CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Depuis le lancement par l’OMS et ses partenaires en 1988 de l’Initiative mondiale pour l’éradication de la poliomyélite, le nombre des infections a reculé de 99 % et quelques cinq millions de personnes ont échappé à la paralysie [14]. Au Bénin, le Programme élargi de vaccination (PEV) n’a effectivement démarré qu’en 1990. Depuis lors, et grâce à l’effort appréciable des services de santé, le Bénin a obtenu des résultats appréciables grâce à une politique qui lui a d’ailleurs valu le prix de la meilleure couverture vaccinale en Afrique au sud du Sahara (UNICEF 1998) [15]. Mais ces succès obtenus dans les années 90 ne vont pas durer dans le temps. Ainsi, malgré les multiples efforts fournis dans le domaine, des échecs vont apparaître un peu partout dans le monde surtout en Afrique. Dans le contexte béninois où la majorité de la population cherche des solutions aux problèmes de santé au sein de la communauté et où la fréquentation des centres de santé est très faible, le modèle collaboratif est recherché. Consistant en une approche d’amélioration de la qualité centrée sur le patient, ses attentes, le processus et le travail en équipe [4], le modèle collaboratif suscite une collaboration entre la médecine dite traditionnelle et celle dite occidentale. Ainsi, un modèle collaboratif a été mis en place afin d’accroître le taux de détection des cas de paralysies flasques aiguës et d’améliorer les indicateurs du PEV, à savoir : atteindre au moins 90 % de couverture vaccinale pour l’ensemble de la commune fin 2004, et 95 % fin 2005 pour les antigènes DTCP 3e dose, VAR, VAA, Hépatite B 3e dose, atteindre 75 % de couverture pour la vaccination antitétanique deux doses ou plus (VAT2+) chez les femmes enceintes pour fin 2005, réduire les taux d’abandon BCG/VAR et DTC1/DTC3 de 10 % entre 2004 et fin 2005 et enfin documenter les taux de perte des vaccins (BCG, VAR) et les réduire.

2L’objectif de cette étude est de documenter le processus du modèle collaboratif dans son contexte, de mesurer son impact sur l’amélioration de la couverture vaccinale, de montrer l’impact de la participation communautaire sur l’amélioration de la détection des cas de paralysies flasques aiguës (PFA), et de décrire les cas détectés.

Méthodologie

Type d’étude

3Il s’agit d’une étude transversale descriptive qui s’est déroulée entre janvier 2004 et décembre 2005.

Site de l’étude

4Cette étude a pour cadre la commune de Pèrèrè située au nord-est du Département du Borgou, en République du Bénin. Elle couvre une population totale estimée en 2005 à environ 42 891 habitants pour une superficie de 2 017 km2 [15]. La population des enfants de 0-11 mois est de 1 863 et 2 350 grossesses étaient attendues pour la même année. On y dénombre 4854 ménages dont la taille moyenne est de 9,3 personnes répartis sur trente-cinq villages et quartiers de ville. L’accessibilité des populations à un centre de santé est de 77 % pour un rayon de 5 kilomètres contre 88 % pour un rayon de 10 kilomètres. Le taux de recouvrement du financement communautaire est de 98 % au 31 décembre 2005 [2].

Populations cibles

5Quatre catégories de personnes sont ciblées par cette étude : il s’agit du personnel de santé, des autorités morales et religieuses, le personnel de soutien (comptable, gestionnaire) et les enfants de 0 à 1 an.

Phases méthodologiques et modalités de recueil des données

Phase 1 : Mettre en œuvre le modèle collaboratif

6Pour la mise en œuvre du modèle collaboratif, huit étapes ont été indispensables :

7La mise en œuvre du modèle collaboratif s’est appuyée sur des données qualitatives, recueillies par focus groupes et entretiens individuels, auprès de catégories d’acteurs intervenant dans les activités de vaccination au niveau de la circonscription sanitaire. Trois focus groupes ont été constitués : un premier groupe comprenant des infirmiers chefs de postes et des responsables des maternités ; un deuxième groupe comprenant des membres des comités de gestion des centres de santé représentant des populations auprès des centres de santé ; un troisième groupe comprenant du personnel de soutien : comptable, gestionnaire. Par ailleurs, nous avons procédé à des entretiens individuels avec les grands leaders d’opinion de certaines localités (Roi, chefs de cultes).

8La première étape a consisté à identifier le problème de la faible couverture vaccinale des enfants de moins d’un an. Le décor planté permet à chacun de savoir quand on peut estimer le problème réglé ou réfléchir aux différentes voies de résolution du problème. La deuxième étape a amené à analyser le système mis en place pour les opérations de vaccination depuis l’approvisionnement jusqu’à l’administration des antigènes aux enfants. Cette analyse permet d’identifier les différentes failles du système ainsi que sa performance. Elle permet aussi à la population de faire le lien entre la survenue des cas de maladies et la non-vaccination des enfants. Les étapes suivantes consistent à développer des hypothèses pour des changements efficaces en relation avec des failles notifiées ; à planifier les changements retenus, à mettre en place les équipes d’amélioration et à introduire les changements planifiés en fonction des missions assignées à chaque équipe, à étudier l’impact de ces changements et à prendre les décisions conséquentes.

9Toutes ces activités ont été appuyées par des supervisions et des soutiens réguliers réalisés par le médecin chef de la circonscription et ses collaborateurs immédiats (responsable PEV, sage femme et infirmier central). Les différentes étapes de ce modèle sont celles décrites par plusieurs spécialistes de la démarche assurance de qualité [17, 18]

Phase 2 : Suivre les couvertures vaccinales

10Les données des activités mensuelles de vaccination sont collectées à partir des cahiers de stratégies avancées, du registre de soins maternels et infantiles et des cartes infantiles. Ces données sont ensuite synthétisées à travers des supports qui indiquent le nombre d’enfants vaccinés par antigène dans le mois et la gestion des vaccins. Ils sont ensuite saisis dans un tableau de bord conçu dans Excel qui génère les couvertures et des taux après insertion préalable de la population-cible mensuelle et du nombre d’enfants vaccinés dans le mois par antigène. Au total, 120 rapports sont générés par an, à raison de 12 par formation sanitaire. Des graphiques sont ensuite tracés à partir de ces données afin d’apprécier les différentes évolutions.

11Les objectifs d’amélioration de la couverture vaccinale fixés dès le départ sont :

  1. atteindre au moins 90 % de couverture vaccinale pour l’ensemble de la commune fin 2004, et 95 % fin 2005 pour les antigènes DTCP 3e dose, VAR, VAA, Hépatite B 3e dose ;
  2. atteindre 75 % de couverture pour la vaccination antitétanique deux doses ou plus (VAT2+) chez les femmes enceintes pour fin 2005 ;
  3. réduire les taux d’abandon BCG/VAR et DTC1/DTC3 de 10 % entre 2004 et fin 2005 ;
  4. documenter les taux de perte des vaccins (BCG, VAR) et les réduire.

Phase 3 : Détecter les cas de paralysies flasques aiguës

12La méthode consiste à intégrer la surveillance des cas de PFA dans les activités de consultation des tradipraticiens et prioritairement ceux dans les localités frontalières avec le Nigeria. Il ne s’agit pas de remplacer la prise en charge traditionnelle par les tradipraticiens mais plutôt d’offrir la possibilité de faire des prélèvements de selles pour analyse. Ceci ajoute un plus à la prise en charge des cas et est une façon de conserver le lien entre la médecine dite occidentale et celle dite traditionnelle. Les leaders et autres tradipraticiens ont donc été informés sur la définition de cas de la PFA qui se résume comme suit : « La communauté doit considérer comme PFA, tout enfant de moins de 15 ans vacciné ou non, qui marchait normalement et qui brutalement présente des troubles de la marche ou cesse de marcher ou encore tout enfant qui rampe normalement et qui brutalement cesse de ramper ». La radio communautaire locale a été aussi mise à contribution pour la diffusion des messages élaborés avec la communauté. Les occasions d’information sont les réunions sous l’arbre à palabre, les griots qui portent l’information de concession en concession. L’apparition d’un cas au sein de la communauté est notifiée aux tradipraticiens ou aux chefs traditionnels qui informent les structures sanitaires les plus proches en vue des investigations nécessaires, etc. Lorsque apparaît un cas de PFA au sein de la communauté, celui-ci recourt généralement au tradipraticien ou au chef traditionnel le plus proche, qui étant déjà informé sur la PFA, saisit la formation sanitaire la plus proche. L’équipe de santé qui s’y trouve dispose des aides-mémoires visuelles devant lui permettre de prendre les décisions adéquates. L’équipe de santé examine, valide ou non le cas et le notifie à la formation centrale. L’équipe de la formation centrale procède à une investigation du cas et félicite le tradipraticien et lui rappelle les définitions. L’équipe fait ensuite des prélèvements si nécessaire et notifie le cas à la hiérarchie.

Résultats

Pour la mise en œuvre du modèle collaboratif

13La mise en œuvre du modèle collaboratif a, dans un premier temps, permis d’identifier les principales causes des mauvais résultats du PEV dans la commune étudiée : le désintéressement de la population vis-à-vis des activités de vaccination, l’inaccessibilité géographique de certaines localités lors des saisons de pluies et les ruptures fréquentes des vaccins. L’approche a ensuite permis de définir les actions nécessaires à son amélioration : le plaidoyer auprès des autorités traditionnelles influentes, l’approvisionnement régulier des centres en vaccins basé sur une estimation chiffrée, la relance des stratégies avancées, les rattrapages et l’offre intégrée des services sont les grandes actions identifiées pour l’amélioration des performances. L’accompagnement et le suivi des activités de vaccination sont également souhaités : des sessions d’échanges d’expérience sont organisées tous les deux mois entre tous les acteurs impliqués dans le processus et sont assorties d’une planification des actions à mener pour le bimestre suivant.

14Les équipes d’amélioration ont été ensuite mises en place. Elles sont de deux types : une équipe de coaching et de suivi (équipe régionale) constituée du médecin-chef, de la sage-femme centrale, de l’infirmier central et de l’infirmier responsable du PEV et une équipe locale dans chaque formation sanitaire (au total dix) constituée de l’infirmier chef poste, de la responsable de maternité s’il y en a, de l’aide soignant(e) et d’au moins un membre du comité de gestion du centre. Les rôles assignés à ces différentes équipes sont pour l’équipe de coaching et de suivi, la coordination et la gestion courante des activités. Les équipes locales constituent la base opérationnelle du système, elles organisent les activités (vaccination et sensibilisation) en stratégies avancées et en fixent, gèrent les vaccins et veillent à la documentation. Elles s’occupent également de la recherche active et la notification des maladies cibles du PEV. Enfin, elles assurent la maintenance préventive régulière de la chaîne de froid. Le mode d’encouragement retenu est la valorisation auprès des pairs, les acteurs qui auraient les meilleures performances : lettre de félicitations, encouragement en public… Enfin, cette équipe assure l’encadrement du stage obligatoire institué dans le domaine du PEV à tout agent nouvellement affecté dans la commune avant qu’il ne regagne son nouveau poste.

15Les points forts de ce processus sont d’avoir mis en place des équipes mixtes (population, agents de santé), avoir amélioré les indicateurs du PEV, avoir favorisé la collaboration entre la médecine dite « traditionnelle » et celle dite « occidentale » pour la détection des cas de PFA, et avoir identifié des pratiques innovantes.

Pour le suivi des couvertures vaccinales

16Les différentes données recueillies, puis analysées ont permis de montrer par rapport à l’année 2003 où la plupart des couvertures vaccinales, excepté celle du BCG, sont largement en-dessous des objectifs nationaux du PEV (95 %), on constate une nette amélioration à partir de 2004, et cette progression est confirmée par l’année 2005 (Tableau I). Pour l’ensemble des trois années, on note une nette amélioration de toutes les couvertures qui ont une moyenne sur les trois ans supérieure à la projection nationale [7].

Tableau I

Récapitulatif des couvertures vaccinales obtenues avant et en cours du processus du collaboratif

Tableau I
Avant le processus collaboratif En cours du processus collaboratif Antigènes Année 2003 Année 2004 Année 2005 Total 1 968 2 052 2 124 6 144 n (%*) n (%*) n (%*) n (%*) BCG 1 904 (96 %) 2 545 (124 %) 2 908 (136 %) 7 353 (120 %) DTCP3 1 536 (78 %) 1 924 (94 %) 2 485 (117 %) 5 945 (97 % VAA 1 375 (70 %) 2 084 (102 %) 2 578 (121 %) 6 037 (98 %) VAR 1 480 (75 %) 2 044 (99 %) 2 478 (116 %) 6 002 (98 %) Hépatite 3 1 373 (70 %) 1 844 (90 %) 2 461 (115 %) 5 678 (92 %) * % = Nombre d’enfants réellement vaccinés/cible attendue selon l’institut des statistiques nationales.

Récapitulatif des couvertures vaccinales obtenues avant et en cours du processus du collaboratif

17Pour ce qui concerne les couvertures en VAT 2+ chez la femme enceinte, la situation au cours de 2004 et 2005, montre une évolution en dent de scie pour les différentes aires sanitaires de la circonscription (Tableau II). On note une très bonne amélioration entre fin 2004 et fin 2005. Ceci est dû surtout à la mise en place d’une stratégie complémentaire qui a consisté à créer une mémoire au niveau des différentes formations sanitaires avec tous les détails nécessaires à l’identification de ces femmes lors des contacts ultérieurs avec les services de santé. Comparés à la performance globale du département du Borgou dans lequel se trouve la commune de Pèrèrè [5] (69 %) en fin 2005, les résultats sont encourageants.

Tableau II

Évolution de la couverture en VAT2+ par aire sanitaire de 2004 à 2005

Tableau II
Aire de santé En cours du processus collaboratif Couverture 04 Couverture 05 n (%) n (%) Pèrèrè centre 588 (61 %) 624 (64 %) Panè 96 (18 %) 120 (64 %) Kpebie 204 (42 %) 204 (83 %) Gninsy 168 (42 %) 168 (110 %) Diguidirou 180 (84 %) 180 (98 %) Boro 144 (48 %) 156 (79 %) Sandilo 108 (90 %) 108 (141 %) Guinagourou 540 (12 %) 552 (61 %) Nassy 120 (21 %) 120 (93 %) Sontou 256 (44 %) 264 (108 %) Total 2 404 (46 %) 2 496 (80 %)

Évolution de la couverture en VAT2+ par aire sanitaire de 2004 à 2005

18Les taux d’abandon ont également été calculés afin d’apprécier la continuité des services de vaccination (Tableau III). Deux taux ont été retenus : le taux d’abandon entre le DTCP1 et le DTPC3 et celui entre le BCG et le VAR. Les taux d’abandon entre DTCP1/DTCP3 et BCG/VAR ont connu une très bonne régression entre 2003 et 2005. Le taux de perte du BCG est passé de 78 % en 2004 à 69 % en 2005 soit une diminution de 9 %, contre 76 % à 47 % soit une diminution de 29 % pour le VAR.

Tableau III

Évolution des taux d’abandon entre DTCP1/DTCP3 et entre BCG/VAR

Tableau III
Avant le processus collaboratif En cours du processus collaboratif Année 03 Année 04 Année 05 DTCP1/DTCP3 21 % 15 % 9 % BCG/VAR 22 % 18 % 15 %

Évolution des taux d’abandon entre DTCP1/DTCP3 et entre BCG/VAR

Pour la surveillance des paralysies flasques aiguës

19Par rapport à la surveillance épidémiologique des maladies cibles du PEV, notamment la PFA, durant la période de décembre 2003 à décembre 2004, sept cas suspects de PFA dont deux cas à poliovirus sauvage confirmés, ont été au total détectés. Six de ces cas, soit environ 86 %, ont été détectés grâce à la collaboration de la communauté.

Discussion

20Ce modèle, qui s’inscrit dans la démarche d’amélioration rapide de la qualité appliquée dans le contexte de la vaccination, nous paraît intéressant car il facilite la formation continue du personnel dans ce domaine et contribue aussi à instaurer un élan de solidarité vers un objectif commun : garantir à la circonscription une bonne couverture vaccinale. Ce bon résultat sera également retrouvé dans bien d’autres domaines de santé par certains auteurs promoteurs qui citent son rôle dans les stratégies de réduction du temps d’attente des patients ou dans l’amélioration des soins maternels et infantiles, comme dans la réduction des complications de retard liées aux soins apportés aux malades chroniques notamment les personnes diabétiques [1, 3, 10, 11]. Appliquant le même modèle à l’amélioration de l’abandon de la vaccination par les enfants en milieu rural au Maroc, Said Bouda [23] trouve qu’il met à nu les défaillances du système de vaccination. Entre autres causes, en dehors de celles liées au système de santé, il cite le faible niveau d’instruction et le déficit d’information. Au Kenya, il a été rapporté qu’outre les causes énumérées plus haut, le niveau d’instruction et les problèmes d’accessibilité constituent un handicap majeur pour l’amélioration de la couverture vaccinale [21]. Au Nigeria par contre, l’accent a été mis sur la motivation du personnel de santé qui est un élément important dans l’amélioration de la qualité des activités du PEV et un modèle dit promotionnel est suggéré [8]. Ces mêmes résultats sont confirmés par une étude réalisée au Bénin qui rapporte qu’en milieu rural, les enfants sont beaucoup moins exposés à la troisième dose de DTC qu’en milieu urbain [12]. Ceci renforce davantage l’idée du collaboratif car tout en visant l’amélioration de la qualité des services, le modèle collaboratif crée une émulation dans la dynamique du groupe ce qui permet de communiquer véritablement avec les couches de la population les plus marginalisées. Ceci exige par ailleurs un esprit de réseau qui doit s’organiser autour d’un domaine de connaissances, de compétences, de convictions ou d’activités à partir duquel il permet d’établir, entre ses membres, des relations d’échanges [22]. Mais cette performance en matière du PEV ne peut être atteinte sans l’implication réelle des bénéficiaires en vue d’une appropriation et de la pérennisation des activités. C’est ainsi que les équipes d’amélioration mises en place intègrent les membres de la communauté et comptent pleinement avec leur participation effective. D’autres auteurs proposent d’ailleurs, dans le cadre de la réduction des inégalités en matière de vaccination des enfants, une intégration des activités de vaccination dans les programmes de base existants dans la communauté [9]. Ceci montre clairement le rôle prépondérant que la communauté doit jouer dans l’amélioration et surtout dans la pérennisation du PEV. Ce travail a le mérite d’intégrer la participation communautaire aux activités des structures sanitaires à travers un modèle qui facilite la collaboration non seulement entre les pairs mais aussi entre les deux parties. Par ailleurs, il convient d’expliquer les couvertures supérieures à 100 % qui sont le plus souvent dues à l’inexactitude des chiffres de population officiels mais aussi aux difficultés d’identification des enfants « étrangers » en dépit de la mise en place des « bacs pour étrangers », qui sont des caisses dans lesquelles sont mises les cartes des enfants venant d’autres aires sanitaires, ce qui permet d’exclure ces enfants du calcul de la couverture des aires sanitaires. Dans le cadre de cette participation communautaire, son impact sur la détection des cas de PFA a été mesuré dans la logique de la surveillance de proximité pour son éradication. Dans cette logique, la négociation d’un couloir d’échanges avec les chefs traditionnels et les tradipraticiens des villages frontaliers avec le Nigeria, qui sont, pour la plupart, bien connus et qui disposent d’une certaine influence dans leur milieu, a été un des acquis de notre stratégie. Les messages ont été régulièrement élaborés et diffusés par le canal de la radio communautaire locale.

21Les félicitations délivrées aux chefs traditionnels et tradipraticiens coopérants et les plaidoyers auprès des « réticents » à travers des visites de courtoisie, ont été d’une grande utilité pour la réussite de l’initiative. Cette valorisation constitue une très bonne motivation et une collaboration en vue de l’amélioration de la qualité de santé des populations. Une étude réalisée au Niger insiste d’ailleurs sur la valorisation de la communauté dans un processus de surveillance des maladies [19]. La surveillance communautaire contribue à la création de « capital social » dans les collectivités participantes [13]. L’augmentation du capital social accroît la capacité de la collectivité à composer avec les nombreuses questions et décisions complexes associées à la durabilité ce qui contribue à la promotion de la santé [6]. Dans un de ses relevés épidémiologiques, l’OMS rapporte que la participation communautaire, a permis d’obtenir de très bons résultats au Ghana pour la lutte contre la dracunculose, mais elle ajoute qu’il a fallu des mesures incitatives [20]. Cela s’avère important pour asseoir une surveillance plus fiable et pérennisable, car conduit à une appropriation par les bénéficiaires. En revanche, il paraît au début du processus coûteux en termes d’énergie à déployer et de disponibilité car cela nécessite une supervision de proximité et un suivi rigoureux. Il nécessite un esprit de leadership de la part des responsables, contraints à un travail en équipe et exige pour sa pérennisation d’être construit sur base des moyens locaux disponibles. Dans le contexte décrit, il a été mené de bout en bout avec le financement communautaire des différentes aires sanitaires bénéficiaires.

Français

Résumé

Le modèle collaboratif a été testé dans le cadre de l’amélioration de la qualité des services de vaccination et de surveillance des maladies cibles dans la commune de Pèrèrè, au Bénin. Elle a pour objectif de mesurer l’impact de ce type d’approche sur l’amélioration des couvertures vaccinales et la détection des cas suspects de paralysie flasque aiguë. Après la mise en place du modèle collaboratif, les données relatives aux couvertures vaccinales et à la détection des cas de paralysies flasques aiguës ont été recueillies au moyen des rapports d’activités mensuels des formations sanitaires et analysées sur une période de deux ans. Les couvertures vaccinales ont progressé entre 2004 et 2005 et six cas suspects de paralysie flasque aiguë ont été notifiés en 2004 contre 1 cas en 2003. La mise en place du modèle collaboratif a eu un impact positif sur l’amélioration de la performance du programme de vaccination, la notification des cas et sur le renforcement du partenariat entre les structures sanitaires et les communautés.

Mots-clés

  • modèle collaboratif
  • paralysie flasque aiguë
  • couverture vaccinale

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Soliou Badarou [1]
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Yves Coppieters [2]
  • [2]
    Professeur de santé publique à l’Ecole de santé publique de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), Route de Lennik 808 CP 596, B- 1070 Bruxelles, Belgique yves. coppieters@ ulb. ac. be.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 04/07/2008
https://doi.org/10.3917/spub.082.0153
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