CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1L’anthropologue accepte de plus en plus les sollicitations qui peuvent lui être faites d’apporter sa contribution à un débat d’intérêt général sur les questions de santé. Depuis une bonne dizaine d’années, la mise en place des politiques de santé s’effectue en association de plus en plus étroite avec les échelons locaux de la santé publique, à la suite de consultations successives avec les partenaires professionnels et les publics concernés [Laurent-Beq, 1999]. On peut citer, par exemple, à La Réunion, l’organisation des États généraux de la santé de 1999 qui ont vu se succéder après un certain nombre de réunions d’un comité de pilotage : journées régionales sur le thème de « la santé pour tous » (« Conditions sociales et accès aux soins et à la prévention »), journée nationale de clôture en avril, puis conférences nationales de santé en mars 2000, mais aussi l’organisation des sept Conférences régionales de santé qui ont été annuellement organisées par les DRASS entre 1995 et 2001 pour valider notamment des PRS (Programmes régionaux de santé). L’objectif est d’établir un « débat démocratique sur toutes les questions de santé » et de « créer une dynamique » autour de « l’appropriation par les citoyens des enjeux de la santé » [1]. Avec maintenant un peu de recul, on s’aperçoit que ces conférences aboutissent le plus souvent à la définition de grands objectifs et essentiellement à une programmation stratégique qui produit moins d’effets que prévus sur le plan opérationnel, faute de moyens financiers et de personnels spécialement formés pour mettre en application ces nouvelles orientations. En parallèle, ces réunions peuvent être l’occasion pour l’anthropologie de faire valoir un point de vue, une connaissance particulière des questions de santé, éventuellement une méthodologie d’enquête ou d’intervention qui peut prendre place, avec plus ou moins d’efficacité, dans les dispositifs classiques d’investigation, et plus particulièrement ceux qui sont concernés par la prévention (études épidémiologiques, études des observatoires de la santé, informatique médicale, démographie médicale, études juridiques et économiques, etc.).

2Les DOM (départements d’outre-mer) n’échappent pas à la règle, au nom de la continuité territoriale et de l’égalité républicaine qui doit se traduire ici par une participation active aux débats démocratiques de tous les «?citoyens français?» concernés par la politique nationale de santé. Et l’anthropologue, toujours plus conscient de la nécessité de promouvoir sa discipline dans les milieux professionnels qui peuvent plus particulièrement offrir des débouchés pour les apprentis anthropologues, participe toujours plus activement à ces activités. Il peut s’agir de comités d’organisation, d’animation de groupes de discussion et d’atelier, voire de participation concrète à des travaux programmés à l’issue de ces consultations, en particulier par l’intermédiaire des PRS. Nous nous sommes ainsi, dans ce cadre, investis à partir de 1994 dans la Programmation stratégique des actions de santé (PSAS), cadre d’intervention qui a précédé la mise en place des Programmes régionaux de santé (PRS), autour du diabète, sur la base d’un travail très ordinaire pour un anthropologue?: effectuer ou faire effectuer des enquêtes ethnographiques auprès de patients diabétiques (en particulier par l’intermédiaire de structures d’aides aux patients), de personnes à risques (notamment autour de la question de l’obésité) ou de formes spécifiques de la maladie (par exemple le diabète gestationnel). La question principale qui était posée à l’anthropologue était celle de la méconnaissance de la représentation culturelle de la maladie et plus généralement de toute maladie chronique. Le «?contexte socioculturel?» réunionnais, celui du pluralisme ethnique, de la créolité (langue et culture créoles), de l’exclusion sociale et de la pauvreté dans certains milieux, faisait obstacle à la prise en charge du patient diabétique et au volet prévention que les acteurs de santé publique se proposaient de mettre en place. Les demandes et parfois des commandes [2] se multipliaient alors?: rôle des femmes dans les comportements alimentaires, implication des modes de vie réunionnais, représentations sociales de la maladie, prévalence dans une ethnie particulière, non implication du réunionnais dans la prise en charge individuelle de la maladie, etc.

3Nous aurions pu nous limiter à apporter des éléments de connaissance ethnologique dans chacun de ces registres. Mais l’intervention de l’anthropologue auprès de ces experts, à leur demande et à la suite d’échanges plus ou moins construits, nous permettait en même temps de situer les avancées enregistrées au niveau de l’émergence d’une nouvelle configuration sanitaire plus apte à prendre en charge les impératifs de la prévention. Ce travail anthropologique qui relève à la fois de l’anthropologie politique et de l’anthropologie des systèmes de santé nous permet d’analyser à la fois la relation entre le malade et son médecin, l’expérimentation d’une nouvelle forme de «?démocratie sanitaire?» et les rapports qui s’établissent entre les niveaux communautaires et institutionnels de la participation aux politiques de prévention. En effet, dans le domaine de la prévention qui nous intéresse ici plus particulièrement, encourager «?l’appropriation par les citoyens des enjeux de la santé?» (qui, comme on l’a vu, était l’un des objectifs des États généraux de la santé de 1999) conduit à s’interroger sur le rôle qui pourrait être dévolu à certains acteurs, à la population en général et aux représentants de certains groupes ou organismes plus particulièrement concernés par les dispositifs de prévention et d’amélioration de la prise en charge des patients. Cette direction nous a semblé intéressante à explorer, en suivant de près la mise en place de quelques actions entrant dans le cadre des politiques locales de prévention.

4L’apport de l’anthropologie se situe alors plus au niveau de l’analyse des rapports qui s’établissent entre les équipes soignantes, les institutions en charge de la prévention et les populations concernées qu’au niveau de la stricte connaissance anthropologique de la maladie. Mais il n’y a aucune exclusive, ce qui signifie en particulier que nous avons continué à mener des enquêtes auprès des diabétiques réunionnais ou des personnes à risques, en particulier dans le cadre des recherches entreprises au sein d’un réseau régional de santé publique INSERM consacré à la prévention du diabète et de ses complications [Corbel, 2002]. Il faut en effet tenir compte des caractéristiques du système de santé à La Réunion, en particulier du pluralisme médical qui résulte de la présence de populations de différentes origines culturelles (Indiens de religion hindoue ou musulmane, Comoriens, Malgaches, Chinois, etc.) [3], et partir d’hypothèses construites autour de l’applicabilité des politiques de santé dans le contexte réunionnais. Il s’agit en fait de questionner à la base les dispositifs d’intervention en prévention primaire et secondaire?: les tâches professionnelles, la relation soignant-soigné, la sollicitation de la participation des sujets locaux, etc.?; de voir comment le contexte de l’interculturalité affecte tout autant la pratique préventive quotidienne que la conception des programmes d’intervention.

5Notre conviction était que l’approche anthropologique du diabète, centrée sur la maladie ou les comportements à risques, devait impérativement se doubler d’une anthropologie politique de la prévention, centrée sur le système de santé dans sa globalité (niveau global et niveau local) et sur «?la culture de l’institution?» qui oriente le «?raisonnement préventif?». Nous verrons dans un premier temps comment on peut situer ces préoccupations dans le champ de la santé publique et dans celui de l’anthropologie médicale. Dans un second temps, on s’intéressera de plus près à la problématique du diabète à La Réunion, aux points de vue et aux demandes qui sont formulés par les épidémiologistes et par les médecins de santé publique impliqués dans l’éducation et la promotion de la santé, en fonction de quelques «?textes?» de référence qui viennent orienter le raisonnement préventif [4]. On présentera en conclusion quelques orientations méthodologiques qui peuvent nous permettre de participer plus activement à cette réorientation des programmes de prévention.

La prévention du diabète entre anthropologie et santé publique

6La mobilisation des autorités sanitaires locales autour du diabète a été effective dès 1992, suite à une enquête de prévalence menée par la cellule épidémiologique du conseil général et le laboratoire de biologie du CHD (Centre hospitalier Dionysien) qui faisait apparaître un taux de 7,43 % dans la population de 18 ans et plus, soit environ 27?000 à 29?000 diabétiques dont un malade sur quatre qui ignorait son état de maladie. L’indice de surmortalité était 2,5 fois plus élevé qu’en métropole. Préférentiellement, le diabète atteint les femmes après l’âge de quarante ans. On souligne également l’importance de l’alcoolisme et de ses conséquences sur des diabètes par pancréatite chronique [5].

7L’échelon local du service médical de la Sécurité sociale avait par ailleurs mis en place un comité diabète pour faire face au problème de la surmédicalisation en 1994. Puis, la même année, ont été mis en place par la DGS (direction générale de la santé) des PSAS (Programmations stratégiques d’action de santé), cadre dans lequel nous sommes intervenus pour la première fois en juin 1995 sous la forme d’une proposition de recherche?: une «?anthropologie du diabète?» présentée dans une perspective de santé publique, en liaison avec les approches épidémiologiques proposées [Cherubini, 1995]. Le modèle d’analyse proposé a été utilisé pour l’étude de ces situations d’acculturation qui mettent en jeu l’histoire de la migration et l’histoire de la maladie des Haïtiens en Guyane [Cherubini, 2002a, 2002b]. Il s’inspire de méthodes de travail utilisées en sémiotique de la culture?: l’étude de la composante sémantique d’un langage naturel fait de signes et de symboles d’une identité que l’on cherche à cerner, de signes artistiques et esthétiques qui forment un système de communication où la structure de la langue n’est pas fixée d’avance, où la fonction informative est dévolue à la communication et non à la langue [Lotman et Ouspenski, 1980]. Il s’agit de prendre les principales caractéristiques des tableaux pathologiques comme objets esthétiques, pour retrouver les éléments du «?cours de vie?» (au sens donné par Alfred Schutz [1987] pour désigner la construction d’attentes typiques quant au comportement de l’Autre), mêlés à des reconstructions partielles ou arrangées de la culture locale, de l’univers magico-religieux et de l’organisation socio-familiale. Le patient met lui-même en scène ses luttes et ses conflits dans son environnement social immédiat (parenté, voisinage, réseaux sociaux) et dans son système étiologique traditionnel. Il définit lui même son espace de la maladie. Il énonce des situations d’interactions quotidiennes à l’intérieur desquelles son identité est mise en scène. Cette identité est négociée à l’occasion de ces interactions, mais également lors des échanges qu’il peut avoir avec le médecin et différents intervenants dans l’espace thérapeutique.

8À La Réunion, avec un diabète qui affecte 10 % de la population réunionnaise [Bazely et Catteau, 2001], la nécessité de mettre en place une étude épidémiologique a été rapidement affirmée. En effet, les actions de prévention en cours depuis un ou deux ans avaient été préparées en l’absence de données précises concernant les diabétiques connus et potentiels. Les diabétologues cliniciens souhaitaient par ailleurs connaître, eux aussi, l’ampleur du phénomène, à la fois sur le plan quantitatif et qualitatif. On supposait la prévalence supérieure aux chiffres jusqu’alors avancés. Le profil de risque devait être lui aussi affiné. C’est ainsi qu’une étude épidémiologique effectuée sur un échantillon de 3?600 personnes âgées de 30 à 69 ans [6] a fait apparaître une prévalence supérieure à 11 % [7], soit largement plus que les estimations avancées avant que ne commence l’étude (entre 5 et 10 %). Les inquiétudes des autorités se voyaient donc largement confirmées.

9C’est dans ce contexte que nous avons participé, avec quelques chercheurs de notre jeune équipe (M. Roddier, G. Potier, F. Martinet), aux travaux du groupe de pilotage du PRS et des conférences régionales de santé. L’anthropologie est amenée à servir d’appui au raisonnement très médicalisé de la prévention du diabète avec pour objectif d’améliorer notre connaissance des facteurs de risque identifiés par la clinique et l’épidémiologie. On sait que le thème de la prévention est relié en santé publique à celui de l’épidémiologie clinique par l’intermédiaire des notions de risque et de contexte. Entre les facteurs de risque définis par la clinique, d’un point de vue biomédical (surpoids, obésité, hypertension artérielle, etc., selon le sexe et l’âge) et les facteurs de risque tels qu’ils sont perçus dans la population, vient généralement se glisser la notion de contexte culturel ou de contexte social (que je cite ici dans un sens donné en santé publique, indépendamment de la notion de contexte utilisée par la suite qui, elle, est inspirée de la sémiotique de la culture), une notion qui a par ailleurs une incidence directe sur la caractérisation de certains facteurs de risque, en particulier ceux qui sont dits «?liés au mode de vie et à l’environnement?» [8].

10En anthropologie, on va considérer que le contexte culturel qu’il importe de prendre en compte est celui du pluralisme médical avec un système de santé qui est à la fois articulé à des savoirs traditionnels, trop rapidement réduits aux logiques propres qui organisent la médecine dite traditionnelle, et à un savoir médical, lui aussi abusivement réduit à la logique propre de la médecine occidentale [Benoist, 1993]. Or il est bien évident que cette dernière doit elle aussi faire l’objet de la recherche anthropologique. Sylvie Fainzang [2001, p. 8] nous rappelle avec insistance que l’un des paris de l’anthropologie médicale est de soumettre aussi la biomédecine à ses outils d’analyse, c’est-à-dire de «?considérer le système biomédical, son discours et ses pratiques, comme n’importe quelle autre pratique populaire, comme n’importe quel objet exotique?». Les approches socio-cognitives d’Aaron Cicourel [2002, p. 145], appliquées par exemple au «?raisonnement médical?», nous montrent parfaitement que «?les diagnostics ne sont pas seulement complexes du point de vue cognitif, ils le sont aussi du point de vue social?: ils impliquent le plus souvent de cerner et d’évaluer les opinions d’individus qui n’ont ni le même niveau, ni le même champ d’expertise?».

11On voit ainsi se développer et se reproduire toutes les liaisons, tous les fondements sociaux et culturels, toutes les valeurs qui sous-tendent l’action et l’intervention quotidienne des individus, des groupes, des communautés. La «?recherche-action?» développée autour de la prévention, telle qu’elle est souhaitée par les professionnels de la santé, pourra cependant être orientée immédiatement sur des essais d’intervention (comme l’information des publics diabétiques ou non diabétiques) et leur évaluation, en prévention primaire ou secondaire?: en direction de personnes à risques ou de personnes hospitalisées. Il peut s’agir, par exemple, d’évaluer l’efficacité en prévention primaire (auprès de personnes à risques dans des quartiers où se mettent en place des actions santé), comme en prévention secondaire (auprès de diabétiques hospitalisés, dans le cadre d’une éducation nutritionnelle, etc.) des actions menées autour de l’équilibre de l’alimentation ou de l’activité physique, ce qui permet, en théorie, de tester directement l’hypothèse de «?l’influence du mode de vie et des habitudes alimentaires locales?» [9]. Pour toutes ces questions, il s’agit avant tout d’examiner la réactivité des populations face aux messages de prévention, leur compréhension des messages et les risques encourus en cas d’incompréhension, comme si le seul niveau d’interrogation acceptable était celui du comportement de la population. Il a paru rapidement évident que c’était l’ensemble du dispositif mis en place autour de la prévention du diabète qui souffrait d’une absence de réflexion de fond sur le contexte d’application des politiques de santé.

12Cela veut dire, à notre niveau, que l’on ne peut pas réduire la demande de participation de l’anthropologie à une injonction du type?: apporter une réponse précise en termes de «?contexte culturel?» à la bonne ou mauvaise diffusion des messages de prévention ou, encore, solutionner un problème de communication entre les professionnels de la prévention et la population locale («?ils ne comprennent pas ce qu’on leur dit?», «?je ne comprends pas ce qu’ils me disent?»). Plusieurs recherches autour du sida ont pu montrer les limites de cette relation d’implication?: les logiques préventives issues d’une meilleure connaissance de la maladie se heurtent aux pratiques quotidiennes des différents acteurs, à l’incohérence de certains comportements par rapport au discours médical préventif [Fainzang, 1997]. Il faut donc prendre en compte le mécanisme de construction de cet espace (social) de prévention?: le jeu des acteurs locaux, institutionnels, associatifs, autres?; les relations de pouvoir à l’intérieur de ce système de santé?; bref, tout ce qui concourt à faire de cet espace un espace politique (au sens anthropologique du terme). Le recentrage récent de la prévention et de la promotion de la santé sur «?la participation citoyenne à toutes les décisions de santé publique?» et sur «?la participation des communautés aux programmes qui visent à créer des conditions favorables à la santé?» [10], est là pour nous le rappeler.

13Sur le terrain, une telle pression se traduit le plus souvent par un retard constant au niveau de l’assimilation de ces multiples directives de santé publique et par un retour aux certitudes de la pratique quotidienne. Les «?savoirs professionnels?» du diabétologue, du néphrologue, du médecin de santé publique, tels qu’ils peuvent s’exprimer dans une pratique quotidienne construite au fil des demandes de réorientation des politiques de santé, sont le plus souvent des «?énoncés d’observation?», fruits d’une observation concrète sur le terrain, que l’anthropologue recueille sous forme de discours, que ceux-ci soient proférés lors de réunions institutionnelles (réunions de comités de pilotages, de groupes de travail) ou lors d’entretiens d’enquête sur un lieu de travail ou ailleurs (le discours d’un informateur). Par exemple, les médecins réunionnais peuvent formuler des options stratégiques comme faire remonter les informations de santé des enfants vers les parents, en faisant le constat que les plus jeunes sont plus «?manipulables?» car moins empreints d’habitudes traditionnelles, que ce sont eux qui font les achats alimentaires dans les petites «?boutiques chinois?» du quartier, surtout dans les milieux défavorisés [Roddier, 1995, p. 31]. L’anthropologue va ensuite analyser ces discours et essayer de resituer «?la culture de l’institution?» à travers «?un procesuus qui exprime une cohérence globale?» [Bellier, 1997], émettrice de ces énoncés, dans le contexte actuel de la prévention.

14La question de savoir s’il est nécessaire de s’intéresser à la «?mise en perspective sociologique de la façon dont il est parlé de la santé dans les discours éducatifs ainsi que dans la rationalité institutionnelle et politique propre aux promoteurs d’éducateurs pour la santé?» [Bouchayer, 1984, p. 101] ne s’est pas trouvée posée uniquement depuis les récentes tentatives de revoir en profondeur les fondements et l’efficacité des politiques de prévention. La sociologie de la santé (par des travaux en l’occurrence ici très proches de l’anthropologie médicale) s’est intéressée, par exemple, au rapport des femmes au risque dans le domaine de la contraception pour découvrir que le risque perçu par les femmes n’est pas celui dont parlent les médecins [11]. Autrement dit, on a toujours fait le constat que la gestion du risque n’avait pas la même signification pour les éducateurs et pour ceux qui reçoivent leur message, mais on n’a que très rarement remis en cause l’approche rationalisée et la définition univoque du risque dans la plupart des discours «?préventologues?». Supprimer le risque a toujours consisté à «?vaincre les résistances?» [Bouchayer, 1984], donc à rendre plus efficace la diffusion des messages éducatifs. Le discours de l’anthropologue qui met en évidence une diversité de représentations et de pratiques socioculturelles doit trouver sa place dans ces actions qui visent à supprimer ces fameux risques.

15Du point de vue de l’efficacité des politiques de prévention, ce ne serait donc pas tellement l’efficacité des messages qui compterait mais plutôt l’efficacité de la communication. Cette question du pouvoir de la communication [Winkin, 2001] est bien posée par Pierre Bourdieu [1997, p. 237]?: comment transformer des «?relations de forces brutes […] en relations de pouvoir symbolique?». Au niveau de ce que nous avons appelé «?le raisonnement préventif?», il s’agit de savoir comment enseigner les comportements de santé ou de prévention adéquats en les étendant à tous les aspects de la santé, par exemple, à partir de la connaissance des risques mais aussi de leurs déterminants psychologiques et sociaux. S’exprimant du point de vue de l’éducation du patient, Alain Deccache et Philippe Meremans [2000, p. 151] considèrent qu’il faut tenir compte du fait que l’on «?vise plus à apprendre la maladie que la santé en n’excluant d’ailleurs pas l’autre, parce que l’on considère que le patient est une personne engagée volontairement dans une relation de soins avec un professionnel des soins?».

16Tout ceci explique que nos objectifs de recherche sont désormais plus centrés sur une anthropologie des systèmes et des politiques de santé, suivant en cela un cheminement qui est en partie guidé par l’évolution même des PRS?: d’un besoin de connaissance de la pathologie et des modes de comportement, face à la maladie et à la prévention, à un besoin d’évaluation des politiques sanitaires et de l’efficacité des dispositifs de prévention [12]. C’est la crédibilité des projets et des propositions d’intervention qui est réexaminée à ce stade d’évolution du PRS. En effet, on a vu que différents problèmes avaient été pointés, dès 1994, au niveau du PSAS dont une surmédicalisation qui se traduisait, en particulier, par un excès de diagnostic, par un recours trop fréquent à l’insuline ou encore une mauvaise connaissance des comportements liés à la chronicité, qui correspondait, entre autres, à une absence de réflexion sur la qualité de vie des patients. Le premier aspect, celui de la surmédicalisation, pouvait constituer une remise en cause de la pratique médicale et concerner le diagnostic, l’intervention des infirmiers libéraux et d’autres acteurs, l’hospitalisation, etc. Le second aspect, celui de la chronicité, ne paraissait pas constituer un problème en soi, au regard des difficultés rencontrées par les professionnels de la santé pour faire passer leurs messages de prévention ou d’éducation thérapeutique. Ces aspects sont très vite passés au second plan, au bénéfice d’une réflexion plus centrée sur le contexte culturel réunionnais que l’on va retrouver dans les prédispositions génétiques et environnementales, les aspects héréditaires, les comportements alimentaires et la sédentarisation de la population, présentés généralement comme étant à l’origine de la forte prévalence enregistrée à La Réunion.

Les fondements de la politique de prévention à La Réunion

17Les fondements socioculturels de la politique de prévention, par exemple la certitude de l’importance des comportements à risques et l’incertitude notoire qui prévaut dans l’appréciation de la variation interculturelle, servent donc de point d’appui à nombre de mesures prises au nom de la politique locale de santé publique. Le savoir médical est donc l’un des facteurs essentiels de l’appréciation des situations sanitaires et sociales. Pour l’anthropologie, il est indispensable de situer en termes de croyances et de système de croyance tout ce qui permet de faire fonctionner un modèle de prévention, donc en premier lieu le caractère empirique du savoir et du raisonnement médical qui oriente la prise en charge du diabète et les campagnes de prévention diabète au sein d’un PRS. Trois éléments paraissent ici essentiels?: la façon dont les professionnels de la santé perçoivent la société réunionnaise, ses caractéristiques propres et son évolution?; la façon dont ils parlent de la relation soignant-soigné et, plus généralement, des comportements du Réunionnais dans une relation de soins ou de prise en charge préventive?; la façon dont sont évoqués les dysfonctionnements du système de santé.

L’origine et l’évolution de la société réunionnaise

18Très rapidement, l’ensemble constitué par les croyances et les pratiques traditionnelles, les comportements dits modernes du Réunionnais (nouvelles habitudes alimentaires, sédentarité, etc.) et une hérédité complexe et incertaine va se retrouver au centre d’un raisonnement médical puis d’un raisonnement préventif qui vont orienter les différentes campagnes de prévention et les différents modes de prise en charge. Citons, par exemple, ce que la première coordinatrice du PRS diabète a appelé un «?constat sociologique?», en fait (de son point de vue) une présentation sommaire des caractéristiques principales de la société réunionnaise et du mode de vie réunionnais établi à partir d’enquêtes réalisées auprès d’allocataires du RMI [13], sur les habitudes de consommation?:

19

Il apparaît que 72 % des couples s’accordent des fantaisies alimentaires (salées?/?sucrées). Mais surtout plus la femme est jeune, plus elle cède à la gourmandise (83 % des femmes de moins de trente ans) […] La multiplication des hyper et supermarchés, parallèlement aux boutiques de proximité, génère une véritable «?fièvre acheteuse?» (effets de la coca-civilisation). Une explosion du parc automobile qui a augmenté de 34 % dans les cinq dernières années contribue à favoriser et entretenir une sédentarisation d’apparition récente, la marche devenant réservée exclusivement aux formes de loisirs sous formes de randonnées. Enfin, la survivance des traditions culturelles (jeûnes, carêmes, ramadan, tisanes médicinales) se heurte au mode de vie occidental et particulièrement à ses exigences thérapeutiques (par exemple, crainte et rejet de l’insulinothérapie). [14]

20On se retrouve ainsi, sans trop de nuances, avec une Réunion qui est devenue une société moderne, une société de consommation où l’on mange de plus en plus mal, par opposition à une Réunion traditionnelle, de l’ancien temps, où l’on marchait beaucoup, où l’on mangeait bien mieux: on est donc en présence d’un diabète «?véritable maladie de civilisation?». L’analyse est bien entendu simplifiée à l’extrême avec le souci évident de mettre au premier plan deux données essentielles de la politique de prévention?: la lutte contre l’obésité et le développement des activités physiques.

21Ce cas de figure a été fort bien noté par Dozon et Fassin [2001, p. 15]?: c’est celui des «?raisonnements culturalistes ordinaires?». On est en attente «?d’interprétations culturelles censées rendre compte des difficultés des actions sanitaires?». Le problème est que l’on se défait difficilement de ces idées de départ. On le verra par la suite à travers les propos des médecins, diabétologues et épidémiologistes, qui, au fil des ans, poursuivent leurs actions de prévention sur la base des mêmes «?constats sociologiques?» [Michel, 2002]. Cela signifie, entre autre, que le contexte local, celui des «?textes?» de références sur lesquels viennent s’articuler les diagnostics médicaux et préventifs, est déterminant dans l’interprétation qui est faite des conduites à tenir en matière de prévention. En effet, on a plutôt tendance à imputer à la structure même des programmes et aux principes erronés de planification des services préventifs [Massé, 1995, p. 61], aux lourdeurs de l’approche technocratique [Loriol, 2002, p. 103], aux retards des institutions «?par rapport au sens des pratiques que leurs objectifs induisent?» [Hours, 2001, p. 18], le relatif immobilisme de la politique sanitaire. Notre hypothèse de travail est ici d’affirmer qu’il serait souhaitable de commencer par s’interroger sur le système de croyance qui oriente le raisonnement préventif, qui lui donne un sens, en particulier celui qui est à la base de l’élaboration des protocoles d’enquêtes épidémiologiques.

22De ce point de vue, il est intéressant d’observer les raisonnements éducatifs et préventifs articulés sur les données épidémiologiques et qui partent donc d’un «?raisonnement médical?» forgé sur le terrain réunionnais, à l’issu d’un certain nombre d’enquêtes épidémiologiques [15]. Ainsi, pour Violaine Michel [2002, p. 9] qui a participé, à partir de 1999, au projet de mobilisation des acteurs à la structuration d’un réseau diabète à La Réunion confié à «?Diabète Au Logis?», le diabète de type 2 est

23

une maladie complexe dont on n’a pas bien défini la cause. Il existe une prédisposition qui associe facteurs génétiques et environnement (dont un mauvais équilibre alimentaire, une sédentarité ). La part héréditaire est cependant importante. Lorsque l’un des parents est atteint, le risque pour les enfants serait de l’ordre de 30 % et d’environ 50 % quand les deux sont malades […] certaines règles hygiéno-diététiques sont ainsi à encourager dès le plus jeune âge.

24On apprend ainsi, dans la continuité de ce raisonnement, que l’île de La Réunion fait partie des «?pays nouvellement développés?»?:

25

Il existe actuellement une forte prévalence qui augmente de manière significativement plus rapide dans les pays en voie de développement, notamment sur les continents africains et asiatiques, ainsi que dans les pays nouvellement développés comme l’île de La Réunion […] sa prévalence augmente dans les pays industrialisés avec le vieillissement, la sédentarisation (l’augmentation des facteurs de risque en général), la fragilité des individus et le développement d’une obésité.
[Michel, 2002, p. 12]

26Un tel raisonnement va privilégier, par exemple, une action d’éducation des jeunes en milieu scolaire, construite autour du facteur de risque «?obésité infantile?» et centrée sur l’activité physique, l’équilibre nutritionnel, le contrôle pondéral [16].

27De la même façon, une étude comme RECONSAL, mise en œuvre par l’équipe REDIA-INSERM et l’Observatoire régional de la santé (ORS), met en évidence, outre les influences classiques des variables socio-démographique et médicales bien connues, l’effet conjugué de l’absence d’activité sportive et d’une alimentation riche en lipides sur la présence d’une obésité abdominale. Cette étude pointe donc des pratiques (sédentarisation, modifications des comportements alimentaires) qui traduisent

28

l’évolution rapide des modes de vie qu’a subi notre île et qui définissent un contexte propice à la prise de poids et au développement de maladies liées à la nutrition. Mais cette situation n’est pas spécifique à La Réunion, elle est au contraire comparable à celles retrouvées actuellement dans d’autres régions françaises et d’autres pays occidentaux [17].

29Autrement dit, cette non spécificité de l’évolution des comportements alimentaires (même si l’étude montre que 93 % des personnes mangent du riz tous les jours et que 85 % des personnes interrogées consomment des «?aliments cuits dans l’huile?» tous les jours) et de la faiblesse de l’activité physique peut orienter la prévention primaire du diabète vers des modes d’intervention non spécifiques à la situation réunionnaise. Du côté des professionnels de la santé, on ne néglige pourtant pas le fait que «?l’alimentation occupe une place forte au niveau identitaire?», tout en considérant que «?les grandes lignes des notions culinaires sont communes à l’ensemble du monde créole à La Réunion?» [Michel, 2002, p. 46]. On s’orientera de préférence vers des actions éducatives primaires ciblées, par exemple au travers des programmes scolaires, avec le soutien des médecins de l’éducation nationale. Il existe ainsi un contexte institutionnel et organisationnel qui est prévu pour gérer les comportements de santé dans une démarche de soins et dans une démarche préventive largement orientée vers l’éducation du patient.

Les comportements du Réunionnais, les demandes des patients diabétiques

30Le raisonnement préventif emprunterait en fait deux voies qui sont censées se rejoindre, en partant de deux points de vue?: la perception professionnelle de la maladie qui part d’un raisonnement très médicalisé et les revendications des patients qui partent de leur vécu quotidien de la maladie. Quand la perception professionnelle de la maladie est mise en avant, c’est l’expérience que les médecins ont des patients diabétiques qui sous-tend la définition de la maladie et l’appréciation de la prise en charge. Ce vécu de la maladie, déduit des interactions entre personnels soignants et patients diabétiques, oriente l’ensemble du raisonnement préventif?:

31

ils n’arrivent pas à comprendre que ça ne guérit pas, que ça va les suivre pour toujours […] le diabète, c’est pas leur problème?, la maladie, «?c’est le docteur?» […] les médicaments sont pris de façon aléatoire, peu de malades sont bien équilibrés, pour eux, c’est la fatalité, et la sanction c’est l’insuline […] ils ne s’impliquent pas, c’est l’assistance sous toute la ligne.
[Martinet, 1996]

32À l’opposé, on peut relever dans la démarche des anciens adhérents d’une association dissoute en 1991, rencontrés à l’occasion de la préparation de la «?journée mondiale du diabète?» de 1995, un souci de promouvoir «?le citoyen-diabétique?»?: son «?autonomie?», son «?indépendance?» et «?l’égalité?». Le patient souhaite devenir un partenaire actif du médecin. Mais on ne manquera pas de souligner la difficulté d’obtenir à la fois un statut de «?malade?» (qui requiert des soins) et un statut social «?normal?», sur des bases revendicatives qui touchent à la fois à la qualité des soins et à la qualité de vie [Martinet, 1996]. On comprend, au contact de la quotidienneté des patients diabétiques, que la gestion de la chronicité est au cœur de la «?qualité de vie?» du patient diabétique et que celle-ci relève des activités «?normales?», du «?cours de vie?».

33La logique des malades et de la population locale, et la logique du discours médical peuvent ainsi se retrouver dans des situations où chacun est amené à négocier son identité?: la population qui dispose de son propre registre de compréhension de la maladie, par l’intermédiaire d’associations de malades, d’individus ou de groupes, et le nutritionniste, le diabétologue, l’infirmier qui possèdent leur propre catégories culturelles (de prévention, de soins, etc.), au sein d’un modèle médical traditionnel fondé sur des catégories encore très prédominantes (taux de morbidité et de mortalité, etc.). Un second élément paraît en effet essentiel?: la perception du diabète par les patients, par les personnes à risques, par la population en général fait l’objet de ce qu’Anselm Strauss [Baszanger, 1992] appelle une «?négociation?» [18] avec les personnels soignants et avec leur entourage. Et cette même perception fait à son tour l’objet d’une seconde «?négociation?» par les personnels soignants (médecins généralistes, spécialistes, infirmiers, etc.) avec les responsables des politiques de santé et avec les représentants des associations.

34L’exemple du diabète est une bonne illustration de ce raisonnement. Le médecin généraliste et le clinicien demandent au patient diabétique de lui signaler les symptômes cliniques, de faire une surveillance clinique et biologique régulière, de prendre régulièrement son traitement et de suivre un bon régime. Donc, en quelque sorte, on lui «?apprend la maladie?» à travers le raisonnement préventif. Mais ce partenariat médecin-patient fait l’objet d’une négociation?: le patient veut limiter sa responsabilité. Il exprime son extrême bonne volonté même lorsqu’il est pris en défaut (à la vue de symptômes indésirables, par exemple), il évoque un manque de temps, etc. Il implique les infirmiers dans la relation partenariale. N’oublions pas enfin que, pour le patient, «?le diabète est une maladie nouvelle [qui] n’existait pas avant?» [Martinet, 1996].

35Les savoirs traditionnels continueront toujours à influencer les logiques propres des sujets locaux et l’expertise de ces derniers doit pouvoir trouver un espace d’expression, si l’on veut réellement améliorer les stratégies préventives. Par exemple, en ce qui concerne le choix de l’insuline, se pose le problème de la composition du produit?: l’insuline semi-lente est d’origine porcine, l’insuline lente est d’origine porcine et bovine, les produits représentent donc des écarts au respect des prescriptions religieuses (musulmanes et hindoues essentiellement). Et il reste très difficile à démontrer pour le médecin que l’insuline «?d’origine humaine?» n’est pas du pancréas humain broyé mais un produit semi synthétique [Roddier, 1995, p. 35].

Le fonctionnement du système de santé

36La pré-enquête réalisée par Muriel Roddier [1995, p. 17-21] au moment de la mise en place du PRS diabète en 1995 fait ainsi apparaître quelques-unes des particularités de la situation réunionnaise. Par exemple, dès les premières réunions du comité de pilotage, on a insisté sur l’importance du coût des injections faites à domicile par le personnel infirmier, en raison principalement de la majoration de nuit appliquée par ces derniers qui est nettement supérieure au coût de l’acte lui-même (environ quatre fois plus élevée)?; sur la mise d’emblée sous anti-diabétiques oraux avant toute tentative de régulation par la diététique ou sans attendre le résultat de celle-ci, ce qui constituerait un manque de confiance du médecin vis-à-vis de son patient quant au respect d’un régime alimentaire et à une sous-estimation de son désir de se prendre lui-même en charge. Il n’est pas bien sûr question de stigmatiser tel ou tel comportement d’un acteur dans une mise à plat du système de santé. Mais il faut constater tout de même que le «?marché?» de l’insulinothérapie représente plus de la moitié des actes réalisés en exercice infirmier libéral à La Réunion (58 % du chiffre d’affaire réalisé en 1994, selon la Caisse générale de sécurité sociale) [Roddier, 1995?; Michel, 2002, p. 41]. Les infirmiers sont conscients de cette situation et rappellent par l’intermédiaire de leurs associations professionnelles, que l’éducation du diabétique fait l’objet d’une tarification depuis 1998. Ce serait donc bien, selon eux, aux médecins d’intervenir à bon escient.

37L’enquête réalisée par Fabienne Martinet [1996, p. 56-60], notamment les entretiens effectués auprès de cinq médecins généralistes, fait d’autre part apparaître ce qu’il est possible d’appeler «?le schéma biomédical idéal du diabétique?»?: le patient diabétique est un malade qui nécessite une surveillance clinique et biologique régulière, le diabète est une maladie qui nécessite un régime et un traitement spécifiques. Cette maladie peut évoluer vers des complications si l’équilibre biologique n’est pas satisfaisant. Il s’agit d’une maladie qui s’explique et pour laquelle on préconise une prévention, une éducation, une implication du malade, une prise en charge personnelle et des habitudes alimentaires particulières. Face à ce schéma idéal, le diabétique est présenté comme un mauvais partenaire dans cette prise en charge?: «?le diabète c’est tellement chronique, c’est casse-pied?», «?ils ne font pas d’effort, un chiffre ça leur suffit?», «?leurs complications, ça c’est très difficile. Ils ne posent pas de question, on dirait que ça les indiffère?», etc. On perçoit donc également, à ce niveau, la présence de «?raisonnements culturalistes ordinaires?».

38De son côté, Marianne Corbel [2002], qui a récemment effectué des enquêtes à La Réunion (de mars à mai 2002 dans le cadre du réseau régional de recherche en santé publique INSERM), a observé une faille majeure dans les actions de prévention?: celle du manque de communication au sein des familles. Il faudrait que les messages de prévention soient discutés et débattus ou expliqués et réexpliqués au sein de chaque cellule familiale, afin de dépister ou d’enrayer des processus de diabète ou de surpoids déjà installés. Rappelons alors que le Haut Comité de Santé Publique (HCSP), dans son rapport de mai 1998, a préconisé que la prise en charge soit effectuée «?en serrant au plus près la vie quotidienne?» et qu’elle intègre les milieux associatifs. Le HCSP a fait observer que

39

les messages, tels qu’ils sont par exemple diffusés par les médias, supposent en effet trop souvent un destinataire passif et ignorant. Il importe au contraire de créer des lieux capables d’accueillir les demandes précises des patients et d’apporter une écoute et une réponse non limitée aux objectifs de soins [19].

Conclusion?: pour une approche anthropologique de la prévention

40L’approche proposée part ainsi de la culture, prend en compte les contextes, et étudie la construction du sens de la maladie, l’expérience de la maladie, en tant que fait de santé, c’est-à-dire en tant que s’inscrivant dans un contexte socioculturel et sociopolitique beaucoup plus large, celui du fonctionnement global des systèmes de santé. À travers les énoncés, on découvre les connexions de l’espace thérapeutique et de l’espace de la maladie avec l’espace social (réseaux de prise en charge, conditions socio-économiques des patients, milieux familiaux, influence des politiques de santé, etc.), tout ce qui, à notre avis, constitue un espace (que l’on pourrait qualifier d’anthropomédical) à l’intérieur duquel le sujet local va venir exprimer son identité.

41L’anthropologue n’a d’autre solution que d’enquêter auprès de ces sujets locaux qui détiennent des savoirs particuliers que l’on nomme «?connaissance locale?» [Lotman, 1990]. On ne peut raisonner que sur des énoncés en situation qui sont autant de façon de mettre en ordre l’univers culturel d’une communauté, le sens commun, les différentes catégories qui s’enracinent dans la quotidienneté, dans des expériences pratiques et culturelles. Il est donc très difficile, voire impossible, de traiter la question du vécu de la maladie ou du discours sur la maladie (entretiens auprès de personnes à risques, en population générale, etc.), à travers une série de réponses à des questions fermées, correspondant au passage d’un questionnaire unique auprès d’un échantillon dit représentatif de population, même si les réponses apportées par l’intermédiaire de ces questionnaires peuvent être effectivement des «?réponses quantitatives et qualitatives?» sur les «?aspects culturels du comportement (représentations, connaissances)?» et sur le «?contrôle de la maladie (observance des traitements, alimentation, poids, glycémie)?» [20].

42On a vu que ce qui doit être observé ici c’est la production d’un espace de santé recentré sur la prévention et sur la participation des populations aux actions de santé. Ce secteur de la promotion de la santé et de l’éducation pour la santé, auquel il faut rattacher l’éducation du patient et l’éducation thérapeutique, n’est pas suffisamment investi par la recherche anthropologique [21]. Il s’agit pourtant d’un secteur qui permet d’articuler assez directement la diversité des cultures médicales et la diversité des cultures professionnelles qui s’engagent dans des démarches de prévention [Colson, 2001]. La logique du «?raisonnement préventif?» doit être analysée à travers l’observation attentive de différentes actions de santé qui sont nécessairement marquées par «?la culture de l’institution?». Irène Bellier [1997, p. 132], qui a travaillé dans le secteur de la décision politique et technocratique (à partir de terrains effectués à l’École nationale d’administration et à la Commission européenne), explique fort bien que l’institution peut être le foyer d’une culture singulière que l’on peut considérer comme une «?sous-culture?», définie par «?un certain environnement, une apparente homogénéité ou une capacité à intégrer différentes cultures?». Notre objectif serait alors de vérifier que les différentes actions conçues au titre de la promotion et de l’éducation pour la santé sont véritablement relayées sur le terrain en terme d’action sociale. Quelques enquêtes sont actuellement en cours dans l’est (Sainte-Rose), le sud (Saint-Joseph) et le nord (Saint-Denis) de La Réunion, portant toutes sur l’opérationnalisation des politiques de santé dans un contexte réunionnais, avec pour objectif d’observer la mobilisation des agents de promotion de la santé et de développement local auprès de la population et de réévaluer la conception des dispositifs d’intervention. Cette recherche devrait nous informer concrètement sur l’applicabilité ou non de certaines politiques de santé dans des milieux qui ne sont pas particulièrement préparés à être associés à des actions de promotion ou d’éducation pour la santé.

Notes

  • [*]
    Maître de conférences d’ethnologie, ISPED (Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement), Université Victor Segalen Bordeaux 2 (346, rue Léo-Saignat 33076 Bordeaux cedex), bernard.cherubini@isped.u-bordeaux2.fr.
  • [1]
    Extraits de la note accompagnant l’envoi des programmes de ces États généraux de la santé à La Réunion.
  • [2]
    Exemple d’étude?: PRS Diabète, activité n° 2, Enquête sur les comportements alimentaires et le mode de vie des femmes réunionnaises âgées de 20 à 59 ans. Résultats de l’enquête anthropologique, 1998 (étude réalisée par M. Roddier), 39 p.
  • [3]
    La population totale recensée par l’INSEE en 1999 est de 706?180 habitants (Recensement INSEE 1999), elle est estimée à environ 720?000 habitants en 2001. En l’absence de statistiques officielles concernant la répartition dite «?ethnique?» de la population réunionnaise, on évalue (notre propre estimation d’après différentes sources d’enquêtes) à 40 % la proportion des Créoles noirs et métis appelés communément «?cafres?», d’origine afro-malgache, à 23 % la proportion des créoles blancs dits encore «?Blancs des hauts?» ou «?yabs?», à 24 % celle des Indiens non-musulmans dits «?malbars?», à 3,5 % celle des Chinois, à 3 % celle des Indiens musulmans dits «?zarabs?» et à environ 6 % la proportion des «?zoreils?», des personnes de nationalité française.
  • [4]
    On appellera «?contexte?», en référence à la linguistique, «?tout texte auquel renvoie la lecture d’un texte ou d’un fragment de texte, quel que soit le mode de ce renvoi?» [Borel, 1990, p. 173].
  • [5]
    5. Enquête prévalence 1992 (CHD, Cellule d’épidémiologie du conseil général de La Réunion)?: 485 décès avec diagnostic principal de diabète entre 1988 et 199
  • [6]
    Dossier de recherche clinique, année 1998, Épidémiologie clinique, diabétologie?: REDIA – Étude des facteurs cliniques et comportementaux liés au diabète et à son contrôle dans la population multiculturelle de La Réunion (L. Papoz), Délégation à la recherche clinique du CHU de Montpellier.
  • [7]
    Une prévalence globale (taux brut) de 11,9 % (430). Le diabète connu atteint 11,2 % des sujets âgés de 30 à 69 ans (taux ajusté sur la distribution d’âge de la population réunionnaise). La prévalence globale ajustée sur le sexe et l’âge dans la population (30-69 ans) est de 17,7 % (16,6 - 18,8 %) soit 55?500 diabétiques sur un total de 307?909 personnes de 30 à 69 ans au recensement INSEE de 1999 (source?: INSERM U 500, Étude REDIA - Résultats principaux, décembre 2001).
  • [8]
    En épidémiologie sociale, en particulier, on prend en compte, en plus des variables individuelles, des variables dites «?de contexte?», reflétant le contexte de l’environnement. M. Goldberg, M. Melchior, A. Leclerc et F. Lert [2002] parlent ainsi de contexte social à propos de variables désignant l’appartenance à une catégories sociale et de contexte sociétal pour la prise en compte de l’agencement des catégories sociales et de leur évolution. Le contexte culturel produit de son côté des facteurs de risque liés au mode de vie et à l’environnement. Voir aussi dans Chaix et Chauvin [2002]. Du point de vue de la sémiotique de la culture, on considère que les sujets locaux produisent leur propre contexte et sont produits par ce même contexte [Lotman, 1990]. Les professionnels de la santé sont des sujets locaux parmi les autres.
  • [9]
    Je reprends ici la thématique de deux des projets retenus dans le cadre du R3SP (réseau régional de recherche en santé publique INSERM), coordonné par le Dr Favier (U 500)?: «?Recherche-action pour la prévention du diabète de type 2 et de ses complications?».
  • [10]
    Voir, en particulier, la Loi du 4 mars 2002 (Chapitre IV?: Politique de prévention). La promotion de la santé vise à rendre l’individu et les collectivités capables d’exercer un meilleur contrôle sur les facteurs déterminants de la santé. L’essentiel réside dans la participation effective du public à la définition des problèmes, à la prise de décision et aux activités mises en œuvre pour modifier ou améliorer les facteurs déterminants de la santé (d’après la Charte d’Ottawa, OMS, 1986).
  • [11]
    Travaux de M. Fellous, cités dans Bouchayer [1984, p. 98].
  • [12]
    Mis en place en décembre 2001 dans le cadre des PRS de seconde génération (2001-2005)?: «?l’objectif prioritaire reste la prévention de l’obésité par la promotion de l’équilibre nutritionnel et de l’activité physique […] Le PRS s’opère dans une optique de développement de la prévention secondaire, en achevant les actions entreprises concernant l’obésité notamment et la surcharge pondérale chez l’enfant et chez l’adulte, le dépistage et le traitement précoce du diabète, l’organisation d’un système de soins coordonné et le développement de l’éducation thérapeutique du patient?» (extrait de PRS – Diabète, La lettre du PRS 2, 2e trimestre 2002).
  • [13]
    Études et synthèses de l’ODR (Observatoire départemental de La Réunion), n° 20, 1994.
  • [14]
    Infostat, n° 41, mars 1997 («?Trois PRS pour La Réunion?»), p. 3.
  • [15]
    Enquête de l’URML-Réunion réalisée en 1997?: Étude transversale d’observation sur une population de 351 diabétiques âgés de 35 à 65 ans. Étude DIABCARE 2000 en collaboration avec l’OMS qui a porté sur 137 diabétiques?: 93 de type 2 et 23 de type 1. Étude REDIA (1999-2001) sur un échantillon de 3?600 personnes âgées de 30 à 69 ans.
  • [16]
    Projet de l’association «?Diabète Au Logis?», une association créée en 1998?: Pour une action de prévention primaire de l’obésité et du diabète à La Réunion (2001).
  • [17]
    Extraits de la conclusion de l’étude RECONSAL (REunion CONsommation Alimentaire), réalisée à partir d’un échantillon de 1?061 personnes de 18 ans ou plus, domiciliées à Saint-Pierre, au Tampon ou à Saint-André, de septembre 1999 à mars 2001.
  • [18]
    A. Strauss (textes réunis par I. Baszanger [1992] sous le titre La trame de la négociation) a développé une théorie de l’ordre négocié à partir de l’étude du fonctionnement d’un hôpital psychiatrique aux États-Unis?: des accords se font sur la meilleure conduite à tenir pour le traitement des malades entre des interlocuteurs qui sont tous actifs dans la situation, du personnel administratif aux soignants en général. Mais, dans une situation où les professionnels dominent, les malades interviennent également dans le processus de négociation.
  • [19]
    Rapport du groupe de travail «?Diabètes?: prévention, dispositifs de soin et éducation du patient?», mai 1998.
  • [20]
    Les citations entre guillemets sont extraites du rapport intermédiaire de L. Papoz (U 500)?: Étude REDIA, 15 mai 2001. Ce type de contrainte («?la priorité absolue à la quantification des diverses composantes des comportements étudiés?») a déjà fait l’objet de remarques méthodologiques de la part de Michel Giraud [1997, p. 75-76], à l’occasion de la mise en place de l’enquête ASCAG aux Antilles et en Guyane françaises.
  • [21]
    Rappelons par exemple que lors du colloque de Nancy de 1990 consacré à la prévention, on situait simplement l’apport de l’anthropologie au niveau d’un «?manque de données sur la prévention dans les pratiques quotidiennes, sur les différences et les conséquences d’une société à l’autre?» [Aïach, Bon et Deschamps, 1992], Sylvie Fainzang, dans ce même ouvrage, rappelant avec pertinence que la prévention est «?une catégorie que ne peut manier l’anthropologue qu’en fonction du contenu que lui confèrent les différents groupes qu’il est amené à étudier?» (p. 18). Nous proposons par conséquent d’étendre l’analyse au contenu qui est donné, par les professionnels de la santé, à la prévention.
Français

Résumé

Le diabète est un thème de santé prioritaire à La Réunion. Il donne lieu, depuis 1995, à un Programme régional de santé (PRS). Il est devenu, en 2001, un PRS de 2e génération orienté sur la prévention. La recherche anthropologique, développée depuis 1994 autour du diabète de type 2, est orientée par les demandes qui sont formulées par les épidémiologistes, les nutritionnistes et les médecins de santé publique. L’évolution de notre participation à ces PRS nous a fait passer d’une anthropologie du diabète centrée sur le sujet local à une anthropologie politique de la prévention : de la compréhension des comportements à risques et de la prise en charge médicale et préventive, à la compréhension des incidences de ce type de collaboration sur la gestion des politiques de prévention au niveau institutionnel.

Mots-clés

  • Réunion
  • diabète
  • politiques de santé
  • raisonnement préventif
  • contexte local
  • espace anthropomédical
  • épidémiologie

Bibliographie

  • Aïach P., Bon N. et Deschamps J.-P. (éd.) [1992], Comportements et santé. Questions pour la prévention, Vandœuvre-lès-Nancy, Presses universitaires de Nancy.
  • Bazely P. et C. Catteau [2001], «?Maladies infectieuses et problèmes sociaux dans les DOM?», Antiane, n° 50, octobre, p. 24-25.
  • Bellier I. [1997], «?Une approche anthropologique de la culture des institutions?», in M. Abeles et J.-P. Jeudy (éd.), Anthropologie du politique, Paris, Armand Colin, p. 129-160.
  • Benoist J. [1993], Anthropologie médicale en société créole, Paris, PUF.
  • Borel M.-J. [1990], «?La schématisation descriptive?: Evans-Pritchard et la magie Zandé?» in J.-M. Adam, M.-J. Borel, C. Calame et M. Kilani (éd.), Le discours anthropologique, Paris, Méridiens-Klincksieck, p. 169-226.
  • En ligneBouchayer F. [1984], «?Les logiques sociales des actions en éducation pour la santé?», Sciences Sociales et Santé, vol. II, n° 3-4, p. 77-103.
  • Bourdieu P. [1997], Méditations pascaliennes, Paris, Seuil.
  • Chaix B. et Chauvin P. [2002], «?L’apport des modèles multiniveau dans l’analyse contextuelle en épidémiologie sociale?: une revue de littérature?», Revue d’Épidémiologie et de Santé Publique, n° 50, p. 489-499.
  • Cherubini B. [1995], «?L’espace anthropomédical du patient diabétique?: un modèle pour l’approche anthropologique des faits de santé?», in Forum-débat «?Mutations sociales et recherches en sciences humaines et biomédicales à La Réunion?» (La science en fête, 7-8 octobre 1995), Saint-Denis, CORI-INSERM.
  • Cherubini B. [2002a], Interculturalité et créolisation en Guyane française, Paris, L’Harmattan et Saint-Denis, Université de La Réunion.
  • Cherubini B. [2002b], «?Santé et immigration haïtienne en Guyane?: survivre dans une société urbaine des «?Amériques noires?» dans les années 1980?», Bastidiana, n° 39-40, juillet-décembre, p. 131-153.
  • Cicourel A. [2002], Le raisonnement médical. Une approche socio-cognitive, Paris, Seuil.
  • Colson W. [2001], «?Endiguer la percée du diabète de type 2?», Patient care, juillet, p. 21-22.
  • Corbel M. [2002], Compte rendu d’une enquête ethnologique sur les représentations du diabète, du corps et de la santé chez des diabétiques et des individus «?à risque?» à l’île de La Réunion, Saint-Denis, CIRCI, Université de La Réunion, octobre 2002 (rapport de recherche).
  • Deccache A. et Meremans P. [2000], «L’éducation pour la santé des patients?: un carrefour de la médecine et des sciences humaines?», in B. Sandrin-Berthon (éd.), L’éducation du patient au secours de la médecine, Paris, PUF, p. 147-167.
  • En ligneFainzang S. [1997], «?Les stratégies paradoxales. Réflexions sur la question de l’incohérence des conduites des malades?», Sciences Sociales et Santé, vol. 15, n° 3, p. 5-23.
  • En ligneFainzang S. [2001], «?L’anthropologie médicale dans les sociétés occidentales?: récents développements et nouvelles problématiques?», Sciences Sociales et Santé, vol. 19, n° 2, p. 7-27.
  • Fassin D. et Dozon J.-P. (éd.) [2001], Critique de la santé publique. Une approche anthropologique, Paris, Balland.
  • En ligneGiraud M. [1997], «?Entre particularités épidémiologiques et spécificités culturelles?: l’enquête sur les comportements sexuels aux Antilles et en Guyane françaises (ASCAG)?», Sciences Sociales et Santé, vol. 15, n° 4, p. 73-93.
  • En ligneGoldberg M., Melchior M., Leclerc A. et Lert F. [2002], «?Les déterminants sociaux de la santé?: apports récents de l’épidémiologie sociale et des sciences sociales de la santé?», Sciences Sociales et Santé, vol. 20, n° 4, p. 75-128.
  • Hours B. (éd.) [2001], Systèmes et politiques de santé. De la santé publique à l’anthropologie, Paris, Karthala.
  • Laurent-Beq A. [1999], «?Éditorial. Les forums-citoyens?: une contribution à la “démocratie sanitaire”???», Santé Publique, vol. 11, n° 1, v. 3-4.
  • En ligneLoriol M. [2002], L’impossible politique de santé publique en France, Renouville Saint-Agne, Éditions Érès.
  • Lotman I. et Ouspenski B. [1980], Sémiotique de la culture russe, Lausanne, L’Âge d’homme.
  • Lotman I. [1990], Universe of the Mind, A Semiotic Theory of Culture, Bloomington, Indiana University Press.
  • Martinet F. [1996], La construction sociale négociée du diabète à La Réunion, Saint-Denis, Université de La Réunion (mémoire de maîtrise d’ethnologie).
  • Massé R. [1995], Culture et santé publique, Montréal, Gaëtan Morin.
  • Michel V. [2002], Prise en charge du diabète sucré de type 2 à La réunion?: de la mobilisation des acteurs à la structuration d’un réseau, Bordeaux, Université Victor Segalen Bordeaux 2, UFR Sciences médicales (thèse pour l’obtention du diplôme d’État de docteur en médecine).
  • Potier G. [1996], Le diabète chez la femme enceinte à La Réunion, Saint-Denis, Université de La Réunion (mémoire de maîtrise d’ethnologie).
  • Roddier M. [1995], Le diabète sucré à La Réunion?: une pré-enquête auprès des acteurs de santé publique et des patients diabétiques, Saint-Denis, Université de La Réunion (mémoire de DEA de Lettres et sciences sociales, option anthropologie).
  • Roddier M. [1999], Le diabète entre culture et santé publique. Approche anthropologique du diabète de type 2 à La Réunion, Saint-Denis, Université de La Réunion (thèse de doctorat en anthropologie).
  • Schutz A. [1987], Le chercheur et le quotidien, Paris, Méridiens-Klincksieck.
  • Strauss A. (textes réunis par I. Baszanger) [1992], La trame de la négociation, Paris, L’Harmattan.
  • Winkin Y. [2001], Anthropologie de la communication. De la théorie au terrain, Paris, Seuil et Bruxelles, De Boeck.
Bernard Cherubini [*]
  • [*]
    Maître de conférences d’ethnologie, ISPED (Institut de santé publique, d’épidémiologie et de développement), Université Victor Segalen Bordeaux 2 (346, rue Léo-Saignat 33076 Bordeaux cedex), bernard.cherubini@isped.u-bordeaux2.fr.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/01/2011
https://doi.org/10.3917/autr.029.0099
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour Presses de Sciences Po © Presses de Sciences Po. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...