CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Un hebdomadaire important dans le paysage médiatique marocain consacre un dossier au « Maroc pays d’immigration ? ». Le titre laisserait présager une prise de distance significative par rapport à la représentation que se fait généralement la presse marocaine des migrations subsahariennes. L’image dominante est en effet celle d’une migration de transit, de passage au Maroc, et au Maghreb en général, dans l’espoir et l’attente d’un voyage vers l’Europe. Le dossier en question s’avère cependant très vite conforme à l’image dominante : les migrants subsahariens sont tantôt des criminels, des voyous qui, en s’adonnant à la mendicité et à des actes de délinquance, dérangent la tranquillité et la sécurité de l’honnête Marocain ; ils interdisent par exemple l’accès de certains cafés ou ruelles. Tantôt victimes de trafics honteux, vivant entassés dans de petites chambres insalubres, ils tentent par tous les moyens de survivre en attendant un retour vers leur pays d’origine ou un passage vers l’Europe. Voilà esquissée la vision dominante, ce que nous nommerons ici “paterisme”, soit une vision combinant apitoiement et stigmatisation sur fond de conception criminalisante des mouvements migratoires. Elle attire l’attention et la réflexion sur les “passagers” clandestins vers l’Europe, au détriment de la pluralité des formes et dynamiques de circulation entre Maghreb, Afrique subsaharienne et Europe.
Il est d’ailleurs assez paradoxal d’observer que, quelle que soit l’augmentation des effectifs de débarquement clandestin en Europe, il…

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Le « patérisme » comme vision combinant apitoiement et stigmatisation sur fond de conception criminalisante des mouvements migratoires, focalise l’attention et la réflexion sur les “passagers” clandestins vers l’Europe, au détriment de la pluralité des formes et dynamiques de circulation entre Maghreb, Afrique subsaharienne et Europe. Cet article se propose de démontrer qu’il n’y a plus au Maroc une seule migration, socialement homogène et productrice du seul clivage entre “sédentaires” restés au pays et migrants, mais des segmentations et des ségrégations sociales que la “société migrante” elle-même répercute. Les parcours migratoires, le statut de ceux qui les accomplissent et les modalités même de leur destin social, signalent l’émergence discrète d’une logique discriminatoire et d’un processus de segmentation. Une segmentation sociale au sein du processus migratoire et qui est à l’image d’une segmentation sociale déjà à l’œuvre ailleurs dans la société marocaine.

Michel Peraldi [*]
  • [*]
    Directeur du Centre Jacques Berque pour la recherche en sciences sociales (CJB), Rabat.
Ahlame Rahmi [**]
  • [**]
    Doctorante en sociologie, Université Aix-Marseille 1.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 13/09/2014
https://doi.org/10.3917/naqd.026.0087
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