CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Nous parlerons ici des mensonges qui intoxiquent l’espace familial, dans le contexte particulier d’une adoption, au point qu’ils constituent un symptôme. au cœur d’un fonctionnement familial placé sous le sceau des idéaux.

2Si la parole mensongère se déploie au fil des avatars de la rencontre avec l’autre, dans l’espace intersubjectif, elle s’utilise bien souvent, à l’origine, pour esquiver, éviter, épargner. (D. Marcelli, 1982, V. Masuy, 2003.) Ainsi, les premières vérités sciemment tronquées par les parents partent souvent d’un authentique souci de protéger la sensibilité infantile. Le « faire croire » des parents, qui vise à donner une explication, peut s’apparenter au mensonge, dans sa stricte définition « d’assertion sciemment contraire à la vérité » : « les bébés naissent dans les choux ou dans les roses », « les enfants sont apportés de l’étang par les cigognes ». « L’affirmation parentale vient ici masquer une réalité trop “crue”, considérée comme n’ayant pas à être révélée à l’enfant, une réalité “choquante”, jugée “pas bonne à dire” […] Le faire croire des parents entretient et porte la croyance de l’enfant tant qu’elle est nécessaire » (B. Chouvier, 1990, p. 332). Mais, il faudra bien un temps où ce « faire croire » parental ne rencontre plus la crédulité de l’enfant. Et quand le secret est dévoilé « c’est la chute de l’idéalisation parentale, la désillusion, la perte de la croyance en la divinité des parents. […] Il y a là une véritable épreuve de croyance, anxiogène, avec changement d’objet et modification interne » (supra, p. 335). Ces mensonges-là, mensonges des parents adressés aux enfants, ont donc une durée transitoire qui tient compte des capacités d’intégration dans la psyché infantile d’une réalité parfois difficile à vivre.

3Mais il arrive que ce « mentir à un enfant » ressemble davantage à un évitement, voire à une tromperie, ces paroles fausses portant sans doute la marque d’une transmission transgénérationnelle « où ce qui est transmis ne peut bénéficier de modifications permettant son intégration psychique », les contenus portant « la trace de ce qui s’est passé et n’a pu être pensé, avec son cortège d’effroi, de honte et d’interdits » et passant « au travers des générations, et non entre les générations » (Granjon, 1995, p. 67). Ces « débris insensés » sont « hors d’atteinte d’un travail psychique, mais vont encombrer la psyché du sujet et du groupe, restant à l’état brut, voués à la répétition et offerts aux identifications de l’enfant » (p. 68). Nous proposons ici de considérer les mensonges répétitifs adressés par une enfant à sa famille adoptive à l’instar de ces « débris insensés », comme une inscription symptomatique au sein du groupe pour préserver la cohésion groupale familiale ainsi que les liens intra-familiaux fondés sur des échanges « sciemment contraires à la vérité ».

Une enfant venue d’ailleurs

4Alizée est âgée de huit ans pour la première période de prise en charge, puis de dix ans quand elle revient pour une nouvelle série de consultations. Si la demande initiale avait pour motif quelques difficultés liées à son questionnement filiatif et affiliatif, le retour il y a quelques mois comportait plus d’inquiétudes. Alizée, en difficulté scolaire, adopte un comportement qualifié de tyrannique ; elle vole de grosses sommes d’argent, elle ment sans cesse et pour tout, vit dans un désordre indescriptible… Elle ne cesse de se plaindre d’être incomprise et brimée, et exprime des mouvements d’envie vis-à-vis de ses camarades et de son frère aîné. Tout ceci dans un contexte de questionnement sur ses origines, plutôt malmenant pour la mère adoptive.

5D’origine tahitienne, Alizée a été recueillie dès sa naissance par un couple de la métropole, selon une procédure propre à son pays d’origine ; enfant fa’a’amu [1], elle a été vendue par sa mère biologique. De cette dernière, Alizée connaît son prénom. De son père biologique, il n’y a aucune trace, et il n’est jamais évoqué. Les parents adoptifs ont rencontré la mère biologique alors qu’elle était enceinte, et des « accords » ont été pris à ce moment-là. La famille adoptante, qui s’était vu refuser un agrément six ans auparavant par la DDASS (au motif que cette demande était « un caprice de la mère sans réelle adhésion du père », sic Madame), était alors composée du couple parental, qui a divorcé par la suite, alors qu’Alizée avait trois ans, et d’un garçon de quatorze ans. Depuis leur séparation, le père voit peu sa fille, malgré son droit de garde.

6Très typée, Alizée se présente comme une grande fille ronde, à l’inverse de sa mère adoptive, petite femme fluette et pâle. Elle porte, bien visible, la trace de ses origines lointaines, et de sa différence. Ses camarades l’interrogent : sur la couleur de sa peau, ni blanche, ni noire, sur son pays d’origine, sur ses « vrais » parents. Elle dit mal supporter ces intrusions qui la désignent comme différente, étrangère. À côté de cette souffrance qu’elle exprime bien, la mère évoque quelques symptômes. Alizée grossit, car elle mange énormément au point d’être suivie sur le plan médical et mise au régime. Elle vole de l’argent à sa mère, ou aux amies de sa mère, et avec le fruit de ses larcins, elle multiplie les cadeaux aux petites amies, va même jusqu’à se déposséder pour elles, afin de leur plaire. Elle ment sans cesse « pour avoir ce que je veux, pour ne pas me faire gronder, parce que j’en ai marre des questions de maman qui me fait tout le temps la morale ». Elle confie, à propos des mensonges, « que son père lui a dit que sa mère mentait, et que d’ailleurs, tout le monde lui ment aussi, tout ça à propos d’histoires d’argent volé par les uns aux autres… » La mère affirmant quant à elle à Alizée « que son père lui raconte n’importe quoi, qu’il ne sait pas s’occuper de sa fille, qu’il privilégie les conflits plutôt que de s’occuper de ses enfants ». La question des mensonges apparaît donc rapidement, aussi bien du côté d’Alizée que de ses deux parents, mais aussi de ses géniteurs et au-delà, de toute une organisation sociale. Nous allons voir de quelle façon un peu plus loin.

7Durant une longue période, Alizée laissait peu de traces pendant les séances ; ses écrits disparaissent vite sur le tableau noir qu’elle lave soigneusement à la fin de chaque séance. Ses dessins sont stéréotypés quand il ne s’agit pas de recopiage, comme s’il fallait ne rien donner de soi.. Un jour, elle fera toute une série de signatures : les siennes, celles des membres de sa famille. « Je cherche ma signature », dit-elle. Cette séance suit de peu la disparition d’une grosse somme d’argent à la maison ; Alizée aurait dépensé tout cet argent pour acheter des cadeaux à ses camarades ; il s’agirait de s’assurer « de leur amour », affirme-t-elle. À l’instar d’un lien de filiation qui s’est organisé à partir du paiement, le lien d’affiliation pourrait en passer par les mêmes conditions !

8Revenons sur les mensonges : ceux d’Alizée sont transparents, tout comme le sont ses vols. Ils se découvrent très facilement. Elle s’y prend les pieds et s’attire les foudres, non seulement de ses parents, mais également de son frère qui fait office de substitut paternel efficace. La cohésion du groupe familial ne semble jamais aussi forte que lorsqu’il s’agit de s’accorder sur les mesures de rétorsion exercées contre Alizée. Ses mensonges ont ainsi une fonction plus structurante au niveau familial qu’il n’y paraît au premier abord même si le prix à payer est lourd : non conforme à l’image de « la petite fille très gentille » qu’elle était, et que regrette la mère, Alizée est vilipendée, punie, privée. Mais cette « petite fille gentille », à jamais disparue, a sans doute un jour éprouvé le vertige d’une pensée transparente, et tenté de masquer un peu de sa limpidité, en s’étonnant de constater que les parents pouvaient être trompés. W. R. Bion (1974), A. Green (1995), M. Myquel (2000) ont ainsi lié pensée secrète et mensonges, comme deux types de communication visant à échapper à l’omnipotence terrifiante du savoir parental.

9Cette distance prise entre la fillette d’alors et la pré-adolescente d’aujourd’hui, par le biais des mensonges et du vol (symptômes appartenant tous deux à la configuration anale), renforce le sentiment d’étrangeté que lui confère son appartenance ethnique. Négociée, loin de son origine qui l’inscrit physiquement comme « fille des îles », elle ne peut « faire croire » qu’elle est la « vraie » fille de ses parents. La couleur de sa peau, son type polynésien, sa taille impressionnante (impossible de se cacher : elle est, en CE2, de loin la plus grande de l’école), toute son enveloppe l’expose, sans aucun moyen de se protéger de la curiosité des autres ; ainsi, elle ne peut garder pour elle l’éventuelle blessure de l’abandon, pas plus que l’histoire d’une adoption qui devrait pouvoir se circonscrire dans l’intimité familiale. Sa préhistoire est transparente aux yeux de tous. Pas moyen de mentir ! Difficile, dans ce contexte, d’y élaborer de quelconques fantasmagories autour de la scène primitive comme du roman familial, pourtant si essentielles dans les processus de filiation, a fortiori lorsqu’il s’agit de filiation adoptive (A. Eiguer, 1994, P. Levy Soussan, 2002, C. Veuillet, 2001). Les mensonges d’Alizée semblent venir en lieu et place de la fantasmatisation, d’autant plus qu’ils prennent appui, par le biais de l’identification narcissique (Freud, 1915), sur les mensonges des adultes menteurs qui l’entourent, tels qu’elle peut les éprouver.

10Son histoire, où co-existent projet de procréation et projet d’abandon, est en effet entachée par un mensonge familial et social autour de son avènement. Avant même son engendrement, Alizée était destinée à être vendue. L’enfant désubjectivé devient un bien consommable, un objet de transaction, et c’est ainsi qu’Alizée naît d’une mère biologique qui l’abandonne selon une coutume ancestrale qui n’a de sens que dans le pays d’origine, puisqu’elle sous-entend que les enfants fa’a’amu restent dans leur tribu, ou des tribus voisines. Cette adoption avait pour but de pallier les vicissitudes et les carences dans l’environnement maternel biologique. L’éloignement géographique est un véritable dévoiement de cette adoption tribale, et pour le coup, constitue un « mensonge » socialement institué. Son arrivée en France paraît avoir été sans obstacle, malgré le refus d’agrément : l’adoption se fera, en dépit de ce refus, par un contournement dont on ne connaît pas les méandres. La conception, puis l’adoption d’Alizée, ne peuvent advenir que parce qu’il y a volonté de transgression de coutumes et de lois, à partir de « mensonges » aux institutions. Ces deux actes fondateurs de son existence, commis comme tels, sont « sciemment contraires » à une exigence de vérité sociale. Par cette naissance et cette adoption, on a donc menti doublement à Alizée : la coutume n’est pas respectée, pas plus que n’est respecté le refus d’agrément. L’environnement maternel lui a également menti doublement : l’un dans un simulacre de désir d’enfant destiné à être donné, l’autre par un achat d’enfant dans un contexte de transgression de la loi.

11Les vols et les mensonges d’Alizée viennent sans doute réparer les effets de ces manquements. D. W. Winnicott (1956), dans sa conceptualisation de la tendance antisociale, où vols et mensonges figurent comme des actes symptomatiques, interroge les espaces d’illusionnement (les mensonges ne sont-ils pas des tentatives d’illusionner ?) qui n’ont pas suffisamment comblé les besoins narcissiques d’une enfant placée dans un « entre-deux » désubjectivant. Entre-deux de l’abandon et de l’adoption, deux années pendant lesquelles Alizée n’était ni dans sa famille d’origine, ni dans sa famille d’adoption. Où elle ne portait pas le nom de ceux qui n’étaient pas encore « véritablement » ses parents, mais celui de ceux qui n’étaient pas « vraiment » les siens. Le niveau identitaire y est bien malmené et on ne saurait s’étonner de voir Alizée chercher fébrilement une signature qui puisse l’identifier.

12Et puisque nous en sommes à ce niveau identitaire, il apparaît intéressant de souligner combien Alizée s’accommodait de cet entre-deux, dans ce qu’elle donnait à voir de son enveloppe extérieure. A. Ciccone (1999) évoque une modalité identificatoire projective avec incorporation de l’objet (chez Alizée, par le vol exercé à l’encontre de figures maternelles) avec un développement d’une « personnalité pseudo » (p. 26). Dans ses choix de vêtements de marque, puis de tous les objets « dernier cri » qu’elle utilise, en véritable fashion victim, Alizée dit autre chose qu’une simple conformité au groupe. Ce vernis social, ce mensonge de l’apparence, semble lui servir de prothèse pour affronter le groupe et s’y faire des amies. Car, dès qu’elle est seule, Alizée parle d’ennui ; se montre incapable de créer, de jouer, bref de jouir des aires transitionnelles, au point de s’endormir… Vide, elle suspend le temps grâce au sommeil, dans lequel elle s’abîme depuis qu’elle est toute petite. Dans sa filiation, face à sa mère et à son père, avec lesquels elle « s’ennuie, trouve le temps long », comme dans ses affiliations (elle supporte si peu d’être seule qu’elle « achète » ses amies), le spectre de la solitude ressemble à celui de la mort. Jamais « l’être seul » (en présence de quelqu’un) n’est verbalisé comme un moment potentiellement créatif, mais toujours comme une expérience de vide désespérant.

13On peut rattacher ce vécu qui la démantèle dans ses capacités psychiques, aux origines de sa vie, où la question d’« être en présence de quelqu’un » » n’a cessé de se poser, à un niveau préconscient, conscient, mais aussi inconscient, durant deux longues années, sans réponse « vraie » possible. Être en présence de quelqu’un, certes, mais de quelle mère, de quel environnement maternel s’agissait-il ? La question suspendue de l’attachement et du possible traumatisme de l’arrachement, vient sans doute jeter un trouble autour de l’identité du « quelqu’un », et de sa présence. Alizée qui ne cesse de réclamer, tergiverser, mentir, esquiver, voler pour obtenir une infinité de réponses positives à ses requêtes incessantes, semble venir dénoncer une tromperie dont elle peut se sentir victime.

14Les mensonges d’Alizée attaquent donc la parentalité : la parentalité biologique, et la parentalité d’adoption. Il importe d’y ajouter un constat : ses vols, mais aussi ses mensonges, disparaîtront pour les premiers, diminueront pour les seconds, après un événement symboliquement significatif. C’est après le vol spectaculaire de pièces d’argent léguées par héritage à l’amie de son père qu’Alizée se rendra compte qu’elle était « allée trop loin ». Ce n’est donc que lorsqu’elle est venue buter sur un ordre générationnel qu’elle a pu arrêter ces conduites compulsives. C’est la référence à la lignée de la « belle-mère », face à la dispersion de cet héritage, qui vient stopper cette hémorragie. À ce moment-là, on a fait référence à un aïeul mort, à un processus d’attachement, et de deuil, à une transmission, et tout s’est passé comme si ces paroles venaient dire à Alizée les enjeux de cet ordre symbolique, au-delà de la réalité concrète de l’héritage et de la filiation. L’enfant a pu s’identifier (un temps) à cette « belle-mère », dans sa qualité de fille, « maillon d’une chaîne ».

15Enfin, il semblerait que les symptômes développés par Alizée agissent particulièrement sur le narcissisme familial : l’échec scolaire, fauteur de honte, au sein d’une famille « brillante », qui « réussit », le vol qui touche d’une manière plus ou moins directe père et mère, via les amies, et les mensonges qui ruinent toute confiance, tout ceci la marginalise, la situe hors d’un fonctionnement familial décrit en termes d’idéal à envier (la réussite, l’argent, les voyages, le niveau culturel, l’aisance financière). Les attaques au niveau de la parentalité que sont les mensonges et les vols laissent imaginer que l’affiliation au groupe familial ne se fait pas sans mal, et ces actes « antifamiliaux » visent sans doute plusieurs buts. Pour vérifier si la mère qu’elle recherche aussi activement est toujours et encore là. Pour s’inscrire dans une lignée généalogique qui l’a adoptée, et dont elle vérifie la qualité de l’engagement (« m’aiment-ils vraiment ? Ne me mentent-ils pas ? »). L’enjeu est d’importance puisque, de la résistance de la fonction parentale face à ces attaques, adviendra son intégration, ou non, dans la lignée.

16Ajoutons enfin que ces mensonges ne sont pas qu’une expérience de déplaisir pour Alizée, qui, à la dernière séance, avouera spontanément : « J’adore mentir. Cela me plaît que les gens me croient. », puis, sans doute dans un mouvement de culpabilité, elle ajoutera : « Mais c’est embêtant, parce qu’on me fait de moins en moins confiance. Maman ne me croit plus jamais sur mes notes, et elle fouille tout le temps mes affaires de classe pour savoir si j’ai des punitions ou des heures de colle. Papa ne me croit pas non plus, il dit que ça le fatigue, toutes ces histoires. Mon frère se fâche, m’engueule. » Ces effets des mensonges rappellent la dimension transgénérationnelle de ce symptôme, en ce qu’il exprime paradoxalement, à la fois de difficulté à vivre ensemble, et d’impossibilité à se séparer : l’accusation de mensonges, qui touche père et mère, mari et femme, et enfin l’enfant vient joindre et disjoindre, lier et séparer, comme si le recours à la « parole acte » qu’est le mensonge était la voie la plus économique pour engager des processus de séparation qui n’en sont que des simulacres.

17En effet, le mensonge, par sa position très particulière entre vérité et fausseté, donne l’illusion – en ce qu’il dit « autre chose » à l’encontre du groupe – qu’un processus d’individuation est en marche, bien que tronqué et biaisé. Mais il est sans doute le seul possible ici, car l’enfant ne semble pas avoir d’autre choix que d’utiliser des chemins de traverse, qui, par leur déviance, attaquent et exposent au risque de la solitude, de l’incompréhension, évitant du même coup un rapprochement œdipien toujours dangereux, spécialement dans un contexte d’adoption. En même temps, comme Alizée dit le contraire du vrai, elle se discrédite aux yeux de tous, sauvegardant ainsi un mythe familial qui fait croire qu’elle appartient à une famille idéale, ce dont elle ne cesse de nous faire l’écho.

18La souffrance d’Alizée s’exprime donc par l’utilisation symptomatique de la parole mensongère. Cette souffrance naît du flou autour de sa filiation comme si, à l’origine de ses mensonges, il y avait eu un mensonge sur l’origine. Le trouble identitaire et la difficulté d’identification naissent de ces « trous », ces blancs contre lesquels le symptôme mensonger s’élève et proteste, attaquant les liens de filiation mis en défaut, traumatiques. Le passage obligé par la parole mensongère évoque un fonctionnement familial, sous l’égide du Moi Idéal, avec son caractère de rigidité et de massivité, contre lequel vient buter la parole mensongère de l’enfant, seule voie de contournement pour qu’adviennent ici les processus de subjectivation.

Notes

  • [1]
    L’enfant fa’a’amu est l’enfant adopté, en Polynésie, par une famille d’adoption ou famille fa’a’amu. La mère biologique, ou les parents biologiques, sont appelés Fanau. Ces qualificatifs désignent officiellement l’adoption, qui n’est ni tue, ni occultée. Par contre, ce qui concerne l’aspect mercantile reste un arrangement entre les deux familles, qui trouvent accord, en règle générale, avant la naissance de l’enfant. L’enfant abandonné est confié par jugement à la famille adoptante ; pendant deux années, la famille d’origine peut revenir sur sa décision, et ce n’est qu’au terme de ce laps de temps que l’adoption plénière devient possible (source MAI, Mission de l’Adoption internationale, ministère des Affaires étrangères).
Français

Résumé

Dans une histoire d’adoption douloureuse, l’utilisation répétitive de mensonges enfantins au cœur d’une clinique de l’intersubjectivité, amène à envisager la parole mensongère comme une attaque des liens familiaux, en réponse à ce qui peut être considéré comme un mensonge sur les origines. Cette attaque « de biais » garantit, en même temps qu’elle autorise un processus de subjectivation, un fonctionnement familial sous le primat du Moi Idéal.

Mots-clés

  • « faire croire »
  • identification narcissique
  • enfant fa’a’amu
  • roman familial
  • Moi Idéal
  • tendance antisociale
Español

Y si en el origen de las mentiras, habría una mentira sobre los orígenes ?

O las mentiras de Alzée, niña del más allá del mar

Resumen

En una historia de adopción dolorosa, la utilización repetitiva de mentiras infantiles en el centro de una clínica de la intersubjetividad, conduce a considerer el habla mentirosa como un ataque de los vínculos familiares, en respuesta de lo que puede ser considerado como una mentira sobre los orígenes. Este ataque « de costado » garantiza, al mismo tiempo que autoriza, un proceso de subjetivation, un fonctionamiento familiar bajo la égida del yo ideal.

Palabras claves

  • « hacer creer »
  • identificación narcisista
  • niño fa’a’amu
  • roman familial
  • yo idéal
  • tendencia antisocial

Bibliographie

  • Bion W. R (1974). L’attention et l’interprétation, Paris, Payot.
  • Chouvier B. (1995). La croyance. Genèse et métamorphoses. Thèse de Doctorat d’État ès Lettres, sous la direction de J. Guillaumin, non publiée.
  • Ciccone A. (1999). La transmission psychique inconsciente, Dunod.
  • Eiguer A. (1994). « Une fiction pour trouver la vérité de la filiation : le roman familial », Dialogue, n° 22, Toulouse, Ères, p. 31-45.
  • Freud S. (1915). « Pour introduire le narcissisme », La vie sexuelle, Paris, PUF, 1969.
  • En ligneGranjon E. (1994). « L’élaboration du temps généalogique dans l’espace de la cure de thérapie familiale psychanalytique », Revue de psychothérapie psychanalytique de groupe, n° 37, Ères, p. 31-43.
  • Green A. (1995). Propédeutique, la métapsychologie revisitée, Champ Vallon.
  • En ligneLevy Soussan P. (2002). « Travail de filiation et d’adoption », Revue Française de Psychanalyse, Paris, 1, PUF, p. 41-69.
  • Marcelli D. (1982). Troubles du comportement, Enfance et Psychopathologie, Éd. Masson, p. 182-193.
  • Masuy V. (2003). « Le mensonge en clinique pédopsychiatrique. Le symptôme de Pinocchio, enfant seul », thèse de doctorat, Université Lumière Lyon 2, non publiée.
  • Myquel M. (2000) in Dictionnaire de Psychopathologie de l’Enfant et de l’Adolescent, sous la direction de D. Houzel, M. Emmanuelli, F. Moggio, Paris, PUF, p. 416 et 432.
  • En ligneVeuillet C. (2001). La démarche d’adoption : le mythe de l’enfant sauveur-sauvé », Dialogue n° 151, Ères, p. 95-101.
  • Winnicott D. W. (1956). « La tendance antisociale », De la Pédiatrie à la Psychanalyse, Paris, Payot, 1969.
Bernard Chouvier
Professeur, Université Lumière Lyon 2
Psychothérapeute
Avenue Pierre-Mendès-France
69676 Bron Cedex
Véronique Masuy
Docteur en psychologie, thérapeute familiale
CMP Secteur I.O.
1, 4, rue d’Antrechaus, Toulon
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
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Mis en ligne sur Cairn.info le 02/04/2012
https://doi.org/10.3917/difa.012.0099
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