1À l’automne 1981 paraît La Science face au racisme [1]. Aux côtés de Jean Bernard, François Jacob, Jacques Le Goff et Léon Poliakov, on trouve au « Comité » de la revue Jean-Pierre Vernant. C’était un an après l’attentat qui visait la synagogue de la rue Copernic, le 3 octobre 1980. Vernant avait alors écrit un texte, « Copernic », repris depuis dans Entre mythe et politique I [2].
2Au printemps 1991, paraissait Le Religieux dans le politique. Vernant ouvrait le volume en publiant « Quand quelqu’un frappe à la porte… »
3Dans son texte il écrit ceci :
« La science, la raison, l’universel, par définition en quelque sorte, n’ont rien à dire à l’individu, en particulier sur la question du sens. La science peut s’exprimer sur la question des faits, sur la question des causes, mais pas sur celle du sens. Et il y avait bien de l’illusion à croire, comme nous le faisions alors, que le mouvement de l’histoire, en nous faisant passer de la nécessité à la liberté, réglerait pour chacun d’entre nous la question du sens. Dans tout cela, pourtant, je me débrouillais comme je le pouvais, je me bricolais des réponses. Aujourd’hui, c’est en tendant vers une sagesse non religieuse – à la manière des Antiques sans doute, on ne se refait pas… – que je chercherais un début de réponse à cette question du sens. Le sens que nous donnons à notre existence, à nos amitiés, à notre façon de penser. Je dis : que nous donnons, car, en eux-mêmes, ni le monde ni la vie n’ont de sens. Et ce sens aussi qui vient de ce que, à regarder les choses en essayant de s’en distancier, on acquiert peut-être une forme de sagesse – que chacun met où il veut, où il le peut, la question étant éminemment personnelle.
« Et cette sagesse-là jette sur la religion un regard qui tend à se rapprocher de celui de Spinoza : on regarde, on observe, on cherche, on se demande pourquoi c’est comme cela et ce que cela veut dire [3]. »
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6Un jour où je tentais de comprendre ce qui l’unissait à tant d’amis différents, de générations diverses, venant d’horizons professionnels et d’univers quelquefois éloignés, Jean-Pierre Vernant a eu cette réponse simple, qui tenait en un seul mot : « l’insoumission ».
Notes
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[1]
Auteurs de ce premier volume : Charles Frankel, Nadine Fresco, Colette Guillaumin, Jean Hiernaux, François Jacob, Albert Jacquard, André Langaney, Maurice Olender, Léon Poliakov. Je reprends ici, en la modifiant, ma page d’ouverture au volume du Genre humain n° 45-46, « La dette et le sens », publié au printemps 2007, peu après la disparition de Jean-Pierre Vernant, intitulé Origines du langage. Une encyclopédie poétique, sous la direction d’Olivier Pot.
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[2]
Entre mythe et politique (1996), in Œuvres, Paris, Seuil, coll. « Opus », 2007, t. 2, p. 2174-2175.
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[3]
Le Genre humain, n° 23 : Le Religieux dans le politique, Paris, Seuil, 1991 – repris dans Entre mythe et politique (1996), in Œuvres, op. cit., t. 2, p. 2205-2206.