CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Dans les livraisons des 26 février et 20 mai 1960 du présent courrier, nous avons examiné la consistance des cinq grandes agglomérations belges et leur situation politique.

2Avant de présenter une solution positive à ce grand problème d’actualité, nous voudrions examiner quelques formules qui ont été avancées au cours du dernier quart de siècle.

3Dans les quelques années qui ont précédé la seconde guerre mondiale, la question de la structure des municipalités a été souvent débattue. Alors déjà tous ceux qui s’intéressaient à la vie locale constataient que la structure des communes n’était plus adaptée aux besoins de l’époque.

4* * *

5En février 1936, la Fédération nationale des conseillers communaux et provinciaux (N.B. de tendance socialiste) met au point une proposition de loi relative à la formation de centres urbains et de cercles ruraux. Ce texte ne concerne donc pas uniquement les grandes agglomérations mais étend son champ d’activité à l’ensemble des communes (voir Annexe I).

6Le système prévoit la division aussi bien des cercles ruraux que des centres urbains en districts administratifs coïncidant avec les limites des anciennes communes ; ces limites peuvent cependant être modifiées par le Conseil communal moyennant approbation du Roi.

7Le projet prévoit la création d’une Commission d’assistance publique unique pour chaque nouvelle entité. Il maintient dans les différents districts les attributions suivantes : population, état civil, milice, cadastre, affaires électorales, instruction des demandes de secours pour l’assistance publique.

8Il permet la délégation des pouvoirs de l’Officier de l’état civil à un fonctionnaire de chaque district et autorise dans les cercles ruraux à faible population le secrétaire communal et le receveur communal à assumer par rotation leur service dans chaque district.

9Le texte admis en février 1936 s’écarte quelque peu du projet élaboré en juillet 1935. Les travaux préparatoires contenaient en effet des dispositions spéciales pour les communes de plus de 100.000 habitants. Nous croyons utile de reproduire un passage de l’article 2 de cet avant-projet.

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"Si la commune nouvelle compte plus de 100.000 habitants, la loi qui l’érige peut, en vue de l’élection de son conseil, la diviser en sections électorales coïncidant avec une ou plusieurs des anciennes communes incorporées, de telle façon qu’il reviendra à chacune d’elles un nombre égal, ou à peu près, de conseillers. La loi déterminera le nombre de conseillers à élire la première fois pour chacune de ces sections.
"Il appartient au conseil communal, moyennant l’approbation du Roi, de modifier le nombre et les limites de ces sections et de mettre en rapport, avec le chiffre de la population déterminé par le dernier recensement décennal, le nombre de conseillers à élire dans chacune d’elles.
"Les dispositions du code électoral relatives à l’apparentement des listes et des candidatures isolées pour les élections législatives et provinciales sont applicables éventuellement aux élections communales.
"Les électeurs de chaque section ne concourent qu’à l’élection des conseillers de leur section.
"Les éligibles le sont dans toutes les sections et non seulement dans celle où ils ont leur domicile. Ils représentent toute la commune."

11Le texte initial mettait en outre l’accent sur la nécessité de réunir des entités de même nature ; il poursuivait ainsi l’homogénéité des communes nouvelles. Le texte définitif a été fortement élagué et ramené aux principes généraux communs aux centres urbains et aux cercles ruraux.

12En 1947, le texte a été remanié ; le résultat en a été publié par Fernand BRUNFAUT dans son ouvrage "Condition municipale" (Ed. Le Travail. Verviers – 1951).

13Par rapport au projet d’avant-guerre, nous ne notons de différence qu’en ce qui concerne la composition des Conseils communaux et des Collèges échevinaux et dans l’appellation de Premier Bourgmestre donnée au premier magistrat de la nouvelle commune, chaque district étant placé sous la direction d’un bourgmestre.

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15A la même époque (1936 ou 1937) remonte une proposition de Monsieur Robert WILKIN, Directeur du Service du Contentieux de la Ville de Liège.

16Nous croyons intéressant d’en donner en annexe le texte qui, à notre connaissance, n’a pas encore été publié (Annexe II).

17Le projet WILKIN s’applique aux communes de toute importance. Il constitue une entreprise générale et systématique de regroupement des communes, par l’intermédiaire d’une loi de cadre. La procédure envisagée est la suivante : chaque commune sera appelée à examiner sa propre situation et à envisager soit son rattachement à une autre, soit l’annexion à elle-même d’une ou plusieurs autres. Un délai est fixé pour cet examen. La décision appartient au Roi, qui donnera leur dénomination aux nouvelles communes.

18Le nombre de conseillers est celui de la loi communale.

19Le projet prévoit la résiliation de plein droit à leur plus prochaine échéance de tous les contrats, concessions et obligations quelconques souscrits par les communes fusionnées ainsi que par les administrations et établissements publics qui en dépendent, de même que des constitutions de sociétés intercommunales.

20Comme nous l’avons dit plus haut, la formule du projet WILKIN est la fusion. Elle étend l’unification de l’administration à tous les établissements publics et d’utilité publique ainsi qu’aux Commissions d’assistance publique. La centralisation de tous les services doit être réalisée. Là où la situation l’exige, certaines subdivisions peuvent être créées pour l’état civil, la population et la milice. Chaque district est dirigé par un Officier d’état civil adjoint et un suppléant à désigner par le Collège des Bourgmestre et Echevins parmi les conseillers communaux ; à défaut de ces deux personnes, le remplacement est fait par les membres du Collège et du Conseil communal, suivant leur ordre de préséance.

21Le projet règle en détail le passage de l’ancien régime au nouveau : transfert des droits et obligations, reprise du personnel, etc.. ; il réalise l’assimilation du personnel des communes de plus de 100.000 habitants aux grades de l’Etat.

22L’article 8 supprime les emplois de cabinet pour le Bourgmestre et les échevins. L’article 9 organise la direction de l’administration. L’approbation des comptes communaux est donnée à la Cour des Comptes. Pour ce qui est de la tutelle, l’échelon provincial est supprimé ; ce nouveau mode de tutelle à exercer directement par le Ministère de l’Intérieur, est réglé par l’article 11.

23En bref, le projet WILKIN tend à réaliser la fusion des communes avec maintien de certaines compétences aux anciennes autorités.

24* * *

25En 1937, le Centre d’Etude pour la Réforme de l’Etat (C.E.R.E.) a déposé son rapport qui fut publié dans l’ouvrage intitulé "La Réforme de l’Etat".

26En raison du fait qu’à la même époque, le Baron Holvoet était chargé par le Gouvernement d’un travail sur les grandes agglomérations, le C.E.R.E. n’aborde pas ce problème et ne s’arrête spécialement qu’aux petites communes, pour la fusion desquelles il propose le texte d’un avant-projet de loi.

27Un certain nombre de considérations figurant dans l’introduction et dans le rapport proprement dit sont néanmoins d’une réelle utilité pour le problème qui nous occupe, vu que les ordres de préoccupations sont identiques.

28Le document rappelle la nécessité d’adapter notre organisation politique et administrative à la situation de fait.

29L’exposé des motifs de l’avant-projet de loi constate que le principe des intercommunales n’est pas applicable à l’administration communale proprement dite, que la loi sur les intercommunales devrait être assouplie et l’esprit étroitement particulariste de certaines administrations communales amendé.

30La solution du problème envisagé est la fusion :

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"On atteint ainsi le mal dans sa racine même en créant de nouvelles unités administratives plus larges qui disposeront de ressources suffisantes en hommes et en argent et pourront exercer avec aisance les multiples pouvoirs impliqués dans l’autonomie communale ….
"La fusion des communes tend donc à constituer des unités administratives plus fortes et plus riches qui pourront recruter un personnel plus qualifié et pourront remplir plus complètement leur importante mission. La réforme implique un second avantage, qui n’est pas négligeable. Elle diminue les charges publiques.
"Economies à l’échelon communal d’abord. Les frais d’administration et de bureau seront réduits : l’entretien des maisons communales, la confection des listes électorales et de milice, les jetons de présence et indemnités accordés aux magistrats communaux, seront moins onéreux.
"Par ailleurs, des économies seront également faites par les administrations centrales qui sont chargées de la tutelle des communes. Les frais de surveillance diminueront avec le nombre des autorités locales".

32Le rapport constate aussi que la fusion "loin de mettre en péril l’autonomie communale tend au contraire à la renforcer" et que des communes plus importantes "pourront plus aisément conserver toute leur indépendance".

33Techniquement, la Commission propose une loi de cadre qui fixerait les principes généraux de la réforme.

34Dans chaque province, doit être constituée, sous la présidence du Gouverneur, une commission dont la consultation serait obligatoire. Pour faciliter les fusions, l’Etat peut, dans certains cas exceptionnels, liquider des interventions à fonds perdu.

35La fusion ne peut être arbitraire mais doit tenir compte de certaines règles générales : superficie, éloignement du centre, moyens de communication, langue. Elle estime que les entités nouvelles doivent constituer de réelles unités économiques et sociales.

36Bien qu’elles ne concernent pas les grandes agglomérations urbaines, on voit que la plupart des considérations rappelées ci-dessus valent aussi pour elles.

37* * *

38Nous allons compléter l’examen des solutions mises au point dans l’immédiat avant-guerre par la solution avancée par le Baron Holvoet.

39Nous examinerons ensuite la solution donnée pendant la guerre par les secrétaires généraux.

40Dans la période postérieure à la guerre, nous parcourrons les solutions préconisées par :

  • l’Union des Villes et Communes belges,
  • le Conseil Central de l’Economie,
  • le Sénateur et ancien Ministre de l’intérieur Pierre VERMEYLEN.

41Nous terminerons en nous penchant sur la position du ministère de l’Intérieur au cours des dernières décennies.

I – La solution du Baron Holvoet

42Un arrête royal du 1er décembre 1936 a chargé le Baron Holvoet, Gouverneur de la province d’Anvers "de présenter au Gouvernement un rapport examinant sous tous leurs aspects les problèmes que suscite l’existence des grandes agglomérations urbaines dans notre pays et indiquant dans des conclusions précises les réformes qui pourraient être introduites tant sous l’aspect politique et administratif que sous l’aspect fiscal et financier".

43Le rapport du Commissaire royal a été publié dans un ouvrage intitulé "Les grandes agglomérations urbaines" (imprimerie Ghiesbreght, Bruxelles, 1937). Il porte sur les agglomérations de Bruxelles, envers, Liège, Gand et Charleroi. Les communes sur lesquelles porte l’étude ont été indiquées dans le bulletin du CRISP n° 54 du 26 février 1960 (Voir les annexes sous les lettres Q et R).

44Monsieur HOLVOET ne précise pas les bases qui ont servi à sélectionner les communes.

45Nous rappelons que le travail du Baron HOLVOET constitue en quelque sorte le complément aux travaux du C.E.R.E.

46Il analyse les secteurs administratifs qui pâtissent d’un défaut d’unité et détecte les suivants :

  • police,
  • services d’incendie,
  • services d’utilité publique distribués au domicile : eau, gaz, électricité, etc…,
  • urbanisation,
  • hygiène publique : égouts, parcs publics, plaines de sport, immondices,
  • instruction publique et beaux-arts,
  • moyens de transport,
  • assistance publique.

47Il accorde une attention spéciale aux déficiences de la gestion des ports, et aux finances des communes constituant les grandes agglomérations.

48Les considérations qu’il émet sur l’aspect constitutionnel et légal du problème revêtent un intérêt réel, de même que les avis des communes intéressées, la rétrospective des solutions proposées et l’exposé des formules appliquées à l’étranger.

49La partie la plus importante de l’ouvrage est constituée par la présentation des reformes à introduire.

50A.– Le Baron HOLVOET envisage tout d’abord des réformes susceptibles d’améliorer le fonctionnement des communes de toute importance, notamment des réformes destinées à régler les questions d’intérêt régional.

511.– L’auteur constate que l’équilibre de la pyramide administrative est rompu par l’importance excessive prise par la cellule communale. Il attribue ce mal à la quantité trop grande de bourgmestres et d’échevins dans les deux Chambres.

52Fin 1933, la Chambre, composée de 187 membres, groupait 125 mandataires communaux, dont 45 bourgmestres et 24 échevins ; fin 1935, sur un même total, les mandataires communaux représentaient 131 unités ; en 1936, sur 202 députés, 111 étaient mandataires communaux.

53L’auteur pense que le maintien de ces cumuls compromet gravement "l’essor harmonieux du pays pour ne servir que des intérêts locaux sinon électoraux". Négociant directement avec le pouvoir central, les membres des exécutifs communaux qui font partie du Parlement ignorent le pouvoir provincial et vident celui-ci de la plus grande partie de son importance.

54Le Baron HOLVOET pose comme base de toute réforme l’incompatibilité entre le mandat parlementaire et le mandat communal ; il estime en outre que ce serait la l’occasion de réduire les effectifs des Chambres.

55Son voeu va à la formation de mandataires spécialisés dans l’exercice du mandat communal et "mettant à la disposition de leur cité les trésors de leur expérience administrative plutôt que les ressources de leur influence parlementaire".

562.– Le rapport du Baron HOLVOET regrette que les dispositions de la loi provinciale relatives à l’évocation par le Conseil provincial des affaires intéressant plusieurs communes soient restées lettre morte. C’est d’après lui le motif principal pour lequel les problèmes que suscite l’existence des grandes agglomérations urbaines n’a pas été résolu jusqu’ici.

57Il propose en conséquence l’évocation par le Conseil provincial des objets administratifs intéressant plusieurs communes, évocation qui ne doit jouer que dans les cas où l’accord entre communes est absolument impossible.

58Le Conseil provincial doit en pareil cas se substituer aux communes défaillantes et régler à leur place l’objet administratif pendant ; cette mission du Conseil provincial doit s’étendre non seulement aux travaux mais aussi aux services permanents nécessaires à leur entretien et à leur utilisation dans l’intérêt des communes.

59L’auteur suggère de compléter la loi sur les associations de communes en vue de donner des pouvoirs accrus aux mandataires désignés par les communes.

60Il propose les adaptations nécessaires des textes légaux et croit que si l’évocation par le Conseil provincial des affaires d’intérêt régional était mieux organisée, leur solution en serait grandement facilitée et améliorée.

61B.– Le Commissaire royal estime que ces réformes ne sont pas suffisantes pour les centres agglomérés.

62Il rejette successivement le système de fusion et la création de nouvelles provinces. Son système prend pour base les propositions de loi élaborées pour l’agglomération bruxelloise par MM. DE BUE, Ad. Max et consorts entre 1920 et 1925 ; il est très proche de la solution proposée par Ad. MAX.

63Une loi de cadre doit permettre la création d’organes élus au second degré et appelés Conseils intercommunaux. Pour chaque agglomération, l’arrêté constitutif fixera les communes faisant partie du district métropolitain ainsi que les matières de la compétence du Conseil Intercommunal. La présidence de celui-ci sera assumée par le Bourgmestre de la commune-centre. La gestion journalière sera assurée par un bureau exécutif présidé par ce bourgmestre.

64Le Conseil Intercommunal n’a pas de compétence fiscale mais détermine la part contributive de chaque commune.

65Le Haut Commissaire voit dans cette formule le grand avantage qu’elle se prête à des réadaptations fort aisées (simple arrêté royal) aussi bien pour l’addition de nouvelles communes que pour l’octroi de nouvelles compétences au Conseil Intercommunal. Il reconnaît que certaines objections peuvent être avancées, notamment le fait qu’un organisme intermédiaire supplémentaire est créé.

66Examinons comment le Baron HOLVOET voyait en 1937 l’application de sa loi de cadre.

1 – Aire géographique

67Dans le Courrier du CRISP du 26 février 1960, nous avons donné (Annexes II à VI, lettre Q) les communes qui, selon l’auteur, doivent être incorporées dans les districts.

68Deux remarques en ce qui concerne l’agglomération liégeoise. Il devrait y avoir deux districts : Liège et Seraing. Bien qu’il reconnaisse que les communes de la Basse-Meuse (Hermalle, Argenteau, Vivegnis, Cheratte) constituent le prolongement économique de l’agglomération liégeoise, il ne les adjoint pas à celle-ci.

2 – Matières administratives

69Le compétence du Conseil Intercommunal doit porter successivement et d’après les nécessités locales sur les objets suivants : incendie, plans et travaux d’urbanisation, immondices, police, distribution d’eau, de gaz et d’électricité, enseignement technique etc… et de façon plus générale, sur toutes les matières pour lesquelles l’auteur a constaté un défaut d’unité dans la gestion.

3 – Finances

70Le Baron HOLVOET n’accorde aucun pouvoir fiscal au Conseil Intercommunal. La trésorerie des super-communes serait assurée pour une bonne part par la création d’un "fonds d’égalisation pour les grandes agglomérations", alimenté par l’Etat (fonds estimé à 150 millions en 1937). Le Conseil détermine simplement la participation incombant à chacune des communes lorsqu’un objet les intéresse toutes. Si un travail n’en concerne que quelques-unes, la répartition se fait entre celles-ci. Dans tous les cas, un recours au Roi est ouvert aux communes.

71Le rapport suggère aussi la reprise par l’Etat de certaines dépenses d’intérêt général telles que les frais relatifs à la Justice, les dépenses d’enseignement moyen, les dépenses pour les plaines de manœuvre et pour le chômage.

72Nous serions incomplets si nous n’ajoutions pas un mot en ce qui concerne la gestion des ports. L’auteur a établi la déficience de l’organisation existante. Il suggère l’adoption pour envers et Gand de la formule admise pour le port de Monsin à Liège.

73L’interférence de l’intérêt local et de l’intérêt général milite en effet en faveur d’une solution qui dépasse les bornes des municipalités. La gestion doit être souple et affranchie des formalités administratives ; une place pourrait être réservée aux organismes représentant le patronat et le monde du travail vivant de la vie du port.

II – Les réalisations des Secrétaires généraux

74Nous voyons qu’a la veille de la seconde guerre mondiale, la question de la modification des structures des communes est d’actualité, qu’elle fait l’objet de discussions constantes et d’études et que même des textes de propositions de loi sont établis.

75A cette époque aussi le ministère de l’Intérieur pousse activement des travaux, dont les secrétaires généraux vont s’emparer.

76Nous rappelons que, pendant la guerre, un double régime juridique a été appliqué en Belgique. D’une part, les autorités d’occupation ont pris toutes les mesures qu’elles estimaient utiles à la sécurité et à la subsistance des troupes d’occupation ainsi qu’au maintien de l’ordre public. D’autre part, la loi du 10 mai 1940 relative aux délégations de pouvoirs en temps de guerre a permis aux secrétaires généraux de se substituer aux pouvoirs législatif et exécutif.

77Par arrêté du 1er septembre 1941 est créé au Ministère de l’Intérieur et de la Santé publique un Commissariat du Royaume aux grandes agglomérations, qui est chargé de réaliser l’unification administrative des cinq grandes agglomérations. Un arrêté du 18 mai 1942 (M.B. 25-26-27 mai 1942) permet au secrétaire général du Ministère de l’Intérieur de désigner au Commissariat d’autres agglomérations à unifier.

78L’œuvre des secrétaires généraux en la matière se présente comme suit :

  • arrêté du 15 septembre 1941 créant le Grand-Anvers (M.B. 21.9.1941)
  • arrêté du 15 mai 1942 portant création du Grand-Gand (M.B. 29.5.1942)
  • arrêté du 20 juin 1942 portant constitution du Grand-La Louvière (M.B. 11.7.1942)
  • arrêté du 15 juillet 1942 portant constitution du Grand-Charleroi (M.B.27-28.7.1942)
  • arrêté du 24 septembre 1942 créant le Grand-Bruxelles (M.B. 27.9.1942)
  • arrêté du 10 octobre 1942 portant constitution du Grand-Bruges (M.B. 14.10.1942)
  • arrêté du 25 octobre 1942 portant constitution du Grand-Liège (M.B. 1.11.1942).

79Pour l’indication précise des communes touchées par la constitution des cinq grandes agglomérations, nous renvoyons au Courrier du CRISP du 26 février 1960 (Annexes II à VI sous lettre C).

80Dans une étude publiée dans la Revue de l’Administration et du Droit administratif de la Belgique (1944, p. 146), M. Gérard DUMONT, Secrétaire communal ff. du Grand-Liège signalait qu’on pouvait s’attendre à l’unification des agglomérations de Verviers et de Mons.

81Toutefois, le Commissariat aux grandes agglomérations a été dissous à partir du 1er janvier 1943 "sa tâche étant achevée".

82En son article 7, la loi du 10 mai 1940 permettait au Roi d’annuler dans les trois mois de la cessation de l’état de guerre les actes pris par les autorités délégataires qui seraient sortis leurs attributions, seraient contraires aux lois ou blesseraient l’intérêt général. C’est sur cette base qu’en 1944, les arrêtés des secrétaires généraux créant les grandes agglomérations ont été mis à néant.

83Avant d’examiner la technique des secrétaires généraux, signalons encore que, par ordonnance du 26 janvier 1943, l’autorité occupante avait interdit de critiquer devant la Justice la légalité de la constitution des grandes agglomérations.

84* * *

85La solution adoptée par les secrétaires généraux est celle de la fusion pure et simple avec dentralisation aussi poussée que possible et maintien dans les districts du strict minimum d’attributions et de services.

A – Organes

86Une circulaire du 13 avril 1941 du secrétaire général du Ministère de l’Intérieur et de la Santé Publique, adressée à tous les bourgmestres, les avait informés qu’une décision des autorités d’occupation du 11 avril interdisait toute activité des Conseils communaux pour la durée de la guerre.

87Les arrêtés créant des agglomérations urbaines édictent pour les communes absorbées la dissolution des Collèges échevinaux, des Conseils communaux et des Commissions d’Assistance publique. Pour la Ville-centre, la Commission d’Assistance publique est également dissoute. Les Collèges échevinaux furent complétés au gré des secrétaires généraux ; les membres des nouvelles Commissions d’Assistance publique furent désignés. Le nombre des échevins a excédé dans certains cas le maximum prévu par la loi communale. Voici les chiffres qui furent décidés :

tableau im1
Anvers – Bruxelles 12 Liège 10 Gand – Charleroi 9 Bruges – La Louvière 6

88Les arrêtés, règlements et ordonnances d’administration extérieure des communes incorporées en vigueur à la date des arrêtés restent d’application jusqu’au jour où les autorités de la grande ville en décident autrement. Les règlements d’administration intérieure sont abrogés dans les anciennes communes et remplacés par ceux de la ville qui absorbe, à partir de la date où est constituée la grande agglomération.

B – Territoire

1 – Limites

89Le souci des Secrétaires généraux est de réunir en un ensemble politique et administratif tout ce qui constitue un tout géographique et économique. La fixation des limites tient compte des nécessités économiques et de l’aménagement du territoire : bois, zones de verdure, prévision de développement des constructions, aménagement des cités résidentielles, conservation et aménagement des sites, plaines de sport à créer, etc…

90Les œuvres sociales, le ravitaillement, la protection contre les épidémies et l’incendie, l’amélioration des services publics, l’organisation de l’enseignement, de la vie culturelle et des délassements, le maintien de l’ordre sont également présentés comme ayant servi de base à la détermination du périmètre des agglomérations.

91La volonté de soumettre toute la police à une seule autorité par agglomération a été un élément sérieux dans la modification de la structure. Les autorités centrales des grandes villes dont le pouvoir d’action s’étendait à tout le territoire disposaient ainsi d’un corps communal de police étendu fonctionnant suivant des directives uniques. Le premier arrêté relatif à envers indique nettement dette utilité d’unifier la police. L’objectif rentrait dans les vues du pouvoir occupant.

92Les arrêtés suivants sont plus discrets sur cet aspect de la fusion.

93Dans la plupart des cas, l’annexion porte sur des communes entières, dans quelques-uns cependant sur une partie seulement du territoire.

2 – Divisions

94Des districts doivent être créés : le Collège en fixe le nombre et la circonscription. Dans certains cas, les limites des anciennes communes ont été respectées, dans d’autres pas.

C – Attributions des districts

95Il s’agit essentiellement de l’état civil. En général, le chef du district est un fonctionnaire désigné par le Collège échevinal pour la raison qu’il a sa confiance ; il est chargé par délégation des attributions de l’état civil.

96En fait, au siège soit des anciennes communes, soit des districts nouveaux sont maintenus des services administratifs assez importants, de façon générale ceux qui sont en rapport avec le public (ravitaillement, recettes, assistance publique, etc…) ; ces services sont placés sous l’autorité administrative des chefs de districts.

97Une centralisation absolue est réalisée pour la police, les finances (budget) et les affaires générales.

D – Appréciation

98Nous avons vu que les réalisations des secrétaires généraux se sont fondées sur des travaux effectués au Ministère de l’Intérieur pendant les années qui ont précédé la seconde guerre mondiale. Il est certain qu’en l’absence de ces études systématiques, les secrétaires généraux n’auraient pas pu réaliser leur œuvre en quelques mois.

99Le système de guerre consiste en une fusion aussi intégrale que possible. Nous verrons à la fin de cette étude qu’il correspond à la politique de l’entre-deux-guerres du Ministère de l’Intérieur.

100Au cas où le même pouvoir se serait maintenu dans une période normale, il est impossible de prévoir si des innovations auraient été apportées dans le domaine de l’élection des Conseils communaux ou dans d’autres. Tout permet cependant de penser qu’aucun changement notable n’aurait été apporté et que la centralisation serait restée totale.

101En général, les limites données aux agglomérations sont bonnes. Mais la centralisation réalisée par les secrétaires généraux nous paraît excessive t les districts étaient vidés d’une bonne part de leur vie et de leur substance ; si, comme on pouvait s’y attendre, le district n’avait pas servi de base à l’élection des conseillers communaux, il eût été à craindre que l’organe électif ne fut coupé de la population.

102Quoi qu’il en soit, cette réalisation a été sans lendemain. On doit aussi constater que les secrétaires généraux n’ont pas réellement innové. Ils ont réalisé leur œuvre à un moment particulièrement délicat et malheureux, ce qui va mettre le problème des grandes agglomérations en villeuse pendant de nombreuses années.

103Il est regrettable qu’au lendemain de la guerre, ces réalisations aient été supprimées. Il eût mieux valu d’après nous les conserver moyennant des adaptations destinées à mieux les modeler sur l’esprit général de nos institutions.

III – Proposition de l’Union des Villes et Communes belges

104En juin 1953, le Congrès de l’Union internationale des Villes et Pouvoirs locaux, qui s’est tenu à Vienne, s’est penché sur l’organisation des grandes villes.

105La tendance des travaux a été résumée comme suit par M. J. BRACOPS, Député, Bourgmestre d’Anderlecht, dans le rapport introductif qu’il a établi pour le Congrès d’envers les l6 et 17 octobre 1954 de l’Union des filles et Communes Belges :

106

"favoriser dans le cadre des grandes agglomérations toutes les collaborations techniques nécessaires et maintenir les déconcentrations politiques indispensables à l’exercice d’une démocratie bien comprise des pouvoirs administratifs locaux".

107Après avoir étudié le rapport de M. BRACOPS, qui brosse une rétrospective de la situation telle qu’elle se présente en Belgique et établit l’état du moment de la question, le Congrès d’Anvers décide de "charger une commission à constituer au sein de l’Union, en accord avec le Ministre de l’Intérieur, d’étudier le problème des grandes agglomérations…. en collaboration étroite avec le département de l’Intérieur d’une part et les représentais des communes intéressées de l’autre". La tâche de cette commission doit porter tout particulièrement sur les aspects financiers, techniques, moraux et sociaux.

108Le groupe de travail fut composé de 15 personnes. M. GRUSLIN, Gouverneur de la province de Namur, assuma la présidence, M. de GRUNNE, Directeur de l’Union des Villes, le secrétariat.

109Le Congrès de l’Union des 23-24 juin 1956 tenu à Liège se penche une nouvelle fois sur les problèmes structurels des communes et "charge l’Union des Villes et sa Commission des grandes agglomérations de déposer des conclusions à lui soumettre le plus rapidement possible dans ce domaine".

110Dès la fin de l’année 1956, les travaux de l’Union des Villes sont suffisamment avancés pour permettre à M. GRUSLIN de présenter au colloque organisé les 17 novembre et 1er décembre 1956 par l’Institut belge de Science politique la solution du groupe de travail au problème des grandes agglomérations. La formule exposée a fait par la suite l’objet d’adaptations d’ordre secondaire, notamment en ce qui concerne le bureau d’agglomération.

111Les 18 et 19 mai 1957 se tient à Saint-Nicolas-Waas un nouveau Congrès de l’Union des Villes et Communes belges. Le rapport introductif signale que les résultats des travaux de la Commission des grandes agglomérations ont été communiqués au Conseil d’administration et au Conseil général de l’Union et que ceux-ci ont approuvé les objectifs poursuivis et ont décidé de soumettre l’ensemble du problème au Congrès.

112La séance du 19 mai voit l’exposé de M. PICAVET et un certain nombre d’interventions intéressantes parmi lesquelles nous notons celle de M. MERCHIERS, alors Bourgmestre de Gand, qui reproche au projet de ne pas aller assez loin en ne préconisant pas la fusion, de présenter une structure lourde et de risquer d’immenses difficultés d’application.

113Dans ses conclusions, le Congrès "constate la nécessité toujours plus grande de réaliser une réforme de ce statut (c.à.d. des grandes agglomérations) dans le sens d’une coordination plus poussée de l’action des communes dans le cadre des grandes agglomérations. Il verse au débat les conclusions du groupe de travail". Il recommande au groupe de poursuivre l’étude du problème, de se tenir en rapport avec le Ministre de l’Intérieur et d’organiser une réunion spéciale où It question serait à nouveau débattue.

114Cette motion peut être considérée comme l’adoption de principe par l’Union des Villes du système arrêté par le groupe de travail.

115Le 28 mars 1956, l’Union des Villes consacre un "Forum" au problème des grandes agglomérations. Le dernier état des travaux du groupe de travail y est présenté et fait l’objet d’un débat intéressant portant notamment sur l’aspect constitutionnel de l’organisation à double étage.

116* * *

117La solution de l’Union des Villes s’inspire de divers projets antérieurs (DE BUE, MAX, etc…) et aussi des travaux du Commissaire royal de 1957.

A – Principes généraux

1181) Il ne s’agit pas d’une loi de cadre. C’est le Parlement lui-même qui détermine :

  1. les agglomérations touchées,
    Au départ, il doit s’agir des cinq grandes agglomérations de Bruxelles, Anvers, Liège, Gand et Charleroi.
  2. l’aire géographique,
    L’avant-projet de loi n’indique pas les communes individuellement mais l’exposé des motifs se réfère en principe à celles que le Baron Holvoet visait.
  3. la compétence ratione materiae et ratione loci du nouvel organisme.

119Seule la loi peut étendre le système à d’autres agglomérations, d’autres communes et d’autres objets.

1202) Le système envisagé est à double étage.

121Les communes actuelles sont maintenues avec leurs frontières présentes et la plus grande partie de leurs compétences. Un nouvel organisme supracommunal est créé : le Conseil d’agglomération, composé en partie de conseillers élus au second degré et en partie de techniciens cooptés.

B – Structure

1 – Le Conseil d’agglomération

122Les conseillers d’agglomération seront élus sur la base de 1 pour 15.000 habitants ; le système tend ainsi à rétablir au niveau de l’agglomération la représentation proportionnelle. Ces conseillers seront élus par les membres des conseils communaux.

123A concurrence du tiers des conseillers d’agglomération ainsi élus, seront cooptés des conseillers choisis en raison de leurs connaissances techniques et administratives. La cooptation se fera d’après le système utilisé au Sénat.

124Au total donc, 3/4 des membres élus au second degré et l/4 de techniciens cooptés.

2 – Le Bureau d’agglomération

125Le Bureau d’agglomération est le pendant du Collège échevinal sur le plan communal. Il dispose de pouvoirs propres assez limités. Il est essentiellement un organisme collégial et consultatif pour le président d’agglomération.

126Dans les positions de l’Union des Villes, il y a eu des variantes selon les époques pour la composition et le mode de désignation des membres du bureau. Initialement, le groupe de travail en fixait uniformément le nombre à B (compte non tenu du président), quelle que soit l’importance de l’agglomération, et prévoyait leur désignation par scrutins successifs.

127Au dernier stade (voir notamment le rapport présenté au "Forum" du 28 mars 1958 : Mouvement communal, n° 319, juin 1958, page 300), le nombre des membres est variable suivant les agglomérations :

  • 8 pour Bruxelles,
  • 6 pour Anvers,
  • 5 pour Liège,
  • 3 pour Charleroi et Gand,
    (toujours compte non tenu du Président).

128L’élection se fait à la représentation proportionnelle, ce qui constitue une innovation dans notre droit public.

3 – Le Président

129Il préside à la fois le Conseil et le Bureau d’agglomération. Il est nommé par le Roi sur une liste double de candidats, dressée par le Conseil d’agglomération. Ses pouvoirs sont assez étendus, notamment en matière de police.

4 – Le personnel

130Il sera peu nombreux, mais de qualité. Il comprendra un secrétaire, un receveur et des techniciens.

C – Compétence

131Elle est nettement définie et limitée par la loi. Elle porte sur des questions d’ordre essentiellement technique. On peut en résumer la portée comme suit :

  1. un pouvoir de décision limité dans certains domaines ;
  2. un pouvoir consultatif obligatoire dans d’autres matières ;
  3. pas de compétence dans les domaines politiques importants, tels que l’instruction publique, la politique sociale, la politique financière et budgétaire.

132Initialement, la compétence s’étendra, selon des modalités et dans des limites variables suivant les objets, aux domaines suivants :

  • urbanisme,
  • réglementation de la bâtisse,
  • établissement de la voirie d’intérêt d’agglomération,
  • établissement de parkings,
  • circulation,
  • police.

133Il nous paraît utile de donner quelques précisions sur cette dernière attribution et sur les innovations dont elle est assortie. Les polices locales sont maintenues avec leur structure actuelle mais elles doivent obéir aux ordres de réquisition du président d’agglomération. Il n’y a pas de police d’agglomération.

134Le Conseil d’agglomération détient un pouvoir réglementaire dans les trois matières suivantes : urbanisme, bâtisse, police de la circulation et de la voirie.

135Le Président d’agglomération est assisté d’un état-major de spécialistes qui veille à promouvoir l’unification de la circulation et apporte une aide technique pour le maintien de l’ordre.

136Ses pouvoirs sont strictement définis et limités, le reste étant maintenu dans la compétence des communes proprement dites. Il s’agit des pouvoirs suivants :

  1. en cas d’urgence, réglementation en matière de circulation ;
  2. maintien de l’ordre, notamment droit de réquisition avec l’accord du Gouverneur ;
  3. avis et recommandations aux bourgmestres pour améliorer et coordonner l’organisation et les activités des polices locales.

D – Finances

137Le budget est voté par le Conseil d’agglomération. Il est alimenté par :

  1. une dotation de l’Etat,
  2. des redevances et des produits de services (notamment des taxes rémunératoires sur les parkings),
  3. les contributions obligatoires des communes.

138Le Conseil d’agglomération n’a aucun pouvoir fiscal.

E – Tutelle

139Le contrôle est exercé par le Roi sans intervention de la Députation permanente. Le Roi peut déléguer ses pouvoirs au Gouverneur de la province.

NOTE

140Les chapitres suivants de ce dossier sur les grandes agglomérations seront publiés ultérieurement :

  • Chapitre IV. Avis du Conseil Central de l’Economie.
  • Chapitre V. Proposition de loi de M. VERMEYLEN portant création de Conseils métropolitains.
  • Chapitre VI. Position du Ministère de l’Intérieur.

Annexe I

Projet de la Fédération Nationale des Conseillers communaux et provinciaux (Février 1936)

LA FORMATION DE CENTRES URBAINS ET DE CERCLES RURAUX

Projet de loi

141Article 1er.– Différentes communes peuvent être fusionnées pour former un centre urbain ou un cercle rural. Des lois spéciales détermineront les communes appelées à former immédiatement des centres urbains ou des cercles ruraux.

142Lorsqu’une localité demandera sa réunion à une autre commune, à un centre urbain ou à un cercle rural déjà formé, un projet de loi sera immédiatement soumis au Parlement par le Ministre de l’Intérieur.

143Article 2.– En cas de formation d’un centre urbain ou d’un cercle rural, dans les trois mois de la promulgation de la loi, il est procédé à l’élection d’un conseil communal unique pour toute l’étendue de la commune nouvelle.

144Les élections sont faites suivant les listes électorales en vigueur dans chacune des communes fusionnées au moment de la promulgation de la loi.

145Il sera procédé à l’installation du nouveau conseil par les soins du gouverneur de la province, aussitôt après validation de l’élection par l’autorité supérieure.

146Les pouvoirs des anciens conseils, collèges échevinaux et bourgmestres, expireront le jour de l’installation du nouveau conseil.

147Les pouvoirs des nouveaux conseils expireront à la date normale des élections communales. A titre exceptionnel, il pourra être décidé dans la loi de fusion, que les pouvoirs des conseillers à élire seront renouvelés pour une période de six ans s’ils n’ont pas siégé pendant plus de deux ans au moment de la dissolution normale des conseils.

148Article 3.– La nouvelle commune est substituée aux obligations et aux droits civils des anciennes communes dont elle prend à charge tout l’actif et tout le passif.

149Article 4.– Les membres du personnel des administrations fusionnées pourront, à leur demande, être admis à la pension. Les membres restant en fonctions seront admis dans les cadres administratifs de la nouvelle commune, selon les règles à fixer par le conseil communal. Ils conserveront le bénéfice des avantages leur acquis par les barèmes ou les règlements de pensions en vigueur dans les anciennes communes. Ils pourront toutefois réclamer l’application des barèmes et statuts à élaborer par le conseil communal pour le personnel nouveau.

150Le conseil communal procédera, lors de sa première séance, à la nomination d’un secrétaire communal et d’un receveur communal.

151Article 5.– Les centres urbains et cercles ruraux seront divisés en districts administratifs, dont les limites coïncideront avec les anciennes limites des localités fusionnées. Ces limites pourront toutefois être modifiées par le conseil communal, moyennant approbation du Roi.

152Article 6.– Chaque district administratif sera placé sous la direction d’un fonctionnaire qui établira la liaison entre les administrés et les services centraux, notamment en matière de population, état-civil, milice, cadastre, affaires électorales, instruction des demandes de secours pour l’assistance publique.

153L’officier de l’état-civil de la commune nouvelle pourra déléguer ses pouvoirs dans chaque district à un fonctionnaire.

154Dans les centres urbains, sauf exceptions à déterminer par le conseil communal, moyennant approbation du Roi, il y aura un commissariat de police pour chaque district.

155Dans les cercles ruraux à faible population, les services administratifs des districts pourront être assurés par le secrétaire communal, qui fonctionnera alternativement dans chaque district, suivant un horaire à déterminer par le conseil communal.

156Dans chaque commune, il n’y aura qu’un receveur communal. Mais dans les cercles ruraux, le receveur pourra être astreint à effectuer les recettes alternativement dans chaque district suivant horaire à déterminer par le conseil.

157Article 7.– Les conseils communaux des centres urbains et cercles ruraux procèderont immédiatement à la nomination d’une commission d’assistance publique. Celle-ci entrera en fonctions après validation de l’élection.

158Article 8.– La loi décidant de la fusion de différentes communes détermine le nom de la commune nouvelle et le siège de la nouvelle administration. Elle en fixe éventuellement les armoiries.

159Article 9.– Les règlements et arrêtés des communes fusionnées conservent, dans le territoire pour lequel ils avaient été édictés, leur force obligatoire jusqu’au jour de leur abrogation.

160Article 10.– Jusqu’au jour où ils seront unifiés, les services communaux des communes fusionnées conserveront leurs attributions sous la direction des autorités constituées par la présente loi.

161Le régime financier des mêmes territoires sera maintenu jusqu’au jour où un budget unique sera arrêté et mis en vigueur pour le centre urbain ou le cercle rural.

162L’unification des services communaux et celle des règlements et arrêtés, ainsi que l’unité budgétaire, seront réalisées au plus tard le 31 décembre de l’année qui suivra celle de la mise en vigueur de la présente loi.

Annexe II

Projet de M. Robert WILKIN, Directeur du Contentieux de la Ville de Liège

163Article 1.– Les villes et communes, dans la forme et sous les conditions indiquées ci-après, seront réunies en une seule administration communale, dont la dénomination sera fixée par le Roi.

164Les conseils communaux seront appelés à se prononcer avant le 1er mai 1938 sur le rattachement de leur commune à un centre communal nouveau à créer. Les communes les plus importantes pourront suggérer aux plus petites communes qui les entourent, la création d’un centre communal nouveau.

165L’avis des conseils communaux sera donné avant le 1er mai 1938.

166Les délibérations de tous les conseils communaux seront transmises au Roi avant le 1er mai 1938.

167Par arrêté royal motivé pris avant le 1er juillet 1938, le Roi pourra créer de sa propre initiative les centres communaux nouveaux et leur donner leur dénomination nouvelle en suivant en principe l’avis de la commune chef-lieu ou centre d’une agglomération.

168Les élections communales d’octobre 1938 seront faites d’après les circonscriptions nouvelles arrêtées par le Roi.

169Les conseils communaux actuels resteront en fonctions jusqu’à l’installation des nouveaux conseils communaux.

170Le Roi donnera aux communes nouvelles la qualification de ville ou de commune.

171Art. 2.– Le nombre de conseillers communaux est fixé d’après le nombre d’habitants comme le prescrit la loi communale.

172Art. 3.– Les électeurs inscrits sur les listes électorales des villes et communes fusionnées constitueront le corps électoral de l’administration nouvelle.

173Les premières élections auront lieu le premier dimanche d’octobre 1938. Les mandataires communaux seront nommés jusqu’au 31 décembre 1944. Le renouvellement des mandats se fera pour le 1er janvier 1945 conformément au régime électoral communal.

174Art. 4.– Les conseils communaux seront installés dans la première quinzaine de janvier 1939. Les conseils communaux siégeront pendant six ans. Le régime électoral communal et la loi communale leur seront appliqués sauf les exceptions prescrites dans les articles suivants :

175Les conseils communaux sortants régleront les affaires administratives courantes jusqu’au 31 décembre 1938. Ils ne pourront plus prendre de délibération de principe, sauf en cas d’urgence dont la réalité sera reconnue par le Roi par une approbation expresse qui sera requise immédiatement et donnée dans le mois de la notification de la délibération.

176Par le simple effet de la présente loi, tous les concessions, contrats et obligations généralement quelconques pris par les communes fusionnées ou par les administrations et établissements publics de ces communes ainsi que les constitutions de sociétés intercommunales sont résiliés de plein droit à leur plus prochaine échéance.

177Les concessions, contrats et obligations prenant fin entre la date de la promulgation du présent arrêté et le 1er janvier 1939 ne peuvent être prolongés que pour un an au maximum par les conseils communaux sortants.

178L’unification de l’administration communale s’étend à tous les établissements publics et d’utilité publique créés par les administrations communales intéressées et aux commissions d’assistance publique.

179Art. 5.– A partir du 1er janvier 1939, l’actif et le passif des communes, des commissions d’assistance publique et des établissements publics et d’utilité publique, les régies et les sociétés intercommunales auxquelles participent les communes fusionnées passent intégralement au compte de l’administration nouvelle dans laquelle elles sont incorporées.

180Art. 6.– Les fonctionnaires communaux desdites administrations et desdits établissements sont tous dépossédés de leurs fonctions à partir du 1er mars 1939. Pour cette date, ils recevront, dans l’administration nouvelle, une fonction ou un emploi compris dans le cadre qu’établira la nouvelle autorité communale,

181Du 1er janvier 1939 au 1er mars 1939, ils exerceront les fonctions qui leur sont confiées valablement par le bourgmestre de la commune qui donne son nom à l’administration nouvelle ou par le bourgmestre qu’à cette fin désignera le Roi.

182L’équivalence traitement et la progression dans le barème attaché à l’emploi leur sont assurés, avec port du titre honorifique, au titre de la nouvelle fonction ou du nouvel emploi qu’ils recevront dans l’administration nouvelle.

183La mutation de fonction ou d’emploi des dits fonctionnaires et employés communaux ne nuira qu’à leur avancement dans un grade supérieur.

184Le régime de pension et de mise en disponibilité dont ils bénéficiaient leur reste acquis de plein droit aux clauses et conditions du règlement communal dont ils relevaient dans l’administration dissoute, à moins qu’ils ne préfèrent adopter le régime de l’administration nouvelle.

185A peine d’être déclaré démissionnaire, nul fonctionnaire ou employé communal des administrations ou établissements dissous ne peut refuser de tenir la fonction ou l’emploi que lui confiera l’administration nouvelle pourvu que le barème inhérent au grade et à l’emploi qu’il occupait, lui soit personnellement maintenu sous un titre ou l’emploi communal nouveau.

186Les traitements et régimes de pension et de mise en disponibilité acquis au personnel des administrations communales dissoutes sont personnels. En cas de départ des intéressés, leur successeur prendra rang parmi le personnel de l’administration nouvelle aux grade et qualités créés dans le cadre du personnel de l’administration nouvelle.

187A titre exceptionnel, les secrétaires communaux et receveurs communaux actuellement en fonction parmi les administrations communales que désignera le Roi sont maintenus de plein droit en leurs fonctions dans l’administration nouvelle.

188Art. 7. – Dans les agglomérations de plus de 100.000 habitants, le cadre du personnel des nouvelles administrations comprendra en fonctions et emplois des situations de traitements équivalents aux fonctions de l’Etat comme il sera dit ci-après :

  • secrétaire communal = secrétaire général
  • receveur communal = directeur général
  • receveur communal adjoint = inspecteur général
  • préfet de police = directeur général
  • directeur général = directeur général
  • architecte = directeur
  • chef de bureau = chef de bureau
  • conducteur principal de travaux = chef de bureau
  • commissaire de police = chef de bureau
  • sous-chef de bureau = sous-chef de bureau
  • conducteur de travaux = sous-chef de bureau
  • commissaire de police adjoint = sous-chef de bureau
  • commis rédacteur = commis rédacteur
  • commis d’ordre = commis d’ordre.

189Les emplois subalternes seront rétribués comme le sont les grades similaires du département du ministre de l’Intérieur.

190Des fonctions d’inspecteur général pourront être créées avec l’approbation royale.

191Des emplois complémentaires pourront être créés par arrêté royal.

192Dans les administrations de 100.000 habitants et moins, le Roi établira l’échelle relative des fonctions et traitements d’après les grades administratifs du ministère de l’Intérieur.

193Les chiffres de la population applicables aux règles ci-dessus tracées sont ceux du dernier recensement décennal.

194Art. 8. – Les emplois de chef de cabinet, de secrétaire ou d’employés du Bourgmestre ou d’un échevin sont supprimés.

195Désormais, les membres du collège traiteront, sans intermédiaire, avec les fonctionnaires titulaires d’une direction de service.

196Art. 9. – Le secrétaire communal est le chef du personnel ; il distribue la besogne, concentre l’activité des services et en surveille la bonne marche en exécution des instructions du collège des bourgmestre et échevins. Dans les administrations importantes où cette division du travail s’impose, le conseil communal peut nommer des directeurs de département d’échevin et répartir la responsabilité du secrétaire communal entre les directeurs de département.

197Le secrétaire communal ou le directeur du département examine les dossiers avant qu’ils soient soumis aux autorités communales. Le secrétaire communal rédige personnellement les procès-verbaux des séances du conseil communal et du collège des bourgmestre et échevins. Il est éventuellement assisté par le directeur du département.

198Le secrétaire communal est suppléé, pour le contreseing de la correspondance et des actes administratifs, par les directeurs de département suivant un ordre de service que le collège des bourgmestre et échevins établit.

199Comme le prescrit l’article 101 de la loi communale, les actes administratifs sont signés par le bourgmestre ou son suppléant et contresignés par le secrétaire communal ou par le directeur du département. Cette formalité de signature et de contreseing n’est maintenue que pour les actes originaux. Les ampliations, copies ou extraits sont légalement signés par le secrétaire communal ou par le directeur du département.

200La nomination du secrétaire communal et du receveur communal est soumise à l’approbation royale. Les peines disciplinaires leur sont appliquées par le conseil communal, avec recours éventuel au Roi, dans la huitaine de la prononciation de la sentence. Les peines disciplinaires sont appliquées au personnel communal par les autorités communales ou par une délégation du collège des bourgmestre et échevins ou du conseil communal, commise à cette fin par une disposition du règlement intérieur. Un droit de recours est accordé au fonctionnaire soit devant le Roi soit devant le Conseil d’Etat si cet organisme reçoit cette attribution de pouvoir.

201La fonction de secrétaire communal adjoint créée à Bruxelles est supprimée.

202Art. 10. –Les mesures d’approbation et de contrôle confiées aux autorités’ provinciales sont supprimées. Désormais, les administrations communales traitent directement avec le gouvernement.

203Les budgets communaux doivent être votés pour l’année suivante avant le 1er novembre.

204Ils sont soumis dans la huitaine pour approbation royale au ministre de l’Intérieur. L’approbation peut être totale ou partielle. Avant le 31 décembre, et en tous cas dans le mois de la communication, le Roi peut annuler ou modifier d’office les projets de dépenses et de recettes communales. Un droit de recours est accordé aux communes devant le Conseil d’Etat lorsque celui-ci sera créé et seulement sur les points contestés.

205Tout budget approuvé est mis à exécution par le collège des bourgmestre et échevins, lequel dispose pour l’année entière des crédits approuvés. A cet effet, le Collège établit les cahiers des charges et assujettit ses décisions au contrôlé royal d’annulation. Le collège des bourgmestre et échevins est responsable de l’imputation des dépenses qu’il ne peut consentir que dans la mesure des crédits approuvés et conformément à leur destination. En cas d’annulation royale, un recours est ouvert aux communes devant le Conseil d’Etat, aussitôt qua cet organisme sera créé.

206Les comptes budgétaires sont arrêtés au 31 décembre de l’année et soumis à l’approbation de la Cour des Comptes. La décision motivée de cette juridiction administrative doit intervenir dans les trois mois de la date de réception du compte. Passé ce délai, le compte est censé approuvé. L’arrêté de la Cour des Comptes engage la responsabilité civile des membres du collège et le chef de service intéressé ; un recours au Conseil d’Etat est possible.

207Art. 11. – Ampliation de toutes les délibérations prises par les autorités communales sera transmise dans la huitaine au ministre de l’Intérieur, lequel pourra en suspendre la validité dans les cinq jours. Avis en sera donné à l’administration intéressée. L’autorité communale qui a pris la décision entreprise devra en délibérer dans la quinzaine et faire valoir ses griefs contre l’arrêté de suspension. L’ampliation de cette nouvelle délibération sera transmise au ministre de l’Intérieur et le Roi pourra l’annuler en tout ou en partie dans les quarante jours.

208La mesure de suspension et d’annulation des délibérations emporte l’annulation respectivement provisoire et définitive des délibérations entreprises, tant à l’égard de l’administration communale qu’envers les tiers qui y puisent des droits politiques ou civils.

209Un recours au Conseil d’Etat est ouvert aux communes.

210Le secrétaire communal ou le directeur du département assure spontanément et personnellement la transmission des ampliations des délibérations au ministre de l’Intérieur, sauf pour les arrêtés personnels du bourgmestre, lesquels sont transmis par le préfet de police ou par le premier fonctionnaire de la police.

211Art. 12. –Les bourgmestres des communes désignées par l’application du dernier alinéa de l’art. 6 ou ceux qui en exercent la charge en remplacement du titulaire, comme il est stipulé dans la loi communale, installeront les nouveaux conseils communaux et continueront l’exercice de leur charge dans l’administration nouvelle à partir du 1er janvier 1939 et jusqu’au 31 décembre 1940.

212Les nouveaux bourgmestres prêteront serment entre les mains du ministre de l’Intérieur ou de son délégué.

213Art. 13. – Les dits bourgmestres et les secrétaires communaux en titre ou leurs remplaçants légaux établiront dès la promulgation de la présente loi, un projet de réorganisation des services communaux, laquelle relèvera, dans son institution définitive, du nouveau conseil communal.

214Les dits bourgmestres établiront le fonctionnement des services et l’attribution des emplois pour la période du 1er janvier 1939 au 1er mars 1939, après avoir pris l’avis du secrétaire communal.

215Art. 14. – Tous les services communaux seront centralisés sous la responsabilité d’un membre du collège des bourgmestre et échevins, assisté du secrétaire communal ou du directeur du département. Toute autre subdivision administrative est interdite.

216Exceptionnellement, les services d’état civil, de population et de milice pourront être subdivisés. Dans chaque subdivision, on pourra célébrer les mariages, recevoir tous les actes d’état civil, tenir les registres de la population et les pièces de milice. Chaque subdivision est dirigée par un officier de l’état civil adjoint et un officier adjoint suppléant qui seront désignés par le collège des bourgmestre et échevins – parmi les conseillers communaux.

217Les officiers adjoints accomplissent les formalités accessoires et notamment les formalités de publication de tous les actes qu’ils sont chargés de recevoir. Le règlement de décentralisation de l’état civil sera publié et communiqué aux autorités administratives et judiciaires. Les officiers adjoints sont remplacés par leur suppléant ou, à son défaut, par les membres du collège et du conseil communal suivant leur ordre de préséance.

218Les officiers adjoints reçoivent par séance une indemnité égale au jeton de présence alloué aux conseillers communaux pour les séances du conseil. Ils ne peuvent toucher qu’une vacation par jour. Eventuellement/ le conseil pourra décider qu’une indemnité annuelle, payable par mois, leur sera versée. En ce cas, ils supporteront personnellement les frais de vacation de leur suppléant.

219Les officiers de l’état civil reçoivent exclusivement les actes originaux qu’ils signent personnellement. Les ampliations et les extraits des actes originaux sont délivrés par les chefs de bureau et les sous-chefs de bureau spécialement désignés en cette qualité par le secrétaire communal. La signature de ces reproductions par les chefs et sous-chefs ainsi désignés confère au document une valeur authentique. La délivrance des ampliations et extraits se fait sous la responsabilité personnelle des signataires.

Raymond Costard
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2014
https://doi.org/10.3917/cris.087.0001
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