CAIRN.INFO : Matières à réflexion

À la croisée de la lutte contre la prolifération et de la lutte contre le terrorisme, la résolution 1540 témoigne de la volonté du Conseil de sécurité de s’adapter à la menace spécifique que constituerait l’utilisation d’armes de destruction massive (ADM) par des acteurs non-étatiques. Adoptée à l’unanimité, cette résolution placée sous chapitre VII vise à lutter contre la fabrication, le vol et le transport d’ADM, ainsi que de leurs vecteurs et de leurs matières connexes, à renforcer les régimes de contrôle des importations, exportations et transferts de biens ou encore de technologies et de logiciels à double usage, et à prendre des mesures de sécurité physique et de comptabilité des stocks. Afin d’évaluer et de renforcer l’application de la résolution 1540, un comité permanent secondé par un groupe d’experts a été établi.
Si les nombreuses informations qu’il publie donnent une idée assez complète de l’application de la résolution 1540, les contraintes institutionnelles et politiques auxquelles ce comité est soumis rendent pourtant nécessaire une mise en perspective de ces données. L’enjeu est donc, ici, de proposer un bilan de l’application de la résolution analysant les lacunes et les perspectives possibles d’amélioration. Ne pouvant juger de l’efficacité et de l’application de la résolution sans en rappeler le contenu et les objectifs, il est utile de revenir d’abord sur le contexte d’adoption et la nécessité de la résolution 1540 avant d’en dresser le bilan.
La résolution 1540, adoptée le 28 avril 2004, traduit la prise de conscience au niveau international de la menace particulière que constitue la possible collusion entre le terrorisme international et la prolifération des ADM…

Français

Adoptée sous chapitre VII en 2004, la résolution 1540 du Conseil de sécurité des Nations unies est le premier instrument international conjuguant lutte contre le terrorisme et contre la prolifération. Afin d’empêcher l’acquisition d’armes de destruction massive par des acteurs non-étatiques, la résolution promeut la mise en œuvre de réglementations nationales renforçant le contrôle de matières sensibles, de vecteur, et de biens ou technologies à double-usage. Bien qu’une majorité d’États aient manifesté leur volonté de se conformer à la résolution en remettant un rapport, l’évaluation qualitative de la mise en œuvre de la résolution reste un enjeu majeur.
L’examen complet récemment effectué par le comité 1540 présente des réflexions intéressantes indiquant une évolution progressive vers une méthode de travail davantage fondée sur le risque. Celle-ci permettra probablement d’éviter le risque de « reporting fatigue » pour les États. Bien qu’une telle démarche puisse être politiquement sensible, le comité pourrait ainsi renforcer la mise en œuvre de la résolution en privilégiant les États faibles ou particulièrement exposés.

English

Adopted under chapter VII in 2004, the United Nations Security Council Resolution 1540 is the first international instrument combining counter-terrorism and non-proliferation issues. In order to prevent non-state actors from acquiring Weapons of Mass Destruction the resolution promotes the implementation of national rules strengthening the control of sensitive materials, means of delivery, and double-use goods or technologies. Even if a large majority of states have manifested their willingness to comply with the resolution in their reports, the qualitative evaluation of the resolution’s implementation remains challenging.
The recent “comprehensive review” carried out by the 1540 committee presents interesting reflections and its work is progressively moving towards a risk-based approach which is more likely to avoid the risk of reporting fatigue. Even though it can be diplomatically difficult, the Committee could improve the implementation of UNSCR 1540 by focusing on weak or particularly risk-exposed states.

  1. La résolution 1540 une réponse originale à une nouvelle menace : l’utilisation d’ADM par des acteurs non-étatiques
    1. Lutter contre la conjonction de deux menaces : le terrorisme international et la prolifération des ADM
    2. Des outils institutionnels couvrant partiellement les menaces auxquelles répond la résolution 1540
      1. Différents instruments internationaux relatifs aux menaces NRBC
      2. Principaux instruments internationaux de lutte contre le terrorisme
    3. L’originalité de la résolution 1540
      1. Une décision applicable à tous adoptée sous chapitre VII
      2. Un processus d’adoption particulier
      3. Un texte onusien à la forme atypique
  2. Forces et faiblesses de l’application
    1. Le comité 1540 : la patience et l’assistance comme armes
      1. La difficile collecte des rapports nationaux
      2. L’assistance technique comme moyen de renforcer l’application de la résolution 1540
      3. Les réunions d’information et de sensibilisation : une efficacité en demi-teinte
    2. Une application très variable en fonction des menaces et des mesures
      1. Une amélioration rapide pour le nucléaire mais un niveau d’application global encore perfectible
      2. La lutte contre la diffusion des vecteurs reste un enjeu majeur
      3. Des mesures de surveillance courantes mais peu approfondies
    3. Bons et mauvais élèves de la résolution 1540
      1. Des États précurseurs : l’application de la résolution 1540 avant l’heure
      2. Des États engagés et coopérants : une application croissante de la résolution 1540
      3. Les États peu actifs : défaillance étatique ou refus délibéré ?
  3. Plusieurs défis à relever
    1. Comment évaluer l’application de la résolution 1540
      1. Définir des indicateurs plus précis
      2. Éviter la reporting fatigue et adapter les exigences en fonction des risques
      3. Diversifier la collecte d’information et renforcer les partenariats interinstitutionnels
    2. La résolution 1540 : entre gouvernance globale et souveraineté étatique
      1. Un besoin de normes communes qui se heurte à l’indépendance des États
      2. L’assistance technique, entre renforcement de l’État de droit et ingérence étrangère
      3. Promouvoir des mesures nationales ad hoc ou généraliser des pratiques optimales communes ?
    3. La résolution 1540 : instrument préventif et/ou répressif ?
      1. Un instrument avant tout préventif
      2. L’éventualité d’un usage répressif
      3. Un instrument dissuasif ?
Paul Hérault
Titulaire du master Recherche relations internationales à Sciences Po. Paris.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 22/10/2013
https://doi.org/10.3917/secug.011.0053
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