CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1On assiste aujourd’hui à une recrudescence des débats sur les rôles, la place et l’importance de l’agriculture pour répondre aux défis alimentaires, économiques et environnementaux du monde. Ces débats renvoient aux structures de production qui seraient les plus à même de répondre à ces défis. Par suite, la caractérisation et la compréhension de la diversité des formes de la production agricole, de leurs stratégies et performances, recouvrent des enjeux méthodologiques renouvelés.

2Conjointement, l’agriculture familiale est souvent définie en opposition à d’autres formes, notamment entrepreneuriales. Si l’on considère que l’exploitation agricole familiale résulte de la conjonction d’une unité de production et d’une unité familiale dont les fonctionnements renvoient à des objectifs et des fonctions spécifiques [Lamarche, 1991 ; Ellis, 2000], alors la dialectique entre l’unité économique et l’unité sociale mise en œuvre dans des environnements spécifiques influe sur la différenciation des formes familiales.

3Ainsi, les formes familiales de l’agriculture évoluent dans le temps en relation avec les contextes dans lesquels elles s’insèrent. Des formes ont disparu, d’autres ont émergé. Aujourd’hui, dans les campagnes du monde, les activités sont diversifiées, la pluriactivité est une réalité, de nouvelles formes de mobilité sont apparues : ce sont des facteurs essentiels de la persistance de l’exploitation familiale dans le milieu rural.

4Dans un contexte en évolution, l’une des approches méthodologiques, promue par la coopération britannique, le cadre Sustainable Rural Livelihoods (SRL) prend en compte les modifications de l’environnement à plusieurs échelles, permet d’étudier les changements structurels agricoles au niveau des exploitations mais aussi la diversité des pratiques et de la place de l’agriculture au sein de systèmes d’activités et de revenus.

5Notre contribution est méthodologique. Elle vise à disposer d’un outil de représentation assez flexible pour s’adapter à la diversité des situations, mais assez robuste pour permettre une mise en comparaison. Il s’agit d’une démarche cognitive destinée à mieux comprendre les transformations des formes familiales de production agricole. La diversité des formes de production agricole est peu « objet de recherche » et de fait, les choix en matière de politique publique reposent sur des représentations souvent datées ou trop globales. Ce détour par le cognitif est rendu nécessaire par le renouveau du débat sur l’agriculture, qui fait appel à des représentations peu opérationnelles : agricultures familiales, small scale farmers, smallholders, etc. Intervenir de manière pertinente sur l’agriculture suppose de mieux en caractériser la diversité des formes familiales.

6Cet article propose une relecture de l’évolution historique des manières de voir les formes de la production agricole et propose l’utilisation d’un cadre d’analyse renouvelé, adapté de l’approche SRL, pour décrire les agricultures familiales aujourd’hui. À partir d’études de cas, nous montrons comment décrire des situations multiformes d’agricultures familiales en transformation. L’argumentaire s’organise en quatre parties. La première propose une lecture historique et sélective des approches et courants de pensée ayant contribué à la description et à la caractérisation des agricultures. La seconde partie présente le cadre SRL, mobilisé dans une troisième partie sur les cas retenus. Enfin, la conclusion s’attache à discuter les enseignements et les perspectives offertes.

Manières de voir [1] les formes de production : une diversité théorique et méthodologique

7Nous proposons une sélection raisonnée d’auteurs ayant mobilisé différents courants de pensée et disciplines pour caractériser et analyser l’agriculture. Nous voulons montrer comment le contexte social, économique et politique interfère avec l’évolution des conceptions, et comment les transformations structurelles récentes rendent indispensable la révision de nos manières de voir.

8Au moment de la révolution industrielle, de la restructuration des campagnes au Royaume-Uni et de l’émergence des grands domaines en Prusse, Marx et Kautsky, prédisent la mutation inéluctable des petits propriétaires en ouvriers agricoles car l’avenir appartient aux prolétaires dans le cadre de l’industrialisation de l’agriculture fondée sur des progrès scientifiques et techniques hors de portée des petits propriétaires [Marx, 1867 ; Kautsky, 1900].

9Cette prophétie ne se concrétise pas, même par l’imposition coercitive d’une « modernité » combinée à l’élimination quasi systématique des paysanneries. Les thèses de Marx se heurtent aux réalités économiques et sociales de la production agricole : peu d’économies d’échelle, des progrès techniques adoptés par les petits agriculteurs, des logiques paysannes peu sensibles au seul taux de profit.

10Chayanov [1924] aura un rôle déterminant dans la caractérisation des économies paysannes puis, par extension, des agricultures familiales. Il définit le modèle paysan par les liens entre production et consommation, par la mobilisation d’un travail familial dont le coût est difficilement mesurable, et par la production de biens d’usage et non d’échange. En entrant par le travail et les cycles de vie, il insiste sur les spécificités de la production agricole, invite à ne pas la penser qu’en termes économiques et explique ainsi la permanence et la résilience de formes paysannes.

11À partir de la fin du xixe siècle, les pays du Sud sortent de l’esclavage et l’agriculture offre une dualité des modèles opposant, dans les régions les plus favorables, la grande plantation de cultures agro-industrielles et un patchwork d’agricultures « indigènes », structurées sur une base familiale. Ainsi, en Afrique sub-saharienne, les plantations de grande taille fonctionnant sur la base de main-d’œuvre salariée côtoient des petites exploitations familiales, dans des situations contrastées entre les pays de colonisation britannique et française [Gibbon, 2011].

12Après 1945, dans un contexte de mutation de la société, on assiste dans les pays du Nord à la transformation d’une économie paysanne en une économie agricole. Au-delà de divergences résultant du recours à des références théoriques différentes, la sociologie rurale française décortique le processus de changement structurel. Mendras [1976] répond ainsi au type idéal en cinq points de la société industrielle d’Aron [2], par celui de la société paysanne : autonomie relative par rapport à la société englobante, importance des logiques domestiques, autarcie relative, force des rapports d’interconnaissance au sein de la société. Serait alors agriculteur un membre d’une société qui perdrait un de ces caractères. La figure du paysan s’efface au profit de celle de l’agriculteur inséré aux échanges marchands. Les recherches se centrent sur le processus de modernisation, dont la compréhension impose d’élargir l’analyse au jeu des déterminants de l’environnement [Jollivet, 2003].

13Dans son ouvrage sur l’agriculture familiale, Lamarche [1991] la définit comme « une unité de production agricole où propriété et travail sont intimement liés à la famille ». Ses idéaux types relèvent du caractère familial de l’organisation de la production et de son degré de dépendance, notamment par rapport aux marchés.

Figure 1

Les formes d’agricultures familiales

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Les formes d’agricultures familiales

Sources : d’après Lamarche [1991], p. 266.

14L’axe « fonctionnement familial » caractérise l’importance relative du travail de la famille par rapport au salariat, ainsi que la nature plus ou moins familiale de l’accès aux facteurs de production et de leur tenure. Le second axe exprime la connexion et le niveau de dépendance aux marchés des produits agricoles, des services et des intrants. Ces axes renvoient à des critères de différenciations actuels ; ainsi la caractérisation du travail [3] et les réflexions sur les conditions de la sécurité alimentaire des ménages ruraux [4] sont aujourd’hui porteuses de sens. En revanche, l’« exploitation familiale moderne » nous semble difficile à conceptualiser.

15Des économistes ruraux, dont Servolin [1972], s’inspirant des concepts marxistes, montrent combien le système capitaliste s’accommode de la persistance de la « petite production marchande ». Alors que ces auteurs publiaient quelques années auparavant « Une France sans paysans » [Gervais, Servolin, Weil, 1965], ils expliquent le maintien de l’exploitation de petite taille comme l’un des rouages indispensables à l’économie capitaliste. La « petite » agriculture perdure par sa capacité à accepter une rémunération de ses facteurs de production en deçà des taux du marché.

16Dans une perspective libérale, la conception de l’exploitation agricole se rapproche de celle de la firme [Coase, 1937], qui opère sur un marché où elle maximise son profit à partir d’une utilisation rationnelle de ses facteurs de production. Les agriculteurs contribuent à la croissance (et parfois à l’intérêt général) en recherchant leur propre intérêt. Cette vision ne prend pas en compte l’histoire, les règles et les relations sociales ; elle va cependant progressivement se complexifier.

17Singh, Squire et Strauss [1986] modélisent le comportement des ménages agricoles sur ces bases théoriques. Dans leur modèle, l’agent doit maximiser son utilité de consommateur (sous contrainte de budget) et son profit comme entrepreneur (sous contrainte de dotation en facteurs). Le ménage agricole fait aussi des choix concernant l’allocation de son travail entre travail agricole, non agricole et loisirs. Des développements ultérieurs évaluent les conséquences de l’exposition des ménages agricoles à des marchés incomplets ou manquants notamment dans les pays en développement [Janvry, Fafchamps, Sadoulet, 1991]. Ils analysent le bien-être des ménages agricoles, évaluent l’effet des politiques sur la production et alimentent des modèles macroéconomiques.

18Sur le rural africain, des travaux en sciences sociales associant des statisticiens, portent sur la définition d’unités d’observation pertinentes, en écho aux difficultés rencontrées par les praticiens du développement et les chercheurs. Le modèle de l’exploitation familiale importé d’Europe trouve alors ses limites [Winter, 1975]. Le groupe de recherche AMIRA pour « l’Amélioration des méthodes d’investigation en milieu rural africain » préconise d’associer approches quantitatives concernées par l’agrégation et nécessitant des unités d’observation stables préalablement définies, et approches compréhensives et qualitatives dans lesquelles la définition de l’unité d’observation est un des produits des enquêtes [Couty, Winter, 1983]. Deux entrées complémentaires sont proposées : Ancey [1975] entre par les niveaux de décision et le statut des individus au sein de la famille ou dans des espaces sociaux plus larges, alors que Gastellu [1980] analyse les fonctionnalités économiques de résidence, consommation, production et accumulation.

19En subordonnant les dimensions économiques aux pratiques concrètes et aux dynamiques sociales, ces travaux s’inscrivent dans la critique des modèles néo-classiques du ménage [Pilon et al., 1997]. L’Économie rurale africaniste française (ERAF) [Colin, Losch, 1994] participe au développement d’une hétérodoxie fondée sur des principes institutionnalistes. Elle engage à s’éloigner des seuls critères technico-économiques pour caractériser les formes familiales de la production agricole et à porter plus d’attention aux stratégies et aux dimensions structurelles [Yung, Zaslavsky, 1992].

20Ces réflexions rejoignent celles de Paul et al. [1994] qui raisonnent en termes de système d’activités, constatant l’incapacité des approches strictement agricoles à rendre compte de logiques familiales reposant de plus en plus sur le développement d’activités non agricoles. Son utilisation est centrée sur les relations fonctionnelles entre les activités, dans une logique de portefeuille d’activités. Des travaux plus récents tentent d’adapter cette approche intégrant davantage les dimensions non marchandes de ces systèmes [Gaillard, Sourisseau, 2009].

21En Europe, le questionnement s’oriente vers l’évolution des investissements en travail dans les activités agricoles et non agricoles. L’effacement constaté des apports familiaux en travail [Delord, Lacombe, 1990] interroge la pertinence de la catégorie « agriculture familiale ». Le travail familial se limite souvent au chef d’exploitation, parfois à temps partiel, les autres composantes familiales s’investissant en dehors de l’exploitation agricole. Le développement de la pluriactivité concerne de manière massive la place des activités agricoles dans les revenus des ménages [Laurent, 2005]. La pluriactivité est aussi éclairée par les travaux des historiens ruralistes : « au xixe autant qu’au xviiie siècle, l’exception n’est pas le pluriactif, mais le mono actif » [Mayaud, 1999]. La projection sur les agricultures des Sud de modèles de spécialisation historiquement datés repose sur une erreur de perspective.

22Le fait migratoire bouscule le lien à la localité. Les travaux d’Amselle, Aghassian et Saliou-Balde [1978] sur les relations villes-campagnes, prolongés dans les années 1990 par l’analyse des articulations entre ancrage et mobilités au Sud, remettent en cause la sédentarité et l’immobilité paysannes. Une géo-économie des relations villes-campagnes [Chaléard, Dubresson, 1999] et des interdépendances organisées autour de la mobilité individuelle, des flux de produits, de revenus et de services se développe, en même temps que des analyses en termes de territoires-archipels [Veltz, 1996]. D’autres relations se tissent entre les unités familiales, l’agriculture et l’ailleurs vers lequel se déplace une part du travail familial, comme l’attestent les chiffres des transferts monétaires.

23Entre 1970 et 1990, des recherches dans le domaine du développement agricole portent sur la modélisation systémique du fonctionnement des exploitations et l’établissement de typologies agricoles « pour servir l’action » [Brossier, Petit, 1977]. Elles se fondent sur les projets des agriculteurs à partir de l’analyse des systèmes de production, ainsi que sur les trajectoires des exploitations, reconstituées à partir d’enquêtes [Capillon, Manichon, 1979 ; Benoit-Cattin, Faye, 1982]. Dans cette filiation, sont élaborées des typologies sur la base de diagnostics de systèmes agraires qui replacent les exploitations dans leur environnement économique, territorial et institutionnel [Mazoyer, 1987]. Ces travaux seront mobilisés en Afrique de l’Ouest, pour développer des outils de conseil aux exploitants et orienter les politiques de développement agricole [Gafsi et al., 2007].

24D’autre part, les courants institutionnalistes et néoinstitutionnalistes sont progressivement mobilisés dans le cadre d’une économie agricole et rurale élargie. Ils appréhendent le lien entre les unités de production, entre elles et avec leur environnement à travers les règles, les normes, les organisations et l’action collective. La compréhension de l’action collective [Commons, 1934] est un moyen de dépasser le cadre individuel de l’unité de production et d’éclairer les dynamiques à l’origine des transformations agraires. Il s’agit également de porter attention aux règles et modes de coordination, notamment dans le domaine de la gestion des ressources naturelles [Ostrom, 1992] Les néoinstitutionnalistes montrent que la transaction marchande ne se limite pas à l’abstraction de la rencontre d’une offre et d’une demande ; les relations autour de la transaction ont un coût et sont régulées par des institutions. Dans le prolongement des travaux de Polanyi [1944], les dimensions non marchandes des activités agricoles apparaissent comme consubstantielles du « marchand » et concourent à expliquer les systèmes productifs [Groupe Polanyi, 2008]. Ces courants permettent de penser « l’immatériel » au-delà de l’échelle de l’exploitation agricole à travers les organisations et les institutions.

25Médiatisée par différents instituts dont l’Institute of Development Studies et l’Overseas Development Institute, le cadre Sustainable Rural Livelihoods[5] (SRL) aborde le fonctionnement des groupes domestiques en intégrant la pluriactivité, la durabilité et les aspects non marchands [Chambers, Conway 1991]. L’approche rompt avec l’entrée par les pratiques technico-économiques pour se recentrer sur les dotations en capitaux des groupes domestiques, qui bornent leurs stratégies. Le non marchand est notamment capté par le capital social et par une appréhension du bien-être empruntant aux travaux de Sen [2000] ; la durabilité est abordée par le capital naturel qui intègre son utilisation et sa reproduction dans la notion de performances, mais aussi par la capacité de résilience et de résistance de la structure en capital [Scoones, 2009] ; une place est accordée à la dimension institutionnelle du développement, avec l’analyse des structures et des processus facilitant ou contraignant l’accès et la mobilisation des capitaux [Ellis, 2000].

26La période récente voit émerger de nouvelles manières de faire de l’agriculture, notamment à l’échelle des unités de production et dans les modalités de leur connexion aux territoires locaux et au monde. L’intrusion de capitaux financiers extérieurs au secteur tend à disjoindre les détenteurs de capitaux, ceux qui mobilisent les technologies et ceux qui disposent de droits sur la terre. Ce phénomène complexifie les logiques de différenciation des formes de production. Hervieu et Purseigle [2011] insistent ainsi sur l’émergence récente de nouvelles formes d’agricultures familiales en France : l’une « spécialisée, segmentée et très professionnelle ; l’autre sociétaire, qui dissocie le travail agricole et le capital d’exploitation, de la gestion patrimoniale et foncière ». Ils estiment qu’en même temps que se développe l’agriculture de firme, perdurent des formes d’agricultures dites de « subsistance » ou de « relégation ».

27Ce qui se passe dans le secteur agricole n’est-il pas à repositionner par rapport à la mobilité croissante des différents capitaux, dont la rémunération serait rendue possible par ce processus de disjonction ? Ce que Petit [1975, p. 47] n’envisageait pas ne serait-il pas en train de se réaliser ? « Il est essentiel pour la survie de l’entreprise que ce profit soit positif quand ces facteurs de production sont mobiles, […] lorsqu’il est possible de leur assurer, éventuellement hors de l’entreprise, une rémunération égale au prix du marché. On conçoit qu’il puisse ne pas en être ainsi dans le cas de l’agriculture où la mobilité des facteurs de production est loin d’être parfaite ».

28Ce parcours de la littérature montre que les représentations des formes de la production agricole sont régulièrement mises à mal par les réalités. Elles doivent être ajustées et la période actuelle est propice au renouvellement de nos outils.

Un cadre souple et intégrateur d’analyse des formes familiales de la production agricole : l’approche par les livelihoods

29L’approche par les groupes domestiques et les capitaux du cadre Sustainable Rural Livelihoods (SRL) apparaît compatible avec beaucoup d’approches précédemment mentionnées. Elle vise initialement à construire un corpus méthodologique de mesure de la pauvreté, susceptible de fournir des pistes pour l’action. Elle vient des limites des approches disponibles dans les années 1990, centrées sur la production marchande, négligeant la pluriactivité et adoptant des mesures restrictives du bien-être. Elle entend ainsi offrir un cadre de lecture des systèmes d’activité, dans lesquels s’inscrit, parmi d’autres, l’agriculture.

30Dans sa formulation par Chambers et Conway [1991], l’approche s’articule autour de trois concepts. Les capabilities définissent les combinaisons de functionings qu’un individu peut mettre en œuvre, dépendant de ce que cet individu peut aspirer à faire ou à être (doings et beings) [Sen, 2000], et renvoient à la liberté effective de choix et d’action des individus, et non à ce qu’ils possèdent. L’équité n’est pas qu’une mesure relative de la distribution des revenus ; il convient de regarder la distribution des actifs possédés, mais aussi les opportunités qui s’offrent aux individus, et leurs capabilities. La durabilité est entendue comme le maintien d’un niveau de vie qui n’altère pas les niveaux et la qualité des actifs, des opportunités et des capabilities.

31Ces notions éclairent et complètent la dotation en capital des groupes domestiques, qui se répartit en avoirs tangibles (stocks et ressources) et intangibles (exigences, prétentions, opportunités, ou droits d’accès) dans le modèle initial, auxquels on peut ajouter les savoirs et les connaissances. Le capital est ici entendu comme l’ensemble des ressources, y compris immatérielles, dont un ménage dispose, pouvant être accumulées et transmises [Bourdieu, 1980]. Insister sur le caractère intangible de la dotation en avoirs permet de tenir compte de la dimension institutionnelle, de l’action collective, des logiques non marchandes, et des capabilities [Bebbington, 1999].

32Le modèle identifie cinq catégories de capitaux, dont les contenus doivent être explicités. Le capital physique comprend les infrastructures et équipements utilisés pour la production de biens ou de services. Le capital financier comprend les actifs monétaires ou physiques mais facilement convertibles, ainsi que l’accès au crédit. Les auteurs définissent le capital naturel comme des stocks (eau, arbres, qualités des sols, foncier [6], etc.). D’autres auteurs y incluent la dimension humaine de sa mise en valeur et les services fournis par les écosystèmes [Gafsi, 2006]. Le capital humain renvoie aux caractéristiques de la main-d’œuvre familiale (âge, capacités productives, santé, éducation), auxquelles nous choisissons d’inclure les salariés permanents. Le capital social est ici « […] l’ensemble des ressources […] liées à la possession d’un réseau durable de relations plus ou moins institutionnalisées d’interconnaissance et d’inter-reconnaissance […] » [Bourdieu, 1980, p. 2].

33Les contextes locaux expliquent en partie les différentes organisations des systèmes d’activité, et les formes de production. Ils sont à la fois porteurs de dynamiques propres qui s’imposent aux ménages, et de ressources influençables par les ménages et facilitant leur accès et leur possibilité de valorisation des différents capitaux (figure 2 ci-dessous). Les différentes combinaisons de capitaux autorisent la mise en œuvre de stratégies variées reposant sur le déploiement et l’articulation d’activités agricoles et non agricoles.

Figure 2

Le cadre d’analyse SRL

Figure 2

Le cadre d’analyse SRL

Sources : d’après Ellis [2000, p. 30].

34L’évaluation des performances des formes de production et de leurs impacts économiques, sociaux et environnementaux, à différents niveaux d’observation, est extrapolée au niveau territorial, puis confrontée aux déterminants exogènes influant sur l’évolution des territoires.

35Nous pensons que la partie concernant les structures domestiques dans le cadre SRL nous est utile pour mesurer et qualifier les capitaux et appréhender la diversité des formes de production. Le cadre SRL est ainsi mobilisé, non pas comme une proposition théorique exclusive, mais comme une grille d’analyse ouverte. Nous faisons l’hypothèse que la diversité des formes de production familiales peut être appréhendée en positionnant chacune d’elles dans un continuum, entre deux idéaux types : le modèle paysan et l’entreprise agricole de Lamarche [1991].

Décrire la diversité des formes familiales de la production agricole : études de cas

36Nous proposons maintenant d’examiner comment un cadre SRL ainsi élargi permet de décrire des formes familiales contrastées à travers trois études de cas. Le cercle de Diéma, dans la région de Kayes au Mali illustre les liens complexes entre mobilité géographique et caractère familial des exploitations ; les formes sociétaires socles de nouvelles formes de production agricole en France illustrent les hybridations entre famille et entreprise ; l’agriculture patronale brésilienne illustre l’accroissement du travail salarié compatible avec le maintien du caractère familial des systèmes d’activités.

37Ces situations couvrent des formes agricoles d’un PMA, d’un pays agricole anciennement industrialisé et d’un pays émergent ; elles permettent de tester les capacités adaptatives du cadre conceptuel [7].

Résilience d’agricultures conduites par de grands groupes domestiques dans un contexte d’émigration au Mali [8]

38Le Mali compte moins de deux ruraux pour un urbain contre huit pour un en 1961. Avec une croissance démographique annuelle de 3,6 %, la population rurale augmente malgré l’exode. En 2004, 805 000 exploitations [CPS, 2008] faisaient vivre 78 % de la population. Entre spécialisation ethnique, gestion communautaire des ressources, taille élevée des familles et disjonction des unités économiques, ces exploitations sont loin de l’idéal type occidental. Leur organisation évolue cependant : appropriation du foncier au niveau des exploitations, réduction de l’entraide, éclatement des familles et monétarisation des échanges.

39Dans la partie Nord de la région de Kayes, les céréales sèches, l’arachide et le niébé occupent la majeure partie des terres cultivées, avec du riz et du maïs si elles sont irrigables. L’élevage en grande partie transhumant occupe une place importante. La culture, manuelle ou en traction animale, utilise peu d’intrants. Les ressources naturelles sont fragiles, difficiles à valoriser. Les rendements sont faibles et irréguliers ; la vente des produits agricoles représente moins de 20 % des récoltes. L’émigration vers l’Europe (60 % des émigrés) et d’autres pays africains (28 %) est ancienne. Les transferts des émigrés qui ont réussi participent à la consommation, à l’investissement et à la diversification des activités. L’élevage est source d’accumulation et de production ; une part des revenus de la migration est consacrée à l’achat d’animaux. Le capital social est un des moteurs des stratégies des exploitations en termes d’accès aux ressources foncières ou au travail, mais il influe peu sur l’insertion marchande : la part commercialisée est faible et peu d’organisations professionnelles facilitent l’accès aux marchés. Enfin le capital financier, dans ce contexte de pauvreté, dépend en grande partie du capital humain, via l’émigration.

40Les exploitations du Cercle de Diéma comprennent en moyenne de plus de 21 personnes, dont deux émigrés de longue durée, l’un au moins envoyant régulièrement des fonds. Les migrations pour recherche d’emploi, financées par l’exploitation, font partie intégrante des stratégies développées [Azam, Gubert, 2006]. La migration s’avère risquée ; l’exploitation se prive d’un actif et la réussite n’est pas systématique. D’un autre côté, elle ne correspond pas à une sortie de l’exploitation ; celui qui part reste membre du groupe domestique, et s’il rentre, retrouve sa place. L’émigration contribue au maintien des grandes structures démographiques, ce qui participe de la réduction des risques.

41Si les exploitations dégagent de faibles revenus, celles ayant des migrants s’en sortent mieux : 20 % des exploitations les plus pauvres sont aussi celles ne bénéficiant pas de transferts monétaires, quand la migration concourt à plus de 60 % du revenu des 20 % les mieux loties. Les transferts sont d’abord consacrés à la satisfaction des besoins d’alimentation, d’habillement, d’éducation et de santé, puis à la capitalisation (élevage notamment) et au financement des activités productives et enfin, dans quelques cas, à des investissements plus importants dans l’habitat.

42La mobilisation du capital humain en dehors du cadre domestique permet parfois d’améliorer les revenus, mais les taux de scolarisation et d’éducation restent faibles. Si le capital humain est déterminant de la différenciation structurelle des familles, il est surtout lié à la capacité à partir en migration.

Émergence de formes sociétaires mutualisant les capitaux et décentrant le rôle de la famille en France [9]

43Depuis 1945, les performances de l’agriculture en France se sont fortement améliorées. Déficitaire au plan alimentaire après la seconde guerre mondiale, la France est désormais une grande puissance agricole. Nous évoquons ici à la période la plus récente de cette transformation.

44La productivité du travail – estimée en valeur ajoutée brute par équivalent temps plein (ETP) a été multipliée par 5 depuis 1978, alors que la diversification des activités des exploitations et de leur chef se renforce. On observe ainsi des dynamiques de spécialisation/concentration et des processus de diversification, sans que cela débouche sur un réel dualisme. Le capital humain est fortement mobilisé hors de l’exploitation, l’actif principal pouvant travailler à temps partiel sur son exploitation. Le niveau de formation des exploitants a aussi augmenté, du fait des exigences accrues pour pouvoir s’installer comme agriculteur. Ce changement touche les autres secteurs d’activité, mais en agriculture il concerne autant les chefs d’exploitations que les co-exploitants et a été particulièrement rapide.

45Ces évolutions se traduisent par l’émergence de formes sociétaires de production avec des statuts juridiques très variés. Elles représentent le quart des exploitations recensées en 2005 (137 500) et leur nombre augmente de 3,9 % en moyenne entre 1988 et 2007. La gestion des capitaux s’autonomise du domestique : tout ou partie du capital physique est mis en commun et le capital humain est affecté sur la base d’une spécialisation et d’une technicité accrues des tâches. Elles sont désormais reconnues et accompagnées par des mesures légales, à travers les dernières lois d’orientation agricole qui remettent en cause l’unicité du modèle de l’exploitation familiale.

46Les formes sociétaires permettent de mutualiser les coûts du recours au salariat extérieur, qui lui-même permet de se rapprocher de rythmes urbains du travail. Ainsi les tâches considérées comme des astreintes pesant sur les vies de famille sont déléguées. Dans certains cas, le domicile est séparé de l’exploitation. L’agriculture comme mode de vie tend à laisser la place à l’agriculture comme métier, avec des horaires et un rapport au travail proches de ceux des autres secteurs.

47Le capital naturel profite de la mutualisation des capitaux. Celle-ci permet en effet une mise aux normes environnementales plus aisée. Les capitaux financiers peuvent s’accroître grâce aux économies d’échelle. Ainsi, si une des exploitations prend en charge l’atelier « production fourragère » pour deux exploitations qui s’associent, le matériel détenu est valorisé sur des superficies deux fois plus importantes.

Dimensions entrepreneuriales de l’agriculture familiale patronale au Brésil

48L’agriculture au Brésil est duale. Elle oppose des formes entrepreneuriales (800 000 unités) exploitant l’essentiel du foncier et insérées dans les échanges internationaux, et des formes familiales plus nombreuses (4,4 millions d’unités), exploitant 24 % des terres et davantage tournées vers le marché domestique et l’autoconsommation [IBGE, 2006]. Cette dualité est le produit d’une histoire marquée par la place de l’agriculture d’exportation dans la formation socio-économique du pays et l’héritage du modèle colonial d’économie de plantation. Ainsi, l’agriculture familiale brésilienne s’est développée dans les interstices géographiques, sociaux et économiques de l’agriculture d’exportation relevant d’une logique patrimoniale au service exclusif de la couronne portugaise. De fait, la direction des plantations était déléguée à un ayant droit, aux pouvoirs étendus hors de la sphère productive ; le travail était assumé exclusivement par une main-d’œuvre servile [10].

49Aujourd’hui, les formes familiales de la production reflètent une large gamme de combinaisons de capitaux [Baudel Wanderley, 2009], parmi lesquelles figure l’agriculture patronale familiale [11]. Cette forme d’agriculture, développée dans les États du sud, est le produit de la modernisation de la seconde moitié du xxe siècle. Elle a participé à l’expansion de la frontière agricole, se transformant parfois en agriculture entrepreneuriale dans les terres vierges du Cerrados et de l’Amazonie [Graziano da Silva, 1982]. Elle résulte d’une accumulation de capitaux sur plusieurs générations. La terre est transmise par héritage ou acquise en jouant, dans le cadre de migrations générationnelles, sur le différentiel de prix entre frontière agricole et zones de départ. Le recours à l’irrigation et à la mécanisation lourde est courant. Les systèmes de culture, mobilisant intrants agricoles, variétés à hauts rendements et OGM, sont souvent organisés autour d’une ou deux plantes pivots : canne à sucre et fruits dans la région de São Paulo, soja dans le sud, l’ouest et en Amazonie, cacao en Amazonie, café dans la région Sud-Est, productions animales intégrées à l’agro-industrie dans le sud. Les cultures alimentaires sont réduites à un simple jardin. On observe fréquemment la disparition des productions d’autoconsommation : les vergers, les cultures alimentaires de base et les petits élevages [Carneiro, Maluf, 2003].

50Dans les zones du sud et du sud-est du pays, la pluriactivité est fréquente et le conjoint a souvent une activité hors agriculture. Dans la région de São Paulo, les ménages ont souvent une double résidence sur l’exploitation et en ville. Le recours au salariat extérieur, surtout temporaire, est la règle. Fortement insérés dans les circuits marchands, ces agriculteurs recourent aux services techniques privés fournis par les entreprises d’aval ou les organisations auxquelles ils sont affiliés. Dans le Rio Grande do Sul, ils sont insérés dans un tissu coopératif dense touchant l’approvisionnement, la commercialisation, la transformation des produits, le crédit ou la gestion de l’eau.

51L’agriculture patronale bénéficie de relais dans le monde syndical et politique, et a contribué à l’émergence de l’agriculture familiale en tant que secteur sociopolitique cible de politiques différenciées. Au niveau fédéral, elle bénéficie de soutiens spécifiques tels le programme national de renforcement de l’agriculture familiale (crédit rural) ou l’Assurance de l’agriculture familiale [Silveira, 2003]. Les agriculteurs patronaux accompagnent des universités agricoles communautaires privées formant les professionnels de l’agriculture et les élites agricoles.

52L’agriculture patronale se trouve ainsi à l’interface de l’agriculture familiale et de l’agriculture entrepreneuriale. Sa transformation s’est opérée par la combinaison d’une capitalisation financière permise par le crédit rural avec un capital social agissant aux différents niveaux de gouvernance jusqu’à l’État fédéral. Son capital humain a évolué, les liens familiaux se sont transformés avec la moindre implication des actifs familiaux dans la production agricole et la diversification rurale des activités. Son capital naturel s’est globalement maintenu compte tenu de l’absence d’une dégradation manifeste du sol, de la disponibilité en eau et de l’usage d’innovations techniques, comme l’agriculture de conservation.

Décrire la diversité des formes de production agricole : vers un cadre conceptuel ?

53Ces cas se positionnent dans le continuum des configurations possibles issues de la dialectique entre unité de production et unité sociale, entre modèle paysan et entreprise. Elles confirment la formalisation possible d’un cadre conceptuel permettant de juger, sur des critères robustes, de la distance des formes observées par rapport aux idéaux types. Ce cadre – que nous proposons dans cet article – s’appuie sur trois représentations multidimensionnelles, inspirées du cadre SRL.

La représentation des combinaisons des capitaux « agricoles »

54Les combinaisons de capitaux « agricoles » définissent des formes plus ou moins intensives en capital humain ou physique, plus ou moins intégrées au marché, faisant plus ou moins appel à des coordinations non marchandes. Le modèle paysan, tourné vers l’autoconsommation, reposant sur une conception identitaire de l’agriculture, est doté en capitaux naturel, humain et dans une moindre mesure physique. Le modèle d’entreprise, qui cherche à maximiser les revenus et le retour sur investissement et la productivité de la terre ou du travail, s’appuie sur d’importants capitaux financiers, physique, humain (salariat extérieur), et social (réseaux).

55Nous représentons ces combinaisons par un schéma donnant les poids relatifs (attribués subjectivement en scores de 1 à 10) aux différents capitaux « agricoles » (figure 3). Du fait du caractère exploratoire du cadre testé, nous attribuons une note grâce à un examen de la littérature et à dires d’expert. Nous convenons qu’il faudra mieux systématiser et quantifier ces scores, mais l’approche SRL invite à confronter des grandeurs dont certaines seulement sont réductibles à une valeur marchande. Aussi les capitaux ne sont pas rigoureusement comparables quantitativement. Il serait illusoire d’écarter la subjectivité et de se priver d’une expertise qualitative jugeant des importances relatives des ressources et avoirs dans les stratégies et les performances. Cette manière de hiérarchiser les capitaux tient aussi au fait que l’on n’examine qu’une seule forme familiale de production par pays, pour laquelle les connaissances acquises sont solides.

Figure 3

Importance respective des cinq types de capitaux mobilisés dans la production agricole

Figure 3

Importance respective des cinq types de capitaux mobilisés dans la production agricole

Sources : élaboration par les auteurs.

56Les études de cas témoignent de situations contrastées avec des dotations en capital financier et physique faibles en valeur au Mali (peu d’équipement et d’infrastructures, des difficultés à mobiliser des ressources financières), et élevés en France et au Brésil.

57Au Mali, la production agricole repose sur les capitaux naturel – malgré la fragilité des ressources –, humain (travail familial, connaissances empiriques) et social (existence de réseaux influant sur l’accès aux ressources, les activités et leurs rémunérations, malgré le développement de l’individualisme et la faible présence d’organisations professionnelles). La pondération de ces capitaux est toutefois faible à cause des migrations.

58En France, la production agricole repose sur un faible capital humain (moindre investissement dans l’agriculture). Certaines formes sociétaires mobilisent un faible capital naturel (mutualisation des efforts de mise aux normes et de changement des pratiques), et se rapprochent de logiques hybrides entre entreprises, coopératives ou associations, au capital social s’articulant autour de logiques sectorielles.

59Les formes patronales au Brésil mobilisent des capitaux, physique et financier, permettant une agriculture commerciale performante qui résulte aussi, et comme en France, d’un capital social élevé visant à jouer favorablement sur son environnement économique, politique et institutionnel. Ses défenseurs se comptent parmi les universitaires, les cadres de l’administration et le personnel politique.

La représentation des combinaisons de capitaux « non agricoles »

60Nous représentons selon la même méthode les capitaux « non agricoles » illustrant la pluriactivité et les mobilités. Ces dimensions n’entrent pas dans la caractérisation usuelle des idéaux types dans la littérature. L’idéal type paysan n’est pas mobile et se consacre à l’agriculture [12]. Son appartenance à sa communauté est peu altérée s’il mobilise des capitaux humain et social « non agricoles », à condition que les liens au sein de cette communauté soient respectés [Chaléard, Dubresson, 1999]. Ceci signifie que les activités non agricoles reposent sur des solidarités et non sur le marché. De même, la mobilité dans des réseaux élargis (même à longue distance), reproduisant dans un ailleurs la logique communautaire, ne rompt pas avec le caractère paysan. L’idéal type de l’entreprise est spécialisé, mais s’il est pluriactif ou mobile, il mobilisera capitaux physique et financier pour viser la maximisation de la rentabilité commerciale reproduisant l’intensité capitalistique de la production agricole.

61Selon les mêmes principes, que pour les capitaux « agricoles », les combinaisons de capitaux sont représentées. Elles mesurent ainsi la nature du décentrage des stratégies domestiques par rapport à l’activité agricole, par la pluriactivité et/ou la mobilité. On note les mêmes différences en termes d’estimation globale de ces capitaux.

Figure 4

Importance respective des cinq types de capitaux mobilisés en dehors de l’agriculture

Figure 4

Importance respective des cinq types de capitaux mobilisés en dehors de l’agriculture

Sources : élaboration par les auteurs.

62Au Brésil, les agricultures patronales peuvent mobiliser une partie de leurs capitaux physiques et financiers dans des activités non agricoles ou investir dans le but de générer des rentes : commerce, artisanat, immobilier et autres formes de placements. Les groupes domestiques ont accès à du salariat de l’un des membres, notamment dans des domaines d’emplois qualifiés (contrairement au Mali où le capital humain est limitant pour accéder à des emplois mieux rémunérés).

63En France, les formes sociétaires reposent sur des combinaisons de capitaux humain (par le travail), financier et social, mais en mobilisant le capital naturel par des activités prolongeant l’activité agricole (tourisme et transformation des produits agricoles de l’exploitation).

64Le Mali fournit un contraste fort avec le Brésil car les stratégies migratoires se fondent sur une combinaison de capitaux humain, social et financier pour financer les départs. Il apparaît que les types de pluriactivité conduits jouent moins sur les dynamiques agricoles proches de celles de l’entreprise. Dans les autres situations, ils accompagnent une prise de distance par rapport à l’idéal paysan en affectant l’allocation des capitaux travail et social.

La représentation du caractère familial des capitaux « agricoles »

65Notre élargissement du cadre SRL repose sur l’appréhension du caractère familial des capitaux « agricoles » (appropriation et gestion). Dans le modèle paysan, les capitaux sont entièrement aux mains du groupe domestique (pour le foncier au niveau de la famille élargie voire de l’ensemble de la communauté). Dans le modèle d’entreprise, les capitaux échappent à la gestion familiale et sont disponibles sur un marché ouvert et parfait.

Figure 5

Niveau relatif de maîtrise par la sphère familiale des cinq types de capitaux engagés dans l’agriculture

Figure 5

Niveau relatif de maîtrise par la sphère familiale des cinq types de capitaux engagés dans l’agriculture

Sources : élaboration par les auteurs.

66Les représentations en étoile accordent à chaque type de capital « agricole » un score de 1 si la famille est dépossédée de la gestion à 10 si la gestion est exclusivement familiale.

67Dans les zones d’émigration du Mali, le groupe domestique contrôle les capitaux « agricoles ». Les règles communautaires, notamment foncières, reconnaissent l’individu, mais la famille conserve l’appropriation et la gestion du travail et son caractère paysan. L’éloignement avec le modèle paysan s’opère par les mobilités, et par un affaiblissement partiel du capital social « agricole » par son externalisation vers des associations pouvant se structurer à grande échelle. Dans le cas d’aménagements hydro-agricoles, les règles de gestion limitent le pouvoir décisionnel au niveau du groupe domestique.

68Dans les formes sociétaires françaises, le groupe domestique tend à s’effacer devant les exigences de la coordination des ateliers mis en œuvre, ce qui conduit à fragmenter et à externaliser vers des entités collectives le contrôle des capitaux (et en particulier le capital physique). La maîtrise familiale se réduit à l’atelier dont chaque producteur a la charge. Cela renforce une spécialisation par atelier, le produit final restant réparti entre chaque exploitation. On a donc des formes différenciées de coordination : à caractère paysan au niveau des ateliers et à caractère « coopératif » sur le modèle de l’entreprise au niveau de l’exploitation.

69L’agriculture patronale brésilienne repose sur une intégration au marché qui se traduit par des capitaux financier et physique peu contrôlés par la famille. Elle recourt au salariat et mobilise un capital social (relations sectorielles et professionnelles) en dehors du cercle domestique. Ce qui rapproche le plus ces exploitations du modèle paysan est leur rapport au foncier qui peut rapidement se distendre et se recomposer dans des logiques marchandes externalisées.

Conclusion

70Le cadre conceptuel proposé offre des représentations simples et accessibles d’agricultures très différentes. Il facilite ainsi les comparaisons et permet la mise en œuvre de diagnostics et d’observations originales.

71La caractérisation et la pondération des différents indicateurs par type de capital joue comme un pense-bête, en invitant à tenir compte de tous les éléments constitutifs des capacités et des stratégies (agricoles ou non) des groupes domestiques. La qualification de tous les types de capitaux, apparaît en particulier intéressante non seulement pour caractériser les pratiques agricoles, mais aussi les différentes pluriactivités et mobilités, que l’on sait aujourd’hui structurantes. Le cadre a l’avantage, pour ne pas perdre la complexité des processus à l’œuvre, de combiner plusieurs approches complémentaires.

72Il invite aussi, par le jeu des pondérations, à tenir compte des interrelations entre les différents capitaux, souvent explicatives des stratégies. Les représentations proposées permettent, ensemble, d’affiner les critères de différenciation duale des agricultures familiales entre l’agriculture paysanne et l’entreprise. Au principe utilisé par Lamarche [1991] du croisement entre dépendance aux marchés et à la famille, le cadre SRL ajoute la notion de capabilities, permet de traiter la question des unités économiques de production, consommation et résidence, tient compte des dimensions marchandes et non marchandes des systèmes d’activité, et replace les exploitations dans leur environnement institutionnel.

73Si elle facilite la différentiation des formes familiales de production agricole, la méthode de représentation ne propose pas de typologies. Elle ne vise pas à regrouper les formes de production par grand type ; elle part plutôt du principe de l’existence d’une infinité de situations possibles.

74Le retrait partiel de la famille de la gestion des capitaux engagés dans l’agriculture permet enfin de mesurer la fragmentation des opérations agricoles, des responsabilités et de la répartition de la richesse produite. C’est un élément décisif de la compréhension et de l’accompagnement des transformations des agricultures familiales.

75Mais ce cadre est exploratoire et devra être affiné, en particulier sur l’évaluation des différents capitaux. Le « comment évaluer » pose déjà question : comment apprécier le capital humain selon les types de compétences acquises ou mobilisées en fonction de leur origine ? Comment le mesurer et, par suite, comment le comparer aux autres types de capitaux et comment comparer des situations nationales ou locales extrêmement différentes autrement que par le recours à des « dires d’acteurs » ? Des clarifications et des arbitrages seront nécessaires, qui invitent à un important travail de recherche empirique.

76Un des défis consiste à comparer et donc à hiérarchiser les éléments tangibles et intangibles de la dotation en capital des groupes domestiques. Si l’on sait globalement quantifier les capitaux physique et financier et que l’on peut envisager de se doter de définitions stabilisées des capitaux naturel, humain et social, la conversion de ces cinq catégories à des valeurs marchandes ne correspond pas aux soubassements théoriques du cadre proposé. Il faut assumer une posture subjective valorisant l’empirisme et l’expertise localisée, pour construire des grilles de notations qualitatives, des scores qualifiant le bien-être espéré de la mobilisation des avoirs disponibles, etc. La comparaison entre des situations éloignées porterait alors davantage sur les contributions relatives des différentes catégories au bien-être et sur l’importance relative des dimensions familiales des organisations, que sur les aspects quantitatifs des performances. Parmi les développements possibles de ce travail figure donc aussi la mesure renouvelée des performances des agricultures familiales.

77S’ouvre ainsi un chantier ayant pour ambition de rendre le cadre robuste en multipliant les études de cas et en les approfondissant, et d’adapter nos manières de voir l’agriculture familiale pour en suivre les dynamiques.

Notes

  • [*]
    Cirad ES, UMR ART-Dev.
  • [**]
    Cirad ES, UMR MOISA.
  • [1]
    En référence à Philippe Couty [1987].
  • [2]
    Qui définit ainsi la société industrielle : séparation de l’entreprise et de la famille, division du travail, accumulation du capital, calcul rationnel et concentration ouvrière sur le lieu de travail.
  • [3]
    Djurfeldt et Waldenström [1996] utilisent le rapport entre travail familial et salarié comme clé de différenciation des exploitations suédoises à partir des recensements agricoles ; Bergeret et Dufumier [2002], distinguent les exploitations familiales, patronales et capitalistiques en fonction du type de travail mobilisé.
  • [4]
    La sécurité alimentaire est appréhendée comme une combinaison d’autofourniture et de recours au marché, via des revenus agricoles ou non agricoles.
  • [5]
    Ce terme est difficile à définir (the means of gaining a living [Chambers, Conway 1991] ; the activities, the assets, and the access that jointly determine the living gained by an individual or household [Ellis, 2000]), et à traduire.
  • [6]
    Nous positionnons ici le foncier, alors que dans d’autres approches [Bergeret, Dufumier 2002], il est envisagé comme capital physique.
  • [7]
    Ces études de cas sont partielles et ne représentent pas la diversité nationale.
  • [8]
    Les analyses sont majoritairement issues du programme RuralStruc [Samake et al., 2008].
  • [9]
    Les analyses de cette partie renvoient aux tendances globales exprimées par Gambino, Laisney, Vert [2012], et s’appuient sur une expérience empirique en Aveyron entre 1995 et 2007 dans le cadre d’un master professionnel.
  • [10]
    Les œuvres classiques de Freire, Prado et Furtado décrivent cette agriculture de plantation.
  • [11]
    Au Brésil, on distingue (i) l’agriculture familiale dont la gestion et travail sont réalisés par les actifs familiaux, (ii) l’agriculture patronale familiale et (iii) l’agriculture entrepreneuriale dont la gestion et le travail sont confiés à des salariés.
  • [12]
    Il s’agit là d’un idéal type, les mobilités traversant les histoires agraires.
Français

Résumé

Les transformations des agricultures familiales interrogent le monde académique et les politiques. Cette interrogation traverse l’histoire des représentations de l’agriculture depuis un siècle. Les manières de voir les agricultures ont accompagné ces transformations. Aujourd’hui, l’agriculture familiale acquiert une légitimité internationale mais elle est questionnée par les évolutions des agricultures au Nord comme aux Suds. Le cadre Sustainable Rural Livelihoods (SRL) permet une appréhension globale du fait agricole comme une composante de systèmes d’activités multisectoriels et multisitués dont les logiques renvoient à des régulations marchandes et non marchandes. Le poids relatif et la nature des capitaux mobilisés permettent de représenter de manière stylisée trois formes d’organisation de l’agriculture familiale au Brésil, en France et au Mali. Une caractérisation plus générique, qu’esquisse notre proposition de modèle conceptuel est enfin proposée, qui pose de nouvelles questions méthodologiques.

Mots-clés

  • agricultures familiales
  • sustainable rural livelihoods
  • paysans
  • entreprises
  • pluriactivité
  • mobilité
  • diversité
  • Brésil
  • France
  • Mali

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Jean-Michel Sourisseau [*]
  • [*]
    Cirad ES, UMR ART-Dev.
Pierre-Marie Bosc[**]
Sandrine Fréguin-Gresh[**]
Jean-François Bélières[*]
Philippe Bonnal[*]
Jean-François Le Coq[*]
Ward Anseeuw[*]
Sandrine Dury [**]
  • [**]
    Cirad ES, UMR MOISA.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 07/12/2012
https://doi.org/10.3917/autr.062.0159
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