CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Gibier ou bête d’élevage, sauvage ou domestique, auxiliaire ou prédateur, objet d’affection ou de consommation, l’animal se définit essentiellement en fonction du rapport que l’homme a toujours entretenu avec lui. Son histoire se confond avec celle de l’humanité. Nous avons par conséquent été conduite à nous demander dans quelle mesure Balzac s’est fait l’écho du trait de civilisation que constituaient les comportements de ses contemporains à l’égard des bêtes qu’ils côtoyaient. L’examen de l’œuvre atteste la présence de l’animal non seulement dans le discours comme l’ont montré un certain nombre d’études portant sur les métaphores [1] (celles-ci s’attachant d’ailleurs plus à l’efficacité expressive du référent animal qu’au mode de pensée qui le sous-tend) mais aussi, en premier lieu, sur le plan du récit ainsi que pouvait le laisser supposer la démarche d’un romancier soucieux de refléter les réalités et le paysage culturel de son époque. Damien Baldin dans son Histoire des animaux domestiques aux xixe et xxe siècles cautionne cette démarche en soulignant que « les utilisations que les hommes font [des animaux] et les sentiments qu’ils éprouvent pour eux deviennent autant de phénomènes historiques qu’il s’agit de mettre en miroir avec les évolutions sociales et idéologiques » et que des ethnologues comme Edward Evans-Prichard, Claude Lévi-Strauss, Edward Leach ont prouvé que « les animaux sont au centre des systèmes de pensée et que les rapports entretenus avec eux sont intimement liés aux rapports sociaux [2] ». Un tel constat n’avait pas échappé à leur prédécesseur, historien des mœurs de son époque sans nul doute conscient, lui aussi, que « la domestication, les discours et les pratiques liés aux animaux sont indissociables d’un contexte politique et culturel et révèlent des processus qui concernent l’ensemble de la société [3] ». C’est ce que nous proposons de montrer dans cette étude sans pour autant laisser de côté l’exploitation romanesque que l’écrivain tire d’un tel thème, les deux projets restant toujours, sous sa plume, intimement liés.

2Nous nous demanderons au préalable quelle pratique personnelle Balzac avait pu avoir du monde animal et de l’animal domestique en particulier. A priori ni chien ni chat n’ont été les compagnons de ses longues veilles : ni sa correspondance ni les témoignages de ceux qui l’ont connu n’en font état. Laure Surville nous apprend toutefois dans un ouvrage postérieur à la mort de l’écrivain qu’étant enfant il « s’était intimement lié » avec le « gros chien de garde » de ses grands-parents Sallambier. Elle rapporte une scène ayant eu lieu lors d’une séance de lanterne magique : « Il sort du salon et rentre traînant le bon chien à qui il dit : Assieds-toi là, Mouche, et regarde, ça ne te coûtera rien, c’est bon papa qui paye [4] ! ». Dans Splendeurs et misères des courtisanes à propos des levrettes offertes par Nucingen à Esther et semblables à celles que possédait Lamartine (« d’une race célèbre, et qui finira par porter le nom du grand poète contemporain »), nous avons un des rares passages où perce semble-t-il un sentiment personnel : « Il est inutile de parler de la gentillesse, de la blancheur, de la grâce de ces animaux, faits pour l’appartement et dont les mœurs avaient quelque chose de la discrétion anglaise », note le narrateur [5].

3Nous savons d’autre part que Balzac a possédé des chevaux pour l’attelage qui lui ont causé bien des soucis financiers comme en témoigne sa correspondance où il évoque la nécessité de « travailler pour ces gredins de chevaux » qu’il regrette de ne pouvoir « nourrir de poésie » [6]. L’un d’eux s’appelait Briton, nom dont il a gratifié la monture de Charles Grandet qui, ruiné, préfère offrir « cette admirable bête » à son ami Alphonse plutôt que de la vendre à un prix désavantageux [7], ce que dut pourtant accepter son réel propriétaire étranglé par les dettes [8]. Certes cette acquisition de chevaux était liée à un besoin de paraître inhérent au dandysme affiché par l’écrivain à une période de sa vie, au désir d’appartenir à une aristocratie du luxe et de l’élégance que signalait la possession d’animaux de race ; mais l’on ne peut nier qu’il ait été soucieux de leur bien-être puisqu’il recommande qu’on les sorte une demi-heure par jour au moins [9] en son absence, précaution élémentaire connue de tout propriétaire de chevaux. Une lettre à Mme Hanska nous apprend même qu’il a été particulièrement affecté par la mort de l’un d’entre eux [10]. Une lecture attentive de la correspondance nous révèle en outre un détail intéressant, à savoir qu’au moins à deux périodes de sa vie il a pratiqué l’équitation. Ainsi Louis-Philippe de Villers-La Faye invite son jeune ami à participer à une chasse au sanglier et précise que sa « rossinante » l’attend [11] : on se doute, même si le terme utilisé comporte une bonne dose de plaisanterie, qu’il ne s’agissait certainement pas d’un fringant coursier, néanmoins le fait est indubitable. Plus tard, lors de son expédition en Sardaigne, alors qu’il ne disposait à coup sûr d’aucun autre moyen de locomotion, Balzac réitéra ce qui n’était donc pas une première expérience et affirme avoir « fait 17 à 18 heures à cheval [12] ». « J’ai traversé des forêts vierges, penché sur le cou de mon cheval sous peine de vie […] car il fallait marcher dans un cours d’eau, couvert d’un berceau de lianes et de branches qui vous auraient éborgné, emporté les dents, cassé la tête », écrit-il à Mme Hanska et il ajoute : « À peine revenu de mon expédition, il a fallu songer à revenir, et sans prendre de repos, je me suis mis à cheval pour aller d’Alghiero à Sassari […] [13] ». Nous noterons au passage que sa corpulence déjà affirmée ne semble pas l’avoir le moins du monde gêné.

4Autre interrogation : l’écrivain a-t-il visité la ménagerie du jardin des Plantes, ouverte en 1794, qui comportait dès le début du xixe siècle fosse aux ours, fauverie, singerie, maison des reptiles, et où fut présentée en 1826 la première girafe importée en France ? Nous pouvons le supposer seulement grâce à certains indices, à défaut de preuve formelle. En effet, dans une lettre à Mme Hanska, il se plaint d’être seul et « comme le lion en cage du jardin des Plantes [il] bâille [14] » ; dans La Cousine Bette, Steinbock « enclin à la paresse […] offrait dans les yeux, comme ces lions encagés au jardin des Plantes, le désert que sa protectrice faisait en son âme [15] », et dans La Rabouilleuse Giroudeau est aperçu par Bridau « encagé comme un animal féroce dans une espèce de poulailler à chatière [16] ». C’est sans doute aussi là qu’il a pu observer « la vélocité mécanique des mouvements du singe [17] », attitude qui semble avoir particulière­ment retenu son attention puisqu’il s’y réfère dans L’Élixir de longue vie, comparant Don Juan Belvidéro jouissant avidement de son existence à « un singe voulant attraper des noix grollières » et la « dépouillant savamment » [18], et qu’il l’exploite aussi dans les Contes drolatiques : dans « La Pucelle de Thilhouze », le vieux seigneur se déhanche « comme ung singe voulant attraper des noix grollières  [19] », et dans « Le Dangier d’estre trop coquebin », l’image est amplement développée puisque nous y pouvons lire ce pittoresque passage qui paraît saisi sur le vif :

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Vites vous iamais cinge advenu de son pais d’oultre-mer auquel pour la prime foys est baillée noix grollière ? Cettuy cinge […] flaire et se tortille en mille cingeries, disant ie ne sçays quoy entre ses badigoinces. Hé de quelle affection, l’estudie ; de quelle estude, l’examine ; en quel examen, la tient ; puys, la tabutte, la roule, la sacqueboutte de cholère […]. Aultant en fit pauvre coquebin […] [20].

6En ce lieu de promenade très fréquenté peut-être a-t-il pu noter cette particularité qu’il attribua ensuite dans La Fille aux yeux d’or au mulâtre Christemio, dont les yeux étaient « enchâssés, comme ceux d’un vautour, par une membrane bleuâtre dénuée de cils [21] », et dans Splendeurs et misères des courtisanes à Fil-de-Soie doté « de petits yeux couverts, comme ceux des oiseaux de proie, d’une paupière grise, mate et dure  [22] ». Pareillement, pouvons-nous imaginer de façon tout-à-fait plausible qu’il y a été fasciné par le regard clair et magnétique du tigre qu’il attribue plus d’une fois à ses personnages, de Corentin dans Les Chouans[23] à Asie et Carlos Herrera dans Splendeurs et misères des courtisanes[24] en passant par Mlle Gamard dans Le Curé de Tours[25] ou M. de Mortsauf dans Le Lys dans la vallée[26] et qui finit par échoir à Fraisier dans Le Cousin Pons [27]. Il n’est pas exclu non plus que l’admiration suscitée par la panthère d’Une passion dans le désert ait d’abord trouvé sa source dans un tête à tête vécu directement sous le ciel parisien, au jardin des Plantes, plutôt qu’à partir de l’illustration d’un ouvrage scientifique par exemple comme en témoigne ce passage où non seulement la pose de l’animal est magnifiquement reproduite mais où même un détail inattendu comme le bruit qu’elle émet en dormant figure : « Cette tranquille et redoutable hôtesse ronflait dans une pose aussi gracieuse que celle d’une chatte couchée sur le coussin d’une ottomane. Ses sanglantes pattes, nerveuses et bien armées, étaient en avant de sa tête qui reposait dessus, et de laquelle partaient ces barbes rares et droites, semblables à des fils d’argent [28] ».

7Les sources livresques de Balzac ne sont pourtant pas inexistantes. Très tôt il s’intéressa aux ouvrages des naturalistes ainsi qu’il le révèle dans l’« Avant-propos » de La Comédie humaine mais il est évident que ce fut d’abord un système philosophique, l’idée d’unité de composition, qu’il en retint avant d’y puiser d’autres informations [29]. La correspondance nous apprend aussi qu’il pratiqua Buffon lors de ses séjours à L’Isle-Adam et que c’est lui qui fut chargé par M. de Villers-La Faye de trouver les ouvrages qui manquaient à sa collection [30]. L’érudition balzacienne cependant a découvert que c’est essentiellement dans le Dictionnaire classique d’histoire naturelle publié entre 1822 et 1830 que l’écrivain a trouvé des renseignements dont il s’est fait ensuite l’écho. J.-H. Donnard l’a montré en ce qui concerne la loutre dans Les Paysans : son inhabituel pelage tacheté de blanc est directement issu de cet ouvrage scientifique puisque l’on peut effectivement y lire : « On a trouvé quelquefois des individus dont le pelage était varié de petites taches blanches qu’on a regardées comme l’effet de la maladie albine [31] ». La même remarque vaut pour toutes les précisions concernant l’onagre et les différentes espèces de canards rencontrées dans La Peau de chagrin, puisées respectivement, ainsi que l’a autrefois prouvé Moïse Le Yaouanc [32], dans un article d’Antoine Desmoulins et dans celui de Drapiez du même dictionnaire. La remarque dans Le Cousin Pons sur « les boas gorgés d’un taureau [qui] sont si bien ivres qu’ils se laissent tuer [33] » est issue, probablement, de la même source comme l’est la référence à la respiration bruyante du phoque dont est gratifié le baron Hulot dans La Cousine Bette[34]. Le Dictionnaire classique d’histoire naturelle affirme à propos du boa : « Quelquefois on a surpris ce monstre au milieu de cette pénible opération [de digestion], et alors il est facile de lui donner la mort, parce qu’il ne peut ni fuir, ni se débarrasser de l’objet, qui occasionne la déformation de la tête [35] ». Quant aux phoques, on peut lire dans le même ouvrage que « leur respiration à terre est toujours gênée et ne s’exécute que par des inspirations fortes et aidées de tous les muscles, et notamment des différentes fibres intercostales [36] ». Le long développement sur la larve du hanneton et sur les insectes parasites des plantes rencontré dans Les Paysans n’y figure pas, mais Balzac y dévoile lui-même d’autres sources érudites en citant « les grands naturalistes, comme Latreille, le comte Dejean, Boisgelin de Paris, Genè de Turin » qui sont arrivés « à trouver 150 000 familles d’insectes visibles [37] ».

8Il est donc rare de prendre l’auteur de La Comédie humaine en défaut. Certains ont cru pouvoir le faire, se gaussant par exemple de la présence de grillons et de cigales dans le parc des Aigues, aux confins du Morvan, dans ce même roman. Cela procura d’ailleurs au Charivari l’opportunité d’un amusant article [38]. Mais Madeleine Ambrière-Fargeaud dans son édition de La Recherche de l’Absolu s’est inscrite en faux contre l’accusation d’erreur portant sur ces mêmes grillons et cigales, présents aussi dans le petit jardin des Claës à Douai, en nous apprenant « que parmi les huit variétés connues de ces insectes, deux, les plus petites, se rencontrent en Île-de-France, dans le Nord et même en Angleterre [39] ».

9Quoi qu’il en soit, les sources livresques de Balzac concernant les animaux nous semblent mineures au regard de la profusion de remarques issues à n’en pas douter de l’observation de son environnement immédiat. Qu’elles concernent les éléments comparants des images utilisées ou les animaux réels mis en situation dans l’intrigue, celles-ci sont toujours d’une justesse étonnante et témoignent de l’acuité du regard de l’écrivain qui, loin d’être le citadin reclus dans son cabinet de travail que l’on pourrait imaginer, a prêté une attention constante à des détails qui peuvent sembler minimes, mais qui constituent la trame de la vie quotidienne en ville ou à la campagne. Nous ne citerons que quelques exemples révélateurs. Les animaux domestiques fournissent bien sûr un corpus important. Ainsi la référence au chien permet au narrateur d’évoquer dans Les Chouans l’attitude des conscrits en marche : « Ils examinaient alors à la dérobée les bois, les sentiers et les rochers qui encaissaient la route, mais de l’air avec lequel un chien, mettant le nez au vent, essaie de subodorer le gibier […] [40] ». Quant à Marche-à-terre, il « était ramassé de telle sorte que, de loin comme de près, l’espion le plus rusé l’aurait facilement pris pour un de ces gros chiens de roulier, tapi en rond et qui dorment, la gueule placée sur leurs pattes [41] ». L’utilisation du démonstratif déictique souligne l’appel à une expérience commune au narrateur et au lecteur du fait de la référence à des animaux familiers. Il en est de même dans ce passage d’Adieu où Stéphanie désormais dépourvue de toute intelligence humaine nous est ainsi présentée : « elle regardait le sucre et détournait la tête alternativement, comme ces malheureux chiens à qui leurs maîtres défendent de toucher à un mets avant qu’on ait dit une des dernières lettres de l’alphabet qu’on récite lente­ment [42] ». Pareillement, le lecteur d’Une passion dans le désert n’était peut-être pas forcément instruit de l’attitude d’une panthère au repos, mais l’allusion à « un gros angora inquiet de tout, même des mouvements de son maître [43] » pouvait l’aider à se représenter celle-ci, et comment ne pas imaginer le désespoir et l’angoisse d’Esther qui imprime ses ongles dans les bras de Carlos Herrera « comme eût fait un chat qui se retient pour ne pas tomber dans un précipice où il ne voit pas le fond [44] » ? En fait, La Comédie humaine fourmille d’allusions à divers animaux, qui tirent leur efficacité de l’exactitude du trait qui les caractérise. Ainsi, Sabine furieuse d’être trompée par Calyste et en proie à une véritable crise d’hystérie « foula sa robe, son écharpe, toute sa toilette aux pieds absolument comme une chèvre prise dans le lacet de sa corde qui ne s’arrête en se débattant que quand elle sent la mort [45] ». Il est facile d’imaginer la précipitation de Mouche qui dans Les Paysans « fondit dans l’Avonne comme une grenouille effrayée [46] », ou le grouillement de la foule lors du bal à l’Opéra par lequel débute Splendeurs et misères des courtisanes, « foule noire, lente et pressée, qui va, vient, serpente, tourne, retourne, monte, descend, et qui ne peut être comparée qu’à des fourmis sur leur tas de bois [47] ». Évoquant l’attitude de Mme de Mortsauf à son égard, Félix de Vandenesse recourt à cette image inattendue mais fort suggestive pour qui a eu l’occasion d’assister à pareil phénomène : « J’étais l’objet auquel s’était rattachées ses pensées, ses sensations méconnues, comme un essaim s’attache à quelques branches d’arbre fleuri […] [48] ». Un bestiaire fort conséquent pourrait ainsi être constitué, Balzac ayant su plus d’une fois se faire peintre animalier et naturaliste au fait des mœurs non seulement des êtres humains mais aussi des bêtes, évoquant par exemple dans Eugénie Grandet l’anxiété de la mère et de la fille, « sentiment d’ailleurs si naturel, que les animaux domestiques l’éprouvent au point de crier pour le faible mal d’une correction, eux qui se taisent quand ils se blessent par inadvertance [49] », ou notant dans La Peau de chagrin : « Si quelque volatile est endolori parmi ceux d’une basse-cour, les autres le poursuivent à coups de bec, le plument et l’assassinent [50] ».

10Certes, ces remarques, si justes soient-elles ne portent pas sur des traits de civilisation spécifiques. Mais elles relèvent d’une juste appréhension des choses de la nature et d’un manifeste intérêt pour celles-ci qui inscrit Balzac dans la mouvance de ce courant né au xviiie siècle pour s’épanouir au siècle suivant et qui vit apparaître les grands fondateurs des sciences naturelles modernes, Linné dont la première édition du Système de la nature date de 1735, Lamarck qui réalisa notamment la classification des invertébrés (1801), Geoffroy Saint-Hilaire avec son Tableau élémentaire de l’histoire naturelle des animaux (1797-1798), son antagoniste Cuvier et bien sûr Buffon dont l’Histoire naturelle parut de 1749 à 1789 et connut de nombreuses rééditions. Quantité d’autres savants, bien sûr, dans cette perspective, mériteraient d’être cités [51] mais il s’agit seulement de souligner que l’auteur de La Comédie humaine en puisant presque constamment dans l’immense réservoir de la diversité animale pour construire son œuvre réagissait avant tout en homme de son temps.

11Plus enracinées dans l’actualité quotidienne de la première moitié du xixe siècle sont d’autres observations. Ainsi, dans Le Médecin de campagne Benassis explique comment il a obtenu une modification très bénéfique des conditions de stabulation bovine dans le village où il s’est installé : « […] je prêchai donc l’assainissement des étables […]. Les vaches et les bœufs furent pansés comme il le sont en Suisse et en Auvergne [52] ». Ce passage ne relève pas de l’utopie et correspond précisément à une préoccupation naissante concomitante, comme nous l’apprend Damien Baldin, avec l’apparition significative d’un néologisme : la « zootechnie », terme attribué à Adrien de Gasparin, apparu dans les années 1830, et désignant la branche de l’agronomie qui traite de l’élevage et cherche à en améliorer le rende­ment [53]. Il est aisé de deviner que des habitudes séculaires furent difficiles à éradiquer comme le montre ce passage des Paysans, contre-point de la scène bucolique inaugurale : « De noirs et sales palis déshonoraient les abords du pavillon en enfermant des cochons sous des toits en planches, des poules, des canards dans de petits carrés dont le fumier s’enlevait tous les six mois [54] ». De même, une ordonnance préfectorale de 1829 rappelait qu’« il est défendu d’élever et de nourrir dans Paris aucuns porcs, pigeons, lapins, poules et volailles domestiques [55] ». Déjà Louis-Sébastien Mercier notait plaisamment : « La plupart [des pauvres] malgré les défenses de police, élèvent dans leur taudis quantité de lapins qu’ils nourrissent avec des feuilles de choux ramassées dans les rues. […] Qui dirait que les lapins vivent sous les tuiles, le lapin animal terrier [56] ? ». Il n’y a rien d’étonnant, par conséquent, à trouver en plein Paris, rue Neuve Sainte-Geneviève, chez Mme Vauquer, « une cour large d’environ vingt pieds, où vivent en bonne intelligence des cochons, des poules, des lapins [57] ». L’élevage d’animaux rencontrés chez le nourrisseur hôte de Chabert faubourg Saint-Marceau, dans une zone plus périphérique, semble un peu plus légal et témoigne en tous cas lui aussi de la réalité de l’époque : on pouvait y voir un mur « garni de cabanes grillagées où de vrais lapins faisaient leur nombreuse famille » et des enfants s’amuser avec un cochon [58]. Cette scène donne une idée de l’image encore rurale que pouvait offrir tout milieu urbain, même la capitale. « Veaux, vaches, cochons sont des animaux très présents dans la ville du xixe siècle, alors que l’interpénétration villes-campagnes est encore forte et que la consommation de viande ne cesse d’augmenter. Tous sont amenés au cœur de la ville pour y être tués et leur viande débitée », fait observer Damien Baldin [59]. Balzac n’insiste pas sur ce point, mais nous en trouvons parfois un discret écho au détour d’une comparaison faisant appel à « la chose vue » : le chevalier de Valois, par exemple, voyant ses espérances matrimoniales réduites à néant, dans La Vieille Fille, « se laissa faire comme un mouton qu’on mène à la boucherie [60] », tandis que Lucien de Rubempré, interrogé par le juge Camusot, était « semblable à l’animal que le billot de l’abattoir a manqué [61] ».

12Certains détails qui pourraient sembler relever uniquement de la fiction romanesque constituent des faits de civilisation justement observés. Ainsi en est-il du lien particulier tissé entre le pauvre et l’animal. Déjà l’auteur du Tableau de Paris au xixe siècle avait noté : « Plus les gens sont pauvres à Paris, plus ils ont de chats, d’oiseaux, etc. [62] », « partageant l’idée souvent répandue chez les élites du tournant du xixe siècle que la propriété d’animaux «inutiles» est une aberration économique au regard de la situation financière de la populace urbaine [63] ». Le lecteur de La Comédie humaine ne peut alors manquer de penser à Bourgeat, le pauvre porteur d’eau de La Messe de l’athée, qui pendant douze ans avait assisté à la messe en compagnie de son caniche [64], ou à La Fosseuse qui dans Le Médecin de campagne raconte comment elle s’était prise d’affection pour « un petit chien gentil comme une personne » : « Ce pauvre petit, dit-elle, est la seule créature qui dans ce temps-là m’ait jeté des regards d’amitié, je lui gardais mes meilleurs morceaux, il me connaissait, venait au-devant de moi le soir, n’avait point honte de ma misère, sautait sur moi, me léchait les pieds […]  [65] ». Il est un autre fait à notre avis peu connu, à savoir la place importante occupée par les oiseaux dans le bestiaire domestique du xixe siècle, et plus particulièrement par le canari. L’immense succès de ce spécimen exotique vint de la diminution de son coût en raison de sa production et de sa commercialisation en Allemagne, alors qu’il était autrefois importé directement de son île d’origine en Europe [66]. Balzac n’oubliera donc pas d’évoquer le bourgeois parisien dont Molineux incarne le type dans César Birotteau, « interrompant une quittance de loyer pour seriner un canari », et possédant dans sa salle à manger « deux cages pleines d’oiseaux [67] ».

13Mais l’animal le plus représentatif de l’animal domestique au xixe siècle est sans nul doute le cheval. Une place toute particulière lui est donc accordée dans La Comédie humaine. Comment eût-il pu en être autrement quand on sait que dans la ville de Paris uniquement, vers 1840, le nombre de chevaux s’élevait à trois millions [68] ? Il n’y a guère de roman où ne soit mentionnée la présence de cet animal : petits chevaux bretons des chouans [69], « grosse jument poussive » de Mlle Cormon [70], « joli cheval anglais à monter » de Victurnien d’Esgrignon [71], cheval pur-sang de du Tillet [72], « chevaux fringants qui avaient des roses à l’oreille [et] qui mordaient leur frein » de l’équipage de Mme de Beauséant [73] ou « magnifiques chevaux gris pommelés » de celui d’Esther [74], poney offert par M. de Mortsauf à son fils [75], cheval arabe de Félix de Vandenesse que lady Stanhope avait offert à lady Dudley et que celle-ci échangea contre un tableau de Rembrandt [76] ou simple cheval de louage « intrépidement » monté par Mlle de Kergarouët [77]… Une liste exhaustive de ce genre d’occurrences serait fort longue. Le paysage urbain et rural était de manière ordinaire animé par la présence des cavaliers et de leurs montures ou des voitures hippomobiles. Le roman balzacien épouse cette réalité. Ainsi l’itinéraire narratif du Médecin de campagne se trouve-t-il rythmé par les déplacements de Benassis et de Genestas. L’œuvre s’ouvre sur la vision de l’ancien militaire qui « par une jolie matinée de printemps suivait à cheval un chemin montagneux qui mène à un gros bourg situé près de la Grande Chartreuse [78] ». C’est en chevauchant que le médecin fait découvrir à son compagnon les transformations qu’il a obtenues dans le village et cette promenade est même l’occasion d’une course au grand galop pendant laquelle Genestas se fait devancer [79]. Alors qu’ils vont lui rendre visite, La Fosseuse devine la présence d’un inconnu car elle a « entendu le pas de deux chevaux [80] ». Une allure tranquille lors de la traversée d’une forêt est propice à la méditation : « Ils allèrent alors lentement et en silence, écoutant le pas de leurs chevaux qui résonnait dans cette galerie de verdure, comme s’ils eussent été sous les voûtes d’une cathédrale [81]. » Enfin, le roman se clôt sur une scène symétrique à celle qui l’inaugurait : Genestas ayant appris la mort de Benassis « commanda de seller son cheval, et se mit en route par une de ces matinées de décembre où le ciel est couvert d’un voile grisâtre […]  [82] », le parcours réel soulignant en quelque sorte le parcours romanesque. De même, les allées et venues, entre Guérande et Les Touches notamment, de Calyste du Guénic qui parfois va « d’un train à crever son cheval [83] », scandent la première partie de Béatrix.

14Nous pouvons en outre avoir une idée de la puissance de l’ancrage de ce fait de civilisation dans les mentalités en constatant combien la référence au cheval apparaît naturellement de manière récurrente sous la plume de Balzac lui-même dans sa correspondance. Citons quelques exemples. Tantôt, impatient d’aller retrouver Mme Hanska, il « piaffe comme un cheval [84] », tantôt au contraire, croulant sous de constants travaux, il s’identifie à « un pauvre cheval fourbu [85] ». À Saché, il se « laisse aller à la paresse du cheval qui se refait d’une course [86] ». Alors qu’il est en pleine rédaction d’un nouvel ouvrage, il se dit « lancé dans une course au clocher [87] », ses idées « ont frappé du pied comme les chevaux retenus longtemps à l’écurie [88] », ou bien c’est son imagination qui est assimilée à un beau cheval [89]. Enfin, quand sa correspondante s’inquiète des dépenses excessives auxquelles il se livre, il tente de la rassurer en lui disant : « Vous êtes meilleure que l’écuyer pour dompter les bêtes [90] ». Homme de son époque, il connaît bien les usages liés à la pratique du cheval. Ainsi parle-t-il des « guides » du cheval attelé de du Tillet et non de ses rênes [91]. Il sait que cet animal peut être facilement effrayé : celui de Maxime de Trailles « fit un léger écart en se précipitant vers le perron » lorsque Goriot ouvrit son parapluie en passant à côté de lui [92]. Il est au courant des qualités d’endurance du cheval barbe : « Le mien gravit les montagnes au grand galop sans mouiller son poil, et trotte d’un pied sûr le long des précipices », affirme Benassis [93]. Il faut aussi, à notre avis être un tant soit peu connaisseur pour être capable de décrire avec une telle justesse dans le conte drolatique intitulé Le Péché vesniel la leçon d’équitation du jeune Jallanges, « lequel, soubs le commandement d’[un] vieil escuïer, tournoyt et viroyt sur ung beau cheval, en soy ployant aux mouvements de la beste, descendant, remonstant, par voltes et passes, fort gentement, tenant hault la cuisse […] [94] ». La séance de voltige équestre pratiquée par Malaga dans La Fausse Maîtresse est décrite avec le même brio et la même exactitude [95].

15Cependant, si les occurrences concernant le cheval sont aussi nombreuses dans La Comédie humaine c’est surtout en raison du contenu sociologique qu’elles recèlent. Il est évident que le preux chevalier médiéval monté sur son destrier et s’illustrant sur les champs de bataille n’est plus qu’un lointain souvenir. Il est mort avec Chabert qui finit sous son cheval car « la bête et le cavalier s’étaient abattus comme des capucins de cartes [96] ». Comme l’écrit Jean-François Richer : « La plus grave perte de Chabert fut d’abord celle de son cheval. Là est tout son drame : le colonel est un cavalier sans monture. […] Cette chute, cette séparation violente de l’animal qui le rendait adéquat, puissant et glorieux, sous l’ère napoléonienne, s’inscrira dans sa psyché avec la puissance traumatique d’une amputation [97]. » Une scène d’une violence identique avec une légère variante apparaît d’ailleurs dans le récit fait par Genestas à Benassis lorsqu’il lui raconte comment son ami Renard lui sauva la vie alors qu’un ennemi allait le transpercer de sa lance : « Renard le voit, pousse son cheval entre nous deux pour détourner le coup ; sa pauvre bête, un bel animal, ma foi ! reçoit le fer, entraîne en tombant Renard et le Cosaque […]  [98] ». Le colonel Philippe de Sucy, certes, n’est pas désarçonné mais se voit privé de sa jument d’une manière horrible puisqu’elle finit dépecée « avec autant d’adresse qu’auraient pu le faire des garçons bouchers de Paris » et dévorée par des soldats affamés, lors de la retraite de Russie [99]. Quant au protagoniste d’Une passion dans le désert, c’est aussi un soldat dépourvu de son cheval puisque celui-ci est mort épuisé sous les éperons de son cavalier fuyant l’ennemi lors de la campagne d’Égypte [100]. La bête finira par servir de pâture à la panthère tandis que son maître sera réduit à amadouer − on sait par quels moyens − le fauve : triste facette de l’épopée napoléonienne ! Le héros guerrier a fini par céder la place à ces petits jeunes gens pleins de morgue paradant de préférence sur un pur-sang, cheval de race prestigieuse et fort coûteuse importée d’Angleterre à partir de la Restauration et devenue à la mode. Le compagnon indispensable sur le champ de bataille s’est alors transformé entre les mains de jeunes aristocrates oisifs ou de simples parvenus en un moyen de paraître. Dès son arrivée à Paris, Victurnien d’Esgrignon « eut cinq chevaux, il fut modéré : de Marsay en avait quatorze [101] ». Ce dernier, lit-on dans La Fille aux yeux d’or, « montait à cheval de manière à réaliser la fable du centaure ; conduisait avec grâce une voiture à grandes guides [102] », qualités enviables certes, mais en réalité assez réductrices… Ceci vaut plus que jamais pour le malheureux Paul de Manerville dont on connaît la médiocre destinée et qui pourtant a reçu cet éloge quelque peu perfide de la part du célèbre dandy : « Je te rends justice : tu es un parfait cavalier ; personne mieux que toi ne sait rendre et ramasser les guides, faire piaffer un cheval, et rester vissé sur ta selle [103] ». La scène où, dans Le Père Goriot, tandis qu’Anastasie reste à sa fenêtre pour le voir partir, Maxime de Trailles quitte l’hôtel de Restaud « faisant piaffer son cheval, et agitant son fouet [104] », donne une idée de la superficialité du personnage. Quant à Lucien de Rubempré qui doit paraître riche s’il veut épouser Clotilde de Grandlieu, « [il] avait trois beaux chevaux dans son écurie, un coupé pour le soir, un cabriolet et un tilbury pour le matin [105] ». Du Bousquier, pour sa part, après avoir épousé Mlle Cormon, manifeste ostensiblement son ascension sociale, « venant du Prébaudet au Val-Noble pour surveiller ses travaux, dans un tilbury attelé d’un nouveau cheval, ayant à ses côtés René en livrée [106] ». Quand il reste l’attribut d’une aristocratie de naissance, le cheval, dans La Comédie humaine, malheureusement ne sert plus qu’à désigner la futilité de ses préoccupations : la conversation des parents de la duchesse de Langeais disputant du mérite respectif de leurs bêtes pendant que se noue le drame en est le témoignage [107] . Comme le rappelle Damien Baldin, le monde des courses hippiques constitue dès lors le spectacle d’une élite qui donne ainsi à voir sa supériorité sociale et « l’affrontement par la course mime pacifiquement celui de chevaliers et de cavaliers combattants, quand la symbolique des casaques des jockeys mime l’héraldique médiévale [108] ». Arthur de Rochefide, en digne représentant de son époque, « se glorifiait donc principalement d’être le sultan d’un sérail à quatre pattes gouverné par un vieil écuyer anglais, et qui par mois absorbait de quatre à cinq mille francs. Sa spécialité consistait à faire courir […]  [109] ». Le monde du cheval est donc devenu un monde du spectacle. Il n’est pas inintéressant, dans cette perspective, de noter que c’est à partir de la mise en scène du dressage des chevaux que le cirque se structura, et qu’il prospéra au xixe siècle grâce à de grandes dynasties d’écuyers comme celle des Dejean et des Franconi [110]. Balzac nous en offre une magnifique illustration avec la prestation de Malaga dans La Fausse Maîtresse [111].

16Marqueur des évolutions sociales, l’animal appartient aussi à la réalité romanesque. Il joue alors un rôle plus ou moins important dans l’intrigue. Le cas extrême est sans doute celui de la panthère, véritable protagoniste d’Une Passion dans le désert : « Comparer une femme à une panthère, c’est banal. Renverser la métaphore (traiter la panthère comme une femme et en tirer toutes les conséquences), c’est ce qu’ose Balzac dans une démonstration très risquée de la réversibilité des figures de rhétorique », écrit plaisamment Philippe Berthier [112]. Chabert fut sauvé par la chute de sa monture : « En me renversant, soit à droite, soit à gauche, j’avais sans doute été couvert par le corps de mon cheval qui m’empêcha d’être écrasé par les chevaux [de la charge de Murat] ou atteint par des boulets [113] », explique-t-il à Derville, et peut-être eût-il mieux valu qu’il mourût sur le champ de bataille car nous savons quelle mésaventure l’attendait. Les dégâts provoqués par les vaches de Courtecuisse dans la forêt des Aigues [114] sont l’une des causes du conflit qui oppose Montcornet aux paysans. Le chien du garde Michaud en a fait les frais car « on avait tranché le cou à Prince, et pour l’empêcher d’aboyer, on l’avait amorcé avec un peu de petit salé qu’il tenait entre sa langue et le voile du palais » : « Il y avait là quelqu’un qui ne voulait pas être surpris par moi, dit Michaud, et qui conséquemment faisait un délit grave […] » [115]. Il s’agissait de détériorer les arbres, on s’en souvient, en imitant les trous provoqués par les larves du hanneton [116]. Le garde finira d’ailleurs par être tué d’une balle dans le dos et c’est l’arrivée de son cheval emballé rentré seul à l’écurie, « les brides cassées, les jambes en sang », qui fera pressentir la tragédie [117]. Nous sommes loin de la scène comique de la chasse à la loutre, véritable morceau de bravoure digne de Molière, où l’on voit en la personne de Blondet un Parisien naïf joué par le rusé père Fourchon [118], ruse évidemment annonciatrice de la suite d’une intrigue où la perfidie n’a d’égale que la cruauté. Dans La Rabouilleuse des rats introduits dans la réserve de grains de Fario sont censés y produire des ravages ayant une apparence naturelle, mais c’est la découverte de l’écureuil fourni par le fils Goddet qui fera basculer la farce dans le registre tragique puisque l’Espagnol n’hésitera pas, pour se venger, à poignarder Maxence Gilet [119]. Véritable catalyseur de l’intrigue est aussi en quelque sorte la monture de Calyste du Guénic qui dans Béatrix révèle à Sabine qu’elle est de nouveau trahie pour sa rivale : « L’état du cheval dont la bouche écumait la frappa. D’où vient-il ? » se demande-t-elle, et le titre du chapitre concerné : « Les chevaux ne mentent pas encore » est significatif [120]. Dans Splendeurs et misères des courtisanes les animaux ne jouent pas un rôle moins important. Ainsi, grâce à la divagation de ses chevaux et aussi, il est vrai, à l’ivresse de son cocher qui les laisse aller, Nucingen a-t-il la possibilité d’entrevoir Esther : « À la mollesse des guides, les chevaux comprirent l’état du cocher […], devenus les maîtres et attirés par cette curiosité que tout le monde a pu remarquer chez les animaux domestiques, ils s’arrêtèrent, dans un rond-point quelconque, devant d’autres chevaux […] ». Ces bêtes sont en quelque sorte les agents de l’intrigue :

17

Quand la calèche ne roula plus, le baron assoupi s’éveilla […] ; puis il fut surpris par une vision céleste […]. Il faisait un clair de lune si magnifique qu’on aurait pu tout lire, même un journal du soir. Par le silence des bois, et à cette lueur pure, le baron vit une femme seule qui tout en montant dans une voiture de louage, regarda le singulier spectacle de cette calèche endormie.

18Désormais Nucingen sera hanté par l’image de « la divine inconnue » aperçue, opportunité machiavéliquement exploitée ensuite par Herrera [121]. Dans le même roman Asie, déguisée en douairière, a pu pénétrer dans le Palais de justice pour communiquer avec le faux prêtre, et un chien lui permet de mener à bien son manège : « Badinant avec un sac à monture en or, elle partageait son attention entre les murailles du Palais où elle errait évidemment pour la première fois et la laisse d’un joli kings’dog.» Cet animal lui sert de prétexte pour arriver ensuite à s’échapper. En effet faisant semblant d’avoir perdu son chien, « elle atteignit la galerie marchande et se précipitant vers un escalier en disant : “Le voilà !...” Cet escalier était celui qui mène à la cour de Harlay, par où, sa comédie jouée, Asie alla se jeter dans un des fiacres qui stationnent au quai des Orfèvres […] [122] ». Quant à Roméo, l’un des lévriers offerts par Nucingen à Esther, il a le sort voulu par son nom et annonce celui de sa maîtresse, puisque celle-ci expérimente sur lui le poison qui servira à son suicide [123].

19La présence de l’animal dans La Comédie humaine ne peut être réduite cependant à son impact sur l’intrigue, même, nous venons de le voir, s’il est parfois essentiel. La signification psychologique en est aussi importante. Il est évident que certaines bêtes servent de substituts affectifs à leurs propriétaires. Devenue veuve, Agathe Bridau « se donna deux grandes cages d’oiseaux, l’une pleine de serins, l’autre d’oiseaux des Indes. Elle s’adonnait à ce goût enfantin depuis la perte, irréparable pour elle comme pour beaucoup de monde, qu’elle avait faite ». Son appartement d’ailleurs garde les stigmates de ce sentiment compensatoire : « Les chats y faisaient leur domicile sur les bergères ; les serins, mis parfois en liberté, y laissaient des virgules sur tous les meubles. La pauvre bonne veuve y posait pour eux du millet et du mouron en plusieurs endroits. Les chats y trouvaient des friandises dans des soucoupes écornées » [124]. Le chevalier du Halga confie à Mme du Guénic qu’il tient plus à sa chienne qu’à sa vie, car celle-ci est « la petite-fille de la délicieuse Thisbé, chienne de Mme l’amirale de Kergarouët », son grand amour que la mort lui a ravi. « Cette petite est en tout point semblable à celle qu’elle caressait de ses belles mains, et qu’elle prenait sur ses genoux. Je ne regarde jamais Thisbé sans voir les mains de Mme l’amirale », avoue-t-il [125]. Thaddée Paz quant à lui semble trouver une compensation à son amour malheureux pour Clémentine Laginska dans le pansage de la jument de la comtesse : l’érotisme de la notation pour être discret n’en est pas moins réel [126] et le transfert de nom qu’a signalé René Guise a de quoi laisser rêveur : Malaga, la prétendue maîtresse du Polonais, avait d’abord été baptisée Cora, le nom même de la jument de Clémentine [127]… L’animal, substitut de la personne, apparaît aussi de manière évidente dans le fantasme de Goriot déclarant à propos de ses filles : « J’aime les chevaux qui les traînent, et je voudrais être le petit chien qu’elles ont sur leurs genoux [128]. » Quant à Molineux, il est permis de penser que les serins et les chats dont il est entouré [129] répondent moins à un attachement vrai qu’à un besoin de jouir d’une certaine subordination affective. La cousine Bette, pour sa part a inversé les termes de l’équation pour aboutir à cette situation d’autant plus monstrueuse qu’elle en a parfaite­ment conscience : « […] je n’ai ni chat, ni serin, ni chien, ni perroquet ; il faut qu’une vieille bique comme moi ait quelque petite chose à aimer, à tracasser ; eh bien… je me donne un Polonais [130] ».

20« Le xixe siècle sera le siècle de «l’animalomanie». Artistes et écrivains sont conquis par l’idée de la bestialité humaine. Les illustrateurs à la mode : Grandville, Gavarni, Daumier ou Cruikshank en Angleterre font communément le portrait de la société bourgeoise sous des traits animaux », écrit Bertrand Marret [131]. La physiognomonie tout particulièrement, avec Charles Lebrun, Petrus Camper et bien sûr Lavater, a montré la frontière indécise entre l’homme et l’animal. Nous ne reviendrons pas sur ce point concernant l’auteur de La Comédie humaine, le sujet ayant déjà été amplement traité [132]. Nous soulignerons toutefois qu’il arrive que Balzac pousse jusqu’à ses extrêmes conséquences le phénomène. Ainsi Stéphanie de Vandières manifeste réellement dans Adieu un comportement animal, ayant même perdu l’usage de la parole. Son ancien amant découvre cet étrange mais significatif manège : « elle grimpa sur un faux ébénier, se nicha dans la houppe verte de cet arbre, et se mit à regarder l’étranger avec l’attention du plus curieux de tous les rossignols de la forêt [133] ». Elle quémande ensuite un sucre comme un chien. Il lui arrivait aussi de « visiter les poches de son ami par des gestes qui avaient la vélocité mécanique des mouvements du singe [134] » : « […] tu es heureuse, rien ne te gêne ; tu vis comme l’oiseau, comme le daim [135] », prétend le médecin qui l’a recueillie et qui est son oncle. D’autre part, il nous semble qu’en certains cas l’animal réel constitue par une espèce d’osmose le double caricatural de son propriétaire. Ainsi le gros carlin de Mlle Gamard est-il aussi peu aimable que sa maîtresse : le malheureux abbé Birotteau s’est adressé affectueusement à lui, mais « ce personnage […] leva […] ses petits yeux perdus sous les plis formés dans son masque par la graisse, puis il les referma sournoise­ment [136] ». La « grosse jument poussive [137]» de Mlle Cormon est dotée du même embonpoint que la vieille fille. Cette dernière, animée par la perspective d’un mariage, « vol[ait] par les escaliers comme un éléphant auquel Dieu aurait donné des ailes [138] », et les habitants d’Alençon purent observer la même précipitation chez sa jument animée d’un « galop fou [139] ». Pénélope cependant mourut de pleurésie quarante jours avant le mariage de sa propriétaire [140], mort préfigurant en quelque sorte la triste destinée et la lente agonie morale du personnage. Enfin, lorsque dans Le Colonel Chabert Derville rend visite à la comtesse Ferraud, celle-ci « déjeunait en jouant avec un singe attaché par une chaîne à une espèce de petit poteau garni de bâtons en fer [141] ». Le détail est loin d’être innocent. Cet animal est réputé pour imiter les comportements humains. L’ex-épouse du colonel, elle, mime la femme comme il faut qu’elle n’a pas toujours été étant donné le passé de prostituée que nous lui connaissons, et surtout elle a imaginé pour préserver sa position sociale et sa fortune, avec beaucoup d’habileté, un manège diabolique auquel Chabert sera sur le point de se laisser prendre. Il n’est pas inutile de rappeler que dans l’iconographie chrétienne le singe est souvent l’image de l’homme dégradé par ses vices, en particulier la luxure, la cupidité et la malice [142]. Dans cette perspective, le singe de Mme Ferraud est plus qu’un animal de compagnie : il est l’incarnation éloquente de sa perversité.

21Ceci nous conduit à souligner combien la charge symbolique dont certains animaux sont investis enrichit la signification du texte. Ainsi, le mystérieux barbet, fidèle compagnon de Bartholoméo dans L’Élixir de longue vie, nous semble-t-il, tel Cerbère ou Anubis, rejoindre le cortège des chiens mythiques, gardiens des enfers ou psychopompes. Plus proches de nous, des superstitions populaires attestent aussi ce lien du chien avec la mort dont il sentirait l’approche et qu’il signalerait par ses hurle­ments [143]. Or, au moment où Don Juan interrompt le retour à la vie de son père, « un gémissement inattendu mais terrible, se fit entendre. Le pauvre barbet expirait en hurlant [144]. » En faisant de lady Dudley une excellente cavalière, Balzac puise encore à une source culturelle bien connue de son lecteur et Félix de Vandenesse en dégage lui-même la signification : « J’ai remarqué depuis que la plupart des femmes qui montent bien à cheval ont peu de tendresse. Comme aux amazones, il leur manque une mamelle, et leurs cœurs sont endurcis en un certain endroit, je ne sais lequel [145] ». Le Dictionnaire des symboles explicite d’ailleurs cette défaillance : « Dans la mythologie grecque, elles symbolisent les femmes tueuses d’hommes : elles veulent se substituer à l’homme, rivaliser avec lui en le combattant au lieu de le compléter… Cette rivalité épuise la force essentielle à la femme, la qualité de mère et d’amante, la chaleur d’âme [146] ». Pareil commentaire coïncide on ne peut mieux avec la personnalité de la dangereuse Anglaise dont Félix dit qu’« elle se faisait un jeu de froisser [son] cœur et d’humilier [son] esprit [147] ». Nous ajouterons que dans la Bible, le cheval est le signe de la puissance orgueilleuse par opposition à l’âne qui, lui, évoque douceur et humilité [148] et que bien des mythologies en font le symbole de l’impétuosité du désir ainsi que de la jeunesse et de la vitalité triomphante [149]. Il n’est pas étonnant, dans cette perspective, de voir cet animal lié à celle qui « valait tout un sérail [150] » mais qui est capable au moment de la rupture de considérer son amant avec la plus grande morgue, le toisant « comme elle eût fait d’un gentilhomme campagnard qu’on lui aurait présenté [151] ». Quant au chat, il ne jouissait guère au XIXe d’un préjugé plus favorable qu’aux siècles précédents. Le Larousse du xixe siècle le disait « faux, dissimulateur, fuyant », et il était en outre méprisé pour sa sexualité jugée débridée [152]. Buffon parlait de « sa malice innée » et ajoutait : « de voleurs déterminés, ils deviennent seulement, lorsqu’ils sont bien élevés, souples, flatteurs comme les fripons ; ils ont la même adresse, la même subtilité, le même goût pour faire le mal, le même penchant à la petite rapine [153] ». Une planche représente d’ailleurs un chat domestique sur une table de cuisine, scène avec laquelle un passage du Père Goriot pourrait bien avoir quelque parenté puisque Mme Vauquer surprend son chat Mistigris qui « venait de renverser d’un coup de patte l’assiette qui couvrait un bol de lait, et le lapait en toute hâte [154] ». Robert Delort souligne combien cette image défavorable est liée aux mentalités du monde chrétien occidental : « on discerne une forte hostilité pour tout ce qu’il incarne : la sexualité, la sensualité, la féminité, le paganisme, la lune, les ténèbres, le noir, Diane, la perfidie, la cruauté, les démons, c’est à dire la plupart des instruments de la sorcellerie […] [155] ». Il paraît indubitable que toutes les images « félines » appliquées à la femme dans La Comédie humaine puisent à cette source et valent surtout par l’implicite qui les sous-tend et qui n’est guère à leur avantage… Nous n’en donnerons que quelques exemples révélateurs : Mlle de Verneuil qui s’aperçut qu’elle était aimée de Montauran « le mit vingt fois à l’épreuve, en obéissant peut-être à cet instinct qui porte la femme à jouer avec sa proie comme le chat joue avec la souris qu’il a prise [156] », et la princesse de Cadignan, elle aussi, heureuse d’avoir ému d’Arthez par ses mensonges, « dévora » avec malignité une larme échappée à ce dernier « par un regard de côté », « leste et net comme un geste de chatte prenant une souris » [157]. Les diaboliques Mme Évangélista et sa fille sont qualifiées significativement et ironiquement de « petites chattes » par de Marsay [158]. Clémentine Laginska éprouve à l’égard de l’ami de son mari une « défiance de chatte [159] », Mlle Gamard fait partie de ces vieilles filles qui « égratignent à la manière des chats [160] », et nous pouvons lire que lorsqu’Esther accepta de séduire Nucingen : « Le singe était devenu chatte, et la chatte devenait femme [161] ». La référence au chat et surtout à la chatte, on le voit, n’est donc jamais valorisante et n’est sans doute pas des plus originales.

22Balzac, néanmoins, n’a pas dédaigné recourir à un certain nombre de stéréotypes ainsi que l’a noté Léon-François Hoffmann : « Le chien est le symbole de la fidélité ou de misère ; l’hirondelle de légèreté, l’anguille de souplesse [162] ». Le crapaud Astaroth et une poule noire dénommée Cléopâtre sont les auxiliaires attendus de Mme Fontaine dans Le Cousin Pons au cours d’une séance de voyance où la protagoniste n’est pas sans faire penser à l’image traditionnelle de la sorcière [163]. Ces exemples sont toutefois minoritaires au sein de l’immense bestiaire de La Comédie humaine. Nous pourrions en outre nous laisser prendre au piège de certaines scènes bucoliques et accuser l’écrivain de céder à la mièvrerie. Adieu présente un passage virgilien, à moins qu’il ne s’agisse de la réminiscence d’un tableau d’un maître hollandais : « Une vache paissait à travers les boulingrins, et foulait les fleurs des plates-bandes, tandis qu’une chèvre broutait les raisins verts et les pampres d’une treille [164] ». Il en va de même au début des Paysans lorsque Blondet décrit le paysage qui s’offre à lui : « Le soleil verse sa plus piquante chaleur, le martin-pêcheur est au bord de l’étang, les cigales chantent, le grillon crie […] [165] ». Même paysage idyl­lique au début du Lys dans la vallée : « […] les insectes qui vivent de lumière, demoiselles vertes, cantharides, volaient à leurs frênes, à leurs roseaux ; les troupeaux ruminaient à l’ombre, les terres rouges de la vigne brûlaient, et les couleuvres glissaient le long des talus [166] ». La présence de Raphaël de Valentin lors de sa promenade au Mont-Dore, dans La Peau de chagrin, ne semble même pas, contre toute vraisemblance, effaroucher les animaux : « Suspendus dans les rochers comme par magie, une chèvre et son chevreau cabriolèrent et vinrent se poser sur une table de granit près de Raphaël, en paraissant l’interroger [167]. » Cependant cette harmonie est trompeuse et cache une faille. Raphaël en est au dernier stade de la phtisie. La forêt des Aigues n’a rien, en réalité, d’un jardin d’Eden car le garde Michaud y est assassiné et bien des forfaits s’y accomplissent. La vallée du Lys occulte le martyre de Mme de Mortsauf en proie au délire d’un mari à qui la fureur donne l’aspect « d’un loup blanc qui a du sang sur le museau [168] ». Stéphanie rompt la sérénité du tableau champêtre par un acte cruel totalement gratuit et inattendu : « Elle s’élança sur un jeune merle qui sautillait, le prit en jetant un petit cri de satisfaction, l’étouffa, le regarda mort, et le laissa au pied d’un arbre sans plus y penser [169] ». D’ailleurs, que d’animaux sacrifiés dans le bestiaire balzacien, ne serait-ce que sur le plan de la diégèse ! Mignonne, la panthère victime d’une tragique méprise est poignardée [170]. La loutre capturée par le père Fourchon finira empaillée moyennant vingt francs, tandis que le cabinet de curiosités de M. Gourdon regorge d’animaux eux aussi naturalisés : ours, marmotte, rongeurs divers, « aigle des Alpes » ainsi qu’une « collection de lépidoptères [171] », la vie grouillante des environs semblant avoir lamentablement échoué en ces lieux. Nous avons aussi noté le sort particulièrement tragique des chevaux dans La Comédie humaine[172]. Les chiens d’Esther, de Michaud ainsi que le caniche de La Fosseuse finissent empoisonnés [173]. Si les autres échappent à cette destinée, ce n’est, semble-t-il, qu’en raison de la férocité qu’on a développée en eux. Ainsi, de Marsay apprend-il que Paquita est extrêmement bien gardée : on lâche pendant la nuit dans les jardins « des chiens dont la nourriture est suspendue à des poteaux de manière qu’ils ne puissent y atteindre. Ces damnés animaux croient alors que les gens susceptibles d’entrer en veulent à leur manger, et les mettraient en pièces [174] ». Ayant recours au même stratagème, « le génie de Magus avait promu [ses chiens] Sauvages, ils étaient devenus sournois comme des Mohicans » pour protéger sa fabuleuse collection [175]. Le chien loup de Grandet est lui aussi doté d’« une notable férocité », si bien que le vieil avare se croit obligé d’avertir son hôte : « Si vous aviez besoin de sortir, vous appelleriez Nanon. Sans elle, votre serviteur ! le chien vous mangerait sans vous dire un seul mot [176] ». Ces quelques remarques ajoutent donc une teinte tragique au tableau de la présence animale dans l’œuvre, mais il n’y a là rien d’étonnant dans la mesure où elle offre le reflet de la société humaine telle que Balzac la conçoit.

23Dans l’« Avant-propos » de La Comédie humaine l’écrivain nous apprend qu’il a autrefois lu presque simultanément Buffon et Walter Scott [177]. Cette double lecture du naturaliste philosophe et du romancier historien des mœurs nous semble emblématique du traitement du thème animalier dans les textes à venir. Balzac résumant son projet affirme en outre que l’œuvre devait avoir une triple forme en étudiant « les hommes, les femmes et les choses [178] ». Or n’oublions pas que l’animal jusqu’à nos jours encore reste soumis au régime des biens [179]. Quoi de plus naturel, par conséquent, que le peintre de l’espace domestique et privé lui accordât une large place au même titre que le costume ou le cadre de vie ? L’observateur des mœurs de son époque devait aussi restituer, s’il voulait être exact, un paysage urbain où l’animal occupait encore une place importante et qui était, de ce point de vue, très différent de celui que nous connaissons. Le romancier s’est par ailleurs montré conscient des ressources littéraires que les bêtes lui offraient : d’une part la physiognomonie zoologique lui permettait de cerner le physique et le caractère des personnages, d’autre part le potentiel romanesque et symbolique de l’animal était loin d’être négligeable, ce qui pouvait même lui valoir parfois d’occuper le devant de la scène comme dans Une passion dans le désert, ou tout au moins une place de choix dans bon nombre d’œuvres. Nous n’hésiterons donc pas à affirmer que les bêtes font partie intégrante de l’univers de La Comédie humaine et même qu’elles en accusent souvent les sombres couleurs.

Notes

  • [1]
    Léon-François Hoffmann, « Les métaphores animales dans Le Père Goriot », AB 1963, pp. 91-105 ; Lucienne Frappier-Mazure, L’Expression métaphorique dans « La Comédie humaine », Klincksieck, 1976 ; Michel Thérien, « Métaphores animales et écriture balzacienne : le portrait et la description », AB 1979, pp. 193-208.
  • [2]
    Damien Baldin, Histoire des animaux domestiques, xix-xxe siècle, Seuil, 2014, p. 8 et p. 10.
  • [3]
    Ibid., p. 12.
  • [4]
    Laure Surville, Balzac, sa vie et ses œuvres, d’après sa correspondance, Paris, Librairie nouvelle, 1858, p. 17.
  • [5]
    Splendeurs et misères des courtisanes, CH, t. VI, p. 688.
  • [6]
    Lettre 32-79, vers le 16 avril 1832, Corr. Pl. I, p. 507.
  • [7]
    Eugénie Grandet, CH, t. III, p. 1127.
  • [8]
    Lettre 32-147, du 15 juillet 1832, Corr. Pl. I, p. 582 ; lettre 32-155, du 24 juillet 1832, p. 596 ; lettre 32-165, du 5 août 1832, p. 608 ; lettre 32-175, du 1er septembre 1832, pp. 626-627 ; lettre 32-187, du 22 septembre 1832, p. 643.
  • [9]
    9.Lettre 32-122, du 10 juin 1832, Corr. Pl. I, p. 540.
  • [10]
    LHB, t. I, lettre du 29 mai 1833, p. 43.
  • [11]
    Lettre XVII-1, du 14 septembre 1817, Corr. Pl. I, p. 7.
  • [12]
    LHB, t. I, lettre du 17 avril 1838, p. 450.
  • [13]
    Ibid., p. 451.
  • [14]
    LHB, t. II, lettre du 1er mai 1848, p. 822.
  • [15]
    CH, t. VII, p. 119.
  • [16]
    16. CH, t. IV, p. 311.
  • [17]
    Adieu, CH., t. X, p. 1007.
  • [18]
    CH, t. XI, p. 485.
  • [19]
    Les CentContes drolatiques, OD, t. I, p. 118.
  • [20]
    20. Ibid., p. 223.
  • [21]
    CH, t. V, p. 1076.
  • [22]
    CH, t. VI, p. 836.
  • [23]
    CH, t. VIII, p. 1187.
  • [24]
    CH, t. VI, p. 483 et p. 821.
  • [25]
    CH, t. IV, p. 222.
  • [26]
    CH, t. IX, p. 1021.
  • [27]
    CH, t. VII, p. 710.
  • [28]
    CH, t. VIII, pp. 1224-1225.
  • [29]
    CH, t. I, pp. 7-8
  • [30]
    Lettre 20-6, du 13 juin 1820, Corr. Pl. I, p. 49.
  • [31]
    Voir Les Paysans, CH, t. IX, p. 1315, n. 2 p. 73.
  • [32]
    Moïse Le Yaouanc, « La visite de Balzac au naturaliste Lavrille », RHLF, 1950, p. 280 sq. (voir La Peau de chagrin, CH, t. X, p. 1326, n. 3 de la p. 238, et p. 1327, n. 2 de la p. 240.
  • [33]
    CH, t. VII, p. 495.
  • [34]
    Ibid., p. 219.
  • [35]
    Dictionnaire classique d’histoire naturelle, 1822-1823, t. II.
  • [36]
    Ibid., t. IX.
  • [37]
    CH, t. IX, p. 319.
  • [38]
    Voir CH, t. X, p. 54. Cet article a été reproduit dans l’AB 1977 dans un article de Thierry Bodin, « L’accueil aux Paysans », dont on retiendra ici les pp. 253-254.
  • [39]
    CH, t. X p. 669 et n. 2.
  • [40]
    CH, t. VIII, p. 908.
  • [41]
    Ibid., p. 973.
  • [42]
    CH, t. X, p. 1006.
  • [43]
    CH, t. VIII, p. 1227.
  • [44]
    Splendeurs et misères des courtisanes, CH, t. VI, p. 484.
  • [45]
    Béatrix, CH, t. II, p. 886.
  • [46]
    CH, t. IX, p. 76.
  • [47]
    CH, t. VI, p. 430.
  • [48]
    CH, t. IX, p. 1126.
  • [49]
    CH, t. III, p. 1104.
  • [50]
    CH, t. X, p. 266.
  • [51]
    Voir les notes de Madeleine Ambrière-Fargeaud, pp. 1114-1118, de l’« Avant-propos » de La Comédie humaine (CH, t. I).
  • [52]
    CH, t. IX, p. 422.
  • [53]
    Op. cit., p. 111.
  • [54]
    CH, t. IX, p. 163.
  • [55]
    Damien Baldin, op. cit., p. 20.
  • [56]
    Louis-Sébastien Mercier, Tableau de Paris, Amsterdam, 1782-1783, t. VIII, pp. 336-337, cité par Damien Baldin, op. cit., p. 21.
  • [57]
    Le Père Goriot, CH, t. III, p. 52.
  • [58]
    Le Colonel Chabert, CH, t. III, pp. 336-338.
  • [59]
    Op. cit., p. 19.
  • [60]
    CH, t. IV, p. 910.
  • [61]
    Splendeurs et misères des courtisanes, CH, t. VI, p. 773.
  • [62]
    Sébastien Mercier, Le Tableau de Paris, La Découverte/ Poche, 2015, p. 59.
  • [63]
    Damien Baldin, op. cit., p. 39.
  • [64]
    CH, t. III, p. 399.
  • [65]
    CH, t. IX, p. 588.
  • [66]
    Voir Damien Baldin, op. cit., pp. 53-58.
  • [67]
    CH, t. VI, p. 106 et p. 109.
  • [68]
    Voir Damien Baldin, op. cit., p. 17.
  • [69]
    Les Chouans, CH, t. VIII, p. 1017.
  • [70]
    La Vieille Fille, CH, t. IV, p. 864.
  • [71]
    Le Cabinet des Antiques, CH, t. IV, p. 990.
  • [72]
    César Birotteau, CH, t. VI, p. 215.
  • [73]
    Le Père Goriot, CH, t. III, p. 104.
  • [74]
    Splendeurs et misères des courtisanes, CH, t. VI, p. 627.
  • [75]
    Le Lys dans la vallée, CH, t. IX, p. 1068.
  • [76]
    Ibid., p. 1149.
  • [77]
    Béatrix, CH, t. II, p. 766.
  • [78]
    78. Le Médecin de campagne, CH, t. IX, p. 385.
  • [79]
    Ibid., pp.469-470.
  • [80]
    Ibid., p. 482.
  • [81]
    Ibid., p. 489.
  • [82]
    Ibid., p. 598.
  • [83]
    CH, t. II, p. 757.
  • [84]
    Lettre du 1er décembre 1833, LHB, t. I, p. 103.
  • [85]
    85.Lettre du 15 décembre 1834, LHB, t. I p. 212.
  • [86]
    Lettre du 7 juin 1848, LHB, t. II, p. 862.
  • [87]
    Lettre du 5 janvier 1844, LHB, t. I p. 771.
  • [88]
    Lettre du 18 juin 1844, LHB, t. I, p. 864.
  • [89]
    Lettre du 2 juillet 1847, LHB, t. II, p. 612.
  • [90]
    Lettre du 16 décembre 1845, LHB, t. II, p. 128.
  • [91]
    César Birotteau, CH, t. VI, p. 215.
  • [92]
    Le Père Goriot, CH, t. III, p. 96.
  • [93]
    Le Médecin de campagne, CH, t. IX, p. 469. « On leur trouve beaucoup de vitesse et de nerf ; ils sont fort légers et très propres à la course », écrivait déjà Buffon (Histoire naturelle, Pl., 2007, p. 536).
  • [94]
    Les CentContes drolatiques, OD, t. I, p. 47.
  • [95]
    CH, t. II, pp. 222-223.
  • [96]
    CH, t. III, p. 324.
  • [97]
    Jean-François Richer, « Balzac sonoriste », AB 2013, p. 345.
  • [98]
    Le Médecin de campagne, CH, t. IX, p. 581.
  • [99]
    Adieu, CH, t. X, p. 991.
  • [100]
    Une passion dans le désert, CH, t. VIII, p. 1221.
  • [101]
    Le Cabinet des Antiques, CH, t. IV, p. 1020.
  • [102]
    CH, t. V, p. 1057.
  • [103]
    Le Contrat de mariage, CH, t. III, p. 531.
  • [104]
    CH, t. III, p. 101.
  • [105]
    Splendeurs et misères des courtisanes, CH, t. VI, p. 474.
  • [106]
    La Vieille Fille, CH, t. IV, p. 915.
  • [107]
    La Duchesse de Langeais, CH, t. V, p. 1013.
  • [108]
    Damien Baldin, op. cit. p. 123-124.
  • [109]
    Béatrix, CH, t. II, p. 895.
  • [110]
    Damien Baldin, op. cit., p. 100.
  • [111]
    CH, t. II, pp. 222-223.
  • [112]
    « Joies de cœur d’une chatte égyptienne », Courrier balzacien, 3e série, n° 3, 2007 (1), p. 59.
  • [113]
    Le Colonel Chabert, CH, t. III, p. 324.
  • [114]
    Les Paysans, CH, t. IX, p. 164.
  • [115]
    115. Ibid., p. 332.
  • [116]
    Ibid., p. 333.
  • [117]
    Ibid., pp340-341.
  • [118]
    Ibid., pp. 72-76.
  • [119]
    La Rabouilleuse, CH, t. IV, p. 449 et p. 455.
  • [120]
    CH, t. II, pp. 873-874 et p. 1533, var. b de la p. 873.
  • [121]
    CH, t. VI, pp. 492-493.
  • [122]
    Ibid., p. 735 et p. 740.
  • [123]
    Ibid., p. 688.
  • [124]
    La Rabouilleuse, CH, t. IV, p. 285.
  • [125]
    Béatrix, CH, t. II, p. 791 et p. 832.
  • [126]
    La Fausse Maîtresse, CH, t. II, p. 230.
  • [127]
    Ibid., « Introduction », p. 191.
  • [128]
    Le Père Goriot, CH, t. III, p. 149.
  • [129]
    César Birotteau, CH, t. VI, p. 109.
  • [130]
    La Cousine Bette, CH, t. VII, p. 92.
  • [131]
    Bertrand Marret, Portraits de l’artiste en singe, Somogy éditions d’art, 2001, p. 67.
  • [132]
    Pierre Abraham, Créatures chez Balzac, NRF, Gallimard 1931 ; Michel Thérien, « Métaphores animales et écriture balzacienne : le portrait et la description », AB 1979, pp.193-208 ; Mireille Labouret, « L’aristocrate balzacienne : du blason au bestiaire », AB 1985, pp. 285-298 ; Régine Borderie, Balzac peintre de corps, Sedes, 2002.
  • [133]
    CH, t. X, p. 1005.
  • [134]
    Ibid., p. 1007.
  • [135]
    Ibid., p. 1008.
  • [136]
    Le Curé de Tours, CH, t. IV, p. 204.
  • [137]
    La Vieille Fille, CH, t. IV, p. 864.
  • [138]
    Ibid., p. 890.
  • [139]
    Ibid., p. 891.
  • [140]
    140. Ibid., p. 914.
  • [141]
    Le Colonel Chabert, CH, t. III, p. 350.
  • [142]
    Bertrand Marret, op. cit., p. 31 et Jean Chevalier et Alain Gheerbrant, Dictionnaire des symboles, Laffont, 1989, p. 887.
  • [143]
    Damien Baldin, op. cit., p. 65.
  • [144]
    L’Élixir de longue vie, CH, t. XI, pp. 484-485.
  • [145]
    Le Lys dans la vallée, CH, t. IX, p. 1190.
  • [146]
    Dictionnaire des symboles, op. cit., p. 28.
  • [147]
    Le Lys dans la vallée, CH, t. IX, p. 1189.
  • [148]
    Zacharie, 9, 9-10 ; Mathieu, 21, 1-11. Voir à ce propos, Philippe Seringe, Les Symboles, Helios, 1995, p. 38.
  • [149]
    Dictionnaire des symboles, op. cit., pp. 228-229. Dans Splendeurs et misères des courtisanes, on peut lire que les chevaux de Lucien de Rubempré « partirent comme si la passion de leur maître eût animé leurs jambes » (CH, t. VI, p. 480).
  • [150]
    Le Lys dans la vallée, CH, t. IX, p. 1187.
  • [151]
    Ibid., p. 1224.
  • [152]
    Grand Larousse universel du xixe siècle, article « Chat ».
  • [153]
    Histoire naturelle, op. cit., p. 689.
  • [154]
    CH, t. III, p. 82.
  • [155]
    Robert Delort, Les Animaux ont une histoire, Seuil, 1993, p. 426.
  • [156]
    Les Chouans, CH, t. VIII, p. 1024.
  • [157]
    Les Secrets de la princesse de Cadignan, CH, t. VI, p. 988.
  • [158]
    Le Contrat de mariage, CH, t. III, p. 640.
  • [159]
    La Fausse Maîtresse, CH, t. II, p. 230.
  • [160]
    Le Curé de Tours, CH, t. IV, p. 191.
  • [161]
    Splendeurs et misères des courtisanes, CH, t. VI, p. 684.
  • [162]
    Op. cit., p. 91.
  • [163]
    Le Cousin Pons, CH., t. VII, pp. 589-590.
  • [164]
    CH, t. X, p. 980.
  • [165]
    Les Paysans, CH, t. IX, p. 54.
  • [166]
    CH, t. IX, p. 1013.
  • [167]
    La Peau de chagrin, CH, t. X, p. 279.
  • [168]
    Le Lys dans la vallée, CH, t. IX, p. 1002. On ne peut manquer de penser ici à la lycanthropie. Jean-Paul Ronecker écrit fort justement à propos du loup-garou : « S’il terrifie, c’est qu’il évoque une férocité archaïque tout autant que la perte de la personnalité. La transformation en animal met en relief cette animalité que l’être humain rejette à toute force » (Le Symbolisme animal, Oyus, 2016, p. 54).
  • [169]
    Adieu, CH, t. X, pp. 1008-1009.
  • [170]
    Une passion dans le désert, CH, t. VIII, p. 1232.
  • [171]
    Les Paysans, CH, t. IX, p. 121 et p. 265.
  • [172]
    Il en va de même dans les Contes drolatiques. Dans Berthe la repentie, par exemple le personnage mène sa monture à un train d’enfer « si bien que le genest creua soubs luy dedans la court » (OD, t. I, p. 387).
  • [173]
    « Voyant que le chien était à moi d’amitié, qu’elle ne pourrait jamais l’avoir, [la femme de l’aubergiste] l’a fait empoisonner. Mon pauvre caniche est mort dans mes bras, je l’ai pleuré comme si c’eût été mon enfant […] », Le Médecin de campagne, CH, t. IX, p. 589.
  • [174]
    La Fille aux yeux d’or, CH, t. V, pp. 1068-1069.
  • [175]
    Le Cousin Pons, CH, t. VII, p. 596.
  • [176]
    Eugénie Grandet, CH, t. III, p. 1071.
  • [177]
    CH, t. I, pp. 8-9 et pp. 10-11. Voir à ce propos Pierre-Georges Castex, « L’Univers de La Comédie humaine », ibid., pp. XI-XII.
  • [178]
    CH, t. I, p. 9.
  • [179]
    La loi du 16 février 2015, modifiant les articles 524 et 528 du Code civil, donne seulement à l’animal un statut juridique distinct des autres biens, puisque l’article 2 de cette loi précise : « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens ».
Français

De l’avis des sociologues, le comportement de l’homme vis-à-vis de l’animal domestique est révélateur de l’histoire et du mode de pensée d’une civilisation. On ne s’étonnera donc pas que le bestiaire de Balzac, historien des mœurs soit conséquent. Une enquête sur la connaissance personnelle que l’écrivain a pu avoir dans ce domaine et sur les voies de son acquisition s’imposait ainsi qu’une mise en parallèle des pratiques du xixsiècle avec le témoignage de La Comédie humaine. De plus, il était intéressant de constater comment le romancier fait intervenir l’animal dans la diégèse, mettant en outre à profit une symbolique familière à ses lecteurs.

Danielle Dupuis
Mis en ligne sur Cairn.info le 23/11/2018
https://doi.org/10.3917/balz.019.0267
Pour citer cet article
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