CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Depuis quelques années, un effort certain a été produit pour documenter l’insertion des sociétés africaines dans les processus historiques globaux, rompant ainsi clairement avec les présupposés d’enclavement et d’anhistorisme qui leur ont longtemps été attribués. « Lire le monde » depuis l’Afrique [1] constitue désormais un projet intellectuel et scientifique pleinement légitime, resté néanmoins encore assez programmatique.

2Dans la vaste trame sociale-historique de l’extraversion [2] qui se dessine ainsi, certaines tendances « noires » assimilables au registre de la blackness transnationale [3] nous paraissent, parmi d’autres, occuper une place particulière. À cet égard, une jeune anthropologue afro-américaine revient sur sa découverte du terrain sud-africain en des termes qui sont ici riches de sens :

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« J’ai vu des voitures jouant à tue-tête du Jay-Z, du Sean Paul et du P. Diddy, entre autres ; des gens portant des vêtements Sean John, Avirex ou encore des maillots d’équipes de sport américain ; et des téléphones portables sonnant sur les derniers airs de 50 Cent ou R. Kelly. J’ai réalisé qu’en tant qu’individu, Noire d’origine caribéenne et américaine, je me sentais une identité noire (blackness) en partage avec les personnes métisses (coloured people) que je rencontrais, non tant en raison d’un héritage africain commun que pour la culture populaire noire – et celle hip-hop en particulier – que nous partagions [4] ».

4Outre que l’exemple sud-africain est clairement transposable à un ensemble bien plus vaste de sociétés africaines, urbaines notamment, émerge ici une série de questions qui constituent la colonne vertébrale de ce dossier : s’agissant de l’Afrique, en quoi l’affirmation d’un être-noir peut-elle s’assimiler à l’expression subjective d’un être-au-monde, par comparaison avec les expériences diasporiques [5] d’Amérique du Nord et d’Europe notamment ? Quels récits d’une africanité cosmopolite s’y rapportent, en prise avec quels rapports d’autorité et schémas de domination aussi bien locaux que globaux ? Et en quoi rejoignent-ils, ou au contraire, s’opposent-ils à d’autres narrations plus anciennes ou adossées à des conceptions radicalement différentes de la place de l’Afrique dans le monde ?

« Colorations » politiques et renversement heuristique

5C’est en intelligence avec de telles interrogations que se déploie notre examen de la blackness en Afrique. Celle-ci n’est évidemment pas exclusive d’autres narrations qui, chacune à leur manière, et en regard des situations sociohistoriques et politiques qui les ont vues naître, disent quelque chose des rapports de pouvoir et de domination qui traversent les sociétés africaines : négritude, panafricanisme, afrocentrisme, ou encore afropolitanisme et afrofuturisme dont traitent respectivement Patrick Awondo et Achille Mbembe dans ce dossier.

6Aussi, qu’on le précise immédiatement : notre démarche ne s’assimile pas ici à une force de proposition conceptuelle qui insisterait sur la richesse interprétative du concept de blackness pour examiner à nouveaux frais les situations africaines passés et présentes. À l’instar de l’autoportrait placé en couverture de ce numéro, où le photographe Omar Victor Diop fait s’entrechoquer les époques et les références dans son évocation provocatrice de l’africanité [6], l’approche en termes de blackness a, ici, avant tout pour objectif d’ouvrir un dialogue critique sur les façons de concevoir et de (se) représenter l’Afrique. Cette approche permet, dans le même mouvement, d’interroger certains rapports de pouvoir globaux à l’aune de leurs traductions sociales et politiques locales, dans les sociétés africaines elles-mêmes.

7L’idée et la pertinence de ce questionnement nous sont d’abord apparues face à l’acuité des « désirs d’ailleurs » des jeunesses africaines [7]. Dans cette optique, considérer la blackness en et depuis l’Afrique revient aussi à interroger certains aspects d’une « géographie imaginaire du départ qui abolit l’Atlantique et incorpore l’Amérique dans la continuité » des sociétés africaines [8]. Suivant cette perspective, on peut faire l’hypothèse que ce sont d’abord des imaginaires du pouvoir qui s’expriment ou se façonnent sous l’apparence d’« identifications chromatiques [9] » transnationales, témoignant ainsi de tentatives de capter et d’incorporer un peu de la puissance qui irradie depuis les centres dominants du Nord [10].

8S’agissant de styles culturels issus des Amériques noires et largement appropriés parmi les jeunes du continent – les répertoires hip hop actuels, tout comme le jazz, la salsa et la soul avant eux –, on peut suggérer qu’ils supportent l’énonciation de « versions du Moi » positives ou gratifiantes, qui contrastent avec le sentiment d’insignifiance sociale auquel beaucoup se confrontent, tout autant qu’avec certains préjugés d’archaïsme encore largement rattachés à l’Afrique et à ses ressortissants. À ce jeu-là, peu importe alors si l’imagerie planétaire qui accompagne aujourd’hui ces tendances et ceux qui les incarnent – largement récupérés par l’industrie culturelle de masse et souvent glorifiés à travers des arguments matériels clinquants ou bling bling[11] – reste très éloignée des conditions de vie effectives d’une majorité de Noirs aux États-Unis ou dans les Caraïbes. Les « cultures matérielles du succès [12] », les poses et postures qui en ressortent, sont en elles-mêmes révélatrices d’un certain potentiel critique. À propos du gangsta rap étasunien et du succès mondial – y compris en Afrique – de certains de ses représentants afro-américains, Eric Gonzales note ainsi que « dans ce genre musical qui joue constamment de l’ambiguïté des rapports entre, d’une part, des produits artistiques et, d’autre part, la réalité vécue et perçue pas ses acteurs et ses spectateurs, on constate que la réussite matérielle est constamment mise en avant, au point de représenter une marque ultime de défiance culturelle et sociale [13]».

9Les « politiques du style [14] » auxquelles certains référencements noirs globaux peuvent fournir leurs rythmes, leurs mots, leurs objets et leurs modèles de réussite, introduisent ainsi un examen du « cosmopolitisme noir » par le bas, notamment sous l’angle des postures critiques qui s’en dégagent. Ce sont, en somme, des effets de frontière à la fois internes et externes aux sociétés africaines qui se dévoilent ainsi sous les traits d’une esthétique transnationale du subalterne.

10Bien sûr, toutes les formes d’extraversion, d’aspirations cosmopolites ou de rapports sociaux de race [15] observables dans les sociétés africaines ne se ramènent pas au registre de la blackness. Ce dernier constitue néanmoins un prisme à travers lequel certains aspects de l’histoire et de l’actualité du continent peuvent être considérés et, en particulier, pour ce qui a trait aux signifiants qui essaiment et se reconfigurent d’une rive à l’autre de l’Atlantique noir [16]. À cet égard, notre ambition générale est de travailler avec et sur la réversibilité de perspectives empiriques et théoriques ouvertes par les études diasporiques et, en retour, de produire des effets de critique dans le champ des études africaines.

11Ce questionnement trouve en effet ses principaux fondements théoriques dans le contexte sociohistorique et académique nord-américain. Dans ses usages critiques les plus aboutis, inspirés notamment du féminisme radical des années 1970 aux États-Unis, le concept de blackness a vocation à « rendre visibles [17] », à la fois la domination systémique s’exerçant sur les populations noires en Amérique et les privilèges blancs hégémoniques, ou whiteness, qui en constituent la trame de fond. Il caractérise ainsi, avant tout, des expériences historiques de la domination et il importe en ce sens de lever d’emblée tout malentendu culturalisant ou racialisant. Loin de réifier une communauté « black » transnationale et d’en suggérer la cohérence ou l’unité, notre intérêt se porte sur des modalités chromatiques de signification du pouvoir et de la domination qui se déploient tant à échelle locale que globale, et en postulant leur diversité intrinsèque. En effet, de part et d’autre de l’Atlantique noir, les modes d’imagination et d’énonciation de la blackness transnationale ont certes en commun la mise en relation de mondes distants, mais ils restent travaillés par des dynamiques fondamentalement hétérogènes : historiquement définis, ils sont intelligibles avant tout en regard de situations locales ou nationales qui en configurent tant les formes que le sens, comme le souligne également Sarah Fila-Bakabadio dans ce dossier.

12En renfort de cet argument, on peut évoquer certains usages du référent africain [18] au sein des diasporas et parmi les populations « afro-descendantes [19] ». Outre les expressions d’un affect que nous laissons pour le moment entre parenthèses, l’évocation d’origines africaines sacralisées [20] peut être comprise comme une tentative de créer un espace de compensation face à la minoration qui, dans une large mesure, caractérise transversalement les expériences noires, notamment hors d’Afrique. Cette dernière apparaît en ce sens « comme une réserve de symboles mobilisables [21] » face à des enjeux qui restent souvent éloignés, sinon totalement coupés, des réalités du continent. Aisément compréhensibles en leurs fondements sociaux, historiques et politiques, ces récits n’en constituent pas moins de facto autant de modalités d’invention de l’Afrique [22], y compris en se parant des meilleures intentions. Suivant cette hypothèse, il y aurait quelque chose comme une distance sociale et politique immanente aux évocations diasporiques du référent africain [23] tout comme, nous l’avons vu, une telle distance transparaît également dans les usages du référent black afro-américain depuis l’Afrique, situant ainsi cet examen dans une dimension fondamentalement spéculaire.

13Cette distance ou ce décalage semble aujourd’hui être rendu particulièrement manifeste à la lumière de nouvelles présences africaines, notamment en Amérique latine, qui résultent de la reconfiguration – politiquement contrainte – des routes migratoires, comme le montre bien Régis Minvielle dans ce dossier. S’intéressant aux enjeux et controverses entourant la réémergence actuelle du « passé africain » et de la « question noire » en Argentine, sa contribution éclaire avec précision les lignes de fracture qui traversent les aspirations et revendications portées par une grande diversité d’acteurs « afro » à Buenos Aires. Ressortissants capverdiens arrivés depuis plusieurs générations, afro-descendants dont les racines africaines se perdent dans l’histoire de la traite, ou encore aventuriers maliens et sénégalais nouvellement venus : chacun porte des stratégies propres de mise en scène et en récit de son ethnicité, qui demeurent de facto largement inconciliables car fondamentalement divergentes, voire concurrentes. À travers une sociologie des acteurs et des rapports de pouvoir locaux comme globaux dont témoignent leurs interactions, Régis Minvielle resitue ces configurations dans leurs nuances et complexité : qui revendique des racines africaines, depuis quelles positions, en quels termes et pour quels objectifs ? La « globalisation de l’ethnicité [24] » qui se dessine ainsi ne peut être comprise en dehors des dynamiques de différenciation internes dont, littéralement, elle est faite. Il y aurait bien sûr du sens à construire sur la confrontation de ces différents positionnements stratégiques subalternes et les logiques centrifuges qui s’en dégagent, mais le constat reste là : la téléologie de l’« unité » – aussi souhaitable et légitime qu’elle paraisse à certains – résiste mal à l’examen empirique.

14C’est également ce que constate Sarah Fila-Bakabadio dans sa contribution, à travers un réexamen critique de la notion de blackness qui, selon elle, reste trop connotée racialement et, ce faisant, paraît arguer d’une « unicité des peuples noirs qui n’existe pas ». En fondant ses analyses sur le travail d’artistes-photographes « afro » – notion qu’elle préfère à celle de blackness en raison notamment de son caractère plus intégrateur –, Sarah Fila-Bakabadio examine certains liens entre histoire, mémoire, territoire et identités. Elle construit pour cela le corps noir comme une archive qui témoigne d’expériences historiques là encore fondamentalement distinctes, et qui ne se laissent en aucun cas emprisonner dans un discours réifiant et unifiant de la race, dont la « couleur noire » serait le signifiant premier, voire unique (et, partant, faussement unificateur). C’est, en somme, l’épineuse question des enjeux de représentation de la « corporéalité noire » qui est ici posée, tant en regard des processus globaux contemporains que des expériences historiques de la discrimination.

Modalités chromatiques de signification du pouvoir et de la domination : à partir de quelques illustrations ouest-africaines

15Le renversement heuristique auquel convie ce numéro doit permettre d’envisager l’Afrique, non plus sous l’angle d’investissements symboliques et/ou d’usages politiques dont elle fait l’objet depuis l’extérieur (notamment au sein des diasporas), mais au contraire et de façon spéculaire comme un haut lieu de production, de contestation et/ou de négociation du sens du monde. Sous cette optique, la blackness renverrait à une « forme de réflexivité [25] » bien spécifique, susceptible d’informer certaines modalités propres à la marche cosmopolitique des sociétés (notamment) africaines contemporaines [26].

16« Dans les années 1930, quand nous avons lancé depuis Paris le mouvement de la négritude, nous puisions particulièrement notre inspiration – de façon paradoxale – chez les “Nègres américains”, au sens général du mot : au mouvement de la Renaissance de Harlem et au mouvement “indigéniste” de Haïti [27] ». Ainsi s’exprimait Léopold Sédar Senghor, soulignant combien sa conception de la négritude avait été très tôt nourrie d’un dialogue noir atlantique. De façon paradoxale dit Senghor et sans doute admet-il ainsi à mot couvert qu’au sortir de l’expérience coloniale, l’urgence politique du retour à une « authenticité culturelle » africaine était déjà prise dans des dynamiques de réinvention et d’hybridation agissantes à échelle mondiale, même si largement (s)électives. Mais le paradoxe ne s’arrêtait pas là. Le dialogue noir global ainsi valorisé avait pour pendant immédiat le rejet des expressions populaires du black entertainment afro-américain, par opposition aux productions notamment littéraires d’intellectuels issus des Amériques noires. Ainsi, au cours des années 1970, le chanteur de soul music James Brown – pourtant interprète de la fameuse chanson-manifeste « Say it Loud – I’m Black and I’m Proud » (1968) – est régulièrement dénigré dans la presse sénégalaise pro-gouvernementale, en raison du mauvais exemple qu’il est censé constituer aux yeux de la jeunesse. En 1972, le quotidien sénégalais Le Soleil applaudissait ainsi au fait que « les jeunes pikinois [habitants de Pikine, banlieue dakaroise] rejettent la soul-music pour une autre culture », rompant avec les « demi-dieux qui ont pour nom James Brown » pour s’en retourner vers des activités plus dignes et sérieuses, tel la création d’une association où se tenaient des causeries sur les rapports générationnels ou les jeunes et la religion [28]… Autrement dit, l’énonciation d’une appartenance ou conscience noire transnationale était immédiatement réinsérée et réinterprétée à l’intérieur de rapports de classe et d’enjeux politiques locaux, sur fond de réinvention d’une culture africaine « véritable ».

17Les exemples de ce type sont assurément observables et déclinables à une échelle continentale bien plus vaste. Ils permettent de situer immédiatement notre propos sur un plan dynamique : ce sont effectivement les politiques de la blackness qui suscitent notre attention, avec tout ce que cela entend en termes de conflits générationnels, de rapports de classe et d’effets de frontière internes aux sociétés africaines. Dans de nombreux contextes africains, on observe en effet une forme d’antagonisme entre des aspirations qui dénotent une forte attirance pour le plus vaste, le plus lointain et le plus différent – « l’esprit du large » dont parle Achille Mbembe à propos de l’afropolitanisme [29] –, et des prises de position qui participent au contraire d’un réquisitoire contre des modèles étrangers censés contribuer à un délitement social et culturel local. Cette dialectique des contraires reflète un contexte sociohistorique plus large, marqué par la place centrale faite aux usages politiques du référent culturel dans de nombreux États africains. Dans la diversité de ses manifestations locales ou nationales, ce culturalisme politique s’est d’abord articulé à une rhétorique du retour à un « Moi » africain véritable [30] mis à mal par l’expérience coloniale, qui a donné sa marque de fabrique particulière aux périodes dites de décolonisation, puis de construction de l’État postcolonial. Il fait sens, aujourd’hui, à la lumière des processus globaux et des raidissements identitaires qu’ils suscitent localement, induisant ainsi une forme de réactivation de l’absolutisme culturel.

18On en trouve nettement la trace dans les représentations et discours sociaux qui dénoncent l’aliénation des « jeunes d’aujourd’hui » (comme ceux « d’hier », on l’a vu) à des modèles et marchandises culturels provenant des centres dominants du Nord, aussi et y compris ceux assimilables au registre de la blackness transnationale. Ces jugements doivent néanmoins être confrontés à l’investigation d’expressions de résistance ou d’indocilité qui, empruntant souvent le détour par un ailleurs global, travaillent les terrains culturels et politiques locaux. Au-delà du constat simpliste d’occidentalisation et des postulats idéologiques qu’il véhicule en termes d’autodénigrement et de domination symbolique, il importe en ce sens de saisir les terrains de contestation qui s’en dégagent. C’est là encore le sens et l’intérêt d’une analyse politique de la blackness en et depuis l’Afrique, qui permet de jauger certaines luttes symboliques dont les métropoles du continent figurent l’arène, les cultures urbaines le révélateur historique et les aspirations populaires/juvéniles le levier critique.

19Suivant une même ligne de pensée, on pourrait évoquer ici certains enjeux liés aux appropriations africaines de styles musicaux nés et grandis au sein de l’Atlantique noir et ayant connu un destin mondial. Du succès assurément ancien du jazz, des musiques afro-cubaines, de la soul et du reggae parmi les jeunes citadins africains – et des formes hybrides qui s’en dégagent localement puis « retournent » au monde, tels le (soul) makossa camerounais, l’highlife et l’afro-beat nigerians – [31] jusqu’au plébiscite actuel du hip-hop nord-américain, du zouk ou du dance hall caribéens, se dessine une généalogie bien plus politique qu’elle n’y paraît de prime abord. Ainsi que Richard Shain l’a montré, au cours des années 1950, le goût prononcé de nombreux jeunes pour la modernité noire ou « tropicale », qu’incarnaient à leurs yeux les artistes afro-cubains, pouvait constituer un défi adressé aux récits de la modernité promus par les autorités coloniales et les élites africaines « évoluées », dans un contexte de montée des revendications à l’égalité et à l’indépendance [32]. Dit de façon plus lapidaire mais non moins parlante, pour les jeunes de Douala de la même époque, c’était « la musique latine plutôt que le latin d’église [33] ».

20Les soins apportés au corps reflètent pareillement l’acuité d’influences et connexions noires transnationales, sous l’angle d’enjeux de pouvoir aux ramifications tant locales que globales. En Afrique de l’Ouest, à Dakar et Abidjan notamment, un nombre toujours croissant de jeunes adoptent le style nappy, ou n’happy. Contraction des termes natural et happy, cette pratique capillaire née au sein des populations afro-américaines – à compter des années 1960, période de forte effervescence du militantisme noir aux États-Unis – consiste à assumer un cheveu crépu ou « afro », en abandonnant ainsi les produits de défrisage souvent agressifs et autres greffes synthétiques. Au Sénégal, un groupe composé principalement de jeunes femmes s’est formé sous le nom de n’happy Galsen[34]. Outre des rencontres régulières où chacun(e) vient échanger ses trucs et astuces en matière de traitement naturel des cheveux, les nombreux membres de ce groupe [35] portent le message d’une africanité moderne, fière car délestée d’injonctions esthétiques « non africaines », et néanmoins empreinte d’un référencement culturel transnational entre Amérique noire et périphéries urbaines hexagonales.

21Des considérations très proches peuvent se formuler au sujet des pratiques d’éclaircissement cosmétique de la peau. En 1979, par le biais d’un décret présidentiel, Léopold Sédar Senghor dénonçait une telle pratique, au motif qu’elle représente « la négation même de la personnalité du Noir sénégalais » au moment où celui-ci « cherche à s’enraciner dans ses valeurs propres [36] ». Valeurs culturelles authentiques, « ontologie profonde [37] » et couleur de peau étaient ainsi placées dans un rapport d’équivalence ou tout au moins d’étroite interrelation. Au fond, le problème n’est pas ici de savoir si le xeesal (désignation wolof de la dépigmentation cosmétique) est bien la marque d’une africanité honteuse ou d’un « complexe du Toubab [Blanc, Occidental] » comme cela se dit souvent à Dakar [38], mais plutôt de constater les modes d’investissement politico-identitaire dont la couleur de peau – claire ou foncée – fait l’objet.

22Quelque trente ans plus tard, une jeune femme dakaroise coutumière des night-clubs branchés de la capitale sénégalaise et prompte à revendiquer sa « filiation stylistique » avec Beyonce, Rihanna et autres stars afro-américaines du r’n’b ou de la pop, livrait sa conception de certaines hiérarchies internes au Dakar by night : « les Toubabs, tu les vois sortir fringués n’importe comment, danser n’importe comment […]. On dirait qu’ils s’en foutent complètement. Nous les Noirs, on n’a pas l’argent mais on a le style, man, la vraie classe quoi ! ». Les affirmations de ce type ne peuvent être comprises en dehors de leur épaisseur sociale, politique et historique ; et il n’est pas anodin que ces identifications « noires » s’énoncent envers et contre leur reflet inversé, également avatar historique de la « blanchité [39] » en Afrique de l’Ouest : la figure du Toubab. En ce sens, elles attestent moins d’une identité noire-africaine essentialisée qu’elles n’égratignent une domination blanche socialement, historiquement et politiquement construite. Face à l’asymétrie des forces en présence, c’est notamment dans le domaine du paraître – des cultures matérielles et des styles culturels – que s’exprime une forme de revanche ou de contestation de la subordination. Ce jeu de miroir révèle, avec une certaine clarté, les « topographies transnationales du pouvoir [40] » qui sont à l’œuvre et les résistances subalternes qui s’en dégagent sous des formes souvent détournées, obliques ou discrètes. À ce niveau, il y aurait beaucoup à dire du terme de toubab lui-même et de ses divers usages ouest-africains. Loin de se réduire à la couleur de peau, il renvoie intrinsèquement à des logiques hiérarchiques (sur les plans sociaux, moraux, économiques, politiques, etc.) et évoque ainsi des systèmes de classification et de dénomination y compris au niveau local – internes aux sociétés ouest-africaines elles-mêmes. Il déborde largement les critères chromatiques et/ou géographiques puisque, en dernière analyse, il peut désigner aussi bien un Noir/Africain qu’un Blanc/Occidental, en ce sens qu’il caractérise aussi et surtout des styles de vie, des manières d’être et de faire, des positions sociales occupées et les frontières morales qui s’en dégagent. Sa gamme sémantique peut s’élargir à un point tel qu’il en vient parfois à désigner « les citadins » qui, par opposition aux villageois, incarnent localement un style de vie moderne, volontiers ouvert au monde et à ses tendances actuelles, non sans une certaine connotation péjorative.

23À l’aune de ces modalités chromatiques et stylistiques de signification du pouvoir et de la domination, on pourrait, là encore, évoquer l’émergence d’une espace de compensation sociale et politique qui emprunte les traits d’une blackness de contestation. Pour beaucoup de jeunes du continent africain, l’assertion de cette appartenance noire globale, fondamentalement cosmopolite, sous-tendrait une forme de critique vis-à-vis de la minoration dont ils font l’objet, aussi bien à échelle mondiale qu’au sein de leur propre société. C’est là, par exemple, toute la richesse du rap comme objet d’analyse : à la fois parole de contestation voire de dissidence éminemment locale, et esthétique transnationale du subalterne.

24Les dynamiques de déterritorialisation contemporaines – la transformation du « lien entre espace, stabilité et reproduction culturelle » et entre « paysages réels et fictionnels [41] » – impliquent ainsi de penser global, en examinant comment les relations de pouvoir et les hiérarchies sociales locales sont travaillées par des dynamiques transnationales. C’est là probablement un autre argument en faveur du rapatriement de la blackness en Afrique : du ghetto afro-américain aux métropoles africaines, en passant par les périphéries des grandes villes européennes, il y a quelque chose comme « un monde en soi » qui se dessine, dont les contours africains restent encore largement à tracer. Ici comme ailleurs, il s’agit néanmoins d’« entendre noir non pas tant comme un marqueur racial ou ethnique, mais comme l’indice d’une volonté de s’en tenir à une forme résolument mineure de l’expression » qui (com)porte intrinsèquement un certain potentiel critique, en tant que manifestation d’un « immédiat-politique » inhérent aux expériences vécues de la minoration et de la relégation [42].

25En s’appuyant sur une ethnographie au sein du monde hip-hop de Ouagadougou, Anna Cuomo rejoint cette perspective dans sa contribution à ce dossier, en examinant notamment comment des référents historiques et culturels « noirs » transnationaux sont mobilisés en tant que ressources symboliques, mais aussi artistiques et marchandes, à l’intérieur des trajectoires aussi bien socioprofessionnelles que personnelles de ses interlocuteurs. Entre allégations d’une « légitimité de la rue » propre à la culture hip-hop globale, et stratégies d’adaptation aux canons de ladite « musique du monde » dont le rap d’Afrique tend à devenir une composante, elle met en lumière la pluralité des registres avec lesquels les acteurs doivent composer leur partition sociale et culturelle propre – entre blackness réinventée et africanité de circonstance.

Quel est ce noir dans cosmopolitisme noir… en Afrique [43] ?

26Telle qu’elle se dessine en filigrane de ces différentes illustrations, la blackness rejoint d’autres formes narratives qui, de la négritude à l’afropolitanisme, en passant par le panafricanisme ou encore l’afrocentrisme, ont vocation à caractériser la place du continent dans le système mondial et les rapports de force qui s’y déploient. Les degrés d’ouverture – l’appel du large – ou de clôture – la rétractation culturelle – plus ou moins importants et flagrants constituent sans doute les principaux leviers de différenciation interne à ces récits de l’africanité. Dans cet écheveau, on pourrait suggérer que le registre de la blackness se distingue tout autant qu’il révèle d’autres « écritures africaines de soi [44] » plus volontiers versées dans des récits de la clôture identitaire et de la préservation culturelle. Du reste, cette approche contrastée participe de notre choix de ne pas chercher nécessairement à traduire la notion dans ce dossier. L’enjeu est, entre autres, de bien en distinguer le sens et la portée par comparaison avec, par exemple, le terme plus englobant d’« africanité », ou celui différemment connoté idéologiquement et historiquement de « négritude » (« noirité » ou « noiritude » nous paraissant par ailleurs des néologismes à la fois trop audacieux et coupés de la référence à l’Atlantique noir qui reste prégnante dans cet examen).

27On comprend bien qu’il y a quelque intérêt heuristique à faire se « frotter » entre elles ces conceptions différentes, parfois antagoniques, de l’Afrique. Le problème n’est toutefois pas de chercher coûte que coûte à les distinguer ou à les opposer, mais plutôt de les envisager à l’aune de leurs historicités propres, de comparer les modèles auxquels elles se réfèrent et les objectifs variés dont elles se dotent, de jauger les diverses stratégies qu’elles recouvrent et qui parfois se confrontent, etc. Il s’agit, en somme, de produire des effets de critique et d’interprétation en tenant ensemble différents registres d’énonciation de l’africanité, à l’aune de leurs tensions constitutives. À cet égard, l’examen de la blackness en et depuis l’Afrique, à nouveau, ne fait pas figure de panacée conceptuelle mais fournit plutôt un levier critique. Plusieurs contributions présentées dans ce dossier se livrent pareillement à cet exercice d’investigation et de modulation critiques de récits africains de soi, articulés à des perspectives temporelles à la fois différentes et complémentaires – entre passé racialiste (Jemima Pierre), présent (afro)cosmopolite (Patrick Awondo) et (afro)futur (Achille Mbembe).

28Le courant afrofuturiste, tel qu’il apparaît sous la plume d’Achille Mbembe, porte une critique radicale de l’humanisme occidental et de la chosification des êtres qu’il contient. À travers cet examen, Achille Mbembe fait exploser le référent chromatique en montrant le glissement qui s’est opéré entre un « nègre de surface » – c’est-à-dire celui à la peau noire, paradigme historique de la subalternité – et un « nègre de fond ». Ce dernier ne se caractérise plus nécessairement par sa couleur de peau ou son origine africaine, mais en regard de son appartenance à une « catégorie subalterne de l’humanité », construite par et dans l’expansion du capitalisme mondial, face à l’emprise du néo-libéralisme et à la marchandisation et l’hyper-technologisation des vies qui s’y rapportent. Ainsi, c’est paradoxalement le mot « nègre », pour choquant qu’il puisse paraître, qui déforce l’ancienne acception de la race, ou plus exactement la déplace et l’actualise dans le récit d’une « planétarisation de l’apartheid ».

29Dans sa contribution, Patrick Awondo revisite quant à lui de façon critique la notion d’afropolitanisme. Convoquant pour cela deux polarités qui lui apparaissent prédominantes, une « pensée de la différence » et une « philosophie de la médiation », il expose des éléments de réflexion permettant de jauger une part de la complexité des enjeux ainsi considérés. Entre les lignes, Patrick Awondo formule également un plaidoyer – auquel nous souscrivons pleinement – en faveur d’approches socio-anthropologiques de l’afropolitanisme, notion certes riche de promesses interprétatives mais qui reste (trop) souvent cantonnée aux registres de l’analyse textuelle ou littéraire, outre un certain écueil élitaire, qui n’est pas sans rappeler parfois celui qui entoure l’analyse du cosmopolitisme, en Afrique et ailleurs.

30C’est également à la poursuite de certains linéaments globaux que se consacre Jemima Pierre dans ce numéro, quoique suivant une perspective bien différente. En s’appuyant sur un examen à la fois historique et anthropologique des processus de racialisation au Ghana, à la lumière notamment d’une « domination blanche globale », elle défend un argument qui pourra paraître provocateur aux yeux de certains : ces processus « structurent la vie des Africains continentaux de manière analogue aux expériences des communautés noires hors d’Afrique ». Ce faisant, elle réfute l’opposition entre blackness et africanité, en insistant sur l’idée, présentée comme banale, que toute société postcoloniale est par défaut un espace racialisé, car irrigué socialement, politiquement et symboliquement par le moment colonial. C’est sous cet angle qu’elle déploie une interprétation du « tourisme d’héritage » ou « patrimonial » au Ghana, où influences panafricaines et stratégies étatiques de développement se mêlent dans la définition toujours réactualisée d’une identité noire transatlantique. Son texte, à cet égard, entre en dialogue contradictoire – et donc fécond – avec certains arguments de Sarah Fila-Bakabadio notamment.

31Plus généralement, les différentes analyses présentées dans ce dossier participent chacune à leur manière à reléguer le référent chromatique au second plan, laissant ainsi émerger des luttes sociales, symboliques et politiques qui témoignent en creux de la complexité et de la pluralité des sociétés africaines elles-mêmes. Les différentes façons (et façons différentes) de se dire et de se penser collectivement en tant qu’Africain(e)s ainsi mises en lumière se côtoient, s’articulent ou se heurtent les unes aux autres. Ce faisant, c’est l’examen d’une « condition noire [45] » qui est installé sur des bases fondamentalement dynamiques ; l’Afrique en représente ici le point focal, mais il se prolonge dans des lignes de fuite débordant nécessairement et largement les frontières continentales.

32Les débats contradictoires de la modernité et de l’africanité qui se dessinent ainsi ouvrent des perspectives empiriques et théoriques très riches. Ce numéro de Politique africaine, est-il nécessaire de le préciser, ne fait qu’en esquisser les contours. La forme collective qui s’en dégage n’a rien de symétrique ni d’homogène : elle est à l’image des points de vue – parfois divergents, souvent complémentaires – qui dialoguent d’un texte à l’autre dans ce dossier. Nous n’avons effectivement pas cherché, coûte que coûte, une cohérence d’ensemble en rassemblant des contributions nécessairement accordées les unes aux autres. Et du reste, c’est peut-être l’une des richesses de cette somme finale : le fait qu’elle n’ait rien, justement, de clos ou de définitif mais qu’elle ouvre au contraire une discussion qui reste peu engagée dans les études africaines. Ce qui, en miroir, offre la possibilité d’une certaine audace analytique et interprétative non trop encore corsetée : à l’attrait de l’ordre raisonné, nous avons préféré le désordre heuristique.

Notes

  • [1]
    A. Mbembe et S. Nuttall, « Writing the World from an African Metropolis », Public Culture, vol. 16, n° 3, 2004, p. 347-372.
  • [2]
    Voir notamment J.-F. Bayart, « L’Afrique dans le monde : une histoire d’extraversion », Critique internationale, vol. 5, n° 5, 1999, p. 97-120 ; F. Cooper, Le Colonialisme en question. Théorie, connaissance, histoire, Paris, Payot, 2010.
  • [3]
    M. Marable et V. Agard-Jones (dir.), Transnational Blackness. Navigating the Global Color Line, New York, Palgrave McMillan, coll. « Critical Black Studies », 2008.
  • [4]
    J. Yarwood, « Deterritorialised Blackness : (Re)making Coloured Identities in South Africa », Postamble, vol. 2, n° 1, 2006, p. 46-58 (p. 47).
  • [5]
    C. Chivallon, La Diaspora noire des Amériques. Expériences et théories à partir de la Caraïbe, Paris, CNRS Éditions, coll. « Espaces & Milieux », 2004.
  • [6]
    Cette photographie est extraite du projet « Diaspora » de l’artiste sénégalais Omar Victor Diop, qui porte notamment l’ambition d’agir sur la « manière dont sont perçus les récits d’Africains découvrant le monde ». Nous souhaitons remercier la galerie Magnin (Paris) d’avoir facilité l’utilisation de cette image en couverture du présent numéro de Politique africaine. Pour des informations plus précises sur le travail d’Omar Victor Diop, et sur la démarche qui sous-tend la série « Diaspora », voir le site : http://www.magnin-a.com/artiste.php?id_artiste=54 ou http://www.omarviktor.com/#!project-diaspora/ca7g
  • [7]
    T. Fouquet, Filles de la nuit, aventurières de la cité. Désirs d’Ailleurs et arts de la citadinité à Dakar, thèse de doctorat en anthropologie sociale, Paris, EHESS, 2011.
  • [8]
    M. Diouf, « Des cultures urbaines entre traditions et mondialisation », in M. C. Diop (dir.), Le Sénégal contemporain, Paris, Karthala, 2002, p. 282.
  • [9]
    Sur cette notion, voir S. Melyon-Reinette, « De la dédiasporisation des jeunes Haïtiens à New-York », Études caribéennes, n° 16, août 2010.
  • [10]
    R. Banégas et J.-P. Warnier (dir.), « Figures de la réussite et imaginaires politiques », Politique africaine, n° 82, juin 2001 ; J.-P. Warnier, « La politique de la valeur », Revue européenne d’analyse des sociétés politiques, n° 4, avril 2008.
  • [11]
    Expression propre au jargon hip-hop, évoquant initialement le son des chaînes en or qui s’entrechoquent et, par extension, le style ostentatoire de nombreux rappeurs et chanteurs de r’n’b.
  • [12]
    M. Rowlands, « The Consumption of an African Modernity », in M. J. Arnoldi, C. M. Geary et K. L. Hardin (dir.), African Material Culture, Bloomington, Indiana Universit y Press, 1996, p. 188-213.
  • [13]
    E. Gonzales, « Cash Still Rules : la représentation du succès dans le rap », Revue française d’études américaines, vol. 2, n° 104, 2005, p. 32.
  • [14]
    T. Fouquet, « Esquisses d’un art de la citadinité subalterne : les aventurières de la nuit dakaroise », in M. Diouf et R. Fredericks (dir.), Les Arts de la citoyenneté au Sénégal. Espaces contestés et civilités urbaines, Paris, Karthala, 2013, p. 131-157.
  • [15]
    Voir notamment B. S. Hall, A History of Race in Muslim West Africa, 1600-1960, Cambridge, Cambridge University Press, coll. « African Studies », 2011.
  • [16]
    P. Gilroy, Atlantique noir. Modernité et double conscience, Paris, Édit ions Amsterdam, coll. « Atlantique noir », 2010.
  • [17]
    C. W. Mills, Blackness Visible. Essays on Philosophy and Race, Ithaca, Cornell University Press, 1998.
  • [18]
    Ce « référent africain » n’est, bien sûr pas le même pour tous, et c’est du reste le sens de cette formulation elle-même : le problème est ici de jauger des modes différents d’invention de l’Afrique, entendue en ce contexte comme système de référence mobilisé à l’intérieur d’enjeux et de situations sociohistoriques très divers.
  • [19]
    Suivant Sarah Fila-Bakabadio, nous désignons ici par la notion d’afro-descendant « toute personne de descendance africaine directe ou historique. Ce terme […] s’applique plus particulièrement aux individus, revendiquant cette filiation et faisant primer cette appartenance spécifique dans leur définition identitaire ». S. Fila-Bakabadio, « Du global au particulier. Kwanzaa Music ou la quête identitaire afro-américaine », Cahiers d’Études africaines, n° 168, 2002, http://etudesafricaines.revues.org/160, consulté le 3 janvier 2015.
  • [20]
    C. Chivallon, « Diaspora noire des Amériques : une réflexion conduite à partir de la notion de lien transétatique », Autrepart, n° 38, 2006, p. 39-61.
  • [21]
    E. Cunin et al., « Rapport final du projet AFRODESC : Afrodescendants et esclavages : domination, identification et héritages dans les Amériques (15e-21e siècles) », ANR, 2012, http://www.ird.fr/afrodesc/IMG/pdf/RapportFinalAfrodesc4.pdf
  • [22]
    V. Y. Mudimbe, The Invention of Africa. Gnosis, Philosophy, and the Order of Knowledge, Bloomington, Indiana University Press, 1988.
  • [23]
    À cet égard, les romans de Maryse Condé fournissent d’intéressants exemples. Voir aussi sa contribution qui revient sur certains enjeux de la visite de l’écrivain Richard Wright en Gold-Coast, en 1954 : M. Condé, « De l’autre bord, un autre pays : l’Afrique vue par les écrivains afro-américains », Politique africaine, n° 15, septembre 1984, p. 34-47.
  • [24]
    E. Cunin, « Introduction. L’ethnicité revisitée par la globalisation », Autrepart, n° 38 (Globalisation de l’ethnicité), 2006, p. 3-13.
  • [25]
    U. Beck, Qu’est-ce que le cosmopolitisme, Paris, Aubier, 2004, p. 85.
  • [26]
    P. Cheah et B. Robbins (dir.), Cosmopolitics: Thinking and Feeling beyond the Nation, Minneapolis/Londres, University of Minnesota Press, 1998. Notre usage de la notion de cosmopolitique renvoie ici, a minima, au fait que les rapports de pouvoir locaux sont traversés, travaillés et dans une certaine mesure inspirés par des dynamiques, des enjeux et des imaginaires qui débordent largement du cadre national.
  • [27]
    Léopold Sédar Senghor, cité par P. Gilroy, L’Atlantique noir…, op. cit., p. 296.
  • [28]
    Journal quotidien Le Soleil, 19 septembre 1972.
  • [29]
    Analyses présentées entre autres dans A. Mbembe, Sortir de la grande nuit. Essai sur l’Afrique décolonisée, Paris, La Découverte, 2010.
  • [30]
    A. Mbembe, « De la scène coloniale chez Frantz Fanon », Rue Descartes, vol. 4, n° 58, 2007, p. 37-55.
  • [31]
    Voir notamment J.-J. Mandel, « Samba, rumba, salsa, makossa… », in B. Tilliette (dir.), Capitales de la Couleur. Dakar-Abidjan-Lagos-Douala-Kinshasa, Autrement, n° 9 (hors-série), 1984, p. 293-307.
  • [32]
    R. M. Shain, « Roots in reverse: Cubanismo in twentieth-cent ury Senegalese music », The International journal of African historical studies, vol. 35, n° 1, 2002, p. 83-101.
  • [33]
    J.-J. Mandel, « Samba, rumba… », art. cité, p. 296.
  • [34]
    Le terme galsen est la forme inversée (ou le verlan) de « Sénégal » ; empruntée au langage des banlieues françaises, cette expression est largement employée par les jeunes sénégalais.
  • [35]
    Sur le réseau social facebook, le groupe n’happy galsen rassemble plus de 4 000 membres. Nombreux blogs nappy animés par des jeunes femmes ivoiriennes rencontrent pareillement un franc succès, outre les réunions en présentiel dont Abidjan est également le cadre.
  • [36]
    Journal Officiel de la République du Sénégal, décret n° 79-231 du 9 mars 1979.
  • [37]
    D. Miller, « Style and Ontology », in J. Friedman (dir.), Consumption and Identity, Londres/New York, Routledge, 1999, p. 53-70.
  • [38]
    Ce que tendent du reste à démentir certaines études historiques, en démontrant que la valorisation du « teint clair » était déjà très présente dans certaines sociétés africaines pré-coloniales.
  • [39]
    Pour une synthèse très éclairante des travaux sur la whiteness, ou « blanchité », voir M. Cervulle, Dans le blanc des yeux. Diversité, racisme et médias, Paris, Éditions Amsterdam, 2013.
  • [40]
    J. Ferguson, Global Shadows. Africa in the Neoliberal World Order, Durham, Duke University Press, 2006.
  • [41]
    A. Appadurai, Après le colonialisme. Les conséquences culturelles de la globalisation, Paris, Payot, 2001, p. 71-72.
  • [42]
    C. Béthune, « Le hip hop : une expression mineure », Volume !, vol. 8, n° 2, 2011, p. 161-185. Sur la notion d’« immédiat politique » plus spécifiquement, voir G. Deleuze et F. Guattari, Kafka. Pour une littérature mineure, Paris, Les Éditions de Minuit, 1975.
  • [43]
    Est ici reformulé l’intitulé d’un texte de Stuart Hall, « What is this “Black” in Black Popular Culture », in M. Wallace et G. Dent (dir.), Black Popular Culture, Seattle, Bay Press, 1992, p. 21-33.
  • [44]
    A. Mbembe, « À propos des écritures africaines de soi », Politique africaine, n° 77, 2000, p. 16-43.
  • [45]
    P. Ndiaye, La Condition noire. Essai sur une minorité française, Paris, Calmann-Lévy, 2008.
Thomas Fouquet
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
Mis en ligne sur Cairn.info le 18/03/2015
https://doi.org/10.3917/polaf.136.0005
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