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Derrière la définition d’un corpus de textes et d’auteurs se conjuguent des enjeux politiques et culturels considérables dans les pays occidentaux comme en dehors d’eux. Dans les universités du monde entier, le corpus suit globalement celui de l’université occidentale ; et, dans l’histoire de la philosophie, la philosophie « occidentale » domine le monde. Sa périodisation, sa définition, sa remise en question obéissent à la problématique de la sécularisation : rationalisme, abstraction, logique. On fait rimer modernité et philosophie, avec l’idée que la philosophie est ce qui s’est progressivement dégagé de la gangue de la théologie et fournit les outils critiques qui permettent notamment de renvoyer à des « sagesses » les pensées non conceptuelles. Mais des philosophes nés dans des géographies autres qu’européennes et travaillant dans le sillage des processus de décolonisation remettent ce cadre en question afin de soutenir le projet de libération de la domination occidentale, une domination qui, selon eux, persiste au-delà des indépendances.
Cette persistance est l’objet de la pensée qui s’est appelée elle-même « décoloniale ». Elle est née et elle s’est développée en Amérique latine comme un mouvement théorique dont la visée principale est de spécifier la condition politique et économique présente des peuples et des États de cette région. La persistance cachée de la domination coloniale y a été désignée sous le nom de « colonialité du pouvoir », notion forgée par le Péruvien Aníbal Quijan…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 05/02/2020
- https://doi.org/10.3917/deba.208.0151
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