CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Depuis 1986, les interlocuteurs sociaux ont renoué avec la pratique des accords interprofessionnels. Conclus pour une durée de deux ans, ceux-ci constituent l’aboutissement de négociations au cours desquelles ils examinent un ensemble de dossiers en cours et de demandes nouvelles. Chaque négociation s’effectue cependant dans un contexte différent qui affecte son déroulement. Fin 1990, la "crise du Golfe" formait une toile de fond, qualifiée d’incertaine par d’aucuns, et a pesé lourdement sur les négociations. En 1992, la dégradation de la situation économique et les objectifs budgétaires du gouvernement ont failli compromettre non seulement la conclusion d’un accord central, mais déjà l’engagement d’une discussion à son sujet.

2Pourtant, fin décembre 1992, l’accord interprofessionnel venait à échéance. A défaut d’une reconduction ou d’un renouvellement de ses dispositions, plusieurs d’entre elles comme les efforts menés en vue de la formation et de l’emploi des plus défavorisés sur le marché du travail financés par une cotisation patronale et le paiement pour tous les salariés du double pécule de vacances pour une journée supplémentaire seraient suspendues. Des mesures comme l’augmentation des indemnités des chômeurs âgés, le relèvement des bas salaires, le rapprochement du statut social des ouvriers et des employés, etc. n’auraient pas l’opportunité d’être adoptées. Certains signes (manifestations, arrêts de travail), pouvant être interprétés comme des marques d’attachement des travailleurs aux accords interprofessionnels, semblaient également indiquer qu’en l’absence d’un nouvel accord, la paix sociale pourrait être compromise, l’échec des négociations ou le refus de les engager pouvant conduire à un climat social tendu.

3La situation économique en régression et la politique gouvernementale d’austérité (inspirée par la dégradation des finances publiques et par les objectifs fixés au niveau européen) ont conduit le gouvernement à être un acteur de la négociation interprofessionnelle. Présent indirectement par les mesures qu’il adopte et auxquelles les interlocuteurs sociaux font constamment référence (mesures budgétaires affectant les coûts du travail ou les charges des entreprises), il intervient aussi directement en prenant l’initiative de réunir les interlocuteurs sociaux en sa présence, en encourageant la conclusion d’un accord interprofessionnel et en formulant des recommandations à propos d’objectifs qu’il considère comme urgents : la sauvegarde de la compétitivité des entreprises et la promotion de l’emploi.

4La présente livraison du Courrier hebdomadaire, qui s’inscrit dans la ligne des précédentes consacrées aux accords interprofessionnels [1], propose une analyse des négociations menées en 1992, du contexte dans lequel elles se déroulent, du destin des revendications, du contenu de la convention, en accordant une attention particulière à ce qui donne un caractère spécifique à cette négociation mais aussi en montrant en quoi elle se situe dans le prolongement de celles qui l’ont précédées. En conclusion, on s’interroge sur l’évolution des relations collectives du travail "au sommet" et sur l’avenir des accords interprofessionnels, alors que leur aboutissement semble de plus en plus ardu.

1. Le contexte et les positions de départ

5La négociation d’un accord interprofessionnel connaît une série d’étapes : confection et dépôt de cahiers de revendications syndicaux, premières réactions patronales, contacts avec le gouvernement, discussions plénières, groupes de travail techniques, approbation d’un projet par les négociateurs, puis par leurs mandants, consultation du gouvernement, signature finale. Cette succession se répète, depuis 1986 en tous cas, tous les deux ans. Le scénario se déroule cependant de manière différente à chaque négociation, parce que le décor qui lui sert de toile de fond, les acteurs à l’œuvre et leurs relations ne sont jamais parfaitement identiques.

6Ainsi en va-t-il des discussions de 1992. Commencées sous les plus mauvais auspices, elles n’aboutiront qu’en dépit des mécontentements exprimés tant du côté syndical que du côté patronal. En cause, l’imbrication d’une situation économique considérée comme défavorable, d’une politique gouvernementale marquée par l’austérité budgétaire et des attentes syndicales d’emblée qualifiées d’excessives par le patronat.

Aspects socio-économiques de la politique gouvernementale

7Après les élections législatives du 24 novembre 1991, de longues négociations conduisent à la reconduction de la majorité gouvernementale en place tout à la fin de la législature précédente (CVP-PS-SP-PSC [2]). L’union économique et financière européenne et l’assainissement des finances publiques sont au centre de ses préoccupations et figurent en tête de son "programme d’urgence", précédant la poursuite du développement de la structure fédérale de l’Etat et la réponse aux nouveaux défis de la société et aux nouveaux besoins des citoyens [3].

8Le budget de 1992, préparé en août 1991, n’est pas voté avant la crise gouvernementale et les élections anticipées. Aussi, une des premières tâches du nouveau gouvernement est d’amender le projet de budget en tendant à l’adapter aux données actualisées lors du contrôle budgétaire qu’il réalise en mars 1992. Il convient en effet d’adapter un certain nombre d’hypothèses de base à la dégradation de la conjoncture économique : nouvelle estimation du taux de croissance économique, des intérêts à court terme et de l’inflation. Au lieu d’une économie initiale de BEF 82,5 milliards prévue en 1991 pour rencontrer l’objectif de maintenir le solde net à financer à BEF 354,8 milliards, le gouvernement Dehaene prend des mesures d’économie pour un montant de BEF 134 milliards en vue d’atteindre le même objectif. Outre des mesures directement applicables (limitation à 95% des frais de fonctionnement de l’Etat, ralentissement des crédits d’investissements de la Défense nationale, limitation des autorisations de recrutement dans les ministères, vente d’actifs immobiliers, etc.), le gouvernement dépose deux projets de "lois-programmes" : l’un contient des dispositions sociales et diverses [4], l’autre des dispositions fiscales et financières [5]. Parmi les principales mesures envisagées dans le domaine social figurent des dispositions en matière de sécurité sociale : accroissement des recettes principalement par augmentation des cotisations, maintien de l’intervention de l’Etat et limitation des dépenses en ce qui concerne les allocations de chômage et les soins de santé, pour un montant total de BEF 20 milliards en 1992 et en 1993. Dans le domaine fiscal et financier, le gouvernement prend des décisions en matière d’impôts directs (code des impôts sur les revenus, lois particulières et taxe de mise en circulation des véhicules) et d’impôts indirects (accises, taxe sur la valeur ajoutée, droits de greffe et taxes assimilées au timbre) [6]. Parmi ces dispositions, certaines constituent en fait l’application de décisions prises lors de l’établissement du budget de 1992 au cours de l’été 1991 mais qui n’avaient pu être réalisées en raison de la crise politique. La restructuration de l’impôt des sociétés prévue dans ce cadre n’a pas été reprise dans le projet de loi et devrait être réexaminée lors de l’élaboration du budget de 1993. Parallèlement, le Parlement procède à l’examen d’un projet de loi instaurant une taxe de mise en circulation, taxe présentée comme devant compenser la perte de recettes due à l’application des nouveaux taux de TVA.

9Conformément aux décisions européennes, le gouvernement élabore un plan de convergence pluriannuel à soumettre aux autorités de la Communauté européenne. Ce plan de convergence contient essentiellement des normes et des perspectives, les mesures à prendre devant être concrétisées par le gouvernement lors de l’élaboration des budgets, à commencer par celui de 1993. A l’occasion de la discussion du plan de convergence et à l’approche du conclave budgétaire, diverses voix se sont prononcées en faveur d’une accélération de l’assainissement budgétaire au cours de l’année 1993. Le Conseil supérieur des Finances, plaidant également pour cette hypothèse, évalue en juin 1992, l’effort budgétaire à réaliser en 1993 entre BEF 65 et 75 milliards, ce qui permettrait de limiter à 4,1% le solde net à financer (pouvoir central plus la sécurité sociale en "définition Maastricht"). Pour réaliser cet objectif, l’effort devrait être structurel et récurrent. Le plan de convergence ne se prononce pas définitivement sur le choix entre effort étalé dans le temps et effort accentué en 1993. Le gouvernement s’est engagé à réaliser au moins l’effort étalé, et plus si le contexte le permet.

10La préparation du budget de 1993, dans le cadre du plan de convergence qui vise à assurer à la Belgique sa participation à l’union économique et monétaire dès 1997, débouche à l’issue du conclave en août 1992 sur des mesures pour un montant de BEF 132 milliards : BEF 117,4 milliards à charge de l’Etat national et BEF 15 milliards pour atteindre l’équilibre financier de la sécurité sociale. Outre le respect des contraintes de l’accord de gouvernement (non-croissance des dépenses en termes réels, blocage des dépenses sans indexation dans le domaine de la défense nationale et de la sécurité sociale), le gouvernement prend des mesures en matière fiscale et de sécurité sociale ainsi que dans divers autres départements. Plusieurs mesures sont adoptées en matière de fiscalité ; elles touchent l’épargne à long terme, les avantages de toute nature, les intercommunales, la fiscalité indirecte, etc., la plus générale de ces mesures étant la non-indexation des barèmes fiscaux. Pour respecter les engagements contenus dans le plan de convergence, il convenait d’adopter une mesure générale. Certains, principalement dans les rangs du CVP, envisagent l’hypothèse d’un saut d’index, ce qui provoque des réactions syndicales et de la part des partis socialistes de la coalition gouvernementale. On envisage aussi la possibilité de lever des centimes additionnels ou un impôt de crise. Finalement, la suspension de l’indexation des limites et tranches prises en compte en matière d’impôt des personnes physiques (à l’exception des revenus exemptés d’impôt) pendant au moins deux et au plus quatre exercices d’imposition est décidée. Le gouvernement opte par ailleurs pour la privatisation d’avoirs de l’Etat (actifs et bâtiments) pour un montant de BEF 15 milliards.

11En matière de sécurité sociale, des mesures sont prises dans le secteur du chômage (plan d’accompagnement des chômeurs et renforcement des sanctions à l’égard des chômeurs de longue durée), des prépensions (augmentation progressive de l’âge d’entrée en prépension après concertation avec les interlocuteurs sociaux), de l’assurance maladie-invalidité (réforme structurelle en vue de la maîtrise des dépenses du secteur : responsabilisation des organismes assureurs, des prestataires de soins et des patients et objectifs budgétaires évalués par des organes de contrôle budgétaire). Le gouvernement décide aussi de réduire de moitié l’opération Maribel (réduction des cotisations patronales de sécurité sociale pour les ouvriers) : de BEF 15 milliards son coût sera ramené à BEF 7,5 milliards, dont la moitié à charge de la sécurité sociale. Dans la pratique, la réduction de BEF 17.000 par ouvrier est réduite à BEF 7.500 sauf dans les entreprises de moins de vingt travailleurs qui bénéficient d’une diminution des cotisations de BEF 11.300 pour les cinq premiers ouvriers.

12En septembre-octobre, il s’avère nécessaire d’apporter des corrections à ce projet de budget en raison de l’évolution défavorable de la croissance du PNB (de 2,3% à 1,9%) et de son effet négatif sur l’emploi. Des mesures supplémentaires pour un montant de BEF 21,8 milliards sont alors décidées : BEF 16,6 milliards à charge du budget de l’Etat et BEF 5,2 milliards en sécurité sociale.

13Pour réaliser ces économies, le gouvernement décide la compression et le report des dépenses de divers départements ministériels ; en matière de sécurité sociale, le système d’interruption de chômage est rendu moins intéressant ; en matière de fiscalité sont retenues la lutte contre l’évasion fiscale et une meilleure perception des recettes. Ce sont toutefois des privatisations pour un montant de BEF 10 milliards (à ajouter aux BEF 15 milliards décidés au conclave budgétaire de juillet-août) qui constituent la mesure la plus importante de cette correction.

Les revendications syndicales

14Les organisations syndicales (FGTB et CSC), qui avaient déjà rédigé un mémorandum commun à l’intention du futur gouvernement, évaluent conjointement les mesures budgétaires prises lors du conclave et leur adaptation en octobre. Rappelant que la politique de l’emploi est leur priorité, les deux organisations d’une part sont satisfaites de ce que l’hypothèse d’un assainissement accéléré n’ait pas été retenue et d’autre part formulent des critiques à l’égard du budget 1993. Elles constatent la "répartition inéquitable de l’effort fiscal demandé" et l’absence "de garantie de financement de la sécurité sociale" [7]. Par ailleurs, elles mettent l’accent, en vue du contrôle budgétaire prévu pour le début de 1993, sur la fiscalité (revenus les plus élevés, entreprises, fortunes, lutte contre la fraude) et sur la préservation de la sécurité sociale (maintien des mécanismes et des allocations).

15Il est presque une tradition que la CSC et la FGTB remettent en commun aux organisations patronales leur cahier de revendications. Rarement, la CGSLB y est associée (cela s’est produit en 1965 et 1970). Après avoir consulté leurs instances respectives, la CSC et la FGTB ont fait part à la FEB de leurs demandes pour 1993-1994, au cours d’une réunion informelle le 9 juillet 1992 tandis que la CGSLB a communiqué les siennes le 8 juillet 1992.

16Le cahier de revendications commun à la CSC et à la FGTB se structure - de manière inhabituelle - autour de trois axes définis non pas par le contenu des demandes mais par les lieux où elles devraient être négociées et mises en œuvre : on a ainsi d’abord les revendications qui devraient être traitées directement dans l’accord interprofessionnel, ensuite celles dont le principe devrait être établi dans l’accord et la mise en œuvre réalisée au sein du Conseil national du travail et enfin celles qui devraient être discutées avec le gouvernement. Le cahier de revendications de la CSC et de la FGTB contient les points suivants :

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1. Dans l’accord interprofessionnel
Prolongation des dispositions existantes :
  • prolongation de la cotisation patronale de 0,25% pour la formation et l’emploi ; financement d’un plan d’accompagnement pour les chômeurs à partir du fonds pour l’emploi, en attendant un financement stable ;
  • consolidation et incorporation du double pécule de vacances pour le troisième jour de la quatrième semaine de vacances.
Nouvelles propositions :
  • cotisation patronale interprofessionnelle pour soutenir et stimuler les initiatives en matière de garde des enfants ;
  • salaire minimum interprofessionnel : relèvement du montant ; poursuite du démantèlement des barèmes salariaux dégressifs pour les jeunes ;
  • amélioration du statut des ouvriers : suppression du jour de carence et pécule de vacances pour journées assimilées sur le salaire réellement perçu ;
  • amélioration du statut des chômeurs âgés ;
  • présence syndicale dans les PME ;
  • généralisation de la semaine de 38 heures ;
  • plan d’actions positives obligatoire pour les femmes dans certaines circonstances (par exemple, dans les entreprises à emploi à temps partiel élevé).
2. Principes dans l’accord interprofessionnel et exécution au sein du Conseil national du travail
Travail en équipes et travail de nuit (CCT n°46) :
  • indemnité adéquate en cas de départ définitif ;
  • droits égaux à ceux des travailleurs de jour.
Restructurations : caractère contraignant des procédures d’information et de consultation.
Statut délégation syndicale (CCT n°5) :
  • indemnité de protection comme pour les membres des conseils d’entreprise et des comités de sécurité ;
  • exercice de mandat extra muros ;
  • délégation syndicale des cadres.
Déplacement du domicile au lieu de travail :
  • suppression du plafond salarial (900.000 F) pour employés ;
  • élargissement au transport individuel pour certaines catégories de travailleurs (par exemple, les travailleurs en équipes).
3. A discuter avec le gouvernement
  • sécurité sociale : financement garanti et transparent et gestion paritaire ;
  • introduction du plan d’accompagnement pour chômeurs ;
  • actions positives pour les femmes : renforcement de la cellule "actions positives".
  • droit à l’interruption de carrière pour des raisons bien déterminées et sous des conditions bien déterminées ;
  • stages des jeunes : une partie est réservée aux jeunes chômeurs de longue durée et aux scolarisés à temps partiel ;
  • travail à temps partiel : au minimum à mi-temps comme étape vers un emploi à temps plein ;
  • lutte contre le travail noir et la sous-traitance ;
  • limitation des heures supplémentaires ;
  • réglementation de la durée du travail des cadres ;
  • maintien du système de prépension et exécution correcte de l’accord du 6 juin 1990 ;
  • statut des travailleurs âgés : emplois de fin de carrière ; congé d’ancienneté ;
  • comité sécurité et conseil d’entreprise : élargissement des compétences à l’environnement ; droit à l’information et à la formation sur les rapports d’impact environnemental et de sécurité : droit à une assistance compétente en matière envi ronnementale ;
  • fonds de fermetures pour tous les travailleurs et toutes les entreprises.

18Les préoccupations des deux organisations convergent sur de nombreux points. Chacune porte toutefois davantage certaines revendications. Ainsi, la FGTB insiste particulièrement sur le relèvement des indemnités de chômage des travailleurs âgés (pour lesquels des améliorations avaient déjà été obtenues dans les deux accords précédents), la poursuite de l’harmonisation du statut des ouvriers et des employés et la création d’équipements collectifs. Du côté de la CSC, on insiste davantage sur les mesures en matière d’emploi et de formation (reconduction des efforts décidés lors des accords antérieurs que le syndicat chrétien lie cette fois à la problématique du plan d’accompagnement des chômeurs).

19Le syndicat libéral dépose pour sa part un cahier de revendications qui s’articule autour de sept thèmes principaux :

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  1. liberté de négociation : la CGSLB la demande tant au niveau national interprofessionnel (pas d’entrave mise par le gouvernement) qu’à celui des secteurs et des entreprises (l’accord interprofessionnel devrait la prévoir comme pour le précédent accord) ;
  2. pouvoir d’achat : respect de la liaison des salaires et des prestations sociales à l’index, augmentation du revenu minimum moyen mensuel garanti et suppression de la dégressivité pour les jeunes travailleurs, octroi d’un double pécule de vacances pour la totalité de la quatrième semaine de congé ; suppression du plafond en vue de l’intervention de l’employeur dans les frais de déplacement, recommandation visant à étendre à tous les secteurs la prime syndicale ;
  3. mesures en faveur de l’emploi : généralisation des 38 heures de travail hebdomadaire, maintien de l’effort de 0,25% en faveur des groupes à risques, prolongation et extension des prépensions conventionnelles, mesures relatives à la fin de carrière, rapprochement des contrats de travail d’employé et d’ouvrier, travail à temps partiel ;
  4. qualité de l’emploi : révision de la convention collective (n°42) sur la flexibilité du travail, mesures de "flexibilité positive", octroi de jours de congé supplémentaires (lié à l’ancienneté) ;
  5. démocratisation de l’entreprise : diverses mesures relatives aux restructurations d’entreprises, encouragement de la participation des travailleurs à la gestion de leur entreprise, développement de l’intéressement financier du personnel lié à une plus grande démocratisation ;
  6. délégation syndicale : renforcement de la protection des délégués syndicaux, droits syndicaux des travailleurs dans les PME, aménagement de la convention collective (n°5) sur les délégations syndicales ;
  7. sécurité sociale : financement transparent et simplifié, responsabilisation des parties, généralisation de la liaison des prestations sociales au bien-être.

21Les deux cahiers de revendications partagent un certain nombre de préoccupations liées au contexte et aux réalites actuels. Des différences de contenus et d’accent apparaissent toutefois.

Les positions patronales

22Dès février 1992, la FEB annonce que la conclusion en automne d’un accord interprofessionnel lui paraît douteuse. En cause, d’une part, le contexte économique difficile et l’assainissement des finances publiques qui risquent de réduire les marges disponibles et, d’autre part, le contexte social marqué par le chômage et, dit-on à la FEB, par un durcissement de l’action des syndicats.

23Lorsqu’en juillet les organisations syndicales déposent leurs cahiers de revendications, la FEB demeure fort réservée : les mesures prises dans le cadre du budget de 1992 et modalisées par les deux "lois-programmes" de juin-juillet vont être suivies d’autres à décider lors du conclave destiné à établir le budget de 1993. L’incertitude quant aux charges nouvelles que le gouvernement pourrait imposer constitue pour les responsables de la FEB une première raison de ne pas s’engager avant le mois de septembre, d’autant que ses représentants n’ont pas reçu de mandat pour négocier. L’organisation patronale estime en outre que le cahier de revendications du front commun FGTB-CSC "est un véritable inventaire dont l’ampleur, en matière de coût, n‘est pas de nature à faciliter une décision d’engager effectivement des négociations" [8].

24Se montrant déçue par le budget de 1993 [9], en particulier par la réduction de moitié de l’opération Maribel qui touche principalement les secteurs industriels, majoritaires au sein de la FEB, l’organisation patronale considère que le gouvernement a confisqué la marge de manœuvre dont les entreprises auraient pu disposer en vue d’un accord interprofessionnel. Parmi les fédérations membres de la FEB, certaines envisagent de laisser de côté l’échelon interprofessionnel de manière à ménager quelques marges négociables dans leurs secteurs et dans les entreprises. D’autant, argumentent certains, que les accords centraux n’incitent pas les centrales syndicales à plus de modération dans leurs négociations aux niveaux inférieurs.

25C’est la mesure relative à l’opération Maribel - qui atteint davantage les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre - qui fait l’objet des principales critiques. Les fédérations patronales les plus touchées par cette mesure - en tête desquelles Fabrimétal - opposées dès le départ à la négociation d’un accord interprofessionnel, restent sur leur position tout au long de la période de discussion et elles se prononcent contre la signature lorsque le projet d’accord leur est soumis. Leur point de vue sur l’opération Maribel était d’ailleurs partagé par certaines centrales syndicales (comme les centrales des métallurgistes de la CSC et de la FGTB) [10].

26Lors de sa réunion du 3 septembre 1992, le conseil d’administration de la FEB - qui se base sur des prévisions économiques et sur les mesures budgétaires gouvernementales pour reporter encore sa décision relative aux discussions avec les organisations syndicales - considère que "si ce gouvernement souhaite vraiment un accord interprofessionnel, comme il l’a prétendu lors de la réunion tripartite du 30 mars, il devra rétablir les conditions permettant une négociation".

27Le gouvernement rencontre les interlocuteurs sociaux le 14 octobre et leur demande de renouer le dialogue. Sans revenir sur sa décision relative à l’opération Maribel, le gouvernement en adapte les modalités d’application d’une manière jugée satisfaisante par les organisations patronales même si la mesure demeure dommageable de leur point de vue. Evaluant fin octobre les mesures budgétaires complémentaires prises par le gouvernement, le conseil d’administration de la FEB craint que ces mesures ne ramènent pas le déficit budgétaire à 5,2% du PNB en 1993 et déplore qu’aucune mesure structurelle d’assainissement n’ait été prise dans le secteur de la sécurité sociale. Simultanément, il estime que le gouvernement n’a pas accru les charges des entreprises. Lors de cette réunion, la majorité des membres de la FEB décide finalement de donner son accord pour que des négociations interprofessionnelles commencent.

28Mais le mandat des négociateurs patronaux est limité : la consigne est de conclure pour les deux années à venir un accord de même amplitude que celui de 1990 mais à deux conditions. D’une part, le texte de l’accord doit contenir une exhortation extrêmement claire en matière de compétitivité. D’autre part, l’accord doit comporter des ouvertures précises dans le domaine de la flexibilité. Les deux orientations énoncées par les membres du conseil d’administration de la FEB visent en fait à ce que les représentants syndicaux s’engagent à faire respecter par leurs centrales des limites en matière salariale et des directives en matière de flexibilité : "Si les syndicats veulent promouvoir des valeurs de solidarité, qu‘ils nous aident a la pratiquer dans ces moments difficiles, en libérant des moyens pour le faire. En 1993, la marge sera pratiquement nulle. Les syndicats, de leur côté, tiennent à l’indexation automatique, à la sauvegarde de la Sécu, à des mesures de solidarité. En échange, nous devrions pouvoir nous orienter vers un pacte de deux ans, garantissant, comme en Allemagne ou aux Pays-Bas, une modération salariale et des orientations pour les dossiers à traiter. Sinon l’indexation sera, à terme, en péril" [11].

2. La négociation

29La négociation de l’accord interprofessionnel s’est pour l’essentiel déroulée au cours de deux réunions (les 17 et 19 novembre 1992) préparées par le travail d’un groupe technique mis sur pied fin octobre [12]. Les négociateurs sont pour la plupart ceux qui ont conclu l’accord précédent en 1990, à l’exception de Norbert Joris, élu président du conseil d’administration de la FEB en avril 1992 pour remplacer Urbain Devoldere dont il achève le mandat ; de Josly Piette, secrétaire général de la CSC, qui succède à Robert D’Hondt décédé en décembre 1991 ; et de Robert Eeckloo, président du Belgische Boerenbond depuis le 1er juin 1992 en remplacement de Jan Hinnekens. Les réunions "plénières" se sont tenues au siège de la FEB à Bruxelles, la présidence des séances étant assurée par Norbert Joris. Ont participé aux négociations :

  • en tant que représentants des organisations d’employeurs :
    • pour la Fédération des entreprises de Belgique-FEB : Norbert Joris, président, Tony Vandeputte, administrateur délégué, Wilfried Beirnaert, directeur général ;
    • pour l’Union syndicale des classes moyennes-UCM : Roger Mené, président et co-président du Front commun des classes moyennes ;
    • pour le Nationaal Christelijk Middenstandsverbond-NCMV : Petrus Thys, président ;
    • pour le Front vert des organisations agricoles : Robert Eeckloo, président du Belgische Boerenbond ;
  • en tant que représentants des organisations de travailleurs :
    • pour la Fédération générale du travail de Belgique-FGTB : François Janssens, président, Mia De Vits, secrétaire général ;
    • pour la Confédération des syndicats chrétiens-CSC : Willy Peirens, président, Josly Piette, secrétaire général ;
    • pour la Centrale générale des syndicats libéraux de Belgique-CGSLB : Willy Waldack, président.

30Des experts techniques sont associés aux travaux des négociateurs et prennent part aux réunions des groupes de travail.

31Les négociations de l’automne 1992 ont été émaillées de faits et de prises de position qui constituent autant de traits particuliers. On en relève cinq ici :

  • l’attitude gouvernementale en général et les relations entre le ministre de l’Emploi et du Travail et les interlocuteurs sociaux en particulier ;
  • la position compétitive de la Belgique et le rapport du Conseil central de l’économie ;
  • la formulation de revendications patronales ;
  • les exigences des classes moyennes ;
  • les mobilisations syndicales en appui à la volonté d’ouvrir des négociations interprofessionnelles ou à des revendications particulières.

Attitude gouvernementale

32Pratiquement dès sa constitution en mars 1992, le gouvernement Dehaene émet le souhait de voir se conclure un accord interprofessionnel pour les années 1993 et 1994. A maintes reprises, la FEB va toutefois considérer que par ses mesures budgétaires, le gouvernement accroît les charges des entreprises et anéantit la marge disponible.

33Contrairement à ce que beaucoup ont espéré, le gouvernement n’est pas revenu sur sa décision de réduire de moitié les avantages de l’opération Maribel de façon à créer les conditions d’un démarrage des négociations. Cependant, la manière dont il a décidé de l’appliquer - plus favorable aux entreprises de moins de vingt travailleurs - a été appréciée du côté des organisations de classes moyennes de même que le non-accroissement des charges des entreprises lors de l’ajustement en septembre du budget de 1993 l’a été par les différentes organisations patronales. Cet élément a contribué à faire pencher une majorité de membres de la FEB en faveur de l’engagement des négociations.

34Quand, dans le courant du moins d’octobre, le gouvernement rencontre les interlocuteurs sociaux, il insiste à nouveau pour qu’ils entament des négociations interprofessionnelles. Il est fortement demandeur d’un accord qui tienne compte de la compétitivité et privilégie l’emploi.

35Le gouvernement, satisfait de ce que les interlocuteurs sociaux ont remis un rapport unanime sur la compétitivité, voit dans un accord interprofessionnel d’une part un gage de paix sociale et d’autre part un appel à la modération destiné aux négociateurs dans les secteurs et dans les entreprises. Pour lui, le rétablissement d’un consensus est primordial : le contexte économique ne garantissant pas le maintien de la position compétitive, il essaie d’obtenir des interlocuteurs sociaux qu’ils adoptent une attitude "responsable" et lui évitent ainsi de devoir prendre des mesures contraignantes. Pas plus que les années précédentes (notamment fin 1990 dans le contexte de la crise du Golfe [13]), le gouvernement ne tient à devoir intervenir tant il sait que les solutions envisageables (comme un saut d’index, par exemple) ne sont guère populaires. C’est la raison pour laquelle du côté syndical principalement, on redoute que le gouvernement doive mettre en œuvre la procédure prévue par la loi du 6 janvier 1989 de sauvegarde de la compétitivité du pays [14].

36Au cours de cette rencontre tripartite le gouvernement, par la voix du Premier ministre, a annoncé qu’il n’y avait aucune charge nouvelle à craindre et a affirmé qu’il existe une marge disponible pour réaliser un accord interprofessionnel : une marge minime, sans doute, mais réelle [15]. La plupart des acteurs considèrent que le gouvernement a facilité la négociation en agissant ainsi.

37Les rapports entre les partenaires sociaux et le ministre qui, au sein du gouvernement, est leur interlocuteur principal, à savoir le ministre de l’Emploi et du Travail, varient sensiblement en fonction des conjonctures et des personnalités. En 1988, par exemple, lors de la négociation de l’accord interprofessionnel, le ministre était intervenu pour débloquer la discussion entre patronat et syndicat, procédant à des rencontres bilatérales et émettant des propositions de nature à aplanir les principales difficultés. Deux ans plus tard, l’attitude du même ministre était moins unanimement appréciée, mais la communication entre lui et les interlocuteurs sociaux était régulière (informations sur l’état d’avancement de la discussion notamment).

38En 1992, les relations entre le ministre de l’Emploi et du Travail et les interlocuteurs sociaux se dégradent au cours de la période de négociation, ce qui a eu pour effet de nuire à leurs collaborations et de maintenir le ministre à l’écart de la discussion. Si, tant du côté patronal que syndical, on regrette d’une manière générale le manque de consultation de la part du ministre qui, en agissant de la sorte se démarque de l’attitude de ses prédécesseurs, la tension connaît un point culminant quand, alors que les négociateurs interprofessionnels ont inscrit cette matière au programme de leurs discussions, Miet Smet annonce qu’elle a rédigé un projet de loi sur le travail de nuit. Se sentant dépossédés d’un dossier à propos duquel le gouvernement avait pourtant demandé leur avis et se montrant opposés aux principales dispositions nouvelles du projet de loi (caractère automatique de l’autorisation du travail de nuit des femmes notamment), les interlocuteurs sociaux exigent et obtiennent du gouvernement que le projet soit retiré et que cette matière fasse l’objet d’une concertation tripartite qui aboutisse à un consensus. En attendant, la situation antérieure est maintenue.

Accord sur l’évaluation de la position compétitive de la Belgique

39En application de la loi sur la sauvegarde de la compétitivité du pays, les interlocuteurs sociaux réunis au sein du Conseil central de l’économie sont tenus d’émettre chaque année un rapport et un avis sur la compétitivité des entreprises belges avant le 31 mars et un rapport intermédiaire avant le 30 septembre. La loi prévoit que l’évaluation de la position compétitive repose sur la comparaison entre la Belgique et ses sept principaux partenaires commerciaux de l’évolution, par rapport à 1987, de cinq indicateurs. Les critères retenus par la loi sont les performances à l’exportation, les coûts salariaux, les coûts financiers, les coûts énergétiques et des déterminants structurels (formation brute du capital fixe, dépenses en recherche et développement, entre autres). Ces comparaisons s’effectuent sur base de données provenant de l’OCDE et des Communautés européennes. Le Conseil central de l’économie a, de sa propre initiative élargi le champ d’analyse à d’autres critères que ceux énoncés par la loi.

40Le 28 septembre 1992, les interlocuteurs sociaux aboutissent à une évaluation commune de la compétitivité du pays. Cet accord n’est toutefois pas aisé à atteindre notamment parce que des aspects méthodologiques rendent l’évaluation peu sûre : deux séries de données économiques contradictoires sont mises en présence et les fluctuations monétaires interviennent fortement sur l’évaluation (l’évolution de la valeur du franc belge par rapport aux autres monnaies conduit à des conclusions différentes, notamment en ce qui concerne les coûts salariaux).

41Si les interlocuteurs sociaux sont d’accord sur la manière d’évaluer la compétitivité et si le rapport intermédiaire est approuvé à l’unanimité, les interprétations auxquelles il donne lieu sont toutefois divergentes. La FEB par exemple, conclut : "le rapport du CCE souligne une fois encore la grande précarité de notre compétitivité. Non seulement nos parts du marché demeurent déficitaires mais, en outre, le facteur « coûts salariaux » reste source de difficultés" [16]. L’organisation patronale estime que la position concurrentielle de la Belgique est en danger, déjà en 1992 et surtout en 1993 d’autant que les décisions budgétaires du gouvernement ne sont pas prises en compte pour les prévisions. Par contre, pour les syndicats la compétitivité n’est pas menacée.

42En regard de la négociation interprofessionnelle, on peut considérer que l’unanimité des interlocuteurs sociaux sur le rapport intermédiaire est un élément non négligeable, de manière à faciliter, si pas a permettre, l’engagement des discussions. Mais l’interprétation que fait l’organisation patronale des données du rapport et de l’absence de prise en compte des dispositions gouvernementales qui risquent de peser sur les coûts salariaux en 1993, maintient la FEB dans une position très prudente à l’égard d’un accord interprofessionnel.

Revendications patronales

43Dans un contexte économique en régression et face à une politique gouvernementale caractérisée par l’austérité, la FEB a résisté longtemps avant d’entamer des négociations interprofessionnelles. La marge disponible étant considérée comme extrêmement réduite, certains au sein de la fédération patronale voulaient purement et simplement laisser le niveau interprofessionnel de côté de manière à mieux satisfaire les revendications formulées dans leurs secteurs ou dans leurs entreprises.

44Divers éléments étant intervenus - comme l’accord unanime au sein du Conseil central de l’économie, l’absence de charge nouvelle pour les entreprises, ou la modulation de la réduction de l’opération Maribel - une majorité parmi les membres du conseil d’administration de la FEB se sont prononcés en faveur de l’engagement de négociations, mais en précisant certaines conditions. Des limites de coûts, tout d’abord. Le conseil d’administration de l’organisation patronale exige que l’on limite au minimum les charges financières nouvelles. Des revendications propres, ensuite. La FEB accepte de participer à la discussion pour autant que l’on inscrive une "exhortation extrêmement claire en matière de compétitivité" et que "l’accord comporte des ouvertures précises dans le domaine de la flexibilité". Sans doute s’agissait-il de la première négociation en vue d’un accord central que la FEB entamait en déposant des revendications propres. Outre ces deux points d’autres matières (chômage partiel, travail à temps partiel, congé-éducation payé) sont amenées à la discussion par la FEB, qui sont en fait des dossiers qu’avaient déjà ouverts les interlocuteurs sociaux et ne constituent pas des revendications à proprement parler.

45En matière de flexibilité, la revendication patronale comporte deux volets d’une part, l’accord interprofessionnel donnerait un crédit de 65 heures supplémentaires par an et d’autre part 65 heures pourraient en plus être négociées dans les secteurs. Dans les deux cas, il s’agissait d’heures supplémentaires, prestées avec sursalaire mais sans repos compensatoire obligatoire.

46Si c’est sans doute la première fois que les représentants de la FEB se présentent aux négociations avec la mission de défendre des revendications, ce n’est par contre pas la première fois que cela a lieu du côté patronal. On se souvient en effet de ce que les classes moyennes avaient déposé en 1988 un cahier de revendications propre en sept points [17].

Exigences des classes moyennes

47D’entrée de jeu, les organisations de classes moyennes (surtout francophones) refusent en bloc trois revendications qui concernent plus spécifiquement les entreprises de petite et moyenne dimension : la généralisation de la durée du travail hebdomadaire à 38 heures [18], l’introduction de délégations syndicales dans les PME [19] et l’augmentation du revenu minimum mensuel moyen garanti [20]. Face à cette attitude, les organisations syndicales ont posé comme condition à la poursuite de la négociation que parmi ces trois revendications une au moins soit prise en considération. En réponse à cette exigence, les organisations de classes moyennes ont admis de discuter de l’augmentation du revenu minimum.

Mobilisations syndicales

48Les négociations interprofessionnelles ont connu bien des difficultés avant de démarrer, fort tardivement, en novembre 1992. On l’a vu, les positions patronales de départ étaient faites de réticences (en raison de la situation économique générale et des mesures budgétaires) et d’attentisme (par rapport aux mesures complémentaires que le gouvernement devait adopter). Les organisations syndicales, fortement attachées à l’aboutissement d’un accord interprofessionnel de solidarité (envers les inactifs et les travailleurs qui n’ont pas de lieu ou de rapport de forces pour négocier) et de progrès social (pour tous) ont tenté d’infléchir la position patronale de plusieurs manières, notamment par le biais de diverses formes de mobilisation des travailleurs.

49En juin 1992, après que certaines composantes de la CSC aient lancé un appel à la grève générale, risquant de compromettre le front commun, les directions de la FGTB et de la CSC se mettent d’accord pour, dans un premier temps du moins, organiser une assemblée commune de 3.000 militants. Celle-ci se tient le 15 juin 1992 au Heysel. Elle vise à mettre en avant les priorités communes des deux organisations en matière du budget et à formuler leur souhait d’aboutir à un accord interprofessionnel "visant à augmenter et à améliorer l’emploi, renforcer la sécurité sociale, rapprocher le statut des ouvriers de celui des employés, accroître le pouvoir d’achat et renforcer la reconnaissance syndicale dans les pme".

50Comme le refus patronal d’entamer des négociations interprofessionnelles persiste, les deux organisations syndicales programment pour le 16 octobre une "journée d’action pour la solidarité", également destinée à faire pression sur le gouvernement afin qu’il répartisse de manière plus équitable l’effort d’assainissement. Les organisations syndicales appellent à des arrêts de travail d’une heure. La CGSLB s’est associée à cette journée d’action. La veille, une centaine de membres du syndicat libéral avaient manifesté devant le siège de la FEB.

51Le jour même, la FGTB et la CSC diffusent un communiqué par lequel elles "se réjouissent du succès de la journée d’action" et "remercient les travailleurs pour le soutien clairement apporté aux revendications posées vis-à-vis du gouvernement et du patronat". "Les travailleurs et les allocataires sociaux ont témoigné leur solidarité agissante et refusé les exclusions et les injustices sociales :

  • dans la plupart des entreprises et des secteurs, les interruptions de travail et les assemblées d’information annoncées ont eu lieu ;
  • des manifestations et des délégations ont été organisées dans tout le pays ;
  • dans de multiples endroits, par la distribution de tracts et d’autres actions, les travailleurs et le public ont été sensibilisés à l’importance de l’objectif poursuivi" [21].

52Du côté de la FEB, l’appréciation de la journée était tout autre : "Ce genre d’action, dont on a l’impression qu’elle se résume à allonger leur week-end d’une heure, n‘est pas de nature à faire changer le sens de notre message. Ce qui compte, c’est de sauver l’emploi et la santé de nos entreprises" [22].

53Auparavant, à la mi-septembre, des actions en front commun avaient été lancées dans les secteurs de la sidérurgie et des fabrications métalliques de la région de Charleroi (arrêts de travail d’une heure généralement transformés en grèves de 24 heures) tandis que des centrales syndicales et des fédérations régionales réclamaient de leurs organisations (CSC et FGTB), d’organiser des actions au niveau interprofessionnel, tant à destination du gouvernement que des employeurs. Ces diverses manifestations ont sans doute servi "d’aiguillon" à l’égard des directions syndicales et les ont encouragées à organiser une action interprofessionnelle.

54Il n’est pas fréquent que les syndicats mobilisent leurs effectifs pour défendre un accord interprofessionnel. La journée d’action du mois d’octobre a sans doute indiqué leur détermination et peut avoir pesé sur la décision patronale d’engager des discussions. D’autres facteurs sont toutefois intervenus dans le même sens, au rang desquels figure l’évolution de la politique gouvernementale. Il n’est pas possible d’évaluer ce qui a été le plus déterminant. Il est difficile aussi d’imaginer l’attitude des syndicats si le refus patronal s’était prolongé. La solidarité interprofessionnelle ne se serait-elle pas heurtée, dans pareille hypothèse, aux revendications et négociations plus catégorielles, en commissions paritaires et dans les entreprises ? Les avantages directement accessibles n’auraient-ils pas eu raison du soutien aux travailleurs les plus mal lotis et aux sans-emploi ?

55D’autres actions ont également été menées en appui à certaines revendications particulières. Les chômeurs âgés de la FGTB en juin, en front commun CSC-FGTB en novembre, se sont rassemblés pour réclamer une augmentation de leurs indemnités de chômage et voir cette amélioration inscrite dans l’accord interprofessionnel. Des membres de la FGTB ont, par ailleurs, distribué des tracts dans les gares pour appuyer la demande d’une cotisation patronale destinée à financer l’accueil des enfants dans les crèches et dans les écoles durant les vacances.

3. L’accord

56L’accord interprofessionnel du 9 décembre 1992 comporte deux grandes parties [23]. La première comprend le texte de l’accord lui-même. Il débute par des recommandations aux secteurs et aux entreprises en matière de liberté de négociation et de position compétitive. Il se clôture sur une clause de paix sociale. La seconde partie est constituée par un protocole au gouvernement qui détaille un ensemble de propositions ou de demandes qui le concernent. Les interlocuteurs sociaux fixent au terme de leur accord comme "condition essentielle", l’approbation du gouvernement à propos de ces différents points. On examine ici les principales dispositions de l’accord interprofessionnel et les réactions qu’il a suscitées auprès des principaux intéressés.

Le contenu de l’accord

57L’accord interprofessionnel est structuré autour de neuf axes : liberté de négociation et position compétitive, revenu minimum mensuel garanti, emploi, chômage, pécule de vancances, organisation du travail, frais de transport, congé éducation payé, dispositions finales.

Emploi et chômage

58En matière d’emploi, les organisations syndicales demandaient notamment la prorogation de la cotisation patronale de 0,25% et abordaient la question du financement du plan d’accompagnement des chômeurs. En fait, les deux aspects sont globalisés dans l’accord et la problématique de l’accueil des enfants y est jointe. En matière de chômage, les questions rejoignent la problématique de la fin de carrière. Des demandes sont en outre formulées au gouvernement à propos des actions positives, du chômage temporaire et du travail à temps partiel.

Groupes à risques

59Les négociations ont abouti à la reconduction d’une partie de la cotisation de 0,25% en faveur de l’emploi et de la formation des groupes à risques. Les 0,10% destinés à financer le plan d’accompagnement des chômeurs (ce montant était fixé par la loi) ont été déduits de telle sorte que sont maintenus 0,15% à utiliser au niveau des secteurs ou des entreprises en accordant une attention particulière aux groupes à risques parmi les travailleurs. En cas de non affectation des 0,15%, une cotisation équivalente doit être versée au Fonds de l’emploi.

60Il est demandé au gouvernement d’accorder une dispense à l’obligation de stage aux secteurs qui, outre un effort pour les groupes à risques, collaborent effectivement au plan d’accompagnement. Cette demande a été acceptée par le gouvernement. En outre, les secteurs qui collaborent au plan d’accompagnement et font un effort supérieur à 0,15% peuvent bénéficier d’aides financières dans le cadre du milliard de francs réservé par le gouvernement au volet emploi du plan d’accompagnement.

Accueil des enfants et actions positives

61Une cotisation de 0,05% est prévue en 1994 pour financer des initiatives en matière d’accueil des enfants. Pour 1993, le gouvernement accepte qu’un milliard de francs soit prélevé du Fonds pour l’emploi et soit consacré à ces initiatives.

62Dans le protocole joint à l’accord interprofessionnel à l’intention du gouvernement, les interlocuteurs sociaux émettent des propositions qui visent à poursuivre et à renforcer les actions positives pour les femmes : renforcer la cellule "actions positives", continuer à autoriser les actions positives dans le cadre des efforts pour les groupes à risques et recommandations aux secteurs et aux entreprises d’agir dans ce sens, imposer un plan d’action positive pour les femmes comme condition supplémentaire pour assimiler les entreprises en restructuration à des entreprises en fermeture.

Chômage temporaire, travail à temps partiel et interruption de carrière

63Le chômage "partiel" ou "temporaire" fait l’objet de propositions au gouvernement que les interlocuteurs sociaux se proposent de modaliser au sein du CNT. Elles visent à la fois à garantir les conditions d’application de la législation et à encadrer le chômage temporaire de manière plus stricte. Un des objectifs poursuivis est de réduire la cotisation patronale au Fonds de fermeture des entreprises de 0,28% à 0,22%.

64Pour ce qui est du travail à temps partiel, les propositions remises au gouvernement visent à rendre la législation existante moins complexe.

65Les interlocuteurs sociaux ont décidé d’étudier au CNT la possibilité d’un droit limité à l’interruption de carrière (limite de temps, de fonction et de nombre de travailleurs par entreprise ou division, indemnisation majorée, remplacement). Dans le secteur privé, l’interruption de carrière est actuellement soumise à l’autorisation du patron. L’idée est donc d’en faire un droit, mais limité.

Fin de carrière

66Trois types de dispositions sont introduites dans l’accord interprofessionnel à propos de la fin de carrière : la prépension à mi-temps, le système d’emploi de fin de carrière, les allocations des chômeurs âgés. A propos des deux premiers points qui sont en fait liés, le texte de l’accord reprend et confirme la position commune à laquelle les interlocuteurs sociaux ont abouti le 30 juillet 1992. Elle renvoie à une discussion à tenir au CNT, l’élaboration d’un cadre pour l’introduction d’un système d’emploi de fin de carrière à modaliser en commissions paritaires ou dans les entreprises ainsi que le problème des "travailleurs en difficultés" et le problème du remplacement des personnes qui ont des emplois de fin de carrière.

67Le relèvement pour les chômeurs âgés de leurs indemnités de chômage est programmé : dès avril 1993, les chômeurs âgés de 55 ans bénéficieront d’une allocation égale à 60% du salaire perdu s’ils sont isolés et à 50% s’ils sont cohabitants. A titre transitoire, les chômeurs de 52 ans devenus chômeurs avant 1991 bénéficieront du même supplément. En décembre 1994, les cohabitants de 55 ans et plus ainsi que les chômeurs de 52 ans qui sont devenus chômeurs avant 1991 verront leur indemnité portée à 60%. Ces améliorations ne répondent que partiellement aux revendications syndicales puisque celles-ci visaient tous les chômeurs âgés de 50 ans et plus. Afin de financer les augmentations accordées, la cotisation patronale existante (0,12% des salaires bruts) est portée à 0,18% en avril 1993 et à 0,23% en octobre 1994.

Autres revendications syndicales

68Les organisations syndicales voulaient qu’un éventuel accord interprofessionnel profite à l’ensemble des travailleurs. A cette fin, elles avaient inscrit la consolidation et l’incorporation du double pécule de vacances pour le troisième jour de la quatrième semaine de vacances parmi leurs revendications. Dans l’accord précédent, cet avantage nouveau avait en effet été acquis de manière non récurrente pour 1992 uniquement. L’application de cette disposition avait fait l’objet de la convention collective du travail n°52, l’indemnité complémentaire étant exempte de cotisations sociales. L’accord interprofessionnel de 1992 prévoit l’adaptation de cette convention de telle sorte que l’indemnité soit accordée aux mêmes conditions en 1993 et 1994. Mais la demande syndicale d’incorporation et donc d’octroi définitif de cet avantage n’est pas rencontrée. Elle sera éventuellement à renégocier dans deux ans.

69En matière de pécule de vacances également, de manière à rapprocher le statut des ouvriers de celui des employés, les salaires fictifs qui sont pris en compte pour les journées (de maladie, de chômage, etc.) assimilées à des journées de travail seront progressivement portés à 100% du salaire journalier. Le financement de cette disposition sera à charge du Fonds commun des employeurs et du Fonds de solidarité des travailleurs au sein de l’Office national des vacances annuelles [24], au prorata de leurs réserves.

70En matière de déplacements domicile-travail, la revendication syndicale de supprimer le plafond fixé à BEF 900.000 par l’accord interprofessionnel de 1990 pour l’intervention dans les frais de transport, n’a été entendue que partiellement : la convention collective du travail n°19ter du CNT qui règle cette matière sera adaptée de manière à porter le plafond à BEF 1,2 million au 1er janvier 1993. Il semblerait que dans de nombreux secteurs, le plafond antérieur est déjà dépassé ou est aboli [25].

71Le revenu minimum mensuel moyen garanti, d’un montant de BEF 41.145, connaîtra une progression de BEF 500 au 1er septembre 1993 pour les travailleurs âgés de 22 ans ayant douze mois d’ancienneté dans l’entreprise.

Organisation du travail et compétitivité

72En ce qui concerne l’organisation du travail, les négociateurs de l’accord interprofessionnel ont repris deux discussions qu’ils avaient déjà entamées au CNT, relatives l’une au congé-éducation payé et l’autre au travail de nuit.

73La première a été introduite par les organisations patronales qui étaient davantage demandeuses d’une réorganisation du système, des dysfonctionnements et usages impropres étant apparus. La discussion interprofessionnelle a débouché sur des propositions visant notamment à établir des relations plus directes entre le bénéfice de la formation et la situation professionnelle ou ses perspectives. A cette fin, il a notamment été décidé d’établir une liste au niveau interprofessionnel des formations de promotion sociale et socio-culturelle ; les cours exclus pourront toutefois être "repêchés" au niveau des commissions paritaires. Le problème des absences simultanées et de la désorganisation du travail qui s’ensuit a également été abordé. Un planning collectif du congé-éducation sera établi dans les entreprises de manière a remédier aux dérangements occasionnés par des absences simultanées.

74En matière de travail de nuit les syndicats demandaient une révision de la convention collective n°46. Toutefois suite à l’initiative de M. Smet, les interlocuteurs sociaux se sont unanimement opposés au projet de loi déposé par le ministre de l’Emploi et du Travail. Ils ont rappelé dans le protocole au gouvernement qu’ils "estiment que les partenaires sociaux doivent gérer eux-mêmes le dossier du travail de nuit et que toute initiative législative doit être conforme à l’accord des partenaires sociaux". Le gouvernement s’est montré favorable à une solution qui garantisse "d’une part la flexibilité requise et d’autre part la protection des travailleurs".

75Il reconnaît que toute adaptation de la législation doit être basée sur une période transitoire réaliste (il envisage deux à trois ans) ainsi que sur une flexibilité adéquate des procédures. Cette adaptation devra faire l’objet d’une concertation tripartite approfondie à l’initiative du ministre de l’Emploi et du Travail et résulter d’un consensus en la matière.

76Par ailleurs, les interlocuteurs sociaux ont examiné les deux "revendications patronales" émises par la FEB qui ont trait à la compétitivité et la flexibilité. Dans ces deux matières, la volonté de certains, au sein de l’organisation patronale, était d’amener les directions syndicales à imposer aux négociateurs sectoriels et d’entreprises des normes et des cadres précis. Démarche que les représentants syndicaux au sommet ne peuvent admettre dans le contexte et le type de relations avec les centrales professionnelles qu’ils connaissent.

77Toutefois, l’accord comporte des recommandations en matière de compétitivité : "les interlocuteurs interprofessionnels demandent expressément aux travailleurs et aux employeurs, à tous les échelons, de s’inspirer de cet exemple[26] en intégrant dans leurs négociations la préoccupation quant aux répercussions du coût salarial sur la compétitivité et quant à l’emploi (…). La liberté de négociation doit aller de pair avec une responsabilité partagée en matière de sauvegarde de la compétitivité comme condition du développement économique et de l’emploi".

78Et il offre une ouverture en matière de flexibilité du temps de travail. La négociation a conduit à accepter uniquement le deuxième volet de la revendication patronale en matière d’heures supplémentaires : des conventions collectives pourront être conclues en commission paritaire afin d’instaurer un crédit annuel de 65 heures supplémentaires en vue de permettre aux entreprises de faire face à des circonstances temporaires. L’accord interprofessionnel ne prévoit donc pas l’obligation de conclure de telles conventions ni d’ailleurs d’entamer des négociations a son sujet. Ce point a toutefois donné lieu à des interprétations diverses, ce qui a obligé les organisations syndicales a en préciser l’esprit et la teneur à l’intention de leur base. Et sa mise en œuvre au niveau des secteurs est source de difficultés, certains négociateurs syndicaux refusant d’aborder ce sujet, alors que les représentants patronaux affirment que les directions syndicales se sont engagées par l’accord interprofessionnel.

Les réactions à l’accord

79Une fois le projet d’accord conclu par les interlocuteurs sociaux, il restait à le soumettre au gouvernement - les signataires voulaient que celui-ci s’engage sur l’ensemble des points contenus dans le protocole et qu’il leur assure qu’il ne prendrait pas de mesures alourdissant le coût salarial ou hypothéquant l’organisation du travail dans les matières réglées concrètement par l’accord - et aux instances de leurs organisations respectives [27].

Approbation gouvernementale

80Fortement demandeur d’un accord interprofessionnel qui allie respect de la compétitivité et promotion de l’emploi, le gouvernement se montre très satisfait du compromis atteint par les interlocuteurs sociaux. Le gouvernement les a rencontrés le 24 novembre et par la voix du Premier ministre s’est engagé à "apporter sa collaboration positive à l’exécution de l’accord". Il a donné son accord de principe sur les propositions contenues dans le protocole (moyennant des précisions techniques) et s’est engagé à déposer dans les plus brefs délais un projet de loi qui coule en texte législatif les dispositions de l’accord interprofessionnel et de son protocole.

81Les représentants du gouvernement se sont retirés en cours de séance afin de formuler leur réponse à la demande des interlocuteurs sociaux de garantir qu’il n’interviendra pas dans les matières qui font l’objet de l’accord. Craignant à l’approche du contrôle budgétaire de s’engager à ne pas prendre des mesures également dans des matières qui sont simplement évoquées dans l’accord (emploi, sécurité sociale), le gouvernement précise que l’assurance qu’il donne aux interlocuteurs sociaux de ne pas adopter des dispositions alourdissant le coût salarial ou hypothéquant l’organisation du travail concerne uniquement les matières concrètement réglées par l’accord.

82Le gouvernement constate que l’accent mis sur l’emploi et la formation rencontre ses priorités et il lance un appel aux interlocuteurs sociaux pour qu’ils contribuent positivement à la réussite de la conférence tripartite de l’emploi qui se tiendra début 1993 et à laquelle les instances régionales seront conviées. Il s’engage par ailleurs à ce qu’une concertation tripartite ait lieu avant le contrôle budgétaire prochain sur la sécurité sociale (l’assurance maladie-invalidité, en particulier) et la fiscalité.

83Jugeant favorablement la recommandation relative à la compétitivité contenue dans le préliminaire de l’accord ("susceptible de contribuer au développement socio-économique harmonieux de notre pays"), le gouvernement souligne que les commissions paritaires et les entreprises où les négociations vont débuter doivent tenir compte de la compétitivité car, estime-t-il, "la marge est limitée". Le lendemain (25 novembre) le gouvernement confirme ses engagements dans une note de quatre pages intitulée "Projet d’accord interprofessionnel. Réponse du gouvernement aux interlocuteurs sociaux" [28]. Il y confirme ses positions et les explicite "compte tenu des précisions et des explications qui ont été fournies" le 24 novembre.

Dans les syndicats

84Les trois organisations syndicales se sont prononcées en faveur de l’accord interprofessionnel le 1er décembre (CSC et CGSLB) et le 8 décembre (FGTB). Mais aucune n’a atteint l’unanimité en son sein. Tandis que les responsables des organisations défendaient le projet d’accord [29], des voix se sont élevées dans les assemblées pour critiquer principalement les dispositions de l’accord interprofessionnel relatives au crédit de 65 heures supplémentaires sans récupération et les restrictions quant au congé-éducation qui doit être limité à des besoins de formation professionnelle.

85A la CSC, le projet d’accord a été approuvé par 86,2% des membres du Comité national. Les reactions ont toutes été positives en ce qui concerne les aspects de solidarité de l’accord ; les critiques avaient surtout trait à l’absence de progrès en matière de réduction du temps de travail alors que la possibilité de flexibilité accrue était ouverte. La Centrale nationale des employés-CNE et la Centrale chrétienne de diverses industries-CCDI, d’une part, les fédérations régionales de Charleroi et du Brabant wallon d’autre part, ont voté contre le projet d’acord, tandis que la centrale des employés flamands (LBC) et les fédérations régionales de Mons, Liège, La Louvière, Namur et Hainaut occidental ont émis un vote partagé (50% pour et 50% contre). Certains observateurs ont qualifié le vote favorable du côté flamand comme un vote de résignation ("on ne peut pas se passer de l’accord") [30].

86La CGSLB a annoncé que le projet d’accord était approuvé "à une large majorité" par le Comité national, les débats ayant également porté sur certains aspects se rapportant à la flexibilité de l’organisation du travail ainsi que sur la limitation du droit au congé-éducation et sur l’âge requis pour bénéficier du salaire minimum.

87A la FGTB, l’accord interprofessionnel a été accepté par 83,7% des votants tandis que 14,3% émettaient un vote négatif et 2% s’abstenaient. De nombreuses centrales et régionales ont émis un vote partagé tant en Flandre qu’en Wallonie, tandis que la régionale de Gand et la section professionnelle régionale des métallurgistes de Charleroi votaient contre l’accord et la régionale de Courtrai s’abstenait. Echec des revendications en matière de réduction du temps de travail et d’introduction syndicale dans les PME, utilisation faite par le patronat de l’engagement relatif à la compétitivité et concessions en termes de flexibilité sont les trois principales critiques adressées lors de la réunion du comité national de la FGTB.

88Il est à noter que tant la CSC que la FGTB ont jugé utile d’adresser à leurs mandants des précisions quant au contenu de diverses dispositions de l’accord et quant à leur application. Ces initiatives apparaissent à la suite d’interprétations diverses, formulées notamment en commissions paritaires, de certaines dispositions de l’accord, en particulier celles qui ont trait aux heures supplémentaires.

Du côté patronal

89L’unanimité n’a pas été acquise non plus au sein du conseil d’administration de la FEB le 26 novembre 1992, certaines fédérations sectorielles ayant maintenu leur position négative à l’égard tant de l’engagement de négociations que du contenu du projet d’accord rédigé par les interlocuteurs sociaux. Pour celles-ci, l’accord interprofessionnel confisque une marge importante de ce qui pouvait être négocié au niveau sectoriel.

90Plaidant en faveur de la ratification de l’accord auprès de leurs mandants, les représentants patronaux mettent en avant son faible coût et surtout l’intérêt qu’ils voient à un compromis avec les syndicats : ils estiment en effet qu’à défaut d’accord, le gouvernement aurait pris d’initiative des dispositions contraignantes et au moins aussi coûteuses. De manière positive, "les arguments qui justifient l’approbation de l’accord sont la volonté clairement exprimée par tous les partenaires à la négociation de privilégier la préoccupation de la compétitivité et les propositions communes visant à promouvoir la flexibilité. L’engagement du gouvernement de « collaboration positive a l’excécution de l’accord proposé » et de non-intervention dans les matières concrètement traitées par l’accord, a constitué une condition essentielle de l’approbation du Conseil" [31].

91Déjà au moment d’approuver le projet d’accord, le conseil d’administration de la FEB fait part d’inquiétudes à propos de la sauvegarde de la compétitivité. Certains rapportent que les cahiers de revendications déposés dans leurs secteurs sont inconciliables avec l’esprit de l’accord. Aussi il exige avant de signer l’accord, une nouvelle rencontre entre leurs représentants et les dirigeants syndicaux. Mais W. Beirnaert, conscient de l’autonomie des centrales syndicales par rapport aux confédérations interprofessionnelles, précise : "Nous n‘exigeons ni une norme, ni des garanties étanches. Nous n‘imposons pas aux syndicats des garanties de résultats qu ‘ils ne peuvent pas nous donner. Mais nous leur demandons d’user de leur devoir d’influence" [32].

92Pour l’Union syndicale des classes moyennes, l’élément déterminant de l’accord est son coût extrêmement limité pour les PME, la principale condition mise à l’approbation du texte étant que le gouvernement respecte les engagements pris envers les interlocuteurs sociaux. Par ailleurs, les organisations de classes moyennes se félicitent d’avoir réussi à éviter l’introduction des syndicats dans les PME, la généralisation des 38 heures de travail hebdomadaire et la suppression du jour de carence pour les ouvriers.

Début de mise en œuvre

93Dès le 22 décembre 1992, le Conseil national du travail a entamé la mise en œuvre des dispositions de l’accord interprofessionnel qui le concernent. Au cours de cette réunion, il a adopté une convention collective du travail n°19 quinquies relative à l’intervention de l’employeur dans le prix du transport des travailleurs : cette convention porte à BEF 1.200.000 le plafond de la rémunération annuelle que les employés ne peuvent dépasser pour bénéficier de cette intervention. Les propositions relatives au chômage temporaire précisées dans le protocole au gouvernement joint à l’accord ont été approuvées et confirmées le même jour.

94Au cours de sa séance du 23 février, le Conseil national du travail a conclu une convention collective relative au chômage temporaire résultant du manque de travail pour causes économiques. Cette convention stipule que le travail qui est normalement exécuté par les travailleurs qui sont mis au chômage temporaire ne peut être sous-traité par leur employeur à des tiers pendant la durée du chômage temporaire.

95La convention collective n°54 a également été conclue. Elle vise l’octroi du double pécule de vacances pour le troisième jour de la quatrième semaine de vacances en 1993 et 1994 et prolonge pour ces deux années les effets de la convention n°52 qui organisait cet avantage pour 1992. Un avis a été émis par lequel le CNT demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour exclure le double pécule en question de la base de calcul des cotisations de sécurité sociale.

96Un avis unanime et favorable a également été remis en réponse à une demande formulée par le ministre de l’Emploi et du Travail relative à un projet d’arrêté royal qui vise les entreprises en restructuration. Aux conditions existantes pour l’assimilation de ces restructurations à des fermetures d’entreprises en vue de l’application de la législation relatives à ces dernières, est ajoutée la condition d’avoir établi un plan en vue de la promotion de l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

97Les discussions relatives à d’autres points de l’accord interprofessionnel ont débuté en commissions. Il s’agit essentiellement de l’interruption de carrière, de la prépension à mi-temps et du travail de nuit. La mise en œuvre des autres dispositions (salaire minimum, congé-éducation payé, évaluation de l’application du crédit d’heures supplémentaires, le travail au noir) est programmée pour plus tard.

98Pour sa part, le gouvernement consacre à l’exécution des points de l’accord interprofessionnel qui le concernent l’essentiel du projet de loi portant des dispositions sociales que le Conseil des ministres a adopté en février 1993. Ainsi que l’exposé des motifs l’énonce : "Les sections 1 à 8 du Chapitre I de cette loi constituent la mise en œuvre de l’accord interprofessionnel intervenu le 9 décembre 1992 entre les partenaires sociaux.

99Les points essentiels de cet accord qui doivent être exécutés par voie législative sont les suivants :

  • en 1993 et 1994, les employeurs seront tenus à un effort de 0,15% en faveur des demandeurs d’emploi issus des groupes à risque ou ayant suivi un plan individuel d’accompagnement des chômeurs. Cet effort sera concrétisé par une convention collective de travail soit sectorielle, soit d’entreprise. A défaut d’une telle convention, les employeurs verseront une cotisation de 0,15% de la masse salariale des travailleurs pour lesquels ils ne sont pas liés par une convention collective de travail. Cette cotisation alimentera le Fonds pour l’Emploi. Des initiatives en matière d’accueil des enfants seront financées par des prélèvements effectués dans ce Fonds. Une dispense totale ou partielle d’engager des stagiaires est prévue dans l’arrêté royal n°230 pour les employeurs qui auront conclu une convention collective de travail relative à l’effort de 0,15% et qui ont effectué un effort raisonnable en faveur de l’emploi ;
  • la réglementation relative au congé-éducation payé a été revue afin de réaliser une application sélective du régime en mettant l’accent sur les formations ayant un lien direct avec la situation ou les perspectives professionnelles du travailleur et en privilégiant la planification collective par rapport aux aspirations individuelles du travailleur ;
  • les allocations de chômage de certains chômeurs âgés seront augmentées, ceci exige une augmentation de la cotisation patronale pour la sécurité sociale - secteur chômage ;
  • la réglementation relative au calcul des heures supplémentaires et à leur récupération a également été assouplie ; les employeurs obtiennent un crédit de 65 heures qui ne doivent pas faire l’objet d’une récupération au cours de la période qui sert de base de calcul de la durée moyenne du travail. En outre, le sursalaire dû en cas de prestation d’heures supplémentaires peut à présent être converti en un repos complémentaire ;
  • une cotisation de 0,05% sera prévue en 1994 pour le financement d’initiatives en matière d’accueil des enfants ;
  • quant au calcul du pécule de vacances des ouvriers, les salaires fictifs pris en compte pour les journées assimilées à des journées de travail (en cas de maladie, chômage, etc.) seront progressivement portés à 100% du salaire journalier. Le coût de ces améliorations sera supporté par le Fonds commun des employeurs et le Fonds de solidarité constitué au sein de l’Office national des vacances annuelles, proportionnellement aux réserves de ces fonds ;
  • en matière de chômage partiel, les interlocuteurs sociaux ont formulé diverses propositions destinées à encadrer le chômage partiel de manière plus stricte. La section 8 de ce chapitre de loi concrétise ces propositions."

Conclusions

100L’accord interprofessionnel du 9 décembre 1992 est le douzième à avoir été conclu. La succession bi-annuelle de ce type de conventions depuis 1986 est-elle le signe que les interlocuteurs sociaux ont durablement renoué avec la tradition des années 1960 à 1976 ? Il est difficile de se prononcer sur ce que sera l’avenir des relations sociales "au sommet". Quelques réflexions et quelques hypothèses se dégagent toutefois des expériences récentes, et plus spécialement de la dernière en date.

Cinq fonctions

101D’une manière générale, on peut considérer que les accords interprofessionnels remplissent au moins cinq fonctions : la programmation sociale, la paix sociale, l’encadrement des négociations aux autres niveaux, la solidarité, la légitimation des organisations nationales :

  • programmation : il s’agit d’octroyer aux travailleurs de nouveaux avantages, éventuellement étalés dans le temps, ou de généraliser les avantages qui ont été négociés dans les secteurs forts. Ceux-ci "tirent" les secteurs faibles, au pouvoir syndical plus réduit ;
  • paix sociale : patrons et syndicats considèrent qu’ils ont réglé les problèmes nationaux en suspens. Les premiers s’engagent à appliquer les décisions, les seconds à ne pas demander plus, ni à déclencher de grève sur le plan interprofessionnel ;
  • cadre : l’accord central fixe des recommandations pour les secteurs et les entreprises qui négocient par la suite. Ces dernières années, le ton est à la modération des revendications ;
  • solidarité : cet aspect est surtout présent depuis 1986, lorsque les interlocuteurs sociaux sont convenus de consacrer une partie de la masse salariale à la formation et à l’emploi des plus vulnérables ;
  • légitimation : l’accord constitue une des fonctions importantes des organisations nationales et est chargé d’une forte connotation symbolique eu égard au système des relations collectives du travail au sommet.

102Le dernier accord remplit les mêmes fonctions que ses prédécesseurs. Mais la conjoncture économique et politique comme l’évolution du système des relations collectives du travail répartissent le poids de chacune dans un équilibre à chaque fois différent. Il semble ainsi que le rôle attendu d’un accord interprofessionnel en matière de paix sociale ne constitue plus aujourd’hui une motivation suffisante du côté patronal comme par le passé. De même, la dimension d’encadrement des négociations aux autres niveaux a manifestement connu un glissement ces dernières années. Il ne s’agit plus seulement de fixer un cadre minimal de généralisation du progrès social à tous les secteurs et à toutes les entreprises du secteur privé. On assiste maintenant à la formulation de recommandations visant si pas la modération des augmentations en matière salariale ("les secteurs négocient librement l’augmentation du pouvoir d’achat"), du moins la prise en compte de la compétitivité et l’invitation à imiter l’exemple de l’accord interprofessionnel ("qui tient compte (du) contexte économique difficile").

103La dimension de légitimation des organisations nationales interprofessionnelles prend un sens particulier dans le contexte de la réforme de l’Etat. L’aboutissement de négociations à ce niveau renforce le rôle des structures interprofessionnelles des organisations et constitue même, partiellement, leur raison d’être. Ceci est sans doute davantage prégnant pour la FEB qui ne connaît pas de régionalisation interne de ses structures. Les organisations patronales régionales (Union wallonne des entreprises-UWE, Union des entreprises de Bruxelles-UEB, Vlaams Economisch Verbond-VEV) ne sont pas des membres de la FEB ; elles n’en constituent pas non plus des subdivisions : ce sont des organisations spécifiques auxquelles s’affilient directement les entreprises de la même manière qu’elles s’affilient aux fédérations sectorielles qui forment la FEB.

104Le système des relations collectives du travail au sommet trouve lui aussi une justification dans les accords interprofessionnels. Et ceci, dans deux acceptions complémentaires. Comme il légitime les organisations structurées au niveau le plus élevé, l’accord interprofessionnel en tant que compromis fortement connoté symboliquement contribue à pérenniser un système national et interprofessionnel de relations de travail au moment où certaines velléités de régionaliser la négociation sociale se font jour. En outre, il est investi d’une valeur telle qu’il sert aussi à justifier les décisions et les positions adoptées dans les instances de concertation et/ou de négociation, parmi lesquelles le Conseil national du travail est le plus important en matières sociales. L’accord est le texte auquel se réfèrent régulièrement les acteurs : leur compromis sert de fil conducteur à leurs travaux et c’est à son esprit que l’on confronte les différends qui émergent et les demandes d’avis qu’adressent les ministres.

Rapports entre niveaux

105Tout en remplissant un rôle de renforcement de la cohésion nationale ou fédérale dans les matières socio-économiques, l’accord interprofessionnel positionne ceux qui le négocient dans une relation particulière avec leur "base", les fédérations sectorielles de la FEB, les centrales professionnelles principalement et les régionales des syndicats. La période de crise a induit un type de rapports nouveaux entre ces niveaux : depuis plusieurs années les accords interprofessionnels recommandent aux négociateurs de prendre en considération la capacité compétitive des entreprises, principalement en matière salariale. Bien que la manière de l’évaluer soit mise en question du côté syndical, la notion même de compétitivité est devenue, au milieu des années 1980, l’objet d’un consensus entre les représentants au sommet des travailleurs et des employeurs. Ce qui est source de tension entre les centrales syndicales et leur (con)fédération d’autant que l’application de la loi relative à la sauvegarde de la compétitivité accorde un rôle important aux interlocuteurs sociaux interprofessionnels.

106Mais en outre, les négociateurs syndicaux se trouvent face aux tentatives de certaines fédérations d’employeurs qui essayent, au moyen de l’accord interprofessionnel, d’imposer leurs revendications notamment a propos de la flexibilité du travail. Nombreux sont aussi ceux qui dans les rangs patronaux attendent des accords interprofessionnels qu’ils constituent un frein pour les négociations dans les secteurs. La généralisation d’avantages acquis dans certains secteurs (dont l’ampleur et le coût tendent à se réduire fortement depuis le début de la crise) s’accompagne ces dernières années d’une généralisation de recommandations de modération.

107Si les négociateurs patronaux ont conscience que l’accord interprofessionnel ne peut avoir une vocation coercitive vis-à-vis des autres niveaux de négociation, ils doivent aussi répercuter les consignes exprimées par leurs mandants. Les négociateurs syndicaux ont pour leur part à respecter l’autonomie de leurs centrales professionnelles. Il n’empêche que la brèche en matière de flexibilité de temps de travail (le crédit de 65 heures supplémentaires avec sursalaire mais sans repos compensatoire) est le point de focalisation de la contestation syndicale du texte : quoique l’accord interprofessionnel laisse aux commissions paritaires l’autonomie de mettre en œuvre cette disposition (qui est présentée comme une possibilité conditionnée par des circonstances temporaires), voire seulement d’entamer la discussion à son sujet, certaines centrales syndicales redoutent que leurs interlocuteurs patronaux prennent l’accord comme un argument d’autorité pour imposer la conclusion de conventions sectorielles de flexibilité.

Entre négociation et concertation

108Les discussions relatives à un accord interprofessionnel ne peuvent être isolées du contexte qui les entoure. La situation économique et la politique gouvernementale sont deux dimensions qui interfèrent et qui donnent, par certains aspects, à la négociation interprofessionnelle des allures de concertation tripartite. Déjà dans le courant des années 1960 et 1970, le recours à l’intervention gouvernementale était rendu nécessaire par l’accord : la mise en œuvre des décisions imposait alors, comme elle le fait aujourd’hui encore, la traduction de certaines de ses dispositions en termes légaux ou réglementaires.

109Avec la crise économique, le gouvernement est intervenu davantage dans les matières du ressort des interlocuteurs sociaux. Les concertations au cours desquelles il fait part de ses priorités et joue un rôle dans la dynamique des rapports entre représentants des employeurs et des travailleurs se sont multipliées ces dernières années. Il va même dans certains cas jusqu’à faire de l’accord interprofessionnel un instrument de sa politique. Le programme des négociations comprend en outre des sujets à propos desquels l’exécutif a saisi les interlocuteurs sociaux au Conseil national du travail.

110Aujourd’hui, on conçoit difficilement qu’un accord interprofessionnel se négocie de manière totalement indépendante du gouvernement, même si la manière varie en fonction de différents facteurs, parmi lesquels les difficultés ou les tensions entre des interlocuteurs sociaux ou les attentes qu’ils ont les uns vis-à-vis des autres.

111L’accord de 1992 règle pour deux ans les principales questions en suspens qui ont trait à l’organisation du travail. Il se situe dans un ensemble de négociations dont les échéances se succèdent. Les acteurs qui l’ont signé se retrouveront sous peu dans d’autres débats, avec le gouvernement, à propos du budget et de la sécurité sociale. Dans ces matières, ils défendent des points de vue opposés : fiscalité et accroissement des ressources du côté syndical ; restriction en matière de sécurité sociale et limitation des dépenses du côté patronal. L’accord interprofessionnel a sans doute bénéficié de son antériorité par rapport à ces autres négociations.

Annexes

1 – Douze accords interprofessionnels depuis 1960

112L’accord interprofessionnel du 11 mai 1960 inaugurait une série dont le dernier (9 décembre 1992) est le douzième. Cette série de conventions concernant l’ensemble des travailleurs du secteur privé, généralement pour une période de deux ans, a été interrompue essentiellement [33] durant les années de crise, de 1977 à 1986, si on ne tient pas compte de l’accord a-typique de 1981. Ces différents accords reposent sur les mêmes principes qui régissent le système des relations collectives du travail "au sommet", ils se présentent tous comme des accords de programmation d’acquis nouveaux ou d’extension à tous les secteurs d’avantages déjà octroyés dans certains d’entre eux, en échange du respect de la paix sociale, se basent sur le consensus entre les parties en présence et sur leur engagement moral. Cependant leur ampleur varie très fortement ainsi que la brève synthèse [34] qui suit va le rappeler.

1131. Accord interprofessionnel du 11 mai 1960 pour la période 1960 à 1962 :

  • double pécule pour la deuxième semaine de vacances à réaliser pour 1963 ;
  • cotisation complémentaire (patronale) pour les allocations familiales dont les modalités de répartition sont déterminées ultérieurement de commun accord ;
  • clause de paix sociale.

1142. Accord interprofessionnel du 12 décembre 1963 pour les années 1964 et 1965 :

  • troisième semaine de vacances à réaliser pour 1965 (avec pécule simple).

1153. Accord interprofessionnel du 15 juillet 1966 pour la période juillet 1966 à novembre 1968 :

  • double pécule de vacances pour la troisième semaine.

1164. Accord interprofessionnel du 7 février 1969 pour les années 1969 et 1970 :

  • réduction de la durée de travail hebdomadaire pour passer de quarante-cinq heures à quarante-trois heures en 1971 ;
  • remplacement par un jour de congé du samedi qui coïncide avec un jour férié ou compensation financière ;
  • clause de paix sociale.

1175. Accord interprofessionnel du 15 juin 1971 pour 1971 et 1972 :

  • remplacement par un jour de congé du samedi qui coïncide avec un jour férié ou compensation financière ;
  • clause de paix sociale.

1185. Accord interprofessionnel du 15 juin 1971 pour 1971 et 1972 :

  • augmentation des pensions de 5% ;
  • octroi des avantages concernant le salaire mensuel garanti aux travailleuses en repos d’accouchement ;
  • programmation de la réduction de la durée hebdomadaire de travail : quarante-deux heures en 1972 et quarante heures en 1975 ;
  • intervention patronale de 50% dans les abonnements sociaux des transports en commun ;
  • clause de paix sociale.

1196. Accord interprofessionnel du 6 avril 1973 pour les années 1973 et 1974 :

  • réduction du temps de travail hebdomadaire pour réaliser les quarante et une heures en 1974 ;
  • quatrième semaine de vacances à réaliser progressivement pour 1975 ;
  • salaire minimum mensuel garanti aux ouvriers en incapacité de travail ;
  • doublement du préavis minimum en faveur des ouvriers (quatre semaines) ;
  • clause de paix sociale.

1207. Accord interprofessionnel du 10 février 1975 pour la période 1975-1976 :

  • en matière de vacances annuelles : indemnité complémentaire de 5% pour les ouvriers à titre exceptionnel, double pécule pour deux jours de la quatrième semaine à partir de 1976, le chômage partiel pour cause économique est assimilé pour le calcul de la durée et du pécule de vacances ;
  • revenu minimum moyen porté à BEF 15.000 garanti aux travailleurs de 21 ans ;
  • recommandation sur l’égalité dans les conditions de travail : entre hommes et femmes (égalité de rémunération, égalité de traitement) et par rapport à l’âge ;
  • généralisation de l’intervention (50%) de l’employeur pour les abonnements sociaux dans les transports publics et demande d’augmentation des plafonds ;
  • généralisation (et recommandation visant au contrôle) de l’application de la semaine de quarante heures ;
  • reconnaissance de la compétence de la délégation syndicale en matière de cadences et rythmes de travail ;
  • accord sur l’idée d’octroyer la pension à 64 ans après une carrière de quarante-cinq ans et aux travailleurs ayant exercé un métier particulièrement rude et insalubre ;
  • maintien du revenu net pendant les quatorze semaines du congé de maternité ;
  • reconnaissance du droit de s’absenter (sans rémunération) de son travail pour raisons familiales impérieuses ;
  • engagement à poursuivre la discussion sur l’assurance maladie-invalidité (notamment à propos du jour de carence) et sur les licenciements collectifs.

1218. Accord interprofessionnel du 13 février 1981 pour les années 1981 et 1982 :

  • conclu sous la menace de l’entrée en vigueur d’un article de la loi du 10 février 1981, relatif à la modération salariale, cet accord rendu obligatoire dans le secteur privé par arrêté royal organise la modération des revenus et autorise des réductions limitées du temps de travail.

1229. Accord interprofessionnel du 7 novembre 1986 pour la période 1987-1988 :

  • après une période de dix ans d’absence d’accord interprofessionnel et d’interventions du gouvernement dans les matières du ressort des interlocuteurs sociaux, ceux-ci concluent un accord qui n’impose rien, mais restaure la liberté de négociation dans les secteurs (tout en attirant l’attention sur la nécessité de tenir compte de la compétitivité et des caractéristiques propres aux secteurs et aux entreprises). A défaut d’accord, le gouvernement menaçait d’intervenir ;
  • en matière d’emploi : recommandation aux secteurs de consacrer 0,5% de la masse salariale à la promotion de l’emploi en général et à celle des jeunes en particulier et prolongation des accords d’emploi antérieurs ;
  • les secteurs négocient librement l’augmentation du pouvoir d’achat et recommandations relatives au revenu minimum garanti ;
  • la réduction du temps de travail hebdomadaire à trente-huit heures est une matière réservée aux négociations de secteurs ;
  • clause de paix sociale.

12310. Accord interprofessionnel du 18 novembre 1988 pour les années 1989 et 1990 :

  • augmentation du revenu minimum moyen mensuel garanti (deux fois BEF 500) ;
  • relèvement de l’allocation de chômage des chômeurs âgés de 50 ans et plus financée par une cotisation patronale de 0,10% sur les salaires bruts ;
  • cotisation patronale de 0,18% au Fonds pour l’emploi ou effort équivalent en faveur de groupes à risques ;
  • généralisation de la prépension conventionnelle à 58 ans pour tous les secteurs jusqu’à la fin 1990.

124Pour le reste, les signataires

  • émettent des recommandations aux secteurs et aux entreprises (libre définition de la marge disponible - qui tienne compte de la "nécessaire compétitivité et de leurs caractéristiques et spécificités propres" - et de son affectation, interruption de carrière et stage des jeunes) ;
  • formulent des demandes au gouvernement (créer une cellule féminine auprès du service des relations collectives du travail, augmenter l’indemnité d’interruption de carrière, proroger les dérogations réglementaires au principe de la prépensïon à 58 ans) ;
  • renvoient certaines matières au Conseil national du travail (la formation et le travail en alternance, la flexibilité, le statut des travailleurs en équipes, le travail à temps partiel, l’introduction des nouvelles technologies) ou acceptent les propositions du gouvernement qui promet d’intervenir en matière de pensions, de protection des délégués des travailleurs et émet une suggestion en matière de représentation syndicale dans les PME.

12511. Accord interprofessionnel du 27 novembre 1990 pour les années 1991 et 1992 :

  • liberté de négociation mais attire l’attention sur la sauvegarde de la compétitivité ;
  • augmentation du revenu minimum moyen garanti (BEF 900 sur deux ans) + adaptations pour les jeunes de 18 à 21 ans ;
  • relèvement des allocations de chômage des chômeurs de 50 à 55 ans (harmonisation avec les plus de 55 ans) la cotisation patronale de 0,10% est portée à 0,12% ;
  • effort de formation et emploi pour les groupes à risques dans les secteurs et entreprises (0,25% de la masse salariale) sinon versement au Fonds de l’emploi ;
  • confirmation de la prépension conventionnelle à 58 ans, jusqu’à la fin 1992 ;
  • paiement du double pécule de vacances pour un jour supplémentaire en 1992 ;
  • congé de maternité porté à quinze semaines ;
  • augmentation à BEF 900.000 du plafond pour l’intervention dans les frais de transports des employés ;
  • clause de paix sociale.

12612. Accord interprofessionnel du 9 décembre 1992 pour les années 1993 et 1994 :

  • liberté de négociation à tous les niveaux doit aller de pair avec une responsabilité partagée en matière de sauvegarde de la compétitivité ;
  • augmentation du revenu minimum moyen garanti (+ BEF 500) pour les travailleurs âgés de 22 ans et ayant douze mois d’ancienneté dans l’entreprise ;
  • relèvement étalé dans le temps des allocations de chômage des chômeurs âgés ; la cotisation patronale de 0,12% est portée à 0,18% en 1993 et à 0,23% fin 1994 ; efforts pour la promotion de l’emploi et le financement (0,10%) du "plan d’accompagnement des chômeurs" : 0,25% en 1993 et 0,3% en 1994, dont 0,05% pour le financement d’initiatives en matière d’accueil des enfants (en 1993, BEF 1 milliard provenant du Fonds pour l’emploi seront consacrés à cette fin) ;
  • amélioration du calcul du pécule de vacances des ouvriers ;
  • prolongation du paiement du double pécule de vacances pour un jour supplémentaire en 1993 et 1994 ;
  • demandes au gouvernement relatives à l’organisation du travail (visant notamment la possibilité de négocier en commission paritaire un crédit de 65 heures supplémentaires) et propositions en matière de congé éducation payé ;
  • relèvement à BEF 1,2 million du plafond relatif à l’intervention financière de l’employeur dans les frais de transport des employés ;
  • demande au gouvernement de s’engager à ne pas intervenir dans les matières par l’accord et de marquer son approbation sur les propositions formulées dans l’accord ;
  • clause de paix sociale.

2 – Chronologie des réunions et des actions

12730 mars 1992

128Réunion tripartite (interlocuteurs sociaux, Premier et vice-Premiers ministres et ministres "sociaux") relative à l’équilibre budgétaire de la sécurité sociale au cours de laquelle le gouvernement exprime son souhait de voir un accord interprofessionnel se conclure pour les années 1993-1994.

129avril-mai 1992

130Réactions patronales et syndicales aux mesures budgétaires adoptées par le gouvernement (notamment manifestation le 7 mai 1992 en front commun FGTB, CSC et CGSLB contre les mesures relatives aux allocations de chômage des travailleurs à temps partiel) et concertations avec différents ministres pour aménager certaines des décisions gouvernementales. La FEB se prononce en faveur d’une accélération de l’assainissement des finances publiques, en particulier par le biais de privatisations, tandis que la CSC et la FGTB plaident pour un assainissement progressif.

1314 juin 1992

132Concentration des organisations de classes moyennes : l’UCM, la FGTI et diverses organisations professionnelles critiquent les mesures gouvernementales (1.000 participants à la salle de la Madeleine à Bruxelles).

13315 juin 1992

134Assemblée commune au Heysel (à Bruxelles) de 3.000 militants de la FGTB et de la CSC pour mettre en avant leurs priorités communes et lancer un avertissement au gouvernement, avant les discussions du plan pluriannuel d’assainissement 1993-1996. Les deux organisations se prononcent contre l’assainissement accéléré dans le cadre du budget 1993 et se déclarent favorables à un nouvel accord interprofessionnel visant à augmenter et améliorer l’emploi, renforcer la sécurité sociale, rapprocher le statut des ouvriers de celui des employés, accroître le pouvoir d’achat et renforcer la reconnaissance syndicale.

13518 juin 1992

136Manifestation de chômeurs âgés affiliés à la FGTB devant le siège de la FEB pour appuyer leur revendication d’augmentation des allocations des chômeurs à partir de 50 ans (de manière à les porter à 60% du dernier salaire après une carrière de vingt ans) et de la voir inscrite dans l’accord interprofessionnel.

13718 juin 1992

138La FEB se montre très prudente par rapport à d’éventuelles négociations interprofessionnelles "dans la mesure où on ignore quelles seront les marges disponibles pour entamer une négociation" suite aux décisions budgétaires du gouvernement.

1396 juillet 1992

140Après avoir consulté séparément leurs instances, les bureaux de la CSC et de la FGTB décident de rédiger un cahier de revendications commun.

1419 juillet 1992

142Réunion informelle des interlocuteurs sociaux au cours de laquelle la FGTB et la CSC remettent et commentent leur cahier de revendications ; la FEB dit ne pas pouvoir s’engager en raison de la situation économique et de ses appréhensions à l’égard des décisions à prendre par le gouvernement dans le cadre du budget 1993.

14320 juillet 1992

144Concertation tripartite à propos du budget 1993 : le gouvernement fait état de la situation budgétaire tandis que patronat et syndicats exposent leurs points de vue respectifs.

14530 juillet 1992

146Accord entre le ministre de l’Emploi et du Travail et les interlocuteurs sociaux sur les prépensions en exécution du protocole d’accord de juin 1990 (relèvement à 57 ans de l’âge possible de la prépension au 1er janvier 1994, régimes spéciaux dans certains secteurs et dans les entreprises en difficulté, introduction à concrétiser d’un régime de prépension à mi-temps). Cette matière fera partie de l’accord interprofessionnel.

147fin juillet-début août 1992

148Conclave budgétaire au cours duquel le gouvernement décide notamment de réduire de moitié la subvention Maribel aux entreprises (réduction des charges sociales dans les entreprises à forte intensité de main-d’œuvre des secteurs exposés à la concurrence comme les secteurs de fabrications métalliques, du textile, de la confection). A l’issue du conclave budgétaire, la FEB conclut que la marge de manœuvre pour aboutir à un accord interprofessionnel est devenue très mince et que la possibilité même des négociations est compromise.

1493 septembre 1992

150Conseil d’administration extraordinaire de la FEB. L’organisation patronale se montre déçue par les mesures budgétaires et déclare que "si le gouvernement souhaite vraiment un accord interprofessionnel (…) il devra rétablir les conditions permettant une négociation" (elle vise en particulier la réduction de l’opération Maribel). Certains secteurs, particulièrement les plus touchés par cette mesure, s’opposent à ce que l’organisation patronale engage des négociations.

1518 septembre 1992

152La CSC et la FGTB formulent une "position commune" en matière de budget et de négociation interprofessionnelle et qualifient d’irresponsable l’attitude de la FEB qui refuse de tenir des négociations interprofessionnelles alors que, selon les syndicats, il reste des marges de manœuvre disponibles dans les entreprises.

1538 septembre 1992

154Communiqué de la CGSLB dans lequel le syndicat libéral se montre favorable à une renégociation de la mesure prise par le gouvernement à propos de l’opération Maribel, afin de permettre la conclusion d’un accord interprofessionnel.

15515 septembre 1992

156Actions en front commun (initialement 60 minutes d’arrêt de travail généralement transformés en grèves de 24 heures) dans les secteurs de la sidérurgie et des fabrications métalliques de la région de Charleroi suivies par un communiqué de la Fédération des syndicats chrétiens de Charleroi-Thuin qui "juge sévèrement" la FEB et le gouvernement et demande à la CSC nationale d’organiser des actions d’opposition sur le plan national et interprofessionnel. La FGTB de Mons et la CGSP-enseignement réclament aussi une action nationale.

15724 septembre 1992

158Conseil d’administration de la FEB relatif notamment à la situation socio-économique ("les entreprises éprouvent des difficultés croissantes") et à la position de l’organisation à propos du rapport sur la compétitivité.

15928 septembre 1992

160Rapport intermédiaire unanime du Conseil central de l’économie sur la position compétitive qui permet toutefois des interprétations divergentes : pour les syndicats la position compétitive n’est pas menacée, tandis que la FEB estime qu’elle le sera légèrement en 1992 et davantage en 1993.

161La FEB attend de voir l’attitude gouvernementale avant d’entamer les négociations tandis que les syndicats (la CSC et la FGTB et la CGSLB) dans un communiqué commun, réclament l’ouverture des négociations puisque la position compétitive est satisfaisante et qu’il existe une marge pour une négociation interprofessionnelle.

16229 septembre 1992

163Le gouvernement fixe à BEF 21,8 milliards les corrections à apporter au budget de 1993 dont BEF 5,2 milliards à charge de la sécurité sociale, pour tenir compte de l’évolution économique moins favorable.

1649 octobre 1992

165Le Conseil des ministres décide des modalités de diminution du Maribel : de BEF 17.000, il passe à BEF 7.500 et à BEF 11.300 dans les PME de moins de vingt personnes, pour les cinq premiers travailleurs.

16614 octobre 1992

167Réunion tripartite des interlocuteurs sociaux et du gouvernement (J. -L. Deha, Ph. Moureaux, M. Wathelet, M. Smet et F. Willockx). Le Premier ministre estime qu’il y a une marge pour un accord interprofessionnel et insiste pour que les interlocuteurs sociaux entament les négociations.

16815 octobre 1992

169"Manifestation surprise" d’une centaine de membres de la CGSLB devant le siège de la FEB ; ils portent un cercueil contenant symboliquement "la tradition des accords interprofessionnels".

17016 octobre 1992

171Journée "d’action pour la solidarité" organisée en front commun par la FGTB et la CSC à laquelle se rallie la CGSLB : arrêts de travail d’une heure afin de faire pression à la fois sur les employeurs pour obtenir la négociation d’un accord interprofessionnel et sur le gouvernement pour une répartition plus équitable de l’effort d’assainissement. La veille, la FEB a protesté contre "une action qui n’est certainement pas de nature à promouvoir le dialogue interprofessionnel préconisé par les organisations syndicales".

17222 octobre 1992

173Le conseil d’administration de la FEB, sans atteindre l’unanimité sur ce point, donne son accord à l’ouverture de discussions avec les organisations syndicales en précisant le mandat des négociations : "examiner comment, dans un contexte économique inquiétant, la défense de la compétitivité peut être privilégiée dans l’intérêt de l’activité économique et, partant, de l’emploi".

17427 octobre 1992

175Les instances de la CSC et de la FGTB acceptent que leurs représentants rencontrent les organisations patronales.

17628 octobre 1992

177Miet Smet, ministre de l’Emploi et du Travail, écrit aux interlocuteurs sociaux afin de leur rappeler qu’ils assument une grande responsabilité en matière d’emploi et insister pour qu’ils maximisent les efforts sur la formation et accordent une attention particulière au problème de la fin de carrière et aux actions positives en faveur des femmes.

17829 octobre 1992

179Réunion bipartite (patronat-syndicats) destinée à envisager la possibilité d’entamer des négociations en vue de la conclusion éventuelle d’un accord interprofessionnel. Après avoir réexpliqué leurs positions respectives, les interlocuteurs sociaux décident de renvoyer à un groupe de travail technique l’examen des principaux dossiers (travail de nuit, congé-éducation, travail à temps partiel, notamment).

18013 novembre 1992

181Distribution de tracts dans plusieurs gares importantes de Wallonie, Bruxelles et Flandre par des membres de la FGTB (appuyant la demande syndicale d’une cotisation patronale (BEF 1 milliard) destinée à "l’accueil des enfants dans les crèches et dans les écoles, pendant les vacances".

18216 novembre 1992

183Miet Smet rend public son projet de loi relatif au travail de nuit. Alors qu’ils avaient inscrit ce point à l’ordre du jour de leurs discussions, les interlocuteurs sociaux considèrent que le ministre "court-circuite" leur travail et demandent le maintien de la situation actuelle.

18417 novembre 1992

185Devant les locaux de la FEB, au moment même où commence la négociation interprofessionnelle, rassemblement en front commun CSC-FGTB de chômeurs âgés, destiné à réaffirmer la revendication d’une augmentation des indemnités de chômage de cette catégorie de chômeurs.

18617 novembre 1992

187Première réunion de négociation : destinée initialement à aboutir à un pré-accord, la discussion se termine par un ajournement des négociations.

18819 novembre 1992

189Deuxième réunion plénière au cours de laquelle les discussions sont vives à propos heures supplémentaires (flexibilité revendiquée par la FEB). Au terme de cette réunion, un préaccord est conclu.

19024 novembre 1992

191Au cours d’une réunion tripartite, le gouvernement donne sa réponse aux demandes contenues dans le projet d’accord interprofessionnel (non-intervention dans les matières réglées concrètement) et dans son protocole.

192Entre le 25 novembre et le 8 décembre 1993

193Les interlocuteurs sociaux présentent le projet d’accord à leurs instances respectives. Toutes les organisations l’acceptent malgré des oppositions tant à la FEB (les secteurs opposés dès le début à la tenue des négociations interprofessionnelles maintiennent leur opposition) qu’à la CSC et à la FGTB (certaines centrales et régionales votent contre, principalement en raison des "concessions" syndicales en matière d’heures supplémentaires et de congé-éducation).

1949 décembre 1992

195Les diverses instances patronales et syndicales ayant approuvé le texte du projet d’accord, signature officielle de l’accord interprofessionnel 1993-1994 dans les locaux de la FEB.

3 – Accord interprofessionnel du 9 décembre 1992 pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994

Liberté de négociation et position compétitive

1961. Les parties sont soucieuses de la sauvegarde de la compétitivité comme condition du développement de l’activité économique et de l’emploi. Elles sont également attachées à la liberté de négociation à tous les niveaux.

197Les représentants des employeurs et des travailleurs constatent que la position compétitive de l’économie belge est très fragile, comme il ressort du rapport du Conseil central de l’Economie, qu’ils ont approuvé ensemble.

198De plus, il y a lieu de tenir compte :

  • des récentes évolutions des taux de change
  • des répercussions économiques des décisions prises par le gouvernement pour assainir les finances publiques
  • des perspectives économiques de l’OCDE récemment revues à la baisse
  • des discussions sociales actuellement chez certains de nos principaux concurrents.

199Précisément par souci de la compétitivité et de l’emploi, les représentants des employeurs et des travailleurs ont conclu un accord interprofessionnel qui tient compte de ce contexte économique particulièrement difficile.

200C’est pourquoi, les interlocuteurs interprofessionnels demandent expressément aux travailleurs et aux employeurs, à tous les échelons, de s’inspirer de cet exemple en intégrant dans leurs négociations la préoccupation quant aux répercussions du coût salarial sur la compétitivité et quant à l’emploi. Pour le gouvernement aussi le souci de la compétitivité et de l’emploi doit être une priorité.

201La liberté de négociation doit aller de pair avec une responsabilité partagée en matière de sauvegarde de la compétitivité comme condition du développement économique et de l’emploi.

Revenu minimum mensuel garanti

2022. Le revenu minimum mensuel moyen garanti de 41.145,-frs, tel que prévu dans la CCT n°43 du Conseil National du Travail, est majoré de 500,-frs. au 1er septembre 1993 pour les travailleurs âgés de 22 ans et ayant 12 mois d’ancienneté dans l’entreprise à cette date.

Emploi

2033. Les entreprises consacreront en 1993 et 1994 respectivement 0,25 et 0,3% des rémunérations brutes à la promotion de l’emploi comme suit :

  1. en 1993 et 1994 une cotisation de 0,1% destinée au financement du plan d’accompagnement
  2. en 1994 une cotisation de 0,05% pour le financement d’initiatives en matière d’accueil des enfants, laquelle est destinée au Fonds des équipements et services collectifs
  3. en 1993 et en 1994 un effort de 0,15% à préciser dans une CCT de secteur ou d’entreprise selon des formules qui tiennent compte des caractéristiques du secteur ou de l’entreprise.

204Les négociateurs consacreront une attention particulière aux possibilités d’intégration de personnes parmi les groupes à risques, à définir dans la CCT, et de demandeurs d’emploi qui ont suivi le plan d’accompagnement pour chômeurs.

205Les entreprises qui ne sont pas couvertes par un effort de 0,15% tel que prévu au c) verseront une cotisation correspondante à l’ONSS qui transmettra ces sommes au Fonds de l’Emploi.

206Les partenaires sociaux demandent au gouvernement que les secteurs et les entreprises qui auraient prévu dans leur convention un effort supérieur à 0,15%, entrent prioritairement en considération pour le volet Emploi du Plan d’accompagnement lorsqu’ils collaborent à des projets VDAB/Forem/Orbem en faveur de groupes à risques.

207Les parties demandent au gouvernement de consacrer 1 milliard en 1993, à prélever sur les réserves du Fonds de l’Emploi, pour des initiatives en matière d’accueil des enfants.

2084. Les parties ont élaboré des propositions à l’attention du Gouvernement qui visent à dispenser de l’obligation de stage les secteurs et les entreprises qui font un effort pour les groupes à risques et collaborent effectivement au plan d’accompagnement.

209Ces propositions sont précisées dans le protocole en annexe.

2105. Les parties ont élaboré des propositions à l’attention du Gouvernement qui visent à renforcer les actions positives pour les femmes.

211Ces propositions sont précisées dans le protocole en annexe.

2126. En ce qui concerne la prépension à mi-temps les parties confirment leur volonté exprimée dans l’accord sur la prépension du 31.7.1992 :

  • d’élaborer un cadre pour l’introduction d’un système d’emplois de fin de carrière (prépension à mi-temps en parallélisme avec la prépension à temps plein), par une CCT au CNT. Ce cadre doit ensuite être concrétisé par le biais de CCT conclues au niveau du secteur ou de l’entreprise ;
  • d’évoquer également pendant cette discussion le problème des "travailleurs en difficulté", ainsi que le problème du remplacement de personnes qui ont des emplois de fin de carrière.

2137. Les parties poursuivront leurs travaux au CNT et consacreront dans ce cadre une étude à un droit limité d’interruption de carrière :

  • limité dans le temps et à prendre éventuellement en plusieurs périodes
  • pour un nombre limité de fonctions (cfr. régime secteur public)
  • pour un nombre limité de travailleurs en fonction des effectifs totaux de l’entreprise ou de la division
  • avec une indemnité majorée (à charge du budget de l’Emploi et du Travail)
  • avec remplacement.

Chômage

2148. Le supplément pour chômeurs âgés sera majoré au 1.4.1993 afin de garantir aux chômeurs âgés de 55 ans une allocation de chômage égale à 60% du salaire de référence pour les isolés et à 50% pour les cohabitants. En guise de mesure transitoire les chômeurs âgés de 52 ans devenus chômeurs avant 1991 bénéficieront d’un même supplément. Au 1.12.1994, les 50% des cohabitants seront portés à 60%.

215A cet effet, l’actuelle cotisation de 0,12% des rémunérations brutes sera portée à 0,18% à partir du 1.4.1993 et à 0,23% à partir du 1er décembre 1994.

2169. Les parties se sont mises d’accord sur des propositions globales en matière de chômage partiel qu’elles formuleront au CNT à l’attention du Gouvernement.

217Ces propositions sont précisées dans le protocole en annexe.

Pécule de vacances

21810. En ce qui concerne le calcul du pécule de vacances des ouvriers de 18 ans et plus, les salaires fictifs pour les jours assimilés plafonnés à 1.900F. seront pris en compte à concurrence de 100% au lieu de 80% pour le pécule des vacances 1993. Le plafond de 1.900 francs sera supprimé pour le calcul du pécule de vacances de 1994.

219Le coût de ces améliorations sera supporté par le Fonds Commun et le Fonds de Solidarité existant au sein de l’Office national des Vacances Annuelles proportionnellement aux réserves de ces fonds.

22011. Les parties conviennent d’adapter la CCT n°52 du CNT relative à l’octroi d’une indemnité complémentaire unique égale au double pécule du troisième jour de la quatrième semaine afin de prolonger son application pendant la durée d’application de cet accord.

221Cette indemnité suit le régime de sécurité sociale de la CCT n°52. Les parties demanderont dès lors au gouvernement de proroger l’exclusion de cette indemnité de la base de perception des cotisations de la sécurité sociale.

Organisation du travail

22212. Les parties ont élaboré des propositions globales à l’attention du Gouvernement, ayant pour objet :

  • de permettre aux entreprises de faire face à des circonstances temporaires qui ne peuvent en aucun cas être résolues par des embauches complémentaires, par l’octroi d’un crédit de 65 heures supplémentaires sur base annuelle, avec droit à un sursalaire, mais sans récupération de temps de travail, moyennant la conclusion d’une CCT sectorielle.
  • de permettre aux travailleurs de compenser du travail supplémentaire en jours de repos complémentaire.
  • de combattre des pratiques de travail en noir.

223Ces propositions sont précisées dans le protocole en annexe.

22413. Les parties ont élaboré des propositions globales à l’attention du Gouvernement en matière de travail de nuit. Elles mettent l’accent sur l’autonomie des partenaires sociaux.

225Ces propositions sont précisées dans le protocole en annexe.

22614. Les parties ont élaboré des propositions à l’attention du Gouvernement qui corrigent la grande complexité de la réglementation sur le travail à temps partiel et qui assurent plus de sécurité juridique.

227Ces propositions sont précisées dans le protocole en annexe.

Frais de transport

22815. Les parties conviennent d’adapter la CCT n°19ter du CNT concernant l’intervention financière de l’employeur dans le prix des transports publics de sorte que cette CCT sera applicable à partir du 1er janvier 1993 aux employés dont le salaire annuel ne dépasse pas 1,2 million.

Congé éducation payé

22916. Les parties se sont mises d’accord sur des propositions globales à l’attention du Gouvernement.

230Elles visent à :

  • concentrer la réglementation sur les formations qui présentent un lien direct avec la situation professionnelle ou avec les perspectives professionnelles ;
  • empêcher la désorganisation du travail suite à des absences simultanées ;
  • contrer l’usage impropre du système.

231Ces propositions sont précisées dans le protocole en annexe.

232(Point 17 inexistant)

Dispositions finales

23318. Les parties sont d’accord pour demander de manière expresse au Gouvernement et ce avant la signature de l’accord :

  • de marquer son approbation sur les propositions formulées à son attention dans cet accord et précisées dans le protocole en annexe. L’approbation du Gouvernement est une condition essentielle de cet accord ;
  • la garantie de ne prendre aucune mesure au cours de la durée de l’accord qui pourrait aggraver le coût salarial ou affecter l’organisation du travail dans les matières qui font l’objet de leur accord.

23419. Les parties conviennent qu’elles ont réglé pour la durée de l’accord les exigences qu’elles ont les unes à l’égard des autres au niveau interprofessionnel."

235Pour la Fédération des Entreprises de Belgique : N. Joris, T. Vandeputte, W. Beirnaert

236Pour le « Nationaal Christelijk Middenstandsverbond » : P. Thys

237Pour l’Union syndicale des Classes moyennes de Belgique : R. Mené

238Pour le Front Vert des Organisations agricoles : R. Eeckloo

239Pour la Confédération des Syndicats Chrétiens de Belgique : W. Peirens, J. Piette

240Pour la Fédération générale du Travail de Belgique : F. Janssens, M. De Vits

241Pour la Centrale générale des Syndicats libéraux de Belgique : W. Waldack

Protocole. Propositions des partenaires sociaux au Gouvernement

"1. Obligation de stage

242L’obligation de stage peut être supprimée dans le secteur privé pour les secteurs/entreprises faisant un effort pour les groupes à risques et collaborant effectivement au plan d’accompagnement.

243Précision :

244L’obligation de stage est suspendue pour les secteurs/entreprises qui fournissent un effort. A cet effet, on utilise la même formule que celle appliquée pour le secteur public, c’est-à-dire que le régime de stage des jeunes (AR n°230) est maintenu, mais l’obligation est annulée par simple AR pour les secteurs/entreprises faisant un effort pour les groupes à risques et collaborant effectivement au plan d’accompagnement.

245Fournir un effort pour les groupes à risques signifie : conclure une CCT portant sur un montant de 0,15%.

246Collaborer effectivement au plan d’accompagnement implique par exemple

  • un accord par la voie d’une CCT pour engager les chômeurs bénéficiant du plan d’accompagnement ;
  • un accord de collaboration entre les secteurs et le Forem/VDAB/Orbem en vue de la formation et de la mise au travail des chômeurs bénéficiant du plan d’accompagnement à l’aide des moyens de 0,15%.

247Une contribution effective signifie que les CCT et les accords de collaboration doivent contenir un effort raisonnable. Comme le prévoit le protocole du plan d’accompagnement, l’ampleur de l’effort sera appréciée par le comité de gestion de l’ONEm.

248Les parties estiment que ce régime garantira une contribution plus efficace et de meilleure qualité que l’engagement proposé dans le protocole du ministre de l’Emploi et du Travail/gouvernements régionaux de réserver 1% des stages aux chômeurs bénéficiant du plan d’accompagnement.

2 – Actions positives pour les femmes

249Poursuite et renforcement des actions positives pour les femmes :

  • renforcement de la cellule actions positives en concertation avec le gouvernement ;
  • maintien de la possibilité de mener des actions positives dans le cadre des efforts pour les groupes à risques, et recommandation aux secteurs et aux entreprises de prévoir effectivement des actions positives dans ce cadre ;
  • obligation de prévoir un plan d’action positive pour les femmes dans les entreprises en restructuration, dans le prolongement de l’AR du 14 juillet 1987 : égalité de traitement entre les hommes et les femmes dans les divisions impliquées compte tenu des qualifications des personnes concernées ; l’intervention et les dérogations en matière de législation sociale (prépension) sont subordonnées au plan d’action positive.

3 – Chômage temporaire

250Les propositions ci-dessous sont destinées à concrétiser les mesures à prendre par le Roi, prévues aux art. 94, 97, 98 et 99 et suivants de la loi susnommée.

251La cotisation calculée par le Fonds de Fermeture d’Entreprises pour financer le chômage temporaire, à législation constante, à raison de 0,28% de la masse salariale, pourrait ainsi être ramenée à 0,22%.

252Propositions

253* La loi prévoit un nombre maximum général de jours de chômage pour des raisons techniques et/ou intempéries par rapport au nombre de jours de travail (50-50).

254* En cas de chômage temporaire à caractère structurel, la possibilité d’un chômage temporaire de plus de 6 mois peut être maintenue à titre exceptionnel pour sauvegarder les possibilités de reconversion. Une exception semblable peut être prévue en cas de mauvais temps persistant.

255* Le nombre de semaines pour lequel la suspension totale peut être prononcée sans AR après avis de la commission paritaire (c’est-à-dire le régime de 4 semaines de chômage et de 1 semaine de travail) peut être limité à un maximum de 16 semaines de suspension effective par an.

256* L’introduction de n’importe quel chômage temporaire pour des raisons économiques (complet ou partiel) doit également être appliquée effectivement en fonction d’un paramètre à déterminer (par exemple après X jours les demandes viennent à échéance).

257* Le travail qui est normalement exécuté par des travailleurs qui sont mis en chômage temporaire, ne peut être sous-traité à des tiers pendant la durée du chômage temporaire.

4 – Heures supplémentaires et travail en noir

1 – Problématique des heures supplémentaires

258a. Permettre aux entreprises de faire face à des circonstances temporaires qui ne peuvent en aucun cas être résolues par des embauches complémentaires, par l’octroi d’un crédit de 65 heures supplémentaires sur base annuelle, avec droit à un sursalaire, mais sans récupération de temps de travail, moyennant la conclusion d’une CCT sectorielle.

259On entend par circonstances temporaires, soit une augmentation exceptionnelle du travail, soit une nécessité imprévue (cfr. loi sur le travail).

260L’utilisation de cette possibilité sera évaluée au CNT dans le courant du second trimestre 1993.

261b. On peut créer la possibilité légale d’opter par CCT pour la compensation des heures supplémentaires par des jours de congé complémentaires s’ajoutant à l’obligation de compensation existante, au lieu du sursalaire (idem pour le travail de nuit et le travail dominical).

2 – Travail en noir

262Extension éventuelle des mesures actuelles (fiche individuelle, registre de présence, obligation de déclaration, responsabilité solidaire et obligation d’enregistrement) à d’autres secteurs après concertation avec les branches d’activité concernées.

263Restrictions des cumuls dans les CCT : interdiction pour les travailleurs qui ont de nombreuses journées libres dans la semaine de gagner un salaire d’appoint ; interdiction d’embaucher des prépensionnés ou des pensionnés.

264Pas d’activité complémentaire comme indépendant pour le même employeur (pour les activités similaires).

265La lutte contre le travail en noir peut être améliorée par un renforcement des services d’inspection et des auditorats du travail.

5 – Travail en équipes - Travail de nuit

266Les parties estiment que les partenaires sociaux doivent gérer eux-mêmes le dossier du travail de nuit et que toute initiative législative doit être conforme à l’accord des partenaires sociaux.

267Dans ce contexte, les propositions suivantes peuvent être utiles :

268- Les secteurs examineront de manière autonome si le travail de nuit des femmes peut être introduit pour certaines fonctions ou tâches. « De manière autonome » signifie, selon le groupe de travail, qu’aucune concession ne doit être faite pour l’instant dans le cadre de la loi sur le travail du 16 mars 1971, concession qui permettrait aux femmes d’être mises au travail la nuit. Cette forme de travail ne pourra être introduite que sur la base de décisions sectorielles.

269- Une liste de ces fonctions et tâches sera établie au niveau interprofessionnel afin de guider ces discussions.

270- La CCT n°46 devra nécessairement être adaptée en ce qui concerne les temps de travail applicables et être adaptée à la Convention 171 du BIT en cas de ratification aussi.

271- Il est recommandé aux secteurs de concrétiser le principe de l’égalité des droits, prévu dans la CCT n°46.

272Après un certain temps, la situation doit pouvoir être évaluée à la lumière du contexte européen.

273L’évaluation à l’issue d’un laps de temps vise à suivre de près l’évolution de la législation européenne et ses éventuelles répercussions sur la loi nationale. Se référant à l’introduction, le groupe de travail estime que toute initiative législative devra, maintenant ou ultérieurement, être conforme à l’accord des partenaires sociaux.

6 – Travail à temps partiel

274Considérant la grande complexité de la réglementation sur le travail à temps partiel, le groupe de travail pense pouvoir examiner les propositions suivantes :

  • simplification sérieuse des modalités administratives en matière de travail à temps partiel. On entend entre autres par là :
    • l’assouplissement, sur proposition de la commission paritaire, de l’obligation pour l’employeur de communiquer les horaires au travailleur cinq jours à l’avance ;
    • des possibilités de contrôle plus adaptées en cas de dérogation aux horaires communiqués ;
    • l’évaluation des obligations et sanctions existantes ;
  • continuation de l’AR temporaire dérogeant à la règle de 1/3.

7 – Congé-éducation

2751.* La liste des formations de promotion sociale et socio-culturelle sera réexaminée au niveau interprofessionnel afin d’en exclure les formations qui ne présentent pas un lien direct avec la situation professionnelle (eu égard à l’expérience ou au diplôme et au certificat) ou avec les perspectives professionnelles.

276La commission d’agrément Congé-éducation sera chargée d’élaborer dans les 6 semaines des propositions pour exclure les formations visées. Elle pourra entre autres s’inspirer de l’arrêté de la Communauté française dressant la liste des formations à caractère occupationnel pour lesquelles un minerval plus élevé est demandé.

277* Les commissions paritaires pourront cependant retenir les cours exclus en tant que formations utiles.

278Lorsque le travailleur change d’employeur en cours de formation et dépend ainsi d’une autre commission paritaire, il faudrait prévoir que l’intéressé conserve le droit d’achever sa formation chez le nouvel employeur aux mêmes conditions.

2792. Les parties proposent d’organiser de la manière suivante le planning collectif du congé-éducation afin de remédier aux dérangements occasionnés par des absences simultanées :

  • toutes les demandes de congé-éducation relatives à une année scolaire normale doivent être introduites au plus tard avant une date à fixer, par exemple le 1er octobre ;
  • le planning collectif est établi par le conseil d’entreprise ou, à défaut, par l’employeur en concertation avec la délégation syndicale de l’entreprise ou, à défaut, par l’employeur en concertation avec les travailleurs ;
  • ce planning doit tenir suffisamment compte des besoins de l’organisation du travail et du droit au congé-éducation des travailleurs concernés. Le planning collectif primera le planning individuel.

2803. Les parties proposent de contrer l’utilisation impropre du congé-éducation par :

  • un contrôle renforcé des institutions organisant les formations de congé-éducation pour éviter les attestations de complaisance. On demandera à l’administration d’établir un rapport annuel de contrôle en la matière ;
  • le refus de l’agrément des formations lorsqu’il ressort de la demande qu’elles peuvent bénéficier du double financement du coût salarial par le Fonds social européen, le VDAB/Forem/Orbem, etc.

2814. Les parties demandent au gouvernement de respecter intégralement ses obligations financières en matière de congé éducation.

4 – Réponse du gouvernement aux interlocuteurs sociaux

282"1. Le 24 novembre dernier, le Gouvernement a rencontré les représentants des partenaires sociaux. Les discussions ont porté sur le projet d’accord interprofessionnel intervenu entre les interlocuteurs sociaux. Par la présente, le Gouvernement communique son point de vue, compte tenu des précisions et des explications qui ont été fournies.

2832. Le Gouvernement se réjouit de constater que les négociations entre les partenaires sociaux ont abouti à la conclusion d’un projet d’accord interprofessionnel pour la période 1993-1994.

284Le Gouvernement a pris connaissance de l’accord intervenu et a soumis les propositions qui lui sont adressées à un examen approfondi.

285Il constate que l’accord s’inspire d’une préoccupation réelle pour la sauvegarde de la compétitivité d’une part, et pour la promotion de l’emploi d’autre part.

286Tout en respectant l’autonomie des interlocuteurs sociaux dans les secteurs et au sein des entreprises, le Gouvernement tient à signaler que les marges disponibles en la matière sont particulièrement restreintes. Il partage le souci exprimé par les partenaires sociaux au niveau interprofessionnel, d’intégrer à tous les échelons des négociations la préoccupation quant aux répercussions du coût salarial sur la compétitivité.

2873. Le Gouvernement constate que les interlocuteurs sociaux sont disposés à affecter une partie de la masse salariale au développement de l’emploi, plus particulièrement en faveur d’initiatives à l’égard de groupes à risques et en matière d’accueil des enfants.

288Vu l’évolution du marché du travail, le Gouvernement souligne l’importance de poursuivre les efforts bénéficiant effectivement à la formation et à l’emploi des groupes à risques.

289En ce qui concerne la dispense de l’obligation de stage, le Gouvernement estime que celle-ci doit être basée sur des éléments et des conditions objectifs à déterminer en concertation avec les partenaires sociaux, compte tenu des orientations prévues dans l’accord. Les exemptions seront accordées sur cette base par le Ministre compétent, après avoir recueilli l’avis du comité de gestion de l'?nem.

290En ce qui concerne la diminution des cotisations sociales dans le cadre du volet emploi du plan d’accompagnement, le Gouvernement estime que, conformément aux priorités fixées dans sa décision du 20 novembre, il faut, pour l’application de cette mesure, essayer de réaliser la sélectivité nécessaire, compte tenu du caractère limité des moyens disponibles à cet effet (1 mia de francs). Vu cet élément, le Gouvernement consentit à ce qu’outre les entreprises comptant moins de 20 travailleurs et les maisons de repos, d’autres employeurs faisant un effort spécial dans le domaine de l’emploi et de la formation des groupes à risques, entrent également en ligne de compte pour la diminution concernée des cotisations sociales. Le Gouvernement n’a toutefois pas d’objections à ce que les arrêtés déterminant le champ d’application et les conditions d’octroi soient déterminés en concertation avec les partenaires sociaux. De plus, le Gouvernement associera le CNT à l’évaluation de ce règlement, qui se fera dans le courant de 1993.

291Quant au transfert de réserves à partir du Fonds pour l’Emploi, le Gouvernement est disposé à affecter les réserves existantes au financement d’initiatives en matière d’accueil des enfants, compte tenu du financement indispensable du plan d’accompagnement. Il tient toutefois à faire observer que ce transfert ne peut pas avoir un impact négatif sur le solde net à financer en 1993. De plus, le Gouvernement créera un groupe de travail, à l’initiative du Ministre de l’Emploi et du Travail. Les partenaires sociaux seront invités à participer à ce groupe de travail afin d’examiner l’exécution concrète de la proposition concernée.

2924. Le Gouvernement se réjouit de ce que les interlocuteurs sociaux aient élaboré des mesures supplémentaires visant à renforcer les actions positives pour les femmes. Il prend connaissance de l’attitude positive des partenaires sociaux à l’égard de l’exécution de l’accord sur les prépensions conclu en juillet dernier et de l’instauration éventuelle d’un droit limité à l’interruption de carrière.

2935. Le Gouvernement prend acte de la préoccupation exprimée par les partenaires sociaux afin de relever le niveau des allocations pour les chômeurs plus âgés. Le Gouvernement souligne toutefois qu’il existe un décalage entre la date de la perception des cotisations et la date de l’augmentation des allocations, ce qui pose un problème financier pour le régime. Il invite les partenaires sociaux à proposer une solution à ce problème.

294En ce qui concerne les mesures qui sont envisagées dans le domaine du chômage temporaire, le Gouvernement rappelle que les propositions des interlocuteurs sociaux ne peuvent pas porter atteinte au principe contenu dans la loi du 26 juin 1992 portant des dispositions sociales et diverses, en vertu duquel 27% des dépenses concernées sont pris en charge par le Fonds d’indemnisation des travailleurs licenciés en cas de fermeture d’entreprise.

2956. Le Gouvernement constate que la demande d’exclusion de la base de perception des cotisations sociales du double pécule de vacances pour le troisième jour de la quatrième semaine des vacances annuelles vise à proroger une mesure prise en exécution du précédent accord interprofessionnel. Le Gouvernement se rallie à cette proposition. Le Gouvernement est d’avis qu’il n’est absolument pas souhaitable qu’une telle dispense soit octroyée à durée indéterminée, à la lumière de la situation financière du régime de sécurité sociale.

2967. Le Gouvernement n’émet aucune réserve de principe à l’égard des propositions qui ont été formulées dans l’accord interprofessionnel concernant la problématique des heures supplémentaires, la lutte contre le travail en noir et la simplification de certaines règles en matière de travail à temps partiel.

297En ce qui concerne le travail de nuit, le Gouvernement rappelle le respect nécessaire des normes internationales en la matière. Dans ce cadre, il faut chercher une solution garantissant, d’une part, la flexibilité requise et assurant, d’autre part, la protection des travailleurs.

298Le Gouvernement se rend pleinement compte du fait que toute adaptation de la législation doit être basée sur une période transitoire réaliste (2 à 3 ans) ainsi que sur une flexibilité adéquate des procédures et qu’elle devrait faire l’objet d’une concertation approfondie avec les partenaires concernés, à l’initiative du Ministre de l’Emploi et du Travail. Cette concertation doit aboutir à un consensus en la matière.

2998. Le Gouvernement a examiné les propositions des partenaires sociaux en matière de congé-éducation. Il a constaté que celles-ci visent à réaliser une application sélective du régime mettant l’accent sur les formations liées à la situation professionnelle et aux perspectives professionnelles et évitant au maximum la désorganisation du travail. Dans cette perspective, le Gouvernement est disposé à chercher une solution afin de trouver un règlement adapté pour les charges de financement du passé.

300A la lumière de ce qui précède, le Gouvernement apportera une collaboration positive à l’exécution de l’accord proposé. A cet égard, le Gouvernement assure aux partenaires sociaux qu’il ne prendra, pendant la durée de l’accord, pas de mesures alourdissant le coût salarial ou hypothéquant l’organisation du travail dans les matières qui sont réglées concrètement par l’accord. Il invitera le Parlement à traiter de façon prioritaire et à approuver les modifications nécessaires de la législation.

301En outre le Gouvernement fait appel aux partenaires sociaux pour collaborer de manière constructive à la conférence de l’emploi qui sera organisée par le Gouvernement au printemps 1993 et qui a pour but d’examiner la manière dont les efforts dans le domaine de l’emploi peuvent être optimalisés, dans le respect des dispositions de l’accord interprofessionnel. Les régions y seront également associées.

302Enfin le Gouvernement organisera avant le contrôle budgétaire, une concertation avec les partenaires sociaux sur la sécurité sociale en général et sur l'assurance-maladie en particulier, ainsi que sur la fiscalité.

Notes

  • [1]
    "La programmation sociale", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°151-152, n°159, n°162, n°168 ; "La programmation sociale interprofessionnelle dans le privé entre 1963 et 1972", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°605 ; "Le sixième accord de programmation sociale interprofessionnelle et la conférence nationale de l’emploi", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°629 ; E. Arcq et M. Piraux, "L’accord interprofessionnel du 13 février 1981", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°914 ; P. Blaise, "L’accord interprofessionnel du 7 novembre 1986", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1137 ; P. Blaise, "L’accord interprofessionnel du 18 novembre 1988", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1223-1224 ; P. Blaise, "L’accord interprofessionnel du 27 novembre 1990" Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1297-1298.
  • [2]
    La VU a quitté de la coalition gouvernementale en septembre 1991.
  • [3]
    Voir "Accords gouvernementaux, réformes institutionnelles et politique budgétaire : janvier-juin 1992", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1363-1364, 1992.
  • [4]
    Loi du 26 juin 1992, Moniteur belge, 30 juin 1992.
  • [5]
    Loi du 28 juillet 1992, Moniteur belge, 31 juillet 1992.
  • [6]
    En matière d’impôts indirects, le projet du gouvernement vise à faire ratifier par une loi des arrêtés royaux pris précédemment (comme en matière de TVA et d’accises).
  • [7]
    Communiqué de presse de la FGTB et de la CSC, 20 octobre 1992.
  • [8]
    La Libre Belgique, 11 juillet 1992.
  • [9]
    "L’effort d’assainissement est insuffisant et l’objectif fixé ne pourra sans doute pas être atteint au moyen des mesures envisagées. De plus, les économies sont pratiquement nulles alors que la fiscalité augmente sensiblement, particulièrement au détriment des travailleurs qualifiés et des cadres. Les PME sont elles aussi fortement frappées", FEB communiqué de presse, 3 septembre 1992.
  • [10]
    Il est à noter que la Centrale des métallurgistes de Belgique (FGTB) et la Centrale chrétienne des métallurgistes de Belgique (CSC) ont signé conjointement avec la fédération patronale des fabrications métallurgistes, Fabrimétal, le Groupement de la sidérurgie et le Groupement des non-ferreux (tous trois membres de la FEB) une lettre ouverte aux ministres participant au conclave budgétaire de juillllet-août 1992 pour défendre le maintien de l’opération Maribel "dans la formule existante" (La Wallonie, 31 juillet 1992).
  • [11]
    Le Soir, 12 novembre 1992.
  • [12]
    Voir la chronologie des réunions et des actions en annexe 2.
  • [13]
    Voir Pierre Blaise, "L’accord interprofessionnel du 27 novembre 1990", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1297-1298, 1990.
  • [14]
    Voir Etienne Arcq, "La concertation sur la compétitivité", ourrier hebdomadaire du CRISP, n°1326, 1991.
  • [15]
    Le Premier ministre avait déjà annoncé de son messag lors de l’émission télévisée "Face à l’opinion" du 4 octobre : "Tout le monde a intérêt à ce qu’un accord interprofessionnel se fasse, mais en maintenant la compétitivité des entreprises. (…) Je suis conscient que le gouvernement a pris avec le budget, et particulièrement avec la réduction de moitié de l’opération Maribel, une part de la marge disponible des entreprises, et les syndicats doivent en tenir compte. (…) Les employeurs exagèrent quand ils disent qu’il n’y a plus aucune marge disponible", La Libre Belgique, 5 octobre 1992.
  • [16]
    Bulletin de la FEB, n°10, octobre 1992, p. 17.
  • [17]
    "Aliger le temps de travail sur la moyenne européenne, supprimer certaines contrainter inposées aux employeurs, ne pas assujettir à l’ONSS les prestations de moins de 2 heures par jour, appliquer le jour de carence, modifier le régime des congés payés pour les jeunes, ne pas abaisser les seuils sociaux et maintenir et améliorer les régimes spécifiques pour les PME", voir P. Blaise, "L’accord interprofessionnel du 18 novembre 1988", Courrier hebdomadaire du CRISP, n°1223-1224, 1988.
  • [18]
    Le temps de travail hebdomadaire est toujours légalement de 40 heures. La plupart des secteurs ont conventionnellement obtenu une diminution ; toutefois, 300.000 ouvriers et employés prestent encore 39 ou 40 heures.
  • [19]
    Déjà abordée à diverses reprises, en particulier lors des négociations interprofessionnelles de 1988 et 1990, la présence syndicale dans les PME se heurte à l’opposition des organisations de classes moyennes. En 1988, il avait été décidé de renvoyer l’examen de cette question au CNT ; au terme de cet examen un rapport est rédigé qui fait état de points de vue inconciliables entre syndicat et patronat. En 1990, l’accord renvoie aux commissions paritaires et aux entreprises le règlement de la question et il invite les organisations patronales représentatives des entreprises concernées par un conflit collectif à le résoudre par le biais des procédures de conciliation ou par des contacts avec les organisations syndicales.
  • [20]
    Outre une augmentation du revenu minimum, les syndicats demandent la suppression des barèmes dégressifs pour les jeunes (entre 18 et 20 ans, leur salaire minimum est un pourcentage compris, selon l’âge, entre 82% et 94% du revenu minimum mensuel moyen garanti ; c’est cette réduction que les syndicats voudraient voir supprimer).
  • [21]
    FGTB-CSC, communiqué de presse du 16 octobre.
  • [22]
    La Libre Belgique, 17-18 octobre 1992.
  • [23]
    Voir annexe 3.
  • [24]
    Le Fonds commun des employeurs est approvisionné par une cotisation patronale, tandis que le Fonds de solidarité des travailleurs est alimenté par des cotisations prélevées sur le pécule de vacances des ouvriers, en vue d’assimiler la période du service militaire, les jours de grève, etc. pour le paiement des vacances annuelles. En 1992, le gouvernement a exercé une ponction de BEF 5 milliards sur ce fonds en boni, ce qui est considéré par cenains comme injuste puisque seuls les ouvriers cotisent.
  • [25]
    FEB Infor, n°44, 1992, supplément, p. IV.
  • [26]
    "L’accord interprofessionnel qui tient compte de ce contexte économique particulièrement difficile".
  • [27]
    FEB, UCM, NCMV, Front vert des organisations agricoles, côté patronal ; FGTB, CSC, CG-SLB, côté syndical.
  • [28]
    Voir annexe 4.
  • [29]
    Cet accord "est ce que nous voulions qu’il soit : une manifestation tangible de solidarité", déclare F. Janssens dans Syndicats du 6 décembre 1992. "L’accord est défendable (…) Il est préférable, de loin préférable, d’avoir un accord que pas d’accord du tout. Le nouveau projet d’accord a un réel contenu, il a quelque chose à offrir, il présente même à nos yeux, en cette période d’austérité économique, un menu bien garni", Télex, CSC, n°92/14.
  • [30]
    La Libre Belgique, 2 décembre 1992.
  • [31]
    FEB, Communiqué de presse à l’issue du conseil d’administration du 26 novembre 1992.
  • [32]
    Le Soir, 27 novembre 1992.
  • [33]
    L’année 1963 et le premier semestre de 1966 ne sont pas couverts par un accord interprofessionnel.
  • [34]
    Cette synthèse est réalisée à partir de différents numéros du Courrier hebdomadaire du CRISP et de l’Année sociale de l’Institut de sociologie de l’ULB.
Pierre Blaise
Depuis 1986, les interlocuteurs sociaux ont renoué avec la pratique des accords interprofessionnels. Conclus pour une durée de deux ans, ceux-ci constituent l'aboutissement de négociations au cours desquelles ils examinent un ensemble de dossiers en cours et de demandes nouvelles. Chaque négociation s'effectue cependant dans un contexte différent qui affecte son déroulement. Fin 1990, la 'crise du Golfe' formait une toile de fond, qualifiée d'incertaine par d'aucuns, et a pesé lourdement sur les négociations. En 1992, la dégradation de la situation économique et les objectifs budgétaires du gouvernement ont failli compromettre non seulement la conclusion d'un accord central, mais déjà l'engagement d'une discussion à son sujet. Pourtant, fin décembre 1992, l'accord interprofessionnel venait à échéance. A défaut d'une reconduction ou d'un renouvellement de ses dispositions, plusieurs d'entre elles comme les efforts menés en vue de la formation et de l'emploi des plus défavorisés sur le marché du travail financés par une cotisation patronale et le paiement pour tous les salariés du double pécule de vacances pour une journée supplémentaire seraient suspendues.
Mis en ligne sur Cairn.info le 08/07/2014
https://doi.org/10.3917/cris.1388.0001
Pour citer cet article
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