Après avoir unifié et harmonisé les règles de conflit de juridictions relatives au divorce et à la responsabilité parentale, le droit international privé des obligations alimentaires, les règles de conflit de lois en matière de divorce, puis le droit international privé des successions, le législateur européen s’est attelé aux rapports patrimoniaux entre époux. Le règlement (UE) nº 2016/1103, qui est entré en vigueur le 29 janvier dernier, proclame ainsi l’unité de la loi applicable au régime matrimonial, quel que soit le lien de situation des biens du couple. Il semble s’écarter ainsi de la tradition juridique qui a longtemps perduré en France, et ce depuis le XVIe siècle. Cette tradition reposant sur une consultation de Charles Dumoulin, il nous a semblé intéressant de proposer une nouvelle publication de ce texte du célèbre consultant et avocat au parlement de Paris, qui a durablement irrigué la pensée juridique française. Nous remercions vivement Bertrand Ancel d’avoir accepté d’en faire une glose.
Article
Pendant au moins un demi-millénaire, le droit
international privé français sera resté sous l’emprise du
Consilium LIII donné en 1525 par Dumoulin, au sujet du
régime matrimonial des époux de Ganey.
Cette consultation se proposait de justifier l’application
des règles de la communauté de biens de la coutume de Paris
aux acquisitions que le mari avait faites, pendant le mariage,
de biens immobiliers situés en Mâconnais, pays de droit écrit
où prévalait un régime séparatiste. En l’occurrence, les époux
s’étaient mariés à Paris où ils avaient établi leur domicile. Il
n’était pas contesté que la communauté coutumière parisienne comprenait les biens meubles du couple et les
immeubles acquis à Paris ; s’étendait-elle aux immeubles
situés hors du ressort de la coutume de Paris ? Mettant en jeu
l’éventuelle extraterritorialité de la coutume de Paris – à l’encontre du droit du lieu de situation des biens –, la question
pouvait trouver sa solution dans la détermination du droit
applicable au régime matrimonial : lex domicilii ou lex rei sitae ?
Dumoulin se prononce pour une application extraterritoriale de la coutume du domicile et soutient donc que les
conquêts sont entrés en communauté en quelque lieu qu’ils
soient situés, sans égard pour le droit local. Cette opinion
repose sur une analyse de la communauté de biens en une
société dont le siège est situé au domicile des époux. L’explication fournissait une justification suffisante du rattachement par le domicile matrimonial : le problème des rapports
pécuniaires du ménage n’est pas celui de la condition juridique des biens, de la définition des droits dont ceux-ci
peuvent être l’objet ; le statut des immeubles n’est pas en
cause et l…
Résumé
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 23/01/2022
- https://doi.org/10.3917/trib.003.0093
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