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1Dénombrer la population par sexe et âge sur un territoire donné et en décrire ses caractéristiques sont les principaux objectifs des enquêtes de recensement. Cela implique de poser une série, souvent limitée, de questions simples sur les habitants de chaque logement recensé. Décrire les liens de parenté entre ces habitants et les différentes formes de familles observées dans les logements sont des objectifs plus ambitieux auxquels ne répond que partiellement le recensement. Quelles sont les formes de familles mal repérées par le recensement ? Comment sont comptés et catégorisés les enfants en résidence alternée ou les familles à trois générations ? Loïc Trabut, Éva Lelièvre et Estelle Bailly utilisent l’enquête Famille et logements, couplée au recensement et disposant d’informations supplémentaires sur les liens familiaux, pour analyser les types de familles identifiables par ces deux sources et leurs éventuelles discordances.

2Pour la première fois depuis la rénovation du Recensement général de la population en 2004 mettant en place des vagues annuelles auprès d’échantillons territoriaux (Desplanques, 2008), une nouvelle mouture de l’enquête Famille a été associée à la vague 2011, l’enquête Famille et logements. Cette enquête, dont la collecte est traditionnellement couplée au recensement et dont la précédente édition date de 1999 (Lefèvre et Filhon, 2005), a pour objectif de décrire en détail la diversité des situations familiales en France [1]. La collecte se fait par un dépôt-retrait du questionnaire en même temps que les bulletins du recensement : l’ensemble des documents déposés sont auto-administrés puis récupérés par l’agent recenseur. Selon les zones échantillonnées, dans l’objectif de simplifier la collecte, les agents recenseurs désignés pour l’enquête Famille et logements ont distribué uniquement des bulletins aux femmes, d’autres uniquement aux hommes. Au total, 359 770 bulletins ont été recueillis auprès d’un échantillon représentatif au niveau régional de femmes et d’hommes âgés de 18 ans ou plus. Son large effectif permet en particulier d’examiner les configurations familiales plus minoritaires.

3Le questionnaire de l’enquête Famille et logements comporte quatre pages et sa thématique est celle du territoire de la famille, explorée à partir des lieux de résidence des membres de la famille sur 3 générations (des parents aux enfants des enquêtés) (Rault et al., 2011). L’enquête étant associée au recensement, on dispose pour les répondants des informations supplémentaires de la feuille de logement et des bulletins individuels des habitants du ménage de l’enquête annuelle de recensement (EAR).

4Tirant partie de l’ensemble de ces informations, l’objectif de cet article est d’examiner les types de familles produits à partir du recensement en confrontant les données du recensement et celles de l’enquête Famille et logements qui lui sont associées. Cette mise en miroir fait apparaître des discordances entre les deux descriptions et nous permet de mieux préciser la composition des catégories de familles produites à partir du recensement. Cette comparaison s’appuie concrètement sur la façon dont le recensement, à partir de ses propres définitions, construit des familles en partant de la composition des ménages, étant entendu que les statistiques habituellement diffusées aux chercheurs, aux décideurs et au grand public sur les structures familiales en sont issues.

I – Compter et décrire les familles

5Bien que la comparaison proposée ici s’inscrive dans le cadre plus large des discussions portant sur la définition de la famille et son fonctionnement (Bonvalet et Lelièvre, 1995 ; Bonvalet et Lelièvre, 2012), l’objet de ce travail n’est pas de proposer une définition alternative de la famille ou même de discuter de la capacité d’une observation basée sur la corésidence à rendre compte de la complexité des configurations familiales. Il s’agit plutôt d’examiner la qualité de la mesure des formes familiales identifiées par le recensement à l’aide d’une source complémentaire (l’enquête Famille et logements) associée au recensement et collectée auprès des mêmes personnes. Pour cela nous allons présenter, dans un premier temps, les deux sources de données afin de circonscrire les termes de la comparaison.

6Le recensement de la population s’effectue sur la base des logements et de leurs habitants (Lefranc, 1997). Les nombreuses informations sur les caractéristiques du logement sont collectées à l’aide d’une feuille de logement. À l’intérieur de la feuille de logement sont listés les occupants du logement à travers la déclinaison de trois listes où on retrouve respectivement la liste A « les personnes qui vivent dans ce logement la plus grande partie de l’année », la liste B « les enfants majeurs logés ailleurs pour leurs études […] qui reviennent vivre dans le logement » et la liste C « les autres habitants du logement ». Ces listes sont accompagnées d’un nombre variable de bulletins individuels (BI) correspondant au nombre « d’habitants permanents du logement » (la liste A) quel que soit leur âge. Cette description va bien au-delà de la famille puisque l’ensemble des habitants du logement sont énumérés dans les listes. Pour chacun d’eux est indiqué le « lien de parenté ou (la) relation avec la personne inscrite sur la première ligne de la liste ». Le lien de l’ensemble des membres du ménage est établi relativement à la première personne déclarée, ce qui ne permet pas de connaître sans ambiguïté les liens entre les différents membres du ménage. Cette première description est complétée par les informations contenues dans les bulletins individuels, notamment le sexe de l’individu, sa date de naissance, sa situation de couple à travers la question « vivez-vous en couple ? » ainsi que son état matrimonial légal.

7Le recensement a pour vocation le dénombrement de la population : chaque individu est identifié en un lieu et un seul et se voit également attribuer une position et une seule au sein de son éventuelle « famille au sens du recensement ». À partir des informations collectées, et selon les recommandations des Nations unies [2] qui reposent sur l’identification des familles au sein du ménage et le concept de famille nucléaire, est produite une typologie qui distingue les personnes seules, les couples avec ou sans enfants, les familles monoparentales (au sein du ménage) et les ménages complexes [3] (Toulemon, 2012). À ce titre, le recensement est aussi utilisé pour décrire les structures familiales de la population nationale.

8L’enquête Famille et logements vise quant à elle à décrire la famille des enquêtés sans nécessairement reconstituer la composition du ménage, ni se limiter aux seuls corésidents. Réalisée au logement des individus recensés, elle permet donc de décrire la famille des enquêté(e)s et uniquement celle-ci. Cette famille dépasse les frontières du ménage-logement. Renseignée par l’ensemble des individus majeurs d’un même sexe dans chaque logement, l’enquête Famille et logements décrit la lignée sur 3 générations et nous renseigne sur une 4e génération (existence de petits-enfants). L’enquête collecte aussi la situation de couple à travers la question « êtes-vous actuellement en couple ? » et le type d’union. Elle interroge sur le nombre de frères et sœurs de l’enquêté (ego). Concernant les enfants, l’enquête renseigne sur leur présence dans le logement ou ailleurs, sur leur filiation à ego et son conjoint et leur temps de présence dans le logement. Enfin, les informations relatives aux parents d’ego sont collectées, on y précise s’il sont vivants ou décédés, leur(s) lieu(x) de résidence et leur situation de couple à travers la question : « votre père vit-il avec votre mère ? ». La description de la plupart des membres de la famille est assortie de leur lieu de résidence, permettant de savoir s’ils/elles résident dans le logement d’ego ou non, et à quelle fréquence.

9L’objet de la comparaison menée ici est de se caler sur les types de familles au sens du recensement (nucléaires et repérées au sein du ménage) et d’examiner la description qui en est faite par chacune des sources [4].

10Il existe plusieurs divergences entre les données issues du recensement et l’enquête Famille et logements. Elles ne sont pas du même ordre et n’appellent pas le même type d’intervention ou de correction. Tout d’abord, certains écarts relèvent du fait que les univers observés ne sont pas comparables : par exemple, les relations familiales qui débordent le cadre du ménage sont, par définition, exclues du recensement dans sa forme actuelle. Ensuite, une autre part des incohérences vient du mode de collecte des deux enquêtes et de l’algorithme utilisé par l’Insee pour le codage automatique des positions familiales. Enfin, les divergences observées peuvent également résulter de mauvaises déclarations dans le recensement ou dans l’enquête. Notre objectif n’est pas d’examiner l’ensemble des divergences entre les deux sources, mais d’apporter un éclairage et des nuances sur la typologie des familles produite par le recensement qui, compte tenu de l’importance de cette source, fait référence dans le débat public. Nous allons distinguer ces différences en commençant par circonscrire le champ d’étude aux familles que l’on peut effectivement comparer à l’aide du recensement et de l’enquête Famille et logements.

II – Comparer les informations sur les familles du recensement et de l’enquête Famille et logements

11Au-delà des différences qui résultent des questions dont la formulation diffère entre le recensement et l’enquête Famille et logements, les deux enquêtes bien que collectées auprès d’un même individu ont des objectifs distincts et ne se réfèrent pas au même univers (les habitants du logement ou la famille). Ainsi, une partie des disparités que nous allons pointer en comparant « la famille corésidente » reconstituée d’une part à partir du recensement (un dénombrement des habitants du logement) et d’autre part décrite par une enquête spécifique, résultent de cette différence de positionnement.

12Les périmètres différents des deux enquêtes doivent donc être examinés pour comparer les familles décrites à partir de ces deux sources. Nous allons tout d’abord restreindre notre champ à la famille corésidente (définition du recensement) afin de comparer les deux échantillons. Par ailleurs, nous devons tenir compte des personnes non apparentées vivant habituellement dans le logement (qui ne figurent pas dans l’enquête Famille et logements).

13Rappelons, à partir de quelques exemples, la façon dont les deux sources rendent compte des résidents habituels du logement et de la famille (figure 1). Examinons les données disponibles concernant les personnes des ménages (1) et (2) dans les deux sources : enquête annuelle du recensement (EAR) et enquête Famille et logements (EFL), sachant que selon l’aire géographique enquêtée, l’EFL sera administrée aux hommes des ménages recensés ou alternativement aux femmes. Ce plan de sondage conditionne les possibilités de comparaison des deux sources pour un individu donné et les comparaisons d’effectifs.

Figure 1

Recensement et enquête Famille et logements. Description des familles et des ménages (1) et (2)

Figure 1

Recensement et enquête Famille et logements. Description des familles et des ménages (1) et (2)

Un exemple illustratif

14Prenons le cas, un peu particulier, d’une mère vivant avec ses deux enfants, – un garçon et une fille tous deux âgés de plus de dix-huit ans – et ayant une relation de couple non cohabitante [5] avec leur père. Dans le logement (1) l’EAR dénombre 3 personnes et identifie (après codification au sens du recensement, voir ci-après) une « famille monoparentale avec deux enfants » dont le parent est une femme.

  • Si l’EFL s’adresse aux hommes des ménages recensés dans cette zone d’enquête, un seul questionnaire sera collecté. Les données de l’EFL nous décrivent alors la famille d’un jeune homme adulte, sans enfant, qui vit avec sa mère et dont le père vit dans un autre logement (2) ; on sait également qu’il a une sœur. On disposera d’informations sur 3 personnes du logement (et une en dehors).
  • Si l’EFL s’adresse aux femmes des ménages recensés dans cette zone d’enquête, deux questionnaires seront collectés :
    • Celui de la femme la plus âgée décrit son couple non corésident (conjoint en (2)) et ses deux enfants adultes qui habitent avec elle ; ainsi que ses parents qui vivent ensemble en (3).
      On disposera d’informations sur les 6 personnes apparentées indépendamment de leur lieu de résidence (3 personnes du logement et 3 en dehors).
    • Celui de la femme la plus jeune décrit un couple non corésident (conjoint en (4)) sans enfant, ainsi que ses parents (mère dans le même logement (1) et père en (2)) et son frère.
      On disposera d’informations sur 3 personnes du logement (et 2 en dehors).

15Dans le logement (2) l’EAR dénombre 1 personne et l’on est en présence (après codification) d’un « individu isolé » de sexe masculin.

  • Si l’EFL s’adresse aux femmes des ménages recensés dans cette zone d’enquête, aucun questionnaire n’est collecté [6].
  • Si l’EFL s’adresse aux hommes des ménages recensés dans cette zone d’enquête, un questionnaire est collecté. Les données décrivent son couple non corésident (conjoint en (1)) et ses deux enfants adultes qui habitent aussi en (1) ; ainsi que ses parents qui vivent ensemble en (5).

16On disposera d’informations détaillées sur 1 personne du logement (et 5 en dehors).

17De ces univers résultent des divergences qui imposent de prendre quelques précautions avant de comparer les deux sources. L’enquête Famille et logements, qui s’attache à décrire les liens familiaux de l’enquêté, ne repère pas au sein du ménage les individus qui ne lui sont pas apparentés. Le recensement ne décrit pas les personnes hors ménage, c’est ainsi que ses « familles monoparentales » sont donc plutôt des « ménages monoparentaux » (Théry, 1993, 1996 ; Lefaucheur, 1987, 1991, 1993), l’un des parents étant non corésident mais pas forcément inexistant.

Les effectifs des occupants des logements selon les deux sources

18Afin de comparer les deux sources, procédons, dans un premier temps, à un rapprochement de l’effectif [7] des occupants des logements enquêtés conjointement par l’enquête Famille et logements 2011 (EFL) et le recensement (tableau 1). Le recensement dénombre « chaque personne qui vit habituellement dans ce logement ». L’enquête Famille et logements comptabilise de la même manière les conjoints corésidents, les enfants déclarés comme vivant la moitié du temps ou plus dans le logement et les parents résidant en permanence dans le logement d’ego. Sur les 359 770 bulletins de l’enquête Famille et logements, 313 098 (soit 87,03 %) [8] permettent de comparer simplement les structures familiales décrites avec le recensement puisque le nombre d’individus des familles corésidentes de l’EFL et le nombre d’individus des ménages du recensement sont égaux.

Tableau 1

Comparaison de la taille du ménage des enquêtés EFL selon l’énumération du recensement et le dénombrement de l’enquête Famille et logements

Tableau 1
Même nombre d’individus par ménage dans les deux sources : 313 098 (87,03 %) Nombre d’individus comptés par le recensement dans les ménages Logements pour lesquels on comptabilise moins d’individus dans l’EFL que dans le recensement 1 2 3 4 5 6+ Nombre d’individus décrits comme corésidents dans le même logement de l’EFL 1 71167 7 637 2 756 1 054 418 348 12 213 2 881 124 170 7 188 2 624 1 044 676 11 532 3 354 2 387 53718 7 711 2 979 1 605 12 295 4 54 591 1 754 44135 1 268 489 1 757 5 10 54 418 902 15154 638 638 6 + 1 18 38 379 396 4 754 Logements pour lesquels on comptabilise moins d’individus dans le recensement que dans l’EFL 1 300 3 050 2 210 1 281 396 8 237 (2,29 %) 38 435 (10,68 %) 313 098 (87,03 %)

Comparaison de la taille du ménage des enquêtés EFL selon l’énumération du recensement et le dénombrement de l’enquête Famille et logements

Sources : Enquête annuelle de recensement EAR2011 et enquête Famille et logements 2011 (Insee).

19On observe également 10,68 % de ménages plus peuplés dans le recensement que dans l’EFL, soit 38 435 cas qui peuvent correspondre à la présence d’individus hors famille non répertoriés par l’EFL. L’EFL décrit uniquement une partie des apparentés de l’enquêté : parents, enfants et conjoint. Ces situations ne devraient pas affecter les structures familiales du ménage telles que le recensement les codifie.

20Enfin, dans 8 237 cas (2,29 %), il « manque » des membres de la famille du côté du recensement. En effet, malgré le fait que certaines personnes de la famille déclarent, dans l’EFL, résider la moitié du temps ou plus dans le logement, aucun bulletin individuel n’a été collecté. Plusieurs hypothèses peuvent être avancées concernant ces quelques cas.

21La première tient au décalage des dates de références des deux recueils d’information. En effet, la collecte du recensement (et donc de l’EFL) s’est déroulée du 20 janvier au 26 février 2011, mais tandis que l’EFL fournit une description à la date de l’enquête, le recensement vise à décrire la population à la date de référence du 20 janvier 2011. Les procédures du recensement « suppriment », par exemple, les enfants nés après cette date qui ne doivent pas faire l’objet d’un bulletin individuel de recensement, alors qu’ils figurent bien dans le tableau des enfants de l’enquêté de l’EFL. La seconde raison tient à la définition des enfants en résidence alternée, systématiquement comptabilisés dans l’EFL mais pas forcément dans le recensement, dans les cas où la résidence est partagée à moitié. En effet, la notice du recensement précise qu’« […] en cas d’égalité du temps passé chez chacun de ses parents : il sera recensé dans le logement où il est présent le jeudi 20 janvier ». Toutefois, les données du ministère de la Justice (Guillonneau et Moreau, 2013) nous permettent de relativiser le nombre de ces situations, puisque 16,7 % des jugements sur les gardes d’enfants suite à la séparation de leurs parents font état d’une garde alternée égale entre chacun des parents.

III – Construire des familles avec les données du recensement

22L’opération coûteuse de codification des données collectées par les enquêtes annuelles de recensement (EAR) est largement automatisée. Elle répond à des recommandations dans le cadre du règlement européen sur les recensements, qui permet les comparaisons entre pays et qui, comme nous l’avons rappelé, est basée sur la famille nucléaire avec une large priorité faite à la description de la situation des enfants au quotidien [9]. Les individus se voient ainsi attribuer sans ambiguïté une position au sein de la famille et une seule, cela afin d’éviter les possibilités de double compte. Pour décrire les structures familiales de la population, l’Insee procède donc à une reconstruction des familles à l’intérieur des ménages à partir des informations décrites dans les bulletins du recensement. Cela permet d’identifier au sein des ménages les personnes seules, les couples avec ou sans enfants, les familles monoparentales et les ménages complexes (Toulemon, 2012). Les affectations d’individus à des types de familles se font selon la structure du ménage, leur position familiale et conjugale, et leur âge.

23L’enquête Famille et logements n’a pas vocation à décrire la composition du ménage, elle permet de décrire précisément la famille de l’enquêté(e). À partir des informations très détaillées de l’enquête Famille et logements, il va être possible d’évaluer la typologie établie par le recensement, de repérer les divergences entre les deux sources.

Les informations collectées, les données utilisées

24Le recensement énumère l’ensemble des habitants du logement sur la feuille de logement, en distinguant différents niveaux d’occupation de celui-ci. Pour chacun des membres du ménage « vivant dans ce logement la plus grande partie de l’année », le lien de parenté ou la relation avec la première personne de la liste est inscrit en clair. De plus, chacun des membres du ménage remplit un bulletin individuel (BI).

25Habituellement, si les informations des BI sont codifiées et disponibles, les informations sur les trois listes des occupants du logement (membres du ménage, enfants majeurs logés ailleurs et autres habitants du logement) ne sont pas saisies dans leur totalité, en particulier celles qui concernent les liens, notés en clair, des membres du ménage avec la première personne de la liste. Ces informations sont néanmoins partiellement utilisées dans certains cas complexes que nous allons décrire. In fine, les liens disponibles (encadré) résultent de l’algorithme plutôt qu’ils n’y contribuent, la codification n’émane que très marginalement des déclarations des personnes faites sur la feuille de logement. Seuls 6 % environ des individus EAR ont leur ménage décrit à partir des liens enregistrés dans la liste A de la feuille de logement [10].

Encadré. Modalités des variables L1 et MOCO

L1 : lien avec la première personne de la liste des habitants permanents du logement
1 – première personne de la liste
2 – conjoint de la première personne (époux, épouse, mari, femme, union libre, en couple, etc.)
3 – enfant de la première personne ou de son conjoint ou conjoint de l’enfant
4 – petit-enfant…
5 – ascendant…
6 – autre parent…
7 – ami…
8 – pensionnaire ou sous-locataire
9 – domestique ou salarié logé
MOCO : mode de cohabitation
11– enfant d’un couple
12– enfant d’une famille monoparentale
21– adulte d’un couple sans enfant
22– adulte d’un couple avec enfant(s)
23– adulte d’une famille monoparentale
31– personne vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes
32– personne vivant seule

La première étape à partir des bulletins individuels

26Dans un premier temps, l’Insee procède au traitement des variables des bulletins individuels (BI) d’un même ménage avec un algorithme permettant « de caractériser automatiquement la composition de 3 ménages sur 4 environ. Cet algorithme repose sur l’âge, le sexe, la situation matrimoniale légale et la mention de vie en couple des occupants du logement » [11] (Insee, 2011). À partir des informations et de définitions spécifiques l’algorithme identifie :

  • les « Logements vides » s’il n’y a pas de BI dans le logement ;
  • les « Personnes seules » s’il y a un seul BI dans le logement, correspondant à un adulte ;
  • les « Couples sans enfant » s’il y a deux BI de personnes de sexe différent dans le logement qui correspondent à un couple ;
  • les « Couples avec enfant(s) » s’il y a au moins trois BI dans le logement : deux correspondent à un couple et les autres à des enfants (personne nécessairement mineure à cette étape de la codification automatique) ;
  • les « Familles monoparentales » s’il y a au moins deux BI dans le logement : l’un correspond à un adulte de plus de 18 ans et les autres à des mineurs.

27L’ensemble de cette première étape ne mobilise pas les liens décrits en clair dans la feuille de logement mais s’appuie uniquement sur l’âge et la situation de couple telle qu’elle est décrite dans les BI. Il en résulte que les liens construits entre parents et enfants ne correspondent pas nécessairement à une filiation légale ou même de fait. En effet, les « enfants » sont de l’un ou de l’autre des 2 conjoints, voire associés à un individu qui pourrait ne pas être parent (un oncle, un frère aîné, etc.) dans de rares cas. Cette première étape permet de classer automatiquement 75 % de la population.

28Pour les 25 % restant, soit les données utilisées par l’algorithme sont partiellement manquantes, soit les situations sont considérées comme plus complexes (par exemple du fait de la présence d’enfants de plus de 18 ans, de plusieurs couples, etc.). L’Insee a alors recours à une deuxième étape de codage faisant intervenir des définitions moins restrictives (du point de vue de l’âge) et qui utilise alors les informations des différentes listes de la feuille de logement.

La deuxième étape de codage : les ménages « a priori plus complexes » et « réellement plus complexes »

29Après la première classification automatique, 25 % des ménages sont « a priori plus complexes » au sens du recensement. Pour décrire les familles de ces ménages complexes, le comptage autorise au sein d’un ménage uniquement la présence de deux familles au maximum. Une fois repérée une première famille (à partir d’un couple ou d’un parent seul et son (ou ses) enfant(s) dans le logement), la codification examine la situation des autres personnes adultes du ménage par rapport à cette première famille. Si la personne est en couple, elle forme automatiquement une seconde famille (y compris si elle-même est un enfant adulte de la première famille). En effet, pour être qualifié d’enfant du premier noyau familial, la personne ne peut pas avoir elle-même dans le ménage un conjoint ou un enfant [12]. Enfin, « les membres du ménage qui ne font pas partie d’une famille sont les « isolés » du ménage ».

30Ce deuxième codage est donc effectué (i) notamment en levant les contraintes associées aux âges des individus pour pouvoir par exemple associer cette fois-ci les enfants de plus de 18 ans à leurs parents vivant dans le ménage, mais aussi (ii) en formant des couples (dont les deux BI n’indiquent pas nécessairement vivre en couple) en s’appuyant sur le lien à la première personne inscrite sur la liste des habitants permanents du logement : « Le lien de parenté indiqué dans les listes peut être époux, épouse, conjoint, conjointe mais aussi ami, amie, concubin, concubine, pacsé, fiancé, etc. Si le contexte suggère une union libre, on retiendra la présence du couple ». C’est uniquement à ce stade que le codage des liens mobilise les informations données par les enquêtés dans la liste A de la feuille de logement (en plus de l’ensemble des informations des bulletins individuels).

31Pour les situations restantes après ce deuxième passage, situations dites des « ménages réellement plus complexes », le codage est basé sur l’examen renouvelé de l’ensemble des individus (BI) du ménage. Les nouvelles règles, qui désormais s’appliquent, sont les suivantes : « le conjoint […] de l’enfant sera également codé enfant (gendre, bru, beau-fils, belle-fille de la première personne et/ou de son conjoint, concubin de l’enfant). Le conjoint du petit-enfant sera codé de la même manière. L’enfant peut aussi être adopté ou en tutelle ». L’ascendant de la liste L1 (encadré) peut être le père, la mère, le beau-père ou la belle-mère, mais aussi sans distinction le grand-père ou la grand-mère. L’ami en L1 n’a pas de lien de parenté ni de relation de travail avec la première personne de la liste, tout comme le pensionnaire ou le sous-locataire. Enfin, les domestiques ou salariés logés présentent eux aussi la caractéristique de ne pas avoir de lien de parenté avec la première personne. Si lien de parenté il y a, il est toujours prioritaire.

32Une fois ces liens codés, le traitement des données construit la première famille, celle de la première personne de la liste A des membres du ménage, puis reprend l’information sur le fait d’être en couple (parent potentiel). Étant donné qu’une seule position subsiste pour chaque individu afin de garantir la description sans double compte, on aboutit à un codage des modes de cohabitation par la variable sur le mode de cohabitation MOCO (encadré). Chaque individu recensé est codé en fin de chaîne selon 7 modalités définissant sa position dans la famille-ménage : « enfant d’un couple » ; « enfant d’une famille monoparentale » (quel que soit l’âge) ; « adulte d’un couple sans enfant » ; « adulte d’un couple avec enfant(s) » ; « adulte d’une famille monoparentale » ; « personne vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes » ; « personne vivant seule ». Par ailleurs, alors que seuls 6 % [13] des ménages sont considérés comme « réellement plus complexes » et donc pour lesquelles la variable L1 est codée à partir des informations effectivement inscrites sur la liste A, l’ensemble des personnes recensées se voit attribuer une modalité L1 par imputation.

33En conséquence, la description réalisée par le recensement définit une structure particulière des familles. Sur la figure 2, on observe à gauche un ménage composé d’une famille tri-générationnelle dont la génération-pivot ne vit pas en couple, mais réside avec ses deux parents et ses deux enfants. La classification réalisée par l’algorithme isole la mère et ses deux enfants, elle-même de ce fait ne peut plus être reconnue comme fille de ses parents en raison de l’unicité du type de lien pour chaque individu. Ainsi l’individu-pivot ne peut être fille puisqu’elle est mère, et ses parents constituent une famille de deux « adultes d’un couple sans enfant ». L’autre exemple présente une situation familiale plus complexe. La description classique nous montre trois couples dont l’un serait parent de trois enfants parmi lesquels deux sont en couple (l’ensemble des individus cohabitant dans un même logement). La classification du recensement produit deux familles, selon la règle des deux familles maximum. La première famille constituée sera réalisée à partir du premier couple parental. La deuxième famille sera réalisée à partir du premier enfant et de son conjoint. Les autres individus du ménage seront ensuite considérés indifféremment comme les enfants du premier couple.

Figure 2

Codification de la structure familiale des ménages du recensement

Figure 2

Codification de la structure familiale des ménages du recensement

IV – Comparer les positions familiales des individus

34La construction des deux enquêtes et les principes de codification des types de famille du recensement sont à l’origine de plusieurs divergences. On retiendra notamment que les données ne couvrent pas systématiquement le même univers et que si les répondants décrivent leurs familles dans l’EFL, celles-ci sont construites selon des modalités spécifiques pour produire la typologie des familles au sens du recensement. D’autres facteurs de divergence interviennent et nous allons tenter de les identifier dans nos comparaisons. Celles-ci résultent du fait que certaines informations relatives aux liens familiaux ne sont pas collectées par le recensement ; que les modalités de construction des familles du recensement au sein des ménages conduisent à des simplifications de codification ; que la description de certains liens en clair peut mener à des interprétations erronées et que la déclaration des individus en multirésidence, notamment les enfants en résidence alternée, peut entraîner des erreurs ; sans omettre les valeurs manquantes et le non-respect des consignes par les personnes interrogées.

35Disposant à présent pour chaque enquêté de Famille et logements de son statut familial selon la codification du recensement, afin de circonscrire les divergences entre les deux sources, nous allons confronter les situations où on connaît précisément la description de la famille corésidente par l’enquête Famille et logements, ce qui permet d’utiliser la position d’ego donnée dans la variable MOCO.

36Pour cela, on retient les situations dans lesquelles le nombre d’occupants du logement et de personnes décrites dans l’EFL est égal, puis supérieur à celui décrit dans le recensement, à savoir des configurations de ménages qui ne devraient pas induire de divergences dans la description de la famille corésidente, ce qui limite les différences dues au champ des deux collectes. Puis, toujours à des fins de simplification, on élimine les enquêtés majeurs en position d’enfant dans l’EFL. Le codage du point de vue du recensement de ces adultes qui vivent avec au moins un de leurs parents va dépendre d’un nombre important de variables (notamment, le nombre de familles dans le logement, le nombre d’individus, la situation familiale de l’enfant, la présence d’enfants qui lui seraient associés), ce qui complexifie l’analyse. Pour l’enquête Famille et logements, on retient comme résidents les enfants déclarés comme vivant la moitié du temps ou plus dans le logement.

Comparaison des deux sources à nombre égal de personnes comptées dans les ménages

37Puisque les personnes majeures en position d’enfant [14] dans l’enquête Famille et logements ne sont pas retenues, ceci va un peu réduire le nombre de cas comparés. Le pourcentage de situations de concordance du nombre d’individus par ménage résultant est de 83,43 % (87,03 % en population générale, tableau 1) [15]. Le tableau 2 décrit la position familiale des enquêtés dans les ménages comptabilisant le même nombre d’individus dans les deux sources.

38Dans ces quatre configurations familiales corésidentes simples, la codification réalisée pour le recensement positionne une très large majorité des individus dans la catégorie que les enquêtés décrivent dans l’EFL.

Tableau 2

Répartition des statuts des enquêtés (%) selon le recensement et l’enquête Famille et logements pour quatre situations familiales repérées dans l’EFL, à taille égale de ménage (83,43 % des cas)(a)

Tableau 2
Valeur de la variable MOCO du recensement Description EFL Adulte d’un couple sans enfant Adulte d’un couple avec enfant(s) Adulte d’une famille monoparentale Adulte sans lien familial dans le logement Enfant d’un couple Enfant d’une famille monoparentale Adulte d’un couple sans enfant Adulte d’un couple avec enfant(s) Adulte d’une famille monoparentale Personne vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes Personne vivant seule 0,00 0,00 98,38 0,00 0,02 1,60 0,00 0,00 0,01 1,00 97,58 0,29 1,12 0,00 0,00 0,01 0,06 0,03 95,08 4,83 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 100 Total 100 100 100 100 Effectif non pondéré 110 326 103 062 15 620 71 167

Répartition des statuts des enquêtés (%) selon le recensement et l’enquête Famille et logements pour quatre situations familiales repérées dans l’EFL, à taille égale de ménage (83,43 % des cas)(a)

(a) Comparaison des cas où le nombre de personnes du ménage est identique dans les deux sources.

39Pour la très grande majorité de ces cas, les quatre situations familiales décrites par le recensement et l’EFL sont concordantes. Tous les individus reconnus comme vivant seuls dans l’EFL sont effectivement codés « personne vivant seule », 98,38 % des individus déclarant vivre en couple sont codés comme « adulte d’un couple sans enfant ». De la même manière, 97,58 % des individus en couple avec enfant(s) et 95,08 % des individus ne vivant pas en couple avec enfant(s) sont classés respectivement en « adulte d’un couple avec enfant(s) » et « adulte d’une famille monoparentale ». À la marge, les cas discordants concernent les adultes hors famille vivant dans un ménage de plusieurs personnes. On remarque que la plupart des 4,83 % d’adultes EFL qui se déclarent en famille monoparentale et codés « personnes vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes », sont des personnes de plus de 50 ans (beaucoup sont bien plus âgées) et dont le(s) enfant(s) corésidents ont plus de 18 ans.

Comparaison des deux sources quand le recensement dénombre plus d’individus que l’enquête

40Le fait d’avoir plus d’individus dénombrés par le recensement que de membres de la famille EFL corésidente dans le logement ne devrait pas affecter la variable MOCO qui code la position de l’individu au sein de sa famille ; on observe cependant des écarts notables de classification entre les deux sources (tableau 3). En effet, il s’agit des cas où la famille décrite par l’individu enquêté par EFL coréside avec des personnes non apparentées ou une autre famille dans le ménage.

Tableau 3

Dans les ménages comprenant des personnes non apparentées, comparaison des statuts des enquêtés au recensement et dans l’enquête Famille et logements pour quatre positions familiales repérées dans l’EFL (7,07 % des cas)(a)

Tableau 3
Valeur de la variable MOCO Description EFL Adulte d’un couple sans enfant Adulte d’un couple avec enfant(s) Adulte d’une famille monoparentale Adulte sans lien familial dans le logement Enfant d’un couple 0,18 0,00 0,15 3,76 Enfant d’une famille monoparentale 0,16 0,00 0,24 3,41 Adulte d’un couple sans enfant 37,35 12,52 0,19 2,67 Adulte d’un couple avec enfant(s) 55,64 83,84 6,48 0,37 Adulte d’une famille monoparentale 0,72 0,7 50,88 26,61 Personne vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes 5,96 2,93 42,06 63,18 Personne vivant seule 0,00 0,00 0,00 0,00 Total 5 004 6 175 2 054 12 213

Dans les ménages comprenant des personnes non apparentées, comparaison des statuts des enquêtés au recensement et dans l’enquête Famille et logements pour quatre positions familiales repérées dans l’EFL (7,07 % des cas)(a)

(a) Comparaison des cas où le nombre de personnes recensées du ménage est supérieur au nombre de membres de la famille corésidente dans l’EFL.

41C’est dans ces ménages qui comportent des personnes au-delà de la famille décrite par l’EFL (7 % de notre échantillon de comparaison) que les divergences sont les plus importantes.

42Les situations où ego se décrit dans l’EFL comme vivant en couple avec des enfants sont les mieux repérées par le processus de codage du recensement (84 % de classification concordante). Néanmoins, 56 % des personnes EFL en couple sans enfant et 27 % des personnes EFL sans lien familial dans le ménage sont classées comme parents d’enfants dans le recensement (respectivement adulte d’un couple avec enfant et adulte d’une famille monoparentale). Et à l’inverse, 42 % des adultes d’une famille monoparentale de l’EFL sont classés hors famille dans le recensement. Les écarts concernent donc principalement le codage de la filiation : (i) le lien parent-enfant est construit artificiellement, ou à l’inverse (ii) le lien parent-enfant est ignoré par la codification semi-automatique du recensement [16].

43Dans le premier cas, quand ego ne déclare aucun enfant corésident la moitié du temps ou plus dans l’EFL, plus de la moitié (55,64 %) de ces 5 004 individus sont considérés comme « adulte d’un couple avec enfant(s) ». Un lien filial est ainsi codé par le recensement avec un membre du ménage non apparenté ou un enfant inscrit en liste A comme vivant habituellement dans le ménage. De la même manière, on constate que les individus ne déclarant ni enfant, ni conjoint corésidents dans l’EFL, bien que majoritairement classés dans la même catégorie (« personne vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes »), sont toutefois 26,61 % à être codés par le recensement à la tête d’une famille monoparentale. Ces individus que l’EFL repère comme adulte hors famille dans le ménage et que MOCO désigne comme adulte (parent) d’une famille monoparentale correspondent à des situations où l’enquêté EFL a effectivement déclaré des enfants, cependant dans 67 % des cas il s’agit de situations de multirésidence pour l’ensemble des enfants qui passent moins de la moitié du temps dans le logement. Ceci conduit potentiellement à des doubles comptes si ces enfants sont comptés dans chaque ménage de leurs deux parents.

44À l’inverse, pour les 42 % d’adultes autodéclarés parents d’une famille monoparentale dans l’EFL et classés par le recensement comme « personne vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes », il s’agit principalement d’enquêtés plus âgés dont les enfants sont eux-mêmes adultes et que la deuxième phase de classification du recensement code sans reconnaître le lien filial.

45Enfin, concernant les couples sans enfant, quand le codage semi-automatique ne leur associe pas un enfant (55,64 %), il ne reconnaît pas le lien de couple (5,96 % des cas). Parmi ceux-ci, 18 % sont des couples de même sexe corésidents – soit un écart logique puisque le recensement ne code pas par construction les liens conjugaux entre personnes de même sexe (y compris si leurs BI mentionnent le fait d’être en couple).

46Pour résumer, plusieurs facteurs contribuent aux différences observées : des écarts prévisibles liés aux définitions particulières appliquées au recensement [17], des divergences résultant des limites de la codification automatique des ménages complexes. Par exemple, le rattachement des enfants de plus de 18 ans qui n’intervient que dans un deuxième temps semble engendrer une sous-estimation des liens de filiation concernant les enfants adultes corésidant avec leur(s) parent(s). Enfin, les problèmes de déclarations au recensement comme dans l’EFL contribuent également au repérage difficile des situations familiales.

47De ces diverses comparaisons, une première conclusion ressort : les formes fréquentes et simples de la famille nucléaire sont correctement codées par l’algorithme semi-automatique de codification des données du recensement, sans aucun recours à la liste A de déclaration des liens avec la personne de référence. Néanmoins, une des spécifications du recensement est de fournir des résultats sur la structure familiale des ménages et l’on attend de cette source « exhaustive », qui fait largement référence, d’être également la mieux à même d’identifier les situations plus marginales, nouvelles, émergentes ou rares. Or si le recensement permet bien de dénombrer les individus, il est moins efficace pour identifier ces situations atypiques. En effet le codage des liens dont est issue la variable MOCO, et qui est principalement basé sur les informations des BI, peine à décrire les familles des ménages moins habituels : ceux où cohabitent plusieurs familles ou plusieurs personnes isolées qui ne constituent pas une famille, ou encore une famille vivant avec des personnes « hors famille ».

48Pour approfondir la question tout en restant dans le cadre des types de liens identifiés par le recensement, une perspective différente est adoptée. Nous allons tout d’abord prolonger les travaux de Laurent Toulemon et Sophie Pennec (2011) en examinant cette fois non pas l’ensemble des situations, mais deux catégories particulières du recensement que sont les « personnes vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes » (il s’agit de 15 011 individus, soit 4,17 % de l’échantillon) et la catégorie des « familles monoparentales » qui, en raison de son plus fort taux de pauvreté, fait l’objet d’un intérêt particulier des pouvoirs publics.

V – Une surestimation du nombre de personnes vivant hors famille et des familles monoparentales

49La confrontation des deux sources a permis de montrer que la typologie du recensement repère bien les formes les plus usuelles de la famille nucléaire corésidente, à savoir les couples avec ou sans enfants, et les personnes vivant seules dans leur ménage, dans la mesure où le ménage est constitué uniquement par ce type de famille. Toutefois, pour les configurations de corésidence moins courantes, les divergences entre les deux sources sont plus marquées. Nous allons donc à présent décrire deux de ces catégories plus marginales de la typologie, c’est-à-dire les « personnes vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes » et les « adultes d’une famille monoparentale » en mobilisant le détail de l’information déclarée dans l’enquête Famille et logements.

Des liens non identifiés : les limites de la définition du recensement

50Comme l’illustre la figure 3, parmi les individus considérés dans le recensement comme « personne vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes », 15,6 % déclarent dans l’enquête Famille et logements vivre avec au moins l’un de leurs parents, 12,1 % ont des enfants qui cohabitent avec eux de manière permanente et 23,8 % vivent en couple et cohabitent avec leur conjoint. C’est ainsi que pour 44,1 % des individus considérés dans le recensement en situation « hors famille dans un ménage de plusieurs personnes », ceux-ci déclarent dans l’EFL qu’ils vivent en réalité au sein d’un groupe familial.

Figure 3

Situations familiales déclarées dans l’EFL des personnes classées par le recensement comme vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes

Figure 3

Situations familiales déclarées dans l’EFL des personnes classées par le recensement comme vivant hors famille dans un ménage de plusieurs personnes

Note : Les enquêtés pouvant se trouver à la fois dans plusieurs situations, le chiffre de 44,1 % est inférieur à la somme des situations identifiées.

51Bien que l’on ne puisse écarter des déclarations erronées dans l’EFL, il apparaît que l’algorithme de l’Insee surmonte mal les difficultés qu’il rencontre à la phase du traitement des familles dites « complexes » lorsqu’il y a plusieurs familles dans un même logement, une famille et des personnes isolées, ou encore des personnes qui ne constituent pas une famille corésidente dans le ménage. C’est une phase où la contrainte d’âge (un enfant peut être âgé de plus de 18 ans) est levée et où le processus fait appel, via la reconnaissance optique [18], aux liens (à la première personne de la liste) décrit sur la liste des habitants du ménage. La restriction de la description des liens à la première personne dans la liste des habitants permanents du logement conjuguée à la polysémie des termes employés par les enquêtés (ami(e), conjoint, etc.) ne permet pas de rectifier la construction de la variable « mode de cohabitation ». S’y ajoute la contrainte, du point de vue du recensement, de l’unicité du lien attribué aux individus qui ne permet pas de décrire convenablement les structures familiales plus complexes.

La difficulté de déclarer ses enfants en garde alternée

52Nous avons précédemment identifié qu’une partie des adultes de famille monoparentale, identifiée par l’EFL, ne l’était pas par le recensement (4,92 %, tableau 2 ; 49,12 %, tableau 3, soit 1 778 cas) et nous avons fait l’hypothèse que la mauvaise prise en compte des liens filiaux entre adultes serait majoritairement responsable de ces différences.

53Cette fois-ci, il s’agit réciproquement d’examiner la situation familiale déclarée dans l’EFL des 20 685 individus classés par le recensement comme étant un adulte à la tête d’une « famille monoparentale », dont 10,5 % sont des hommes et 89,5 % des femmes (tableau 4). Leur codification (MOCO = 23) résulte de la présence d’un adulte non en couple et de son(ses) enfant(s) comme membres du ménage. Les parents séparés doivent inscrire leurs enfants dans des listes différentes selon la situation (section I et annexe) [19] : soit dans la liste A avec « les personnes qui vivent dans ce logement la plus grande partie de l’année », qui comprend d’ailleurs (sans durée minimale de présence) « les enfants mineurs logés ailleurs pour leurs études », soit dans la liste B « les enfants majeurs logés ailleurs pour leurs études et qui reviennent vivre dans ce logement pour les vacances ou les week-ends, par exemple », soit dans la dernière liste C et en sous-liste C2 « en cas de garde conjointe, s’ils résident la plupart du temps avec l’autre parent » ; dans le cas particulier de garde à 50 % exactement, selon la présence de l’enfant le 20 janvier 2011 [20]. Le recensement ne demande pas de précision sur la durée ni la fréquence de présence des enfants dans le logement, en s’en tenant au remplissage du répondant, et le codage est fait à partir des enfants qui sont déclarés comme vivant « habituellement dans le logement » et pour lesquels on dispose d’un bulletin individuel, sans autre information relative par exemple à la résidence alternée des enfants (Toulemon et Pennec, 2010).

Tableau 4

Comptage comparé des enfants des ménages monoparentaux, enquête annuelle de recensement EAR et enquête Famille et logements EFL

Tableau 4
Sexe du déclarant Modalité de comptage Nombre d’enfants 0 1 2 3 4 5 + total Homme Comptage dans l’EAR 1 421 556 139 41 10 2 167 Comptage dans l’EFL des enfants présents la moitié du temps ou plus 679 1 012 303 101 31 11 2 137 Variation de l’effectif (%) –28,8 –45,5 – 27,3 –24,4 +10,0 Femme Comptage dans l’EAR 10 936 5 407 1 631 395 149 18 518 Comptage dans l’EFL des enfants présents la moitié du temps ou plus 3 258 9 181 4 183 1 313 346 131 18 412 Variation de l’effectif (%) –16,0 –22,6 –19,5 –12,4 – 12,1 Ensemble Comptage dans l’EAR 12 357 5 963 1 770 436 159 20 685 Comptage dans l’EFL des enfants présents la moitié du temps ou plus 3 937 10 193 4 486 1 414 377 142 20 549 Variation de l’effectif (%) –17,5 –24,8 –20,1 –13,5 –10,7

Comptage comparé des enfants des ménages monoparentaux, enquête annuelle de recensement EAR et enquête Famille et logements EFL

Note : 136 valeurs manquantes sur le temps de présence d’au moins un des enfants dans l’enquête Famille et logements expliquent la différence d’effectif entre les deux enquêtes. Il est à noter que lorsque l’enquêté n’avait pas rempli le temps de présence de l’enfant, le processus d’apurement a imputé comme temps de présence « tout le temps ».

54Contrairement au recensement, l’EFL permet de connaître avec précision le nombre d’enfants du répondant et leurs caractéristiques résidentielles. La durée de résidence dans le logement est précisée selon 3 modalités : « Tout le temps », « La moitié du temps ou plus », « Moins de la moitié du temps ». À supposer que les instructions de remplissage du recensement comme de l’EFL [21] soient bien suivies, les enfants déclarés dans le recensement et ayant rempli un bulletin individuel devraient correspondre à ceux des deux premières catégories de l’EFL (« Tout le temps », « La moitié du temps ou plus »).

55Afin de mener la comparaison entre les deux sources, le tableau 4 détaille la situation des individus repérés comme « adulte d’une famille monoparentale » par le recensement, selon le nombre des enfants avec qui la personne a déclaré corésider dans le ménage « Tout le temps », « La moitié du temps ou plus » dans l’EFL.

56Le premier constat est que 19,2 % des personnes classées en « adulte d’une famille monoparentale » par le recensement vivent moins de la moitié du temps avec leur(s) enfant(s) : 32 % des hommes en position de père d’une famille monoparentale (variable MOCO) n’ont, d’après leur propre déclaration dans l’EFL, aucun enfant qui passe la moitié du temps ou plus dans leur logement (18 % des femmes). Ces enfants sont donc soit potentiellement (et légitimement) également déclarés dans le recensement comme membres d’un autre ménage, celui de leur autre parent et donc comptés deux fois au niveau national, soit confondus avec un autre individu du ménage au recensement.

57De plus, la confrontation des deux sources de données nous amène à constater un décalage important du point de vue de la comptabilité des enfants au sein des ménages monoparentaux (tableau 4). On remarque que, quel que soit le nombre d’enfants déclaré dans l’enquête annuelle de recensement, l’EFL en compte presque systématiquement moins. Par exemple, les ménages monoparentaux dont le parent est un père de deux enfants d’après le recensement sont 45,5 % moins nombreux dans l’enquête Famille et logements. De la même manière, chez les femmes à la tête d’un ménage mono-parental de deux enfants d’après le recensement, on constate une proportion de 22,6 % inférieure dans l’enquête Famille et logements.

58Notre hypothèse est donc que ces écarts résultent d’une déclaration erronée sur la feuille de logement du recensement. Le mode de collecte du recensement et de l’enquête Famille et logements par dépôt-retrait nécessite en effet d’utiliser des bulletins simples à remplir et les différentes règles de remplissage des listes de la feuille de logement sont complexes. De plus s’ajoute à notre sens un facteur important : la volonté pour les parents d’inscrire leurs enfants, y compris s’ils ne vivent pas avec de façon continue. L’expérience d’enquêtes menées en face-à-face et des tests effectués pour l’enquête Famille et logements[22] montrent de fait l’importance pour les répondants, particulièrement dans des situations moins fréquentes, de pouvoir les décrire de façon satisfaisante (Lelièvre et Trabut, 2013). Pour un parent qui reçoit ses enfants de façon alternée, qui en a tenu compte dans ses choix résidentiels après la séparation et aménagé en conséquence son espace intérieur, devoir « ne les inscrire qu’en bas de page » (liste C2) ou éventuellement pas du tout, peut contribuer à expliquer ce surcroît de déclarations identifiées en particulier chez les hommes.

Conclusion

59Le recensement, tel qu’il est construit, joue pleinement son rôle en comptabilisant le nombre d’individus résidant sur le territoire français à travers l’unité ménage. Le mécanisme d’énumération à l’œuvre dans le recensement s’appuie toutefois sur une analyse en termes de types de famille. Ce sont justement ces types familiaux, définis à travers la variable mode de cohabitation (MOCO), et leur construction que nous avons étudiés ici. Si l’objectif initial du recensement n’est pas la description des familles, comme c’est le cas de l’EFL, ces données servent d’appui à un grand nombre d’analyses de la famille en France. Le point de vue que nous avons choisi dans cet article est donc d’examiner les catégories produites non pas dans leur pertinence relative au comptage, mais dans leur capacité à capter un certain nombre d’évolutions contemporaines. L’EFL associée au recensement permet de préciser les typologies établies à partir des données du recensement et de valider la composition des catégories de familles produites. Cette confrontation nous mène à évaluer les raisons des divergences entre les deux sources.

60Dans les situations où le ménage-logement du recensement est composé uniquement d’une famille au sens de l’EFL, l’algorithme de codage de la variable MOCO s’avère satisfaisant. Les quatre situations familiales [23] décrites par le recensement et l’EFL sont concordantes.

61Dans les ménages qui comportent des personnes extérieures à la famille, le codage automatique des liens principalement basé sur l’information des BI parvient difficilement à décrire la structure familiale de ces ménages moins courants où résident plusieurs familles, plusieurs générations, des personnes sans liens familiaux ou qui corésident avec une famille. Un problème majeur concerne le codage de la filiation, la codification semi-automatique créant ou ignorant le lien parent-enfant, et ceci particulièrement lorsque les personnes en position d’enfants ont plus de 18 ans.

62La description faite sur la feuille Logement des seuls liens de parenté avec la personne de référence et les règles afférentes au remplissage des différentes listes sont peu adaptées pour décrire la famille dans le ménage. De plus, cette déclaration recueillie en clair peut être ambiguë (usage de termes polysémiques tels que beau-père ou ami). Nous avons mis en évidence qu’une partie des divergences concernant le lien parent-enfant résulte également de la complexité des règles de remplissage des différentes listes de la feuille de logement. Ceci est particulièrement en cause concernant les parents dont les enfants résident en partie ailleurs et entraîne des divergences non négligeables concernant le dénombrement des familles monoparentales ou recomposées conduit à des doubles-comptes ou des omissions d’enfants et à une surévaluation des personnes vivant hors famille.

63Pour les ménages comprenant des individus qui ont deux statuts (enfant de, parent de, conjoint de), les catégories produites font apparaître des faiblesses liées à la simplification qu’imposent les outils utilisés par le recensement pour décrire la structure familiale de ces ménages-logement. L’unicité du lien (indispensable pour assurer une énumération valide de la population) ne permet pas d’identifier convenablement les situations de ménages où corésident plusieurs familles (situations multigénérationnelles) plaçant certains individus dans une position familiale unique, alors qu’ils sont en situation de pivot intergénérationnel.

64Face à ce constat, deux pistes d’amélioration des descriptions de structures familiales se présentent : une modification de la collecte des liens entre les membres du ménage sur la feuille de logement du recensement, et une collecte régulière des enquêtes Famille associées au recensement. Cela nous paraît en effet important dans la mesure où les « chiffres du recensement », y compris sur les types de familles, sont abondamment repris dans le débat public. L’isolement, les familles monoparentales ou les enfants en résidence alternée sont autant d’exemples nécessitant une analyse plus fine que fournit justement l’enquête Famille et logements.

65Au vu des résultats présentés ici, on ne peut que plaider pour une modification du recensement prenant en compte les liens des individus non plus au sein du ménage-logement mais au-delà du logement, et non plus uniquement en rapport avec un individu de référence, mais bien entre l’ensemble des membres du ménage comme le proposent de nombreux recensements (britannique, portugais, etc.) [24]. La collecte numérique du recensement, pas encore testée en France mais déjà expérimentée avec un certain succès en Angleterre, au Canada, etc. sera l’occasion d’une refonte permettant d’envisager ces changements. Le recensement évoluera ainsi d’un bon outil de comptage à un véritable outil démographique permettant de décrire les structures familiales au sein du ménage de manière systématique et rigoureuse.

Annexe

Recensement de la population - Feuille de logement

tableau im8

Notes

  • [*]
    Institut national d’études démographiques, Paris.
  • [**]
    Équipe ANR-LiLi (ANR-10-ESYS-004) : Laurent Toulemon, Wilfried Rault, Magali Mazuy, Catherine Bonvalet, Célio Sierra-Paycha, Julie Chapon, Elisa Abassi, Christophe Imbert et le partenaire Migrinter.
    Correspondance : Loïc Trabut, Institut national d’études démographiques, 133 boulevard Davout, 75980 Paris Cedex 20, courriel : loic.trabut@ined.fr
  • [1]
  • [2]
  • [3]
    Une famille est la partie d’un ménage comprenant au moins deux personnes et constituée :
    • soit d’un couple vivant au sein du ménage, avec le cas échéant son ou ses enfant(s) appartenant au même ménage ;
    • soit d’un adulte avec son ou ses enfant(s) appartenant au même ménage (famille monoparentale).
      Pour qu’une personne soit enfant d’une famille, elle doit être célibataire et ne pas avoir de conjoint ou d’enfant faisant partie du même ménage. Un ménage peut comprendre zéro, une ou plusieurs familles. Un « ménage complexe », au sens du recensement, est un ménage composé de deux familles, de plusieurs personnes isolées qui ne constituent pas une famille, ou de personnes isolées et de famille(s) (http://www.insee.fr/fr/methodes/)
  • [4]
    La description des configurations familiales est enrichie par la possibilité de tenir compte des personnes n’ayant pas leur résidence principale dans le logement (Breuil et al., 2015).
  • [5]
    Pour aller plus loin sur cette notion voir Régnier-Loilier et al. (2009).
  • [6]
    Dans ces situations nous ne possédons pas de données dans l’enquête Famille et logements. La comparaison n’est donc pas possible.
  • [7]
    Dans ce comptage n’interviennent ni le sexe, ni l’âge des personnes listées dans le logement.
  • [8]
    L’ensemble des comparaisons sont faites ici sur des données brutes non pondérées et non imputées afin de travailler sur l’ensemble des réponses d’un même individu aux deux bulletins (EAR/EFL) remis à l’agent recenseur ensemble. On considère comme enfants de l’enquêté l’ensemble des déclarations faites dans l’EFL, indépendamment de l’appariement avec un bulletin individuel de l’EAR.
  • [9]
    http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2009:329:0029:0068:FR:PDF
  • [10]
    L1 (encadré) n’est renseignée que pour 22 423 individus de l’échantillon de travail.
  • [11]
    Pour connaître les définitions d’adulte, enfant et couple lors de ce premier traitement, voir la documentation Insee : http://www.insee.fr/fr/bases-de-donnees/default.asp?page=recensement/resultats/doc/traitement_donnees_rp.htm
  • [12]
    Une personne cesse d’être un enfant au sens du recensement dès lors qu’elle est elle-même en position (potentielle) de parent.
  • [13]
    Proportion observée dans l’échantillon du recensement associé à l’EFL.
  • [14]
    Le recensement ne conservant qu’une seule position familiale, ce sont donc les cas où des divergences entre les deux enquêtes vont se produire.
  • [15]
    Pour les ménages où le recensement dénombre plus d’individus que l’enquête EFL et où l’enquêté EFL n’est pas en position d’enfant, on comparera les types de famille de 7,07 % au lieu de 10,68 % (tableau 1).
  • [16]
    Un enfant présent dans le recensement (avec BI donc en liste A) et absent dans l’EFL pour le répondant conduirait au même résultat. Néanmoins, ce type de situation reste singulier car, contrairement au recensement, l’ensemble des enfants du répondant EFL, quels que soient leur âge et leur taux de présence dans le logement, sont sollicités, alors que le recensement effectue des sélections basées sur l’âge, l’activité (étudiant ou non) et la résidence des membres du ménage pour l’établissement de la liste des occupants du ménage.
  • [17]
    Le fait de ne pas tenir compte des couples de même sexe dans l’analyse ménage-famille du recensement et le fait de ne pas considérer comme « enfant » des personnes vivant en couple ou avec leurs propres enfants relèvent de la même catégorie de différence : une différence de concept.
  • [18]
    Les liens à la personne de référence sont inscrits « en clair » sur le bulletin, un logiciel de reconnaissance optique « lit » les mentions et les code automatiquement.
  • [19]
    D’après les instructions du recensement, « Les enfants à la garde d’un autre parent ou qui doivent être inscrits en liste C2 de la feuille Logement ne remplissent pas de bulletin individuel ».
  • [20]
    Moyennant que le répondant ait bien lu la notice qui accompagne les bulletins à remplir.
  • [21]
    Ici on utilise les données brutes et 136 valeurs manquantes subsistent.
  • [22]
  • [23]
    Couples avec ou sans enfant(s), famille monoparentale, adultes isolés.
  • [24]
    Voir les travaux du Groupe de travail du CNIS « Évolution du questionnaire du recensement de la population », http://www.cnis.fr/cms/site/Cnis/lang/fr/Accueil/activites/Organisation/ Groupes_de_travail/Anciens_groupes_de_travail/GT_evolution_questionnaire_recensement
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Tirant parti et confrontant l’ensemble des informations sur les liens familiaux présentes dans l’enquête Famille et logements et dans le recensement, l’objectif de cet article est d’examiner les types de familles décrites par chacune des deux sources. Cette comparaison fait apparaître des discordances et permet de décrire la composition des catégories de familles produites à partir du recensement. Si le recensement, tel qu’il est construit, joue pleinement son rôle en comptabilisant le nombre d’individus résidant sur le territoire français à travers l’unité ménage, il s’avère de moins bonne qualité lorsqu’il s’agit de décrire les familles, en particulier lorsque corésident plusieurs familles, plusieurs générations, des personnes sans liens familiaux ou qui alternent leur résidence entre plusieurs ménages. Cette confrontation permet d’évaluer les causes des divergences entre les deux sources. Celles-ci résultent des objectifs différents des deux collectes, des principes de codification du recensement basés sur le concept de famille nucléaire et des déclarations erronées ; ce qui n’appelle pas les mêmes types d’intervention. Malgré l’exhaustivité du dénombrement par le recensement, les recommandations internationales ne permettent pas de décrire de façon satisfaisante les formes marginales et/ou émergentes de famille, justifiant la reprise des enquêtes Famille associées au recensement.

Mots-clés

  • structure familiale
  • ménage
  • enquête famille et logements
  • enquête annuelle de recensement
  • France

Références

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Loïc Trabut [*]
  • [*]
    Institut national d’études démographiques, Paris.
Éva Lelièvre [*]
  • [*]
    Institut national d’études démographiques, Paris.
Estelle Bailly [*]
  • [*]
    Institut national d’études démographiques, Paris.
L’équipe Lili [**]
  • [**]
    Équipe ANR-LiLi (ANR-10-ESYS-004) : Laurent Toulemon, Wilfried Rault, Magali Mazuy, Catherine Bonvalet, Célio Sierra-Paycha, Julie Chapon, Elisa Abassi, Christophe Imbert et le partenaire Migrinter.
    Correspondance : Loïc Trabut, Institut national d’études démographiques, 133 boulevard Davout, 75980 Paris Cedex 20, courriel : loic.trabut@ined.fr
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Mis en ligne sur Cairn.info le 20/01/2016
https://doi.org/10.3917/popu.1503.0637
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