le tribunal a estimé que l’assureur ne pouvait pas augmenter les primes des assurés plus âgés dans une proportion plus grande que celle des plus jeunes [135]. Ce jugement est lourd de conséquences financières pour les assureurs, et peut-être également pour les assurés. Il peut déboucher sur une modification du taux de calcul des primes par l’ensemble des compagnies d’assurance.

200La deuxième décision concerne une discrimination basée sur l’orientation sexuelle. En avril 2005, le tribunal de première instance de Nivelles a condamné un propriétaire à cesser de discriminer les candidats locataires sur la base de leur orientation sexuelle, sous peine d’astreinte de 100 €. La plainte avait été déposée par un couple de personnes homosexuelles qui avaient trouvé via une agence une villa qu’elles désiraient louer et pour laquelle elles avaient versé un acompte. L’agence les avait ensuite recontactées pour annoncer que le propriétaire préférait louer à un couple traditionnel [136]. Cette décision ne débouche sur aucune conséquence pratique pour les plaignants, puisque depuis lors le bien a été loué à d’autres personnes. Elle a cependant une valeur d’exemple très importante.

201La troisième décision concerne une discrimination basée sur l’origine ethnique. Elle est intervenue dans une action au civil, selon une procédure instaurée par la loi antidiscrimination. En juin 2005, le tribunal de première instance de Bruxelles, siégeant en référé, a donné raison à un couple qui s’estimait victime de discrimination sur la base de son origine ethnique dans sa recherche d’un logement. L’action en justice avait été introduite par le MRAX. La décision a établi que le couple s’était vu refuser la location d’un appartement en raison de son origine étrangère en violation de la loi antidiscrimination, même si les motifs officiellement invoqués par la propriétaire avaient été différents. En attestait notamment le fait qu’une personne d’origine belge se présentant après le couple et à leur demande s’était vu réserver un accueil favorable [137]. Il faut noter que le tribunal a souligné que la loi anti-discrimination offrait une protection moins importante que celle prévue par la directive 2000/43/CE, puisqu’elle admettait une justification à une différence de traitement sur la base de l’origine ethnique, ce que ne permet pas la directive. Le juge a estimé que le prescrit de la directive européenne l’emportait sur celui de la loi anti-discrimination.

202Une autre plainte déposée par le Centre pour l’égalité des chances au nom d’un couple homosexuel s’estimant discriminé dans sa recherche d’un logement en location était en appel à l’été 2005 à Gand (le tribunal de première instance ayant débouté les plaignants) [138].

203Les propos homophobes du cardinal Joos avaient également fait l’objet du dépôt d’une plainte par le Centre pour l’égalité des chances, mais l’action judiciaire est éteinte du fait de la mort du cardinal.

204Par ailleurs, le 14 juin 2005, la Cour d’appel d’Anvers a débouté des plaignants qui invoquaient la loi anti-discrimination pour obtenir la levée de l’interdiction du port du voile dans une école de la province de Limbourg. Le motif invoqué par la Cour était l’inapplicabilité d’une loi fédérale dans l’organisation de l’enseignement du réseau officiel [139].

205L’application de la loi semble faible au regard des problèmes rencontrés : une étude menée conjointement par la KUL et l’ULB à la demande de l’Orbem a révélé que 27 % des dossiers de candidatures aux emplois vacants feraient l’objet d’une discrimination [140]. Actuellement, la discrimination liée à l’emploi (conditions de travail, etc.) est difficile à établir et à poursuivre. En effet, l’inspection sociale n’est guère formée à la détecter ou à rédiger un rapport nécessaire à l’engagement de poursuites au civil. La procédure habituelle pour constatation d’une infraction est en effet la rédaction d’un procès-verbal, qui débouche éventuellement sur des poursuites pénales. Les arrêtés royaux du 15 juillet 2005 donnent cependant compétence aux inspecteurs sociaux de mener des actions sur la base de la loi anti-discrimination [141].

206L’action en cessation pose également question, dans la mesure où le bénéfice pour la victime en demeure aléatoire. Obtenir la cessation d’une discrimination concernant la location d’un logement ou une offre d’emploi n’apportera souvent au plaignant qu’une satisfaction morale ; il est peu probable qu’il souhaitera louer le bien ou accepter l’emploi initialement refusé.

207Il y a eu des tentatives ou des annonces de tentative d’instrumentalisation de la loi à des fins politiques. Par exemple, Serge Kubla, à l’époque vice-président du gouvernement wallon, se proposait de déposer plainte contre la N-VA pour discrimination envers les Wallons [142] et de leur côté deux députés de la N-VA se proposaient de déposer plainte contre Olivier Maingain, président du FDF, pour discrimination envers les Flamands [143].

208L’utilisation de la loi pour déclencher des poursuites judiciaires reste donc problématique ; au premier rang des problèmes rencontrés se trouve la difficulté d’établir la preuve de l’infraction.

209Une étude a révélé que la loi était généralement méconnue et que les victimes de discriminations ne connaissaient pas leurs droits [144]. Or, le rôle préventif de la loi est sans doute le plus important ; un effort de médiatisation est nécessaire pour la faire mieux connaître. Les patrons continuent à dire qu’ils sont libres d’engager qui ils veulent et les propriétaires qu’ils sont libres de choisir leurs locataires. C’est effectivement vrai, mais à condition de ne pas commettre de discrimination [145].

210Dans l’ensemble, le petit nombre de jugements intervenus permet de conclure au caractère essentiellement exemplatif de ceux-ci. Ils participent à une connaissance de la loi. Cependant, le petit nombre d’infractions sanctionnées au regard du nombre extrêmement élevé d’infractions commises pose question. La loi n’est-elle pas déforcée lorsqu’elle ne peut pas être appliquée avec constance ?

6. LA TRANSPOSITION DES DIRECTIVES EUROPÉENNES ET LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES

211Un des objectifs de la loi du 25 février 2003 est de transposer deux directives européennes : la directive 2000/43/CE du 29 juin 2000 relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine technique [146] et la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 [147] portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail. Ainsi que l’avait souligné le Conseil d’État, la loi anti-discrimination est une législation fédérale. Cependant, elle touche également à des matières qui sont des compétences communautaires (comme la politique des handicapés) ou régionales (politique de l’emploi). Elle ne s’applique donc, en ces matières, qu’en ce qui concerne les règles de droit (droit civil, droit au travail…) qui sont de la compétence du pouvoir fédéral.

212Dans toute une série de cas, par exemple l’accessibilité de l’école ou des transports publics aux handicapés, l’application du principe de non-discrimination passe nécessairement par des instruments communautaires ou régionaux.

213À elle seule, cette loi fédérale est insuffisante à réaliser la transposition des directives européennes, dans la mesure où le champ d’application de ces directives couvre largement certaines des compétences des régions et des communautés.

214Certaines entités fédérées ont adopté des instruments juridiques qui visent à transposer les directives, sans que cette transposition soit complète [148]. Nous n’allons pas ici examiner ces instruments, mais exposer ce qui pose problème par rapport à la transposition des directives [149]. Premièrement, ces instruments sont pour la plupart incomplets par rapport aux obligations européennes. Deuxièmement, certains instruments régionaux et communautaires ne prévoient pas les sanctions civiles ou pénales aux infractions à leurs dispositions ainsi que le demandent les directives européennes. Les entités fédérées disposent de la compétence pour édicter des sanctions aux infractions à leurs législations, même si le champ de la directive 2000/78/CE couvre plutôt le droit du travail, compétence fédérale. D’autres instruments prévoient non seulement des sanctions, mais également des procédures judiciaires particulières. Ce faisant, ils empiètent naturellement sur une compétence réservée de l’Autorité fédérale, à savoir l’organisation de la justice. D’autre part, la Commission communautaire française et la Commission communautaire commune n’ont pas encore adopté d’instruments transposant les directives pour les matières de leur compétence.

215Un certain flou entoure les conséquences de l’absence de coordination des instruments législatifs de l’Autorité fédérale et des entités fédérées. Par exemple, si un candidat locataire est victime d’une discrimination en raison de son origine ethnique, la loi fédérale s’appliquera sans doute si c’est un propriétaire privé qui se rend coupable de cette discrimination (puisque les règles de droit civil s’appliquent à tout citoyen) mais la discrimination ne sera probablement pas punissable si elle est le fait d’une société publique de logement, puisque la politique du logement est une compétence régionale.

216D’autre part, la loi du 25 février 2003 va au-delà des prescriptions des directives puisqu’elle interdit toute discrimination basée sur un motif quelconque dans la fourniture de services, alors que les directives européennes n’érigent en principe pour les biens et services que l’interdiction de toute discrimination sur la base de la race ou d’origine ethnique (directive 2000/43) et du genre (directive 2004/113), et n’interdit la discrimination basée sur l’orientation sexuelle, l’âge, le handicap et la religion ou les convictions qu’en matière d’emploi et de travail (directive 2000/78). Les autres motifs de discrimination sont ignorés par les normes européennes [150].

217En ce qui concerne l’intersection entre la loi belge et les directives européennes, la question se pose de savoir si ces dernières ont été adéquatement et complètement transposées. La Commission européenne a d’ailleurs adressé une série de questions au gouvernement belge pour s’en assurer. Parmi les problèmes posés par la loi belge se trouve tout d’abord l’absence de mention dans le liminaire de la loi des directives qu’elle transpose. Il s’agit cependant d’une obligation. Ensuite, la loi contient une définition de la discrimination directe différente de celle de la directive. La définition belge semble permettre des différences de traitement justifiées : « Il y a discrimination directe si une différence de traitement manque de justification objective et raisonnable » (art. 2, § 1er) [151], ce que ne permet pas la directive 2000/43. En ce qui concerne les relations de travail, la loi belge introduit une définition de la justification objective et raisonnable : si « la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle » (art. 2, § 5). Ceci est en harmonie avec les dispositions de la directive 2000/78, cependant celle-ci réclame en outre l’établissement d’une liste des exigences professionnelles essentielles [152].

218L’annulation par la Cour d’arbitrage de la liste des motifs de discrimination est susceptible de poser problème surtout en matière de droit du travail. En effet, tout critère de recrutement pourra être contesté s’il ne constitue pas une exigence professionnelle essentielle.

219Il apparaît également que la Belgique n’a pas fait usage de certaines possibilités de restrictions offertes par les directives qui auraient pu rendre la loi plus facilement applicable. Par exemple, la directive 2000/78 prévoit qu’elle ne s’applique pas aux régimes de sécurité sociale et de protection sociale. La directive autorise également les différences de traitement fondées sur l’âge lorsqu’elles sont « objectivement et raisonnablement justifiées (…) notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle (…) ». Le spécifier dans la loi belge aurait peut-être été plus clair, eu égard aux questions que pose l’interdiction de la discrimination basée sur l’âge. La directive permet également aux États membres de ne pas appliquer les dispositions relatives au handicap ou à l’âge en ce qui concerne les forces armées, de police et de secours. Elle propose également aux États membres d’exempter les Églises et organisations assimilées d’appliquer les dispositions de la directive.

7. PERSPECTIVES

220L’arrêt de la Cour d’arbitrage, les observations de la Commission européenne quant à l’imperfection de la transposition des directives et certaines difficultés liées à l’application de la loi conduisent obligatoirement à la remanier. Cette perspective figure d’ailleurs dans la note de politique générale du ministre de l’Égalité des chances : adapter et améliorer la loi contre la discrimination [153]. Il y est question à la fois de campagnes de sensibilisation pour faire mieux connaître la loi et d’adapter celle-ci pour « lui redonner une cohérence et la rendre plus lisible », en tenant compte de l’arrêt de la Cour d’arbitrage, des observations de la Commission européenne, de l’adoption prochaine d’une nouvelle directive européenne en matière d’égalité entre les femmes et les hommes et des problèmes de chevauchements entre normes fédérales, régionales et communautaires.

221Un groupe de travail réunissant les représentants des différents ministres compétents, des représentants des institutions de promotion de l’égalité – dont le Centre pour l’égalité des chances – et des experts universitaires a été constitué à cet effet et devrait transmettre des recommandations au ministre de l’Égalité des chances.

222Il paraît envisageable de réintroduire une liste fermée des discriminations interdites à condition d’enlever l’exception générale de la justification raisonnable et d’édicter un certain nombres d’exceptions spécifiques à chaque motif de discrimination. La spécificité des différentes discriminations pourrait conduire à un fractionnement de la loi ou à une réorganisation à l’intérieur du même texte. La discrimination basée sur le genre et sur l’origine ethnique ne souffre par exemple que très peu d’exceptions. En revanche, un traitement différencié sur la base de l’âge paraît légitime dans une série de cas, et notamment en matière d’accès à l’emploi ou à la formation et de bénéfices de sécurité sociale.

223Il existe déjà des instruments, la loi de 1981 contre le racisme et la loi de 1999 pour l’égalité homme-femme, que l’on pourrait envisager d’adapter, réservant à une autre loi l’interdiction des autres formes de discrimination. Cette façon de faire pose cependant une série de problèmes, notamment parce que la loi de 1981 ne prévoit pas de sanctions au civil. En revanche, la loi anti-discrimination modifiée par l’arrêt de la Cour d’arbitrage ne prévoit plus de rendre susceptible de poursuite la publication de l’intention de discriminer, ce que permet la loi de 1981.

224La discrimination à l’embauche et à l’emploi, quel qu’en soit le motif, est-elle aussi de nature particulière ? La discrimination à l’embauche pour raison d’origine ethnique est probablement une des discriminations les plus fréquentes et les plus dommageables. En raison de l’existence d’une directive européenne spécifique et parce qu’elle concerne au premier chef les interlocuteurs sociaux qui ont de leur côté déjà adopté des instruments visant à lutter contre elle, on pourrait envisager de lui réserver une législation propre.

225Il est aussi possible de maintenir l’interdiction de la discrimination dans un seul instrument législatif, mais de réserver à chaque motif de discrimination un traitement spécifique à l’intérieur de la loi. C’est ce qu’on peut appeler de façon imagée une loi à tiroirs. D’autres modifications pourraient être apportées à la loi ; il est question par exemple de supprimer la mention de l’arrêté royal d’organisation des tests de situation, ce qui ne rendrait plus nécessaire la prise d’un tel arrêté. La recevabilité du test de situation serait appréciée par le juge. Par ailleurs, la question de l’inclusion du sexe parmi les motifs de discrimination punis par cette loi se reposera certainement, dans le contexte de l’adoption de la directive 2004/113/CE à ce sujet.

226Il n’est cependant pas certain que tous les acteurs soient demandeurs d’une révision de la loi. L’opposition à certains de ses principes s’étant réveillée à la suite de la discussion du projet d’arrêté royal sur les tests de situation, les défenseurs des droits des minorités craignent qu’une nouvelle discussion au Parlement soit l’occasion d’un affaiblissement de la protection contre la discrimination, en particulier au niveau de la fourniture des biens et services.

227Les problèmes rencontrés dans l’application de la loi et le fait qu’elle ne réponde qu’imparfaitement aux prescrits des directives européennes ne doivent pas occulter le caractère réellement novateur de la loi anti-discrimination. Pour certains groupes, les personnes homosexuelles et les personnes handicapées, c’est le premier instrument qui leur permet de donner un contenu à leur droit à l’égalité.

228Comme exposé plus haut, la loi innove également en instaurant un renversement partiel de la charge de la preuve. Plus fondamentalement, elle innove en instaurant des règles précises pour les rapports entre les citoyens. Traditionnellement, les droits fondamentaux sont entendus comme étant ceux des citoyens vis-à-vis des autorités publiques. Il appartient bien sûr à ces dernières de veiller à ce que les citoyens ne portent pas mutuellement atteinte à leurs droits fondamentaux. C’est ainsi que l’État doit par exemple assurer la sécurité. Mais la loi anti-discrimination va plus loin que tout autre instrument législatif antérieur dans le respect des droits fondamentaux des citoyens par les citoyens eux-mêmes.

229Le droit à l’égalité et l’interdiction de la discrimination entrent sinon en conflit du moins en contact avec le respect d’autres droits fondamentaux, en particulier la liberté d’expression. On peut ici rappeler le deuxième alinéa de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme qui autorise expressément la mise en place de restrictions à cette dernière [154].

230Ce conflit potentiel de la loi anti-discrimination avec le respect de libertés fondamentales n’est pas une donnée totalement nouvelle. D’abord parce que cette question s’est déjà posée avec acuité pour la loi anti-racisme de 1981 et la loi anti-négationnisme de 1995, mais aussi parce que la possibilité de conflits entre différentes libertés fondamentales est inhérente à ces libertés, ce qui apparaît de façon variable en fonction des contextes. Il existe ainsi une tension évidente entre la liberté religieuse et la liberté d’expression, et la sphère d’expression de chacune est limitée par l’autre.

231La loi anti-discrimination se révèle n’être ni l’instrument miracle pour instaurer l’égalité que certains avaient pu espérer, ni le texte coercitif et liberticide que d’autres avaient pu craindre. Son application a été freinée par les recours auprès de la Cour d’arbitrage d’abord, par l’annulation partielle par celle-ci ensuite, et par l’absence d’arrêté royal organisant les tests de situation. La transposition imparfaite des directives européennes s’ajoutant à ces deux problèmes, il est raisonnable de conclure que la loi devra être modifiée pour pouvoir sortir son plein effet.

1. Loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme

232* En italiques : les passages annulés par l’arrêt de la Cour d’arbitrage n° 157/2004

CHAPITRE I. - Disposition introductive

233Article 1er. La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.

CHAPITRE II. - Dispositions générales

234Art. 2. § 1er. Il y a discrimination directe si une différence de traitement qui manque de justification objective et raisonnable est directement fondée sur le sexe, une prétendue race, la couleur, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, l'âge, la conviction religieuse ou philosophique, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique.

235§ 2. Il y a discrimination indirecte lorsqu'une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre a en tant que tel un résultat dommageable pour des personnes auxquelles s'applique un des motifs de discrimination visés au § 1er, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne repose sur une justification objective et raisonnable.

236§ 3. L'absence d'aménagements raisonnables pour la personne handicapée constitue une discrimination au sens de la présente loi.

237Est considéré comme aménagement raisonnable l'aménagement qui ne représente pas une charge disproportionnée, ou dont la charge est compensée de façon suffisante par des mesures existantes.

238§ 4 Toute discrimination directe ou indirecte est interdite, lorsqu'elle porte sur :

  • la fourniture ou la mise à la disposition du public de biens et de services ;
  • les conditions d'accès au travail salarié, non salarié ou indépendant, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d'activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion, les conditions d'emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, tant dans le secteur privé que public ;
  • la nomination ou la promotion d'un fonctionnaire ou l'affectation d'un fonctionnaire à un service ;
  • la mention dans une pièce officielle ou dans un procès-verbal ;
  • la diffusion, la publication ou l'exposition en public d'un texte, d'un avis, d'un signe ou de tout autre support comportant une discrimination ;
  • l'accès, la participation et tout autre exercice d'une activité économique, sociale, culturelle ou politique accessible au public.
§ 5. Dans le domaine des relations de travail telles qu'elles sont définies au § 4,2e et 3e tirets, une différence de traitement repose sur une justification objective et raisonnable lorsque, en raison de la nature d'une activité professionnelle ou des conditions de son exercice, la caractéristique en cause constitue une exigence professionnelle essentielle et déterminante, pour autant que l'objectif soit légitime et que l'exigence soit proportionnée.

239§ 6. Le harcèlement est considéré comme une forme de discrimination lorsqu'un comportement indésirable qui est lié aux motifs de discrimination figurant au § 1er a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d'une personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

240§ 7. Tout comportement consistant à enjoindre à quiconque de pratiquer une discrimination à l'encontre d'une personne, d'un groupe, d'une communauté ou de leurs membres pour un des motifs visés au § 1er est considéré comme une discrimination au sens de la présente loi.

241Art. 3. La présente loi ne porte pas atteinte à la protection et à l'exercice des libertés et des droits fondamentaux qui sont mentionnés dans la Constitution et les conventions internationales relatives aux droits de l'homme.

242Art. 4. Les dispositions de la présente loi ne constituent aucunement un empêchement à l'adoption ou au maintien de mesures qui, afin de garantir la pleine égalité dans la pratique, visent à prévenir ou à compenser les désavantages liés à un des motifs visés à l'article 2.

243Art. 5. A l'exception du chapitre III et de l'article 19, §§ 3 et 4, qui restent d'application, les discriminations fondées sur le sexe et qui ont trait aux matières visées à l'article 2, § 4,2e et 3e tirets sont soumises exclusivement aux dispositions de la loi du 7 mai 1999 sur l'égalité de traitement entre hommes et femmes en ce qui concerne les conditions de travail, l'accès à l'emploi et aux possibilités de promotion, l'accès à une profession indépendante et les régimes complémentaires de sécurité sociale.

CHAPITRE III. Dispositions pénales

244Art. 6. § 1er. Est puni d'emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de cinquante EUR à mille EUR ou d'une de ces peines seulement :
– quiconque, dans l'une des circonstances indiquées à l'article 444 du Code pénal, incite à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci, en raison du sexe, de l'orientation sexuelle, de l'état civil, de la naissance, de la fortune, de l'âge, de la conviction religieuse ou philosophique, de l'état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique ;

245- quiconque, dans l'une des circonstances indiquées à l'article 444 du Code pénal, donne une publicité à son intention de recourir à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne, (d'un groupe), d'une communauté ou des membres de celle-ci, en raison du sexe, de l'orientation sexuelle, de l'état civil, de la naissance, de la fortune, de l'âge, de la conviction religieuse ou philosophique, de l'état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique.

246§ 2. Est puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans, tout fonctionnaire ou officier public, tout dépositaire ou agent de la force publique qui, dans l'exercice de ses fonctions, commet une discrimination à l'égard d'une personne, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci sur base du sexe, de l'orientation sexuelle, de l'état civil, de la naissance, de la fortune, de l'âge, de la conviction religieuse ou philosophique, de l'état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique.

247Si l'inculpé justifie qu'il a agi par ordre de ses supérieurs pour des objets du ressort de ceux-ci et sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, les peines sont appliquées seulement aux supérieurs qui ont donné l'ordre.

248Si les fonctionnaires ou officiers publics inculpés d'avoir ordonné, autorisé ou facilité des actes discriminatoires, prétendent que leur signature a été surprise, ils sont tenus en faisant, le cas échéant, cesser l'acte, de dénoncer le coupable ; sinon, ils seront poursuivis personnellement.

249Si l'un des actes discriminatoires susmentionnés est commis au moyen de la fausse signature d'un fonctionnaire public, les auteurs du faux et ceux qui, méchamment ou frauduleusement, en font usage, sont punis de la réclusion de dix ans à quinze ans.

250Art. 7. Dans le Code pénal, un nouvel article 377bis est inséré, rédigé comme suit : « Art. 377bis. Dans les cas prévus par le présent chapitre, le minimum des peines portées par ces articles peut être doublé s'il s'agit d'un emprisonnement, et augmenté de deux ans s'il s'agit de la réclusion, lorsqu'un des mobiles du crime ou du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son sexe, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique (d'un handicap) ou (d'une caractéristique physique). »

251Art. 8. Dans le même Code, un nouvel article 405quater est inséré, rédigé comme suit : « Art. 405quater. Dans les cas prévus par les articles 393 à 405bis, le minimum des peines portées par ces articles peut être doublé s'il s'agit de peines correctionnelles, et augmenté de deux ans s'il s'agit de la réclusion, lorsqu'un des mobiles du crime ou du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de son âge, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique, de son état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique. »

252Art. 9. Dans le même Code, un nouvel article 422quater est inséré, rédigé comme suit : « Art. 422quater. Dans les cas prévus par les articles 422bis et 422ter, le minimum des peines correctionnelles portées par ces articles peut être doublé, lorsqu'un des mobiles du crime ou du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de son âge, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique, de son état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique. »

253Art. 10. Dans le même Code, un nouvel article 438bis est inséré, rédigé comme suit : « Art. 438bis. Dans les cas prévus par le présent chapitre, le minimum des peines portées par ces articles peut être doublé (s'il s'agit de peines correctionnelles) et augmenté de deux ans s'il s'agit de la réclusion, lorsqu'un des mobiles du crime ou du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de son âge, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique, de son état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique. »

254Art. 11. Dans le même Code, un nouvel article 442ter est inséré, rédigé comme suit : « Art. 442ter. Dans les cas prévus par l'article 442bis, le minimum des peines correctionnelles portées par cet article peut être doublé, lorsqu'un des mobiles du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de son âge, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique, de son état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique. »

255Art. 12. Dans le même Code, un nouvel article 453bis est inséré, rédigé comme suit : « Art. 453bis. Dans les cas prévus par le présent chapitre, le minimum des peines correctionnelles portées par ces articles peut être doublé, lorsqu'un des mobiles du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de son âge, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique, de son état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique. »

256Art. 13. Dans le même Code, un nouvel article 514bis est inséré, rédigé comme suit : « Art. 514bis. Dans les cas prévus par les articles 510 à 514, le minimum des peines portées par ces articles peut être doublé s'il s'agit des peines correctionnelles et augmenté de deux ans s'il s'agit de la réclusion, lorsqu'un des mobiles du crime ou du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de son âge, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique, de son état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique. »

257Art. 14. Dans le même Code, un nouvel article 532bis est inséré, rédigé comme suit : « Art. 532bis. Dans les cas prévus par les articles 528 à 532, le minimum des peines portées par ces articles peut être doublé (s'il s'agit de peines correctionnelles) et augmenté de deux ans s'il s'agit de réclusion, lorsqu'un des mobiles du délit est la haine, le mépris ou l'hostilité à l'égard d'une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de son sexe, de son orientation sexuelle, de son état civil, de sa naissance, de son âge, de sa fortune, de sa conviction religieuse ou philosophique, de son état de santé actuel ou futur, d'un handicap ou d'une caractéristique physique. » Sans préjudice de l'application des articles 31 et 32 du Code pénal, les auteurs des infractions visées à l'article 6 pourront être condamnés à l'interdiction, conformément à l'article 33 de ce même Code.

258Art. 16. Les dispositions du livre Ier du Code pénal, sans exception du chapitre VII et de l'article 85, sont applicables aux infractions prévues par la présente loi.

259Art. 17. Sans préjudice des attributions des officiers de police judiciaire, les fonctionnaires désignés par le Roi surveillent le respect des dispositions de la présente loi et de ses arrêtés d'exécution.

260Ces fonctionnaires exercent cette surveillance conformément aux dispositions de la loi du 16 novembre 1972 concernant l'inspection du travail.

CHAPITRE IV – Dispositions civiles

261Art. 18. Sont nulles les clauses d'un contrat contraires aux dispositions de la présente loi, et celles qui prévoient qu'un ou plusieurs contractants renoncent par avance aux droits garantis par la présente loi.

262Art. 19. § 1er. A la demande de la victime de la discrimination ou d'un des groupements visés à l'article 31, le président du tribunal de première instance, ou selon la nature de l'acte, le président du tribunal du travail ou du tribunal de commerce, constate l'existence et ordonne la cessation d'un acte, même pénalement réprimé, constituant un manquement aux dispositions de la présente loi.

263Le président du tribunal peut ordonner la levée de la cessation dès qu'il est prouvé qu'il a été mis fin aux infractions.

264§ 2. Le président du tribunal peut prescrire l'affichage de sa décision ou du résumé qu'il en rédige, pendant le délai qu'il détermine, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur des établissements du contrevenant ou des locaux lui appartenant, et ordonner la publication ou la diffusion de son jugement ou du résumé par la voie de journaux ou de toute autre manière, le tout aux frais du contrevenant.

265Ces mesures de publicité ne peuvent être prescrites que si elles sont de nature à contribuer à la cessation de l'acte incriminé ou de ses effets. § 3. Lorsque la victime de la discrimination ou un des groupements visés à l'article 31 invoque devant la juridiction compétente des faits, tels que des données statistiques ou des tests de situation, qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, la charge de la preuve de l'absence de discrimination incombe à la partie défenderesse.

266§ 4. La preuve de la discrimination fondée sur le sexe, une prétendue race, la couleur, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, l'âge, la conviction religieuse ou philosophique, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique peut être fournie au moyen d'un test de situation qui peut être établi par constat d'huissier. Le Roi détermine par un arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres les modalités d'exécution du test de situation, tel que prévu aux §§ 3 et 4.

267Art. 20. Le juge peut, à la demande de la victime de la discrimination ou d'un des groupements visés à l'article 31, condamner au paiement d'une astreinte l'auteur de la discrimination pour le cas où il ne serait pas mis fin à celle-ci. Le juge statue conformément aux articles 1385bis à 1385novies du Code judiciaire.

268Art. 21. § 1er. L'employeur qui occupe un travailleur qui a introduit, soit au niveau de l'entreprise ou du service qui l'emploie, conformément aux procédures en vigueur, soit auprès de l'Inspection des lois sociales, une plainte motivée ou pour lequel l'Inspection des lois sociales est intervenue, ou qui engage une action en justice, ou pour lequel une action en justice a été engagée en application des dispositions de la présente loi concernant les chances de promotion, les conditions de travail, y compris les conditions de licenciement ou de la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie, ne peut pas mettre fin à la relation de travail, sauf pour des motifs qui sont étrangers à cette plainte ou à cette action en justice.

269§ 2. La charge de la preuve de ces motifs repose sur l'employeur, lorsque le travailleur a été licencié ou si les conditions de travail ont été modifiées de manière unilatérale dans le délai de douze mois suivant l'introduction de la plainte. Cette charge de la preuve repose également sur l'employeur dans le cas de licenciement ou de modification unilatérale des conditions de travail après qu'une action en justice a été engagée, et cela jusqu'à trois mois après que la décision est passée en force de chose jugée.

270§ 3. Lorsque l'employeur met fin à la relation de travail ou modifie de manière unilatérale les conditions de travail en violation des dispositions du § 1er, le travailleur ou l'organisation de travailleurs à laquelle il est affilié peut solliciter sa réintégration dans l'entreprise ou dans le service ou lui laisser exercer sa fonction sous les mêmes conditions que précédemment.

271La requête est introduite par lettre recommandée dans les trente jours de la communication du préavis, du licenciement sans préavis ou de la modification unilatérale des conditions de travail. L'employeur doit se prononcer sur la requête dans les trente jours qui suivent la communication de la lettre.

272L'employeur qui réintègre le travailleur dans l'entreprise ou dans le service ou qui lui laisse exercer sa fonction sous les mêmes conditions que précédemment doit, à la suite du licenciement ou de la modification des conditions de travail, payer la rémunération perdue et verser les cotisations des employeurs et des travailleurs sur cette rémunération.

273§ 4. Lorsque le travailleur, suite à la requête prévue au § 3, alinéa 1er, n'a pas été réintégré ou ne peut pas exercer sa fonction dans les mêmes conditions que précédemment et qu'il a été jugé que le licenciement ou la modification unilatérale des conditions de travail est contraire aux dispositions du § 1er, l'employeur doit verser au travailleur une indemnité qui, au choix du travailleur, est soit équivalente à un montant forfaitaire correspondant à (la rémunération brute) de six mois, soit au dommage réellement causé au travailleur ; dans ce dernier cas, le travailleur doit prouver l'ampleur du dommage causé.

274§ 5. L'employeur est tenu de payer la même indemnité, sans que le travailleur ou l'organisation de travailleurs à laquelle il est affilié doive introduire la requête prévue au § 3, alinéa 1er, pour pouvoir être réintégré ou pouvoir exercer sa fonction aux mêmes conditions que précédemment :

  1. lorsque la juridiction compétente a considéré comme établis les faits de discrimination ;
  2. lorsque le travailleur rompt le contrat d'emploi, parce que le comportement de l'employeur viole les dispositions du § 1er, ce qui constitue selon le travailleur un motif pour rompre le contrat d'emploi sans préavis ou pour y mettre fin avant son expiration ;
  3. lorsque l'employeur a licencié le travailleur pour motif grave, et pour autant que la juridiction compétente a estimé ce licenciement non fondé et en contradiction avec les dispositions du § 1er.
Art. 22. L'action fondée sur l'article 19 est formée et instruite selon les formes du référé.

275Elle est formée par requête, établie en quatre exemplaires et envoyée par lettre recommandée à la poste ou déposée au greffe de la juridiction compétente.

276Sous peine de nullité, la requête contient :

  1. l'indication des jours, mois et année ;
  2. les nom, prénoms, profession et domicile du requérant ;
  3. les nom et adresse de la personne physique ou morale contre laquelle la demande est formée ;
  4. l'objet et l'exposé des moyens de la demande.
Le greffier du tribunal avertit sans délai la partie adverse par pli judiciaire, auquel est joint un exemplaire de la requête, et l'invite à comparaître (au plus tôt trois jours), au plus tard huit jours après l'envoi du pli judiciaire.

277Il est statué sur l'action nonobstant toute poursuite exercée en raison des mêmes faits devant toute juridiction pénale.

278Lorsque les faits soumis au juge pénal font l'objet d'une action en cessation, il ne peut être statué sur l'action pénale qu'après qu'une décision coulée en force de chose jugée a été rendue relativement à l'action en cessation. La prescription de l'action publique est suspendue pendant la surséance.

279Le jugement est exécutoire par provision, nonobstant tout recours et sans caution. Il est communiqué par le greffier de la juridiction, sans délai, à toutes les parties et au procureur du Roi.

CHAPITRE V – Dispositions modificatives

280Art. 23. L'article 2, première phrase, de la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, modifié par la loi du 13 avril 1995, est remplacé par la disposition suivante :
« Art. 2. Le Centre a pour mission de promouvoir l'égalité des chances et de combattre toute forme de distinction, d'exclusion, de restriction ou de préférence fondée sur :

  1. une prétendue race, la couleur, l'ascendance, l'origine nationale ou ethnique ;
  2. l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, l'âge, la conviction religieuse ou philosophique, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique.
Le Centre exerce sa mission dans un esprit de dialogue et de collaboration avec les associations, instituts, organes et services qui, en tout ou en partie, accomplissent la même mission ou sont directement concernés par l'accomplissement de cette mission. »

281Art. 24. L'article 3, alinéa 2,5°, de la même loi, modifié par la loi du 13 avril 1995, est remplacé par la disposition suivante :

282« 5° à ester en justice dans les litiges auxquels pourrait donner lieu l'application de :
- la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie ;
- - la loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l'approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la Seconde guerre mondiale ;
- la loi du 13 avril 1995 contenant des dispositions en vue de la répression de la traite des êtres humains et de la pornographie enfantine ;
- - la loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un centre pour l'égalité des chances et de la lutte contre le racisme. »

283 L'article 578 du Code judiciaire, modifié par les lois du 5 décembre 1968,4 août 1978,17 juillet 1997,13 février 1998,7 mai 1999 et 17 juin 2002, est complété par un 13° rédigé comme suit : « 13° des contestations relatives aux discriminations, au sens de la loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, qui portent sur les conditions d'accès au travail salarié ou non salarié, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d'activité et à tous les niveaux de la hiérarchie professionnelle, y compris en matière de promotion, les conditions d'emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, tant dans le secteur privé que public, à l'exception des relations régies par un statut de droit public. »

284Art. 26. L'article 581 du même Code, remplacé par la loi du 30 juin 1971, et modifié par les lois des 4 août 1978,1er août 1985, l'arrêté royal du 25 septembre 1986 et les lois des 30 décembre 1992 et 7 mai 1999, est complété par un 10° rédigé comme suit : « 10° des contestations relatives aux discriminations, au sens de la loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, qui portent sur les conditions d'accès à un travail indépendant, y compris les critères de sélection et les conditions de recrutement, quelle que soit la branche d'activité, les conditions d'emploi et de travail, y compris les conditions de rupture et de rémunération, tant dans le secteur privé que public. »

285Art. 27. L'article 585 du même Code, modifié par la loi du 11 avril 1989, est complété par un 9° rédigé comme suit :
« 9° les demandes de cessation et il prescrit les mesures de publicité de sa décision qu'il estime nécessaires, en vertu de l'article 19 de la loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme. »

286Art. 28. L'article 587bis inséré dans le même Code par la loi du 19 mars 1991, est remplacé par la disposition suivante :

287« Art. 587bis. Le président du tribunal du travail, saisi par voie de requête, statue sur :
1° les demandes formées en vertu des articles 4 et 5, §§ 3 et 4, de la loi du 19 mars 1991 portant un régime de licenciement particulier pour les délégués du personnel aux conseils d'entreprise et aux comités de sécurité, d'hygiène et d'embellissement des lieux du travail, ainsi que pour les candidats délégués du personnel ;
2° les demandes de cessation et il prescrit les mesures de publicité de sa décision qu'il estime nécessaires, en vertu de l'article 19 de la loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme. »

288 Art. 29. L'article 588 du même Code, modifié par les lois du 24 juin 1970,14 juillet 1971,5 décembre 1984,11 avril 1989 et 4 décembre 1990, est complété par un 13°, rédigé comme suit : « 13° les demandes de cessation et il prescrit les mesures de publicité de sa décision qu'il estime nécessaires, en vertu de l'article 19 de la loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme. »

289Art. 30. A l'article 764, alinéa 1er du même Code, remplacé par la loi du 3 août 1992 et modifié par les lois des 3 août 1992,17 juillet 1997,23 avril 1998 et 17 juin 2002, le 10° est remplacé par la disposition suivante : « 10° les demandes prévues aux articles 578,11° et 12°, 580,581, 582,1°, 2° et 6° et 583 ».

CHAPITRE VI – Disposition finale

290Art. 31. Le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme peut ester en justice dans les litiges auxquels l'application de la présente loi donnerait lieu sauf si la discrimination contestée repose sur le sexe.

291Dans ce dernier cas, l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes créé par la loi du 16 décembre 2002 peut ester en justice dans les litiges auxquels l'application de la présente loi donnerait lieu. Peuvent également ester en justice dans les litiges auxquels l'application de la présente loi donnerait lieu, lorsqu'un préjudice est porté aux fins statutaires qu'ils se sont donnés pour mission de poursuivre :

  1. tout établissement d'utilité publique et toute association, jouissant de la personnalité juridique depuis au moins cinq ans à la date des faits, et se proposant par ses statuts de défendre les droits de l'homme ou de combattre la discrimination ;
  2. les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs, telles qu'elles sont définies à l'article 3 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires ;
  3. les organisations représentatives au sens de la loi du 19 décembre 1974 organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités ;
  4. les organisations représentatives des travailleurs indépendants.
    Toutefois, lorsque la victime de l'infraction ou de la discrimination est une personne physique ou une personne morale, l'action des groupements visés aux premier et second alinéas ne sera recevable que s'ils prouvent qu'ils ont reçu l'accord de la victime.

2. Proposition de loi tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme déposée au Sénat le 31 mars 1999 [155]

292Article premier
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.

CHAPITRE 1er – Dispositions générales

293Art. 2. § 1er . Dans la présente loi, il y a lieu d'entendre par discrimination, les comportements qui, sans autorisation de la loi, ont directement ou indirectement pour but ou pour effet, dans les domaines politique, économique, social ou culturel ou dans tout autre domaine de la vie sociale, d'établir une distinction entre les personnes, les groupes de personnes ou les communautés, fondée sur le sexe, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, l'âge, la fortune, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique, dénuée de justification objective et sans rapport raisonnable et proportionnel avec le but poursuivi.

294La distinction n'est pas objectivement justifiée si elle peut manifestement être remplacée par d'autres mesures d'efficacité supérieure ou comparable, plus respectueuses des personnes concernées.

295§ 2. La présente loi ne s'applique pas à l'organisation interne des communautés religieuses et des organisations philosophiques, reconnues par le Roi.

296Art. 3. La preuve du caractère objectivement justifié d'une distinction et du rapport raisonnable et proportionnel avec le but poursuivi par son auteur est toujours à charge de celui-ci.

CHAPITRE 2 – Dispositions pénales

297Art. 4. § 1. Est puni d'emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de cinquante francs à mille francs ou d'une de ces peines seulement :

  • quiconque, dans l'une des circonstances indiquées à l'article 444 du Code pénal, incite à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard de personnes, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci, en raison des particularités visées à l'article 2 ;
  • quiconque, dans l'une des circonstances indiquées à l'article 444 du Code pénal, donne une publicité à son intention de recourir à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci, en raison des particularités visées à l'article 2.
  • § 2. Est puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans, tout fonctionnaire ou officier public, tout dépositaire ou agent de la force publique qui, dans l'exercice de ses fonctions, commet une discrimination à l'égard d'une personne, d'un groupe, d'une communauté ou des membres de celle-ci.
Si le prévenu ou l'inculpé justifie qu'il a agi par ordre de ses supérieurs pour des objets du ressort de ceux-ci et sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, les peines sont appliquées seulement aux supérieurs qui ont donné l'ordre.

298Si les fonctionnaires ou officiers publics prévenus ou inculpés d'avoir ordonné, autorisé ou facilité des actes discriminatoires, prétendent que leur signature a été surprise, ils sont tenus en faisant, le cas échéant, cesser l'acte, de dénoncer le coupable ; sinon, ils seront punis personnellement.

299Art. 5. Sous réserve des dispositions de l'article 4, lorsque les mobiles d'une infraction sont le sexe, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, l'âge, la fortune, l'état de santé actuel ou futur, un handicap ou une caractéristique physique de la victime, les peines correctionnelles pourront être portées au double, et les peines criminelles augmentées conformément à l'article 54 du Code pénal.

300Art. 6. Sans préjudice de l'application des articles 31 et 32 du Code pénal, les auteurs des infractions visées aux articles 3 et 4 pourront être condamnés à l'interdiction, conformément à l'article 33 de ce même Code.

301Art. 7. Les dispositions du livre Ier du Code pénal, sans exception du chapitre VII et de l'article 85, sont applicables aux infractions prévues par la présente loi.

CHAPITRE III – Dispositions civiles

302Art. 8. Toute discrimination est interdite, et notamment lorsqu'elle consiste en :

  • le refus de fournir un bien ou un service ;
  • l'entrave à l'exercice normal d'une activité économique, sociale, culturelle ou politique ;
  • le refus d'établir un contrat de travail ou la résiliation d'un contrat de travail ;
  • l'entrave à la poursuite d'une carrière professionnelle, ou la détermination des conditions de travail ;
  • le refus de nommer un fonctionnaire ou la détermination de son affectation de service ;
  • la diffusion, la publication ou l'exposition en public d'un texte, d'un avis, d'un signe, ou de tout autre support comportant une discrimination ;
  • une mention dans un acte officiel ou un procès-verbal.
Sans préjudice d'autres sanctions, toute discrimination donne lieu à une réparation sous forme de dommages et intérêts.

303Art. 9. Sont nulles les clauses d'un contrat contraires aux dispositions de la présente loi, et celles qui prévoient qu'un ou plusieurs contractants renoncent par avance aux droits garantis par la présente loi.

304Art. 10. § 1er . À la demande du procureur du Roi, de la victime de la discrimination ou d'un des groupements visés à l'article 12, le président du tribunal de première instance, ou selon la nature de l'acte, le président du tribunal du travail ou du tribunal de commerce, constate l'existence et ordonne la cessation d'un acte, même pénalement réprimé, constituant une infraction aux dispositions de la présente loi.

305Le président du tribunal peut ordonner la levée de la cessation dès qu'il est prouvé qu'il a été mis fin aux infractions.

306§ 2. Le président du tribunal peut prescrire l'affichage de sa décision ou du résumé qu'il en rédige, pendant le délai qu'il détermine, aussi bien à l'extérieur qu'à l'intérieur des établissements du contrevenant ou des locaux lui appartenant, et ordonner la publication ou la diffusion de son jugement ou du résumé par la voie de journaux ou de toute autre manière, le tout aux frais du contrevenant.

307Ces mesures de publicité ne peuvent être prescrites que si elles sont de nature à contribuer à la cessation de l'acte incriminé ou de ses effets.

308Art. 11. Sans préjudice des dommages et intérêts, le juge peut, à la demande de la victime de la discrimination ou d'un des groupements visés à l'article 12, condamner au paiement d'une astreinte l'auteur de la discrimination pour le cas où il ne serait pas mis fin à celle-ci.

309Le juge statue conformément aux articles 1385ter à 1385nonies du Code judiciaire.

310Art. 12. Le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme peut ester en justice dans les litiges auxquels l'application de la présente loi donnerait lieu.

311Peuvent également ester en justice dans les litiges auxquels l'application de la présente loi donnerait lieu, lorsqu'un préjudice est porté aux fins statutaires qu'ils se sont donnés pour mission de poursuivre :

  1. tout établissement d'utilité publique et toute association, jouissant de la personnalité juridique depuis au moins cinq ans à la date des faits, et se proposant par ses statuts de défendre les droits de l'homme ou de combattre la discrimination ;
  2. les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs, telles qu'elles sont définies à l'article 3 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires ;
  3. les organisations représentatives au sens de la loi du 19 décembre 1974 réglant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités ;
  4. les organisations représentatives des travailleurs indépendants.
Toutefois, lorsque la victime de l'infraction ou de la discrimination est une personne physique, l'action des groupements visés aux premier et second alinéas ne sera recevable que s'ils prouvent qu'ils ont reçu son accord.

312Art. 13 § 1er . Les cours et tribunaux statuent toutes affaires cessantes sur les actions civiles exercées en vertu de la présente loi, à l'exception de l'action fondée sur l'article 10.

313§ 2. L'action fondée sur l'article 10 est formée et instruite selon les formes du référé.

314Elle est formée par requête, établie en quatre exemplaires et envoyée par lettre recommandée à la poste ou déposée au greffe de la juridiction compétente.

315Sous peine de nullité, la requête contient :

  1. l'indication des jours, mois et année ;
  2. les nom, prénoms, profession et domicile du requérant ;
  3. les nom et adresse de la personne physique ou morale contre laquelle la demande est formée ;
  4. l'objet et l'exposé des moyens de la demande.
Le greffier du tribunal avertit sans délai la partie adverse par pli judiciaire, auquel est joint un exemplaire de la requête, et l'invite à comparaître au plus tôt trois jours, au plus tard huit jours après l'envoi du pli judiciaire.

316Il est statué sur l'action nonobstant toute poursuite exercée en raison des mêmes faits devant toute juridiction pénale.

317Le jugement est exécutoire par provision, nonobstant tout recours et sans caution. Il est communiqué par le greffier de la juridiction, sans délai, à toutes les parties et au procureur du Roi.

CHAPITRE IV – Dispositions modificatives

318Art. 14. L'article 2 de la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, modifié par la loi du 13 avril 1995, est remplacé par la disposition suivante :

319« Art. 2. Le Centre a pour mission de promouvoir l'égalité des chances et de combattre toute forme de distinction, d'exclusion, de restriction ou de préférence fondée sur :
1º la race, la couleur, l'ascendance, l'origine ou la nationalité ;
2º le sexe, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, l'âge, la fortune, l'état de santé actuel ou futur, un handicap, ou une caractéristique physique. »
« 5º à ester en justice dans les litiges auxquels pourrait donner lieu l'application de :
- la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie ;
- la loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l'approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la Seconde guerre mondiale ;
- la loi du 13 avril 1995 contenant des dispositions en vue de la répression de la traite des êtres humains et de la pornographie enfantine ;
- la loi du ... tendant à lutter contre la discrimination. »

3. Chronologie du processus parlementaire

Sénat

320 14 juillet 1999 Dépôt de la proposition de loi
17 novembre 1999 Envoi en commission de la Justice
Dépôt d’amendements
2 mai 2000 Premier avis du comité d’avis pour l’égalité des chances entre les femmes et les hommes
Dépôt d’amendements
21décembre 2000 Premier avis du Conseil d’État
Dépôt d’amendements
13 juin 2001 Deuxième avis du comité d’avis pour l’égalité des chances entre les femmes et les hommes
Dépôt d’amendements
21 novembre 2001 Adoption de la proposition de loi amendée en commission de la Justice
Dépôt d’amendements
21 décembre 2001 Adoption en plénière de la proposition telle qu’adoptée en commission de la Justice

Chambre

321 27 décembre 2001 Réception du projet de loi adopté par le Sénat
18 février 2002 Deuxième avis du Conseil d’État
Dépôt d’amendements
Avis du Conseil national du travail
16 juillet 2002 Adoption du projet de loi amendé en commission de la Justice
12 septembre 2002 Renvoi en commission de la Justice
Dépôt d’amendements
1er octobre 2002 Adoption du projet de loi amendé en commission de la Justice
Dépôt d’amendements
17 octobre 2002 Adoption en plénière du projet de loi tel qu’adopté en commission de la Justice

Sénat

322 21 octobre 2002 Réception du projet amendé par la Chambre
Dépôt d’amendements
4 décembre 2002 Adoption du projet en commission de la Justice tel que transmis par la Chambre
Dépôt d’amendements
12 décembre 2002 Adoption du projet en séance plénière

Notes

  • [1]
    Moniteur belge, 17 mars 2003 ; errata, Moniteur belge, 13 mai 2003. Cf. le texte de la loi en annexe 1.
  • [2]
    Les circonstances prévues à l’article 444 du Code pénal sont : des réunions ou lieux publics ; en présence de plusieurs individus, dans un lieu non public, mais ouvert à un certain nombre de personnes ayant le droit de s'y assembler ou de le fréquenter ; dans un lieu quelconque, en présence de la personne offensée et devant témoins ; par des écrits imprimés ou non, des images ou des emblèmes affichés, distribués ou vendus, mis en vente ou exposés aux regards du public ; par des écrits non rendus publics, mais adressés ou communiqués à plusieurs personnes.
  • [3]
    L’arrêt de la Cour d’arbitrage semble avoir pour conséquence d’élargir la mission du Centre à toute forme de discrimination, au-delà des critères énoncés par la loi dont la liste a été annulée par l’arrêt de la Cour. Cf. page 40.
  • [4]
    Cf. M. VINCINEAU (coordinateur), Le sida, stimulateur des discriminations, Bruxelles, Bruylant, 2002.
  • [5]
    D’après P. BORGHS, De antidiscriminatiewet. Handleiding bij de Wet ter Bestrijding van Discriminatie, Antwerpen, 2003, pp. 61-63.
  • [6]
    Proposition de loi tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme, Sénat, Doc. parl. 1-1341/1 (1998-1999), 31 mars 1999. Cf. le texte de la proposition de loi en annexe 2.
  • [7]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/1 (1999), 14 juillet 1999.
  • [8]
    Décision du Conseil 2000/750/CE.
  • [9]
    JO L 373,21 décembre 2004, p. 0037-0043.
  • [10]
    Commission européenne, DG Emploi et affaires sociales, Rapport annuel sur l’égalité et la non-discrimination, 2004, p. 7.
  • [11]
    Le protocole numéro 12 n’a cependant pas encore été ratifié par la Belgique.
  • [12]
    Cf. J. JACQMAIN : « La loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993… Et omnia discriminatio », Journal du droit des jeunes, n° 227, septembre 2003, pp. 18-23.
  • [13]
    La chronologie du processus parlementaire figure en annexe 3.
  • [14]
    Le comité d’avis pour l’égalité des chances entre les femmes et les hommes a été créé au sein du Sénat en janvier 1996 en vue de faire respecter l’égalité des chances entre les femmes et les hommes tant dans la législation que dans le fonctionnement du Sénat.
  • [15]
    Le Conseil de l’égalité des chances entre hommes et femmes est un organe fédéral consultatif qui a pour tâche de contribuer efficacement à l’élimination de toutes les discriminations vis-à-vis des hommes et des femmes et à la réalisation de l’égalité effective entre les deux sexes. Il a été créé par l’arrêté royal du 15 février 1993.
  • [16]
    Avis du 7 mars 2000 du bureau du Conseil de l’égalité des chances entre hommes et femmes concernant la proposition de loi tendant à lutter contre la discrimination.
  • [17]
    Ce sera la directive 2004/113 CE, cf. infra.
  • [18]
    Avis de la Direction de l’Égalité des chances relatif à la proposition de loi tendant à lutter contre la discrimination, s.d.
  • [19]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/3 (1999-2000), 2 mai 2000.
  • [20]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/2 (1999-2000), 28 mars 2000.
  • [21]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000.
  • [22]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (1999-2000), 6 janvier 2001.
  • [23]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/9 (2000-2001), 13 juin 2001.
  • [24]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (1999-2000), 10 juillet 2001.
  • [25]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/10 (1999-2000), 21 juin 2001.
  • [26]
    Ce sera la loi du 16 décembre 2002 portant création de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes.
  • [27]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/12 (1999-2000), 12 juillet 2001.
  • [28]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/18 (1999-2000), 19 décembre 2001.
  • [29]
    Sénat, Ann. parl. 2-168 (2000-2001), 20 décembre 2001.
  • [30]
    Chambre, Doc. parl. 50-1578/002 (20001-2002), 18 février 2002.
  • [31]
    Chambre, Doc. parl. 50-1407/005 (2001-2002), 12 juillet 2002.
  • [32]
    Chambre, Doc. parl. 50-1578/003 (20001-2002), 22 mai 2002.
  • [33]
    Chambre, Doc. parl. 50-1578/004 (2001-2002), 29 mai 2002.
  • [34]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000.
  • [35]
    Loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie, article premier, alinéa 1er.
  • [36]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [37]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [38]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/15 (2000-2001), 18 décembre 2001, pp. 26-28.
  • [39]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (2000-2001), 10 juillet 2001.
  • [40]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/12 ( 2000-2001), 12 juillet 2001.
  • [41]
    Chambre, Doc. parl. 50-1578/002 (2001-2002), 18 février 2002, p. 5.
  • [42]
    Chambre, Doc. parl. 50-1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [43]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/10 (2000-2001), 21 juin 2001.
  • [44]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/14 (2001-2002), 21 novembre 2001.
  • [45]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/15 (2001-2002), 18 décembre 2001.
  • [46]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/14 (2001-2002), 21 novembre 2001.
  • [47]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [48]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/005 ( 2001-2002), 12 juin 2002.
  • [49]
    Sénat, Doc. parl. 1-1341/1 (1998-1999), 31 mars 1999.
  • [50]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000.
  • [51]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/15 (2001-2002), 18 décembre 2001, p. 39. Il n’est pas évident de comprendre en quoi cela détournerait la loi de son objectif. En tout état de cause, la loi anti-discrimination a été invoquée dans une affaire semblable, cf. infra.
  • [52]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [53]
    Cf. infra, p. 27.
  • [54]
    Chambre, Doc. parl. 50 1407/005 (2001-2002), 12 juillet 2002, p. 40.
  • [55]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/013 (2002-2003), 16 octobre 2002.
  • [56]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/20 (2002-2003), 5 novembre 2002.
  • [57]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [58]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (2000-2001), 10 juillet 2001. À noter que le protocole n° 12, qui prévoit également la langue et l’appartenance à une minorité nationale parmi les bases de discrimination interdite n’a pas encore été ratifié par la Belgique.
  • [59]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001. Cet amendement a été modifié par le sous-amendement 116 qui en a inversé l’ordre des paragraphes.
  • [60]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/10 (2000-2001), 21 juin 2001 ; Chambre, Doc. parl. 50 1578/004 (2001-2002), 29 mai 2002, et 50 1578/005 (2001-2002), 12 juin 2002.
  • [61]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000.
  • [62]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/1 (1999), 14 juillet 1999, p. 5.
  • [63]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000, p. 10.
  • [64]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/7 (2000-2001), 23 mai 2001.
  • [65]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (2000-2001), 10 juillet 2001.
  • [66]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/1 (1999), 14 juillet 1999.
  • [67]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/1 (1999), 14 juillet 1999, p. 5.
  • [68]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000, p.12.
  • [69]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [70]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/7 (2000-2001), 23 mai 2001.
  • [71]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (2000-2001), 10 juillet 2001.
  • [72]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/10 (2000-2001), 21 juin 2001.
  • [73]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (2000-2001), 10 juillet 2001.
  • [74]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/10 (2000-2001), 21 juin 2001.
  • [75]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/15 (2000-2001), 18 décembre 2001, p. 146.
  • [76]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/18 (2000-2001), 19 décembre 2001.
  • [77]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/005 (2001-2002), 12 juin 2002.
  • [78]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/20 (2002-2003), 5 novembre 2002.
  • [79]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [80]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [81]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [82]
    Chambre, Doc. parl. 50 1407/005,12 juillet 2002, p. 37.
  • [83]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [84]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [85]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [86]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [87]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [88]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [89]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (2000-2001), 10 juillet 2001.
  • [90]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/15 (2001-2002), 18 décembre 2001, p. 167.
  • [91]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [92]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [93]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000.
  • [94]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/4 (1999-2000), 12 juillet 2000.
  • [95]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2001-2002), 6 janvier 2001.
  • [96]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/002,18 février 2002
  • [97]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [98]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/14 (2001-2002), 21 novembre 2001.
  • [99]
    Chambre, Doc. parl. 50 1578/003 (2001-2002), 22 mai 2002.
  • [100]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/6 (2000-2001), 6 janvier 2001.
  • [101]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/11 (2000-2001), 10 juillet 2001.
  • [102]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/10 (2000-2001), 21 juin 2001.
  • [103]
    Sénat, Doc. parl. 2-12/5 (2000-2001), 21 décembre 2000.
  • [104]
    Sénat, Ann. parl. 2-170,21 décembre 2001
  • [105]
    Chambre, Ann. parl. CRIV 50 PLEN 277,16 octobre 2002.
  • [106]
    Chambre, Ann. parl. CRIV 50 PLEN 278,17 octobre 2002.
  • [107]
    Sénat, Ann. parl. 2/251,12 décembre 2002.
  • [108]
    Depuis l’adoption de la directive 2004/113/CE du 13 décembre 2004, la législation européenne interdit également toute discrimination basée sur le genre dans la fourniture des biens et services.
  • [109]
    Discussion générale au Sénat le 12 décembre 2002.
  • [110]
    Centre pour l’Égalité des chances, communiqué de presse du 13 décembre 2002.
  • [111]
    De Morgen, 22 décembre 2002.
  • [112]
    La Libre Belgique, 4 novembre 2002.
  • [113]
    La Libre Débats, La Libre Belgique, 18 mars 2002.
  • [114]
    Propos d’A. REA, Le Vif/L’Express, 8 février 2002.
  • [115]
    FEB, Communiqué de presse du 18 mars 2003.
  • [116]
    La Libre Belgique, 27 mars 2003.
  • [117]
    Éditorial de l’organe du Syndicat national des propriétaires Le Cri, février 2003, n° 271.
  • [118]
    Arrêt n°157/2004.
  • [119]
    P. JOASSART, « La loi anti-discrimination et l’arrêt de la Cour d’arbitrage. Une victoire pour le Vlaams Blok ? », Journal des procès, n° 493,31 décembre 2004, p. 8.
  • [120]
    De Standaard, 7 octobre 2004 ; Le Soir, 7 octobre 2004.
  • [121]
    Communiqué de presse de l’UNIZO, 23 mars 2005.
  • [122]
    La Libre Belgique, 25 et 26-28 mars 2005 ; Le Soir, 26-28 mars 2005.
  • [123]
    De Standaard, 23 mai 2005.
  • [124]
    De Standaard, 25 avril 2005.
  • [125]
    Communiqué de presse du MRAX, de la Ligue des droits de l’homme et de la Liga voor Mensenrechten du 24 mars 2005.
  • [126]
    Loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme, Moniteur belge, ultérieurement modifiée par les lois du 13 avril 1995 (Moniteur belge, 25 avril 1995), du 20 janvier 2003 (Moniteur belge, 12 février 2003) et du 25 février 2003 (loi anti-discrimination).
  • [127]
    Centre pour l’Égalité des chances et la lutte contre le racisme, Rapport annuel 2002, p. 141.
  • [128]
    Centre pour l’Égalité des chances et la lutte contre le racisme, Rapport annuel 2003, pp. 61-78 et Rapport annuel 2004, pp. 15-23.
  • [129]
    Centre pour l’Égalité des chances et la lutte contre le racisme, Rapport annuel 2004, pp. 15-16.
  • [130]
    Loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie et loi du 23 mars 1995 tendant à réprimer la négation, la minimisation, la justification ou l’approbation du génocide commis par le régime national-socialiste allemand pendant la Seconde guerre mondiale.
  • [131]
    Il s’agit de l’entreprise Feryn à Kapelle-op-den-Bos. De Standaard, 28 avril 2005 ; La Libre Belgique, 29 avril 2005.
  • [132]
    Moniteur belge, 31 décembre 2002.
  • [133]
    Plan de développement de l’Institut pour l’Égalité des femmes et des hommes, Bruxelles, sd, p. 11.
  • [134]
    Arrêté royal du 8 octobre 1998, Moniteur belge, 27 octobre 1998.
  • [135]
    Jugement du tribunal de commerce de Bruxelles, 7 mars 2005, AC 6952/2004, asbl Test-achats contre SA DKV Belgium. L’Écho, 19 et 20 mars 2005.
  • [136]
    La Libre Belgique, 28 avril 2005 ; De Standaard, 28 avril 2005.
  • [137]
    Tribunal de première instance de Bruxelles, 3 juin 2005, n° 05/1289/A du rôle des référés.
  • [138]
    De Standaard, 22 mars 2005.
  • [139]
    Cour d’appel d’Anvers, 6e Chambre, affaire 2004/AR/2811,14 juin 2005. La Libre Belgique, 16 juin 2005.
  • [140]
    Le Soir, 9 mars 2005.
  • [141]
    Moniteur belge, 2 août 2005.
  • [142]
    Vers l’Avenir, 31 mars 2003.
  • [143]
    Le Soir, 2-3 octobre 2004.
  • [144]
    D. DE PRINS, S. SOTTIAUX, J. VRIELINK, Handboek discriminatierecht, Kluwer, 2005.
  • [145]
    J. DE WITTE, De Standaard, 23 juin 2005.
  • [146]
    JOCE, 19 juillet 2000.
  • [147]
    JOCE, 2 décembre 2000.
  • [148]
    Decreet houdende evenredige participatie op de arbeidsmark (8 mai 2002), ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale relative à la gestion mixte du marché de l’emploi dans la région de Bruxelles-Capitale (26 juin 2003), décret de la Communauté germanophone relatif à la garantie de l’égalité de traitement sur le marché du travail (17 mai 2004), décret de la Communauté française relatif à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement (19 mai 2004), décret de la Région wallonne relatif à l’égalité de traitement en matière d’emploi et de formation professionnelle (27 mai 2004).
  • [149]
    Sur ce point, cf. S. VAN DROOGHENBROECK, « La non-discrimination dans les rapports entre particuliers : de nouvelles données », in M. PÂQUES et J.-C. SCHOLSEM (coord.), L’égalité : nouvelle(s) clé(s) du droit ?, Larcier, 2004.
  • [150]
    Il n’est évidemment pas interdit qu’une loi qui transpose une directive prévoie un niveau de protection supérieur à celui requis par la directive. Cependant, dans le cas de la loi antidiscrimination, cela a compliqué la rédaction de la loi. Par exemple, l’interdiction de la différence de traitement basée sur l’âge dans la fourniture d’un service, qui n’est pas prévue par la directive européenne, souffre évidemment plus d’exceptions que l’interdiction d’un traitement différent basé sur l’origine ethnique, prévu par la directive.
  • [151]
    Avant l’annulation partielle par la Cour d’arbitrage, ce paragraphe se lisait « il y a une discrimination directe si une différence de traitement qui manque de justification objective et raisonnable est directement fondée sur le sexe, une prétendue race, etc. » ce qui ne rencontrait pas non plus, semble-t-il, le prescrit de la directive européenne.
  • [152]
    Une telle liste avait été déterminée par arrêté royal en ce qui concerne la loi de 1999 sur l’égalité homme-femme.
  • [153]
    Note de politique générale du ministre de la Fonction publique, de l’Intégration sociale, de la Politique des grandes villes et de l’égalité des chances, Chambre, Doc. parl., 51 1371/014 (2004-2005), 12 novembre 2004, pp. 109-11.
  • [154]
    « L’exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir l’autorité ou l’impartialité du pouvoir judiciaire. »
  • [155]
    Sénat, Doc. parl. 1-1341/1 (1998-1999), 31 mars 1999, déposée par Roger Lallemand, Nadia Merchiers, Guy Verhofstadt, Pierre Jonckheer, Eddy Boutmans, Bert Anciaux, Fred Erman et Philippe Mahoux ; Sénat, Doc. parl. 2-12/1 (1999), 14 juillet 1999, déposée par Philippe Mahoux, Iris Van Riet, Chokri Mahassine, Marie Nagy et Frans Lozie.
Français

Résumé

La loi anti-discrimination est entrée en vigueur le 27 mars 2003. Elle interdit toute discrimination, directe ou indirecte, portant non seulement sur l’accès à l’emploi et les conditions de travail, sur la fourniture des biens et services, mais aussi sur la participation à toute activité économique, sociale, culturelle ou politique accessible au public.
Elle élargit la compétence du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme aux discriminations non raciales, à l’exception de la discrimination fondée sur le sexe, qui est de la compétence de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes.
La loi anti-discrimination est l’aboutissement d’une discussion de près de quatre ans. Elle se trouve à la rencontre de deux processus. L’un, dû à l’initiative de parlementaires et d’associations de promotion de l’égalité des droits, visait à renforcer l’arsenal législatif belge tout en contribuant à l’évolution des mentalités vers plus d’acceptation des différences. L’autre, soutenu par le gouvernement fédéral, avait pour objet la transposition de deux directives européennes.
Caroline Sägesser expose le contenu de la loi, en retrace la genèse et le processus parlementaire. Elle présente ensuite l’accueil réservé à la loi, l’arrêt de la Cour d’arbitrage qui a annulé certaines de ses dispositions, élargissant ainsi considérablement sa portée, et le projet d’arrêté d’application organisant les tests de situation. Elle examine encore l’application de la loi depuis son entrée en vigueur.

  1. INTRODUCTION
  2. 1. LE CONTENU DE LA LOI
    1. 1.1. LES DÉFINITIONS
    2. 1.2. LES DISPOSITIONS PÉNALES
    3. 1.3. LES DISPOSITIONS CIVILES
    4. 1.4. AUTRES DISPOSITIONS
  3. 2. LA GENÈSE DE LA LOI
    1. 2.1. LES PREMIÈRES PROPOSITIONS DE LOI
    2. 2.2. LE CADRE EUROPÉEN ET INTERNATIONAL
    3. 2.3. LA POLITIQUE DU GOUVERNEMENT VERHOFSTADT I
  4. 3. LE PROCESSUS PARLEMENTAIRE
    1. 3.1. LA LISTE DES DISCRIMINATIONS INTERDITES
      1. 3.1.1. L’opportunité de conserver le sexe parmi les motifs de discrimination visés
      2. 3.1.2. Le motif de l’origine ethnique ou raciale
      3. 3.1.3. Le handicap
      4. 3.1.4. Les orientations philosophiques et les opinions politiques
      5. 3.1.5. L’âge
      6. 3.1.6. La liste définitive des motifs de discrimination
    2. 3.2. LE CHAMP D’APPLICATION DE LA LOI
      1. 3.2.1. Le respect des libertés fondamentales
      2. 3.2.2. L’exception en faveur des cultes
      3. 3.2.3. Les relations de travail
      4. 3.2.4. Le souci de ne pas interdire les actions positives
    3. 3.3. LES PROCÉDURES JUDICIAIRES
      1. 3.3.1. L’incrimination de la discrimination indirecte
      2. 3.3.2. L’injonction à discriminer
      3. 3.3.3. Le « renversement » de la charge de la preuve
      4. 3.3.4. Les tests de situation
      5. 3.3.5. Le harcèlement
    4. 3.4. LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES
    5. 3.5. L’ADOPTION DE LA LOI
  5. 4. L’ACCUEIL RÉSERVÉ À LA LOI
    1. 4.1. LES PREMIÈRES RÉACTIONS
    2. 4.2. LES RECOURS EN ANNULATION
    3. 4.3. L’ARRÊTÉ D’APPLICATION ORGANISANT LES TESTS DE SITUATION
  6. 5. L’APPLICATION DE LA LOI
    1. 5.1. L’ACTION DU CENTRE POUR L’ÉGALITÉ DES CHANCES
    2. 5.2. L’INSTITUT POUR L’ÉGALITÉ DES FEMMES ET DES HOMMES
    3. 5.3. LES AUTRES ACTEURS
    4. 5.4. LES ACTIONS JUDICIAIRES
  7. 6. LA TRANSPOSITION DES DIRECTIVES EUROPÉENNES ET LA RÉPARTITION DES COMPÉTENCES
  8. 7. PERSPECTIVES
La loi anti-discrimination est entrée en vigueur le 27 mars 2003. Elle interdit toute discrimination, directe ou indirecte, portant non seulement sur l’accès à l’emploi et les conditions de travail, sur la fourniture des biens et services, mais aussi sur la participation à toute activité économique, sociale, culturelle ou politique accessible au public. Elle élargit la compétence du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme aux discriminations non raciales, à l’exception de la discrimination fondée sur le sexe, qui est de la compétence de l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes. La loi anti-discrimination est l’aboutissement d’une discussion de près de quatre ans. Elle se trouve à la rencontre de deux processus. L’un, dû à l’initiative de parlementaires et d’associations de promotion de l’égalité des droits, visait à renforcer l’arsenal législatif belge tout en contribuant à l’évolution des mentalités vers plus d’acceptation des différences. L’autre, soutenu par le gouvernement fédéral, avait pour objet la transposition de deux directives européennes. Caroline Sägesser expose le contenu de la loi, en retrace la genèse et le processus parlementaire. Elle présente ensuite l’accueil réservé à la loi, l’arrêt de la Cour d’arbitrage qui a annulé certaines de ses dispositions, élargissant ainsi considérablement sa portée, et le projet d’arrêté d’application organisant les tests de situation. Elle examine encore l’application de la loi depuis son entrée en vigueur.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2005
https://doi.org/10.3917/cris.1887.0005
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