CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Initialement ancré dans l’Occident contemporain, le New Age relève d’une mouvance socioreligieuse complexe qui défie les catégories établies des sciences sociales. Situé aux confins du spirituel, du thérapeutique et du politique, il est né dans des sociétés sécularisées marquées par une importante différenciation sociale et a souvent été perçu comme un mode de « consumérisme spirituel » ou de « religiosité à la carte », centré sur un individualisme exacerbé et la circulation aléatoire de ses adeptes entre des pratiques hétérogènes [1]. Pour bien des sociologues et historiens du religieux, il serait ainsi propre aux sociétés postindustrielles, (néo)libérales et postmodernes, et en particulier à leurs classes moyennes ou supérieures, considérées comme distanciées de communautés religieuses et en mal de modèles idéologiques. À Cuba, dans un contexte marqué par le matérialisme scientifique et le socialisme d’État qui se maintiennent depuis plus de cinquante ans, le New Age a pourtant émergé récemment. Au fil des années 2000, à mesure que des notions exogènes et a priori insolites – telles celles d’« énergie universelle », de « spiritualité » ou de « développement personnel » – pénétraient différents champs de la sphère sociale, des pratiques thérapeutico-spirituelles inédites, empreintes d’un imaginaire relatif à l’Orient, ont fleuri tous azimuts.

2 Si l’ancrage du New Age en Amérique latine n’est pas nouveau [2], à Cuba, pays fort singulier sur l’échiquier politico-religieux régional, il pose question du fait d’un contexte qui y semble à première vue peu propice. Dans la perspective d’une approche comparée de cette mouvance, l’étude de ses conditions d’émergence requiert donc une attention particulière. Elle invite notamment à placer la focale sur la question concrète du « comment » [3], relative aux modalités d’introduction, de diffusion et de légitimation de cette forme de religiosité. Son émergence à Cuba s’est en effet jouée au croisement de logiques de circulation globales et locales qui entrelacent étroitement dynamiques du changement social et transformations religieuses, et permettent, de ce point de vue, d’explorer des aspects plus généraux du phénomène autant que de nuancer certaines des analyses sociologiques brièvement évoquées.

3 Après être revenue sur d’incontournables questions de définition et de contexte, j’adopterai dans cet article une perspective historicisante propre à montrer que le développement du New Age à Cuba s’est ancré dans différentes réformes de la période postsoviétique. Étape nécessaire dans une réflexion anthropologique portant sur les nouvelles formes de ritualisation impliquées, il s’agira de dresser un premier cadre socio-historique à même de rendre compte de l’inscription de cette mouvance dans l’île et, ce faisant, de contribuer à baliser un champ d’étude en construction [4]. Pour ce faire, je m’appuierai sur une ethnographie récemment conduite à La Havane ainsi que sur des terrains antérieurs menés depuis 2002 sur la vie quotidienne et les pratiques religieuses cubaines. Sauf précision, les données convoquées proviennent d’entretiens croisés menés avec des fondateurs de cercles New Age, des professionnels de la santé, de l’armée et du sport, et des adeptes des cultes afro-cubains. Elles ont été corroborées par la consultation de leurs archives personnelles constituées d’échanges épistolaires datant des années 1990, de certificats décernés à l’issue de formations ainsi que de prospectus et documents liés à des conférences et rassemblements.

Le New Age à Cuba

4 Par le terme de New Age, j’entends désigner une mouvance fondée sur la (re)découverte et la réinterprétation de rituels, thérapies et cosmologies d’origines historique et culturelle diverses, réagencés de façon créative dans des logiques d’accomplissement spirituel. L’emploi de ce terme répond à un usage consacré sur les terrains latino-américains et relève d’une caractérisation etic du phénomène, qui s’avère pertinente pour le cas de Cuba et articule les aspects suivants [5].

5 S’il est peu fréquent, sur l’île comme ailleurs, que des individus se revendiquent de la Nueva Era, soit du New Age, ceux qui évoluent dans cet univers se définissent d’abord comme des « chercheurs » (buscadores) tantôt de « vérité », tantôt de « spiritualité » – catégorie généralement emblématique de ce mouvement [Gutiérrez Zúñiga, 1996 ; Sutcliffe, 2003] –, et tous recourent à un vocabulaire constitutif de ce qui relève de la vulgate transnationale du New Age, centré sur les notions d’« énergie », de « guérison », d’« éveil », de « spiritualité » ou d’« auto-connaissance ».

6 Les modalités selon lesquelles adeptes et praticiens combinent, à des fins curatives et spirituelles, une multitude de pratiques d’origine orientale, européenne ou méso-américaine [6], sans en exclure les cultes afro-cubains endogènes les plus populaires, sont aussi caractéristiques : ils transcendent leur disparité en invoquant des systèmes de correspondances qui affirment l’unité profonde de ces traditions hétérogènes, dans une logique du « Tout est Un » que l’on peut considérer comme distinctive du New Age [Teisenhoffer, 2007].

7 L’ensemble considéré tient en outre sa cohérence de la cosmologie qui en dérive. Fondée sur des conceptions holistes de l’individu, celle-ci postule son lien étroit avec la nature et s’appuie sur l’idiome de la « guérison » (sanación) spirituelle, traditionnellement étranger à l’univers religieux cubain, et en particulier afro-cubain. Elle suggère aussi que la poursuite d’un accomplissement spirituel personnel promet de favoriser, à terme, un accomplissement collectif plus global, soit le développement d’une humanité plus éclairée et consciente d’elle-même.

8 C’est donc de New Age au sens large d’une nouvelle « matrice de sens » [De la Torre, 2013] ainsi que d’un mouvement fondé sur des formes réinventées de guérison, d’initiation et de ritualisation [Pike, 2004 ; Houseman, 2016] dont il est question ici. Bien qu’il soit difficile de la chiffrer statistiquement du fait de la circulation des adeptes et de l’instabilité de cercles spirituels qui se (re)créent constamment, un élément significatif donnera une idée de la représentativité sociale de cette mouvance. Celle-ci est en effet assez visible pour que le gouvernement castriste s’en soit inquiété et requière, dès 2005, une enquête du Centre d’investigations de psychologie sociale (CIPS) de La Havane visant à établir si les pratiques considérées constituaient une potentielle menace pour l’ordre social en vigueur – ce à quoi, on y reviendra, ledit rapport a répondu par la négative [7] [Jímenez et al., 2005]. Depuis, ces pratiques n’ont cessé de prospérer au sein de la population et pour rendre compte de leur émergence initiale, il convient de revenir en amont sur les conditions d’introduction de techniques et de conceptions dont la découverte a de fait préparé l’apparition et la popularisation du New Age.

Le socialisme cubain et la « période spéciale en temps de paix »

9 De façon schématique, deux dates jalonnent l’histoire de Cuba. 1959 d’abord, année du triomphe de la révolution castriste, suivie, deux ans plus tard, de l’annonce de son caractère socialiste. 1991 ensuite, qui, suite à la chute de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) et au durcissement de l’embargo commercial imposé par les États-Unis, a inauguré un tournant dramatique dans l’histoire nationale. Alors que la première a provoqué durant des décennies une coupure idéologique radicale avec l’Europe de l’Ouest et les États-Unis, et l’établissement d’échanges politico-économiques et culturels presque exclusifs avec l’URSS et les pays « non alignés », la seconde a marqué l’effondrement brutal de l’économie cubaine et initié une période de mutations perceptibles dans tous les aspects de la vie quotidienne [8].

10 Dès 1991, le IVe Congrès du Parti communiste cubain (PCC) décrète l’instauration d’un état d’urgence, la « période spéciale en temps de paix », fondé sur une économie de pénurie qui perdure encore dans certains secteurs et qui a profondément marqué les existences et les esprits. Tandis que des contradictions vont émerger dans la « phraséologie révolutionnaire » [Karnoouh, 2007] et que les difficultés quotidiennes vont mettre à mal l’idéologie de l’Homme nouveau inculquée depuis les années 1960, certaines des mesures économiques alors adoptées vont aussi contribuer à faire (re)surgir des disparités jusqu’alors tapies ou inconnues au sein de la population [9].

11 Cela dit, on aurait tort de chercher là la raison d’être du New Age : aucune transition néolibérale n’aura alors lieu [10], l’État va demeurer le principal pourvoyeur de biens et services, et le socialisme va se maintenir. Les réformes et réorientations alors décidées afin de palier la situation vont toutefois (in)directement favoriser l’émergence de pratiques New Age.

Le secteur (para)médical et le développement de thérapies alternatives

12 Dès le début de la période spéciale, le secteur cubain de la médecine, fer de lance de la révolution et leader mondialement reconnu, a été fortement affecté par la crise. Malgré le soutien d’organisations non gouvernementales (ONG) [Graber, 2013], la pénurie chronique de médicaments et d’équipements nécessaires au travail hospitalier a commencé à compromettre la qualité des soins délivrés. Dans ce cadre, le ministère de la Santé publique (Minsap), en lien avec des équipes (para)médicales, a fait le choix d’expérimenter des solutions alternatives visant à garantir, selon les textes officiels, une certaine « qualité de vie » à la population [Brotherton, 2012, p. 47-49]. De nombreuses initiatives vont alors voir le jour et conduire à l’institutionnalisation progressive de thérapies basées sur l’importation de techniques exogènes encore inconnues.

13 Un accent est mis sur la prévention des maladies auprès du troisième âge par des programmes fondés, avec le soutien de la Chine, sur l’introduction et la diffusion de nouvelles techniques du corps et d’arts martiaux comme le tai-chi-chuan. De 1993 à 1998 notamment – période extrêmement dynamique où la correspondance des personnels des institutions médicales que nous avons pu consultée évoque explicitement la nécessité politique de développer des thérapies pouvant pallier les effets du bloqueo (blocus) états-unien –, des groupes de recherche et de formation se créent, qui vont tester l’efficacité de médecines est-asiatiques alternatives à celle allopathique. Des expérimentations originales sont menées à guichet fermé, au sein d’hôpitaux parmi les plus réputés à Cuba, tels le Calixto García, le Salvador Allende et différents hôpitaux militaires.

Figure 1

Élèves de tai-chi-chuan se réunissant chaque matin à l’aube, quartier de Centro Habana, novembre 2014

Figure 1

Élèves de tai-chi-chuan se réunissant chaque matin à l’aube, quartier de Centro Habana, novembre 2014

Sources : Emma Gobin ©.

14 En lien à des tentatives antérieures [Hernández González, 2008], ces groupes explorent l’acupuncture et son dérivé qu’est l’auriculothérapie, basé sur le traitement de l’oreille. Ils considèrent le shiatsu, la thérapie florale de Bach ou, en collaboration avec des acteurs n’appartenant pas toujours au monde médical, des techniques dites « bioénergétiques », aux noms parfois des plus surprenants : « guérison pranique », « alternative afro-orientale » ou encore positive thinking et rebirthing[11]. Des formations diplômantes sont même dispensées.

15 Les protocoles d’enquête s’appuient sur des initiatives développées entre acteurs locaux et vont de pair avec le développement d’une naturopathie (medicina verde) basée sur des savoirs résiduels d’herboristerie populaire, pour certains issus de l’immigration chinoise des xix e et xx e siècles, alliés à des savoirs « traditionnels chinois » nouvellement importés et aujourd’hui relayés par des panneaux pédagogiques dans les pharmacies. Dans la seconde moitié des années 1990, cette naturopathie engendre un dialogue, moins fructueux, avec des initiés des religions afro-cubaines qui participent aussi à ces programmes en tant que dépositaires de compétences botaniques ritualisées [12].

16 Dans des hôpitaux et universités de La Havane où des psychologues s’intéressent à la « bioénergie » et au magnétisme, ces expérimentations s’appuient, d’une part, sur des échanges avec des organisations étrangères, telle la Fédération espagnole pour la recherche sur l’énergie humaine et universelle (FEHU), dont des membres dispensent des cours dans des institutions médicales en 1995 et en 1997. Elles engagent, d’autre part, des collaborations avec des ressortissants de différents pays asiatiques [13], comme, par exemple, lors du Congrès de médecine traditionnelle chinoise qui a eu lieu en 1997 pour le 150e anniversaire du « quartier chinois » de La Havane. Avant même que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ne s’exprime sur la pertinence des « médecines traditionnelles » [OMS, 2009], ces échanges bénéficient de fait d’une conjoncture internationale propice puisqu’en Europe, les débats autour de la reconnaissance de techniques de médecine non conventionnelle sont eux-mêmes en plein essor.

17 Au beau milieu de la période spéciale, en 1995 [Jiménez et al., 2005], ces multiples programmes se cristallisent suite à la décision du Minsap de créer des « départements de médecine traditionnelle et naturelle », dont on dote progressivement les centres de santé municipaux, ou policlínicos, du pays. Modifiant les modes de traitement d’affections diverses, ces structures se fondent sur l’emploi de techniques alternatives à bas coût, empruntant aux savoirs déjà évoqués mais aussi, de façon plus surprenante au reiki « tibétain » – dont les rituels d’imposition des mains sont expérimentés en cancérologie et en gérontologie à des fins palliatives – ainsi qu’à des formes de chromothérapie ou d’iridothérapie, impliquant l’établissement de diagnostics à partir de l’observation de l’œil. Les initiatives sont multiples et quiconque se rend aujourd’hui dans l’un de ces centres ne devra pas s’étonner d’apprendre que son mal de gorge peut être soigné, en chromothérapie, par l’usage de la couleur bleu, par un « nettoyage » de son « aura » ou, d’un point de vue holistique, par des efforts d’amélioration de sa communication sociale et familiale.

18 Malgré les résistances et le scepticisme suscités parmi une partie de la communauté médicale et certains patients qui n’y voient qu’un pis-aller simple et démagogique [14], l’introduction de ces techniques s’est avérée jouer un rôle important du point de vue qui nous occupe. Initialement importées et développées en tant que « techniques thérapeutiques », celles-ci ont ouvert la voie à de nouvelles théories de la personne fondées sur des cartographies corporelles impliquant les notions de méridiens et de chakra et sur des conceptions du lien entre corps et esprit faisant intervenir énergie, corps pranique, aura ou encore spiritualité.

19 Dans un contexte où le taux d’adhésion et le recours effectif au système médical n’ont rien à envier aux pays européens, on ne saurait mésestimer les effets de légitimation et de familiarisation alors à l’œuvre. Il n’y a là rien de strictement automatique, mais les récits de quelques maîtres cubains de tai-chi-chuan et de reiki formés à cette époque dans le secteur (para)médical de même que ceux de certains diplômés de « médecine bioénergétique et naturelle » sont révélateurs. Ayant, au fil de leur progression, découvert que le tai-chi-chuan, loin de se résumer à une gymnastique ou à un simple exercice physique, consistait aussi en une « voie spirituelle » de « travail sur soi » liée à tout un univers « philosophique » et « spirituel » ou que le reiki était aussi une « voie initiatique » parsemée d’« ésotérisme », certains se sont alors activement engagés dans des pratiques alternatives et dans la création de cercles New Age orientés vers le « développement spirituel » personnel et collectif.

20 Ces réformes médicales ont donc constitué un véhicule efficace de représentations interconnectant progressivement, dans une logique profondément New Age, les notions de « santé », de « spiritualité » ou de « développement personnel ». Leur diffusion et leur appropriation se sont vu d’autant plus facilitées que la période spéciale s’est accompagnée de changements significatifs sur d’autres plans.

Le champ religieux et la diversification des années 1990

21 Jusque récemment, le champ religieux cubain était dominé par la pratique des religions afro-cubaines endogènes, liées au culte populaire des saints et à l’espiritismo ou spiritisme local. Centrées sur la gestion quotidienne d’infortunes, celles-ci avaient été, comme le catholicisme institutionnel, condamnées conformément à l’athéisme d’État proclamé dans les années 1960, et discriminées. Elles demeuraient cependant fort dynamiques et leurs aspects choréico-musicaux avaient paradoxalement été glorifiés sur un plan patrimonial comme des emblèmes de l’identité culturelle cubaine [Argyriadis, 2006 ; Gobin, 2009].

22 À l’aube de la période spéciale, un tel positionnement idéologique va faire l’objet d’une réorientation de poids. En 1991, lors du IVe Congrès du PCC, le parti prend la décision officielle de lever toute discrimination religieuse via un amendement constitutionnel [15]. Visant l’obtention du soutien du Vatican, de mouvements catholiques tels que la Théologie de la libération ainsi que d’organisations protestantes [Argyriadis, 1999], cette stratégie va moins se traduire par un retour dans les églises que par un gain de visibilité des pratiques afro-cubaines et, plus important pour notre propos, par une diversification progressive du paysage religieux. Outre l’implantation précoce d’églises protestantes de tous bords (baptistes, adventistes du Septième Jour ou Témoins de Jéhovah), celle, plus tardive, de courants religieux encore peu connus va influer sur le développement du New Age.

23 À la faveur de relations avec de nouveaux partenaires économiques et culturels est-asiatiques, certaines écoles de bouddhisme vont s’implanter dans la deuxième moitié des années 1990. Elles vont insister – c’est peut-être l’une des spécificités de leur insertion à Cuba – non seulement sur la question de la « spiritualité » individuelle, mais aussi sur sa dimension sociale. L’exemple de la Sōka Gakkai, organisation qui avait retenu l’attention du CIPS dans son rapport de 2005, mérite que l’on s’y arrête [16]. Récemment étudiée par Girardo Rodríguez Plasencia [2014], celle-ci a été directement exportée depuis le Japon en 1996 avec la venue de son fondateur : ce dernier signe des accords d’échanges avec l’université de La Havane, est reçu par Fidel Castro lui-même et décoré du prestigieux ordre Felix Varela. Le religieux et le spirituel se sont alors immédiatement imbriqués au politique mais aussi à l’académique et au culturel. Prônant des principes d’« amour » et de « paix sociale », le leader du mouvement s’est engagé dans un processus que l’on pourrait qualifier d’« indigénisation » des notions clés de la Sōka Gakkai [17], tout en s’attachant – ce que font toujours certains adeptes cubains – à présenter celle-ci moins comme un mouvement religieux que comme une organisation laïque à but social « oeuvrant pour la paix ». Au début des années 2000, sans être encore légalement reconnue, la Sōka Gakkai s’implique ainsi, avec le soutien de l’université, dans des projets pédagogiques et éducatifs à vocation sociale (ateliers, conférences, etc.). Alors qu’une telle stratégie masque à peine un prosélytisme sous-jacent, elle concourt indéniablement à la diffusion et à la promotion progressive d’idées et de pratiques nouvelles alors que s’implantent parallèlement d’autres courants.

24 Entre 1995 et 1996, dans un champ religieux en pleine diversification, les échanges interpersonnels tissés entre des Cubains et des étrangers de passage donnent naissance à d’autres groupes : parmi eux, des cercles de bouddhisme zen, dit du « dojo », lié à une école française, ceux de la méditation indienne dite du « vipassana » ou, plus tard, ceux de la « Voie du Diamant », originaire d’Europe du Nord. Ces mouvements, cette fois tous liés aux nouvelles spiritualités apparues en Europe et aux États-Unis et engageant une réappropriation occidentale de pratiques extrême-orientales, s’implantent quant à eux par l’intermédiaire de leurs relais européens et (latino-)américains, du fait des liens créés avec des ressortissants de ces pays et, parfois, de la présence temporaire de « maîtres » occidentaux ou orientaux réputés. Voyageant déjà ailleurs en Amérique, ces derniers visitent Cuba à la faveur de son ouverture et y interviennent dans des cercles socio-culturels, des centres académiques et universitaires, au domicile de sympathisants cubains ou, même, dans des centres œcuméniques protestants. Prônant un contact renouvelé avec la nature dans lequel se dessine aussi les prémices d’une articulation nouvelle entre urbanité et écologie, certains commencent à organiser des retraites « spirituelles » dans des provinces cubaines considérées comme propices à un tel contact.

25 Si le nombre d’adeptes du bouddhisme demeure limité à quelques milliers à Cuba selon certains de ses responsables, la multiplication de ces cercles et la façon dont on y transmet les savoirs, sous forme, souvent, de conférences rappelant l’« université populaire » et avec le soutien, parfois, de personnalités académiques, scientifiques, voire politiques comme dans le cas de la Sōka Gakkai, ont participé de la diffusion de différentes notions. Les idées de recentrage sur soi, d’autoréalisation comme moyen d’épanouissement personnel et d’établissement de relations au monde plus saines et altruistes, d’« éveil spirituel », de « conscience de soi », de contrôle de l’esprit sur le corps par de nouvelles techniques (méditation, yoga, prières collectives) ou de rapport plus harmonieux à la nature font leur chemin.

26 À la différence des religions afro-cubaines que certains avaient pourtant tenté de concilier avec des réinterprétations du matérialisme scientifique [Aguëro Gastón, 1961], il importe de noter que ces nouvelles formulations religieuses et spirituelles, par leur insistance sur une dimension sociale, et parce qu’elles n’exigent nullement le truchement du concept d’âme ou le recours à une divinité suprême, ne se sont guère érigées comme incompatibles avec le matérialisme scientifique professé à Cuba. Elles ont même trouvé un écho parmi des personnes qui ne se seraient pas spontanément définies comme « religieuses » – autodésignation fréquente parmi les adeptes des pratiques afro-cubaines.

27 Cela ne signifie pas que ces derniers ne s’y soient pas montrés sensibles. Il existe même dans ces religions endogènes des représentations stéréotypées sur l’Orient qui en ont facilité la popularisation [18]. Certains aspects de la cosmologie afro-cubaine ont fourni des points d’appréhension et de réélaboration créative de ces concepts et pratiques en lien aux rituels locaux, engendrant des processus d’appropriation de symboles et d’objets New Age au sein des religions afrocubaines [Blanco Pérez, 2007 ; Gobin, 2014], lesquels se sont opérés parallèlement au développement de cercles New Age, quant à eux centrés sur des formes d’organisation socioreligieuse structurées autour de nouvelles relations « maître-disciple », du partage d’« enseignements » et de la poursuite collective d’un « épanouissement spirituel personnel ». En revanche, cela signifie bien que la mise en circulation de ces nouvelles techniques et, avec elles, de nouveaux univers philosophiques a pu faire des émules parmi nombre d’individus initialement peu enclins à s’engager dans la sphère du religieux.

28 Les entretiens avec d’actuels praticiens New Age qui ont fréquenté ces conférences et les premiers cercles bouddhistes en témoignent. Certaines conceptions ont par exemple résonné dans l’un des secteurs le plus intensément formé à l’athéisme d’État, celui des Forces armées révolutionnaires. Outre que des militaires avaient été partie prenante des initiatives et formations (para)médicales déjà évoquées, certaines archives privées révèlent que des expériences sur différentes méthodes de « contrôle mental » se poursuivaient dans les années 1990 à l’Institut supérieur de médecine militaire. Dans les années 1980, des ateliers de métapsychie, de télékinésie mais aussi de méditation visant à favoriser la concentration et la survie avaient déjà été menés [19], et ce dans le contexte d’une préparation constante à un potentiel conflit armé représenté par le spectre de l’invasion historique de Playa Girón, ou de la baie des Cochons. Bien que moins significatives, de telles connexions sont également repérables dans la formation sportive de haut niveau et ont facilité une conjonction entre les domaines, le tout ayant été relayé – on s’en aperçoit – par un contact accru avec l’extérieur.

Tourisme international et immigration cubaine

29 À la faveur d’une réorientation cette fois économique, enclenchée précocement puis officialisée lors du Ve Congrès du PCC [Tesis y resoluciones, 1997], la période spéciale est marquée par la nécessité et la volonté de stimuler le tourisme international comme une ressource de premier plan, ce qui va amorcer un processus de désenclavement relatif de Cuba et de sa population vis-à-vis de l’Europe de l’Ouest et du reste de l’Amérique hispanophone. Marqueur des plus visibles du changement, les années 1990 voient en effet l’arrivée de nombreux étrangers : touristes qui ne pouvaient guère fréquenter l’île auparavant ou alors dans des conditions bien particulières et, dans une moindre mesure, étudiants séjournant temporairement dans l’île et personnalités invitées dans un cadre académique, à l’université ou dans des centres de psychologie par exemple. Des infrastructures sont mises en place et, en 1994, est créé le ministère du Tourisme. Son site web officiel [Mintur, 2014], dont provient une partie des informations évoquées ci-dessous, signale qu’en 1996 le nombre de visiteurs étrangers atteint un million.

30 Depuis les années 2000, il se chiffre à un peu plus de deux millions par an pour une population insulaire d’environ onze millions d’habitants.

31 Dans le cadre d’un assouplissement idéologique, des liens familiaux se retissent aussi au début des années 1990 entre les Cubains de l’île et ceux de l’immigration, dits « de l’extérieur » ou « de l’exil », qui avaient été longtemps ostracisés. Dans le contexte de la période spéciale, l’émigration cubaine augmente en outre significativement, à destination non plus seulement des États-Unis, mais de pays d’Europe occidentale et d’Amérique latine. Après les fameuses vagues de balseros ayant tenté de rejoindre la Floride dans des embarcations de fortune, l’émigration légale, en partie facilitée par les mariages binationaux et les relations entamées avec certains touristes, s’accroît. Alors que, jusqu’aux récentes décisions de Raúl Castro datant de 2011, les habitants de l’île vont demeurer largement entravés dans leurs déplacements, ces nouveaux flux de personnes vont favoriser des échanges transnationaux inédits, tant avec les Cubains de l’extérieur qu’avec des ressortissants étrangers – les interactions de la population avec ces derniers étant toutefois délibérément limitées au départ par les autorités.

32 Aux premiers contingents d’un tourisme balnéaire (Canadiens surtout, puis Italiens et, dans une moindre mesure, Français), commencent à s’ajouter d’innombrables visiteurs provenant, entre autres, du Mexique, du Venezuela, de Colombie ou d’Argentine. Ce tourisme, parfois accompagné d’une curiosité politique, commence à revêtir les atours d’un tourisme culturel, mais aussi religieux, puisque les cultes afro-cubains déjà implantés à l’extérieur du pays par le biais, notamment, de l’immigration, commencent à attirer de nombreux adeptes étrangers [20]. Tout cela concourt alors à l’introduction d’autres techniques et pratiques thérapeutico-spirituelles, en particulier à La Havane, cœur administratif et culturel du pays par lequel transitent plus de 60 % des étrangers de passage.

33 Comme le soulignent les premiers Havanais sensibilisés à ces pratiques, des étrangers engagés dans le monde des spiritualités alternatives et parfois liés au secteur (para)médical, vont de temps à autre organiser des workshops (cursos) dans la capitale, à l’université ou au domicile de Cubains avec qui ils se lient d’amitié. Parmi eux, quelques « entrepreneurs religieux » le feront de façon systématique. Ils contribuent à former sur place des yogi, des maîtres de reiki ou des « manipulateurs d’énergie ». À la faveur de la récente libéralisation religieuse, certains vont jouer un rôle déterminant dans l’introduction de doctrines ou philosophies nouvelles, telle celle du célèbre guru indien Sai Baba. L’apparition des dites initiations maya à La Havane, connectées à la révélation de l’existence d’un treizième chakra, est le fait de ressortissants mexicains, se revendiquant « chamanes », ainsi que de l’action étonnante de membres de l’ambassade du Guatemala qui, à travers textes, pamphlets et activités publiques, contribuent à l’introduction des croyances liées à 2012 et au calendrier maya.

Figures 2 et 3

Cérémonie Oxaljuj Baq’Tun du « calendrier maya », plage de Bacuranao-La Havane, décembre 2012

Figures 2 et 3
Figures 2 et 3

Cérémonie Oxaljuj Baq’Tun du « calendrier maya », plage de Bacuranao-La Havane, décembre 2012

Conduite par trois « sages (sabios) mayas », la cérémonie a été organisée par l’ambassade du Guatemala avec le soutien de la Casa de las Américas et d’autres institutions culturelles, scientifiques et gouvernementales cubaines.
Sources : courtoisie de Françoise Brouzès ©.

34 Autre exemple, c’est à des groupes d’Espagnols que l’on doit la diffusion, bien que marginale et plus récente, de la mouvance du Kryon, connectée au channeling et à l’idée d’une communication avec des consciences autres, extraterrestres. La thérapie florale est quant à elle enseignée dans certains policlínicos de La Havane par une Allemande formée en Argentine, où cette technique est parfaitement insérée aux circuits néo-ésotériques locaux [Carrozzi, 1999].

35 Dans les récits des premiers Cubains ayant fréquenté ces cercles puis assuré leur réélaboration et leur transmission locales, la figure d’un étranger est toujours présente, sous la forme soit d’un témoin de la « sérénité » et de l’« équilibre personnel et social » acquis par le biais d’une ou de plusieurs pratique(s) spirituelle(s), soit d’une aide apportée à la réalisation, ô combien rare à Cuba (au moins à l’époque), d’un voyage à caractère « initiatique » à l’étranger. Chose remarquable au vu des obstacles bureaucratiques et des coûts impliqués, quelques Cubains ont pu participer, durant les années 1990, à des « stages spirituels » au Mexique ou, dans le cas de ce promoteur de la méditation vipassana, effectuer un séjour de plusieurs mois dans un ashram en Inde.

36 Autre élément, la venue d’étrangers, conjuguée aux allers-retours ou échanges épistolaires avec les nouveaux migrants, s’est avérée essentielle à alimenter et à diversifier ces pratiques. Précisons qu’ailleurs en Amérique latine, d’importantes logiques de marché et une offre commerciale abondante en objets et en ouvrages soutiennent l’expansion rapide du New Age [De la Torre, Gutiérrez Zúñiga, 2005 ; Juárez Huet, 2013]. Il en va de même des flux du « tourisme mystique » européen et nord-américain qui favorisent la réinvention ou la réinterprétation de rituels locaux en situation interculturelle [Galinier, Molinié, 2006]. Tous terrains confondus, Internet est, en outre, un relais crucial dans la découverte de pratiques venant constamment nourrir et renouveler les parcours New Age [Heelas, 1996 ; York, 1999]. Néanmoins, à Cuba, l’accès au Web s’avère encore drastiquement limité par des contraintes techniques autant que politiques, et nombre de Cubains sont ainsi tenus en marge de développements et débats de tous types. Le tourisme lié aux religions afro-cubaines n’engage par ailleurs guère de logiques d’adaptation vis-à-vis d’un nouveau public, dont on requiert plutôt qu’il se conforme aux exigences et usages locaux. Jusqu’à très récemment, les librairies d’État qui consacrent désormais des étagères au thème du développement personnel demeuraient quant à elles pauvrement fournies.

37 Dans ce contexte, les réseaux évoqués ont compensé l’absence de ces éléments et constitué un canal essentiel de mise en circulation non seulement d’objets – menues pyramides, pierres de quartz, attrapeurs de rêves, encens, etc. usités dans différents rituels New Age –, mais surtout d’une précieuse et foisonnante documentation traitant de reiki, de confucianisme, de lithothérapie, de runes celtes, de mythologie hindoue, dans laquelle, notons-le au passage, des savoirs ethnologiques étaient librement repris. Provenant principalement d’Espagne, d’Argentine et du Mexique où elle abonde, cette littérature déjà empreinte de filtres et de couches interprétatives New Age, recopiée, réélaborée, a alors été utilisée comme support d’apprentissage, y compris dans des cercles (para)médicaux.

38 Aujourd’hui, alors que les « chercheurs spirituels » et praticiens cubains se sont mis à produire leurs propres textes et feuillets New Age qu’ils partagent ou commercialisent à bas prix lors de séances rituelles, cette documentation étrangère relayée par les touristes et les migrants continue de transiter de main en main sous format digital (copies CD et clés USB), bien au-delà d’ailleurs des seuls cercles d’adeptes. Elle permet l’intégration constante de nouvelles techniques ou d’enseignements allant, par exemple, de morceaux de « méditations du pardon » à desmanuels piratés de « reconnexion avec l’énergie terrestre » – méthode brevetée et commercialisée aux États-Unis – en passant par des vidéos de gurus tels Osho ou Deepak Chopra, figures de proue desmouvements du développement personnel dans l’Occident contemporain.

Figure 4

Étal de rue d’une librairie portant l’étiquette « ésotérisme et self-help » (autoayuda), quartier de Centro Habana, novembre 2014

Figure 4

Étal de rue d’une librairie portant l’étiquette « ésotérisme et self-help » (autoayuda), quartier de Centro Habana, novembre 2014

Sources : Emma Gobin ©.

Réseaux locaux et effets de légitimation

39 À ces flux internationaux et transnationaux se sont enfin ajoutées des logiques de circulation et de fonctionnement internes à Cuba, sans lesquelles on ne peut pleinement rendre compte de l’inscription et de l’appropriation diffuse de ces techniques et conceptions. La société cubaine a ceci de particulier qu’elle repose sur des liens d’interconnaissance étendus, qui entremêlent réseaux de parenté, réseaux de voisinage, réseaux professionnels ou encore réseaux rituels afro-cubains, d’où une densité particulière du tissu social. Y compris à La Havane, capitale d’environ trois millions d’habitants, les individus sont pris dans des entrelacs de sociabilité qui rendent la vie quotidienne comparable à celle d’un « village » [Argyriadis, 1999]. De fait, malgré les inégalités (ré)apparues pendant la période spéciale, et parce que la révolution y avait amplement travaillé auparavant, la notion de « classe » est bien moins pertinente à Cuba qu’ailleurs : au regard des sociétés européennes ou latino-américaines voisines, on y observe, si ce n’est une complète homogénéité, une faible stratification sociale et culturelle, également favorisée, en contexte urbain, par la cohabitation nécessaire ou voulue en foyers élargis, souvent recomposés, et, de façon générale, par un niveau moyen d’éducation assez élevé.

40 La structure sociale cubaine a, en ce sens, également assuré le développement du New Age, déjà ancré dans une pluralité de champs interconnectés. C’est par exemple parce que l’une de ses sœurs avec qui il habitait était engagée dans une démarche spirituelle alliant yoga, reiki, chromothérapie et astrologie tantrique, qu’un santero ou initié des religions afro-cubaines avec qui j’ai travaillé de 2002 à 2005 s’intéressait au New Age. L’un des participants autrefois les plus actifs des groupes d’expérimentations (para)médicaux à La Havane, ancien coupeur de canne à sucre, a quant à lui popularisé des méthodes inconnues dans son quartier en créant un système thérapeutico-botanique et ésotérique de son cru et en dispensant nouveaux services thérapeutiques et spirituels à un grand nombre de ses voisins. Parmi quelques groupes de reiki qui interviennent aujourd’hui bénévolement dans les services de cancérologie ou de soins palliatifs, on retrouve des gens de tous horizons et des membres de cercles de méditation se réunissant sur les collines de La Havane afin d’ouvrir des « portails intergalactiques » visant à libérer la planète d’« esprits extraterrestres prisonniers de ce monde » ou encore des individus sensibles au végétarisme et tentant de développer une écologie alternative.

41 À cet égard, une remarque doit être formulée. L’inscription de certaines de ces pratiques dans le champ de la médecine est, on l’a dit, un facteur légitimant. Il alimente même une autre caractéristique centrale du New Age [Hanegraaff, 1996], à savoir la tendance de ses adeptes à recourir à la « science » pour justifier les notions, théorie de la personne ou cosmologie qu’ils promeuvent. Et le politique intervient aussi à ce niveau.

42 En effet, frappés par le lien que les adeptes cubains établissent explicitement entre leurs parcours individuels dans le New Age et des visées communautaires plus vastes, centrées sur l’idée d’une transformation et d’une amélioration du monde, les chercheurs du CIPS sont parvenus à l’idée que le New Age ne nuisait guère à la société révolutionnaire mais présentait, au contraire, une certaine congruence dans ses valeurs avec le socialisme cubain [Jiménez et al., 2005, p. 81-82]. Sans qu’il s’agisse de rediscuter ici le lien du New Age à l’ultracapitalisme ou au socialisme, cette affirmation, située aux antipodes de celles qui traversent la sociologie européenne, souligne que l’implication dans cette mouvance ne peut être comprise comme résultant de situations individuelles de rupture et de décrochage avec des modèles idéologiques et des valeurs d’action sociale dominants.

43 Surtout, elle a eu des effets concrets. La reconnaissance institutionnelle du bouddhisme Sōka Gakkai en 2006 par le bureau d’attention aux Affaires religieuses du PCC ainsi que celle d’« écoles » de reiki et d’autres cercles informels basés au domicile de praticiens ne peut qu’être lue comme découlant d’une telle conclusion. Le fait qu’aujourd’hui l’État cautionne, tout en les encadrant, des pratiques relevant de l’univers du New Age, identifiées comme telles, participe bien de leur intégration sociale et, partant, de leur reproduction et de leur diffusion.

Conclusion

44 Au terme de cette incursion dans le contexte cubain des années 1990-2000, il apparaît qu’en l’absence de facteurs considérés ailleurs comme propices à l’épanouissement du New Age (idéologie néolibérale, sécularisation, forte segmentation sociale en termes de classes, individualisme exacerbé, Internet, etc.), c’est à la conjonction de décisions d’État ayant, pour certaines, affecté les champs de la santé et du religieux et, pour d’autres, favorisé la création de nouveaux réseaux internationaux et transnationaux que le New Age a progressivement émergé dans l’île, aux confins de circulations globales et de modes de fonctionnement et de légitimation locaux. Dans le cadre d’une réflexion comparée sur le New Age, l’examen de ce cas singulier permet ainsi d’apporter, en creux, des éléments de dialogue qui touchent à la caractérisation du phénomène.

45 Soulignons d’abord que si cette corrélation entre une période critique de l’histoire cubaine, faite d’intenses changements, et le développement du New Age semble pointer vers l’idée, assumée par de nombreux sociologues ou historiens, d’une « religiosité de crise », on ne saurait, sauf à retomber ici dans une lecture du religieux comme « opium du peuple », le réduire à cela. Les choses sont plus complexes et l’un des points les plus intéressants réside précisément dans le rôle que l’État a (in)directement joué dans le processus. Si l’expansion du New Age dans l’île a bien mobilisé des circulations (physiques, symboliques, etc.) transnationales, ce rôle des instances étatiques invite à questionner l’idée, répandue, que le New Age relèverait à l’instar d’autres pratiques [Csordas, 2009] du registre d’une « religion transnationale » – et ce, d’autant qu’il est d’emblée fondé sur l’emprunt culturel et que, tout en étant ancré historiquement dans certaines sociétés, il ne l’est guère dans des communautés culturelles locales dont il pourrait être extrait pour être remodelé ailleurs, sur le modèle de religions transnationales bien étudiées.

46 L’étude du contexte cubain incite par ailleurs à nuancer fortement l’idée, plus répandue encore, que l’adhésion au New Age serait le fait d’individus en rupture idéologique, par ailleurs déracinés de communautés religieuses – les pratiquants des religions afro-cubaines s’y montrent aussi sensibles. Elle permet, ce faisant, de mettre en lumière l’acception fondamentalement christiano-centrée de cette dernière affirmation, souvent passée inaperçue, ainsi que de la perception du « religieux » qui la sous-tend. Alors que les débats affins sur la nature problématique – spirituelle, religieuse, politique ou thérapeutique – du New Age continuent de faire couler de l’encre [21], on voit ici comment c’est précisément l’articulation renouvelée entre ces dimensions qui rend compte de son émergence et lui confère sa pertinence sociale. Puisque c’est l’une des caractéristiques du New Age que de résister à toute classification monolithique, il s’avère donc fécond de prendre acte de cette intersection fondamentale, en réalité essentielle à sa définition, et de tenter d’en explorer les modalités différenciées selon les terrains.

47 Contrairement par exemple à ce qui s’est passé dans certains contextes européens, où les méthodes de naturopathie et d’autres, justement issues du New Age, ont dû s’émanciper de ce milieu pour acquérir une légitimité scientifique [Grisoni, 2011 cité par Luca, 2012] et pouvoir être intégrées dans les hôpitaux [Le Menestrel, 2014], ici, c’est le processus inverse qui s’est produit. C’est d’abord en faisant irruption dans le secteur de la médecine que certaines techniques ont commencé à susciter une curiosité et une voie d’entrée vers des conceptions spirituelles ainsi qu’une réflexion sur l’interconnexion entre santé, spiritualité et développement personnel. En la matière, la connexion récurrente au champ académique [Galinier, Molinié, 2006] ou à des formes naissantes d’écologie, liées à une reconfiguration spiritualisante des rapports à la nature, mériteraient par ailleurs exploration.

48 À la fois conséquence et signe du changement social à Cuba dont il est partie prenante, le New Age semble en tout cas s’être inscrit d’autant mieux socialement qu’il entrecroise justement ces différentes dimensions et de multiples réseaux. Dans une perspective anthropologique, reste donc à entreprendre l’étude détaillée de ces articulations à partir d’une ethnographie des innovations et nouvelles ritualisations qu’elles impliquent, posture dont on peut espérer qu’elle nous fasse progresser dans une définition plus fine du phénomène à Cuba ainsi que, potentiellement, dans un débat plus général, transdisciplinaire, sur la pertinence de la catégorie même de New Age.

Notes

  • [*]
    Maître de conférences en anthropologie à l’université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, membre du Laboratoire architecture ville urbanisme environnement (LAVUE, UMR CNRS 7218) et chercheure associée au Laboratoire mixte international Mobilités, gouvernance et ressources dans le bassin méso-américain (LMI MESO) de l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
  • [1]
    Voir Lewis, Melton [1992], York [1995], Heelas [1996], Hanegraaf [1996], Sutcliffe [2003], Wood [2007] et les travaux de la sociologie religieuse française [Champion, 1994 ; Hervieu-Léger, 2001].
  • [2]
    Voir Gutiérrez Zúñiga [1996], Carrozzi [1999], Magnani [1999], De la Torre [2013].
  • [3]
    Plutôt que sur celle du « pourquoi », de l’ordre de la psychologie sociale.
  • [4]
    En dépit de sa popularité croissante depuis une dizaine d’années, le New Age à Cuba n’a été évoqué que dans une poignée de travaux précurseurs [Jiménez Berrios et al., 2005 ; Blanco Pérez, 2007 ; Karnoouh, 2011].
  • [5]
    La catégorie de New Age provient initialement d’un terme emic issu du mouvement éponyme, emblématique de la contre-culture états-unienne et européenne des années 1970. Aujourd’hui, son usage, bien que débattu sur certains terrains, est aussi synonyme de celui de « spiritualités contemporaines ». Sur la pertinence heuristique et théorique de la catégorie, dont la discussion dépasse le cadre de cet article, voir par exemple Chryssides [2007].
  • [6]
    Parmi les plus représentées à La Havane, mentionnons le reiki, technique curative d’origine japonaise qui connaît des variantes dites tibétaines, les courants d’« énergie universelle » issus de la doctrine d’un maître sri-lankais, la chromothérapie, la lithothérapie ou la sonothérapie – méthodes divinatoires et thérapeutiques respectivement basées sur l’usage des couleurs, des minéraux et des « sons tibétains » –, la numérologie « tantrique », les méthodes dites de « régression des vies antérieures », le « culte des anges » (channeling) issu de réinterprétations de l’occultisme et du néo-ésotérisme européen, la « sorcellerie Wicca », faisant place à des éléments celtes, ou encore des variantes de néo-chamanisme, localement connues sous le nom d’« initiations maya ».
  • [7]
    Je remercie les chercheurs du CIPS de m’avoir communiqué ce rapport.
  • [8]
    L’URSS absorbait 80 % des exportations et fournissait environ 65 % des importations nationales. Après sa disparition, le produit intérieur brut (PIB) cubain a ainsi chuté de 34 % en trois ans [Rodríguez Ruiz, 2011], entraînant une crise économique et des difficultés chroniques de subsistance.
  • [9]
    Entre autres, mentionnons l’instauration d’un système de triple, puis de double, monnaie, l’ouverture de marchés paysans, l’arrivée d’entreprises dites mixtes (avec des capitaux étrangers) ou l’ouverture au tourisme. Ces mesures ayant engendré un accès différencié aux devises, elles vont contribuer à fomenter de nouvelles inégalités économiques, corrélées à la résurgence d’autres inégalités, notamment « raciales » (voir Núñez González [2006], Rodríguez, Carrazana [2006]).
  • [10]
    On n’en décèle les prémices que dans les plus récentes mesures adoptées par le gouvernement de Raúl Castro.
  • [11]
    Notion issue de l’hindouisme et liée à la médecine ayurvédique, le prana évoque l’idée d’un souffle vital. L’alternative « afro-orientale » est une méthode conçue sur place, alliant savoirs asiatiques et afro-cubains. Le rebirthing relève quant à lui du champ des thérapies transpersonnelles.
  • [12]
    Parmi eux, les membres du désormais célèbre groupe religieux Ifá Iranlòwó [Gobin, 2013].
  • [13]
    Chine, Corée et Vietnam selon l’un des médecins interviewé par Sean Brotherton [2012, p. 50], auxquels s’ajoutent des ressortissants canadiens [ibid.].
  • [14]
    Sur les quelques débats ayant pris place à ce sujet dans la communauté médicale, voir par exemple Blanco Pérez [2007, p. 34-35], Brotherton [2012, p. 52].
  • [15]
    Pour des détails, voir Gobin, Morel [2013, § 17-18 et n. 22].
  • [16]
    Nouveau mouvement religieux né dans le Japon des années 1930, la Sōka Gakkai International est une puissante organisation transnationale. Ses prétentions ambiguës à l’exclusivisme des adeptes [Jiménez et al., 2005 ; Rodríguez Plasencia, 2014] la placent hors de la sphère du New Age telle que définie plus haut mais elle a contribué à la mise en circulation de notions constitutives de ce dernier à Cuba.
  • [17]
    Pour ancrer ses préceptes localement [Rodríguez Plasencia, 2014, p. 204-208], ledit leader n’a pas hésité à revisiter l’histoire cubaine pour faire de José Martí – héros de la guerre d’indépendance, figure clé de la « pédagogie des héros » révolutionnaire [Karnoouh, 2007] et de la lutte latino-américaine contre l’impérialisme états-unien – une forme de Boddhisatva ayant incarné avant l’heure les valeurs et les buts de la Sōka Gakkai [Ikeda, Vitier, 2001]. Sur la notion d’« indigénisation » culturelle, voir Appadurai [1996].
  • [18]
    Les figures classiques d’esprits « arabes », « indiens » et « chinois » issues de l’espiritismo cubain, et localement forgées en lien avec les migrations des xix e et xx e siècles provenant du Proche-Orient et d’Asie, ont par exemple rencontré le nouvel imaginaire sur les spiritualités orientales caractéristiques du New Age [Diem, Lewis, 1992]. Une connexion, encore à explorer, existe en outre avec des loges maçonniques, présentes depuis le xix e siècle à Cuba et connues pour leur goût des philosophies orientales, ainsi qu’avec la théosophie et les Rose-Croix, dont quelques sociétés s’étaient implantées avant la révolution.
  • [19]
    Voir aussi Karnoouh [2011, p. 218-221] ou Brotherton [2012, p. 44].
  • [20]
    Voir notamment Gobin [2013].
  • [21]
    Voir Champion [1994] pour une première formulation du problème.
Français

L’objectif de cet article est de dresser un cadre socio-historique permettant de rendre compte de la diffusion et de l’appropriation récentes du New Age dans la Cuba contemporaine. Il montre qu’en l’absence des facteurs usuellement considérés comme propices au développement de cette mouvance (néolibéralisme, sécularisation, forte stratification sociale, individualisme exacerbé, Internet, etc.), son développement croissant dans l’île provient de l’émergence, en amont, de techniques et représentations exogènes importées dans le contexte d’importants changements sociopolitiques liés aux réorientations de la période postsoviétique. Il révèle ainsi que l’émergence du New Age dans l’île s’est jouée à la croisée d’intenses circulations globales et locales et à la conjonction de décisions d’État ayant engendré la création de réseaux internationaux et transnationaux inédits et ayant reconfiguré le champ de la santé et du religieux. Sur la base de ce cas et dans le cadre d’une approche comparée du New Age, l’article rediscute enfin quelques assertions communément admises sur ce phénomène socioreligieux complexe.

Mots-clés

  • politique
  • socialisme
  • médecine
  • religion
  • tourisme
  • migration
  • spiritualités contemporaines
  • spiritualités orientales
  • New Age
  • Cuba

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  • York M. [1995], The emerging network : A sociology of the New Age and neo-pagan movements, London, Rowman and Littlefield, 336 p.
  • En ligne York M. [1999], « Le supermarché religieux : ancrages locaux du Nouvel Âge au sein du réseau mondial », Social compass, vol. 46, no 2, p. 173-179.
Emma Gobin [*]
  • [*]
    Maître de conférences en anthropologie à l’université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, membre du Laboratoire architecture ville urbanisme environnement (LAVUE, UMR CNRS 7218) et chercheure associée au Laboratoire mixte international Mobilités, gouvernance et ressources dans le bassin méso-américain (LMI MESO) de l’Institut de recherche pour le développement (IRD).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2016
https://doi.org/10.3917/autr.074.0137
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