CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Le 17 décembre 2004, le président George W. Bush promulguait l’Intelligence Reform and Terrorism Prevention Act (IRTPA), la loi de réforme de l’appareil de renseignement la plus ambitieuse depuis plus d’un demi-siècle [1]. Son objectif était de renforcer la coordination des agences de renseignement mise en défaut le 11 septembre 2001. Les travaux d’enquête initiés au lendemain des attentats avaient en effet insisté sur la problématique du cloisonnement de la communauté du renseignement (CR). Pour la Commission du 11-Septembre, la CR s’apparentait à une « confédération informelle d’agences » qui se seraient “accumulées d’une manière qui défie l’entendement” » [2].

2Afin de pallier ce manque de cohésion, l’IRTPA augmenta le degré de centralisation de la CR en créant le poste de directeur du renseignement national (Director of National Intelligence, DNI). Doté de pouvoirs de gestion renforcés, le DNI devait être en mesure d’exercer son autorité sur l’ensemble de l’appareil de renseignement et ainsi permettre une rationalisation de son fonctionnement. Toutefois, cette réorganisation suscita rapidement un scepticisme proportionnel à son ambition. En 2007, Amy Zegart dressait un bilan sans équivoque : « Au lieu de renforcer la coordination et la centralisation, la loi de 2004 a déclenché une course à l’influence qui a rendu le secrétaire à la Défense plus puissant, le directeur du renseignement national moins puissant et la communauté du renseignement encore plus désunie » » [3]. Depuis, des revers comme la tentative d’attentat du 25 décembre 2009 contre le vol Amsterdam-Détroit ont entretenu les doutes sur l’intégration du renseignement américain [4].

3L’objectif de cet article est de dresser un bilan de la réforme de 2004 et de ses limites. Cela implique d’abord de revenir sur les origines des problèmes que l’IRTPA devait résoudre. Ensuite, il conviendra de présenter les conditions dans lesquelles cette loi a été bâtie ainsi que la façon dont elle a été appliquée. Enfin, il est nécessaire d’examiner les conséquences de cet échec qui, par un effet pervers, entravent le processus de décloisonnement de la CR.

Un problème récurrent

De Pearl Harbor …

4Le problème du cloisonnement de l’appareil de renseignement est antérieur aux attentats de 2001. Soixante ans plus tôt, l’attaque de l’aviation japonaise contre la base américaine de Pearl Harbor avait déjà mis en lumière les mêmes carences structurelles. Comme à l’occasion du 11-Septembre, les différentes commissions créées pour enquêter sur cet acte de guerre dénoncèrent le manque de coordination entre les différents acteurs. Elles appelèrent à une « intégration complète des agences de renseignement de l’Armée et de la Marine » » [5]. Dans un ouvrage de référence publié en 1962, l’universitaire Roberta Wohlstetter corrobora ce constat. Illustrant la problématique du cloisonnement, elle note qu’« aucune personne ou agence n’a pu disposer, à aucun moment donné, de l’ensemble des signaux disponibles dans ce vaste réseau d’information » » [6].

5C’est de ces enseignements et de l’expérience de la Seconde Guerre mondiale qu’émergea la communauté du renseignement moderne, bâtie progressivement à partir de 1945. Afin de coordonner les activités des différentes agences, le président Harry S. Truman créa en janvier 1946 le poste de directeur du renseignement central (Director of Central Intelligence, DCI). L’instauration de cette fonction de coordinateur ouvrit la voie, quelques mois plus tard, à la création d’une agence de renseignement indépendante, la CIA (Central Intelligence Agency[7]. L’attelage DCI-CIA devait guider l’ensemble des acteurs du renseignement, civils et militaires, et leur permettre de fonctionner de façon intégrée sur les sujets relevant de la sécurité nationale. Or, un aperçu des quatorze études officielles consacrées au renseignement entre 1947 et 2004 fait apparaître le caractère récurrent des dysfonctionnements observés à Pearl Harbor [8].

6Ces travaux mettent en lumière, dès 1948, les relations difficiles entre une CIA jugée trop faible et des agences départementales mues par la défense de leurs prérogatives. Par manque d’autorité, le DCI ne parvenait pas à remplir sa mission visant à « rapprocher » les différents acteurs du renseignement pour atteindre le « niveau d’efficacité exigé [9] ». En conséquence, il fut suggéré au DCI de déléguer sa tâche de directeur de la CIA à un adjoint pour se concentrer sur la supervision de l’ensemble de la CR [10]. En 1971, un rapport commandité par l’administration Nixon fit un constat similaire. Il recommanda de renforcer la centralisation par la création d’un véritable poste de directeur du renseignement qui aurait autorité sur le budget et les effectifs de l’ensemble des agences [11]. Les remises en question intervenues dans les années 1970, suite aux révélations de plusieurs scandales, ne modifièrent pas la perception des carences de la CR et notamment de sa direction. En 1976, la commission dirigée par le sénateur Frank Church fit des propositions dans la continuité des précédentes études. Le DCI devrait se focaliser sur les affaires relevant de la communauté et laisser la gestion quotidienne de la CIA à un adjoint [12]. Vingt ans plus tard, la Commission Aspin-Brown, du nom de ses deux présidents successifs, les anciens secrétaires à la Défense Les Aspin et Harold Brown, appela à accroître les pouvoirs du DCI, y compris dans le domaine budgétaire. L’objectif était de lui permettre d’exercer une plus grande influence sur les agences de la CR, plus particulièrement celles dépendant du Département de la Défense [13].

… au 11 Septembre

7Identifiés de façon récurrente pendant plus de cinquante ans, ces dysfonctionnements se manifestèrent de façon spectaculaire le 11 septembre 2001. Les attentats mirent en évidence le faible niveau de coordination des activités des différentes agences. Pointant des « défaillances systémiques », la Commission d’enquête parlementaire mixte nota que les membres de la CR « se comportent trop souvent et à différents niveaux comme une collection d’entités informelle [14] ». La Commission du 11-Septembre mit en cause le « fonctionnement opaque » de l’appareil de renseignement. Elle déplora également la place de moins en moins centrale de la CIA dont l’accès aux productions des autres agences avait été restreint. Elle imputa cette absence de gestion cohérente au manque d’autorité du DCI et à la multiplicité de ses fonctions. Elle souligna l’impossibilité pour le DCI de remplir de façon efficace son triple mandat (diriger la CIA, superviser la CR et conseiller le président dans le domaine du renseignement). Les auteurs du rapport observèrent que la gestion de la communauté avait beaucoup pâti de cette surcharge de responsabilités. En conséquence, ils proposèrent de scinder les attributions du DCI en créant un poste de directeur du renseignement indépendant de celui de patron de la CIA [15].

Une réforme édulcorée

Un vaste débat

8La publication du rapport de la Commission du 11-Septembre à l’été 2004 alimenta le débat parlementaire sur la réorganisation du renseignement. Ses recommandations guidèrent les discussions même si des changements radicaux furent proposés. Le sénateur républicain Pat Roberts, qui présidait la Commission du Renseignement, présenta un texte particulièrement ambitieux. À l’instar de la Commission du 11-Septembre, il prévoyait la création d’un poste de directeur du renseignement. L’aspect le plus audacieux de la réforme concernait l’organisation de la communauté. Le sénateur envisageait une refonte totale de la CR, organisée autour de quatre branches. La première serait en charge des activités de collecte, la deuxième de l’analyse, la troisième de la recherche et développement et la quatrième du soutien militaire. Une des conséquences de cette restructuration serait le démantèlement de la CIA. Une autre serait, pour le Département de la Défense, la perte de contrôle des agences de renseignement technique comme la NSA (National Security Agency) qui passeraient sous l’autorité du directeur du renseignement [16]. Ce texte suscita de vives critiques, notamment de la part d’anciens hauts responsables de la CR.

9Le sénateur républicain Arlen Specter présenta également une proposition de loi aux implications drastiques. Elle prévoyait la création d’un Département du Renseignement (Department of Intelligence) rassemblant la CIA, la NSA et d’autres agences techniques du Département de la Défense ainsi que les composantes de renseignement du FBI. Il serait dirigé par un directeur du renseignement, nommé pour un mandat de dix ans, qui aurait autorité sur le budget, les personnels et les composantes de son département [17]. Trop éloignés du cadre tracé par la Commission du 11-Septembre, les textes des sénateurs Roberts et Specter furent rapidement abandonnés. En pleine campagne présidentielle, la logique d’une réforme rapide s’imposa au Capitole. L’administration Bush et les professionnels du renseignement soutinrent cette démarche qui permettait d’écarter les initiatives les plus ambitieuses. C’est la position que défendit, au Congrès, le Secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld. Il expliqua que des progrès considérables avaient été constatés depuis 2001. Les budgets, personnels et activités de la CIA et du Pentagone étaient désormais « étroitement imbriqués ». Rumsfeld insista également sur l’inopportunité d’entreprendre des transformations de grande ampleur alors que les États-Unis étaient engagés militairement en Afghanistan et en Irak [18].

Un compromis a minima

10À l’automne 2004, un consensus émergea au Congrès autour d’une mesure emblématique, la création du poste de directeur du renseignement. Il était en effet communément admis que le DCI ne pouvait assumer de front ses missions de patron de la CIA, de conseiller présidentiel et de coordinateur de la CR. En revanche, l’autorité de cette nouvelle fonction et sa position au sein de l’administration furent l’objet de discussions entre les parlementaires. Deux propositions de loi furent présentées au Capitole en octobre 2004, une au Sénat et l’autre à la Chambre des représentants. La première accordait au remplaçant du DCI – le DNI (Director of National Intelligence) – des pouvoirs plus importants que la seconde, notamment en termes de gestion budgétaire. D’après le projet sénatorial, le DNI devait « déterminer » le budget annuel du renseignement puis « gérer et superviser » son exécution. Pour la Chambre, il devait « développer et présenter » le budget avant de « s’assurer » qu’il soit correctement appliqué. S’agissant des ressources humaines de la CR, les sénateurs offraient également une plus grande marge de manœuvre au DNI. En revanche, les parlementaires s’accordèrent pour limiter l’autorité du DNI sur les agences dépendant du Pentagone [19].

11L’opposition de ces deux visions aboutit à un compromis reflétant une approche prudente de la réforme [20]. La mesure principale de l’Intelligence Reform and Terrorism Prevention Act (IRTPA) fut la création de la fonction de DNI en remplacement du DCI. La loi le charge de définir les objectifs et les priorités de la CR afin que l’ensemble des activités de renseignement soit exécuté de manière cohérente et dans des délais adaptés. Le DNI a par ailleurs la charge de conseiller le président et le Conseil de sécurité nationale (National Security Council, NSC) sur les questions de renseignement. À ce titre, il présente le briefing présidentiel quotidien portant sur les principaux développements en rapport avec la sécurité nationale ou assiste à la présentation de celui-ci. Afin de remplir sa mission de chef d’orchestre, le DNI est doté de pouvoirs de gestion, notamment celui de superviser l’élaboration du budget du renseignement. Il ne dispose cependant que d’une autorité consultative concernant le budget des agences du Département de la Défense, qui représente environ 80 % des fonds gouvernementaux alloués au renseignement. Dans le domaine des ressources humaines, l’IRTPA associe le DNI à la désignation des directeurs d’agences et lui permet de procéder au transfert de personnels au sein de la CR. Il est également autorisé à créer des structures ad hoc chargées de fournir des analyses sur des thématiques spécifiques, comme par exemple le terrorisme ou la prolifération.

12Si elle offrait une réponse rapide, produit d’un consensus politique, aux dysfonctionnements identifiés par la Commission du 11-Septembre, cette réforme suscita un enthousiasme très mesuré. Ainsi, le sénateur Susan Collins, une des architectes de l’IRTPA, admit que la loi était le « reflet de compromis qui devront être ajustés [21] ». La principale critique formulée à l’égard de la législation concernait le caractère vague du périmètre d’action et des attributions du DNI. Ce flou pouvait néanmoins se révéler un atout pour le titulaire du poste car il lui laissait la possibilité de délimiter son autorité. Malgré cette marge de manœuvre, les professionnels du renseignement ne se précipitèrent pas pour étrenner le poste de DNI. L’ancien directeur de la CIA Robert Gates déclina l’offre présidentielle. Lors du débat parlementaire, il avait exprimé des réserves à propos de la loi, craignant qu’elle n’octroie pas au DNI l’autorité nécessaire pour s’affirmer face à la CIA ou au Département de la Défense [22]. Le président Bush opta alors pour un diplomate de carrière, John Negroponte, qui entra en fonction en avril 2005.

Une mise en œuvre difficile

Des obstacles institutionnels

13Les inquiétudes formulées par Robert Gates se vérifièrent car le DNI éprouva les plus grandes difficultés à s’imposer à la tête de la CR. Il se heurta en effet immédiatement au secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld qui ne lui reconnut aucune autorité sur les agences du Pentagone. Rumsfeld avait en effet créé le poste de sous-secrétaire à la Défense pour le renseignement pour assurer la direction des agences du département « en consultation avec le DNI ». Il avait également édicté une directive empêchant tout transfert de personnels du département sans l’accord de son adjoint qui devenait ainsi, contrairement à l’esprit de la loi, l’interlocuteur privilégié du DNI [23]. Ce sujet était particulièrement important pour Rumsfeld qui, dès 2001, avait entrepris de développer les capacités de renseignement de son département afin de réduire sa dépendance vis-à-vis d’une CIA qui ne lui inspirait guère confiance. Le DNI eut moins de difficulté dans ses relations avec la CIA en raison de l’affaiblissement de cette dernière suite au 11-Septembre et du soutien apporté par la Maison-Blanche. Toutefois, la décision de John Negroponte de quitter sa fonction en février 2007 pour s’occuper du dossier irakien au Département d’État, au plus fort des violences interconfessionnelles, en disait long sur l’expérience qui avait été la sienne en tant que DNI.

14Son successeur, l’amiral Mike McConnell, bénéficia d’un environnement plus favorable. Donald Rumsfeld avait cédé sa place au Pentagone à Robert Gates. Si ce dernier s’était montré critique envers la réforme, il s’était publiquement inquiété de la « domination du Département de la Défense dans le domaine du renseignement » » [24]. En outre, la direction de la CIA était assurée depuis mai 2006 par le général Michael Hayden, qui avait été l’adjoint de Negroponte à la tête de la CR. Les bonnes relations personnelles entre ces trois responsables et leur vision convergente des enjeux du renseignement permirent de pallier les défauts de la loi. Comme l’a souligné Robert Gates, les rapports qu’il entretenait, de longue date, avec McConnell et Hayden purent « altérer une hostilité bureaucratique autrement irréductible » » [25]. En creux, cette situation démontrait les profondes carences de la fonction de DNI. Ce dernier ne pouvait jouer son rôle de directeur de la communauté du renseignement qu’avec l’assentiment du Pentagone et de la CIA, doublé d’un soutien appuyé de la Maison-Blanche.

Marginalisation du DNI sous Obama

15La présidence de Barack Obama confirma cette spécificité. En janvier 2009, Obama nomma l’amiral Dennis Blair au poste de DNI et désigna Leon Panetta pour prendre la tête de la CIA. Pour occuper ces deux fonctions, la Maison-Blanche avait sélectionné des profils très différents. En tant qu’ancien chef du Commandement pacifique (Pacific Command, PACOM), l’amiral Blair disposait d’une solide expérience dans le domaine du renseignement. Ce n’était pas le cas de l’ancien parlementaire et secrétaire général de la Maison-Blanche qu’était Panetta [26]. En revanche, ce dernier n’était pas un étranger pour la nouvelle administration. Mentor du futur secrétaire général de la Maison-Blanche Rahm Emanuel, il avait également apporté son soutien à Obama dès la primaire démocrate. À l’inverse, l’amiral Blair ne jouissait pas de liens particuliers avec le président ou ses conseillers. Cette distinction se révéla déterminante. La relation entre le directeur de la CIA et le premier cercle d’Obama offrit à l’Agence l’accès à la Maison-Blanche dont la réforme de 2004 l’avait privée. Elle permit également à Leon Panetta de résister à l’autorité du DNI, qui était pourtant son supérieur hiérarchique.

16Peu après sa prise de fonction, l’amiral Blair entreprit de désigner, comme la loi le lui permettait, les représentants de la CR dans les différentes ambassades américaines. S’affranchissant d’une tradition qui attribuait ces postes à des employés de la CIA, le DNI choisit, dans quelques cas, des membres d’autres agences comme la NSA. Panetta s’y opposa immédiatement, au motif que la CIA était responsable des activités de renseignement extérieur du gouvernement américain. Le patron de la CIA parvint à convaincre la Maison-Blanche de trancher en sa faveur [27]. Parallèlement, l’amiral Blair se heurta à l’influence du conseiller présidentiel en charge du contre-terrorisme, John Brennan. Initialement pressenti pour prendre la tête de la CIA, ce dernier joua un rôle clé dans le processus d’élaboration de la politique de sécurité nationale du président Obama. Illustrant la confiance présidentielle, Brennan fit office de porte-parole de l’administration pour défendre la communauté du renseignement contre les attaques de certains membres du Parti républicain à la suite de la tentative d’attentat visant le vol Amsterdam-Détroit le 25 décembre 2009. De plus, il fut chargé par le président de conduire une étude sur la performance des agences de renseignement lors de cet incident. Le DNI contesta les conclusions de ce travail qui identifiait des responsabilités individuelles. Blair estimait que les problèmes mis en lumière par cette attaque manquée étaient d’ordre systémique et non pas personnel. Il demanda à Brennan de revoir sa copie, menaçant de faire état de leurs divergences publiquement. Les deux hommes parvinrent à un compromis mais cet épisode accentua la marginalisation de l’amiral Blair. Il fut contraint de démissionner quelques semaines plus tard [28].

17Les difficultés rencontrées par l’amiral Blair reflètent le fonctionnement singulier de l’administration Obama, caractérisé par une centralisation extrême des outils décisionnels à la Maison-Blanche. Plus qu’aucune autre depuis la présidence de Richard Nixon, la garde rapprochée d’Obama s’est illustrée par sa volonté de contourner la bureaucratie traditionnelle. Le président et ses conseillers privilégient en effet un accès direct, sans intermédiaire, aux exécutants de leur politique. Cela explique le retour en grâce de la CIA sous le mandat de Leon Panetta. À l’inverse, l’ostracisme dont a été frappé l’amiral Blair constitue une preuve supplémentaire de la faiblesse intrinsèque de la fonction de DNI.

De nouveaux défis

Une croissance incontrôlée

18Parallèlement aux difficultés institutionnelles du DNI, la CR a connu des transformations majeures qui ne facilitent pas son intégration. La plus marquante est sans conteste la croissance incontrôlée de la bureaucratie. D’après une enquête de deux journalistes du Washington Post, le budget alloué au renseignement aurait augmenté de 250 % entre 2001 et 2010. Cependant, cette hausse n’est pas le reflet d’une initiative concertée servant une stratégie globale mais de politiques propres à chaque agence [29]. L’ampleur de cette évolution a été corroborée en 2013 par les informations divulguées par l’ancien employé de la CIA et collaborateur de la NSA, Edward Snowden. Selon ces révélations, Washington aurait dépensé 500 milliards de dollars pour ses activités de renseignement depuis 2001. La CR compterait plus de 107 000 employés pour un budget de 52,6 milliards de dollars en 2013. La CIA serait la composante la mieux dotée avec 14,7 milliards de dollars, soit 28 % du total. La NSA arriverait en deuxième position avec des crédits de 10,5 milliards de dollars [30].

19La croissance d’organisations comme la CIA ou la NSA apparaît comme un obstacle majeur à une gestion coordonnée et cohérente de la communauté du renseignement. En effet, d’une part cette évolution représente un défi interne à chacune de ces agences. L’amplification accélérée des capacités de collecte d’une agence comme la NSA a en effet généré des difficultés considérables dans le domaine de l’exploitation des données, nécessitant un recours accru à des prestataires extérieurs. D’autre part, le poids acquis par ces structures s’est accompagné d’une augmentation de leur influence, ce qui entrave le développement d’une « culture communautaire ». Ainsi, en dépit des recommandations de la Commission du 11-Septembre, la NSA reste critiquée pour sa réticence à partager ses données avec les autres membres de la CR. Les révélations de Snowden ont notamment offert l’opportunité à certains responsables de mettre en cause l’attitude de la NSA vis-à-vis d’agences moins en vue et le manque de soutien du DNI [31].

Rapprochement entre la CIA et le Pentagone

20L’évolution des rôles de la CIA et du Pentagone reflète une autre mutation significative de la CR. À l’initiative de Donald Rumsfeld, le Département de la Défense a considérablement accru ses capacités de renseignement depuis 2001. L’objectif était de permettre aux forces armées d’opérer de manière autonome, sans dépendre des informations de la CIA. Dans cette optique, Rumsfeld développa, parallèlement, les moyens de son département dans le domaine des opérations clandestines, sous l’égide du Joint Special Operations Command (JSOC). En 2004, il édicta une directive autorisant les forces spéciales du JSOC à conduire des missions clandestines dans plus d’une dizaine de pays, de l’Afrique du Nord à l’Asie du Sud-Est [32]. Son remplacement par Robert Gates en décembre 2006 favorisa un rapprochement avec la CIA qui, depuis l’arrivée du général Hayden à sa tête, avait recouvré une certaine sérénité. Le développement d’une collaboration entre ces deux entités sur le théâtre irakien favorisa l’émergence d’une culture commune.

21C’est cependant sous la présidence de Barack Obama que cette coopération prit toute sa dimension. Les bonnes relations entre Robert Gates et le nouveau patron de la CIA Leon Panetta permirent de renforcer et de structurer cette collaboration, créant les conditions du succès de l’opération contre Oussama Ben Laden [33]. Parallèlement, le lien direct rétabli entre la Maison-Blanche et la CIA à partir de 2009 offrit à cette dernière l’opportunité de devenir un acteur clé de la politique de l’administration Obama dans le domaine du contre-terrorisme. En effet, les activités paramilitaires de la CIA, symbolisées par l’utilisation de drones armés, ont connu un essor sans précédent depuis l’élection du président démocrate. Selon les statistiques de la New America Foundation, l’administration de George W. Bush a mené 48 frappes de drones sur le territoire pakistanais entre 2004 et 2009. Lors du premier mandat du président Obama, 295 opérations de ce type ont été recensées au Pakistan [34]. Le recours à la CIA pour conduire de telles missions est privilégié car la législation américaine permet aux autorités de ne pas reconnaître les activités de l’Agence dans des pays avec lesquels les États-Unis ne sont pas en guerre. L’emploi des forces armées à l’étranger s’inscrit dans un cadre réglementaire plus contraignant.

22L’imbrication des opérations spéciales menées par les forces armées et des activités paramilitaires de la CIA est une des particularités de la politique de l’administration Obama en matière de contre-terrorisme. Le passage de Leon Panetta du poste de directeur de la CIA à celui de secrétaire à la Défense en juillet 2011 et son remplacement à Langley par le général David Petraeus témoignent d’une porosité croissante entre les activités des deux organisations [35]. Le recours accru à des opérations secrètes menées par des unités d’élite répond à la volonté présidentielle de limiter l’implication des États-Unis à l’étranger. En termes institutionnels, cette évolution s’est traduite par l’affirmation d’un duopole entre le Pentagone et la CIA. La relation établie entre ces deux composantes majeures de la CR pourrait accroître la marginalisation du reste des agences et du DNI. À terme, ceci pourrait affaiblir les capacités de renseignement des États-Unis. Car le changement de visage de la CIA s’est opéré de manière unilatérale, au détriment de sa mission première, la production de renseignement stratégique. Lors d’une de ses dernières apparitions publiques en tant que secrétaire à la Défense en 2011, Robert Gates s’était « inquiété » de « la qualité de notre renseignement aux niveaux politique et stratégique » » [36].

23Ces mises en garde n’ont pas permis d’éviter des déconvenues majeures comme l’attaque du consulat et d’une antenne de la CIA à Benghazi durant laquelle l’ambassadeur des États-Unis en Libye, J. Christopher Stevens, et trois de ses concitoyens trouvèrent la mort le 11 septembre 2012. Si la Commission du Renseignement du Sénat a reconnu que la CR avait signalé une dégradation de la situation sécuritaire dans l’Est du pays, elle note qu’aucun avertissement spécifique n’a été adressé à la mission diplomatique dans les jours précédant l’attaque. Elle a également souligné des dysfonctionnements en termes d’analyse du renseignement et, surtout, de coordination entre la CIA, le Département d’État et le Pentagone. Le rapport révèle notamment que les responsables militaires américains en Afrique ignoraient que la CIA disposait d’une antenne à Benghazi [37].

24L’offensive éclair lancée dans le Nord de l’Irak par le groupe terroriste État islamique (EI) durant l’été 2014 a confirmé la persistance de dysfonctionnements au sein de la CR. Le président Obama a publiquement reconnu les manquements de la CR, se référant aux propos du DNI James Clapper [38]. Quelques semaines plus tôt, Clapper avait en effet admis avoir « sous-estimé » l’EI et « surestimé les capacités de l’armée irakienne ». Réaffirmant ne pas avoir vu venir « l’effondrement des forces de sécurité irakiennes dans le Nord », il a cependant insisté sur le caractère « impondérable » et sur la difficulté de « prédire le désir de combattre » » [39]. En réalité, la percée de l’EI est significative car elle illustre les risques induits par l’évolution récente de la CR. Elle est en effet intervenue dans le berceau de la coopération entre la CIA et le Pentagone. L’imbrication des activités des deux organisations en Irak a ainsi considérablement amoindri les capacités de renseignement des États-Unis dans le pays après le retrait des militaires américains en décembre 2011. Privée de la présence des forces spéciales du JSOC, la CR a dû s’appuyer sur des moyens techniques insuffisants dans une telle configuration [40]. Ce déficit de renseignement a également ralenti la réponse militaire lancée par l’administration Obama en août 2014. À la fin du mois, un responsable de la CR évaluait à « plusieurs mois » le temps nécessaire à la constitution de capacités de renseignement adaptées à la campagne de frappes aériennes contre l’EI. Adam Schiff, représentant démocrate de Californie et membre de la Commission du Renseignement de la Chambre, dénonçait quant à lui le manque de « visibilité » de Washington à propos de la situation en Irak et en Syrie [41].

Conclusion

25Les dix années d’expérience de la fonction de DNI ont mis en évidence les carences du compromis hâtif de 2004. Robert Gates les résume dans ses mémoires en expliquant l’échec de l’amiral Blair par une mauvaise appréciation de son mandat. Blair « croyait qu’il était vraiment le chef de la communauté du renseignement » alors qu’en réalité « le DNI n’avait toujours pas de base légale ou de poids politique pour affirmer son autorité sur les autres composantes de la communauté du renseignement » » [42]. En l’absence de pouvoirs institutionnels, la capacité d’action du DNI est conditionnée par la bienveillance de la Maison-Blanche, du Département de la Défense et de la CIA. Autant dire que dans un environnement bureaucratique aussi concurrentiel que l’appareil de sécurité nationale des États-Unis son influence est quasi nulle.

26« Mon sentiment est que cela ne se résoudra pas en bon ordre et que nous devrons passer par les habituelles – deux, trois, voire plus – phases de réorganisation » » [43]. Si ces propos se rapportent au renseignement, ils n’émanent pas d’un conseiller de Barack Obama mais d’Harold Smith, le directeur du Bureau du Budget d’Harry Truman. Datant de la réforme initiée en 1945, ils rappellent que le processus de centralisation d’une bureaucratie comme la CR est, aux États-Unis, une entreprise nécessairement longue et ardue. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la réorganisation de l’appareil de renseignement comme l’unification des forces armées se sont opérées en plusieurs étapes. Dans les deux cas, la fonction de DCI et de secrétaire à la Défense a précédé la constitution de l’organisation sur laquelle devait s’exercer leur autorité administrative, la CIA et le Département de la Défense. Ce n’est qu’à ce moment-là que ces coordinateurs ont pu agir en directeurs. Dans un pays caractérisé par sa méfiance à l’égard d’une concentration des pouvoirs trop forte, une approche différente semble vouée à l’échec. La loi de décembre 2004 doit donc être perçue non pas comme une finalité mais comme un point de départ. Néanmoins, dans un environnement international particulièrement instable, l’immobilisme de la Maison-Blanche et du Congrès depuis dix ans s’apparente de plus en plus à une menace pour la sécurité nationale.

Notes

  • [*]
    Raphaël Ramos est doctorant en histoire à l’Université Paul-Valéry Montpellier III (CRISES, E.A. 4424) et allocataire du Ministère de la Défense. Sa thèse est consacrée à la formation de la communauté du renseignement américaine sous l’administration Truman. Il est l’auteur de De l’OSS à la CIA (Presses universitaires de la Méditerranée, 2006).
  • [1]
    Intelligence Reform and Terrorism Prevention Act of 2004, Public Law 108-458, 108th Congress, 17 décembre 2004.
  • [2]
    The 9/11 Commission Report, National Commission on Terrorist Attacks upon the United States, Washington D.C., U.S. Government Printing Office, juillet 2004, p. 409-410.
  • [3]
    Amy B. Zegart, Spying Blind : The CIA, the FBI, and the Origins of 9/11, Princeton, Princeton University Press, 2007, p. 183.
  • [4]
    La tentative d’attentat manquée du 25 décembre 2009, lors de laquelle un passager nigérian tenta de faire exploser le vol Amsterdam-Détroit, suscita des doutes sur l’efficacité de la réforme de 2004. Au Sénat, la Commission du Renseignement releva des « défaillances systémiques dans l’ensemble de la communauté du renseignement qui ont entravé la détection de la menace ». Voir Unclassified Executive Summary of the Committee Report on the Attempted Terrorist Attack on Northwest Airlines Flight 253, Senate Select Committee on Intelligence, 18 mai 2010, p. 1.
  • [5]
    Report of the Joint Committee on the Investigation of the Pearl Harbor Attack, 79th Congress, Washington D.C., U.S. Government Printing Office, juillet 1946, p. 253. Entre 1941 et 1946, huit commissions d’enquête ont été créées par différents organes du gouvernement américain pour étudier les causes de l’attaque de Pearl Harbor. Le travail de la Commission parlementaire cité ici, qui repose sur trente-neuf volumes d’auditions, est sans conteste le plus complet.
  • [6]
    Roberta Wohlstetter, Pearl Harbor : Warning and Decision, Stanford, Stanford University Press, 2006 (1962), p. 385.
  • [7]
    La CIA a été créée par la loi du 26 juillet 1947, le National Security Act. Sur cette période, voir notamment David F. Rudgers, Creating the Secret State : The Origins of the Central Intelligence Agency, 1943-1947, Lawrence, University Press of Kansas, 2000.
  • [8]
    Michael Warner, J. Kenneth McDonald, “US Intelligence Community Reform Studies Since 1947”, Washington D.C., Central Intelligence Agency, Center for the Study of Intelligence, avril 2005.
  • [9]
    Ibid., p. 7-10.
  • [10]
    Ibid., p. 17.
  • [11]
    Ibid., p. 22.
  • [12]
    Ibid., p. 29.
  • [13]
    Ibid., p. 34.
  • [14]
    Report of the U.S. Senate Select Committee on Intelligence and U.S. House Permanent Select Committee on Intelligence, Joint Inquiry into Intelligence Community Activities Before and After the Terrorist Attacks of September 11, 2001, 107th Congress, décembre 2002, p. xv, 78.
  • [15]
    The 9/11 Commission Report, op. cit., p. 409-411.
  • [16]
    La proposition de loi du sénateur Roberts, présentée en août 2004, s’intitulait « 9-11 National Security Protection Act », [En ligne : http://fas.org/irp/congress/2004_cr/roberts-911nspa.pdf]. Consulté le 16 août 2014.
  • [17]
    La proposition de loi du sénateur Specter, présentée en septembre 2004, s’intitulait « Intelligence Reformation Act of 2004 », [En ligne : http://www.gpo.gov/fdsys/pkg/BILLS-108s2811is/pdf/BILLS-108s2811is.pdf]. Consulté le 16 août 2014.
  • [18]
    Déclaration de Donald Rumsfeld devant la Commission des Forces armées du Sénat le 17 août 2004, [En ligne : http://www.dod.mil/dodgc/olc/docs/test04-08-17Rumsfeld.pdf]. Consulté le 16 août 2014.
  • [19]
    Concernant les deux propositions de loi, voir l’étude comparative réalisée par le Centre de recherche du Congrès, H.R. 10 (9/11 Recommandations Implementation Act) and S. 2845 (National Intelligence Reform Act of 2004) : À Comparative Analysis, Congressional Research Service, CRS Report RL32635, octobre 2004.
  • [20]
    L’Intelligence Reform and Terrorism Prevention Act of 2004 a été approuvé le 7 décembre par 336 voix contre 45 à la Chambre et, le lendemain, par 89 voix contre 2 au Sénat.
  • [21]
    Walter Pincus, « National Intelligence Director Proves to be Difficult Post to Fill », The Washington Post, 31 janvier 2005.
  • [22]
    The News Hour with Jim Lehrer, PBS, 23 juillet 2004, [En ligne : http://www.pbs.org/newshour/bb/terrorism-july-dec04-commission_7-23/#]. Consulté le 17 août 2014.
  • [23]
    Directive du Département de la Défense no. 5143.01 datée du 23 novembre 2005, [En ligne : http://fas.org/irp/doddir/dod/d5143_01.pdf]. Consulté le 17 août 2014.
  • [24]
    Robert M. Gates, « An Intelligent CIA Pick », The Washington Post, 18 mai 2006.
  • [25]
    Robert M. Gates, Duty : Memoirs of a Secretary at War, New York, Alfred A. Knopf, 2014, p. 92-93.
  • [26]
    Leon Panetta siégea au Congrès en tant que représentant de l’État de Californie de 1977 à 1993. Il intégra ensuite l’administration Clinton en tant que directeur du Bureau du Budget, de 1993 à 1994, avant de devenir secrétaire général de la Maison-Blanche de 1994 à 1997. Sa seule prise de position publique sur la question du renseignement remonte à une tribune de janvier 2008 dans laquelle il dénonçait vivement le recours à la torture. Voir Leon E. Panetta, « No Torture. No Exceptions », Washington Monthly, janvier 2008.
  • [27]
    Cet épisode est relaté in Bob Woodward, Obama’s Wars, New York, Simon and Schuster, 2010, p. 60-61 et James Mann, The Obamians : The Struggle Inside the White House to Redefine American Power, New York, Viking, 2012, p. 215.
  • [28]
    Ibid., p. 220-221. L’amiral Blair démissionna le 28 mai 2010. Il fut remplacé par James Clapper.
  • [29]
    Dana Priest, William M. Arkin, Top Secret America : The Rise of the New American Security State, New York, Little, Brown and Company, 2011, p. 103.
  • [30]
    Issues d’Edward Snowden, ces données ont été révélées par la presse américaine. Elles n’ont pas été démenties par l’administration Obama. Voir notamment Barton Gellman, Greg Miller, « U.S. Spy Network’s Successes, Failures and Objectives Detailed in ‘Black Budget’ Summary », The Washington Post, 29 août 2013.
  • [31]
    Voir notamment Eric Lichtblau, Michael S. Schmidt, « Other Agencies Clamor for Data N.S.A. Compiles », The New York Times, 3 août 2013.
  • [32]
    James Risen, State of War : The Secret History of the CIA and the Bush Administration, Londres, Pocket Books, 2007 (2006), p. 69-70. Mark Mazzetti, The Way of the Knife : The CIA, a Secret Army, and a War at the Ends of the World, New York, The Penguin Press, 2013, p. 128-129.
  • [33]
    L’opération contre la résidence d’Oussama Ben Laden au Pakistan, qui aboutit à la mort du chef terroriste le 2 mai 2011, a été dirigée par la CIA et exécutée par des forces spéciales du JSOC. Elle a été planifiée conjointement par la CIA et le JSOC.
  • [34]
    Calculs effectués à partir des données mises en ligne par la New America Foundation sur son site Internet [En ligne : http://securitydata.newamerica.net/drones/pakistan/analysis]. Consulté le 21 août 2014.
  • [35]
    Leon Panetta a quitté son poste de directeur de la CIA pour prendre la tête du Département de la Défense le 1er juillet 2011, suite au départ de Robert Gates. Panetta a été remplacé par le général Petraeus le 6 septembre 2011.
  • [36]
    Discours du secrétaire à la Défense Robert M. Gates le 25 mai 2011, [En ligne : http://www.defense.gov/Speeches/Speech.aspx?SpeechID=1573]. Consulté le 21 août 2014.
  • [37]
    Review of the Terrorist Attacks on U.S. Facilities in Benghazi, Libya, Septembre 11-12, 2012, Together with Additional Views, Senate Select Committee on Intelligence, 113th Congress, 15 janvier 2014, p. 9, 22-23, 77.
  • [38]
    Peter Baker, Brian Knowlton, « Obama Acknowledges U.S. Erred in Assessing ISIS », The New York Times, 28 septembre 2014.
  • [39]
    David Ignatius, « James Clapper : We underestimated the Islamic State’s ‘will to fight’ », The Washington Post, 18 septembre 2014.
  • [40]
    Shane Harris, « Jihadist Gains in Iraq Blindside American Spies », Foreign Policy, 12 juin 2014.
  • [41]
    Greg Miller, « U.S. strikes in Syria against Islamic State hindered by intelligence gaps », The Washington Post, 23 août 2014.
  • [42]
    Gates, Duty : Memoirs of a Secretary at War, op. cit., p. 293.
  • [43]
    Extrait d’un mémorandum d’Harold Smith à Sam Rosenman daté du 10 janvier 1946. Reproduit in Foreign Relations of the United States, 1945-1950, Emergence of the Intelligence Establishment, Washington D.C., U.S. Government Printing Office, 1996, p. 172.
Français

Malgré l’augmentation de son degré de centralisation en réponse aux attentats du 11 Septembre, la communauté du renseignement américaine (CR) ne parvient pas à fonctionner comme un ensemble intégré et cohérent. Face à ce problème récurrent depuis Pearl Harbor, le compromis élaboré en 2004 n’a pas donné au nouveau directeur du renseignement l’autorité nécessaire pour diriger cet ensemble hétérogène de manière rationnelle. Combinée à un afflux de crédits sans précédent, cette absence de direction effective a généré une croissance incontrôlée qui apparaît aujourd’hui comme un obstacle supplémentaire à l’intégration de la CR.

Bibliographie indicative

  • Christopher Andrew, For the President’s Eyes Only : Secret Intelligence and the American Presidency from Washington to Bush, New York, Harper Perennial, 1996 (1995).
  • Robert M. Gates, Duty : Memoirs of a Secretary at War, New York, Alfred A. Knopf, 2014.
  • Rhodri Jeffreys-Jones, The CIA and American Democracy, 2e édition, New Haven, Yale University Press, 1998.
  • Gildas Le Voguer,, Le renseignement américain : entre secret et transparence, 1947-2013, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014.
  • Dana Priest andWilliam Arkin, Top Secret America : The Rise of the New American Security State, New York, Little, Brown and Company, 2011.
  • James Mann, The Obamians : The Struggle Inside the White House to Redefine American Power, New York, Viking, 2012.
  • Mark Mazzetti, The Way of the Knife : The CIA, a Secret Army, and a War at the Ends of the World, New York, The Penguin Press, 2013.
  • Raphaël Ramos, De l’OSS à la CIA : La centralisation du renseignement américain au lendemain de la Seconde Guerre mondiale à travers l’expérience du Central Intelligence Group, Montpellier, Presses universitaires de la Méditerranée, 2006.
  • Report of the U.S. Senate Select Committee on Intelligence and U.S. House Permanent Select Committee on Intelligence, Joint Inquiry into Intelligence Community Activities Before and After the Terrorist Attacks of September 11, 2001, 107th Congress, décembre 2002.
  • Jeffrey T. Richelson, The U.S. Intelligence Community, 5e édition, Boulder, Westview Press, 2008.
  • James Risen,, State of War : The Secret History of the CIA and the Bush Administration, Londres, Pocket Books, 2007 (2006).
  • David F. Rudgers, Creating the Secret State : The Origins of the Central Intelligence Agency, 1943-1947, Lawrence, University Press of Kansas, 2000.
  • Donald Rumsfeld, Known and Unknown : A Memoir, New York, Sentinel, 2011.
  • The 9/11 Commission Report, National Commission on Terrorist Attacks upon the United States, Washington D.C., U.S. Government Printing Office, juillet 2004.
  • Michael Warner, J. Kenneth McDonald, US Intelligence Community Reform Studies Since 1947, Washington D.C., Central Intelligence Agency, Center for the Study of Intelligence, avril 2005.
  • Roberta Wohlstetter, Pearl Harbor : Warning and Decision, Stanford, Stanford University Press, 2006 (1962).
  • Bob Woodward, Obama’s Wars, New York, Simon and Schuster, 2010.
  • En ligneAmy B. Zegart, Spying Blind : The CIA, the FBI, and the Origins of 9/11, Princeton, Princeton University Press, 2007.
Raphaël Ramos [*]
  • [*]
    Raphaël Ramos est doctorant en histoire à l’Université Paul-Valéry Montpellier III (CRISES, E.A. 4424) et allocataire du Ministère de la Défense. Sa thèse est consacrée à la formation de la communauté du renseignement américaine sous l’administration Truman. Il est l’auteur de De l’OSS à la CIA (Presses universitaires de la Méditerranée, 2006).
Mis en ligne sur Cairn.info le 06/05/2015
https://doi.org/10.3917/polam.024.0045
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