CAIRN.INFO : Matières à réflexion

INTRODUCTION

1 La Région de Bruxelles-Capitale occupe une place particulière dans l’édifice institutionnel belge. Elle doit concilier la défense des intérêts de sa population avec son rôle de capitale. Elle est en outre organisée sur la base de deux groupes linguistiques officiellement reconnus – le groupe français et le groupe néerlandais – qui participent à sa gestion. Nous avons voulu analyser les débats parlementaires bruxellois de la législature qui vient de s’achever sous l’angle de ces deux contraintes. Nous nous sommes également interrogé sur la façon dont la majorité avait fonctionné alors que, du côté francophone, l’absence d’Écolo rendait le rapport de forces défavorable au PS par rapport à son partenaire. Quelques grandes thématiques nous ont paru de nature à nous éclairer dans cette triple préoccupation : les relations communautaires, la fiscalité, la mobilité, qui seront traitées dans la présente livraison du Courrier hebdomadaire. Les nuisances sonores dues au survol aérien de Bruxelles ainsi que la politique de l’eau et la Cobru seront traitées dans une livraison ultérieure.

2 Rappelons le contexte politique dans lesquels ces débats ont eu lieu. Dans le groupe linguistique français, les élections régionales bruxelloises du 13 juin 1999 furent marquées par le succès d’Écolo qui, avec 18,3 % des votes et 14 sièges, devenait la deuxième force bruxelloise. La Fédération PRL FDF restait en tête avec 27 élus, le PS tombait à la troisième place avec 13 élus et le PSC n’obtenait que 6 élus. Deux formations d’extrême droite, le Front national (2 élus) et le Front nouveau de Belgique (1 élu) étaient représentées au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, ainsi que le parti Vivant (1 élu). Dans le groupe linguistique néerlandais, le Vlaams Blok devenait la première force (4 élus), devant le CVP (3 élus), le cartel VLD-VU-O (2 élus) et le cartel SP-Aga (2 élus).

3 Il était indispensable que le CVP, le cartel VLD-VU-O et le cartel SP-Aga s’unissent pour constituer une majorité sans le Vlaams Blok dans le groupe linguistique néerlandais. Durant la législature 1999-2004, la Région de Bruxelles-Capitale fut donc la seule entité où le CVP participa au gouvernement.

4 Du côté francophone, la négociation en vue de former un gouvernement réunit la Fédération PRL FDF, Écolo et le PS. L’accord qui en résulta portait la marque de ces trois formations. Il avait été élaboré dans un rapport de forces équivalent entre la droite et la gauche de l’échiquier politique bruxellois. Toutefois, Écolo, ne se voyant offrir qu’un poste de secrétaire d’État, refusa de participer au pouvoir à la Région de Bruxelles-Capi-tale alors qu’il entrait aux gouvernements fédéral, wallon et de la Communauté française. La majorité francophone bruxelloise fut donc constituée de la Fédération PRL FDF et du PS.

5 L’article 9 du règlement du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale fut modifié le 19 juillet 1999 afin de permettre au PSC, qui avait obtenu 6 sièges sur 64 dans le groupe linguistique français, de constituer un groupe politique. En effet, le règlement du Conseil prévoit que pour constituer un groupe politique, les élus d’une même liste doivent disposer de 10% des sièges du groupe linguistique correspondant. Auparavant, en cas de fraction d’unité, le chiffre obtenu était arrondi à l’unité supérieure. Avec cette modification, le chiffre était arrondi à l'unité inférieure.

6 Magda De Galan (PS) fut élue à la présidence du Conseil et Jan Béghin (CVP) à la première vice-présidence.

7 Il est à noter que durant la législature 1999-2004 plusieurs groupes politiques changèrent de dénomination : le 5 octobre 2001, le groupe CVP devenait le groupe CD&V ; le 30 novembre 2001, le groupe VLD-VU-O devenait le groupe VLD-Spirit et le 3 juillet 2002, le groupe VLD ; le 29 mars 2002, le groupe PRL-FDF se transformait en groupe MR ; le 24 mai 2002, le groupe PSC prenait l’appellation de groupe CDH.

8 Alors que la liste PRL-FDF avait été conduite par Armand De Decker, ce fut Jacques Simonet, élu au Parlement fédéral, qui accéda au poste de ministre-président de la Région de Bruxelles-Capitale. Le gouvernement bruxellois fut constitué comme suit :

  • Jacques Simonet (PRL-FDF), ministre-président, chargé des Pouvoirs locaux, de l’Aménagement du Territoire, des Monuments et Sites, de la Rénovation urbaine et de la Recherche scientifique ;
  • Jos Chabert (CVP), ministre, chargé des Travaux publics, du Transport de la Lutte contre l’incendie et de l’Aide médicale urgente ;
  • Éric Tomas (PS), ministre, chargé de l’Emploi, de l’Économie, de l’Énergie et du Logement ;
  • Annemie Neyts-Uyttebroeck ( VLD-VU-O), ministre, chargée des Finances, du
    Budget, de la Fonction publique et des Relations extérieures ;
  • Didier Gosuin (PRL-FDF), ministre, chargé de l’Environnement et de la Politique de l’eau, de la Conservation de la Nature, de la Propreté publique et du Commerce extérieur ;
  • Éric André (PRL-FDF), secrétaire d’État, chargé de l’Aménagement du Territoire, du
    Transport rémunéré de personnes, des Monuments et Sites, de la Régie foncière et de la Rénovation urbaine ;
  • Robert Delathouwer (SP-Aga), secrétaire d’État, chargé de la Fonction publique, de la
    Lutte contre l’Incendie et de l’Aide médicale urgente et de la Mobilité (sauf travaux d’infrastructures) ;
  • Alain Hutchinson (PS), secrétaire d’État, chargé du Logement.
Le gouvernement connut plusieurs remaniements au cours de la législature. Le poste de ministre-président changea ainsi trois fois de titulaire. Le 18 octobre 2000, François-Xavier de Donnea (PRL-FDF) devenait ministre-président à la place de Jacques Simonet. Le 6 juin 2003, Daniel Ducarme (PRL-FDF) devenait à son tour ministre-président. Jacques Simonet reprenait cette fonction le 18 février 2004. D’autres remplacements intervinrent : le 18 octobre 2000, Guy Vanhengel (VLD-VU-O) prenait la place d’Annemie Neyts-Uyttebroeck et Willem Draps remplaçait Éric André en tant que secrétaire d’État ; le 15 septembre 2003, Pascal Smet (SP-Aga) accédait au poste de secrétaire d’État en lieu et place de Robert Delathouwer.

9 Au cours de la législature 1999-2004 intervint la réforme de l’État issue des accords du Lambermont (17 octobre 2000 et 23 janvier 2001) et du Lombard (29 avril 2001). Le contenu de ces accords fut intégré dans les lois spéciales de réformes institutionnelles du 13 juillet 2001. Ces négociations institutionnelles ne furent pas sans conséquences sur le débat politique bruxellois, que ce soit en amont – groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises- ou en aval – débat fiscal, Cobru (groupe de travail réunissant les principales personnalités politiques bruxelloises chargé d’une réflexion sur l’avenir des institutions bruxelloises et, plus particulièrement, d’étudier les rapports Régioncommunes, à la lumière des nouveaux transferts de compétences).

1. LES RELATIONS COMMUNAUTAIRES

10 Dans son préambule, l’accord politique régional bruxellois de 1999 soulignait que la Région de Bruxelles-Capitale s’était affirmée comme Région à part entière et comme un lien entre les régions et les communautés. Il fallait donc préserver le statut d’autonomie de la Région de Bruxelles-Capitale pour ne pas porter atteinte aux équilibres institutionnels de la Belgique fédérale et aux intérêts de la population bruxelloise. L’accord bruxellois faisait référence à l’accord gouvernemental fédéral qui précisait que la conférence prévue au niveau fédéral pour traiter des problèmes institutionnels s’engageait à exécuter les solutions retenues par consensus entre les Bruxellois des deux communautés linguistiques. Les négociateurs de l’accord du gouvernement bruxellois s’engageaient donc à mettre sur pied dès la rentrée parlementaire de 1999 un groupe de travail paritaire sous la présidence du formateur de ce gouvernement – François-Xavier de Donnea – « qui regrouperait des représentants, parlementaires ou dirigeants des diverses formations politiques démocratiques de la région ». L’objectif était de mettre au point ensemble les solutions permettant d’assurer le bon fonctionnement des composantes communautaires des institutions bruxelloises et d’éviter le blocage de celles-ci. Dans ce cadre, une attention particulière devait être consacrée au problème de la représentation du groupe néerlandophone dans le Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. Les deux communautés devaient faire un effort pour financer les discriminations positives en faveur des écoles francophones et néerlandophones de la Région dont la population scolaire nécessitait une attention et un encadrement particuliers et plus spécialement celles qui étaient situées dans des quartiers fragilisés. Cet effort devait être financé, conformément à la loi spéciale, par des tirages de la Commission communautaire française (Cocof) et de la Vlaamse Gemeenschapscommissie (VGC) sur le budget de la région à concurrence de 840 millions en 2000 et de 1 milliard en 2001  [1]. Les questions de la représentation flamande au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale et du financement régional des commissions communautaires suscitèrent de vifs débats au sein du groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises et au Conseil régional.

11 Constitué le 26 octobre 1999, le groupe de travail sur les institutions bruxelloises prévu par la déclaration gouvernementale était composé de représentants des diverses formations démocratiques bruxelloises. Il connut deux phases de travail : la première, dont les réunions furent placées sous la présidence de François-Xavier de Donnea, eut lieu du 26 octobre 1999 jusqu’au 3 avril 2000  [2]. La seconde, qui vit Daniel Ducarme prendre la place de François-Xavier de Donnea à la présidence, se déroula du 23 mars au 29 avril 2001 et déboucha sur l’accord du Lombard  [3]. Les dispositions de celui-ci furent intégrées, pour l’essentiel, dans la loi spéciale du 13 juillet 2001 portant transfert de diverses compétences aux régions et aux communautés  [4].

12 Suite au refus de plusieurs parlementaires de la Volksunie de voter la réforme de l’État de 2001, le gouvernement fédéral se retourna vers le PSC en vue d’obtenir l’abstention de celui-ci lors du vote sur les lois spéciales qui concrétisaient les accords du Lambermont et du Lombard. Après un accord intra-francophone relatif à l’affectation des nouveaux moyens destinés à la Communauté française (5 juin 2001), un accord impliquant le pouvoir fédéral intervint dans la nuit du 27 au 28 juin 2001. Pour prix de son abstention, le PSC obtenait :

  • la promesse du gouvernement fédéral de ratifier la convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales. Cependant, la notion de minorité devait être négociée en conférence interministérielle de politique étrangère associant tous les exécutifs du pays ;
  • la création d’un fonds budgétaire fédéral qui serait alimenté d’un budget annuel de l’ordre de 3 milliards de francs belges pour favoriser et promouvoir le rôle international et la fonction de capitale de Bruxelles. Auparavant, le montant accordé à cette fin dans le cadre de l’accord de coopération du 15 septembre 1993 entre l’État fédéral et la Région de Bruxelles-Capitale était négocié chaque année. La création d’un fonds permet en outre de reporter d’année en année les budgets non engagés  [5].
En dehors des points abordés dans le groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises, le débat communautaire porta aussi sur les questions du bilinguisme de la Région bruxelloise, sur les relations de la région avec les autres entités fédérées, sur le statut de la Région de Bruxelles-Capitale dans la Belgique fédérale et sur la ratification de la convention-cadre du Conseil de l’Europe sur la protection des minorités nationales.

1.1. L’ACCORD DE COURTOISIE LINGUISTIQUE

13 Des parlementaires flamands tels que Brigitte Grouwels (CVP) ou Sven Gatz (VLD-VU-O) se montrèrent très vigilants tout au long de la législature sur le bilinguisme des services communaux et régionaux et multiplièrent les questions sur divers sujets à ce propos. Mais la grande majorité des débats relatifs au bilinguisme portèrent sur l’application de l’accord de courtoisie linguistique.

14 Conclu les 14 et 27 novembre 1996 et traduit le 20 novembre 1997 sous la forme de circulaires du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale et du collège réuni de la Commission communautaire commune adressées aux communes et aux centres publics d’aide sociale, l’accord de courtoisie linguistique prévoyait que le recrutement de contractuels dans les pouvoirs locaux devrait se faire prioritairement au sein d’une réserve de recrutement de personnel créée au sein de l’ORBEM, constituée de titulaires du brevet linguistique du Secrétariat permanent de recrutement (SPR, devenu SELOR). Au cas où un pouvoir local aurait besoin d’un candidat dont le profil ne se trouverait pas dans la réserve, il pourrait recruter une personne en dehors de cette réserve. Une personne recrutée de la sorte devrait cependant faire la preuve de la connaissance de la seconde langue nationale dans un délai de deux ans. Le contenu des examens linguistiques devait être adapté à l’exécution des tâches et aux exigences de l’accueil des usagers dans les pouvoirs locaux, tout en garantissant un degré de connaissance linguistique rencontrant les exigences de la fonction  [6].

15 Alors qu’en août 2000 les circulaires furent prolongées dans leurs effets par le gouvernement bruxellois et le collège réuni de la Commission communautaire commune, l’accord de courtoisie linguistique fit l’objet d’interpellations au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale de Dominiek Lootens-Stael (Vlaams Blok), Sven Gatz (VLD-VU-O) et Jean-Pierre Cornelissen (PRL-FDF) le 10 novembre 2000. Dominiek Lootens-Stael considérait qu’avec les accords de courtoisie linguistique de 1996-1997, on était entré dans l’ère de « l’illégalité absolue ». Pour lui, au lieu de résoudre les problèmes, ils avaient « institutionnalisé l’illégalité ». Sven Gatz reprocha à certains ministres de prendre prétexte du fait que les examens linguistiques n’avaient pas encore été adaptés pour ne pas appliquer l’accord. S’il concédait qu’une prolongation unique du délai pour réussir l’examen linguistique dont bénéficiait le personnel des administrations locales en vertu de l’accord linguistique était nécessaire, il refusait une prolongation supplémentaire. En outre, pareille prolongation n’était pas autorisée pour ceux qui avaient un remplaçant à part entière – c’est-à-dire un lauréat de l’examen linguistique – au sein de la réserve de l’ORBEM. Jean-Pierre Cornelissen rappelait que la réforme des examens linguistiques devait impérativement intervenir dans les deux ans de l’entrée en vigueur des accords de courtoisie linguistique. Or, ni le SPR ni le SELOR n’avaient déployé de grand zèle en cette matière, de sorte que la situation était identique à celle de l’automne 1997. Une évaluation du système d’examens linguistiques avait été récemment demandée à l’Université de Liège et n’aboutirait à des propositions concrètes qu’un an et demi plus tard. Dans ces conditions, Jean-Pierre Cornelissen considérait qu’il n’était que justice que les candidats recrutés dans le cadre des accords, bénéficient d’examens équitables et conformes à ces accords. Cela impliquait qu’entre-temps ces personnes soient maintenues en fonction. Brigitte Grouwels (CVP) estimait qu’il était indispensable d’adapter les examens linguistiques, non en les assouplissant, mais en les rendant plus fonctionnels. Elle évoquait la décision prise par le gouvernement selon laquelle les contractuels qui, après deux ans, n’avaient pas encore réussi l’épreuve linguistique ne pourraient plus être engagés qu’une seule fois à titre temporaire pour une période de deux ans. L’ORBEM devait néanmoins d’abord vérifier s’il n’y avait pas de bilingues qui convenaient pour l’emploi, auquel cas, ceux-ci auraient priorité. Elle demandait au ministre-président de se prononcer sans équivoque à ce propos. François-Xavier de Donnea répondit que les chiffres de l’ORBEM révélaient que le nombre de demandeurs d’emploi disposant d’un certificat linguistique était très faible. Les agents contractuels qui avaient pu bénéficier de deux ans pour se mettre à niveau pouvaient disposer de deux années supplémentaires mais il n’était pas question de les recruter sur base de contrats à durée indéterminée  [7].

16 Le 8 novembre 2001, le député FDF Serge de Patoul interpella le ministre-président sur les examens linguistiques pour le personnel des administrations régionales et communales en commission réunie des Finances et des Affaires intérieures. Évoquant la recommandation relative aux discriminations à l’embauche votée le 1er juin 2001, laquelle visait à rencontrer les problèmes persistants que connaissaient les personnes d’origine étrangère confrontées à la sphère du travail, Serge de Patoul soulignait les difficultés démesurées de l’examen linguistique du SELOR par rapport aux besoins des fonctions exercées. Il faisait état de l’avis d’experts selon lesquels, en Région bruxelloise, la discrimination était camouflée sous forme d’exigences linguistiques exagérées. Serge de Patoul s’inquiétait également de l’évolution des examens et se référait aux motions votées par de nombreuses communes pour dénoncer l’évolution catastrophique des résultats. En outre, le contexte dû aux examens linguistiques nuisait à l’attractivité d’une carrière professionnelle au sein de la fonction publique. Vu l’état du marché de l’emploi, le SELOR encourageait les candidats valables à préférer le secteur privé. Aussi, l’accès à la fonction publique locale risquait de se limiter à d’excellents bilingues qui n’étaient pas pour autant de bons professionnels. Serge de Patoul mit également en cause l’obligation de parité linguistique dans les fonctions supérieures des administrations locales qui pénalisait les francophones bruxellois, lesquels représentaient selon lui 90 % de la population. Le ministre-président François-Xavier de Donnea rappela que la législation linguistique relevait des compétences fédérales et que la Région n’était pas habilitée à prendre des initiatives dans le cadre de l’organisation institutionnelle. Il déclara par contre partager le souci de voir le SELOR organiser des examens linguistiques raisonnables et permettant aux services locaux compétents de maîtriser un vocabulaire de base. Le gouvernement souhaitait que soient mises en œuvre certaines réformes concernant les épreuves linguistiques. À cet effet, le rapport de l’Université de Liège était attendu pour le 31 décembre 2001 afin de permettre une évaluation dès 2002 en concertation avec la Région sur l’organisation de cet examen. Certaines réformes étaient cependant déjà en vigueur, comme la diminution à 50% pour la réussite de l’épreuve orale. Par ailleurs, l’École régionale d’administration publique (ERAP) allait intensifier les cours de formation linguistique.

17 Une motion signée par Caroline Persoons (PRL-FDF), Anne-Sylvie Mouzon (PS), Marion Lemesre (PRL-FDF), Joël Riguelle (PSC), Benoît Cerexhe (PSC) et Michel Van Roye (Écolo) fut déposée suite à cette interpellation  [8]. Son texte initial était amendé afin de prendre en compte la sensibilité néerlandophone. Telle qu’amendée, la motion demandait au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale :

  • de transmettre le rapport de l’Université de Liège sur l’évaluation des examens linguistiques au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale dès que possible ;
  • d’inciter le ministre fédéral de la Fonction publique à poursuivre l’adaptation des examens linguistiques destinés aux fonctionnaires locaux concernant la connaissance générale et professionnelle requise de la seconde langue en rapport avec les exigences réelles de l’activité communale et en rapport avec les services à la population ;
  • d’appliquer intégralement, tel que prévu dans l’accord de gouvernement du 9 juillet
    1999, l’accord de courtoisie linguistique adopté par le gouvernement le 14 novembre
    1996 en ce compris l’évaluation prévue dans le même accord.
Cette motion était adoptée le 14 décembre 2001 par l’ensemble des formations politiques francophones et néerlandophones à l’exception du Vlaams Blok et du Front national  [9].

18 Le 1er mars 2002, Sven Gatz interpella à nouveau le ministre-président concernant l’application de l’accord de courtoisie linguistique. Remarquant que l’accord de courtoisie linguistique avait été prolongé en août 2000 et que cette prolongation prenait fin le 31 août 2002, il estimait que les intéressés auraient eu à ce moment-là suffisamment de temps pour présenter les examens requis. L’autorité fédérale avait fait ce que l’on attendait d’elle – les examens du SELOR avaient été adaptés et modernisés en concertation avec la Région – et la balle était maintenant dans le camp du gouvernement bruxellois. Les lois linguistiques « étaient des lois » et les accords traduits dans une circulaire basée sur la loi devaient être appliqués, en premier lieu dans l’intérêt de la population. L’accord ne demandait pas l’impossible mais une simple application de la loi. Jean-Pierre Cornelissen contesta que les examens aient été adaptés et que le fédéral avait « fait tout ce qu’il devait faire ». Pour lui, il ne pouvait être question de sanctionner les communes qui faisaient tout ce qu’il fallait pour disposer d’un personnel raisonnablement bilingue. Jean-Pierre Cornelissen s’inquiétait de cette interpellation et se demandait si l’on n’assistait pas à une offensive coordonnée. Il mit en cause le vice-gouverneur de l’arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale Hugo Nys concernant « les propos belliqueux » qu’il avait tenus au Financieel Economische Tijd ; Hugo Nys intervenait, selon lui, dans un débat où il n’avait pas sa place. Pour le PRL-FDF, le processus était toujours en cours et il n’y avait pas d’autre solution que de prolonger à nouveau les délais. Brigitte Grouwels se rallia à la position de Sven Gatz  [10].

19 Le 30 avril 2002, Dominiek Lootens-Stael (Vlaams Blok), Sven Gatz (VLD-Spirit) et Brigitte Grouwels (CD&V) interrogèrent le ministre-président sur l’accord intervenu entre le gouvernement bruxellois et le gouvernement fédéral sur les examens linguistiques du SELOR  [11].

20 Le 18 juillet 2002, le gouvernement approuva un nouveau projet de circulaire aux pouvoirs locaux. Cette circulaire prévoyait qu’à partir du 1er septembre 2002, les contrats d’engagement seraient prévus pour une durée de deux ans. Les agents qui, à l’issue de cette période, n’auraient pas encore réussi les épreuves linguistiques pourraient bénéficier d’une prolongation de contrat pour une dernière période de deux ans à la condition impérative qu’ils établissent avoir participé activement à l’intégralité d’une formation linguistique agréée par la Région ou, le cas échéant, par la Commission communautaire commune en vue d’obtenir le brevet délivré par le SELOR. Pouvaient aussi bénéficier d’une prolongation de contrat, les agents qui, sans avoir suivi les formations précitées, avaient obtenu plus de 40% des points aux examens du SELOR. Si lors de renouvellements successifs de ces contrats, le délai de quatre ans était transgressé et que l’intéressé n’avait pas entre-temps satisfait aux examens linguistiques exigés, le vice-gouverneur suspendrait le renouvellement de son contrat et les ministres compétents du gouvernement devraient l’annuler, sauf dans des circonstances exceptionnelles qui devaient être motivées. Les agents dont les contrats arrivaient à échéance après la date du 1er septembre 2002 pourraient obtenir un nouveau contrat selon ces modalités. Le gouvernement décida de procéder à une évaluation de l’application de l’accord de courtoisie linguistique sur base des données que lui fournirait chaque semestre les services chargés de la tutelle administrative et le vice-gouverneur. Il chargea le ministre-président de demander au ministre fédéral de la Fonction publique qu’un comité de suivi comprenant des représentants de la Région de Bruxelles-Capitale et de la Commission communautaire commune ainsi que des représentants du SELOR et du ministre de la Fonction publique soit mis sur pied en vue d’évaluer semestriellement les travaux accomplis par les experts chargés de procéder à l’adaptation des examens linguistiques.

21 Cette prolongation et cette révision de l’accord de courtoisie linguistique provoquèrent les interpellations de Dominiek Lootens-Stael (Vlaams Blok) et Brigitte Grouwels (CD&V) en commission des Affaires intérieures le 7 novembre 2002. L’élu du Vlaams Blok dénonça le nouvel assouplissement des exigences linguistiques. Brigitte Grouwels demandait sur quelle base le gouvernement avait décidé de prolonger à nouveau l’accord. Se penchant sur l’évolution de l’accord de courtoisie linguistique et sur les modifications qui y étaient sans cesse apportées, elle se demandait si l’on voulait vraiment que Bruxelles reste la capitale bilingue de la Belgique fédérale. Jean-Pierre Cornelissen (MR-FDF) estimait que l’on était encore très loin de l’adaptation de l’examen linguistique et qu’il fallait permettre à l’accord de courtoisie linguistique de trouver sa pleine application. Sven Gatz (VLD) estimait par contre que l’examen linguistique avait été adapté en fonction de la connaissance nécessaire au fonctionnaire sur le terrain. De plus, la préparation à l’examen était meilleure que par le passé. Il trouvait très positif que le contrat de celui qui n’avait pas passé d’examen après deux ans ou qui ne l’avait pas réussi après quatre ans soit annulé irrévocablement. En gros, il pouvait s’accommoder de la prolongation de l’accord de courtoisie linguistique, considérant que le gouvernement avait tenté de parvenir à un compromis équilibré  [12].

22 Saisi par l’asbl Vlaams Komitee Brussel, le Conseil d’État suspendit les circulaires du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale (du 19 juillet 2002) et du collège réuni de la Commission communautaire commune (du 18 juillet 2002) relatives à l’accord de courtoisie linguistique, le 8 avril 2003. L’arrêt du Conseil d’État dénonçait la dérogation faite à l’obligation d’établir la connaissance de l’autre langue au moment de l’engagement contractuel, ainsi que la réserve mise par les circulaires à l’exercice effectif de la tutelle  [13].

23 Cela suscita les interpellations de Brigitte Grouwels (CD&V), Benoît Cerexhe (CDH), Jean-Pierre Cornelissen (MR-FDF) et Dominiek Lootens-Stael (Vlaams Blok) à la séance plénière du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale du 2 mai 2003. Benoît Cerexhe estimait que si l’on devait pâtir de la rigueur idéologique de certains parlementaires flamands, on pouvait en revenir à la lecture stricte des lois linguistiques de 1966. L’article 21 de ces lois coordonnées prévoyait que seuls les agents statutaires étaient visés par l’obligation du bilinguisme. Les accords de courtoisie linguistique avaient étendu cette obligation aux contractuels en différant tout simplement cette obligation dans le temps. Jean-Pierre Cornelissen rappelait que l’accord de courtoisie linguistique avait résulté de négociations intenses qui avaient permis de mettre en place un système équilibré. Il octroyait entre autres un délai raisonnable pour maîtriser l’autre langue nationale et prévoyait l’adaptation des examens linguistiques aux exigences réelles des fonctions occupées par les contractuels. Le député MR déplorait que les conclusions de l’étude commandée par le ministre fédéral de la Fonction publique sur ce sujet n’étaient toujours pas disponibles. Dominiek Lootens-Stael considérait que « la suspension par le Conseil d’État de l’accord de courtoisie linguistique était une gifle pour les membres francophones et flamands de la majorité ». Elle permettait, selon lui, de restaurer l’état de droit et de mettre un terme à l’illégalité. Il exigeait que le gouvernement bruxellois annule immédiatement les nominations « illicites » et s’opposait à un assouplissement de la législation linguistique. Rudi Vervoort (PS) estimait que le critère primordial de recrutement des postes devait rester le niveau de compétence, allié à la détention du brevet linguistique. L’exigence linguistique pouvait limiter la possibilité de choisir entre plusieurs candidats pour une fonction. Jean-Luc Vanraes (VLD) suggérait d’imposer l’examen linguistique à toute personne âgée de 18 ans. Il déplorait par ailleurs la nécessité de deux signatures – celle d’un ministre de chaque appartenance linguistique – pour la tutelle en matière linguistique dans le secteur bicommunautaire, ce qui permettait au ministre francophone de faire barrage à l’annulation signée par son confrère flamand. Pour Brigitte Grouwels, le gouvernement devait examiner comment les principes de l’accord de courtoisie linguistique pouvaient être maintenus dans le respect de la loi. Adelheid Byttebier annonçait l’appui du groupe SP-AGA à toute proposition constructive. Elle pensait plus particulièrement à l’idée de soumettre tous les élèves ayant presque terminé leurs humanités à l’examen linguistique du SELOR. Elle pensait qu’une large part d’irritation serait éliminée si une suspension par le gouverneur ne devait plus être ratifiée par deux ministres, mais ne pouvait être remise en cause qu’après approbation par deux ministres. Le ministreprésident François-Xavier de Donnea considérait que la poursuite du service public restait la priorité, tout comme la nécessité d’un accord politique de courtoisie linguistique qui favoriserait progressivement l’engagement de personnel bilingue. Le Conseil d’État ayant suspendu la dernière circulaire, la précédente redevenait d’application. Le gouvernement continuerait néanmoins à exercer la tutelle dans l’esprit de l’accord politique qui avait abouti à la dernière circulaire de courtoisie linguistique. Il y voyait la seule manière de promouvoir le bilinguisme à Bruxelles  [14].

24 Le 7 mai 2004, le Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale vota une résolution visant à encourager l’obtention d’un certificat de connaissance linguistique du SELOR. Le but de cette résolution était de faire en sorte que de jeunes adultes puissent participer aux examens pendant la dernière année des humanités. La résolution demandait qu’un examen linguistique du SELOR soit organisé dans certaines écoles pilotes et demandait aux autorités fédérales d’introduire le système sur une base légale. L’examen devrait être adapté à la fonction que la personne souhaiterait exercer  [15].

25 Le 25 mai 2004, la sénatrice Annemie Van de Casteele (VLD) et le député régional bruxellois Sven Gatz (VLD) annonçèrent le dépôt au Sénat de deux propositions de loi visant à clarifier la législation linguistique à Bruxelles, mais aussi à la renforcer sur certains points telles que les annulations de nominations. Le VLD voulait que les suspensions de nominations par le vice-gouverneur flamand de l’arrondissement de Bruxelles-Capitale ne puissent être annulées que via la tutelle d’approbation. Le groupe VLD du Sénat refusait également de voir l’application de la législation linguistique, de compétence fédérale, atterrir sur la table du forum communautaire prévu après l’été. La deuxième proposition du VLD visait à imposer le bilinguisme des agents au sein du corps des pompiers  [16].

1.2. LE STATUT DE LA RÉGION DE BRUXELLES-CAPITALE

26 La reconnaissance du statut de la Région de Bruxelles-Capitale en tant que Région à part entière est un point très sensible du côté francophone. Aussi, des interpellations et des questions parlementaires furent introduites chaque fois que ce principe paraissait mis en cause.

27 Le 26 octobre 2000, la présidente du groupe Écolo Évelyne Huytebroeck interpella le ministre-président François-Xavier de Donnea à propos d’une rencontre entre les gouvernements wallon et flamand à la veille des élections communales du 8 octobre. Elle voulait notamment savoir comment il se faisait que Bruxelles ne participait pas à ce type de rencontres. Le gouvernement bruxellois avait-il été convié et avait-il refusé ou les gouvernements wallon et flamand avaient-ils omis de l’inviter ? Pour Évelyne Huytebroeck, Bruxelles, ville-Région, capitale, ville européenne, bilingue, multiculturelle et accueillant près de 360 000 navetteurs quotidiens était pourtant directement concernée par les dossiers mis sur la table. Le président du groupe socialiste Rudi Vervoort refusa, à ce stade, de dramatiser les choses : il considérait qu’il fallait s’habituer à vivre dans un État fédéral où les différentes entités fédérées se rencontrent et se parlent. Pour lui, la présence nouvelle à la tête de l’exécutif de François-Xavier de Donnea, l’une des personnalités de son parti les plus expérimentées en matière institutionnelle, était de bon augure, compte tenu de la volonté qu’il avait exprimée de représenter et de défendre les intérêts de la Région bruxelloise à l’extérieur et jusqu’au plus haut niveau. Il annonça néanmoins la vigilance du groupe socialiste sur la transcription légale des derniers accords institutionnels. Benoît Cerexhe (PSC) partageait par contre l’inquiétude d’Évelyne Huytebroeck. Il voyait dans l’éclat particulier donné à la réunion de La Hulpe, quelques jours avant les élections communales, une volonté délibérée de tracer, pour le pays, une voie institutionnelle sans Bruxelles. Le député PRL-FDF Jean-Pierre Cornelissen se voulait positif. Il attendait de voir quelle serait l’attitude qu’adopterait le ministreprésident flamand au sujet des contacts qu’il initierait et il faisait confiance à François-Xavier de Donnea  [17].

28 Le 9 décembre 2000, le ministre-président flamand Patrick Dewael accorda une interview au journal Le Soir dans laquelle il se prononçait très clairement pour une Belgique à deux et où il affirmait que la Région bruxelloise ne parviendrait jamais à devenir une Région à part entière. Il reprenait l’idée lancée par Louis Tobback d’un district européen pour Bruxelles. Patrick Dewael se démarquait de son prédécesseur Luc Van den Brande qui n’avait jamais voulu se concerter avec Bruxelles. Il acceptait, quant à lui, de discuter avec le ministre-président bruxellois mais refusait une réunion commune des deux gouvernements. Il constatait cependant que les formations bruxelloises flamandes ne s’opposaient pas au fait que Bruxelles soit une région « à part entière » et qu’il ne pouvait que l’admettre.

29 Ces propos suscitèrent de vives réactions et donnèrent lieu aux interpellations de Jean-Pierre Cornelissen (PRL-FDF), Benoît Cerexhe (PSC), Sven Gatz (VLD-VU-O), Anne-Sylvie Mouzon (PS) et Jean-Luc Vanraes (VLD-VU-O) à l’adresse du ministre-président François-Xavier De Donnea. Jean-Pierre Cornelissen trouvait les propos de Patrick Dewael inadmissibles. Il estimait qu’on ne pouvait minimiser ce qui revenait en fait à une remise en cause fondamentale tant de la Région bruxelloise que du système institutionnel belge et, dans la foulée, de la survie même de l’État belge. Benoît Cerexhe (PSC) voyait dans l’idée de transformer la Région bruxelloise en district fédéral une injure faite au million de Bruxellois, auxquels on déniait le droit d’être traités de la même manière que les habitants de la Région flamande et de la Région wallonne. Il s’étonnait de la réaction du ministre-président et de celle des membres de son gouvernement. Il faisait remarquer que les propos de Patrick Dewael n’étaient pas l’expression isolée d’un ministre-président qui « aurait à un moment donné, comme on dit, pété les plombs », mais qu’ils avaient été relayés et amplifiés les jours suivants par les ministres flamands Landuyt et Sauwens. Constatant une « indignation sélective », Sven Gatz (VLD-VU-O), appelait au calme. Il qualifiait néanmoins les propos de Patrick Dewael de « gratuits » et donc, à son sens, de contre-productifs. Pour lui, le statut de la Région de Bruxelles-Capitale était un fondement du système fédéral belge. Cependant il aurait aimé y changer certaines choses. Bruxelles était aussi bien une capitale qu’une ville internationale, polyglotte et multiculturelle. Bruxelles devait, en tant que ville, appartenir à une Région et la Région devait assumer une plus grande participation politique. Anne-Sylvie Mouzon (PS) comprenait les déclarations de Patrick Dewael comme une façon de minimiser la rencontre qu’il devait avoir avec François-Xavier de Donnea. Elle affirmait avec fermeté le refus de la toute grande majorité des francophones d’une Belgique « à deux ». Pour elle, la seule question qui se posait était de savoir si le ministre-président de Donnea avait persuadé son homologue flamand d’organiser des réunions entre le gouvernement flamand et le gouvernement bruxellois comme il en existait avec le gouvernement wallon. Si ce n’était pas le cas elle demandait à François-Xavier de Donnea combien de temps encore il accepterait de rencontrer en tête à tête « un monsieur qui ne souhaite pas vous reconnaître en votre qualité de ministre-président d’une Région bruxelloise digne de ce nom ». Voyant dans le refus de Patrick Dewael de serrer la main de François-Xavier de Donnea devant les caméras une façon de le traiter « en pestiféré », elle offrait une crécelle au ministreprésident bruxellois. Le député libéral flamand Jean-Luc Vanraes considérait les propos de Patrick Dewael comme inacceptables. Mais il refusait de diaboliser le ministre-président flamand grâce auquel les relations entre les régions s’étaient améliorées, ce qui n’était pas le cas à l’époque où Luc Van den Brande était ministre-président du gouvernement flamand. Sa réponse à la question de savoir si Bruxelles devait devenir un district fédéral ou européen était un non sans équivoque. Au nom d’Écolo, Évelyne Huytecroeck entendait réfuter les affirmations de Patrick Dewael selon lesquelles Bruxelles n’était pas viable au niveau institutionnel ou au niveau économique. Bruxelles avait surtout besoin d’un projet régional qui associerait tous les Bruxellois dans le respect des spécificités culturelles de chacun. Bruxelles avait aussi besoin d’un gouvernement fort qui se mettrait enfin d’accord de manière claire et unanime sur les revendications financières qu’il voulait présenter au niveau fédéral. Évelyne Huytebroeck considérait l’idée d’une mainmise exclusive de la Flandre sur Bruxelles comme totalement inacceptable et elle estimait qu’il était temps que les responsables politiques bruxellois, francophones et néerlandophones, le fassent comprendre à tous les politiques flamands. Brigitte Grouwels (CVP) faisait remarquer que la réforme des institutions bruxelloises relevait exclusivement de la compétence de l’autorité fédérale et que le ministre-président Dewael, plutôt que d’étaler ses états d’âme sur Bruxelles dans les journaux, devait aborder les problèmes de la réforme de l’État dans le cadre de négociations avec l’autorité fédérale. Le représentant du Vlaams Blok Dominique Lootens-Stael trouvait absurde l’idée de Patrick Dewael de placer Bruxelles sous la tutelle des autorités européennes alors que l’Europe ne s’intéressait ni à Bruxelles, ni aux Bruxellois. Mais il suivait le ministre-président flamand dans son constat que Bruxelles n’était viable ni politiquement ni économiquement. Dans sa réponse, le ministre-président François-Xavier de Donnea estimait qu’il fallait rester impavide quand un homme politique flamand relayait des thèses archi-connues, répétées depuis des années par le Parlement flamand, alors qu’il n’y avait en aucun cas de majorité parlementaire pour voter ne fut-ce qu’un début d’application de ces thèses. Il estimait qu’il n’aurait été ni utile ni intelligent de refuser de rencontrer Patrick Dewael. Il valait mieux aller discuter d’égal à égal avec celui-ci, d’expliquer aux journalistes présents à ses côtés qu’il n’était pas d’accord avec ses théories institutionnelles, mais que cela n’empêchait pas le dialogue. Une réunion allait être organisée au mois de février pour discuter de divers points concrets entre ministres bruxellois et flamands. Patrick Dewael et lui avaient convenu de se rencontrer entourés de tous leurs ministres pour évoquer quatre thèmes : la coordination de leurs positions relatives à la présidence européenne, le problème de la navigation sur le canal Anvers-Charleroi-Bruxelles, le RER, et l’amélioration de la coopération des attachés commerciaux des deux régions. Pour François-Xavier de Donnea, il fallait souligner le fait nouveau que représentait la collaboration qui se développait petit à petit entre les deux régions.

30 Suite à ces interpellations, un ordre du jour signé par Marc Cools (PRL-FDF), Mahfoud Romdhani (PS), Brigitte Grouwels (CVP), Sven Gatz (VLD-VU-O), Isabelle Gelas (PRL-FDF), Évelyne Huytebroeck (Écolo) et Denis Grimberghs (PSC) fut déposé. Il contenait notamment les positions suivantes :

31

  • « considérant que l’Union européenne ne constitue pas un État fédéral comparable aux
    États-Unis d’Amérique et que, par conséquent, les récentes déclarations du ministreprésident du gouvernement flamand sur une transformation de la Région de
    Bruxelles-Capitale en ‘Brussels DC’ sont sans objet ;
  • considérant que la Région de Bruxelles-Capitale tient un rôle de capitale plurale comme capitale de l’État belge, comme capitale des Communautés française et flamande et comme capitale de l’Union européenne ;
  • considérant que les institutions bruxelloises, créées en 1989, ont jusqu’à présent fonctionné et qu’elles ont contribué de manière importante et positive à la revitalisation de la Région de Bruxelles-Capitale ;
  • considérant qu’une éventuelle modification du statut de la Région de Bruxelles-
    Capitale nécessiterait un dialogue et une concertation au sein de la structure fédérale du pays et que, par conséquent, vouloir imposer unilatéralement la modification de ce statut n’est pas souhaitable et est incompatible avec la nécessité de collaboration entre les communautés qui caractérise la Région de Bruxelles-Capitale ;
  • affirme que la Région de Bruxelles-Capitale a un statut équivalent à celui des deux autres régions du pays et a des caractéristiques propres comme point de rencontre des deux grandes communautés du pays et comme capitale nationale et internationale ;
  • affirme le droit des citoyens de la Région de Bruxelles-Capitale à gérer leur
    Région  [18]. »
Cet ordre du jour motivé, qui associait la préoccupation flamande de voir souligner le statut de capitale de Bruxelles et la préoccupation francophone d’affirmer l’équivalence du statut de Bruxelles par rapport aux autres régions, fut voté le 12 janvier 2001 par l’ensemble des formations politiques flamandes et francophones à l’exception de l’extrême droite  [19].

32 Une rencontre qui eut lieu le 14 mars 2001 entre des ministres du gouvernement bruxellois et des ministres du gouvernement flamand suscita de nouvelles questions parlementaires au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. Sur base des comptes rendus lus dans la presse, Évelyne Huytebroeck relevait que le gouvernement flamand traitait de manière fort différente les rencontres qu’il avait avec le gouvernement bruxellois et qu’il semblait vouloir les nier ou les cacher. La parlementaire écologiste voulait savoir si des décisions concrètes y avaient été prises et si des accords de coopération étaient prévus ; elle demandait si une nouvelle rencontre était programmée, le cas échéant avec la Région wallonne ; enfin, elle voulait connaître les raisons invoquées par le gouvernement flamand pour refuser de participer à la conférence de presse organisée en conclusion de cette rencontre. Anne-Sylvie Mouzon demandait quand il y aurait enfin des réunions de gouvernement à gouvernement « et non pas des ‘bidules’ par lesquels le ministre flamand traite les Bruxellois comme des lépreux, raison pour laquelle, à l’époque, je vous avais offert une crécelle ? ».

33 Le président du groupe PSC Benoît Cerexhe faisait remarquer que dix jours auparavant les gouvernements wallons et flamands s’étaient à nouveau réunis en l’absence du gouvernement bruxellois. Or des dossiers qui intéressaient au plus haut point la Région bruxelloise, tels que, par exemple, l’avenir de la SNCB et les investissements à venir dans le domaine du rail, avaient été traités par les ministres-présidents flamand et wallon. Cette réunion pouvait donner l’impression d’une volonté des deux autres régions de se mettre d’accord sur le dos des Bruxellois. Dans sa réponse, François-Xavier de Donnea commençait par faire remarquer que lors des précédentes législatures aucune rencontre n’avait eu lieu entre ministres bruxellois et wallons ni entre ministres bruxellois et flamands. Depuis 1999, un mouvement s’inscrivait donc dans un sens positif. Des décisions concrètes avaient été prises en matière de coordination pour les normes de bruit appliquées à l’aéroport de Bruxelles-National, de RER, pour la gestion et le dragage du canal Anvers-Bruxelles-Charleroi et au niveau de la coopération des attachés économiques et commerciaux. Il partageait l’opinion de Benoît Cerexhe selon laquelle il serait inéluctable qu’un jour il y ait des réunions trilatérales sur certains sujets. Il tenait cependant à souligner que la réunion avec le gouvernement flamand s’était déroulée dans un climat serein et constructif  [20].

34 Le numéro d’août 2001 de la revue Secessie, dont l’éditeur responsable est Alexandra Colen, députée fédérale du Vlaams Blok, comportait un article de Brigitte Grouwels, présidente du groupe CVP au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. Dans cet article, Brigitte Grouwels attaquait l'accord du Lambermont parce qu'il visait au développement d’un fédéralisme basé sur trois régions équivalentes et non au développement des deux grandes communautés. Ses partenaires flamands de la majorité bruxelloise, le VLD-VU-O et le SP-Aga, réagissaient dans un communiqué de presse commun où l’on pouvait lire que « la position de Brigitte Grouwels est en opposition flagrante avec les accords de majorité, aussi bien du gouvernement bruxellois que de la Commission communautaire flamande ». Ces deux groupes parlementaires flamands dénonçaient également le fait que Brigitte Grouwels se soit exprimée dans une revue d’extrême droite  [21]. L’approche développée par Brigitte Grouwels était réaffirmée par le CVP, qui se transformait en CD&V, lors de son congrès du 29 septembre 2001. Les déclarations de Brigitte Grouwels et la prise de position en faveur d’un fédéralisme à deux du CD&V suscitaient une interpellation de la présidente du groupe Écolo Évelyne Huytebroeck au ministre-président du gouvernement bruxellois concernant « le statut de la Région de Bruxelles-Capitale tel qu’il figure dans l’accord de gouvernement de juillet 1999 et tel qu’il est renforcé par les accords du Lombard » à la séance du 26 octobre 2001 du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. François-Xavier de Donnea répondait que ce qui comptait était de voir si le CD&V respectait bien l’accord du gouvernement, ce qui était le cas selon lui. Le problème ne se posait donc pas pour le chef du gouvernement  [22].

35 Le 26 avril 2002, un accord entre les partis composant la majorité au niveau fédéral (libéraux, socialistes, écologistes) prévit notamment d’accorder l’autonomie constitutive à la Région de Bruxelles-Capitale (tout texte relatif à celle-ci devant être adopté à une majorité des deux tiers et à une majorité dans chaque groupe linguistique) ; l’accord accordait également le pouvoir décrétal et reconnaissait l’appellation officialisée de « parlement » pour tous les conseils. Benoît Cerexhe (PSC) et Évelyne Huytebroeck (Écolo) interpellèrent le ministre-président à propos de cet accord le 8 mai 2002. Benoît Cerexhe regrettait notamment que les avancées obtenues pour la Région étaient reportées – l’autonomie constitutive nécessitant une révision de la constitution – alors que les Flamands engrangeaient des avantages immédiats  [23].

36 Le 5 juillet 2002, alors que le ministre des Finances et des Relations extérieures de la Région de Bruxelles-Capitale Guy Vanhengel avait remplacé Bert Anciaux en tant que membre bruxellois du gouvernement de la Communauté flamande, Benoît Cerexhe le félicita tout en lui demandant si, avant d’accepter, il avait exigé comme garantie une modification des positions du gouvernement flamand à l’égard de la Région bruxelloise. Il lui demanda s’il n’aurait pas quelques difficultés à se justifier devant la population bruxelloise suite à des décisions flamandes. Christos Doulkeridis (Écolo) estimait que même si le cumul des mandats de ministre flamand et bruxellois était légalement et techniquement difficile à comprendre, telle était la situation depuis la fusion opérée du côté flamand entre la communauté et la région. Le ministre Vanhengel répondit que le législateur fédéral avait créé la possibilité de la double fonction de ministre régional et communautaire afin d’éviter les conflits d’intérêt et d’assurer une meilleure compréhension des uns et des autres  [24].

1.3. LA CONVENTION-CADRE DU CONSEIL DE L’EUROPE POUR LA PROTECTION DES MINORITÉS NATIONALES

37 Voyant dans cette convention un moyen de faire valoir les droits des francophones de la périphérie, plusieurs partis francophones exigèrent avec insistance sa signature par la Belgique  [25]. Au cours des débats du groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises, le FDF tenta sans succès d’en faire une condition pour accorder une représentation minimale aux néerlandophones du Conseil de la Région de Bruxelles-Ca-pitale.

1.3.1. L’engagement pris par le gouvernement fédéral de signer la convention

38 Le 28 juin 2001, afin d’éviter un vote négatif du PSC sur les lois spéciales de réformes institutionnelles, le gouvernement fédéral s’était engagé à signer la convention-cadre pour la protection des minorités nationales. Le même jour, vers 13 heures, le ministreprésident François-Xavier de Donnea communiquait au Premier ministre la notification que le gouvernement bruxellois conférait les pleins pouvoirs au ministre fédéral des Affaires étrangères pour signer la convention-cadre. Le 3 juillet 2001, la presse annonçait que le ministre Chabert (CVP) se désolidarisait de la décision bruxelloise du 28 juin et contestait la légalité du mandat du ministre fédéral des Affaires étrangères. Cet incident donna lieu à des interpellations de Jean-Pierre Cornelissen (PRL-FDF) et de Françoise Schepmans (PRL-FDF) à la séance plénière du 12 juillet 2001 du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. Jean-Pierre Cornelissen constatait qu’un procès-verbal faisant foi établissait de manière incontestable que le point de principe avait bel et bien été abordé lors de la réunion du 28 juin 2001, en présence du ministre Chabert. Le parlementaire FDF supposait que le ministre-président n’aurait aucune peine à démontrer que le gouvernement avait bel et bien délibéré collégialement, et qu’il n’avait pas été enfreint à la règle du consensus en vigueur dans les différents gouvernements. Il ajoutait que « le rôle d’un ministre bruxellois n’est certes pas de servir de cheval de Troie à un parti de l’opposition nationale (le CVP, ndlr) décidé à pratiquer la politique de la terre brûlée, y compris à Bruxelles, où il est pourtant une composante de la majorité ». Françoise Schepmans constatait les divergences quant à l’interprétation de ce qui avait été décidé. Pour les francophones, en effet, l’introduction dans le droit public belge de la convention serait l’occasion d’en finir avec certains actes irréguliers et discriminatoires que l’on avait pu observer ces dernières années dans les six communes à facilités de la périphérie bruxelloise. En revanche, à entendre plus d’un responsable politique néerlandophone, l’éventuelle ratification par la Belgique ne changerait pour ainsi dire rien à la situation existante dans la périphérie. Pour Françoise Schepmans, tout allait dépendre de la définition même du terme « minorité » qui ne manquerait pas de susciter débat. Elle rappelait l’opposition traditionnelle des dirigeants flamands à la reconnaissance d’une importante minorité francophone en périphérie. Quant au gouvernement fédéral précédent, il avait fait savoir au Conseil de l’Europe qu’il n’existait qu’une seule minorité en Belgique, à savoir, la communauté germanophone. La parlementaire libérale relevait cependant une approche différente dans le monde scientifique. Elle faisait ainsi référence aux contributions du juriste néerlandophone J. Theunis, auteur d’une importante étude relative à la protection des minorités dans le droit national et international, lequel distinguait trois minorités : la germanophone, les néerlandophones de Bruxelles et de la frontière linguistique et les francophones au niveau fédéral, en Région flamande et dans la Communauté germanophone. Françoise Schepmans espérait que la définition de minorité qui devait être retenue par la conférence interministérielle de la politique étrangère ne viderait pas la convention de son sens. Elle regrettait que la position du CVP bruxellois s’aligne sur celle de son « grand frère » flamand et considérait que ce maximalisme communautaire s’accordait mal avec la personnalité traditionnellement consensuelle du ministre Chabert. Benoît Cerexhe (PSC) faisait remarquer au ministre du CVP que l’obstination de son parti à refuser la signature de la convention-cadre pour la protection des minorités nationales conforterait l’opinion défavorable que les « leaders européens » avaient de la communauté flamande en raison de « l’excès de nationalisme flamand ». D’autre part, il ne voyait pas ce qui empêcherait le ministre-président de déposer le projet d’ordonnance portant ratification de la convention, en dépit du désaccord de l’un de ses ministres. Brigitte Grouwels (CVP) signalait que son parti était favorable à la signature et à la ratification de la convention-cadre pour autant que cela se fasse avec une déclaration interprétative selon laquelle les francophones et les néerlandophones de Belgique ne constituaient pas des minorités nationales. Cette position était partagée par le Parlement flamand, par le gouvernement flamand et par la quasi-totalité des juristes qui avaient été consultés à ce sujet par la conférence interministérielle de 1996. Elle rappelait qu’en vertu de la loi spéciale les gouvernements des entités fédérées devaient être associés à la ratification de la convention-cadre et que sans consensus au sein du gouvernement bruxellois, aucune décision n’était possible. Évelyne Huytebroeck (Écolo) se déclarait favorable, au nom de son groupe, à ce que la Belgique, donc l’État fédéral, mais aussi les entités fédérées, signent la convention-cadre. Elle constatait qu’il y avait « un rebelle » au sein du gouvernement en la personne du ministre Chabert, dont elle savait qu’il serait un jour déchiré entre son esprit de conciliation et les diktats de son parti. Mais elle pointait un autre rebelle dans le chef du FDF qui avait décidé de « citer-Polycarpe en justice ». Sven Gatz (VLD-VU-O) voyait le nœud du problème dans le fait que la conférence interministérielle devrait trouver une définition pour la notion de minorité. Il s’en prenait également au FDF qui souhaitait la ratification de la convention-cadre mais qui en même temps « voulait contester d’autres parties de l’accord du Lambermont devant le tribunal ». Pour Jos Van Assche (Vlaams Blok), le Conseil de l’Europe était une nouvelle fois manipulé et la Communauté flamande contrainte de se défendre. Mahfoud Romhani (PS) déclarait que le groupe socialiste se félicitait de la signature de la convention qui constituait une avancée démocratique et qui effaçait une tache sur l’image internationale de la Belgique. Il imputait cette avancée davantage au PSC qu’au FDF dont il regrettait l’attitude et sur la ligne et la cohérence duquel il s’interrogeait. Quant à Jos Chabert, il considérait que se posait à son sujet la « question essentielle » suivante : « M. Chabert est-il d’abord un ministre bruxellois néerlandophone ou bien un ministre CVP à Bruxelles ? » Concernant l’application de l’accord de la Saint-Polycarpe, l’absence de déclaration du gouvernement sur la manière de mettre en œuvre ses nouvelles compétences l’inquiétait. Le ministre-président répondit qu’il proposerait au gouvernement de soumettre au Parlement pour ratification le texte signé par le ministre des Affaires étrangères dès que le groupe de travail chargé de définir la notion de minorité aurait terminé ses travaux  [26].

39 Le ministre des Affaires étrangères, Louis Michel, signa officiellement la conventioncadre pour la protection des minorités nationales le 31 juillet 2001 assortie d’une réserve selon laquelle la notion de minorité nationale serait définie par la conférence interministérielle de Politique étrangère.

40 Le 11 janvier 2002, Benoît Cerexhe interrogea le ministre-président sur l’état d’avancement de ce dossier au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. François-Xavier de Donnea répondit que la conférence interministérielle s’était penchée sur le problème les 24 octobre et 27 novembre 2001. Elle avait décidé de constituer un nouveau groupe de travail chargé de définir la notion de minorité nationale. La Région y serait représentée par au moins un expert francophone et par un expert néerlandophone désignés par le gouvernement. La position du gouvernement bruxellois, défendue par le ministre bruxellois des Relations extérieures et par lui-même au sein de la conférence interministérielle de la politique étrangère, ne pourrait être déterminée que sur la base des conclusions du groupe de travail  [27].

41 Le 28 février 2002, la conférence interministérielle désigna un groupe d’experts pour définir la notion de minorité dans la perspective de la ratification de la convention-cadre pour la protection des minorités nationales par les Parlements fédéral, régionaux et communautaires. L’État fédéral désigna le professeur Scholsem de l’Université de Liège et Barthold Schutyser, conseiller pour les affaires institutionnelles du cabinet du vice-Premier ministre Johan Vande Lanotte ; La Région wallonne choisit Jean-Christophe Peterken, ancien chef de cabinet du ministre-président Jean-Claude Van Cauwenberghe, et Marc Uyttendaele, avocat et professeur à l’Université libre de Bruxelles ; la Communauté française désignait Kim Möric, assistant à l’Université libre de Bruxelles et ancien membre du cabinet du ministre-président Hervé Hasquin, et Emmanuelle Bourgaux, de l’Université libre de Bruxelles et ancienne collaboratrice de Philippe Moureaux ; la Région flamande délégua Matthias Storm, ancien président de l’Overlegcomite Vlaamse Verenigingen et Jan Velaers de l’Université d’Anvers ; Manu Van den Bossche, un expert du VLD, et Sébastien Van Dooghenbroeck , des Facultés universitaires Saint-Louis, siégeaient pour la Région de Bruxelles-Capitale  [28].

1.3.2. Le rapport Nabholz-Haidegger

42 Le 22 décembre 2000, le député fédéral FDF Georges Clerfayt, membre du Conseil de l’Europe, avait adressé au président de cette assemblée Lord Russell-Johnston une pétition signée par des mandataires francophones et des habitants de la périphérie dénonçant « le statut discriminatoire imposé par l’État belge » aux 120 000 francophones de la périphérie. Cette démarche avait abouti à la désignation d’une rapporteuse suisse, Lili Nabholz-Haidegger  [29].

43 La rapporteuse se rendit en Belgique en juin et septembre 2001. Son rapport, qui reconnaissait le statut de minorité aux francophones vivant dans la région de langue néerlandaise, fut adopté le 18 mars 2002 en commission des questions juridiques et des droits de l’homme du Conseil de l’Europe et finalement voté par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe le 26 septembre 2002  [30].

44 À la séance plénière du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale du 29 mars 2002, Benoît Cerexhe posa une question d’actualité au ministre-président. Il lui demanda s’il avait donné des instructions aux experts bruxellois et s’il était d’accord avec les conclusions du rapport Nabholz-Haidegger. Il se déclara surpris de la désapprobation exprimée par le ministre libéral flamand Guy Vanhengel à propos de ce rapport. Le ministreprésident rappela que la conférence interministérielle de politique étrangère avait créé un groupe de travail sur la notion de minorité nationale et que le rapport Nabholz-Haidegger devait encore être approuvé par l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Le gouvernement ne pouvait donc à ce stade prendre de position officielle  [31].

45 Le 17 octobre 2002, le président du groupe CDH Benoît Cerexhe interpella le ministreprésident en séance plénière à propos de l’évolution de la ratification de la conventioncadre sur la protection des minorités nationales et la position du gouvernement bruxellois à la lumière du rapport Nabholz-Haidegger adopté par le Conseil de l’Europe le 26 septembre 2002. Benoît Cerexhe considérait que le détour par la conférence interministérielle des Affaires étrangères pour définir la notion de minorité nationale ne se justifiait plus puisque cette définition avait été donnée par les experts les plus reconnus avec un vote positif par une assemblée internationale. Il attendait donc que le ministre-président dépose au bureau du Conseil un projet de ratification de la convention-cadre. Il s’interrogeait également sur la position du ministre des Relations extérieures de la Région de Bruxelles-Capitale, se demandant s’il partageait les vues du ministre-président bruxellois ou celles du ministre-président du second gouvernement où il siégeait, à savoir celles de Patrick Dewael. La parlementaire FDF Caroline Persoons, après avoir souligné la réelle importance du Conseil de l’Europe, considérait que le vote de la résolution Nabholz-Haidegger signifiait trois choses essentielles pour la Belgique et pour chacune de ses entités fédérées : premièrement, cette résolution rappelait que chaque entité fédérée était liée par la convention-cadre ; deuxièmement, elle définissait ce qu’était une minorité nationale en Belgique ; troisièmement, elle critiquait les remarques émises par la Belgique au moment de la signature. Dominiek Lootens-Stael (représentant du Vlaams Blok) estimait que le gouvernement bruxellois n’était pas compétent pour s’exprimer sur un sujet qui ne concernait que des communes flamandes. Pour lui, la Flandre avait subi une défaite même si les votes au Conseil de l’Europe étaient plutôt une loterie que le résultat d’un travail parlementaire sérieux. Brigitte Grouwels (CD&V) considérait que quiconque œuvrait pour la reconnaissance de minorités régionales en Belgique mettait en danger l’ordre constitutionnel, y compris la parité au sein du gouvernement, les majorités spéciales et les cadres linguistiques des administrations et des tribunaux. Par la voix de Rudi Vervoort, le groupe socialiste jugeait que l’adoption du rapport Nabholz-Haidegger constituait un élément de poids en vue de faire respecter les droits des francophones de la périphérie. Mais il n’en restait pas moins essentiel de faire aboutir les débats au sein de la conférence interministérielle. Pour Sven Gatz (VLD), l’Europe risquait de se voir fortement déstabilisée si l’on transposait la logique du rapport Nabholz à son échelle. Il estimait par ailleurs que les Flamands pourraient également saisir le Conseil de l’Europe à propos de la santé à Bruxelles. Le ministre-président informait que, suite à l’adoption du rapport, la conférence interministérielle avait créé un groupe de travail dans lequel la Région bruxelloise était représentée par deux experts, l’un francophone, l’autre néerlandophone. Ce groupe travaillait sur base du rapport Nabholz et de la convention de Venise pour établir une définition de ce qu’était une minorité nationale en droit belge et international. En l’état, le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale n’avait donc pas à se prononcer et faisait confiance au groupe d’experts mandatés par les différentes entités et à Louis Michel, ministre des Affaires étrangères. Il partageait le point de vue de Rudi Vervoort selon lequel toute autre attitude porterait atteinte à la loyauté fédérale et compromettrait la chance d’aboutir à un accord national en la matière  [32].

1.3.3. La poursuite des débats relatifs à la ratification

46 Le 28 mars 2003, Brigitte Grouwels, sur la base de déclarations faites par le président du FDF Olivier Maingain à Télé-Bruxelles, demanda au ministre-président De Donnea si le gouvernement bruxellois avait déjà décidé de proposer au Conseil de ratifier la conventioncadre. Benoît Cerexhe, se référant à l’évolution du dossier en Région wallonne et à la Communauté française, voulait savoir si les choses allaient avancer de la même façon à la Région bruxelloise. François-Xavier de Donnea répondit que le gouvernement bruxellois n’avait pas encore délibéré sur la question, ce qui réjouit Brigitte Grouwels et déçut Benoît Cerexhe  [33].

47 Le 20 juin 2003, Benoît Cerexhe, se référant à la position des experts francophones réunis au sein de la conférence interministérielle de politique étrangère selon laquelle l’ensemble des francophones et des germanophones pourraient être considérés comme des minorités nationales, demanda quelle était la position défendue par les experts désignés par le gouvernement bruxellois. Au nom du ministre-président Daniel Ducarme, le ministre Gosuin répondit que celui-ci avait demandé un rapport d’information aux deux représentants bruxellois au sein de la conférence interministérielle  [34].

48 Le 12 mars 2004, Benoît Cerexhe interpella le ministre-président Jacques Simonet sur l’évolution du projet de ratification par la Région de Bruxelles-Capitale de la conventioncadre. Le président du groupe CDH déplorait qu’en dépit du rapport Nabholz-Haidegger et de la position d’experts au sein de la CIPE, rien n’avait avancé. Pour Bernard Clerfayt (MR-FDF), le dépôt d’un projet d’ordonnance d’assentiment à la convention-cadre devait se faire sous la présente législature, sans assortir son approbation définitive à la définition préalable du concept de minorité nationale par la CIPE. Rudi Vervoort s’en tenait à l’accord du 28 juin 2001 tout en apportant son soutien à la convention-cadre. Il estimait que le ministre des Affaires étrangères devrait solliciter une réunion de la conférence interministérielle qui ne s’était plus réunie depuis des mois. Le ministre-président Jacques Simonet répondit que la convention-cadre pour la protection des minorités nationales était entrée en vigueur le 1er février 1998. Elle avait été signée en 2001 par la Belgique avec des réserves. La convention-cadre doit s’appliquer sans préjudice des normes législatives qui régissent l’emploi des langues et la notion de minorité doit être définie par la conférence interministérielle de politique étrangère. Un groupe de travail a été institué le 28 février 2002 auquel la Région a délégué deux experts. Le rapport du groupe d’experts a été remis en janvier 2003 et Jacques Simonet avait fait inscrire ce point à la conférence interministérielle du 25 novembre 2003. Des opinions différentes s’étaient dégagées entre experts francophones et néerlandophones mais tous avaient accepté l’idée de minorités régionales et pas seulement nationales et des critères de définition identiques dans les deux cas. Ces critères sont donnés par la résolution 1201 du Conseil de l’Europe. Des divergences persistaient dans la manière de définir une minorité et le champ d’application territorial à donner à la protection d’une minorité. À l’issue de la conférence interministérielle du 25 novembre, il avait été décidé d’étudier le rapport des experts de manière plus approfondie pour prendre une décision lors de la prochaine réunion sur le suivi de ce dossier. Jacques Simonet se déclarait prêt à demander une date de réunion au ministre Louis Michel. Le gouvernement bruxellois entendait assurer le suivi de ce dossier et il voulait aboutir à une position commune. Benoît Cerexhe souhaitait que ce dossier aboutisse avant les élections régionales et déposait une motion en ce sens alors qu’un ordre du jour pur et simple (ce qui signifie voter la confiance au gouvernement) était également déposé par Éric André (MR), Rudi Vervoort (PS) et Sven Gatz (VLD)  [35]. Lors du vote sur ces motions, le 26 mars 2004, un incident survint du fait de l’intention manifestée par le groupe MR de s’abstenir sur la motion pure et simple par cohérence avec le vote positif émis la semaine précédente sur le même sujet à l’assemblée de la Commission communautaire française. Anne-Sylvie Mouzon annonça alors également une abstention du PS. Elle rappelait que les accords du Lombard avaient prévu l’assentiment des assemblées après un accord interministériel sur la notion de minorité. Or, la conférence n’ayant plus été réunie depuis quelques mois, la parlementaire socialiste estimait qu’il ne servait à rien d’avancer seul. Après une intervention de séance demandée par la présidente du groupe MR Marion Lemesre, celle-ci annonçait que le MR apporterait sa confiance au gouvernement. Anne-Sylvie Mouzon apportait alors également celle du groupe socialiste. Le CDH, n’ayant pas obtenu un vote sur la priorité à la motion motivée qu’il avait déposée, quitta l’hémicycle. L’ordre du jour pur et simple fut voté par 41 voix contre 10 ; il y eut 4 abstentions  [36].

1.4. SYNTHÈSE

49 Lors de notre étude sur les relations communautaires à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune  [37], nous étions arrivé à la conclusion que les néerlandophones de Bruxelles ne remettaient pas en cause le statut de la Région de Bruxelles-Capitale mais qu’ils se montraient très sourcilleux quant à leur place au sein des institutions bruxelloises et au respect de la législation linguistique. Du côté francophone, nous avions identifié une grande vigilance à l’égard du statut de la Région de Bruxelles-Capitale. Les débats qui se sont déroulés au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale durant la législature 1999-2004 ainsi qu’au groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises confirment ces tendances.

50 Au groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises, les néerlandophones ont âprement négocié leur représentation garantie au sein du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale et leur place dans les collèges des bourgmestre et échevins et ont obtenu satisfaction sur ces points grâce aux accords du Lombard. Outre l’augmentation des moyens financiers attribués aux commissions communautaires, les francophones sont parvenus dans l’accord du Lombard à un assouplissement de la règle de la double majorité, ce qui réduit les risques de blocage des institutions bruxelloises  [38].

51 Au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, les néerlandophones ont déposé des interpellations et posé des questions parlementaires relatives au respect de la législation linguistique. Le respect de l’accord de courtoisie linguistique a, plus particulièrement, retenu leur attention. En dehors du Vlaams Blok, intraitable à propos de la législation linguistique, ce sont les groupes VLD-VU-O (devenu VLD) et CVP (devenu CD&V) qui se sont montrés les plus combatifs par la voix respectivement de Sven Gatz et de Brigitte Grouwels. Du côté francophone, c’est, sans surprise, la composante FDF de la Fédération PRL FDF MCC (devenue MR) qui s’est opposée à eux. Le FDF a en effet argumenté sans relâche sur le fait que l’accord de courtoisie linguistique impliquait une adaptation des examens du SELOR, dont il considérait la difficulté comme démesurée et qu’il allait jusqu’à assimiler à une forme de discrimination à l’embauche. Des compromis sont intervenus, tels que le vote d’une motion équilibrée le 14 décembre 2001 qui demandait à la fois l’adaptation des examens linguistiques (préoccupation francophone) et l’application intégrale de l’accord (préoccupation néerlandophone) ou les prolongations de l’accord intervenues en août 2000 et en juillet 2002. Néanmoins, à l’instar de ce qui s’était passé en 1997-1999, le VLD semble ne pas faire confiance à la représentation politique régionale bruxelloise pour régler le problème et a porté celui-ci au plan fédéral comme en témoignent les propositions de loi qu’il a déposées au Sénat.

52 Tous les partis politiques francophones, à l’exception de l’extrême droite, ont réagi avec une grande vigueur aux propos (déclarations du 9 décembre 2000) et attitudes (refus d’officialiser des réunions de son gouvernement avec le gouvernement bruxellois) du ministre-président flamand Patrick Dewael. Le PSC (devenu CDH), Écolo et le PS se sont parfois unis pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une absence de fermeté chez le ministre-président François-Xavier de Donnea. Du côté flamand, si l’on excepte le Vlaams Blok et la démarche ambiguë de la présidente du groupe social-chrétien flamand Brigitte Grouwels, on constate une prise de distance par rapport aux idées de Patrick Dewael. L’attachement des élus néerlandophones régionaux bruxellois au statut régional ne les empêche cependant pas de mettre l’accent sur le rôle de capitale de Bruxelles. Ici aussi, une position commune s’affirme, notamment dans la motion du 12 janvier 2001, laquelle, tout en soulignant le rôle de capitale de Bruxelles (préoccupation flamande), réaffirme l’équivalence du statut de la Région de Bruxelles-Capitale par rapport aux deux autres régions (préoccupation francophone).

53 Notons enfin que le débat sur la périphérie s’est développé au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, suite à l’engagement pris par le pouvoir fédéral de signer la conventioncadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales. Mais, contrairement aux thèmes précédents, un accord entre francophones et néerlandophones sur ce dossier extrêmement sensible est apparu nettement plus problématique.

2. LA FISCALITÉ

54 La déclaration gouvernementale bruxelloise du 15 juillet 1999 prévoyait que la pression fiscale globale pesant sur les habitants de la Région de Bruxelles-Capitale ne serait pas augmentée  [39]. Très vite, des échanges eurent lieu entre partenaires de la majorité sur ce sujet ; les libéraux – dont le ministre libéral flamand Guy Vanhengel – manifestaient leur intention de faire baisser la pression fiscale, alors que les socialistes, francophones comme flamands, ne voulaient pas s’engager dans cette voie  [40].

55 La réforme de l’État de 2001, en régionalisant de nouveaux impôts régionaux et en accordant une certaine autonomie fiscale aux régions, rendait ce débat inévitable.

2.1. LA RÉFORME DE 2001

56 Pour l’ensemble des impôts régionaux, les régions devenaient désormais totalement compétentes pour modifier le taux d’imposition, la base d’imposition et les exonérations.

57 À la liste des impôts régionaux repris dans l’article 3 de la LSF s’ajoutent :

  • les droits d’enregistrement sur :
    • la constitution d’une hypothèque sur un bien immeuble situé en Belgique,
    • les partages partiels ou totaux de biens immeubles situés en Belgique, les cessions à titre onéreux, entre copropriétaires, de parties indivises de tels biens,
  • les droits d’enregistrement sur les donations entre vifs de biens meubles ou immeubles ;
  • la redevance radio-télévision ;
  • la taxe de circulation sur les véhicules automobiles ;
  • la taxe de mise en circulation ;
  • l’eurovignette.
L’ancien statut régional fictif des écotaxes disparaît. La taxe de circulation devient un impôt régional  [41].

58 Il est prévu que l’administration fédérale continue à assurer gratuitement la perception des impôts régionaux (à l’exception de la redevance radio-télévision perçue par les communautés jusqu’au plus tard le 31 décembre 2004) mais les régions peuvent reprendre le service de la perception de tous les impôts régionaux à leur charge.

59 Des dispositions sont prises pour éviter le risque de migration fiscale, de délocalisation et de concurrence malsaine entre les diverses autorités  [42]. Un accord de coopération doit être conclu pour des impôts ayant des bases très mobiles telles que la taxe de circulation, la taxe de mise en circulation et l’eurovignette  [43].

60 Le transfert de nouveaux impôts régionaux doit s’opérer dans le cadre de la neutralité budgétaire. Cela signifie que les recettes fiscales supplémentaires de chaque Région doivent être portées en diminution de la part de l’IPP attribuée aux régions. Ce montant à déduire, appelé le « terme négatif » est calculé sur la base des recettes des impôts régionaux de 1999 à 2001. Pour l’année budgétaire 2002, un montant de départ est déterminé sur base de la moyenne des recettes des nouveaux impôts régionaux des exercices budgétaires 1999-2001 exprimées en prix 2002. À partir de 2003 on adapte ces montants indexés à 91% de la croissance du RNB.

61 Un mécanisme est néanmoins instauré pour chaque Région à partir de l’année budgétaire 2003 au cas où, à politique inchangée, les recettes des nouveaux impôts localisés dans la région concernée, à l’exception de la redevance radio-télévision, et les recettes supplémentaires résultant du transfert intégral des droits d’enregistrement présenteraient une diminution en termes nominaux par rapport au niveau initial pour l’année budgétaire 2002. Ce dispositif de sécurité fonctionnerait à plein rendement pendant les cinq premières années. Pour les années 2008 à 2012 incluses, la compensation diminuerait progressivement (chaque année de 16,67 points du montant de base de la correction de transition obtenu pour la même année). À partir de l’année budgétaire 2013, il n’est plus accordé de correction de transition  [44]. Géraldine Van der Stichele et Magali Verdonck ainsi que Giuseppe Pagano considèrent que la correction de transition sera inopérante. En effet, pour qu’elle agisse, il faudrait que les recettes nominales des impôts transférés pendant une année donnée soient inférieures à leur montant de 2002, ce que l’évolution de l’index rend très peu probable  [45].

62 Les régions obtiennent une autonomie fiscale pour la part restante qu’elles perçoivent de l’IPP et peuvent appliquer des réductions d’impôts (forfaitaires), des augmentations et des réductions générales liées aux compétences des régions  [46]. Il est fixé une marge dans laquelle cette latitude leur est accordée. Cette marge est exprimée par rapport au produit de l’IPP localisé dans chaque Région et s’élève à 3,25% à partir du 1er janvier 2001 et à 6,75% à partir du 1er janvier 2004  [47].

63 L’exercice des compétences fiscales régionales à l’égard de l’impôt des personnes physiques doit s’effectuer sans diminuer la progressivité de l’impôt et en excluant toute concurrence fiscale déloyale. Une procédure de concertation est prévue. Une Région qui souhaite appliquer des augmentations ou soustractions d’impôts doit en informer le gouvernement fédéral ainsi que les gouvernements des deux autres régions et demander l’avis de l’assemblée générale de la Cour des comptes  [48].

64 Des moyens supplémentaires sont prévus par la loi spéciale du 13 juillet 2001 afin que les régions puissent faire face aux nouvelles compétences qui leur sont transférées  [49].

2.2. LES SUITES DE LA RÉFORME DE 2001

2.2.1. Le Fonds de réserve

65 Le système de la neutralité budgétaire devait immanquablement amener une modification de la structure des recettes de la Région de Bruxelles-Capitale. En effet, les experts budgétaires estimaient que la part des impôts régionaux dans le total des recettes de la Région passerait de 21% à en 2001 à près de 50% en 2002. En contrepartie, la part de la dotation IPP accordée par le fédéral diminuerait de 26% (passant de 60% en 2001 à 34% en 2002). Le phénomène devait être plus perceptible en Région bruxelloise que dans les autres régions. Ainsi, en Région wallonne, il apparaissait que la part des impôts régionaux ne constituerait qu’environ 30 % du total des recettes après la dernière réforme de l’État contre 10% auparavant. En Flandre, l’effet serait encore moins visible, en raison de la fusion du budget communautaire et régional. Cette différence interrégionale s’explique par le fait que la part de la Région bruxelloise dans le total des impôts régionaux s’élève à environ 17% pour les impôts précédemment régionalisés et à 13% pour les impôts nouvellement régionalisés, alors que la dotation IPP bruxelloise ne représente que 9% de la dotation totale. La cause en est la relative densité du patrimoine immobilier bruxellois, base des impôts régionaux les plus importants (droits d’enregistrement, droits de succession, droits de donation et précompte immobilier). Le caractère cyclique des recettes des impôts régionaux allait inévitablement causer, vu leur quote-part de presque 50 % dans le total, des variations dans le budget des voies et moyens. Afin d’éviter que la Région ne dépense tous ses moyens pendant une année de croissance pour ensuite être obligée de contracter des emprunts lors d’une année de diminution, un fonds de réserve, nommé le « Fonds Grenier à blé », a été créé pour mettre de côté des boni budgétaires ou des bénéfices fortuits et de pouvoir faire face à des contretemps lors des années suivantes  [50].

66 La création de ce fonds fut appréciée de façon différente dans la majorité. Le groupe PRL-FDF exprima sa satisfaction. Éric André y vit un élément clé de la politique financière que le gouvernement allait mener à l’avenir. Serge de Patoul se réjouit de la création du fonds, la considérant comme une donnée absolument indispensable de la gestion financière régionale. Par contre, le président du groupe socialiste Rudi Vervoort ne cacha pas une certaine perplexité. Il remarqua que les 400 millions inscrits en dépense au budget initial 2002 dans un fonds de réserve correspondaient exactement au dépassement du déficit autorisé par le Conseil supérieur des Finances. Cela avait été souligné par la Cour des comptes qui considérait que ce montant pourrait être réduit du calcul de la norme CSF à condition qu’il soit soustrait des recettes de l’exercice au cours duquel il serait retransféré au budget régional. Rudi Vervoort en conclut donc que ce dépassement de 400 millions en 2002 réduisait d’autant le déficit autorisé l’année où il était utilisé pour des politiques  [51] .

2.2.2. La fusion de la redevance radio-télévision et de la taxe régionale

67 Lors de l’examen en commission du projet de budget 2002, le ministre des Finances Guy Vanhengel avait insisté sur la nécessité de redimensionner et revoir la pression fiscale et parafiscale régionale. L’évolution du dossier sur l’ouverture d’un casino à Bruxelles lui laissait entrevoir des possibilités à cet égard. La perspective de faire « des cadeaux fiscaux » suscitait certaines réserves de la part d’Écolo et du PS, qui mettaient l’accent sur le besoin de moyens pour rencontrer les politiques qui devaient être menées. Le PRL-FDF, par la voix d’Éric André, faisait savoir que deux dossiers nécessitaient une initiative rapide du gouvernement dans le contexte de concurrence fiscale qui régnait. Le premier était relatif aux droits de succession, où il s’agissait d’opérer une réforme intégrant l’évolution des législations intervenues dans les autres régions. Le second concernait la redevance radio-télévision ; l’idée de fusionner la taxe régionale et cette redevance rencontrait leur faveur, mais l’élargissement de l’assiette à l’ensemble des ménages et entreprises devait être l’occasion d’une réduction substantielle du montant à charge de chaque ménage bruxellois. Dans sa réponse aux différents intervenants dans le débat budgétaire du 14 décembre 2001, le ministre Vanhengel annonçait que le gouvernement venait de décider d’intégrer la redevance radio-télévision dans la taxe régionale  [52].

68 Au cours du débat en commission sur le projet d’ordonnance du gouvernement, le président du groupe socialiste Rudi Vervoort déclara ne pas voir de problème dans la fusion de ces deux taxes mais s’interrogeait sur le caractère juste et distributif de la nouvelle taxe. Il souhaitait donc un débat plus général. Aussi déposait-il un amendement destiné à limiter à un an la réforme de la taxe régionale afin de permettre au projet de démarrer mais aussi d’être rediscuté une fois que le débat global aurait eu lieu. Le ministre Vanhengel déclara que cet amendement posait un problème. La proposition qu’il contenait n’avait en effet jamais été soulevée au gouvernement. Après une interruption de séance, le ministre Vanhengel annonça que le gouvernement déposait un amendement qui prévoyait une évaluation annuelle des modalités d’exécution et des effets de la taxe. Il ajoutait que le gouvernement ferait de son mieux pour régler très prochainement la problématique des droits de succession des cohabitants – une proposition socialiste avait été déposée sur ce sujet – et pour ouvrir très rapidement une discussion globale sur la fiscalité. Enfin, il précisait que, si des marges supplémentaires se dégageaient à l’avenir, le gouvernement utiliserait ces marges pour adapter la fiscalité régionale. Satisfait de la réponse du ministre, Rudi Vervoort retirait son amendement. Le député écologiste Christos Doulkeridis reprenait alors pour le compte de son groupe l’amendement de Rudi Vervoort et redéposait ce texte non modifié  [53].

69 Durant le débat en séance plénière sur le sujet, le 8 février 2002, Alain Adriaens (Écolo) déplorait les conditions qui avaient présidé à ce débat suite aux divisions évidentes au sein de la majorité, ainsi que le peu de temps consacré au débat de fond. Il était évident que la redevance radio-télévision était dépassée et devait être abandonnée. Dès lors, la question qui se posait était de savoir comment compenser la perte de 2,4 milliards de francs belges. Alain Adriaens considérait la réponse du gouvernement comme décevante et idéologiquement orientée. S’il pouvait comprendre l’indexation de la taxation des surfaces professionnelles visant les moyennes et grandes entreprises, le triplement de la taxe forfaitaire sur tous les ménages bruxellois était inacceptable pour Écolo. Or, des alternatives à la taxe linéaire et forfaitaire proposée par le gouvernement existaient. L’ajout d'un demi pourcent aux additionnels IPP et au précompte immobilier et l’ajout de 15% à la taxe de circulation permettaient, tout en respectant la neutralité fiscale globale, de faire porter le poids des 2,4 milliards disparus sur ceux pour qui cette augmentation n'aurait qu'un impact dérisoire. Éric André (PRL-FDF) estimait qu’il y avait unanimité sur le fait qu’un débat fiscal global portant sur les particuliers comme sur les entreprises était nécessaire. Réagissant aux propos d’Alain Adriaens, il faisait savoir que le PRL-FDF ne laisserait pas libre cours à une augmentation de la fiscalité. Pour lui, la fusion de la redevance radio-télévision et de la taxe régionale ne pouvait être considérée comme une injustice sociale puisque le gouvernement avait opéré un élargissement des exonérations. Il considérait que l’indexation de la partie de la taxe régionale portant sur les entreprises remettait à niveau les deux composantes de cette taxe. Constatant qu’en francs constants, il ne s’agissait pas d’un alourdissement de la fiscalité pour les entreprises, il estimait, par contre, qu’il faudrait mettre un jour sur la table le problème de la fiscalité communale. Le député PSC Benoît Cerexhe se déclarait choqué par l’attitude qu’avait adoptée le Parti socialiste. Il estimait que ce projet n’aurait pas été possible sans le soutien de son groupe. Il voulait cependant le voir modifié et annonçait le dépôt d’amendements visant à exonérer de la taxe régionale autonome les chefs de ménage qui ne possèdent pas de téléviseur, à éviter les doubles et parfois les triples impositions – privé, bureau – des indépendants et commerçants qui exercent leur activité à Bruxelles et à supprimer l’effet rétroactif de l’indexation de la fiscalité régionale sur les entreprises et les bureaux. Le PSC n’était pas opposé à une indexation de la fiscalité sur les entreprises, mais cela nécessitait au préalable, une étude comparative entre la fiscalité pesant sur les entreprises bruxelloises et les régimes fiscaux en vigueur dans les deux autres régions. Éric André faisait alors remarquer que c’était l’impôt communal qui faisait la différence. Rudi Vervoort (PS) signalait que le PS avait approuvé sans réserve le principe de cette réforme mais qu’il ne voulait pas d’une simple addition des deux taxes qui auraient conduit à un quadruplement du prélèvement sur les ménages bruxellois. Il avait obtenu satisfaction, puisque le gouvernement avait voulu limiter l’impact sur les personnes par une meilleure répartition de la charge sur les entreprises. Une autre exigence socialiste avait été rencontrée : un système d’exemption le plus large possible, afin de préserver de cette augmentation les personnes les plus précarisées. Enfin, le groupe socialiste avait souhaité que l’on s’attelle à mettre en place progressivement un système qui intègre la capacité contributive des personnes. Il avait été suivi par Écolo puisque Christos Doulkeridis avait repris intégralement sa proposition d’amendement et ses justifications. L’évaluation annuelle proposée par le gouvernement était bien une évaluation spécifique imposée annuellement au gouvernement. Le groupe socialiste attendait donc un rapport détaillé sur le produit de la taxe ventilée selon les différentes catégories de ménages, les exemptions, les difficultés de perception tant du point de vue de l’administration que de celui des contribuables. Il se réjouissait de l’engagement pris par le gouvernement de mettre en place un groupe de travail sur la fiscalité et de faire voter la proposition d’Anne-Sylvie Mouzon visant à supprimer la discrimination entre cohabitants et couples mariés en matière de droits de succession  [54]. La réforme fut votée le 8 février 2002 par les groupes de la majorité ; Écolo, le Vlaams Bok et une partie de l’extrême droite francophone votaient contre tandis que le PSC et une autre partie de l’extrême droite francophone s’abstenaient. Elle introduisait un tarif zéro pour la redevance radio-télévision. Afin de ne pas compromettre les objectifs de la Région, en particulier la neutralité budgétaire, cette mesure était compensée par une majoration de la taxe régionale autonome. La taxe régionale forfaitaire passait ainsi de 50,32 € (2 030 FB) en 2001 à 165 € (6 656 FB) en 2002. Le montant à payer par mètre carré pour certains immeubles montait de 4,96 € (200 FB) par mètre carré à 6,36 € (257 FB). De plus, une indexation de la taxe sur les mètres carrés était prévue dès 2003.

70 À cette occasion, les exonérations en matière de paiement de la taxe forfaitaire régionale ont été élargies (invalides, familles nombreuses).

71 Afin de tenir compte des effets sociaux de ces dispositions sur les ménages et de pouvoir, le cas échéant, corriger leurs effets éventuellement injustes, le gouvernement devait procéder annuellement à une évaluation.

2.2.3. La proposition d’ordonnance relative aux taux d’imposition et exonération des droits de succession et de mutation par décès applicables aux cohabitants légaux

72 La proposition d’Anne-Sylvie Mouzon, qui visait à appliquer aux couples non mariés (homosexuels et hétérosexuels) les exonérations applicables aux époux en matière de droits de succession, fut débattue en commission durant les mois de mars et d’avril 2002. Avant le vote, le PRL-FDF souhaitait une déclaration du gouvernement sur ses projets pour éviter une augmentation de la fiscalité en matière de droits de succession. Cela créa une tension en commission, le PS soupçonnant les libéraux de recourir au chantage en vue de faire adopter leurs propres propositions fiscales  [55]. La proposition socialiste fut adoptée en commission le 18 avril et un compromis intervint au gouvernement prévoyant que le 20 juin celui-ci adopterait des projets réformant la fiscalité, notamment en matière de droits d’enregistrement  [56]. La proposition fut votée le 8 mai 2002.

73 Au cours du débat en séance plénière, Anne-Sylvie Mouzon rappela que cette proposition, qui inscrivait dans la législation régionale une conséquence de l’avancée inscrite dans le code civil, avait été déposée par le groupe socialiste dès 1998. Elle regrettait que, alors que le Parlement bruxellois avait été le premier à prendre en considération une proposition supprimant la discrimination entre cohabitants légaux et couples mariés dans les droits de succession, il serait la dernière des assemblées régionales à la voter. Elle soulignait aussi que, contrairement au texte initial, l’assimilation aux couples mariés s’appliquerait à tous les cohabitants légaux et donc pas seulement aux cohabitants légaux unis par un lien affectif. Il s’agissait donc à Bruxelles d’un compromis politique. Cet amendement du gouvernement ne serait pas sans conséquence sur le plan financier puisqu’en élargissant la catégorie concernée, on risquait d’inciter un plus grand nombre de personnes à recourir aux avantages en matière successorale. Anne-Sylvie Mouzon voulait voir entamer dans les semaines suivantes le débat relatif à la réforme fiscale auquel le gouvernement s’était engagé. Elle annonçait que le groupe socialiste veillerait à ce que cette réforme établisse une fiscalité plus juste basée sur la capacité contributive des citoyens. Mais, pour elle, cette réforme devait être menée dans un cadre budgétaire neutre. Bruxelles devait en effet faire face à de nombreux défis et les contribuables étaient aussi des citoyens qui attendaient de leur Région qu’elle soit capable de consacrer des moyens importants pour résoudre leurs difficultés quotidiennes.

74 Le député écologiste Christos Doulkeridis soulignait l’appui sans équivoque que son groupe avait apporté à cette proposition. Il aurait préféré, lui aussi, que l’on s’en tienne au texte original, l’objectif, pour sa formation, ayant été que l’on s’attache à viser les couples homosexuels et hétérosexuels. Concernant le prochain débat fiscal, il considérait qu’il fallait refuser d’entrer dans une logique obsessionnelle et quasi caricaturale de baisse des impôts. Il insistait sur l’extrême importance des missions qui incombaient à la Région en termes d’offres de services publics.

75 Serge de Patoul (PRL-FDF) estimait que la lenteur des débats avait résulté de blocages idéologiques et il pointait « la volonté de certains de vouloir à tout prix fiscaliser au maximum le patrimoine ou le capital ». Il soulignait la nécessité de procéder en Région bruxelloise à une révision en profondeur de la fiscalité. Il pensait que maintenir les recettes et diminuer la fiscalité n’était pas une équation impossible. Il se déclarait en effet convaincu que la diminution de certaines impositions pouvait générer plus de recettes car elle dissuaderait la fraude.

76 Le ministre Vanhengel, s’adressant à la gauche, affirmait qu’une augmentation de la pression fiscale n’égalait pas systématiquement des recettes fiscales supplémentaires et que la diminution de la pression fiscale n’impliquait pas nécessairement une diminution des recettes fiscales  [57].

2.2.4. L’accord du 20 juin 2002

77 Le 16 mai 2002, le journaliste de La Libre Belgique Pascal Sac fit état des critiques du ministre socialiste Éric Tomas à l’égard de son collègue des Finances Guy Vanhengel qu’il soupçonnait de s’être entendu avec le MR. Éric Tomas énonçait un certain nombre de pistes qui prenaient le contre-pied des idées du ministre libéral flamand. Cette prise de position suscita une question d’actualité du député Olivier de Clippele qui demanda au ministre Vanhengel de clarifier la position du gouvernement. Guy Vanhengel répondit que le Conseil des ministres du 18 avril avait décidé de mettre en place un groupe de travail intercabinet pour préparer la réforme fiscale régionale dans un cadre budgétaire neutre. Il avait déposé deux projets d’ordonnance visant à réformer les droits de succession et les droits d’enregistrement. Son collègue Tomas lui avait transmis une note reprenant les positions du PS en matière de fiscalité régionale. La discussion était en cours et chaque mesure était évaluée en fonction de son impact budgétaire. Il affirma que toutes les composantes du gouvernement étaient d’accord pour aboutir à la réforme fiscale pour le 20 juin  [58]. Le 7 juin 2002, Christos Doulkeridis interrogea le ministre-président sur les informations diffusées par la presse relatives à la réforme fiscale et sur une déclaration d’Éric Tomas qui semblait dire que la date du mois de juin ne devait pas être considérée comme une date fétiche. François-Xavier de Donnea répondit qu’un accord interviendrait dans les délais prévus  [59] .

78 Le gouvernement parvint effectivement à un accord le 20 juin 2002. Cet accord, à transposer dans une ordonnance, contient une série de dispositions relatives aux droits d’enregistrement, aux droits de succession et aux exonérations de la taxe régionale autonome qui devaient entrer en vigueur à partir du 1er janvier 2003. Il comporte une réduction des droits d’enregistrement. Un système uniforme d’abattement linéaire, indépendant du revenu du candidat acheteur, est instauré en vue d’alléger la facture d’achat d’un bien immobilier dans la Région. Si le bien est situé dans un « espace de développement renforcé du logement » (EDRL), où figurent les quartiers fragilisés du centre-ville, le bénéfice fiscal est de 7 500 € (300 000 FB). En dehors de ces zones spécifiques, l’avantage s’élève à 5 625 € (225 000 FB). Une telle réduction aboutit à la suppression pure et simple des droits d’enregistrement pour les biens d’une valeur qui ne dépasse pas 50 000 €. Sur les biens immobiliers de valeur élevée, l’abattement a par contre un impact proportionnel progressivement moins important. L’objectif étant de favoriser l’habitat à Bruxelles, cette diminution d’impôt n’est évidemment d’application qu’à la condition que l’acquéreur établisse sa résidence principale dans l’habitation acquise. Il dispose de deux ans pour cela étant donné que des travaux de rénovation peuvent s’avérer nécessaires.

79 L’acquéreur doit en outre résider pendant au moins cinq ans dans la Région de Bruxelles-Capitale, mais pas nécessairement dans le bien acheté. S’il ne respecte pas ces conditions, il s’expose à une obligation de remboursement intégral de l’avantage fiscal.

80 Grâce à cette opération, les droits d’enregistrement devenaient moins élevés à Bruxelles qu’en Wallonie. Ils devenaient également plus intéressants que ceux d’application en Flandre pour les biens d’une valeur inférieure à 250 000 €.

81 L’ancien taux réduit de 6 % de droits d’enregistrement (au lieu de 12 %) qui concernait les revenus cadastraux de moins de 30 000 FB est supprimé.

82 Cela se justifie par le fait que le critère d’attribution de ce tarif réduit se trouvait rarement appliqué.

83 Par ailleurs, le tarif préférentiel de 5 % dont bénéficient les promoteurs immobiliers est porté à 8 %, ce qui doit générer une recette de 4 500 000 € (180 000 000 FB) pour la Région.

84 Un effort est en effet demandé au secteur concerné en tenant compte du fait que la diminution d’impôt lors de l’acquisition d’une habitation engendrerait une hausse des transactions immobilières.

85 Une partie de l’accord gouvernemental du 20 juin porte sur les droits de succession.

86 Il réduit d’un tiers les tarifs des droits de succession pour une habitation familiale reprise dans la succession en ligne directe ; du moins pour la partie de sa valeur qui n’excède pas les 250 000 € (10 millions de FB). Par contre, les droits sont plus élevés pour les successions en ligne collatérale, dans la mesure où l’on globalise le calcul du taux à appliquer. Cela signifie que la part de chaque héritier en ligne indirecte est frappée du taux applicable à la valeur de l’héritage avant le partage en plusieurs parts.

87 Les droits de succession entre frère et sœur restent inchangés tandis que l’on met sur le même pied les enfants nés d’une première et d’une seconde union.

88 Enfin, des catégories supplémentaires d’habitants sont exonérées de la taxe régionale autonome à partir de 2003.

89 Cet accord fut intégré dans des projets d’ordonnance qui furent votés le 20 décembre 2002. L’ordonnance modifiant le code des droits de succession fut votée par les groupes de la majorité ; le CDH, l’extrême droite flamande et francophone ainsi qu’Albert Mahieu votèrent contre, Écolo s’abstint. L’ordonnance modifiant le code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe fut votée par l’ensemble des membres, à l’exception de Margueritte Bastien et de Stéphane de Lobkowicz qui s’abstinrent  [60].

2.2.5. L’élargissement du champ des exonérations à la taxe régionale

90 Le 28 mars 2003, le Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale examinait un projet d’ordonnance modifiant l’ordonnance du 23 juillet 1992 relative à la taxe régionale à charge des occupants d’immeubles bâtis et de titulaires de droits réels sur certains immeubles. Ce projet élargissait le nombre de personnes exemptées du paiement de la taxe. Initialement, le projet prévoyait une exemption pour les chefs de ménage dont les revenus du ménage étaient égaux ou inférieurs à 115 % du revenu d’intégration. Un amendement déposé par Anne-Sylvie Mouzon étendait les exonérations jusqu’à 120% du revenu d’intégration et prenait en compte les deux revenus d’intégration du ménage pour les cohabitants. De son côté, le groupe MR faisait adopter un amendement qui dispensait de la taxe un chef de ménage quand lui-même ou un membre de son ménage était déjà redevable en raison de l’activité professionnelle qu’il exerçait dans l’immeuble en tant que personne physique. Une exonération similaire était prévue pour le chef de ménage gérant d’une petite société lorsqu’il habitait dans l’immeuble de sa SPRL. Les exonérations existantes pour personnes handicapées étaient accordées à partir de 66% d’invalidité alors que, jusque-là, le seuil était de 80%. Enfin, la taxe n’était pas due pour les immeubles où se tenaient régulièrement des séances plénières du Parlement européen, d’une chambre fédérale, d’un conseil régional, d’un conseil de Communauté, d’une assemblée de commission communautaire, d’un conseil communal ou d’un conseil de l’aide sociale. Plusieurs amendements déposés par le CDH avaient été rejetés en commission : le premier prévoyait une exonération pour les chefs de ménage qui souscriraient une déclaration sur l’honneur attestant qu’ils ne disposaient pas d’un téléviseur ; le deuxième prévoyait de relever l’âge de 21 ans des enfants à charge dans les familles nombreuses ; le troisième limitait les exonérations au précompte immobilier aux immeubles administratifs des entités qui tombaient uniquement sous la tutelle de la Région bruxelloise ; enfin, le dernier portait sur les asbl à finalité sociale. Le député écologiste Alain Adriaens rappelait l’opposition de son groupe à la création d’une seule taxe au montant élevé qui frappait indistinctement tous les ménages quel que soit le montant de leurs revenus. Comme ce qui était proposé dans le projet constituait une atténuation des effets socialement négatifs de la taxe régionale, il annonçait un vote positif d’Écolo. Mais il déplorait le « compromis boiteux » par lequel les communes, qui refusaient depuis des années de payer la partie de la taxe liée au mètre carré de surface administrative, se voyaient libérées d’environ la moitié du montant de la taxe. Rudi Vervoort rappelait ce qu’avait obtenu le groupe socialiste dans le cadre de la discussion fiscale. L’ordonnance modifiant la taxe régionale votée en février 2002 devait être évaluée. Il convenait que l’on ne pouvait évaluer quelque chose qui n’était pas encore totalement en fonction, mais cela devrait se faire et son groupe y serait attentif, parce qu’il fallait aboutir à un caractère plus progressif de cet impôt. Le groupe socialiste avait également demandé un débat global à propos de la fiscalité. Ce débat avait eu lieu à la fin de l’année précédente. Le troisième volet concernait les exonérations qui étaient débattues ce jour. Il trouvait que la charge d’Écolo contre l’institution municipale était excessive et relativement inutile. Le président du groupe CDH Benoît Cerexhe soulignait l’accouchement pénible de ce volet de la taxation régionale au sein de la majorité. Il faisait remarquer à Rudi Vervoort qu’en dépit de sa position, le caractère forfaitaire de la taxe était maintenu. Le CDH était favorable à une exonération pour les plus faibles revenus mais la proposition qu’il avait déposée était plus intéressante et plus simple à appliquer. Il approuvait également le volet relatif aux personnes handicapées. Il déplorait le rejet en commission des amendements que son groupe avait déposés et répétait la pertinence de ceux-ci. Concernant l’exonération des bâtiments où siègent des élus, il proposait d’étendre celle-ci à l’ensemble des bâtiments communaux. Par contre, il ne voyait aucune objection à ce que les divers parlements qui siègent en Région bruxelloise soient soumis à la taxe. Bien que considérant ce projet comme mauvais, il annonçait un vote favorable de son groupe parce qu’il s’agissait d’une réduction de fiscalité au profit des plus faibles dans la région. Marion Lemesre (MR) se réjouissait au nom de son groupe des mesures proposées par le gouvernement en vue d’alléger la pression fiscale sur les Bruxellois. Le MR, particulièrement sensibilisé par les nombreuses réclamations introduites dans le cadre de l’enquête publique sur le PRD, estimait que la Région devait, pour être réellement équitable, veiller à l’équité fiscale en mettant fin à la double taxation dont les commerçants faisaient l’objet au niveau de la taxe régionale. Un double paiement pour des commerçants habitant le même immeuble était excessif, d’autant plus que les commerçants qui faisaient ce type de choix de vie encourageaient le développement urbain. En préconisant la promotion de logements au-dessus des commerces, le PRD poursuivait le même objectif. Il s’agissait donc d’avoir une même cohérence sur les plans urbanistique et fiscal. Enfin, elle se réjouissait de l’exonération des communes en ce qui concernait les bâtiments où se réunissaient les assemblées élues. Mais, sur ce plan, elle partageait l’avis de Benoît Cerexhe selon lequel il faudrait arriver à exonérer d’autres bâtiments communaux. Jan Béghin(CD&V) apportait le soutien de son groupe au projet d’ordonnance, considérant qu’un beau compromis avait été trouvé pour les taxes sur les bâtiments publics  [61].

91 Le projet fut voté par l’ensemble des formations à l’exception de Denis Grimberghs (CDH), d’Albert Mahieu (indépendant) et de l’extrême droite flamande et francophone  [62].

92 Le 28 novembre 2003, Benoît Cerexhe faisait état de la position de la Cour d’arbitrage qui semblait lui donner raison à propos du critère de l’âge de 21 ans pour la comptabilisation des enfants à charge. Le ministre Guy Vanhengel reconnaissait que les arguments de la Cour d’arbitrage étaient convaincants. Comme il ne tenait pas à « forcer » d’autres familles nombreuses à introduire un recours, il avait demandé à la Cour d’arbitrage si un remboursement était envisageable. Il partageait le souci de Benoît Cerexhe d’étendre l’exonération  [63]. L’ordonnance relative à la taxe régionale fut modifiée en ce sens le 24 avril 2004.

2.3. SYNTHÈSE

93 Latent jusqu’en 2001, le débat fiscal fut abordé après la réforme de l’État qui transférait un certain nombre d’impôts régionaux et qui accordait une certaine autonomie fiscale aux régions. On constate un clivage idéologique assez net en examinant les débats qui portèrent alors sur la taxation régionale. Alors que le ministre libéral flamand Guy Vanhengel, soutenu par le MR, défendait l’idée d’un allègement de la pression fiscale à Bruxelles, les socialistes et les écologistes refusaient que la Région se prive de moyens nécessaires pour mener des politiques indispensables.

94 La déclaration gouvernementale refusant tout alourdissement de la fiscalité et ne prévoyant pas d’allègement de celle-ci, des compromis furent trouvés pour réaménager la fiscalité dans le cadre de la neutralité budgétaire. Mais ils le furent au terme de débats assez tendus au sein de la majorité. Ainsi, lors de l’examen du projet d’ordonnance fusionnant la taxe régionale et la redevance radio-télévision, la logique d’une taxation linéaire et forfaitaire défendue par les libéraux se heurta à l’approche d’une fiscalité progressive soutenue par les socialistes et les écologistes. À cette occasion, on vit même les écologistes déposer à leur nom un amendement socialiste qui avait été retiré pour éviter un grave problème de majorité.

95 Les accommodements intervenus donnent l’impression d’un chantier inachevé et il n’est pas douteux que la question de la fiscalité sera remise à l’ordre du jour lors de la prochaine législature.

3. LA MOBILITÉ

96 La déclaration gouvernementale comportait un important chapitre consacré à la mobilité. Le député régional Willem Draps (PRL-FDF), qui s’en réjouissait, y voyait une nette inflexion par rapport à la ligne suivie en la matière par le précédent gouvernement et y décelait le rôle joué par Écolo durant les négociations gouvernementales  [64]. Une attention toute particulière y était en effet portée aux transports en commun.

97 La déclaration prévoyait notamment :

  • l’augmentation de l’offre de transport en commun : augmentation des fréquences et de la vitesse commerciale ;
  • la priorité accordée au transport public dans l’ensemble des aménagements ;
  • le maintien du statut public de la STIB ;
  • la limitation du trafic automobile lié aux déplacements domicile-travail, notamment par une politique active en matière de stationnement ;
  • la poursuite des efforts en faveur de la réalisation du RER en collaboration avec le pouvoir fédéral et les autres régions. La démarche était cependant très clairement encadrée afin d’éviter les effets pervers qu’elle pourrait générer : mesures d’accompagnement favorisant le transfert de la voiture vers le transport en commun, exigence de l’optimalisation des lignes ferroviaires et des gares existantes à Bruxelles.
    Il était en outre fermement affirmé que le budget régional ne serait pas mis à contribution sauf en ce qui concernait l’éventuel aménagement du réseau de la STIB ;
  • une attention à la réalisation d’une desserte rapide et efficace vers l’AZ-Jette ;
  • l’achèvement du métro jusqu’à Erasme et le bouclage du métro dans le cadre d’une programmation pluriannuelle tout en veillant à améliorer la répartition des budgets en faveur des réseaux de surface dans toute la Région.
Le programme en matière de mobilité visait aussi à accroître la sécurité routière, à accélérer la mise en œuvre des dix-huit itinéraires cyclables prévus par le PRD, à stimuler le transport de marchandises combiné (eau, réseau ferroviaire, route), en prenant les mesures nécessaires pour que le port puisse poursuivre ses activités. Il était également décidé de veiller à limiter au maximum les nuisances pour les riverains et pour les activités économiques et commerciales locales à l'occasion de l'exécution de travaux d'infrastructure  [65].

98 Les principaux débats parlementaires portèrent sur la STIB (réseau, statut public) et sur les rapports avec l’autorité fédérale et la SNCB ( RER et TGV).

3.1. LES DÉBATS RELATIFS À LA STIB

3.1.1. Le réseau

99 Les premières escarmouches à propos de l’offre de transport public eurent lieu lors du débat budgétaire de décembre 1999. Philippe Debry et Geneviève Meunier (Écolo) déclarèrent que les augmentations budgétaires se retrouvaient surtout dans le volet consacré aux transports privés. Pour ce qui concernait le transport public, ils voyaient dans la priorité budgétaire accordée au métro une contradiction avec la déclaration gouvernementale  [66]. Denis Grimberghs (PSC) abondait dans le même sens  [67], tandis que Michel Moock (PS) considérait que le bouclage de la ligne 2 était une obligation à la fois pour améliorer la vitesse commerciale et entreprendre sans tarder la liaison avec le futur RER  [68].

100 Écolo allait se montrer extrêmement sourcilleux à propos des dispositions de la déclaration gouvernementale relatives à la défense du réseau de surface du transport en commun. Le 28 janvier 2000, Geneviève Meunier posa une question orale au ministre du Transport, Jos Chabert, sur les mesures déjà prises pour concrétiser la déclaration gouvernementale en ce qui concernait le programme d’amélioration de la vitesse commerciale des transports en commun en surface (amélioration de la gestion des carrefours et des sites propres)  [69]. Lors du débat budgétaire de décembre 2000, la même parlementaire jugea que l’accord gouvernemental n’était pas respecté au sujet du rééquilibrage en faveur du réseau de surface  [70].

101 Le 21 mars 2001, dans une interpellation au ministre du Transport, développée en commission de l’Infrastructure, chargée des travaux publics et des communications, Geneviève Meunier réaffirma l’opposition du groupe Écolo au bouclage du métro. Les raisons en étaient que l’étude d’incidence établissait que l’intérêt de ce bouclage en termes de mobilité était faible et qu’il n’aurait que peu d’influence sur le choix du mode de transport. Au cours de la même séance, le député FDF Jean-Pierre Cornelissen interpella lui aussi le ministre. L’élu FDF considérait, quant à lui, que la finalisation du métro vers Erasme et le bouclage de la ligne 2 étaient attendus conformément à la déclaration gouvernementale. Mais il fallait aussi développer le réseau de surface et améliorer la vitesse commerciale. Intervenant dans le débat, Denis Grimberghs (PSC) souligna que l’extension vers Erasme représentait des investissements lourds qui ne seraient pas sans conséquence sur les marges de manœuvre dans les politiques urgentes de la Région. Quant à la question du bouclage, elle avait, selon lui, été occultée pour des raisons techniques et il n’y avait pas eu de débat politique sur le sujet.

102 Le ministre Chabert répondit que le bouclage permettrait de mieux répondre aux besoins de la Région tels que définis dans le plan Iris  [71]. Il s’agissait de l’aboutissement naturel du programme métro actuel et il rendrait possible l’exploitation maximale du réseau à un coût plus avantageux  [72].

103 Le 14 juin 2001, dans une interpellation au ministre Chabert, Geneviève Meunier fit état de la façon dont les responsables de la STIB avaient évoqué en termes de projets très clairs et presque définitifs le fait qu’un tunnel serait construit dans quatre ans au-dessous de la rue Rogier et qu’un autre tunnel relierait la gare du Nord à la place Liedts. La députée écologiste décelait une stratégie délibérée de couper les différentes branches d’un même tronçon pour le limiter à un seul tronc, lequel serait la préfiguration d’un métro ; les deux projets de tunnel n’en seraient que la conséquence logique  [73].

104 Le 21 février 2002, Geneviève Meunier interpella à nouveau le ministre des Transports. Se centrant sur les modifications prévues au réseau de tram, elle commença par déplorer le peu d’informations dont disposaient les membres de la commission de l’Infrastructure, qui avaient été alertés par la presse ou les associations. Elle reprocha à la STIB de réorienter sa politique sur les déplacements domicile-travail alors que des études récentes montraient que les raisons de déplacements autres que le domicile-travail étaient en forte augmentation. Cette politique forçait la STIB à investir dans les moyens lourds tels que le métro. Pour Écolo, l’offre de transports n’était pas assez large en termes de fréquences et amplitudes. Passant en revue les différents changements apportés au réseau, elle conclut que cette modification représentait finalement peu de choses par rapport au problème plus général de l’attractivité du réseau de tram. Celle-ci dépendait de la création de sites propres, d’une augmentation de la rapidité et de l’instauration de meilleures fréquences  [74].

105 La restructuration du réseau de tram revint à l’ordre du jour lors de la réunion de la commission de l’Infrastructure du 29 mai 2002. Se référant à un article de La Lanterne du 29 avril 2002, Geneviève Meunier y interpella le ministre Chabert à propos de la ligne 3 du métro sur l’axe Nord-Sud et l’intention de la STIB d’organiser des navettes express entre Churchill et la place Liedts. Pour elle, celles-ci préfiguraient une nouvelle ligne de métro et de nouvelles ruptures de charges pour les usagers. Geneviève Meunier rappelait que le kilomètre de rails de tram coûtait dix fois moins cher qu’un kilomètre de métro. Selon Denis Grimberghs, personne n’était fondamentalement opposé au métro mais la Région n’avait pas les moyens pour le faire et sa construction posait des questions de fracture urbaine. Le ministre Chabert répondit qu’il avait reçu confirmation de la STIB que l’un des scénarios à l’étude visait à améliorer la régularité du service au sein du tunnel Nord-Sud, en le préservant des difficultés de circulation rencontrées en amont et en aval du tunnel. Toutes ces études avaient pour objectif d’optimaliser le fonctionnement du réseau et de rencontrer les besoins du plus grand nombre de clients. Cependant, aucun des scénarios d’exploitation n’avait pu être objectivement préféré à ce jour. Geneviève Meunier constata qu’elle n’avait pas reçu de réponse à la question relative à l’origine de ce scénario alternatif proposant des navettes express entre Churchill et la place Liedts. Échaudée par le manque de réponses à ses précédentes interpellations, elle annonça le dépôt d’un ordre du jour motivé, signé tant par des membres de l’opposition que de la majorité. L’ordre du jour, après avoir souligné l’opposition très ferme du secrétaire d’État chargé de la Mobilité au projet de métro sur l’axe Nord-Sud, demandait au gouvernement de s’opposer à ce projet et de donner instruction à la STIB de finaliser les études permettant une amélioration de la vitesse commerciale sur cet axe sans augmenter les ruptures de charge. Il était signé par Bernard Ide (Écolo), Jean-Pierre Cornelissen (MR-FDF), Michel Moock (PS), Denis Grimberghs (CDH) et Adelheid Byttebier (SP/Aga). Ne pouvant cacher son mécontentement, Jos Chabert constata que l’ordre du jour n’était pas signé par l’ensemble de la majorité – on n’y trouvait effectivement pas de signature VLD-Spirit ni CD&V. Il s’étonna par ailleurs de la prise de position de son collègue secrétaire d’État à la Mobilité – Robert Delathouwer – et déplora cette façon de travailler  [75]. Cet ordre du jour motivé était néanmoins voté le 21 juin 2002 par l’ensemble des formations politiques à l’exception de l’extrême droite  [76].

106 Le 14 mars 2003, ce fut cette fois à l’initiative du député socialiste Michel Moock que ce débat reprit au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. Une réforme du réseau de tram avait en effet été décidée le 12 mars par le comité de gestion de la STIB. Celle-ci devait amener les trams venant du Nord de l’agglomération (lignes 52,55,56,81) à s’arrêter à la station Rogier. De là, les voyageurs devraient gagner le centre-ville par une navette Nord-Midi. Dans son interpellation, Michel Moock estimait que cette restructuration était moins favorable pour les usagers et il craignait la réduction de l’emploi liée à cette réforme. Au nom du groupe Écolo, Geneviève Meunier se félicita de l’interpellation du groupe socialiste sur un dossier que les écologistes suivaient de très près. Elle rappela que, à l’inverse des partis de la majorité, Écolo n’avait pas de représentant au comité de gestion de la STIB. Elle réaffirma l’opposition catégorique d’Écolo à la navette Nord-Sud qui pouvait être utile pour les navetteurs qui descendaient à l’une des deux gares mais qui était préjudiciable aux Bruxellois. Elle exigea d’urgence une audition de la STIB en commission de l’Infrastructure. Marc Cools (MR-PRL) qualifia de honteuse la manière dont la STIB avait élaboré le plan de restructuration du réseau de tram. Il dénonça l’absence totale de concertation et de consultation des différentes autorités communales par la STIB. Denis Grimberghs (CDH) se montra, quant à lui, plutôt satisfait de la volonté manifestée par la STIB de réinvestir dans le tram. Mais il voulait être certain qu’il s’agissait effectivement du tram. Certains voyaient en effet dans ce plan la préfiguration d’un réseau de métro. Aussi, souscrivait-il à la suggestion de Geneviève Meunier d’organiser un travail de qualité en commission sur les propositions de la STIB. Jean-Pierre Cornelissen (MR-FDF) se réjouit du consensus qui semblait se dégager au sein du Parlement. Il mit l’accent sur le fait que c’était une majorité et non une unanimité qui s’était dégagée au comité de gestion de la STIB en faveur du plan de restructuration. À cet égard, il déplora le fait que le coreligionnaire politique de Michel Moock, vice-président de la STIB  [77], n’ait pas adopté la même logique que ce dernier au comité de gestion. Pour le MR, la réforme projetée mettait en place un réseau qui reflétait davantage les préoccupations des navetteurs que celles des habitants de Bruxelles. Le ministre Chabert, après avoir évoqué les contraintes du contrat de gestion de la STIB et mis en valeur l’augmentation du nombre de voyageurs à laquelle était parvenue la STIB, exposa les objectifs poursuivis par les adaptations apportées au réseau. Il s’agissait d’abord d’adapter l’offre à la demande ; ensuite, d’augmenter la fréquence et la régularité des services – les modifications proposées prévoyaient un usage optimal des sites propres pour tramways où les nuisances dues au trafic automobile étaient inexistantes – ; enfin, on visait à recourir à du nouveau matériel confortable. Il fit remarquer que la proposition en cause, qui n’était pas à prendre ne varietur, n’émanait pas seulement de la direction générale de la STIB, mais qu’elle avait été approuvée par le comité de gestion. Il marqua son accord sur le principe d’un débat détaillé en commission de l’Infrastructure, ce dont l’interpellateur Michel Moock prit acte. Une motion motivée fut déposée suite à ce débat. Elle était signée par Geneviève Meunier (Écolo), Jean-Pierre Cornelissen (MR-FDF), Marc Cools (MR-PRL), Isabelle Emmery (PS), Denis Grimberghs (CDH), Jan Béghin (CD&V), Sven Gatz (VLD) et Adelheid Byttebier (SP/aga). La motion réclamait d’urgence l’audition des représentants de la STIB à la commission de l’Infrastructure du Parlement  [78]. Elle fut votée le 28 mars 2003 par l’ensemble des formations politiques à l’exception de l’extrême droite et en l’absence des élus du VLD  [79].

107 Mais la commission de l’Infrastructure fut saisie immédiatement du dossier et lui consacra sept réunions : les 19 et 26 mars, le 30 avril, le 28 mai, les 11 et 18 juin et le 2 juillet. Les responsables de la STIB, les représentants d’Interenvironnement et du BRAL, les président et vice-président de la commission régionale de la Mobilité y furent entendus. À l’issue de la réunion du 18 juin, un groupe de travail se réunit les 25 juin et 2 juillet, date à laquelle un projet de résolution fut finalisé. La résolution demandait notamment au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale de veiller à ce que toute réorganisation du réseau tramway se fasse en synergie avec le nouveau plan directeur métro et la future restructuration du réseau bus dans le but d’un maillage optimal de la Région bruxelloise ; elle demandait également que la STIB présente un plan intégré reprenant l’ensemble de son offre de transport en tenant compte de celle des autres opérateurs publics sur le territoire de Bruxelles-Capitale ; elle tenait également à ce que la STIB soit particulièrement attentive aux conséquences des ruptures de charge et réexamine les alternatives à l’exploitation de l’axe nord-sud sous forme de navettes ; si, néanmoins, cette solution devait être retenue, la résolution demandait qu’à côté de la navette soit maintenu un tramway de capacité suffisante pour couvrir l’actuel trajet du 55 ; une amélioration des fréquences en soirée et en week-end sur l’axe Nord-Sud était également demandée  [80]. La résolution fut votée le 15 juillet 2003 par l’ensemble des formations à l’exception de l’extrême droite flamande et francophone  [81]. Le dossier fut réexaminé au niveau du gouvernement et donna lieu à plusieurs réunions intercabinets en décembre 2003 et janvier 2004. Des améliorations au projet initial de la STIB furent apportées. Le plan ainsi remanié ne fut cependant pas approuvé par le gouvernement qui le présenta au Parlement. Celui-ci préféra s’en tenir à sa résolution du 15 juillet 2003.

108 À la rentrée parlementaire de 2003, le nouveau secrétaire d’État Pascal Smet (SP.a) reprocha sèchement aux ministres Chabert et Vanhengel de ne pas avoir fait avancer le dossier du tram rapide vers l’AZ de la VUB  [82]. Le 6 novembre 2003, le gouvernement décida d’ouvrir une nouvelle desserte de l’AZ-VUB à partir de Simonis. La demande de permis d’urbanisme devait être déposée dans le courant du premier semestre 2004 et la pose des voies commencer en 2005. Ce projet n’était pas sans inquiéter les riverains et suscita une question d’actualité de Michèle Carthé (PS), par ailleurs bourgmestre de Ganshoren. Le ministre Chabert se voulut rassurant : il s’agirait d’une ligne de tram modeste, bien intégrée dans l’environnement urbain et il y aurait un rapport d’incidence constitutif à la demande du permis d’urbanisme  [83].

3.1.2. Le statut public de la STIB

109 Le maintien du statut public de la STIB était affirmé dans la déclaration gouvernementale. Cependant, les projets européens de libéraliser les transports publics urbains – une proposition de règlement de la Commission européenne allait en ce sens – suscitèrent l’inquiétude de certaines familles politiques. Ce thème fut, de ce fait, plusieurs fois abordé dans les débats parlementaires.

110 Au cours du débat budgétaire de décembre 2000, l’écologiste Geneviève Meunier fit état que la STIB, lors d’un colloque international, avait défendu le principe selon lequel les sociétés de transport urbain feraient partie du champ d’application de la réglementation européenne. Au cours du même débat, Michel Moock (PS) rappela l’attachement du groupe socialiste au caractère public des services fournis par la STIB. Seul le service public pouvait en effet garantir un service universel et maintenir le maillage du réseau. S’il approuvait la volonté du gouvernement de concentrer l’essentiel des moyens de la STIB dans les crédits de fonctionnement, il insistait pour que ces crédits soient prioritairement affectés au développement de l’emploi au sein de la STIB. Michel Moock ne cachait pas l’inquiétude qu’avait éveillée en lui les propos de l’administrateur-directeur général de la STIB, Alain Flausch, qui avait déclaré que « la STIB n’est pas une succursale de l’ONEM  [84] ».

111 Le 14 juin 2001, dans le débat sur le contrat de gestion 2001-2005 entre la Région de Bruxelles-Capitale et la STIB, ce fut au tour du député PSC Denis Grimberghs de regretter les propos tenus par Alain Flausch dans un grand journal. Denis Grimberghs exprimait sa méfiance à l’égard des « donneurs de leçons du privé qui veulent mieux gérer un service public. On a vu ce que cela a donné à la Sabena et à la SNCB. » Il espérait qu’il ne fallait pas y voir une lente dérive d’un style qui se voudrait « plus privé » pour anticiper l’application de la directive européenne qui imposera une direction managériale  [85].

112 Interpellant le ministre Chabert le 21 février 2002, la députée socialiste Sfia Bouarfa s’inquiéta de la diminution de l’engagement des équipes relatives à l’entretien et à la maintenance en raison de l’externalisation. Elle mettait en garde contre la perte de tout contrôle sur un volume d’emplois non qualifiés pour les Bruxellois. Déplorant la création par la STIB d’une « caste de ‘supermanagers’ » avec des avantages salariaux « de loin supérieurs aux barèmes de la fonction publique », elle constatait que, depuis l’entrée en service de l’administrateur-directeur général et du nouveau directeur des ressources humaines, « certaines pratiques peu démocratiques, voire de discrimination raciste étaient monnaie courante  [86] ». La députée écologiste Geneviève Meunier dit redouter un risque d’explosion sociale à la STIB et mit en garde contre le fait de créer un gouffre entre les rémunérations du personnel d’exploitation et celles du personnel de direction  [87].

113 Le projet européen incita le député socialiste Michel Moock à déposer une proposition de résolution concernant le maintien du service public intégral de l’offre de transport en commun dans la Région de Bruxelles-Capitale. Lors de sa séance plénière du 14 novembre 2001, le Parlement européen adopta la proposition de règlement. Il conserva la règle d’exception pour les réseaux de métro et de tramway. Une sorte de demande d’offre serait néanmoins exigée pour l’exploitation de lignes d’autobus comme cela se faisait déjà chez De Lijn. Le 26 juillet 2000, la Commission européenne approuva une proposition de règlement qui contenait une règle d’exception pour des réseaux intégrés (métrotrambus) comme les réseaux de Paris et de Bruxelles. Il apparaissait cependant qu’il existait beaucoup d’oppositions à cette règle d’exception, émanant d’autres États membres. D’emblée, le texte du projet de résolution suscita des réticences de la part du PRL-FDF. Jean-Pierre Cornelissen, qui avait co-signé la proposition, entendait déposer immédiatement un amendement. Le député FDF était d’accord avec le fait qu’il y avait des domaines d’activité de la STIB qui ne pourraient jamais être privatisés. Néanmoins, selon lui, le maintien de certaines activités dans le giron de la STIB n’était pas dans tous les cas indispensable. Et de citer l’exemple d’une imprimerie au sein de la société. Il fallait considérer la mission première de la STIB et voir les pans d’activité qui pouvaient être cédés au privé. Dans son amendement, il liait donc la condition d’absence de privatisation à l’offre de transports publics stricto sensu. Il fut appuyé par Marc Cools (PRL) qui estimait qu’il fallait mener la discussion sans tabous pour voir si certains services ne seraient pas mieux rendus par le secteur privé. Un autre membre libéral, Claude Michel, se dit mal à l’aise devant certains passages du texte qu’il estimait désobligeants pour le secteur privé. Pour Geneviève Meunier (Écolo), l’amendement de Jean-Pierre Cornelissen vidait complètement la proposition de résolution de son sens. Réagissant à la position de Jean-Pierre Cornelissen selon laquelle l’imprimerie et la publicité ne seraient pas des activités essentielles pour la STIB, Michel Moock lui répondit qu’il n’y avait pas que cela à la STIB : si on cédait l’entretien du matériel, ainsi que le nettoyage des véhicules à des privés, à terme la société ne pourrait plus disposer de personnel qualifié. On risquait en outre de faire la part belle au saucissonnage de la société dans le cadre d’une privatisation larvée. Michel Moock rappela que la STIB était « une entreprise citoyenne » qui employait plus de 5 500 personnes, dont un bon nombre de personnes très peu qualifiées. Souhaitant que la Belgique adopte une position nette et ferme dans ce dossier – en ne laissant pas tomber les bus –, Denis Grimberghs jugea que la proposition de résolution tombait à point. Ces divergences de vues n’empêchaient cependant pas que tous considéraient que le caractère public des services offerts par la STIB devait être maintenu. Il fut donc décidé de demander à une sous-commission de rédiger un texte dans lequel tous pourraient se retrouver. Cette sous-commission fut constituée le 23 janvier 2002. Elle était composée de Marie-Jeanne Riquet, Claude Michel et Jean-Pierre Cornelissen pour le PRL-FDF, de Geneviève Meunier et Bernard Ide pour Écolo, de Michel Moock et Mahfoudh Romdhani pour le PS, de Denis Grimberghs pour le PSC et de Jan Béghin pour le CD&V. Les différentes sensibilités s’exprimèrent au sein de cette sous-commission. Michel Moock accepta de reformuler certains passages afin de supprimer les qualificatifs « dénigrants » à l’égard du secteur privé. Un consensus fut finalement trouvé.

114 La résolution, qui fut votée le 1er mars 2002 par toutes les formations politiques, demandait au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale

  • de réaffirmer sa volonté de maintenir le caractère public des services offerts par la STIB ;
  • de s’opposer à toute forme de démantèlement des services publics intégrés de transport urbain, ainsi qu’à toute initiative qui aboutirait à la diminution de la qualité et de l’offre de service public dont bénéficient actuellement les usagers ;
  • de prendre en compte à cet égard les expériences vécues à l’étranger au cours des deux dernières années ;
  • de demander aux autorités fédérales de veiller au maintien dans la législation européenne du caractère public des sociétés de transports urbains et des services qu’elles offrent  [88].
Au cours de la discussion relative à la politique générale du gouvernement du 8 octobre 2002, le président du groupe socialiste Rudi Vervoort, soulignant le rôle des pararégionaux dans la mise en œuvre de nombre de politiques régionales, évoqua les menaces de dérégulation et de privatisation que faisaient peser certaines instances européennes sur ces organismes. Il se montrait plus particulièrement préoccupé par la situation de la STIB. Il exprima à nouveau l’inquiétude ressentie par les socialistes suite aux attitudes de la direction générale à l’égard de la notion de service public  [89].

115 La crainte de la privatisation resurgit à la séance du 14 novembre 2002 dans les interpellations de Sven Gatz (VLD), Michel Moock (PS) et Geneviève Meunier (Écolo) relatives à la grève de la STIB du 5 novembre. Évoquant les propos de Jean-Pierre Alvin, porteparole de la STIB, selon lesquels « tout ne doit pas être diabolisé dans ce plan  [90] qui entend préparer la société aux futures directives européennes prévoyant une ouverture du marché », Michel Moock posa la question de savoir si l’on parlait d’une libéralisation, d’une privatisation qui ne voulait pas dire son nom. Il estimait qu’il faudrait un jour mettre les points sur les i et marquer un désaccord avec une telle position. Geneviève Meunier souligna que la STIB était une société ancienne de service public, qui avait plus d’un siècle, avec « une culture maison » bien ancrée au fil du temps, et que c’était une erreur de vouloir la gérer comme une PME privée. Elle s’inquiétait, elle aussi, du risque de privatisation larvée de la société, avec le danger de perte d’emplois. Elle dénonçait le recours insidieux à une augmentation de la sous-traitance alors que la STIB était un gros employeur de personnel bruxellois peu qualifié. Denis Grimberghs exprima également la volonté du CDH de maintenir la STIB en tant que service public. Jean-Pierre Cornelissen, tout en se déclarant opposé à la privatisation de la STIB, estimait néanmoins que faire passer les tâches d’entretien à une société privée ne devait pas être considéré comme une privatisation de l’entreprise. Répondant aux intervenants, le ministre Chabert rendit hommage au travail accompli par la STIB ces dernières années. S’il convint qu’il n’était pas question de privatiser la STIB, cela ne signifiait pas, à son sens, que des services à rendre en dehors des spécificités de la STIB ne pouvaient pas, s’ils étaient concurrentiels, être prestés par ceux qui apporteraient le meilleur service au prix le plus intéressant. Selon Denis Grimberghs, il serait intéressant de lister les métiers que l’on estimait devoir être réalisés à la STIB et ceux à mettre en concurrence à terme. Michel Moock appela à tenir compte de l’emploi à Bruxelles. Pour lui, les économies réalisées risquaient fort d’avoir un coût en termes de pertes d’emplois. Il demanda également s’il était possible d’établir, dans un délai raisonnable, un catalogue de ce qui pouvait et de ce qui ne pouvait pas être mis en concurrence. Geneviève Meunier exprima son désaccord avec le ministre à propos de la sous-traitance  [91].

116 Le 14 mars 2003, Michel Moock interrogea le ministre sur un prospectus édité par le Groupe des entreprises de transport public des grandes métropoles (GGM), auquel appartenait la STIB. Il voulait savoir sur quelles bases la STIB avait cru bon défendre des options politiques sur la libéralisation du secteur. Répondant au nom du ministre Chabert, le ministre Gosuin précisa qu’en réalité la STIB s’était inquiétée de l’État actuel de la proposition européenne qui n’autoriserait plus le « modèle parisien » des transports selon lequel l’opérateur public exploite le centre-ville et le privé la périphérie. Michel Moock affirma ne pas partager la vision européenne du service public. Aussi appelait-il à une grande vigilance  [92].

117 La vigilance du groupe socialiste dans cette problématique ne se relâcha pas. Le 20 juin 2003, Michel Moock interpella le ministre du Transport sur les déclarations de la direction générale de la STIB à l’occasion de la présentation de son rapport d’activité 2002. Constatant que l’administrateur-directeur général de la STIB se plaignait de la faible compétitivité de la société et de l’insuffisance de son taux de capitalisation pour faire face à ses nouveaux investissements, le député socialiste posa la question de savoir si la direction de la STIB entendait réclamer ainsi le débat sur la libéralisation. Selon lui, une réflexion s’imposait à propos de la STIB  [93].

118 Lors du débat budgétaire du 17 décembre 2003, le président du groupe socialiste Rudi Vervoort évoqua le nouveau conflit social en cours à la STIB. Au-delà de la question de fond, il mettait en cause « l’attitude arrogante de la direction » et doutait de la capacité d’Alain Flausch à gérer un conflit social. Il estimait que si ce problème de direction ne pouvait être résolu en cette fin de législature, il devrait l’être par le nouveau gouvernement  [94].

3.2. LE RER ET LE TGV

119 Le 30 mars 1999, la conférence interministérielle des communications et de l’infrastructure adopta un protocole d’accord relatif au RER. Celui-ci devrait desservir une zone de trente kilomètres autour de Bruxelles. Un groupe de travail « de haut niveau » devait préparer un accord de coopération sur le RER entre le pouvoir fédéral et les régions. Ses conclusions étaient attendues pour le 30 septembre 1999. Il apparut néanmoins que les problématiques du RER et du TGV s’entrecroisaient en raison, notamment, des options à prendre concernant l’utilisation du réseau ferré bruxellois.

3.2.1. Premiers échanges à propos d’un deuxième terminal TGV

120 Dans une interpellation adressée le 23 décembre 1999 en commissions réunies de l’Aménagement du territoire, de l’Urbanisme et de la Politique foncière et de l’Infrastructure, chargée des travaux publics et des communications, au secrétaire d’État, chargé de l’Aménagement du Territoire, Éric André, la députée écologiste Geneviève Meunier rappelait l’opposition de son parti au projet de la SNCB d’implanter un terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation. Selon sa lecture du Plan régional d’affectation du sol (PRAS), ce projet paraissait acquis puisqu’on y prévoyait explicitement la gare, des voiries et des parkings de transit sur ce site. Elle demandait donc au nouveau gouvernement s’il acceptait une telle localisation d’un terminal TGV et, le cas échéant, elle posait une série de questions sur les problèmes des parkings de transit et des voiries d’accès. Le député schaerbeekois Bernard Clerfayt (PRL-FDF) manifesta également son opposition au projet de la SNCB. Considérant que l’urgence d’un tel projet n’était pas justifiée, il déplora sa fixation par le PRAS II dans une zone du site de Schaerbeek-Formation, ce qui excluait l’alternative schaerbeekoise (Schaerbeek-Voyageurs). Denis Grimberghs (PSC) dit regretter que l’on n’ait pas envisagé les avantages de l’option prévue au PRD d’installer une deuxième halte TGV à Bruxelles-Nord. Alain Adriaens (Écolo) rappela que, tel que cela était inscrit dans le PRD et en partie confirmé par le PRAS, la localisation des infrastructures administratives devait se faire autour des trois gares bruxelloises. Cela était totalement remis en question par la création de ce nouveau pôle.

121 Répondant au nom du secrétaire d’État Éric André, le secrétaire d’État chargé de la mobilité, Robert Delathouwer, exposa les raisons de la volonté de la SNCB de construire une gare TGV, IC-IR, RER sur le site de Schaerbeek-Formation, en liaison directe avec l’aéroport de Bruxelles-National :

  • le développement très rapide de la clientèle TGV à destination de la France et l’hypothèse de la saturation à terme du terminal de Bruxelles-Midi ;
  • le risque de saturation progressive de la jonction Nord-Midi en raison d’un accroissement de la clientèle TGV à destination des Pays-Bas et de l’Allemagne ;
  • la difficulté croissante de l’accessibilité en voiture de l’aéroport de Bruxelles-National et la nécessité d’améliorer la desserte de celui-ci au moyen du transport public ;
  • la nécessité d’alléger le transport aérien sur Bruxelles en transférant au TGV une partie de la clientèle des vols à courte distance.
Sur base de l’article 26 de l’ordonnance du 29 août 1991 organique de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme, qui autorise le PRAS à préciser et à compléter le PRD lorsque survient un événement nouveau, le projet de création d’une gare sur le site de Schaerbeek-Formation avait été intégré au projet de PRAS. Il précisait cependant que toute proposition d’un terminal TGV au Nord de Bruxelles devrait se baser sur des données issues d’une étude sur les développements les plus récents en synergie avec l’aéroport national. Quant à sa propre position, Robert Delathouwer considérait qu’il revenait à la SNCB de démontrer la saturation du premier terminal TGV et qu’il était d’accord avec la plupart des intervenants  [95].

122 Le 2 février 2000, au sein des mêmes commissions réunies, le député PSC Denis Grimberghs revint sur les différences qui avaient été perçues entre les discours de Robert Delathouwer et d’Éric André et interpella celui-ci afin « qu’il soit mieux sensibilisé à une problématique qui entraîne des prises de position dépassant les clivages majoritéopposition ». Il se référa à la « très grande majorité » qui se dégageait pour considérer que ce serait une erreur de déterminer la réalisation d’un deuxième terminal complet dans la région sans avoir préalablement procédé à des études plus fines en termes d’évolution du trafic des lignes à grande vitesse. Denis Grimberghs s’en prit à la volonté des « édiles libéraux de Donnea et Hasquin » de développer sur le site de Schaerbeek-Formation le deuxième terminal TGV de Bruxelles qu’ils avaient déjà baptisé « Bruxelles-Europe », « avec la complicité du lobby du béton et de la SNCB ». Sans vouloir voir du communautaire partout, il constatait que le site de Schaerbeek-Formation était totalement excentré par rapport au développement bruxellois mais apparaissait plus dans la continuité de certains développements imaginés par la Flandre. Alain Adriaens (Écolo) affirma ne voir dans ce projet que l’intention de valoriser les terrains de la SNCB. Lui aussi prit à partie François-Xavier de Donnea, qui aurait considéré avant tout « les millions de mètres carré de bureaux et donc de taxes ‘bureaux’ dont sa commune hériterait ».

123 Le député libéral flamand Guy Vanhengel ne cacha pas un certain malaise. Il souhaitait éviter de « discuter de manière poujadiste de ce dossier technique compliqué ». Il proposa de donner une meilleure information aux commissaires en invitant les techniciens de la SNCB à une réunion de commission. Cette suggestion fut également formulée par le député PRL-FDF Jean-Pierre Cornelissen et appuyée par le président de la commission Willem Draps (PRL-FDF) pour lequel le document « Mobilité dans et autour de Bruxelles », préparatoire au plan décennal d’investissement 2001-2010 de la SNCB, justifiait cette rencontre. Le député socialiste Michel Moock se rallia à l’idée d’audition de représentants de la SNCB et demanda que le document évoqué soit distribué aux membres de la commission.

124 Dans sa réponse, le secrétaire d’État Éric André fit remarquer que la SNCB remettait enfin un projet intégrant le RER dans et autour de Bruxelles, alors que cela faisait des années que les Bruxellois réclamaient des investissements en matière de RER. Il ne voyait pas de contradictions entre ses propos et ceux de ses collègues concernant l’implantation d’un deuxième terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation. Cette nouvelle gare IC/RER devait être également une porte d’entrée dans l’aéroport de Bruxelles-National. Souhaitant, à l’instar de Guy Vanhengel, ne pas tomber dans la caricature, il annonça que la décision était prise d’installer le deuxième TGV à Schaerbeek sans que le lieu exact ne soit encore déterminé. Alain Adriaens et Denis Grimberghs demandèrent que la commission ne se limite pas à entendre le point de vue des experts de la SNCB  [96].

3.2.2. La recommandation du 30 juin 2000 relative à la mobilité dans et autour de Bruxelles

125 Sous la présidence de Willem Draps, la commission de l’Infrastructure se consacra à l’analyse du document de la SNCB intitulé « Task force : mobilité dans et autour de Bruxelles » et elle procéda à de multiples auditions du mois de mars au mois de juin 2000.

126 Il apparut que la SNCB accordait une nette priorité au TGV, le trafic national passant au deuxième plan et le RER au troisième. La SNCB prévoyait la saturation prochaine de la jonction Nord-Midi et plaidait en faveur d’un second terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation, soutenue en cela par la ville de Bruxelles. Son intention était de mettre en place un nouveau pertuis TGV via la ligne 28 et de soulager ainsi la jonction Nord-Midi. Or, le projet de tunnel Schuman-Josaphat avait été présenté dans le même but. Après plus de soixante heures de travail, la commission aboutit le 22 juin 2000 à une résolution unanime qui traitait de la manière de mettre en œuvre le RER et d’accueillir le TGV.

127 La résolution demandait de façon liminaire de veiller prioritairement à la limitation des nuisances subies par les riverains tant dans la conception des projets que dans l’établissement des cahiers des charges relatifs aux travaux.

128 Elle plaçait le RER comme première priorité de la politique de mobilité dans et autour de Bruxelles et appelait à veiller à ce que ce réseau ne constitue pas un encouragement à l’exode urbain et à porter une attention toute particulière à l’offre interne à Bruxelles (via le nombre d’arrêts en Région bruxelloise et l’équilibre du schéma de desserte sur l’ensemble de la Région). La fréquence de base du réseau devait être de quatre trains par heure aux heures de pointe dans toutes les gares et de trois aux autres moments de la journée.

129 Le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale était appelé à définir les futurs points d’arrêt du RER dans la Région en fonction de la demande potentielle sur la base de critères précisément définis et non pas de schémas de transport théoriques. Il devait être veillé prioritairement au lancement rapide des procédures d’acquisition d’un matériel roulant adapté et performant. La résolution laissait clairement entendre que le financement de l’investissement et de l’exploitation du RER ne pouvait peser sur les finances régionales, sauf en ce qui concernait les investissements à effectuer concomitamment sur le réseau de la STIB ou favorisant la vitesse commerciale du RER. Dans ce cadre, le plan décennal d’investissement de la SNCB devait être prioritairement affecté au RER. Il ne pouvait être question de faire appel dans l’avenir à l’accord de coopération, sauf révision significative des montants affectés à celui-ci.

130 La nécessité de prendre des mesures d’accompagnement simultanément à la mise en place du RER était affirmée. L’accord de coopération entre le pouvoir fédéral et les trois régions qui devait assurer la mise en œuvre du RER devait également prendre en compte la construction de parkings de dissuasion, situés, en principe, en dehors de la Région bruxelloise. Des mesures strictes de limitation du stationnement devaient être prises. Compte tenu de la faiblesse des moyens des communes pour assurer cette mission, la réforme en profondeur de l’exercice de la compétence du stationnement était prônée. Une des voies possibles était la création d’une intercommunale du stationnement.

131 La résolution abordait aussi certains problèmes particuliers d’infrastructures :

  • l’exploitation de la jonction Nord-Midi apparaissait comme pouvant être optimalisée ; les perspectives de développement du trafic TGV annoncées par la SNCB ne semblaient pas incompatibles avec le trafic existant. Les réserves de capacité de la jonction devaient être vérifiées et validées par des experts extérieurs internationalement reconnus ;
  • la réalisation du tunnel Schuman-Josaphat était justifiée par la SNCB comme étant un maillon indispensable pour la réalisation du RER mais elle constituait également une opportunité de désenclaver la gare du Luxembourg et d’assurer entre celle-ci et l’aéroport une liaison directe ;
  • concernant la proposition de la SNCB de mettre à quatre voies les lignes 124
    (Bruxelles-Nivelles) et 161 (Bruxelles-Ottignies), une mission d’experts internationaux reconnus était également demandée pour définir s’il convenait d’augmenter le nombre de voies sur tout ou partie de ces tronçons. En toute hypothèse, tout devait être mis en œuvre afin de réduire les nuisances pour les riverains ;
  • le problème de l’accessibilité de l’aéroport de Bruxelles-National devait être posé de manière globale. La résolution se prononçait pour la connexion de la gare de chemin de fer de Bruxelles-National avec l’ensemble du réseau intérieur, la mise en place de plusieurs terminaux aériens dans les grandes gares belges ;
  • plusieurs recommandations étaient faites à propos du deuxième terminal TGV. En premier lieu, il était demandé de faire vérifier par des experts indépendants internationalement reconnus le fait que, bien conçu et exploité de manière optimale, le terminal TGV de Bruxelles-Midi ne connaîtrait pas de saturation prévisible à moyen terme. Ensuite, de veiller prioritairement à la finalisation des aménagements prévus aux alentours de la gare du Midi. Il était également suggéré de réexaminer l’opportunité de l’arrêt de quelques TGV aux heures de pointe à la gare du
    Luxembourg. La réalisation d’un éventuel second terminal TGV devait faire l’objet d’une étude d’opportunité et de faisabilité, la proposition alternative de Schaerbeek-
    Voyageurs devant être également étudiée. Ce second terminal éventuel ne pouvait en aucun cas être développé de manière exogène, coupé du tissu urbain, orienté vers la périphérie, avec un développement important de stationnement pour l’aéroport de
    Bruxelles-National. Enfin, les mêmes experts devaient étudier le postulat figurant dans le document de la SNCB selon lequel, vers 2020, le trafic TGV traversant
    Bruxelles devrait être acheminé par la ligne 28, nonobstant la volonté de la Région d’y développer le trafic RER.
La proposition de recommandation fut votée le 30 juin 2000 par l’ensemble des formations politiques à l’exception de l’extrême droite, qui s’abstint de même pour les membres du gouvernement et des secrétaires d’État, les membres du gouvernement et les secrétaires d’État s’abstenant  [97] .

132 L’accession de François-Xavier de Donnea – partisan déclaré de l’implantation d’un second terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation – à la présidence du gouvernement régional bruxellois le 18 octobre 2000, n’était pas sans susciter certaines inquiétudes quant au respect par le gouvernement de la recommandation du 30 juin 2000. Le jeudi 26 octobre 2000, le député PSC Denis Grimberghs interpellait le nouveau ministreprésident sur ses déclarations concernant la recommandation. Rappelant que François-Xavier de Donnea avait qualifié la recommandation de « cornichonnerie » alors qu’il était encore bourgmestre de Bruxelles, il estimait assez choquant qu’un certain nombre d’élus libéraux aient considéré l’implantation d’un second terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation comme une « solution optimale ». Cela, alors que le Parlement bruxellois et l’ensemble des élus du PRL-FDF avaient, sous la houlette de Willem Draps, exigé une étude réalisée par des experts internationaux sur ce dossier. Il était soutenu par le socialiste Michel Moock et par l’écologiste Geneviève Meunier. Persuadé qu’un deuxième terminal TGV serait un jour nécessaire à Bruxelles, François-Xavier de Donnea marquait, dans sa réponse, son accord pour que l’on fasse toutes les études nécessaires tout en estimant – sans parler au nom du gouvernement – qu’il serait dommage de ne pas utiliser les abords de cette gare TGV pour en faire un pôle d’expansion économique, social et européen. Il jugeait préférable de positionner les extensions futures de l’Europe sur des sites où il n’était pas nécessaire de démolir les constructions existantes et de perturber les tissus sociaux vivants et conviviaux  [98].

3.2.3. Le contact avec la Région wallonne à propos du RER

133 Le 8 décembre 2000, Geneviève Meunier interrogea le ministre du Transport Jos Chabert et le secrétaire d’État à la Mobilité Robert Delathouwer sur les questions relatives au RER qui avaient été abordées lors d’une réunion commune des ministres bruxellois et wallons qui s’était tenue deux semaines auparavant. Elle s’inquiétait notamment de savoir si les décisions de ce conseil interrégional ne faisaient pas double emploi avec celles de la CIMIT (conférence interministérielle de la mobilité, de l’infrastructure et des télécommunications) compétente pour les décisions officielles relatives au RER et si une concertation similaire ne devait pas obligatoirement avoir lieu avec la Région flamande. Elle souhaitait également obtenir des informations sur les mesures d’accompagnement. Le ministre Chabert répondit qu’effectivement la CIMIT restait le forum où devaient être prises les décisions relatives au RER et que l’accord du 30 mars 1999 demeurait la base des discussions en la matière. Il devait cependant constater que cette procédure n’avançait pas très rapidement. À l’inverse, la concertation avec le gouvernement wallon avait principalement pour but de parvenir à une collaboration pratique. Complétant la réponse de Jos Chabert, le secrétaire d’État Robert Delathouwer précisa que les Régions wallonne et bruxelloise avaient marqué leur accord sur une politique volontariste en matière de stationnement. À propos du risque de double emploi avec les décisions de la CIMIT, le secrétaire d’État signala que le groupe de travail de haut niveau « mesures d’accompagnement » ne se réunissait plus et n’avait pu finaliser un accord définitif. Il n’y avait donc aucune raison de ne pas pouvoir discuter de ces questions lorsque les membres des deux gouvernements se rencontraient. Un certain nombre de mesures avaient fait l’objet d’un accord. Il y avait toutefois une divergence d’opinion sur certains points, parmi lesquels le nombre d’arrêts à desservir dans la région bruxelloise. Il fallait en effet trouver un équilibre entre la vitesse commerciale et la qualité de la desserte (l’objectif des Flamands et des Wallons étant d’arriver le plus vite possible au centre de Bruxelles). Il annonçait qu’une concertation similaire avec la Flandre serait préparée le 12 décembre 2000 par les deux ministres-présidents  [99] .

3.2.4. Les recommandations complémentaires du 23 février 2001 concernant la mobilité dans et autour de Bruxelles

134 À l’initiative de la députée écologiste Geneviève Meunier, la commission de l’Infrastructure se réunit les 14 et 21 février en vue d’évaluer les suites de la recommandation du 30 juin 2000. Les discussions eurent pour base la publication de la « Contribution de la SNCB à la politique d’accroissement de la mobilité par le rail. Projet de plan décennal d’investissements 2001-2010 ».

135 Le député socialiste Michel Moock souligna l’indifférence avec laquelle la SNCB traitait les recommandations votées à l’unanimité par l’assemblée bruxelloise. Geneviève Meunier remarquait que la SNCB n’avait rien repris des recommandations bruxelloises sur le RER. Par ailleurs, la SNCB changeait d’orientation à propos des lignes 161 (Bruxelles-Ottignies) et 124 (Bruxelles-Nivelles). Plutôt qu’une mise à quatre voies, elle optait pour une ligne rapide le long de la E411 avec un tunnel de 5 kilomètres sous la forêt de Soignes. Une variante envisagée était de construire un tunnel de 3,7 kilomètres à Auderghem qui aboutirait au carrefour Léonard. Quant à la question du second terminal TGV, si la SNCB se montrait plus prudente au niveau de la dénomination – on ne parlait plus de terminal Bruxelles-Europe –, les annexes chiffrées du document laissaient apparaître qu’il s’agissait bien d’un deuxième terminal et que les propositions de la SNCB n’allaient pas du tout dans le sens des recommandations du Conseil régional. Geneviève Meunier appela à une prise de position forte du Parlement bruxellois. Le député PSC Denis Grimberghs rejoignit la préoccupation de Geneviève Meunier et s’interrogea aussi sur le rôle du gouvernement bruxellois. Quant à Michel Moock, il aurait voulu savoir si le ministre-président bruxellois défendait aussi bien les intérêts de Bruxelles en matière de développement des infrastructures ferroviaires que ne le faisait le ministre-président flamand pour sa Région. Il estimait utile d’entendre la vice-Première ministre et ministre fédérale du Transport Isabelle Durant (Écolo). Jan Béghin (CD&V) remarqua que les décisions seraient prises ailleurs qu’au sein de l’assemblée bruxelloise et qu’il fallait que la ministre fédérale soit auditionnée. Pour Jean-Pierre Cornelissen, il serait utile de convoquer, outre la ministre fédérale, les responsables de la SNCB, dont Étienne Schouppe. Geneviève Meunier proposa cependant que l’on sursoie à la demande d’auditions, vu les délais.

136 Un consensus, fut trouvé qui préservait l’intégrité des recommandations du 30 juin 2000  [100]. Des recommandations complémentaires furent présentées à la séance plénière du 23 février 2001 et votées par l’ensemble des formations politiques à l’exception de l’extrême droite qui s’abstint.

137 Dans ces recommandations, le Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale constatait que le projet de la SNCB sur la mobilité dans et autour de Bruxelles ne rencontrait pas les recommandations unanimes du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 juin 2000. Il déplorait que le RER ne soit pas une priorité pour la SNCB, qu’il n’y ait encore aucune garantie sur le financement du RER et que le conseil d’administration de la SNCB se soit contenté de réitérer sa conviction que la saturation de la jonction Nord-Midi était sans appel, ce qui imposait de faire circuler un certain nombre de trains TGV sur la ligne 28 et les installations ferroviaires de Schaerbeek. Le conseil rappelait l’importance d’une desserte optimalisée des 28 gares bruxelloises pour améliorer la mobilité intra-bruxelloise et ses doutes sur la saturation de la jonction Nord-Midi. Il demandait au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale de défendre de manière unanime la position selon laquelle une éventuelle réduction des projets d’investissements ne pouvait en aucun cas induire un report de la mise en œuvre du RER et de rappeler les priorités de la Région bruxelloise concernant les investissements de la SNCB pour les dix ans à venir : l’achat de matériel roulant spécifique au RER, l’exploitation optimalisée, très rapidement, des lignes 26 et 28 pour le RER, la réalisation des études d’opportunité d’un second terminal TGV, la finalisation des aménagements prévus dans et autour de la gare du Midi.

138 Le Conseil réaffirmait avec force ses recommandations du 30 juin 2000.

139 Le ministre Chabert précisait que lui-même et le secrétaire d’État à la mobilité soutenaient cette motion et qu’ils la transmettraient dès que possible aux personnes intéressées.

3.2.5. Le contact avec la Région flamande concernant le RER

140 Le 14 mars 2001, une rencontre entre les gouvernements flamand et bruxellois aboutit à l’expression d’une volonté commune de faire pression pour que les décisions prises depuis 1999 par le gouvernement fédéral et la CIMIT soient exécutées sans délai et pour que de meilleurs services ferroviaires soient offerts sur l’infrastructure existante vers Bruxelles. Un groupe de travail était mis sur pied pour travailler sur le besoin d’une meilleure accessibilité à Bruxelles. Il devait être animé par les représentants Jos Chabert et Robert Delathouwer et par Steve Stevaert, vice-président du gouvernement flamand et ministre de la Mobilité, des Travaux publics et de l’Énergie  [101].

3.2.6. Questions à propos du plan décennal d’investissement de la SNCB

141 Le 30 mars 2001, Geneviève Meunier posa une question d’actualité au ministre-président sur l’avis du gouvernement bruxellois à propos du plan décennal d’investissement de la SNCB. François-Xavier de Donnea répondit que ce plan devait être approuvé le jour-même par le Conseil des ministres fédéral et que le gouvernement bruxellois n’avait encore reçu aucune demande officielle. Il allait de soi que le gouvernement bruxellois donnerait son avis une fois qu’une telle demande lui aurait été transmise et qu’il tiendrait compte des « bonnes idées » émises par le Conseil régional  [102] .

142 Le 27 avril 2001, ce fut au tour de Jean-Pierre Cornelissen (PRL-FDF) de poser une question d’actualité sur le même sujet. Il souhaitait connaître les grandes lignes de la réponse fournie par la Région bruxelloise, obtenir des informations sur les initiatives prises par la Région pour avancer aussi vite que possible dans le dossier du RER et s’inquiétait de la sollicitation de la participation des régions pour prendre en charge le déficit d’exploitation du RER.

143 Le ministre Chabert lui répondit que le gouvernement fédéral n’avait toujours pas transmis le plan d’investissement de la SNCB qui avait été approuvé le 30 mars 2001. Il signalait qu’il venait de recevoir une invitation de la ministre fédérale des Transports, Isabelle Durant, pour participer à une réunion en date du 2 mai 2001. À cette occasion, le projet du plan d’investissement devait être transmis aux régions et présenté par la SNCB. Le ministre espérait que la concertation relative au RER serait fixée à cette occasion  [103].

144 Geneviève Meunier interpella le ministre Chabert en commission de l’Infrastructure le 9 mai 2001 sur la position du gouvernement relative à la mise à quatre voies des lignes 124 et 161 et les alternatives de lignes nouvelles proposées par la SNCB. Michel Moock, Alain Adriaens, Jean-Pierre Cornelissen et Mahfoud Romdhani intervinrent dans la discussion. Le ministre Chabert répondit que le 30 mars 1999, son prédécesseur et ses collègues avaient signé un accord qui prévoyait la mise à quatre voies des lignes 124 et 161. La SNCB avait surpris tout le monde en proposant une alternative. Pour la Région de Bruxelles-Capitale, seul l’accord interministériel du 30 mars 1999 était valable. Des tracés alternatifs ne pouvaient être acceptables que si la SNCB et la ministre fédérale des Transports démontraient que ceux-ci ne portaient pas atteinte aux travaux du RER  [104].

145 Interpellant le ministre Chabert concernant l’avis du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale au sujet du plan d’investissement décennal de la SNCB, le député PSC Denis Grimberghs affirma qu’il fallait lier les dossiers du plan d’investissement et du RER. Il rappela que la mise en œuvre du projet de RER avait été inscrite en tant qu’objectif prioritaire, tant par le gouvernement bruxellois sur base du plan régional des déplacements que par le gouvernement fédéral. Or, l’accord de coopération passé entre le gouvernement fédéral et les trois régions relatif à la mise en œuvre du RER avait été reporté unilatéralement par le gouvernement fédéral. Il rappela que l’accord de gouvernement bruxellois prévoyait que le budget régional ne serait pas sollicité pour le RER. Pour Marc Cools (PRL-FDF), l’amélioration et l’optimalisation de la vitesse sur la ligne Namur-Bruxelles était indispensable. Le député libéral prônait une grande prudence dans le débat qui portait sur l’opportunité de son élargissement ou sur la réalisation d’une ligne nouvelle. Il émit diverses considérations à propos du site de Schaerbeek-Formation. Il fallait préserver de l’espace pour des infrastructures non ferroviaires sur ce site ; il fallait attendre la confirmation de la saturation de l’arrêt TGV de la gare du Midi avant de prévoir un second terminal TGV ; enfin, il fallait insister pour que les TGV qui traversent la Région bruxelloise s’y arrêtent et pour que ceux qui la contournent par la ligne 28 soient une exception. Quant au RER, Marc Cools voulait qu’il améliore la mobilité intrabruxelloise et qu’il desserve les gares prévues dans le cadre du PRAS et du PRD. Marc Cools fit part de quelques inquiétudes à propos du financement du matériel roulant qui n’était pas prévu dans les budgets d’investissement mais dans le budget d’exploitation. Évelyne Huytebroeck (Écolo) reprocha au gouvernement de ne pas avoir encore réagi au plan d’investissement de la SNCB. Elle exigeait que le gouvernement se prononce contre la mise à quatre voies de la ligne 124 et qu’il exprime sa volonté de voir la partie Ouest de Bruxelles desservie. Elle se référait à la recommandation du 30 juin 2000 en vertu de laquelle la réalisation du tunnel Schuman-Josaphat écartait le projet de Schaerbeek-For-mation. Par la voix de Michel Moock, le groupe socialiste revint sur les deux résolutions relatives aux investissements de la SNCB à Bruxelles, à savoir que le nouveau plan décennal prévoie l’ensemble des moyens nécessaires à la réalisation du RER et que ce réseau soit conçu comme un élément d’un projet de mobilité qui profite aussi aux Bruxellois. Cela passait notamment par la concrétisation des investissements sur les infrastructures à l’Ouest de Bruxelles, par le réaménagement, la réaffectation et la modernisation des gares bruxelloises et par l’achèvement prioritaire des travaux à la gare du Midi. Selon Michel Moock, les inquiétudes de voir la Région supporter le poids financier de l’achat de matériel roulant par le biais du déficit d’exploitation était justifié. Pour toutes ces raisons, il estimait qu’il fallait examiner le plan décennal en ayant un œil sur le projet de coopération entre l’État fédéral et les régions sur le RER.

146 Se chargeant de répondre aux différents intervenants, le secrétaire d’État à la Mobilité, Robert Delathouwer, rappelait qu’en janvier 2001, la SNCB avait présenté au gouvernement fédéral un plan d’investissement pour 2001-2010 représentant 644 milliards. Compte tenu des moyens prévus par le gouvernement fédéral et de ses propres moyens, la SNCB disposait seulement de 497 milliards, ce qui impliquait un solde à financer de 147 milliards. Fin mars 2001, le Conseil fédéral des ministres acceptait le plan mais décidait de l’étaler sur douze ans afin de compenser en partie le solde à financer de 147 milliards. Le conseil d’administration de la SNCB avait adapté son plan sur base de cette décision. Il subsistait un solde à financer de 97,5 milliards. Le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale était en train d’examiner ce plan d’investissement et préparait un avis motivé. Les infrastructures ferroviaires devaient s’inscrire dans le cadre de la politique d’aménagement du territoire et tenir compte de l’environnement et de l’habitat ; le calendrier et le financement du RER devaient être clairs et sûrs ; les charges financières découlant du solde à financer de 97,5 milliards ne pouvaient avoir de répercussions ni sur la réalisation des projets, ni sur les résultats d’exploitation du RER. Robert Delathouwer réaffirma que les frais pour le RER ne pouvaient être inscrits sur l’accord de coopération entre l’État fédéral et la Région bruxelloise. Il liait partiellement l’avis définitif du gouvernement bruxellois aux accords concernant le RER. Il notait le déficit d’exploitation comme l’un des points importants qui devaient être abordés au cours de négociations ultérieures. Constatant que le plan d’investissement proposé ne mentionnait pas de financement du matériel ferroviaire pour le RER, il en déduisait que la SNCB et/ou la ministre fédérale envisageaient une opération de leasing. Une discussion devrait avoir lieu pour déterminer qui serait amené à en supporter les charges financières. Pour lui, ces charges ne pouvaient aucunement grever le compte d’exploitation du RER.

147 Suite à ce débat, une proposition d’ordre du jour motivé, signée par Évelyne Huytebroeck (Écolo), Joël Riguelle (PSC), Jan Béghin (CD&V), Rudy Vervoort (PS), Jean-Luc Vanraes (VLD-Spirit) et Marc Cools (PRL-FDF), était déposée. Il y était réaffirmé que le budget régional ne pouvait être mis à contribution pour financer le réseau SNCB du RER, que ce financement devait être réalisé exclusivement par le fédéral, à l’exception de l’éventuel aménagement du réseau de la STIB, et qu’il ne pouvait être fait appel au mécanisme de l’accord de coopération  [105].

148 Le 13 juillet 2001, Jean-Pierre Cornelissen interrogea le ministre-président sur les moyens prévus par le pouvoir fédéral pour le RER et sur le financement du matériel roulant. La parlementaire écologiste, Évelyne Huytebroeck, releva avec satisfaction qu’un avis de la Région était intervenu sur le plan d’investissement de la SNCB et que le ministreprésident était à nouveau intervenu, durant la semaine, pour répéter qu’il n’y aurait pas d’investissements du côté de la Région. Elle demanda au ministre s’il était intervenu lors de la réunion du matin pour répéter ces conditions.

149 François-Xavier de Donnea répondit que le comité de concertation s’était réuni le matin et que la note résultant des négociations de la veille et de la nuit leur était parvenue vers 8h55, ce qui ne leur avait pas laissé le temps de réagir en séance. Une nouvelle réunion des ministres était prévue à 18h. Il tenait à rappeler que la Région avait pris une position très ferme en la matière. Un premier avis sur le plan d’investissement de la SNCB avait été remis le 21 juin. Les négociations s’étaient poursuivies depuis lors sans que les ministres bruxellois n’infléchissent leur position. Il mettait l’accent sur l’attention portée par le gouvernement au matériel roulant du RER. Il fallait que celui-ci soit disponible rapidement et financé sans grever les finances régionales. En second lieu, le financement alternatif du solde à financer de 97 milliards ne pouvait provoquer de retard, voire de suppression, des projets nécessaires au RER, indépendamment du matériel roulant. Enfin, pour les permis, le gouvernement voulait que dans certaines circonstances, les délais de rigueur soient suspendus. D’après le document transmis le matin, la majorité des remarques émises par la région avaient été prises en considération et intégrées dans l’accord de coopération. Jean-Pierre Cornelissen encouragea le ministre-président à persévérer dans cette voie et Évelyne Huytebroeck marqua son accord  [106].

150 Le député PSC Denis Grimberghs réaffirma son inquiétude dans une interpellation en commission de l’Infrastructure, le 24 octobre 2001. Selon lui, l’accord intervenu sur le plan d’investissement de la SNCB entre les différents niveaux de pouvoir n’était pas satisfaisant pour Bruxelles. En effet, l’option qui consistait à inscrire pour partie l’acquisition du matériel roulant du RER dans le plan d’investissement de la SNCB était essentiellement financée par la part des investissements attribués à la Région de Bruxelles-Capitale. Cela n’aurait pas été grave si tous les investissements nécessaires au bon développement du rail dans la Région bruxelloise avaient été repris dans ce plan décennal. Mais il semblait qu’il n’y avait guère de réserves pour assurer le financement de mesures environnementales nécessaires pour le dédoublement des voies sur la ligne 161 et le dédoublement partiel sur les lignes 124. En outre, le montant de 10,5 milliards destiné au matériel roulant qui était repris dans le plan laissait deux tiers de la facture à charge du compte d’exploitation. L’interpellant notait également que l’accord intervenu au niveau fédéral concernant le plan d’investissement, capital pour la Flandre et la Wallonie, n’avait pas été couplé à l’adoption de l’accord de coopération relatif au RER. S’il y avait des avancées en matière d’investissements, il n’y avait pas d’accord quant au fonctionnement. Concernant le tunnel Schuman-Josaphat, il n’y avait pas de garantie en termes d’exploitation de la structure. Denis Grimberghs voulait obtenir des informations sur l’étude relative au schéma d’exploitation du RER financée dans le cadre de l’accord de coopération entre l’État fédéral et la Région de Bruxelles-Capitale sur les investissements d’intérêts nationaux ou internationaux sur le territoire bruxellois. Il souhaitait également disposer d’une liste des haltes du réseau bruxellois. Il signalait enfin que les deux autres régions ne marquaient pas leur intérêt pour des mesures d’accompagnement en ce qui concernait le stationnement.

151 Il terminait son intervention en interrogeant le ministre sur le nouveau calendrier de l’accord de coopération sur le RER et en lui demandant s’il envisageait de faire ratifier l’accord de coopération relatif au plan décennal avant la signature de l’accord de coopération sur le RER.

152 Il s’informait aussi de la position du ministre concernant les mesures d’accompagnement à prendre en dehors du territoire bruxellois. Le ministre Chabert répondit que les choses s’étaient accélérées depuis juillet 2001. Il proposait d’éviter les complications et d’aller de l’avant. Il était parvenu à faire inscrire dans l’accord de coopération sur le plan d’investissement de la SNCB un financement direct de 10,5 milliards qui devaient servir à la construction de rames du RER. Selon les spécialistes du chemin de fer, il fallait 30 milliards pour tout le matériel nécessaire, mais il était important d’avoir déjà obtenu les 10,5 milliards pour entamer la construction des rames. Il n’y avait aucun lien explicite entre l’accord de coopération du RER et celui du plan d’investissement, mais il existait un parallélisme car la réalisation du RER était tributaire de l’approbation et de la réalisation du plan d’investissement. De nombreuses questions restaient pendantes, dont celle du coût supplémentaire du leasing des rames de RER. Il n’était pas question que la Région le prenne en charge. Une étude relative au schéma d’exploitation devait être prochainement lancée. L’implantation des arrêts était en cours de réalisation, les recommandations votées en juin 2000 ayant été prises en compte. Le plan d’accompagnement qui comprenait notamment les emplacements de parking et les zones pour autobus devait être discuté avec les autres régions, une fois l’accord de coopération adopté.

153 Dans sa réplique, Denis Grimberghs exprima son refus de ratifier l’accord de coopération du RER après celui du plan d’investissement  [107].

3.2.7. Le débat parlementaire sur le plan décennal d’investissement de la SNCB

154 Le projet d’ordonnance portant assentiment à l’accord de coopération entre l’État, la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif au plan d’investissement pluriannuel 2001-2012 de la SNCB fut discuté à la séance plénière du 20 décembre 2001 du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale. Ce plan comportait un volet très important pour les Bruxellois, à savoir la réalisation du RER. La Région de Bruxelles-Capitale avait demandé des éclaircissements sur un certain nombre d’aspects importants pour Bruxelles dont certains n’étaient pas repris dans le plan : le nombre de gares à desservir à Bruxelles, l’optimalisation de la jonction Nord-Midi, l’amélioration de la desserte du quartier européen et de l’aéroport, le financement du matériel ferroviaire du RER.

155 Le plan s’étale sur une période de douze au lieu de dix ans, il prévoit dans chaque Région d’importants travaux d’infrastructure, il présente un solde net à financer de 97,5 milliards et comporte une possibilité pour les régions de pré ou de co-financer des investissements.

156 Le ministre avait insisté sur la nécessité de prévoir un financement pour le matériel ferroviaire du RER. Une formule alternative – le leasing – ne pouvait aboutir pour Bruxelles à des charges d’exploitation plus élevées pour le RER. Le ministre avait également souligné le financement direct, à concurrence de 10,5 milliards, pour le matériel ferroviaire du RER qui devait permettre de procéder à l’acquisition, pour 2005-2006, des rames nécessaires à l’exploitation des deux lignes que l’État fédéral s’engageait à réaliser pour la fin 2005.

157 Le solde à financer de 97,5 milliards ne pouvait occasionner des charges supplémentaires pour Bruxelles ni conduire au report ou à la suppression d’investissements importants et prioritaires pour la région.

158 La Région de Bruxelles-Capitale avait demandé plus de clarté sur différents aspects tels que l’impact sur le déficit d’exploitation du RER, en fonction du financement insuffisant du matériel, l’impact du solde à financer sur des projets situés dans la Région bruxelloise, la façon dont l’accord pourrait, le cas échéant, être adapté dans la durée, les priorités régionales et les investissements dans les gares et l’intégration de l’extension ferroviaire de la ligne 104 entre Braine-l’Alleud et Linkebeek. En dépit de l’avis défavorable du Conseil d’État, en particulier en ce qui concernait un possible pré- et co-financement par les régions, le ministre proposait que le Conseil régional approuve l’accord de coopération.

159 La députée écologiste Geneviève Meunier rappela les recommandations votées par le Conseil régional sur la mobilité dans et autour de Bruxelles et la demande faite en février 2001 au gouvernement de défendre les revendications bruxelloises. Elle déplorait une certaine passivité du gouvernement qui « s’était heureusement réveillé en juillet ». Elle exprimait la satisfaction de son groupe sur les avancées obtenues : l’effectivité de deux lignes RER pour 2005 et un crédit de 10 milliards de francs belges pour l’achat de matériel roulant. Le gouvernement devait encore conclure l’accord de coopération RER et obtenir des garanties sur le déficit d’exploitation et le financement du matériel roulant complémentaire. Elle notait qu’il y avait un engagement de la SNCB pour réinvestir la ligne 28 dans le trafic voyageurs mais dans un délai trop lointain. L’engagement de réinvestir dans les gares bruxelloises lui paraissait trop imprécis. Par contre, elle se réjouissait que l’installation d’un terminal TGV « pharaonique » à Schaerbeek-Formation, le projet de nouvelle ligne alternative à la ligne 161 et la mise à quatre voies intégrales sur la ligne 24 n’étaient pas repris dans le plan. Elle annonçait un vote positif de son groupe.

160 Au nom du groupe socialiste, Michel Moock dit regretter « l’empressement » avec lequel il avait fallu travailler en commission sur l’adoption de cet accord. Il plaça son intervention dans le cadre des revendications formulées dans la résolution votée par le Conseil. Il rappela la priorité accordée au RER en tant que vecteur de la mobilité des Bruxellois dans la résolution et s’inquiétait que l’accord sur le RER ne soit pas finalisé à ce jour. Il se demandait si, lorsque la Région bruxelloise aurait approuvé l’accord sur le plan d’investissement de la SNCB, il lui resterait assez d’atouts en mains pour imposer sa vision des choses. Sa crainte était que soit imposé un RER uniquement pour navetteurs, ce qui ne pouvait être accepté. Il constatait que les crédits prévus au titre « aménagements gares et parkings » à Bruxelles ne s’élevaient plus qu’à 800 millions et s’étalaient sur la période 2009-2012. Or, dans le plan initial de la SNCB, les investissements s’élevaient à 4,5 milliards et étaient prévus entre 2003 et 2010. Il interrogeait donc le ministre sur cette diminution drastique et ce report. En ce qui concernait le matériel roulant, il relevait que le plan d’investissement prévoyait 10,5 milliards pour son acquisition, sur plus de 30 milliards estimés nécessaires. Une partie de ces 10,5 milliards provenait des économies réalisées suite à l’abandon de la ligne nouvelle envisagée dans le plan initial. Il signalait que seule la Région bruxelloise affectait ces moyens à l’acquisition de matériel roulant, les deux autres les consacrant à des mesures environnementales. La résolution bruxelloise avait pourtant été claire quant à la protection des quartiers riverains. L’absence de crédits prévus pour ces investissements faisait craindre qu’il faille les financer dans le cadre de l’accord de coopération, ce qui avait été exclu dans la déclaration gouvernementale. Il demandait des garanties au ministre sur ce point. Il voulait aussi savoir dans quelle mesure les investissements TGV prévus au plan concernant Bruxelles Nord-Schaerbeek orientaient la localisation d’un futur terminal. Alors qu’un RER bruxellois demandait l’utilisation des trois jonctions ferroviaires (Nord-Midi, ceinture Est via la ligne 26 et ceinture Ouest par la ligne 28), il regrettait l’absence de concomitance entre la libération des crédits nécessaires au passage du TGV sur la ligne 28 et de ceux nécessaires pour le réaménagement effectif de la même ligne. Il posait dès lors la question des garanties que l’on avait d’un réseau RER qui ne délaisse pas l’Ouest de Bruxelles. Malgré cette circonspection, le groupe socialiste, conscient qu’un refus de l’accord reporterait la mise en route des deux premières lignes du RER, prévues en 2005, le voterait. Alors que la Région wallonne s’était déjà prononcée en faveur de l’accord, il était curieux de voir le temps que mettrait la Région flamande à le voter.

161 Le député PSC Denis Grimberghs critiqua également le rythme accéléré des travaux qui avait été imposé alors que « partout ailleurs, l’examen de cet accord de coopération a suscité moult débats et réflexions, y compris sur l’utilité d’un tel accord de coopération ». Visant Écolo, il ironisait sur des membres de l’opposition qui trouvaient que cela n’allait pas assez vite et qui voulaient se montrer « bons élèves par rapport à la ministre fédérale des Transports ». Poursuivant dans l’ironie, il soulignait l’attitude de ceux qui considéraient qu’il aurait été « d’un parfait mauvais goût » d’envisager de surseoir à l’examen de ce texte en l’absence d’avancée significative en ce qui concernait l’accord de coopération RER. Et pourtant, insistait Denis Grimberghs, s’il y avait un accord de coopération qu’il fallait attendre en tant qu’autorité régionale, c’était bien celui relatif au RER. Or, de celui-là, il n’y avait point de nouvelle officielle. Il ne comprenait pas ceux qui voulaient que le Parlement bruxellois approuve cet accord avant la fin de l’année, alors que l’on savait que le Parlement flamand n’en ferait rien. Pour lui, le risque était grand que la SNCB, la Région flamande et, sans doute aussi, la Région wallonne ne fussent plus pressées de finaliser l’accord sur le RER une fois conclu l’accord sur le programme d’investissement de la SNCB et, concomitamment, le permis d’urbanisme pour le tunnel Schuman-Josaphat délivré. Car ce qui restait à négocier était surtout source de contrainte pour les uns comme pour les autres. En effet, il fallait se mettre d’accord sur les mesures d’accompagnement, sur la répartition du déficit d’exploitation et sur les modalités d’exploitation du RER. Un signal politique clair aurait pu être donné en annonçant que le Parlement bruxellois approuverait l’accord sur le programme d’investissement à la condition qu’une avancée significative ait lieu sur l’accord de coopération RER, en fixant un délai. Le tunnel Schuman-Josaphat serait réalisé mais Denis Grimberghs doutait qu’il fut le maillon indispensable au RER et qu’il fut une garantie de réalisation rapide de ce-lui-ci. Il relevait que dans l’accord de coopération, le financement du fonds RER s’opérerait sur douze ans, pour le même montant que celui qui avait été prévu initialement sur huit ans. Denis Grimberghs répétait son inquiétude à propos du manque de marge de manœuvre dont disposait la Région de Bruxelles-Capitale pour la réalisation de projets complémentaires, en particulier pour la prise en charge des coûts environnementaux liés aux travaux à réaliser sur les lignes 161,28 et 124. Il rejoignait Michel Moock à propos de l’insuffisance des crédits prévus pour le réaménagement des gares. La question du deuxième terminal TGV était pour lui l’illustration de la politique des petits pas ou du fait accompli de la SNCB. « Certes, l’accélération imaginée, à un moment donné par l’actuel ministre-président, dans sa fonction antérieure à la Ville de Bruxelles, est abandonnée », mais, selon lui, on faisait exactement ce que la SNCB avait demandé au départ, alors que l’on n’était toujours pas sûr que Bruxelles avait besoin de ce fameux deuxième terminal. Le député PSC était par ailleurs sceptique quant au fait que les engagements pris par la Région sur les délais de délivrance des permis d’urbanisme introduits par la SNCB pour la concrétisation du plan d’investissement soient conformes aux délais d’examen normaux des dossiers en vertu des ordonnances existantes en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire.

162 Le représentant du Vlaams Blok, Johan Demol, appela pour sa part au rejet de l’accord qui devait conduire, selon lui, à la faillite de la SNCB.

163 Dans sa réponse, le ministre Chabert fit état du montant de 60,330 milliards affecté spécifiquement au RER à Bruxelles. À ceux-ci s’ajoutait une rubrique « Complément mobilité Bruxelles », dotée de 61 milliards supplémentaires. Le ministre fit remarquer qu’il s’agissait des investissements les plus importants à Bruxelles qui devaient bénéficier tant aux navetteurs qu’aux Bruxellois. En outre, le gouvernement fédéral et la SNCB avaient également réservé 10,5 milliards de francs pour l’acquisition de rames RER. Ce montant était le résultat d’un dur combat mené par les ministres bruxellois. Au total, c’étaient donc près de 132 milliards qui étaient prévus pour la mobilité dans et autour de Bruxelles, soit 19% du budget d’investissement global. Le ministre estimait que la mise en œuvre de deux lignes ferroviaires du RER pour la fin 2005 représentait une avancée considérable. Reconnaissant que des doutes subsistaient concernant les frais d’exploitation du RER et la faisabilité financière du plan d’investissement, il relatait qu’il avait voulu obtenir des garanties maximales. La ministre fédérale des Transports l’avait assuré que des solutions adaptées au fait que la Région n’interviendrait pas dans le déficit d’exploitation du RER seraient recherchées. L’administrateur de la SNCB avait affirmé que le recours à certaines techniques budgétaires devrait couvrir le solde à financer. La ministre Durant avait converti ces déclarations en une position ministérielle, dans un courrier de ministre à ministre. En ce qui concernait le respect des procédures et des réglementations régionales, Jos Chabert affirma que les procédures seraient strictement suivies lorsque chaque Région s’engagerait à finaliser les demandes de permis endéans les délais impartis légalement. Cela suscita le scepticisme de Denis Grimberghs qui, rappelant que l’accord de coopération donnait un délai maximum de 18 mois pour finaliser les permis, prévoyait qu’il faudrait adapter la législation si le délai était supérieur. Le ministre ne partageait pas son avis, considérant que l’accord de coopération ne touchait aux procédures légales ni aux possibilités de participation en ce qui concernait la participation de la population. Répondant au même intervenant à propos de l’opportunité de commencer par l’accord de coopération relatif au RER, le ministre estimait que l’ordre logique était d’abord l’accord sur le plan d’investissement et ensuite l’accord sur le RER. Une série de mesures devaient être discutées dans le cadre d’un accord de coopération pour le RER. Attendre leur résolution risquerait de faire encourir des retards à d’autres projets ferroviaires. Ainsi, certains projets n’étaient pas repris dans le chapitre RER, comme par exemple, la ligne 28, reprise au chapitre « Extension de la capacité » du programme classique. Une grande vigilance serait de mise concernant le respect du timing repris dans le plan d’investissement. Le gouvernement avait fait tout ce qui était nécessaire pour Bruxelles et allait négocier l’accord de coopération en vue du RER. Celui-ci devait présenter aussi suffisamment de possibilités à l’intérieur de la Région : places de parking à Bruxelles, aménagement des gares. Le ministre concluait en voyant dans cet accord la possibilité de développer le RER et de contribuer ainsi à la résolution des problèmes de mobilité. Le secrétaire d’État Robert Delathouwer manifestait sa satisfaction du travail accompli, ayant la certitude qu’en 2005 les premières rames circuleraient sur le RER  [108].

164 Le projet fut voté par les partis de la majorité et par Écolo (parti auquel appartenait la ministre fédérale des Transports, Isabelle Durant). Le PSC et l’extrême droite flamande et francophone votèrent contre. Le député PRL-FDF Bernard Clerfayt, par ailleurs bourgmestre de Schaerbeek, s’abstint. Il justifiait son abstention, notamment par le fait qu’il estimait que la SNCB obtenait toutes les garanties et que les Bruxellois n’en avaient pas suffisamment, et par cohérence avec la position de la Ville de Bruxelles et de Schaerbeek par rapport au tunnel Schuman-Josaphat  [109].

3.2.8. Les suites du plan d’investissement de la SNCB et le dossier du RER

165 Le 21 février 2002, Denis Grimberghs revint à la charge, évoquant un accord politique qui neutraliserait l’accord de coopération sur le RER tant que la Région flamande n’aurait pas ratifié l’accord de coopération relatif au plan d’investissement de la SNCB. Le ministre Chabert niait l’existence d’un tel accord. Il jugeait prématuré de supposer que la Région flamande demanderait et obtiendrait des garanties complémentaires pour des mesures d’accompagnement dans la zone RER. Lors des contacts bilatéraux, le gouvernement flamand avait réaffirmé la volonté de la Région flamande de voir aboutir le RER et de continuer à collaborer dans un esprit constructif  [110].

166 Le 24 mai 2002, Brigitte Grouwels (CD&V) demanda des éclaircissements concernant l’implantation d’un terminal TGV à Schaerbeek. Le ministre Chabert rappela que le 30 mars 1999, une décision ministérielle avait été prise concernant le terminal TGV à Schaerbeek-Formation et la place essentielle du RER dans ce cadre. Dans son avis du 21 juin 2001 sur le plan d’investissement de la SNCB, le gouvernement bruxellois s’était référé à la décision interministérielle précitée et précisé qu’une étude devait être menée. Il était impensable que le gouvernement revoie la teneur de sa position précédente dans laquelle il soulignait l’importance du RER. Brigitte Grouwels en déduisit que la décision initiale concernant Schaerbeek-Formation n’était pas remise en question. Or c’est ce qu’avait fait le secrétaire d’État Draps dans sa réponse à une question précédente. Elle craignait les conséquences d’une trop grande indécision alors que la Flandre se prononçait pour un arrêt TGV à Zaventem. Jos Chabert lui répondit que la décision ne pourrait intervenir avant la fin juin, puisque l’étude ne serait clôturée qu’à ce moment-là  [111].

167 Dans une interpellation à la commission de l’Infrastructure, Denis Grimberghs rappela la promesse du ministre Chabert que l’accord de coopération du RER serait réalisé dans les plus brefs délais. Constatant que les blocages persistaient, il exprima sa perplexité devant le fait que l’on n’ait pas utilisé l’attribution du permis d’urbanisme pour le tunnel Schuman-Josaphat comme instrument pour faire avancer ce dossier. Il s’étonnait de découvrir dans le permis l’intention de ne pas hypothéquer « un éventuel (tunnel) routier en direction du centre-ville entre la rue du Noyer et l’avenue de la Joyeuse entrée ». Il rappelait que si le tunnel Cortenbergh n’avait qu’un seul sens, c’était à la suite d’une volonté politique expresse qui refusait de poursuivre une logique d’autoroute urbaine. La députée écologiste Geneviève Meunier rappela que le blocage provenait essentiellement de la Région flamande. Elle ne comprenait pas non plus l’attitude du gouvernement à propos du tunnel Schuman-Josaphat. La Région avait mis six mois pour traiter le dossier et un tunnel routier, appelé « le vide technique » était apparu dans le dossier. Ce projet remettait en question le tunnel ferroviaire rien qu’au niveau technique. Sur le fond, ce tunnel routier, en contradiction avec le plan Iris des déplacements, serait un aspirateur à voitures, concurrent du tunnel ferroviaire.

168 Intervenant dans le débat, le député socialiste Michel Moock commença par interroger le ministre sur l’accord de coopération sur le RER. Il manifesta également son inquiétude par rapport à la construction d’un véritable tunnel routier à propos du permis d’urbanisme accordé pour le tunnel Schuman-Josaphat. Dans sa réponse, le ministre Chabert signala qu’un premier projet d’accord de coopération avait été approuvé par le gouvernement le 19 juillet 2002. Le 18 septembre 2002, la ministre Durant avait annoncé qu’elle était sur le point de signer un accord avec la SNCB selon lequel les deux premières lignes du RER devaient être mises en service pour la fin 2005. Le gouvernement régional était en attente d’un accord plus complet. Le retard provenait d’un désaccord entre le cabinet Durant et la SNCB au sujet du type de rames envisagé. Une commande de rames de fin de série conçue pour des compagnies étrangères serait sur le point d’être passée, ce qui devait permettre d’obtenir une réduction des coûts de 25% et diminuer les délais de fabrication. Le permis du tunnel Schuman-Josaphat avait été délivré. Enfin, la Région ne prendrait pas en charge les frais d’exploitation ferroviaire. À propos de l’adaptation du profil en long du tunnel pour ne pas hypothéquer un éventuel tunnel routier, le secrétaire d’État Draps affirmait qu’il n’y avait pas le moindre début d’autorisation « d’un seul mètre de tunnel routier  [112] ».

169 Le député PSC Denis Grimberghs interpella une nouvelle fois le ministre Chabert en commission de l’Infrastructure le 20 novembre 2002. Rappelant l’importance accordée par le Parlement bruxellois à une desserte optimalisée des 28 gares bruxelloises, il voulait savoir pourquoi la Région n’avait toujours pas donné son avis sur une carte du RER proposée par la SNCB le 14 mars 2001. En outre, il estimait utile que la commission puisse confronter les propositions élaborées au niveau régional et les schémas présentés par la SNCB. Il soulignait le conflit d’utilisation de la ligne 28 dans l’hypothèse du développement du deuxième terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation. Pour lui, dans ce cas, la ligne 28 devait être à quatre voies et faire coexister TGV et RER. La députée écologiste Geneviève Meunier suggéra de distinguer l’infrastructure et l’exploitation du RER. Pour l’infrastructure, c’est-à-dire le suivi du plan d’investissement de la SNCB, elle proposa d’instaurer un comité de concertation Région-SNCB, comme cela avait été mis en place par la Région wallonne. L’exploitation (fréquences, publicité, meilleure exploitation des lignes 26 et 28) représentait, quant à elle, tout l’enjeu de l’accord de coopération RER entre le pouvoir fédéral et les régions. Cet accord avait été transmis pour accord aux régions et elle espérait que le gouvernement bruxellois le ratifierait rapidement pour qu’il puisse entrer en vigueur à la fin de l’année. Pour le député MR Jean-Pierre Cornelissen, le deuxième terminal TGV n’était pas à l’ordre du jour. Pour lui, il fallait maintenir l’option de faire circuler le TGV dans la jonction Nord-Midi et d’utiliser la ligne 28 pour le RER. Le député socialiste Michel Moock dit partager l’approche de Denis Grimberghs et rappela la demande socialiste d’une gare RER active et développée sur la ligne 28. Le ministre Chabert précisa que le gouvernement avait toujours tenu compte des recommandations formulées par le Parlement. Il signala que le projet d’accord sur le RER confirmait que l’offre complémentaire ferroviaire tiendrait compte des 40 arrêts dont il était fait mention dans le PRD. Il souligna l’importance d’un accord contraignant entre le fédéral et les régions, pour que chaque pouvoir ne décide pas de façon autonome des stations disponibles pour le RER. Le projet d’accord prévoyait un comité de pilotage , associé d’un groupe opérationnel, qui proposerait les améliorations et les adaptations apportées au réseau RER. Cela permettait à la Région d’être associée à tous les aspects de la mobilité dans la Région. Une décision de principe avait déjà été prise pour prévoir de nouvelles gares sur la ligne 26. Pour les gares du RER, la SNCB appliquerait des normes de qualité plus sévères. Le pouvoir fédéral venait de transmettre un projet d’accord pour le RER qui devait encore être examiné. Une intégration optimale de la ligne 28 et de l’aéroport dans le RER était défendue. Les conclusions de l’étude relative à la nécessité d’un terminal ferroviaire dans la zone de Schaerbeek étaient attendues avant de prendre attitude à propos de la liaison de la ligne 28 avec cet éventuel terminal. Au nom du secrétaire d’État Willem Draps, le ministre signala que le projet de raccordement du diabolo ferroviaire de l’aéroport au site de Schaerbeek-For-mation avait évolué depuis que le gouvernement avait arrêté le PRAS. La Flandre s’était récemment prononcée en faveur de l’installation d’une nouvelle ligne de chemin de fer dans la berme centrale de l’autoroute E19. Cette proposition qui avait été intégrée comme telle dans le PRD était également préférée par le gouvernement bruxellois, mais elle nécessitait une révision du PRAS, préalablement à la délivrance du permis. Par rapport au souhait émis par Geneviève Meunier, le ministre indiqua qu’une première réunion du comité de concertation Région-SNCB avait eu lieu la semaine précédente  [113].

3.2.9. L’annonce de réduction des crédits pour le RER et l’évolution du dossier TGV

170 Le 13 décembre 2002, le député CD&V Walter Vandenbossche signalait que selon les dires du patron de la SNCB Karel Vinck, le RER ne se ferait pas parce qu’il n’y avait pas d’argent pour le faire  [114]. Le 7 février 2003, le député socialiste Michel Moock interrogea le ministre Chabert sur une diminution des investissements prévus en 2003 pour le RER lesquels passeraient, selon un article du quotidien Le Soir, de 87 millions € à 7 millions €. Considérant les permis et certificats d’urbanisme déjà octroyés pour le RER et les expropriations déjà annoncées à certains habitants, le député MR Marc Cools appelait le gouvernement à exiger le respect des engagements tels qu’ils avaient été pris dans l’accord de coopération. Le président du groupe CDH Benoît Cerexhe suggéra une réunion du co-mité de concertation. Walter Vandenbossche souligna les manquements de la ministre Durant. Pour l’écologiste Christos Doulkeridis, au contraire, les choses étaient d’autant plus étonnantes que l’argent avait été mis de côté par le pouvoir fédéral. Le ministre Chabert répondit qu’il allait demander, lors de la conférence des ministres des Transports, que le plan d’investissement 2001-2012 soit correctement exécuté et que l’accord de coopération soit respecté. Il considérait qu’il n’était pas acceptable qu’un accord signé par quatre gouvernements et ratifié par quatre parlements soit écarté par une seule des parties. Il se déclarait prêt, le cas échéant, à demander la convocation du comité de concertation  [115].

171 À la même séance, le député CDH Denis Grimberghs releva que certaines déclarations du ministre-président François-Xavier de Donnea à propos du TGV étaient en contradiction avec l’étude réalisée par le bureau Stratec dans le cadre de l’accord de coopération entre l’État fédéral et la Région de Bruxelles-Capitale. Il se référait à un communiqué de presse du ministre-président selon lequel les trains à grande vitesse pourraient utiliser la ligne 28 pour contourner la jonction Nord-Midi et n’avoir qu’un seul point d’arrêt, à savoir le deuxième terminal. Or, d’après l’étude, le TGV devait rester dans la jonction. Le secrétaire d’État Draps ne voyait, quant à lui, pas de contradiction entre le communiqué de François-Xavier de Donnea et l’étude. Selon lui, le gouvernement privilégiait toujours l’option dans laquelle les TGV emprunteraient la jonction Nord-Midi, la ligne 28 devant être dédiée prioritairement au RER. La déclaration de François-Xavier de Donnea indiquait simplement que les TGV en direction des Pays-Bas ou de l’Allemagne pourraient partir de la halte au Nord de Bruxelles  [116].

172 Suite à l’annonce de la réduction des crédits prévus pour le RER, Jean-Pierre Cornelissen (MR), Denis Grimberghs (CDH) et Geneviève Meunier (Écolo) interpellèrent le ministre Chabert à la séance plénière du 21 février 2003. Marc Cools (MR), Jos Van Assche (Vlaams Blok), Michel Moock (PS) et Christos Doulkeridis (Écolo) intervinrent. À l’issue de ce débat, un ordre du jour signé par des représentants de toutes les formations politiques (sauf l’extrême droite) fut déposé. Celui-ci jugeait totalement inacceptable la déperdition de moyens et la perte de temps qui résultait de la non-utilisation maximale du budget 2003 de la SNCB de l’enveloppe de 87 millions prévue initialement dans le plan d’investissement dodécennal pour lequel la Région avait émis un avis favorable. Il exigeait le respect strict de la planification des investissements essentiels indispensables à la mise en place du réseau RER et réclamait que les modalités relatives à la commande d’un matériel roulant spécifique au RER soient réalisées dans le courant de l’année afin de respecter le calendrier prévu pour le début de l’exploitation. Il rappelait la nécessité d’aménager les gares et de créer certains nouveaux points d’arrêts. Il s’opposait à toute régionalisation du rail et demandait au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale d’entreprendre toutes les démarches et initiatives utiles afin d’assurer le respect des engagements pris. Il demandait au gouvernement de saisir, le cas échéant, le comité de concertation qui réunit l’État fédéral et les entités fédérées  [117]. Il fut voté le 14 mars 2003 par l’ensemble des formations politiques à l’exception de l’extrême droite  [118].

173 Le 19 mars 2003, Denis Grimberghs interpella le ministre-président François-Xavier de Donnea et le secrétaire d’État chargé de l’aménagement du territoire Willem Draps à propos du résultat de l’étude Stratec sur le deuxième terminal TGV. Le député du CDH constatait que cette étude confirmait l’absence de saturation du terminal Bruxelles-Midi et récusait tout lien entre la saturation de la jonction Nord-Midi et l’opportunité de développer le deuxième terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation. Il considérait comme erroné d’utiliser la ligne 28 pour le TGV car celui-ci ne passerait alors plus par la gare du Midi. Or, le principal terminal TGV devrait toujours se situer dans cette gare. Afin de désengorger la jonction Nord-Midi, la ligne 28 devait être utilisée par le RER et les lignes intérieures. Denis Grimberghs voulait savoir ce qu’il en était des autorisations urbanistiques actuellement accordées à la SNCB et si le gouvernement avait des garanties d’utilisation de la ligne 28 pour le délestage de la jonction Nord-Midi. Il demandait au ministre-président de définir les grandes tendances d’aménagement du territoire pour la zone de Schaerbeek-Formation. Enfin, soulignant que l’un des arguments de la SNCB en faveur du projet de gare sur le site de Schaerbeek-Formation était la réalisation d’une porte d’entrée pour l’aéroport de Bruxelles-National, il souhaitait des informations sur les contacts pour favoriser l’enregistrement des bagages dans l’une des grandes gares bruxelloises.

174 La parlementaire écologiste Geneviève Meunier abonda dans le même sens. Le socialiste Michel Moock estima qu’avant de construire un second terminal TGV, il fallait terminer le premier et veiller à ce qu’il soit dans un état convenable. Le choix du site de Schaerbeek-Formation pour la construction d’un deuxième terminal TGV entraînerait la mobilisation de la ligne 28 et donc une réduction des voies disponibles pour le RER. Un tel schéma était impensable pour les socialistes. Jean-Pierre Cornelissen se demandait comment l’on pourrait justifier la construction d’un deuxième terminal TGV pour une ville de la taille de Bruxelles. Pour lui aussi, l’utilisation de la ligne 28 devait se faire dans le cadre d’une optimalisation du RER. Et si un jour une gare devait être utilisée pour un deuxième terminal TGV, il faudrait que ce soit celle de Schaerbeek-Voyageurs.

175 Le secrétaire d’État Willem Draps répondit qu’en juin 1999, la Région avait délivré un permis d’urbanisme pour la construction des lignes TGV au Nord de Bruxelles vers Amsterdam et Cologne. L’infrastructure en béton pour le croisement des voies sur le site de Schaerbeek-Formation pouvait être considérée comme le prémisse d’un deuxième terminal TGV. Il n’avait pas le pouvoir de retirer ce permis. Par ailleurs, le projet initial de la ligne TGV vers Anvers devait être modifié pour y raccorder la future ligne prévue sur la berme centrale de l’autoroute E19 et cela en liaison avec le diabolo de l’aéroport. La SNCB préparait à cet effet les plans d’une nouvelle demande de permis ou de certificat d’urbanisme pour les voies TGV dans Bruxelles-Formation et la liaison vers l’échangeur autoroutier de Machelen. Les conclusions de l’étude Stratec indiquaient que le terminal TGV du Midi suffirait aux besoins pendant vingt ans et qu’une division des opérations d’un terminal sur deux sites était inutile. Le détour du TGV par la ligne 28 n’était pas souhaitable. En cas de dépassement de la capacité de la jonction Nord-Midi, il était préférable de détourner le trafic intérieur par la ligne 28. Le secrétaire d’État partageait l’idée que, le cas échéant, la meilleure localisation pour une nouvelle gare TGV était le site de Schaerbeek-Voyageurs. Le gouvernement insistait toujours sur la priorité à réserver à la ligne 28 au RER. La Région appuyait un schéma où tous les TGV s’arrêtaient au Midi, traversaient la jonction sur des lignes rapides et faisaient une deuxième halte, soit à Schaerbeek soit à l’aéroport. Willem Draps préférait Schaerbeek  [119].

176 Alors que l’accord de coopération relatif au plan d’investissement pour douze ans de la SNCB était à l’ordre du jour des discussions en vue de la formation d’un nouveau gouvernement fédéral, Denis Grimberghs interpella le ministre du Transport, Jos Chabert, et le secrétaire d’État chargé de la Mobilité, Robert Delathouwer, en commission de l’Infrastructure le 8 juillet 2003. Évoquant le plan d’entreprise Move et la vraisemblable révision du plan d’investissement décennal, il jugeait indispensable que tous les Bruxellois précisent leurs demandes vis-à-vis de la SNCB et fassent inscrire leurs priorités au début du calendrier d'exécution de ce plan. Il s’informait également à propos de l’accord de coopération relatif au RER qui s’était transformé en une convention conclue le 4 avril 2003.

177 Geneviève Meunier appuya cette intervention et interrogea le ministre sur ses priorités par rapport aux gares à rénover  [120].

3.2.10. Les engagements du nouveau gouvernement fédéral

178 Le 22 septembre 2003, le comité de concertation réunissant l’État fédéral et les entités fédérées aboutit à un accord sur plusieurs dossiers budgétaires, dont le plan d’investissement de la SNCB. Cet accord suscita plusieurs interpellations au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale du 24 octobre 2003. Geneviève Meunier (Écolo) et Denis Grimberghs centrèrent leur intervention sur la modification du plan d’investissement de la SNCB. Dans des interventions plus générales, Rudi Vervoort (PS) et Jean-Pierre Cornelissen (MR) abordèrent également cet important dossier. Le ministre Chabert répondit que, durant la négociation, lors de l’examen de la proposition du gouvernement fédéral de revoir l’étalement du plan d’investissement de la SNCB sur 14 ans, le gouvernement bruxellois avait veillé à la concrétisation du RER. Il en résultait que les investissements pour les infrastructures du RER ne seraient pas diminués. Les travaux devaient être exécutés selon le planning d’origine. Les moyens qui ne seraient pas utilisés pour un projet déterminé seraient affectés à d’autres projets liés au RER. Un financement alternatif de la BIAC assurerait la liaison diabolo avec l’aéroport. S’agissant de l’acquisition du matériel roulant, aucune décision ne mettrait en péril le montant de 250 millions d’euros prévus pour le RER. Un groupe de travail technique était chargé de préciser la qualité et la quantité de ce matériel. La convention conclue pour le RER restait inchangée et une approbation de cette convention allait être introduite d’urgence auprès du Conseil. Enfin, deux lignes RER devaient être opérationnelles pour le 31 décembre 2005  [121].

179 Réuni en conclave à Ostende le week-end des 20 et 21 mars 2004, le gouvernement fédéral arrêtait un certain nombre de mesures relatives au RER. Le réseau démarrerait en 2006-2007 avec le matériel existant. Le nouveau matériel ne serait mis en circulation qu’ultérieurement. Les coûts d’exploitation seraient pris en charge par le gouvernement fédéral jusqu’en 2010.

180 Le 26 mars 2004, Brigitte Grouwels (CD&V) et Geneviève Meunier (Écolo) posèrent au ministre Chabert la question de ce qui adviendrait de ces coûts d’exploitation après 2010. Celui-ci répondit que le gouvernement fédéral s’était engagé à prendre en charge le déficit d’exploitation de l’offre de trains pour le RER jusqu’en 2010. Il semblait que cet engagement se prolongerait jusqu’en 2014, mais la décision n’avait pas encore été annoncée formellement. Pour Jos Chabert, il s’agissait là d’un progrès significatif car c’était la première fois que le gouvernement acceptait le principe de la prise en charge des coûts d’exploitation. Quant à la Région de Bruxelles-Capitale, elle restait fidèle à son point de vue selon lequel elle n’interviendrait pas. Un projet d’ordonnance portant assentiment de l’accord d’Ostende avait été approuvé par le gouvernement bruxellois et serait évoqué en urgence au Parlement. Brigitte Grouwels demanda alors si la décision mentionnait explicitement l’obligation pour les régions d’assumer les coûts d’exploitation après 2014 ou 2010. Le ministre répondit qu’il présumait que non mais qu’il se trouvait dans l’incapacité de le confirmer  [122].

181 Le 8 avril 2004, les travaux pour la mise à quatre voies du tronçon situé entre Schuman et la gare de Watermael de la ligne 161 (Bruxelles-Ottignies) étaient lancés.

3.2.11. La convention du 4 avril 2003 entre l’État fédéral et les trois régions visant à mettre en œuvre le programme du RER et sa procédure de ratification

182 Au sein de la Conférence exécutive des ministres de la Mobilité, il n’y avait pas eu de consensus pour que les modalités d’exploitation fassent l’objet, à ce stade, d’un accord de coopération. Aussi, à la demande notamment du gouvernement flamand, prirent-elles la forme d’une convention liant le gouvernement fédéral et les trois gouvernements régionaux. Cette convention engageait néanmoins budgétairement tant l’État que les régions et avait donc la portée d’un accord de coopération. En termes financiers, il était prévu que l’État et les régions gèrent, chacun pour ce qui le concerne, les questions relatives à la propriété et au financement des infrastructures et du matériel roulant. Au niveau de l’exploitation, chaque société de transport public devrait assumer les charges de l’offre qui ressortit à ses compétences, les quatre gouvernements traduisant ces nouvelles contraintes dans les contrats de gestion conclus avec leurs opérateurs.

183 Concrètement, les parties signataires s’engageaient, chacune dans le cadre de ses compétences à mettre les moyens en œuvre pour réaliser :

  • un renforcement significatif, quantitatif et qualitatif, de l’offre de transports en commun ;
  • une intégration des offres de transport prestées par les quatre sociétés de transport en commun dans cette zone (horaires, tarifs, informations) ;
  • des mesures d’accompagnement incitant à l’usage des transports en commun et prises simultanément à la mise en service de l’offre RER.
Les parties visaient à mettre l’offre RER en service dans sa totalité au plus tard pour le 31 décembre 2012. Cette offre devrait assurer la desserte des trois pôles suivants : la jonction Nord-Midi, le quartier des institutions européennes à l’Est de Bruxelles et l’aéroport de Bruxelles-National ainsi que les autres pôles importants de la zone RER.

184 Le projet RER impliquait une collaboration étroite entre les trois régions et l’État fédéral ainsi que leurs opérateurs de transports en commun respectifs.

185 Les mesures d’accompagnement considérées comme indispensables pour favoriser le transfert modal de la voiture individuelle vers les transports en commun faisaient l’objet d’un chapitre de la convention  [123].

186 Au cours du débat en séance plénière du 7 mai 2004, le rapporteur Michel Van Roye signala que la convention avait reçu l’assentiment en commission de tous les partis démocratiques à l’exception du CDH, qui s’était abstenu. Il s’agissait cependant d’une approbation résignée. Les commissaires avaient en effet déploré qu’il s’agissait non d’un accord de coopération mais d’une convention, que celle-ci n’était pas encore approuvée par les autres régions  [124] et que ses principes n’étaient pas encore repris dans le contrat de gestion de la SNCB.

187 Denis Grimberghs (CDH) nota que le Parlement bruxellois était le seul à ratifier cette convention. Par ailleurs, il se montra dubitatif par rapport à l’approche de la SNCB. Il annonça donc l’abstention de son groupe. Marc Cools (MR-PRL) apporta le soutien du MR à la ratification mais appela le ministre à la vigilance. Il relevait que toutes les formations politiques étaient favorables au RER mais que l'on sentait dans le chef des acteurs de la SNCB une volonté de faciliter la venue des navetteurs à Bruxelles. Il reprochait à la SNCB de se conduire en spéculateur avec ses propriétés foncières en arguant d’un manque de moyens chaque fois qu’il s’agissait d’améliorer l’environnement des gares. Marc Cools appela à exiger une amélioration du réseau de chemins de fer bruxellois. Geneviève Meunier (Écolo) rappela que la ministre Durant avait fait le forcing pour obtenir un accord minimal. Elle demandait pourquoi l’approbation de cette convention signée en avril 2003 avait pris plus d’un an, soupçonnant le manque de volonté politique aux niveaux fédéral et flamand. Elle considérait que les mesures d’accompagnement proposées dans la convention paraissaient bien minimes. Elle annonçait néanmoins le vote favorable de son groupe. Michel Moock fit savoir que le groupe socialiste voterait ce projet sans joie. En effet, il voulait un RER aussi pour les Bruxellois. Or, la SNCB ne s’intéressait qu’aux lignes radiales et ne songeait qu’à faire voyager les gens aux heures de pointe. Les mesures d’accompagnement lui paraissaient également peu détaillées. Il attendait pour début octobre au plus tard une proposition pour la gare de l’Ouest. Enfin, constatant que la SNCB était en train de vendre ses terrains à Bruxelles, il se demandait ce qui resterait à la Région le jour où elle serait régionalisée. Pour lui, il était urgent de geler la situation.

188 Jean-Pierre Cornelissen (MR-FDF) insista pour que l’inévitable déficit d’exploitation ne se retrouve pas à la charge des Bruxellois. Le ministre Chabert reconnut qu’il faudrait être vigilant et suivre ce dossier de très près lors de la prochaine législature  [125].

3.2.12. Autres thèmes abordés

189 D’autres problèmes liés à la mobilité furent abordés au Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale durant la législature 1999-2004. Citons le développement d’un réseau de transports en commun de nuit  [126], la gratuité des transports en commun pour certains publics bruxellois  [127] et, surtout, la politique du stationnement. La problématique du stationnement, élément-clé d’une politique efficace en matière de mobilité fut notamment débattue dans le cadre d’une interpellation de Brigitte Grouwels (CVP) le 16 mars 2001. La présidente du groupe CVP, appuyée, pour une fois, par Écolo, déplora l’absence de politique coordonnée et volontariste de la part des communes. Écolo proposa la création d’une agence régionale de stationnement sur délégation de compétences des communes. Au cours de ce débat, le PS , tout en souscrivant à la mise en œuvre d’une politique coordonnée en matière de stationnement, insista cependant sur la nécessité de mener une telle politique dans le cadre des compétences respectives de la région et des communes  [128].

190 Sur la base d’une proposition d’ordonnance visant à créer une agence régionale du stationnement et d’une note du secrétaire d’État à la Mobilité Pascal Smet, envoyée à la Conférence des bourgmestres, une proposition de résolution relative à la politique de stationnement fut votée par l’ensemble des formations, à l’exception du Vlaams Blok et de Margueritte Bastien et d’Albert Mathieu, le 7 mai 2004. Cette résolution prévoit une répartition des tâches entre autorités régionale et communales, impliquant une planification et une réglementation régionale ; elle recommande qu’un groupe de travail mixte comprenant la Région, les communes et les gestionnaires de transport public et de parkings publics s’attèle très rapidement à mettre en œuvre cette politique du stationnement  [129].

3.3. SYNTHÈSE

191 Les débats du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale relatifs à la mobilité au cours de la législature 1999-2004 témoignèrent d’une méfiance émanant de la part des groupes politiques francophones et du groupe SP/Aga à l’égard de la direction de la STIB, soutenue par le ministre du Transport, Jos Chabert.

192 Les reproches adressés à la direction de la STIB et, plus particulièrement à son administrateurdirecteur général Alain Flausch, sont de deux ordres :

  • les modifications envisagées pour le réseau prennent davantage en compte les préoccupations des navetteurs que celles des Bruxellois – par exemple, les navettes projetées entre les gares du Nord et du Midi ;
  • le statut public, garant d’un service universel, du maillage du réseau et réserve d’emplois pour des Bruxellois peu qualifiés, n’est pas suffisamment défendu dans un contexte où les instances européennes font peser des menaces de dérégulation et de privatisation.

193 Ces inquiétudes inspirèrent le vote de deux motions relatives au réseau ferré de la STIB (les 21 juin 2002 et 28 mars 2003) et une résolution concernant le maintien du service public intégral de l’offre de transport en commun dans la Région de Bruxelles-Capitale (le 1er mars 2002). Au cours du débat sur cette résolution concernant le statut public de la STIB, un clivage se dessina du côté francophone entre, d’une part, le PS, Écolo et le PSC – hostiles à la privatisation de certaines activités de la STIB – et, d’autre part, le MR – partisan de la cession au secteur privé de certaines tâches qui ne concernent pas la mission première de la STIB. Les premiers redoutaient « un saucissonnage » conduisant à une privatisation larvée, les seconds voulaient examiner si certaines tâches ne seraient pas mieux remplies par le secteur privé. On se situe là dans un débat d’ordre idéologique  [130].

194 La volonté d’améliorer la mobilité des Bruxellois se heurta également aux options défendues par la SNCB pour ses investissements dans la Région bruxelloise. La SNCB privilégiait en effet le TGV au RER. Son intention était de réaliser un second terminal TGV sur le site de Schaerbeek-Formation et, se fondant sur l’hypothèse d’une saturation prévisible de la jonction Nord-Midi, de faire passer des trains à grande vitesse sur la ligne 28 (Ouest de Bruxelles). Le site de Schaerbeek-Formation, coupé du tissu urbain bruxellois, devait servir de porte d’entrée à l’aéroport de Bruxelles-National. La majorité des élus bruxellois s’opposaient à cette vision (seule une partie des libéraux, dont François-Xavier de Donnea y était favorable). Pour eux, la nécessité d’un second terminal pour le TGV n’était pas avérée et la réalisation du RER devait être la priorité en matière d’investissements ferroviaires à Bruxelles. Toutefois les préoccupations bruxelloises à propos du RER différaient de celles des deux autres régions dont l’objectif était d’acheminer le plus rapidement possible les navetteurs au centre de Bruxelles avec le risque de provoquer un nouvel exode de Bruxellois vers des banlieues vertes. La Région de Bruxelles-Capitale entendait limiter les nuisances pour les riverains, enrayer l’exode urbain et favoriser l’offre interne de transport public à Bruxelles, ce qui impliquait notamment d’assurer la desserte optimale des gares bruxelloises et d’affecter la ligne 28 au RER et non au TGV. Sur le plan financier, le RER ne pouvait peser sur les finances régionales et l’acquisition du matériel roulant ainsi que la prise en charge du déficit d’exploitation ne pouvaient être supportées par la Région de Bruxelles-Capitale.

195 Plusieurs résolutions furent votées par l’ensemble des groupes politiques (généralement à l’exception du groupe Vlaams Blok) bruxelloises afin d’affirmer clairement les préoccupations bruxelloises face à une SNCB qui persistait à ne pas tenir compte des intérêts spécifiquement bruxellois : la recommandation du 30 juin relative à la mobilité dans et autour de Bruxelles, les recommandations du 23 février complémentaires concernant la mobilité dans et autour de Bruxelles, la motion votée le 14 mars 2003 qui exigeait le respect strict des investissements essentiels relatifs à la mise en place du RER. La fermeté des élus régionaux bruxellois permet de faire barrage à certains projets de la SNCB, peu compatibles avec l’intérêt de la population bruxelloise. Elle contribue aussi à pousser le gouvernement fédéral à prendre des engagements dans le dossier du RER : investissements pour les infrastructures, effectivité de deux lignes de RER pour 2005, affectation d’un montant de dix milliards de francs – sur les 30 milliards nécessaires – à l’achat de matériel roulant dans l’accord de coopération sur le plan d’investissement de la SNCB, engagement du gouvernement fédéral de prendre en charge le déficit d’exploitation du RER jusqu’en 2010.

196 Toutefois, les élus bruxellois sont loin d’avoir obtenu tous leurs apaisements. En effet, l’accord de coopération qui devait être signé entre l’État fédéral et les trois régions sur le RER a été transformé en convention à la demande du gouvernement flamand, lequel n’avait toujours pas signé celle-ci à la veille des élections régionales du 13 juin 2004 contrairement aux Régions bruxelloise et wallonne. Ce report est de nature à éveiller certaines suspicions compte tenu de l’exigence flamande de régionaliser la SNCB. En outre, la convention ne lève pas certaines incertitudes sur le financement du matériel complémentaire et du déficit d’exploitation après 2010, sur le réaménagement des gares bruxelloises et la desserte de l’Ouest de Bruxelles, ainsi que sur l’ampleur des mesures d’accompagnement du RER.

Notes

  • [1]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale (CRBC), 15 juillet 1999, pp. 54-55.
  • [2]
    J.-P. NASSAUX, « Le groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises. Première phase : octobre 1999-mai 2000 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1682,2000.
  • [3]
    J.-P. NASSAUX, « Le groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises. Deuxième phase et accord dit du Lombard », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1716-1717,2001.
  • [4]
    Sur les modifications institutionnelles bruxelloises, cf. B. RENAULD, « Le Conseil et le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale et la Commission communautaire commune », APT, 2002, pp. 137-141 ; F. AMEZ, « Premières réflexions sur la réforme des institutions bruxelloises », Chronique de droit public, n°1,2002 ; F. DELPÉRÉE, « La nouvelle configuration de la Belgique » , JT, n°6020,2001 ; P.VANLEEMPUTTEN, Les institutions bruxelloises. Leur position dans la structure fédérale de l’État, leur organisation, leur fonctionnement, leur financement, Bruylant, 2003 ; J.-P. NASSAUX, La réforme de l’État de 2001, CRISP, Bruxelles, 2002, complément au dossier du CRISP n°40, La Belgique fédérale par J. B (1994).
  • [5]
    RASSINNE Le Soir, 29 juin 2001 ; La Libre Belgique ; 29 juin 2001 ; G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés. 1970-2002. Solidarité, responsabilité, autonomie et concurrence fiscale, CRISP, 2002, p.155.
  • [6]
    J.-P. NASSAUX, « Les relations communautaires à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1633-1634,1999, pp. 51-52 ; P. VANDERNOOT et Y. MARIQUE , « Le personnel communal et la législation linguistique à Bruxelles », in E. WITTE et al., Les dix-neuf communes bruxelloises et le modèle bruxellois, Larcier, Bruxelles, 2003, pp. 369-423. Cf. aussi P. SAC, Didier Gosuin. Les mains vertes. Itinéraire atypique d’un ministre de l’environnement à Bruxelles, Luc Pire, Bruxelles, 2004, pp. 92-96.
  • [7]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 10 novembre 2000, séance du matin, pp. 108-117.
  • [8]
    CRBC-BIQ (2001-2002) n° 8.
  • [9]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 14 décembre 2001, séance de l’après-midi, pp. 390-392.
  • [10]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 1er mars 2002, séance de l’après-midi, pp. 793-800.
  • [11]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 30 avril 2002, pp. 1022-1024.
  • [12]
    CRBC-BIQ (2002-2003) n° 5.
  • [13]
    P. VANDERNOOT et Y. MARIQUE, « Le personnel communal et la législation linguistique à Bruxelles », op. cit., pp. 400-401.
  • [14]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 2 mai 2003, pp. 4-8.
  • [15]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 7 mai 2004, séance du matin, pp. 10-11 et de l’après-midi, pp. 16-17.
  • [16]
    L’Écho, 26 mai 2004.
  • [17]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 26 octobre 2000, pp. 84-91.
  • [18]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 21 décembre 2000, séance de l’après-midi, pp. 312-330.
  • [19]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 12 janvier 2001, séance de l’après-midi, pp. 537-538.
  • [20]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 16 mars 2001, séance de l’après-midi, pp. 813-817.
  • [21]
    Le Soir, 7 août 2001.
  • [22]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 26 octobre2001, séance de l’après-midi, pp. 105-112.
  • [23]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 8 mai 2002, séance du matin, pp. 9-12.
  • [24]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 5 juillet 2002, séance de l’après-midi, pp. 1358-1360.
  • [25]
    Cf. J.-P. NASSAUX, « Le groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises. Première phase : octobre 1999-mai 2000 », op. cit., pp. 14-15 et 20-22. Cf. aussi F. DELPÉRÉE, « Droits des minorités, droits de l’homme », in Les droits de l’homme au seuil du troisième millénaire. Mélanges en hommage à Pierre Lambert, Bruxelles, Bruylant, 2000 ; X. DELGRANGE et S. VAN DROOGHENBROECK, « La signature de la convention-cadre sur la protection des minorités nationales et les mesures de protection des minorités contenues dans les lois spéciales », APT, 2002, pp. 273-287 ; J.-P. NASSAUX, « La protection des minorités nationales : un singulier débat », Idées, Le Vif/L’Express, 22 mars 2002.
  • [26]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 12 juillet 2001, séance de l’après-midi, pp. 1365-1374.
  • [27]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 11 janvier 2002, pp. 10-11.
  • [28]
    L’Écho, 1er mars 2002.
  • [29]
    Le Soir, 12 juin 2001.
  • [30]
    La Libre Belgique, 18 mars 2002 ; Le Monde, 28 septembre 2002.
  • [31]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 29 mars 2002, séance de l’après-midi, p. 5.
  • [32]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 17 octobre 2002, séance de l’après-midi, pp. 116-127.
  • [33]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 28 mars 2003, séance de l’après-midi, pp. 941-942.
  • [34]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 20 juin 2003, séance de l’après-midi, pp. 1312-1314.
  • [35]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 12 mars 2004, séance de l’après-midi, pp. 6-8.
  • [36]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 26 mars 2004, séance de l’après-midi, pp. 24-26.
  • [37]
    J.-P. NASSAUX, « Les relations communautaires à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1633-1634,1999.
  • [38]
    J.-P. NASSAUX, « Le groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises. Première phase : octobre 1999-mai 2000 », op. cit., et « Le groupe de travail sur le fonctionnement des institutions bruxelloises. Deuxième phase et accord dit du Lombard », op. cit.
  • [39]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 15 juillet 1999, p. 69.
  • [40]
    Cf. par exemple le débat lancé par l’interpellation de Rudi Vervoort le 20 octobre 1999 et le débat budgétaire de décembre 2000. Cf. Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 20 octobre 1999, séance du matin, pp. 21-27 ; Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC du 22 décembre 2000, séance du matin, p. 366 et séance de l’après-midi, pp. 385 et 392.
  • [41]
    Art. 3 nouveau, LSF.
  • [42]
    Art. 5 nouveau, LSF.
  • [43]
    Art. 4 nouveau, LSF.
  • [44]
    Art. 33bis nouveau, LSF ; Art. 33bis nouveau, LSF.
  • [45]
    G. VAN DES STICHELE et M. VERDONCK, « Les modifications de la loi spéciale de financement dans l’accord du Lambermont », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1733,2001, pp. 39-40 et G. PAGANO, Le financement des régions et des communautés 1970-2002. Solidarité, responsabilité, autonomie et concurrence fiscale, op. cit., pp. 179-180.
  • [46]
    Art. 6, § 2 nouveau, LSF. G. VAN DER STICHELE et M. VERDONCK, « Les modifications de la loi spéciale de financement dans l’accord du Lambermont », op. cit.
  • [47]
    Art. 9, § 1er nouveau, LSF.
  • [48]
    Art. 9, § 1er et art. 9bis nouveau, LSF.
  • [49]
    Art. 35 bis à 35octies, LSF. Cf. G. VAN DER STICHELE et M. VERDONCK, « Les modifications de la loi spéciale de financement dans l’accord du Lambermont », op. cit., p. 44.
  • [50]
    CRBC, Doc. parl. A-232/1 (2001-2002), pp. 5-7 et 37-39.
  • [51]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 14 décembre 2001, séance du matin, pp. 275, 283 et 292.
  • [52]
    Ibidem, pp. 270-287 et séance de l’après-midi, pp. 338-339.
  • [53]
    CRBC, Doc. parl. A-257/2 (2001-2002).
  • [54]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 8 février 2002, séance du matin, pp. 671-691.
  • [55]
    La Lanterne, 9 mars 2002 ; L’Écho, 23 mars 2002.
  • [56]
    La Libre Belgique, 19 avril 2002.
  • [57]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 8 mai 2002, séance du matin, pp. 1057-1075.
  • [58]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 24 mai 2000, p. 4.
  • [59]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 7 juin 2002, séance de l’après-midi, pp. 1212-1213.
  • [60]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 20 décembre 2002, pp. 529-543.
  • [61]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 28 mars 2003, séance du matin, pp. 903-919.
  • [62]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 28 mars 2003, séance de l’après-midi, pp. 975-977.
  • [63]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 28 novembre 2003, séance du matin, pp. 7-8.
  • [64]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 16 juillet 1999, séance de l’après-midi, p. 98.
  • [65]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 15 juillet 1999, pp. 60-61.
  • [66]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 9 décembre 1999, séance du matin, pp. 180-181 et séance de l’après-midi, pp. 203-204.
  • [67]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 9 décembre 1999, séance de l’après-midi, pp. 206.
  • [68]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 9 décembre 1999, séance de l’après-midi, p. 207.
  • [69]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 28 janvier 2000, séance de l’après-midi, pp. 418-419.
  • [70]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 22 décembre 2000, séance de l’après-midi, pp. 390-391.
  • [71]
    Le plan Iris est le volet déplacements du plan régional de développement.
  • [72]
    CRBC-BIQ (2000-2001) 35.
  • [73]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, jeudi 14 juin 2001, p. 16.
  • [74]
    Compte rendu intégral de la séance plénières du CRBC, 21 février 2002, pp. 726-727.
  • [75]
    CRBC-BIQ (2001-2002) 46.
  • [76]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 21 juin 2002, séance de l’après-midi, p. 1309.
  • [77]
    Il s’agit de Jacques Decoster.
  • [78]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 14 mars 2003, séance du matin, pp. 821-832.
  • [79]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 28 mars 2003, séance de l’après-midi, p. 979.
  • [80]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 14 juillet 2003, pp. 1421-1436 et CRBC, Doc. parl. A-443/1 – (2002-2003).
  • [81]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 15 juillet 2003, séance de l’après-midi, p. 1541.
  • [82]
    De Standaard, 7 octobre 2003.
  • [83]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 9 janvier 2004, p. 4.
  • [84]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 22 décembre 2000, séance de l’après-midi, pp. 405-406.
  • [85]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 14 juin 2001, p. 7.
  • [86]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 21 février 2002, pp. 724-725.
  • [87]
    Ibidem, pp. 730-731.
  • [88]
    CRBC, Doc. parl. A-234/2 – (2001-2002) ; Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 1er mars 2002, séance du matin, pp. 763-769 et séance de l’après-midi, pp. 833-834.
  • [89]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 8 octobre 2002, pp. 1609-1610.
  • [90]
    Il s’agit du plan de modernisation qui avait suscité la grève.
  • [91]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 14 novembre 2002, pp. 195-207.
  • [92]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 14 mars 2003, séance de l’après-midi, pp. 880-881.
  • [93]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 20 juin 2003, séance du matin, pp. 11-15.
  • [94]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 17 décembre 2003, p. 8.
  • [95]
    CRBC-BIQ (1999-2000) n° 15.
  • [96]
    CRBC-BIQ (1999-2000) n° 21.
  • [97]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 30 juin 2000, séance du matin, pp. 939-954 et de l’après-midi, pp. 1007 ; CRBC, Doc. parl. A-109/1 et 2 (1999-2000). L’abstention des membres du gouvernement était logique puisque cette résolution leur était adressée.
  • [98]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 26 octobre 2000, pp. 91-98.
  • [99]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 8 décembre 2000, séance de l’après-midi pp. 276-277.
  • [100]
    CRBC, Doc. parl. A-170/1 (2000-2001).
  • [101]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 16 mars 2001, séance de l’après-midi, p. 815.
  • [102]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 30 mars 2001, séance de l’après-midi, pp. 879-880.
  • [103]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 27 avril 2001, séance de l’après-midi, p. 955.
  • [104]
    CRBC-BIQ (2000-2001) n° 47.
  • [105]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 14 juin 2001, pp. 18-22.
  • [106]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 13 juillet 2001, séance de l’après-midi, pp. 1464-1465.
  • [107]
    CRBC-BIQ (2001-2002) n° 2.
  • [108]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 20 décembre 2001, pp. 424-437.
  • [109]
    Ibidem, pp. 442-443.
  • [110]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 21 février 2002, pp. 738-739.
  • [111]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 24 mai 2002, pp. 1135-1136.
  • [112]
    CRBC-BIQ (2001-2002) n° 57.
  • [113]
    CRBC-BIQ (2002-2003) n° 10.
  • [114]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 13 décembre 2002, séance de l’après-midi, pp. 324-326.
  • [115]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 7 février 2003, séance de l’après-midi, pp. 704-710.
  • [116]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 7 février 2003, séance de l’après-midi, pp. 711-713.
  • [117]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 21 février 2003, séance de l’après-midi, pp. 783-799.
  • [118]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 14 mars 2003, séance de l’après-midi, pp. 892-893.
  • [119]
    CRBC-BIQ (2002-2003) n° 32.
  • [120]
    CRBC-BIQ (2003-2004) n° 4.
  • [121]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 24 octobre 2003, séance du matin, pp. 9-12.
  • [122]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 26 mars 2004, séance de l’après-midi, p. 7.
  • [123]
    CRBC, Doc. parl. A-549/1 (2003-2004) et CRBC-BIQ (2003-2004) n° 54.
  • [124]
    Le Conseil de la Région wallonne l’a approuvée le 13 mai. Par contre le Parlement flamand a reporté son vote au-delà du 13 juin. Une autre majorité pourrait donc revoir la position flamande. Cf. La Libre Belgique, 14 mai 2004.
  • [125]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 7 mai 2004, séance de l’après-midi, pp. 8-9.
  • [126]
    Un tel réseau fut notamment proposé par Sven Gatz (VLD-Spirit), appuyé par Geneviève Meunier (Écolo) et Denis Grimberghs (PSC) en commission de l’Infrastructure le 24 avril 2002 et relancé par le député socialiste Michel Moock, toujours dans cette commission, le 22 octobre 2003, cf. CRBC BIQ (2001-2002) 38 et CRBC-BIQ (2003-2004) 2.
  • [127]
    Par exemple, dans les questions orales de Christos Doulkeridis (Écolo) du 26 novembre 1999, de Geneviève Meunier (Écolo) de Joël Riguelle (PSC) et de François Roelants du Vivier (PRL-FDF) du 16 mars 2001, cf. Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 26 novembre 1999 , pp. 157-159 et du 16 mars 2001 , séance de l’après-midi, pp. 834-835. Le thème fut également abordé par Brigitte Grouwels (CD&V) et par Jean-Pierre Cornelissen (PRL-FDF) lors du débat budgétaire du 14 décembre 2001, cf. Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC séance du matin, pp. 281-283 et de l’après-midi, pp. 317-319.
  • [128]
    Compte rendu intégral de la séance plénière du CRBC, 16 mars 2001, séance du matin, pp. 787-795.
  • [129]
    Compte rendu analytique de la séance plénière du CRBC, 7 mai 2004, séance du matin, pp. 11-12 et séance de l’après-midi, p. 17 ; CRBC, Doc. parl. A-5572 (2003-2004).
  • [130]
    Sur ce type de problématique, cf. S. HALIMI, « Dans l’étau des privatisations », Le Monde Diplomatique, n° 603, juin 2004, pp. 1 et 8-9.
Français

Résumé

La Région de Bruxelles-Capitale occupe une place particulière dans l'édifice institutionnel belge. Elle doit concilier la défense des intérêts de sa population avec son rôle de capitale. Elle est en outre organisée sur la base de deux groupes linguistiques officiellement reconnus - le groupe français et le groupe néerlandais - qui participent à sa gestion. Les débats parlementaires bruxellois sont marqués par cette double spécificité. Les positions des partis à l'échelle bruxelloise ne sont pas toujours relayées avec le même degré de solidarité ou de cohérence par les mêmes partis à d'autres niveaux de pouvoir. À cela s'ajoute, au cours de la dernière législature, que l'absence d'Écolo au sein de la majorité francophone, alors qu'il avait participé aux négociations de l'accord de gouvernement, a rendu le rapport de forces défavorable au PS par rapport à son partenaire. Jean-Paul Nassaux a choisi d'analyser les débats politiques de la législature précédente en choisissant un nombre limité de problématiques de nature à éclairer les enjeux spécifiquement bruxellois : les relations communautaires, la fiscalité, la mobilité, qui seront traitées dans la présente livraison du Courrier hebdomadaire. Les nuisances sonores dues au survol aérien de Bruxelles ainsi que la politique de l'eau et la Cobru seront traitées dans une livraison ultérieure.

  1. INTRODUCTION
  2. 1. LES RELATIONS COMMUNAUTAIRES
    1. 1.1. L’ACCORD DE COURTOISIE LINGUISTIQUE
    2. 1.2. LE STATUT DE LA RÉGION DE BRUXELLES-CAPITALE
    3. 1.3. LA CONVENTION-CADRE DU CONSEIL DE L’EUROPE POUR LA PROTECTION DES MINORITÉS NATIONALES
      1. 1.3.1. L’engagement pris par le gouvernement fédéral de signer la convention
      2. 1.3.2. Le rapport Nabholz-Haidegger
      3. 1.3.3. La poursuite des débats relatifs à la ratification
    4. 1.4. SYNTHÈSE
  3. 2. LA FISCALITÉ
    1. 2.1. LA RÉFORME DE 2001
    2. 2.2. LES SUITES DE LA RÉFORME DE 2001
      1. 2.2.1. Le Fonds de réserve
      2. 2.2.2. La fusion de la redevance radio-télévision et de la taxe régionale
      3. 2.2.3. La proposition d’ordonnance relative aux taux d’imposition et exonération des droits de succession et de mutation par décès applicables aux cohabitants légaux
      4. 2.2.4. L’accord du 20 juin 2002
      5. 2.2.5. L’élargissement du champ des exonérations à la taxe régionale
    3. 2.3. SYNTHÈSE
  4. 3. LA MOBILITÉ
    1. 3.1. LES DÉBATS RELATIFS À LA STIB
      1. 3.1.1. Le réseau
      2. 3.1.2. Le statut public de la STIB
    2. 3.2. LE RER ET LE TGV
      1. 3.2.1. Premiers échanges à propos d’un deuxième terminal TGV
      2. 3.2.2. La recommandation du 30 juin 2000 relative à la mobilité dans et autour de Bruxelles
      3. 3.2.3. Le contact avec la Région wallonne à propos du RER
      4. 3.2.4. Les recommandations complémentaires du 23 février 2001 concernant la mobilité dans et autour de Bruxelles
      5. 3.2.5. Le contact avec la Région flamande concernant le RER
      6. 3.2.6. Questions à propos du plan décennal d’investissement de la SNCB
      7. 3.2.7. Le débat parlementaire sur le plan décennal d’investissement de la SNCB
      8. 3.2.8. Les suites du plan d’investissement de la SNCB et le dossier du RER
      9. 3.2.9. L’annonce de réduction des crédits pour le RER et l’évolution du dossier TGV
      10. 3.2.10. Les engagements du nouveau gouvernement fédéral
      11. 3.2.11. La convention du 4 avril 2003 entre l’État fédéral et les trois régions visant à mettre en œuvre le programme du RER et sa procédure de ratification
      12. 3.2.12. Autres thèmes abordés
    3. 3.3. SYNTHÈSE
La Région de Bruxelles-Capitale occupe une place particulière dans l’édifice institutionnel belge. Elle doit concilier la défense des intérêts de sa population avec son rôle de capitale. Elle est en outre organisée sur la base de deux groupes linguistiques officiellement reconnus – le groupe français et le groupe néerlandais – qui participent à sa gestion. Les débats parlementaires bruxellois sont marqués par cette double spécificité. Les positions des partis à l’échelle bruxelloise ne sont pas toujours relayées avec le même degré de solidarité ou de cohérence par les mêmes partis à d’autres niveaux de pouvoir. À cela s’ajoute, au cours de la dernière législature, que l’absence d’Écolo au sein de la majorité francophone, alors qu’il avait participé aux négociations de l’accord de gouvernement, a rendu le rapport de forces défavorable au PS par rapport à son partenaire. Jean-Paul Nassaux a choisi d’analyser les débats politiques de la législature précédente en choisissant un nombre limité de problématiques de nature à éclairer les enjeux spécifiquement bruxellois : les relations communautaires, la fiscalité, la mobilité, qui seront traitées dans la présente livraison du Courrier hebdomadaire. Les nuisances sonores dues au survol aérien de Bruxelles ainsi que la politique de l’eau et la Cobru seront traitées dans une livraison ultérieure.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/10/2005
https://doi.org/10.3917/cris.1837.0005
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