CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Agences de l’eau

Redevance pour pollution - Réclamation du redevable portant sur la réalité de la créance - Acte non détachable de la procédure d’imposition fiscale - Possibilité de recours contentieux au titre de la seule procédure fiscale - Exonération pour une période de la redevance calculée à partir de la pollution mesurée - Elément de nature à remettre en cause la redevance calculée forfaitairement sur une autre période (non).

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« Considérant que les décisions par lesquelles il est statué sur la réclamation du redevable qui entend contester la créance d’une agence financière de bassin, en tout ou en partie, en ce qui concerne la redevance due pour détérioration de l’eau assignée, après déduction le cas échéant du montant de la prime d’épuration, ne constituent pas des actes détachables de la procédure d’imposition ; qu’elles ne peuvent, en conséquence, être déférées à la juridiction administrative par la voie du recours pour excès de pouvoir et ne peuvent faire l’objet d’un recours contentieux qu’au titre de la procédure fixée par les articles L. 190 et R. 190-1 du Livre des procédures fiscales ;
Considérant que si la société Gaget fait valoir que les mesures réalisées par l’Agence de l’eau Seine-Normandie au cours de l’année 2004 démontrent que son activité de conception de matières aromatiques à partir de fruits frais ne justifiait pas le paiement des redevances pour détérioration de la qualité de l’eau d’origine non domestique mises à sa charge au titre des années 2000 à 2003, il est constant que ces redevances ont été calculées, au titre de cette période, en tenant compte des quantités de pollution déterminées, non pas au regard de mesures de la pollution réelle, mais de manière forfaitaire comme le permettait l’article 4 du décret du 28 octobre 1975 ; qu’ainsi, la circonstance que l’Agence de l’eau Seine-Normandie ait réalisé en 2004 des mesures de la pollution qui l’ont conduite à dispenser la société requérante du paiement de la redevance dont elle s’était précédemment acquittée, n’est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé des redevances calculées forfaitairement au titre des années 2000 à 2003. »
TA Versailles, 18 décembre 2008, Société Gaget, no 0606065.

Caractère de contrat administratif de la convention accordant une subvention à un redevable pour lutter contre la pollution d’origine agricole - Caractère non détachable du contrat du refus de procéder au versement de la subvention - Compétence du seul juge du contrat en cas de litige.

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« Considérant que par convention du 8 novembre 2000, l’Agence de l’eau Loire-Bretagne a accordé une subvention de 9 573,80 € à M. Piton en contrepartie de l’engagement pris par ce dernier de réaliser des travaux en vue de la maîtrise de pollutions d’origine agricole sur le territoire de la commune de Saint-Laurent-de-la-Plaine (Maine-et-Loire) ; qu’une telle convention, eu égard à son objet, présente le caractère d’un contrat administratif ; que la décision du 19 avril 2007 par laquelle le directeur général de l’Agence de l’eau Loire-Bretagne a rejeté sa demande tendant au versement de la subvention en cause, au titre de la convention du 8 novembre 2000, n’est pas détachable de ladite convention ; que, par suite, le bien-fondé de cette décision ne peut être contesté que devant le juge du contrat. »
CAA Nantes, 7 avril 2009, M. Piton, no 08NT01944.

3Les éléments dégagés par cette jurisprudence - quoique portant sur le régime antérieur à celui entré en vigueur du fait de la LEMA à compter du 1er janvier 2008 - demeurent applicables dans le cadre du nouveau régime, à savoir :

  1. le caractère non détachable de la procédure fiscale de toute réclamation opposée par l’assujetti aux redevances des agences de l’eau ;
  2. l’impossibilité d’intenter à l’encontre des créances émises par les agences un recours pour excès de pouvoir, le seul recours contentieux ouvert ne pouvant se faire que dans le cadre de la procédure fixée par le Livre des procédures fiscales ;
  3. le caractère également non détachable de la décision d’accorder ou non une subvention, avec l’engagement contractuel entre le bénéficiaire et l’agence de mener à bonne fin l’opération qui le justifie et, de ce fait, la compétence du seul juge du contrat en cas de contestation.

Assainissement

Station d’épuration - Autorisation de rejet antérieure à la loi du 3 janvier 1992 sur l’eau valant autorisation au titre de la police de l’eau - Demande de nouvelle autorisation en cours - Nécessité d’imposer dans l’intervalle des prescriptions additionnelles à l’autorisation initiale et de l’enjoindre au préfet (non) - Erreur d’appréciation (non).

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« Considérant (…) que des travaux d’amélioration ont été engagés sur la station d’épuration de Ploubalay et que la construction, soit par extension, soit par substitution, d’une nouvelle station sur son emplacement est désormais envisagée ; qu’une demande d’autorisation relative à ce nouveau projet doit être prochainement déposée et que la commune de Ploubalay a produit des éléments du dossier et de l’étude d’impact qui y seront joints ; que, à la date où il statue, le Tribunal constate que les travaux de réhabilitation entrepris par la station d’épuration ont permis de supprimer ses dysfonctionnements les plus polluants, et qu’un rapport de visite assistance technique du 28 avril 2008 indique que la qualité de l’eau traitée était correcte et la concentration de boues correctes à cette époque de l’année ; que dès lors, nonobstant la réalité de l’insuffisance de la station actuelle à répondre parfaitement aux besoins de la population accueillie, notamment en période estivale, compte tenu des améliorations apportées (…), il n’apparaît pas nécessaire à la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 211-1 de fixer des prescriptions additionnelles aux prescriptions applicables à la station existante et résultant de l’arrêté de 1973 modifié, lesquelles ne s’appliqueraient que pour un temps restreint, ni d’enjoindre au préfet des Côtes d’Armor de prendre de telles prescriptions ; qu’ainsi, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de considérer que le préfet, en refusant d’édicter de nouvelles prescriptions comme le lui demandait l’association requérante, aurait notamment commis une erreur d’appréciation (…). »
TA Rennes, 13 novembre 2008, Association de défense du site de Lancieux et de la baie de Beaussais, no 06907.

5Nonobstant le fait que la station d’épuration des eaux résiduaires de la commune bretonne de Ploubalay doit faire face à un afflux conséquent de population estivale et qu’elle était retenue par la Cour de justice des Communautés européennes au nombre des stations non conformes pour traiter les rejets des agglomérations en zone sensible, les travaux de réhabilitation déjà entrepris et le dépôt en cours d’un nouveau dossier d’autorisation ne rendent pas nécessaire dans l’intervalle l’édiction des prescriptions complémentaires à l’acte initial d’autorisation de rejet préexistant à la loi sur l’eau de 1992 et valant autorisation au titre de cette dernière législation.

Station d’épuration soumise à déclaration au titre de la police de l’eau-Enquête diligentée au titre de l’utilité publique - Bilan coûts-avantages favorable - Erreur manifeste d’appréciation (non) - Nécessité d’une étude de l’incidence des variations climatiques sur le fonctionnement des ouvrages (non)-Suffisance de l’étude d’impact (oui).

6

« Considérant (…) que si la technique d’épuration retenue, constituée par une station à macrophytes utilisant des filtres plantés de roseaux, entraîne une faible dénitrification et un abattement peu important de la matière phosphorée, elle a en revanche un rendement important sur la dégradation de la pollution organique et sur la pollution azotée ; que la commune de Plan-d’Aups-Sainte-Baume ne comprend aucun établissement industriel ou artisanal susceptible de rejeter des effluents fortement chargés ; que les requérants ne démontrent pas qu’il existerait un système d’épuration présentant un meilleur bilan entre les coûts et les avantages ; qu’en ce qui concerne la protection des eaux environnantes, la question de cette protection a été étudiée à la fois dans un rapport d’hydrogéologie joint au dossier de déclaration et par le comité départemental d’hygiène lors de sa séance en date du 8 décembre 2004 ; que ces deux instances ont rendu un avis favorable sur le projet ; qu’en outre, l’arrêté du 10 décembre 2004 comprend des prescriptions en vue de concourir à la protection des eaux souterraines des karsts sous-jacents, qui imposent notamment un suivi régulier de la qualité des eaux ainsi qu’une auto-surveillance du système de collecte et du système de traitement ; que la capacité de la station d’épuration, de 1 500 équivalents-habitants, est suffisante dès lors qu’au dernier recensement INSEE de 1999, la commune comprenait 764 habitants, qu’un recensement complémentaire mené en 2001 fait état d’une population permanente comprise entre 900 et 1 100 habitants, que la capacité supplémentaire d’accueil de la population touristique est d’environ 300 personnes, et que la station d’épuration litigieuse doit desservir 80 % de la population de la commune ; que le chiffre de 2 500 habitants cité par les requérants et tiré d’un rapport de l’écomusée de Sainte-Baume ne saurait être retenu dès lors que la valeur scientifique de ce rapport n’est pas établie ; que le raccordement de la commune de Plan-d’Aups-Sainte-Beaume au réseau d’assainissement de la commune d’agglomération Garlaban-Huveaune-Sainte-Beaume n’est pas adapté dès lors que cette solution impliquerait l’acheminement des eaux usées jusqu’à la commune de Saint-Zacharie par un trajet de dix kilomètres situé dans un relief accidenté ; qu’au vu de ces éléments, le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation dans le choix de la technique d’épuration retenue doit être écarté ;
Considérant qu’il ressort des conclusions du commissaire-enquêteur, rendues au terme de l’enquête publique (…), que la fiabilité du procédé de filtres macrophytiques est assurée aussi bien en période chaude qu’en temps de gel en raison du fait que les aspergeurs poursuivent leur office même sous une couche de glace ou de neige ; que, pour ce qui est des précipitations, le préfet fait valoir, sans être utilement contredit sur ce point, qu’elles ne perturberont pas le fonctionnement de la station d’épuration dès lors que le réseau d’assainissement ne recueillera que les eaux usées et non les eaux pluviales et que le lieu d’implantation de la station d’épuration se situe hors de la dépression où se situe la majeure partie du village du plan d’Aups ; que, dans ces conditions, aucune étude particulière sur l’incidence des précipitations ou des variations climatiques sur le fonctionnement des ouvrages n’était requise (…) ; que la notice d’impact étudie longuement l’impact du projet sur les eaux, notamment sur le milieu aquatique, sur la vie piscicole, sur l’hydrologie, sur la qualité des eaux souterraines et sur le réseau d’eau potable ; que le simple fait de ne pas avoir pris en compte trois captages individuels n’est pas de nature, à lui seul, à entacher d’insuffisance la notice d’impact. »
TA Nice, 12 mai 2009, Association de défense de la qualité de la vie à Pland’Aups-Sainte-Baume et autres, no 0503076.

7Même si la procédure de déclaration ne comporte pas par elle-même d’enquête publique, celle-ci est exigée si l’implantation de la station d’épuration requiert l’expropriation de parcelles privées, auquel cas le juge établit un bilan entre le coût et les avantages de l’opération.

Autorisations (police de l’eau)

Réalisation d’ouvrages de collecte d’eaux pluviales dans le cadre d’un aménagement ferroviaire - Bénéfice du régime de l’antériorité (non) - Nécessité de réaliser des modifications importantes sur des ouvrages anciens - Changement des circonstances de droit avec maintien du régime antérieur pour une période déterminée - Soumission au régime déclaratif (non) - Soumission au régime de l’autorisation (oui).

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« Considérant que, pour décider que les ouvrages hydrauliques qui ont donné lieu à la délivrance d’un récépissé de déclaration par l’arrêté contesté étaient, en réalité, assujettis à une autorisation, l’arrêt attaqué retient qu’ils relèvent de la rubrique 2.1.5.0 de la nomenclature établie par le décret du 17 juillet 2006 ;
Considérant, toutefois, qu’en faisant application, à une déclaration déposée en 1998, de la nomenclature résultant du décret du 17 juillet 2006, la cour administrative d’appel a méconnu les dispositions transitoires fixées par l’article 5 de ce décret ;
Considérant, en deuxième lieu, que les ouvrages hydrauliques nos 1, 2, 3, 4 et 5 n’ont fait l’objet d’aucune autorisation ; que si le ministre de l’écologie et du développement durable soutient que ces ouvrages existaient avant l’intervention de la loi sur l’eau et de ses décrets d’application et bénéficiaient, de ce seul fait, en vertu des articles 40 et 41 du décret no 93-742 du 29 mars 1993 de droits acquis les dispensant d’autorisation, ces articles précisent que cette possibilité est subordonnée à la condition d’un fonctionnement régulier, c’est-à-dire autorisé ou déclaré au titre de la réglementation alors applicable et à la condition que l’exploitant fournisse certains renseignements au préfet dans les délais fixés par l’article 41 en cas de modification du régime juridique qui leur est applicable ; que le ministre n’assortit son moyen d’aucune précision permettant au juge d’apprécier si les conditions relatives au droit d’antériorité revendiqué sont réunies alors que la plateforme ferroviaire, qui a été installée en 1880 et n’était plus en service, nécessitait des modifications et des aménagements importants. »
CE, 17 décembre 2008, SNCF, MEEDDAT, nos 309103, 309365.

Voirie routière et rejets d’eaux pluviales - Enquête publique diligentée au titre de la police de l’eau pour la réalisation des ouvrages hydrauliques et non au titre de la déclaration d’utilité publique des travaux de voirie routière - Obligation d’inclure dans le champ de l’enquête publique les extensions futures (non).

9

« Considérant (…) que l’arrêté préfectoral du 16 février 1996 a prescrit une enquête publique au sujet de la demande du conseil général des Yvelines "sollicitant une autorisation, au titre de la loi sur l’eau, pour le rejet des eaux pluviales dans le cadre de l’aménagement de la RD 307", et que tant le dossier soumis à enquête publique que le rapport du commissaire-enquêteur n’ont fait état que de la construction d’ouvrages de retenue des eaux ; que, dès lors, en relevant que l’opération faisant l’objet de l’enquête publique était constituée non par la construction des ouvrages de retenue d’eau, mais par la réalisation même des travaux de voirie, alors que, d’une part, ces travaux de voirie avaient fait l’objet d’une précédente enquête publique en 1993 et avaient été déclarés d’utilité publique par un arrêté préfectoral du 20 janvier 1994, et que, d’autre part, l’objet de la nouvelle enquête publique ne portait que sur la construction des ouvrages de retenue d’eau, la Cour a fait une inexacte interprétation de l’objet et de la portée de l’arrêté préfectoral attaqué ;
Considérant (…) que si l’enquête publique exigée par la loi du 3 janvier 1992 et le décret du 29 mars 1993 a pour objet d’évaluer l’impact sur l’eau du projet envisagé, notamment en ce qui concerne le libre écoulement des eaux, et les atteintes portées à la qualité ou la diversité du milieu aquatique, cette obligation n’implique pas d’inclure dans le champ de l’enquête des extensions futures de l’ouvrage, notamment lorsque celles-ci ne sont pas à un état d’avancement suffisant, ou que l’absence de ces extensions dans le champ de l’enquête n’est pas de nature à compromettre l’application des incidences du projet sur la ressource en eau. »
CE, 10 avril 2009, Département des Yvelines, Ministre de l’Ecologie et du Développement durable, nos 296781, 296788.

Travaux hydrauliques nécessités par une déviation routière - Concordance du champ d’action géographique d’une association de défense de quartiers avec un bassin versant - Impact du projet sur la vie des quartiers - Intérêt à agir (oui).

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« Considérant (…) qu’il ressort de sa dénomination que l’association entend avoir pour champ d’action géographique le quartier de Fayol à Firminy et le quartier de Gaffard au Chambon-Feugerolles qui sont tous deux traversés par le ruisseau de l’Echapre et par le projet de déviation de la RD 500 prévu sur une emprise sensiblement parallèle audit ruisseau ; que, même en estimant que le champ géographique de l’association s’étend à l’ensemble de la vallée de l’Echapre, le bassin versant de ce ruisseau constitue, en toute hypothèse, un territoire limité ; qu’au demeurant, au regard d’une autorisation délivrée au titre de la loi sur l’eau, le bassin versant représente une entité particulièrement pertinente ; que, dans ces conditions, les demandes de l’association dirigées contre un projet important susceptible d’avoir des impacts multiples sur la vie des deux quartiers susmentionnés, s’inscrivent dans l’objet que l’association s’est donné statutairement ; qu’elle est, en conséquence, fondée à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Lyon a estimé qu’eu égard à la généralité de son objet, elle ne justifiait pas d’un intérêt à agir (…). »
CAA Lyon, 3 février 2009, Association Vivre en Ondaine, no 08LY01870.

Aménagements hydrauliques et rejets d’eaux pluviales nécessités par des travaux de voirie routière - Obligation de la compatibilité de l’opération autorisée au titre de la police de l’eau avec les documents d’urbanisme (non) - Suffisance des prescriptions imposées aux rejets (oui) - Insuffisance des prescriptions destinées à prévenir les risques de pollution par remontée de nappe-Suffisance des contrôles effectués à la demande des services et du dispositif de prévention des pollutions accidentelles (oui).

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« Considérant que l’arrêté attaqué prévoit le principe d’assainissement séparatif qui sera mis en œuvre, et décrit les ouvrages hydrauliques et modalités de gestion des eaux autorisés ; que, notamment, les eaux de ruissellement de la chaussée seront recueillies dans des fossés revêtus d’argile, et acheminées jusqu’aux bassins de traitement, puis dans des bassins d’infiltration ; que les eaux extérieures à la plate-forme seront interceptées par des fossés, infiltrées partiellement par une noue engazonnée et acheminées vers les bassins d’infiltration ; que la transparence hydraulique de l’ensemble des écoulements naturels interceptés par le projet sera réalisée par la mise en place de cinq ouvrages hydrauliques ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, les ouvrages ainsi autorisés prennent en compte le barreau de liaison avec la RD 79, et sont suffisamment dimensionnés à cet effet ; qu’il n’y a pas lieu de prévoir des prescriptions supplémentaires concernant l’épaisseur du revêtement d’argile des fossés et les moyens qui seront retenus pour fixer ce fond d’argileux, dès lors que l’arrêté impose au permissionnaire de "maintenir en bon état l’ensemble des ouvrages qui doivent toujours être conformes aux conditions de l’autorisation" ; qu’il ne résulte pas de l’instruction, eu égard aux caractéristiques des terrains des bassins versants naturels, et même en tenant compte de la présence de l’ouvrage, que les bassins d’infiltrations seraient sous-dimensionnés en ce qui concerne les eaux extérieures à la plate-forme ; que la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 211-1 n’impose pas de prévoir une hauteur d’eau minimale de 1,50 mètre dans les bassins d’infiltration ;
Considérant, en revanche, qu’il ressort de la cartographie DIREN que l’ouvrage se situe, dans sa majeure partie, en zone où la profondeur de la nappe "en période de très hautes eaux" est de cinq mètres, et que le barreau de liaison traverse, à son extrémité ouest, une zone dans laquelle la nappe peut se trouver à un mètre de profondeur ; que, selon le profil en long de la partie principale de l’ouvrage, figurant au dossier d’autorisation, des décaissements de plus de cinq mètres sont prévus pour la réalisation de l’ouvrage ; que le profil en long du barreau de liaison ne figure pas au dossier ; qu’il y a lieu dès lors de renvoyer la communauté d’agglomération Caen la mer devant le préfet du Calvados pour qu’il complète son arrêté par des prescriptions visant à prévenir les risques de pollution par remontée de nappe en prenant en compte la profondeur de la nappe phréatique en période de très hautes eaux telle qu’elle figure sur la cartographie DIREN ;
Considérant que l’arrêté, dans son article IV, comporte des prescriptions suffisantes en ce qui concerne l’exécution des travaux ; qu’eu égard à la nature des ouvrages autorisés, il pouvait se borner à prévoir le principe de contrôles effectués à la demande du service chargé de la police des eaux, sans avoir à prévoir la fréquence des prélèvements, la nature des contrôles ou la réalisation d’un bilan à trois ans ; que l’article VIII concernant la pollution accidentelle, qui prévoit la mise en place du plan d’alerte et d’intervention départemental ainsi que l’information des "services compétents", et qui impose au permissionnaire d’être en mesure de confirmer tout déversement accidentel par manœuvre des by-pass et intervention rapide de la COPR, contient des prescriptions suffisantes. »
TA Caen, 13 mars 2009, Association « Environnement et cadre de vie de Cambes-en-Plaine », no 0800151.

Plan d’eau - Refus d’autorisation - Obligation de communication au pétitionnaire ou au commissaire-enquêteur des avis internes aux services (non) - Obligation de communication au CDH (CODERST) d’autres documents que le projet d’arrêté (non) - Compatibilité avec le SDAGE (oui) - Légalité du refus (oui).

12

« Considérant qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’interdit au préfet, au cours de l’instruction d’une demande déposée en application de (…) l’article L. 214-3 du Code de l’environnement, de consulter des services de l’Etat compétents et non mentionnés par les dispositions précitées de l’article 7 du décret du 29 mars 1993 ; que la SCEA Homburger-Geist n’est donc pas fondée à contester le fait que le préfet de la Creuse ait sollicité, au cours de l’instruction de son dossier, l’avis de la direction régionale de l’environnement du Limousin et celui de la brigade départementale du conseil supérieur de la pêche ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que le préfet ait orienté dans un sens favorable l’avis de ces organismes ; qu’il ne résulte d’aucune disposition législative ou réglementaire que le préfet doive communiquer au pétitionnaire ou au commissaire-enquêteur les avis internes de ces services instructeurs ;
Considérant (…) que le préfet de la Creuse n’était pas tenu (…) de communiquer d’autres documents que ce projet d’arrêté, et notamment par la note de synthèse établie par ses services à l’intention des membres du conseil départemental d’hygiène (…) ;
Considérant (…) que la requérante ne peut non plus utilement soutenir que l’application du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux du bassin Loire-Bretagne devrait être écartée dès lors qu’il restreindrait l’exercice du droit de propriété. »
TA Limoges, 16 avril 2009, SCEA Homburger-Geist c/ Préfet de la Creuse, no 0601215.

Travaux de nature à constituer un obstacle à l’écoulement des crues et à modifier le profil en long d’un cours d’eau, réalisés sans autorisation - Refus de régularisation des travaux - Légalité du refus (oui).

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« Considérant que (…) le préfet des Yvelines a autorisé le syndicat intercommunal pour l’aménagement et l’entretien du bassin de la Mauldre supérieure (SIAMS) à entreprendre des travaux d’aménagement sur la rivière "Lieutel", (…) ; que ces travaux consistant en la remise en état du lit, son curetage, son débroussaillage, ainsi qu’en le traitement sélectif des arbres et la consolidation des berges, n’ont jamais été réalisés ; qu’en décembre 2001, M. Jakobowicz, propriétaire d’un terrain sis 30, Grand-Rue à Vicq, donnant sur ce cours d’eau, a effectué sans autorisation des travaux dont la finalité était de stabiliser les berges ; qu’à cet effet, il a déposé sur le fond du lit de la rivière des blocs de béton empilés verticalement le long de la berge, sur une longueur de 39,50 mètres ; que, ces travaux de stabilisation des berges ayant été réalisés sans autorisation, en violation des dispositions de l’article L. 214-3 du Code de l’environnement, il a été mis en demeure le 11 mars 2002 de retirer cet ouvrage sous peine de poursuites pénales ; (…)
Considérant (…) que cet aménagement a pour effet de contrarier l’écoulement de l’eau et de modifier le profil en travers du cours d’eau, sans constituer un obstacle à l’érosion ; que, par suite, les aménagements réalisés relèvent des rubriques 250 et 253 de la nomenclature annexée au décret précité, et donc du régime de l’autorisation ; qu’ainsi, la DDAF des Yvelines a pu, par ce motif, légalement refuser de régulariser les travaux ayant fait l’objet de la déclaration litigieuse. »
TA Versailles, 24 février 2009, M. Jakobowicz, no 0603765.

Station d’épuration d’eaux résiduaires - Modification du procédé de traitement des boues produites - Absence de modification des installations - Nécessité d’une nouvelle autorisation (non) - Suffisance de prescriptions complémentaires - SAGE en cours d’élaboration - Obligation de consultation de la commission locale de l’eau sous peine de nullité (non) - Légalité de l’arrêté portant prescriptions complémentaires (oui).

14

« Considérant (…) que le changement notable apporté par l’arrêté attaqué, aux seules modalités de traitement des boues produites par les installations de traitement des eaux usées, sans aucune autre modification des installations prévues ou des normes de rejet, aurait été de nature à entraîner "des dangers ou inconvénients" nouveaux, ou à accroître sensiblement ceux créés par les installations initialement prévues, et auraient ainsi obligé le préfet à inviter le bénéficiaire à déposer une nouvelle demande d’autorisation, qui aurait nécessité une instruction comprenant une nouvelle enquête publique ; que par suite, le moyen tiré de ce que la susdite modification ne pouvait régulièrement être autorisée par simple prescription complémentaire dans les formes prévues à l’article R. 214-17, sans nouvelle enquête publique, doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que si, en vertu de l’article R. 214-10 du Code de l’environnement, le dossier de demande d’autorisation est communiqué pour avis, notamment, à la commission locale de l’eau, lorsque l’opération se situe dans le périmètre d’un schéma d’aménagement et de gestion des eaux approuvé ou a des effets sur un tel périmètre, il ressort de l’instruction, et n’est d’ailleurs pas discuté par la commune requérante, que le schéma d’aménagement et de gestion des eaux du sous-bassin de l’Huisne dans le périmètre duquel se trouve le site d’implantation est en cours d’élaboration ; que le moyen tiré de ce que l’arrêté attaqué serait intervenu à l’issue d’une procédure irrégulière faute de consultation de la commission locale de l’eau doit être écarté. »
TA Caen, 7 novembre 2008, Commune de Saint-Langis-lès-Mortagne, no 0800462.

Aire de passage pour gens du voyage - Ouvrages hydrauliques d’assainissement - Satisfaction des exigences de la gestion équilibrée (non) - Défaut d’analyse explicite de la compatibilité des travaux avec les objectifs du SDAGE (oui) - Annulation de l’autorisation (oui).

15

« Considérant qu’il résulte de l’examen de l’étude d’impact que celle-ci se borne à indiquer, que "compte tenu des caractéristiques du projet (pas de remblaiement, faible imperméabilisation des sols) et des mesures compensatoires prises (restauration de prairies humides et création de reboisement), le projet est compatible avec le SDAGE" ; que cette indication succincte ne saurait tenir lieu d’analyse explicite de la compatibilité des travaux autorisés avec les objectifs précités du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée-Corse, qui ne sont pas non plus exposés, alors que ces travaux (…) ont une incidence particulière sur le respect de ces objectifs ; que, par suite, la procédure d’autorisation des travaux litigieux est entachée d’une irrégularité substantielle. »
TA Grenoble, 26 mai 2009, Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature de l’Isère, no 0802760.

Golf - Atteinte à une espèce animale protégée (tortue d’Hermann) - Absence de garantie d’une protection apportée à cette espèce par les mesures compensatoires - Légalité du refus de l’autorisation (oui).

16

« Considérant qu’il ne peut être sérieusement contesté que les travaux majeurs envisagés ainsi que l’urbanisation qui en résulte auraient un impact sur le milieu dans lequel cette espèce protégée évolue, qu’ils sont à l’évidence de nature à accroître sensiblement la mortalité des tortues d’Hermann et à nuire gravement à leur reproduction, que les mesures compensatoires proposées ne garantissent en aucune manière la protection effective d’une espèce qu’il est interdit de détruire (…). »
TA Nice, 5 février 2009, Société domaine de Rouvède, no 04045790.

17Les travaux hydrauliques nécessités par les aménagements ferroviaires ou routiers constituent une majorité des opérations soumises à la police de l’eau.

18S’agissant de plein contentieux, le juge utilise les règles applicables au jour où il se prononce à moins que les textes n’en disposent autrement. Ainsi, le décret no 2006-881 du 17 juillet a prévu des dispositions transitoires en prévoyant que les règles anciennes continuaient à s’appliquer aux demandes d’autorisation et aux déclarations qui avaient été reçues par le préfet avant le 1er octobre 2006 : telle opération qui n’aurait dû être soumise qu’à déclaration, si la règle de plein contentieux avait été appliquée, demeurait soumise au régime d’autorisation prévu par l’ancienne nomenclature.

19De façon pragmatique, le juge adopte une lecture strictement littérale des textes en :

  • refusant d’inclure dans le champ de l’enquête publique des opérations soumises à autorisation, les extensions futures de l’ouvrage ;
  • insistant sur le principe d’indépendance des législations entre la DUP, la police de l’eau, la police de l’urbanisme ;
  • limitant au strict nécessaire prévu par les textes le nombre des pièces du dossier susceptibles d’être obligatoirement communiquées au pétitionnaire, au commissaire-enquêteur ou au CODERST.

20En l’absence de modifications considérées comme substantielles, une nouvelle autorisation n’est pas requise et des prescriptions complémentaires à l’arrêté initial d’autorisation suffisent (ainsi de la seule modification du procédé de traitement des boues pour une station d’épuration à l’exclusion de toute modification des installations elles-mêmes).

21Par ailleurs, la consultation de la commission locale de l’eau n’est requise sous peine de nullité de la procédure que s’agissant d’un SAGE définitivement approuvé, la seule approbation de son périmètre ne suffisant pas à la constituer.

22Avant l’entrée en vigueur de la nouvelle nomenclature des IOTA au titre de la police de l’eau, on rappellera également que les golfs étaient soumis à autorisation. S’ils ne figurent pas en tant que tels dans la nomenclature, ils n’en sont pas moins susceptibles d’être soumis à autorisation ou déclaration du fait de leurs prélèvements ou de leurs rejets.

23Enfin, le juge attache une attention particulière :

  • dans le document d’incidences hydrauliques (ou dans l’étude ou la notice d’impact si celle-ci est exigée) à l’examen de la compatibilité de l’opération avec les dispositions du SDAGE ou du SAGE qui conditionne en fait la faisabilité ou non de celle-ci ;
  • à la présence sur le site d’espèces protégées et aux mesures compensatoires susceptibles d’être proposées pour pallier les incidences de l’aménagement.

Cours d’eau

Permanence du lit et du débit la majeure partie de l’année - Caractère de cours d’eau (oui) - Prélèvement de la totalité des eaux - Soumission à la police de l’eau (non).

24

« Considérant que pour attaquer l’arrêté du 25 janvier 2008, M. Pierrat soutient que l’eau alimentant le plan d’eau situé sur le terrain dont il est propriétaire est prélevée dans un fossé artificiel canalisant les eaux de ruissellement et non pas dans un cours d’eau ; que, toutefois, il résulte de l’instruction que l’eau prélevée par le requérant provient d’un ru défini par la permanence de son lit et de son débit la majeure partie de l’année ; que, si son débit connaît de fortes variations en fonction des conditions climatiques, le requérant n’établit pas que ce ru ne serait alimenté que par les eaux de pluie ; que, par suite, M. Pierrat ayant installé un système de captage lui permettant de prélever toute l’eau du ru, le préfet des Vosges était tenu de le mettre en demeure de déposer une demande d’autorisation ou une déclaration en application des dispositions précitées du Code de l’environnement ; que, dès lors, l’autre moyen présenté par M. Pierrat contre l’arrêté attaqué et fondé sur un défaut de motivation doit être écarté comme inopérant. »
TA Nancy, 28 avril 2009, M. Pierrat, no 0800480.

25De façon pragmatique, le juge vérifie que l’écoulement se produit la majeure partie de l’année et ne se limite pas aux seuls épisodes pluvieux. Dès lors, la qualification de cours d’eau lui est attribuée.

Déclaration

Circuit automobile - Oubli d’une rubrique par le demandeur sans influence sur la légalité du récépissé dès lors que les prescriptions générales relatives à cette rubrique sont mises en œuvre - Obligation de déroulement d’une consultation publique préalable (non) - Compatibilité avec le SDAGE (oui) - Légalité du récépissé (oui).

26

« Considérant qu’il résulte de l’instruction que le dossier de demande (…) comportait des éléments prévus par les dispositions de l’article 29 précité du décret du 29 mars 1993 ; que s’il faisait mention de ce que le projet pourrait relever de la rubrique 2.2.0 de la nomenclature eau annexée au décret no 93-743 du 29 mars 1993, il l’excluait aussitôt compte tenu des caractéristiques de l’installation projetée ; que si cette demande ne mentionnait pas que le projet relevait de la rubrique 2.5.2 de la même nomenclature, et négligeait par suite d’étudier les conséquences de la présence d’un ouvrage ayant des effets sur la luminosité nécessaire au maintien de la vie et de la circulation aquatique, cette circonstance est sans conséquence sur la légalité du récépissé de déclaration dès lors que celui-ci mentionne en définitive que la demande relève de cette rubrique oubliée par les demandeurs et est par suite soumise aux prescriptions de l’arrêté ministériel du 13 février 2002 fixant les prescriptions générales applicables aux installations, ouvrages, travaux ou activités relevant de cette rubrique ;
Considérant que (…) la demande présentée en application de l’article L. 214-1 du Code de l’environnement n’avait pas pour objet la construction du circuit automobile projeté sur le site de la ferme de Fary, mais relevait de la seule réglementation de la police de l’eau organisée notamment par les décrets du 29 mars 1993 précités ; que, par suite, les requérantes ne peuvent utilement soutenir que la délivrance du récépissé aurait dû être précédée d’une concertation publique en vertu des articles L. 110-1 et L. 121-1 du Code de l’environnement ; que la branche du moyen tirée de ce que la Convention d’Aarhus du 25 juin 1998 n’a pas été respectée ne peut qu’être écartée dès lors qu’elle ne précise pas laquelle des dispositions de ladite convention elle invoque et n’est par suite pas assortie de précisions permettant d’en apprécier le bien-fondé ;
Considérant (…) que le projet permettra d’une part de respecter, en compatibilité avec les objectifs du SDAGE, la priorité donnée au contrôle des rejets dans les eaux superficielles pour assurer la qualité des nappes, la restauration des milieux aquatiques et la réduction des ruissellements dès lors que des dispositifs de récupération et de traitement des eaux de ruissellement du circuit seront mis en place et que l’augmentation du volume de ces eaux de ruissellement a été évaluée au pourcentage de 3,38 %, compatible avec l’objectif A2 du SDAGE tendant à limiter cette augmentation ; que, d’autre part, le prétraitement des eaux de ruissellement et la faible augmentation de leur volume limitent les incidences sur l’environnement aquatique du projet, en particulier en ce qui concerne le débit et la qualité des eaux du ruisseau de Dolly ou la qualité des eaux souterraines et des nappes (…). »
TA Amiens, 28 avril 2009, Association « Vie et Paysages » et Association « SOS au pays des écuyers », no 0602450.

27Egalement valable en matière d’autorisation, le fait qu’une entrée dans une rubrique de la nomenclature ait été oubliée par le déclarant ne suffit pas à invalider la procédure pour autant que l’administration ait fait application de la rubrique manquante en soumettant l’opération aux prescriptions générales prévues à ce titre.

Déclaration d’utilité publique

Travaux de dérivation de crues - Intérêt de l’opération pour la sécurité publique (oui) - Utilité publique (oui).

28

« Considérant (…) que la commune de Geu a décidé d’aménager une dérivation destinée à recueillir une partie des eaux du Riu-Gros en période de crue et à les amener sur des terres agricoles situées sur la rive gauche du ruisseau afin de préserver les habitations situées sur sa rive droite d’inondations telles que celle qui s’est produite en 1993 ; que si les requérants soutiennent que les dégâts provoqués par cette crue, à caractère centennal, auraient pu être évités si la commune avait entretenu le lit et les berges du ruisseau ainsi que le ponceau qui le traverse et restauré les ouvrages maçonnés du lit artificiel du ruisseau entre ce pont et la voie ferrée, il ressort du dossier soumis à enquête publique que ces travaux, qui ont été réalisés après la crue, ne permettent pas d’augmenter la capacité maximale du ruisseau de manière suffisante pour éviter le débordement de ses eaux en période de crue ; que si la déviation que l’arrêté en litige déclare d’utilité publique aura pour effet, en période de crue, d’inonder les terres agricoles situées sur la rive gauche du ruisseau, dont la moitié environ appartient aux requérants, il ressort des pièces du dossier, d’une part, que cette partie de leurs terres, en nature de pâturages, de bois de hêtres ou de taillis, et non de cultures, est utilisée pour une activité d’élevage et ne représente que 20 % environ des parcelles dont ils sont propriétaires et, d’autre part, que dix des vingt-cinq parcelles ainsi situées en zone inondable ne sont susceptibles d’être inondées que lors des crues centennales ; qu’en outre, le dossier de l’enquête publique prévoit l’indemnisation des dommages subis par les exploitants agricoles du fait de l’inondation de leurs terres ; qu’enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’aménagement de la dérivation modifiera le système d’irrigation mis en place à partir du Riu-Gros ; qu’eu égard à l’intérêt de l’opération pour la sécurité publique des habitants, les inconvénients qu’elle présente pour les terres agricoles situées en zone inondable, ne sont pas de nature à lui retirer son caractère d’utilité publique. »
CAA Bordeaux, 23 mars 2009, MM. Dodet, no 07BX01345.

Station d’épuration des eaux résiduaires urbaines - Avis favorable du commissaire-enquêteur assorti d’une recommandation - Caractère de réserve (non) - Amélioration de la qualité des eaux du milieu récepteur - Utilité publique (oui).

29

« Considérant (…) que le commissaire-enquêteur a émis un avis favorable au projet ; qu’il a assorti cet avis favorable, d’une part de la constatation que le rejet des eaux usées se ferait dans une partie de la rivière Omignon touchant les propriétés de Mme Turchini, d’autre part d’une recommandation tendant à ce que quelques aménagements d’ordre technique tels que le désengorgement d’un contre-fossé soient apportés afin d’éviter au maximum les inondations ; que cette constatation et cette recommandation ne peuvent être regardées comme des réserves dont la levée constituaient un préalable à la décision attaquée ; qu’elles ne sont de nature, contrairement à ce que soutient l’intervenante, ni à remettre en cause le sens favorable de l’avis émis, ni à l’entacher de contradiction ;
Considérant (…) que le projet déclaré d’utilité publique par l’arrêté attaqué a pour objet d’améliorer le traitement des eaux usées de la commune d’Athies, antérieurement déversées directement dans la rivière Omignon ; que ce projet revêt ainsi un caractère d’intérêt général. »
TA Amiens, 16 décembre 2008, M. Verbrugge, Mme Turchini, nos 0603040, 0603063.

30L’amélioration de la situation - qu’il s’agisse de l’alimentation en eau potable, de la sécurité (prévention des crues) ou de la salubrité (traitement des eaux usées) - constitue un élément décisif pour attester de l’utilité publique d’une opération et surmonter les atteintes à la propriété privée, le coût financier ou les autres inconvénients ou atteintes.

Domaine public

Déclassement d’un cours d’eau - Transfert de propriété du seul lit mineur-Mise à la charge des riverains de l’entretien des digues de protection contre les inondations (non).

31

« Considérant que si les requérants font valoir que cette décision de déclassement transfère aux riverains de ce cours d’eau la charge de l’entretien des digues de protection contre le risque inondation dans le val de Bréhemont, il résulte des termes mêmes de l’arrêté attaqué que seule la propriété du lit mineur du « Vieux-Cher » se trouve transférée à ses riverains ; qu’ainsi le moyen en tout état de cause manque en fait ; que les moyens tirés de ce que l’Etat met en péril la sécurité des habitants en refusant d’entretenir et de restaurer le système de protection des digues du « Vieux-Cher » sont inopérants à l’encontre de la décision attaquée. »
TA Orléans, 20 janvier 2009, M. Taffonneau et autres, no 0700882.

32Les digues de protection contre les inondations construites le long des cours d’eau domaniaux se trouvent en dehors de la zone retenue pour la délimitation du domaine public fluvial qui est constatée par la limite atteinte par les plus hautes eaux avant leur débordement (règle dite du Plenissimum Flumen), c’est-à-dire l’extension maximale au seul lit mineur du cours d’eau. En l’occurrence, si la propriété des digues de protection et donc leur entretien ne sont pas transférés aux riverains, il est toutefois permis de se demander si la propriété de ces digues ne revient pas aux riverains ainsi que leur entretien du fait de la théorie de l’accession, celles-ci étant construites sur leur propriété et pouvant en être considérées comme l’accessoire. A moins qu’en l’espèce, un acte réglementaire ait antérieurement classé ces digues comme dépendances du domaine public et qu’elles le demeurent.

Droits fondés en titre

Limitation temporaire du débit d’un cours d’eau à l’aval d’un ouvrage servant à l’alimentation d’un canal de navigation et à l’adduction en eau potable-Situation de crise - Diminution d’office du débit dérivé pour un ouvrage fondé en titre - Caractère indifférent du fondement en titre au regard d’impératifs de crise et à la nécessité d’alimenter la population en eau potable.

33

« Considérant (…) que les autorisations ou permissions de prises d’eau, peuvent être révoquées ou modifiées en cas de nécessité pour assurer l’alimentation en eau potable d’une zone d’habitation, quelles que soient les conditions dans lesquelles elles ont été accordées ou consenties ; que par l’arrêté attaqué le préfet de la Haute-Marne a limité temporairement le débit de la rivière Mouche en aval du barrage réservoir de La Mouche au débit réservé qui doit être assuré par les "lâchures" opérées à partir du vannage de la tour de prise d’eau du réservoir, dénommée "tour du Moulin-Thévenot" ; que le préfet a pu, à bon droit, se fonder sur les dispositions précitées de l’article L. 215-10 pour modifier le droit de prise d’eau sur le bief qui alimente le moulin dont les requérants sont propriétaires, sans qu’il y ait lieu de rechercher si le droit de prise d’eau était fondé en titre ;
Considérant (…) que la situation hydrologique était alarmante sur le plateau de Langres à la fin de l’été 2004 ; que le niveau minimal d’exploitation était presque atteint dans les différents barrages réservoirs, les précipitations enregistrées au cours du mois d’octobre n’ayant pas suffi à reconstituer les réserves d’eau ; que la limitation des "lâchures" d’eaux du barrage réservoir de la Mouche vers la rivière était nécessaire pour préserver la qualité de l’eau dans la conduite qui permet l’alimentation en eau potable du sud de la Haute-Marne ; que par suite, le droit d’eau du moulin Thévenot a pu légalement être restreint jusqu’au 15 décembre 2004. »
CAA Nancy, 2 mars 2009, Mme Richard, M. Corbel, no 0700426.

Détermination de la consistance légale - Impossibilité pour quantifier un droit d’eau de se référer à des études théoriques ne tenant pas compte de la situation réelle d’origine de l’ouvrage.

34

« Considérant que pour contester la consistance du droit fondé en titre retenu par l’administration et justifier la modification demandée, M. Labouly produit une étude réalisée au mois de septembre 2007 à l’effet de quantifier son droit d’eau fondé en titre ; que, toutefois, l’administration soutient sans être contredite que les abaques de l’instruction technique de 1977 ne peuvent être utilisées que pour calculer un débit nominal théorique d’une conduite neuve d’un réseau et qu’en l’espèce, s’agissant de la détermination du débit pouvant transiter dans un canal en pleine terre, conformément à la situation d’origine, l’étude hydraulique devrait procéder à un calcul de ligne d’eau à part entière et retenir une chute d’eau "nette" correspondant à la seule puissance disponible pour des moulins de l’ancienneté du moulin d’Escala, eu égard aux moyens techniques existant à l’époque d’acquisition du titre ; que, dans ces conditions, il résulte de l’instruction que les calculs soumis au Tribunal par M. Labouly ne sont pas de nature à établir que la consistance légale du droit d’eau retenue par le préfet des Hautes-Pyrénées ne correspond pas à la consistance résultant du titre originaire. »
TA Pau, 7 avril 2009, M. Labouly, no 0702065.

35Si l’article L. 215-10-II du Code de l’environnement rend applicables aux ouvrages fondés en titre (« établissements ayant une existence légale ») les règles de police de l’eau permettant de les modifier, voire de les révoquer sans indemnité pour des raisons tirées de l’intérêt général, encore incombe-t-il à l’administration de fournir la preuve du ou des motifs d’intérêt général au nom desquels elle agit. Par ailleurs, on rappellera que l’ordonnance no 2005-805 du 18 juillet 2005 a assimilé les installations et ouvrages fondés en titre aux IOTA existant avant la loi du 3 janvier 1992, qui sont réputés déclarés ou autorisés au titre de la police de l’eau et, de ce fait, susceptibles par exemple de faire l’objet de prescriptions complémentaires. En contrepartie, en cas de modification ou de révocation unilatérale, ils bénéficient des mêmes garanties procédurales que celles accordées à une déclaration ou à une autorisation. Cela paraît toutefois constituer une régression dès lors qu’avant la parution de cette ordonnance, un droit fondé en titre était assimilé a priori et dans tous les cas à une autorisation.

Energie (police de l’)

Concession - Retrait - Cours d’eau réservé - Aménagement d’une passe à poissons et modernisation des installations permettant une augmentation de la production d’énergie - Entreprise nouvelle (non) - Défaut allégué de prescription d’un dispositif de franchissement pour les engins de loisirs nautiques non motorisés - Contrariété avec le principe de gestion équilibrée (non).

36

« Considérant (…) que contrairement à ce que soutient l’appelant, ces travaux visent non à la création d’une entreprise hydraulique nouvelle mais à la simple modernisation d’un ouvrage existant et régulièrement installé, que les dispositions précitées de la loi du 16 octobre 1919 n’ont pas pour effet d’interdire ; qu’en outre, la circonstance qu’à la faveur de ces aménagements, la production d’électricité soit également susceptible d’être augmentée du fait d’un accroissement de 10 mètres cubes par seconde du débit équipé de l’ouvrage, est sans incidence sur la régularité de l’autorisation litigieuse au regard de ces dispositions, dès lors qu’il est constant que la hauteur du barrage est demeurée inchangée ;
Considérant (…) qu’en autorisant des travaux destinés à l’amélioration des conditions de circulation des poissons migrateurs et qui, sans impact sur l’environnement, permettaient également une légère augmentation de la production d’énergie hydraulique, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a suffisamment pris en compte les différentes activités susceptibles d’être conciliées au sens des dispositions de l’article 211-1 du Code de l’environnement, nonobstant la circonstance qu’à l’occasion de ces aménagements, n’ait pas été également prescrite la réalisation d’un dispositif, d’ailleurs inexistant depuis l’origine, de franchissement du barrage par les embarcations de loisirs non motorisées ; que son arrêté ne peut, pour les mêmes motifs, être regardé comme ayant, de ce seul fait, méconnu les dispositions de l’article L. 214-12 du même code, qui, en l’absence de schéma directeur et de gestion des eaux approuvé, garantissent la libre circulation de telles embarcations sur les cours d’eau. »
CAA Bordeaux, 19 février 2009, M. Scharff, no 07BX00074.

Règlement d’eau d’une centrale hydroélectrique - Inapplicabilité aux établissements fondés en titre avant 2014 des nouvelles modalités de calcul de débit minimum - Limitation de la hauteur du déversoir pour prévenir les crues-Légalité (oui) - Installation d’un dispositif de fonctionnement pour les engins de loisirs nautiques non motorisés - Légalité au regard de la difficulté du franchissement (oui) - Obligation de respecter le droit de propriété sur les berges des cours d’eau non domaniaux.

37

« Considérant (…) que le moulin de la Buissière situé sur l’Oise (…), existait avant 1789 ; que, dès lors, la centrale hydroélectrique s’étant substituée à l’ancien moulin doit être regardée comme étant fondée en titre ; que, par suite, le préfet a fait une inexacte application des dispositions de la loi du 16 octobre 1919 en soumettant cette installation à une autorisation et en limitant celle-ci dans le temps et il y a donc lieu pour la Cour de modifier les dispositions de l’article premier de l’arrêt attaqué en tant qu’elles accordent une autorisation et ne reconnaissent pas le droit fondé en titre ;
Considérant (…) qu’il résulte des dispositions (…) de l’article L. 214-18 du Code de l’environnement, qu’en raison de son droit fondé en titre, l’application des nouvelles modalités de calcul du débit minimal à respecter en aval des ouvrages ne pourra pas être imposée à la Société centrale de Flavignyle-Grand avant le 1er janvier 2014 ; que, dès lors, il y a lieu pour la Cour de modifier les dispositions de l’article 5 de l’arrêté attaqué en tant qu’elles fixent un débit réservé d’1,12 m3/s avant cette date ;
Considérant (…) que les dispositions de l’article L. 215-10 du Code de l’environnement autorisent le préfet à limiter la hauteur du déversoir pour un motif d’intérêt général, et notamment pour prévenir les crues en amont de l’installation ;
Considérant que l’arrêté préfectoral attaqué mentionne que le fonctionnement actuel de la centrale hydroélectrique ne garantit pas un écoulement régulier des eaux ni une protection contre les inondations en cas de crue habituelle ; qu’ainsi, la prescription inscrite à l’article 7 de l’arrêté contesté qui prévoit qu’il y a lieu de fixer l’arasement du déversoir situé en amont de l’installation à la cote 100,71 mètres, est suffisamment motivée ;
Considérant (…) que le principe de liberté de circulation pour ces embarcations prévu à l’article L. 214-12 se doit de respecter le droit de propriété sur les berges des cours d’eau non domaniaux ou sur les ouvrages hydrauliques ;
Considérant que l’article 9o de l’arrêté prescrit la réalisation d’un passage et d’une fosse de réception pour les engins nautiques de loisirs non motorisés sur le déversoir appartenant à l’exploitant ; que compte tenu des incidents constatés, notamment des bris d’embarcations lors du passage du déversoir, la société requérante ne soutient ni ne démontre que la mesure de police prise par le préfet était inutile, disproportionnée ou de nature à porter une atteinte illégitime à ses droits. »
CAA Douai, 26 mars 2009, Société centrale de Flavigny-le-Grand, no 07DA01281.

Débits minimums - Refus du préfet de réduire ces débits fondés sur les dispositions du SDAGE - Légalité du refus (oui).

38

« Considérant (…) que (…) les débits réservés proposés par les requérants sont inférieurs au débit de crise fixé à 2 m3/s par le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Adour Garonne ; que, dans ces conditions, le préfet des Hautes-Pyrénées a pu légalement refuser, pour ce seul motif, de réduire les débits réservés litigieux respectivement à 1,8 m3/s, 1,7 m3/s et 0,8 m3/s. »
TA Pau, 7 avril 2009, Union des producteurs autonomes Neste-Adour-Garonne, M. Labouly, SNC Peyres et Birabent, Société hydroélectrique du Bas-Mour, no 0700633.

Demande d’autorisation pour l’implantation d’une microcentrale hydroélectrique - Domaine public fluvial - Refus du préfet de prescrire l’enquête publique - Mesure préparatoire à une décision ultérieure (non) - Autre demande ne pouvant être considérée comme concurrente eu égard à son lieu d’implantation - Injonction faite au préfet de prescrire l’enquête publique.

39

« Considérant (…) que seul le préfet est compétent pour réglementer les conditions techniques relatives aux dispositions d’exploitation normale des ouvrages hydrauliques ; que, par suite et s’agissant des sports d’eau vive, ledit règlement ne pouvait légalement prévoir dans son article 6 que les conditions techniques seraient fixées par une convention conclue entre EDF, la Fédération française de canoë-kayak et la communauté de communes de l’argentière ; que, dans cette mesure, la Fédération des Hautes-Alpes pour la pêche et la protection du milieu aquatique est fondée uniquement à demander l’annulation du règlement d’eau en tant qu’il concerne les sports d’eau vive. »
TA Châlons-en-Champagne, 19 février 2009, Société Solenate Energies, no 0802237.

Autorisation - Refus de la demande tendant à la révision de l’arrêté d’autorisation - Insuffisance de l’étude environnementale - Légalité du refus (oui).

40

« Considérant (…) qu’en l’espèce (…) l’étude environnementale contenue dans le dossier de demande de révision contient de nombreuses insuffisances ; que notamment, cette étude a été réalisée en tenant compte d’un débit de la Loire de 19 m3/s qui, ainsi qu’il vient d’être dit, ne correspond pas au débit des eaux devant être retenu pour garantir en permanence la vie, la circulation et la reproduction des espèces qui peuplent les eaux au moment de l’installation de l’ouvrage ; qu’elle n’évoque pas, par ailleurs, la compatibilité du projet avec la zone de protection spéciale Natura 2000 instituée dans les gorges de la Loire dans laquelle l’usine de la Vousse est incluse, ni avec les préconisations du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Loire-Bretagne ou ne procède à aucune étude sur les conséquences du projet sur les milieux de la vie du brochet, de la vandoise et de la truite, présents sur le site et qui sont des espèces piscicoles classées comme protégées par l’arrêté ministériel du 8 décembre 1988 susvisé, lequel interdit, sur tout le territoire national, la destruction, l’altération ou la dégradation de leurs milieux aquatiques ;
Considérant, enfin, que si la société requérante affirme, sans autre précision, que "la baisse de l’hydrologie a été importante de l’ordre de 23 %", elle ne le justifie pas alors qu’au demeurant il ressort de ses propres études, contenues dans l’annexe de sa demande de révision, que le secteur en cause a connu ces dernières années des phénomènes cycliques de sécheresse attenant à des épisodes pluvieux ; que les phénomènes de sécheresse constatées ces dernières années sont donc, en tout état de cause, insuffisants pour établir que la Loire connaît, de façon irrévocable, une diminution de son débit justifiant la révision à la baisse des débits réservés ;
Considérant, en l’espèce, que la décision contestée a pour effet de maintenir à 4 m3/s le débit naturel de la Loire au droit de l’ouvrage, ce qui représente (…) 15 % du module naturel ; que le préfet de la Haute-Loire fait valoir que ce niveau a été arrêté par des experts afin de permettre de façon certaine à l’exploitant de respecter l’obligation minimale d’un débit réservé de 10 % faute de connaître avec exactitude le débit minimum de la Loire en raison des différents prélèvements d’eaux qu’elle subit ainsi que celui nécessaire au maintien de la vie biologique ; que la société requérante n’apporte aucun élément de nature à établir le débit de la Loire au droit de son installation, pas plus que l’existence d’un moindre besoin pour assurer la pérennité de la vie, de la circulation et de la reproduction des espèces, et en particulier de celles bénéficiant d’une protection ; que, dans ces circonstances, eu égard aux prélèvements d’eaux effectués en amont de l’installation et qui ne sont pas reconstitués, le préfet de la Haute-Loire n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en fixant le débit minimal nécessaire pour sauvegarder les intérêts écologiques visés à l’article L. 214-18 du Code de l’environnement à 4 m3/s alors même qu’il représente 15 % du module naturel (…). »
TA Clermont-Ferrand, 5 mai 2009 (2 esp.), SNC Usine électrique de Vousse c/ Préfet de la Haute-Loire, no 081235, SNC Usine de Vert c/ Préfet de la Haute-Loire, no 081234.

41Si la police de l’eau et la police de l’énergie s’appliquent bien aux ouvrages fondés en titre qui peuvent se voir imposer par exemple la limitation de leur hauteur de chute pour prévenir les inondations (art. L. 215-10 du Code de l’environnement), ceux-ci bénéficient toutefois, aux termes de l’article L. 214-17.III du même code, d’un délai jusqu’au 1er avril 2014 au plus tard pour se mettre en conformité au regard de nouvelles modalités de calcul de débit minimum susceptibles de leur être imposées pour atteindre le bon état écologique.

42Il en va de même s’agissant des dispositifs de franchissement des poissons migrateurs sur ces mêmes ouvrages fondés en titre.

43Par ailleurs, si l’ouvrage présente une difficulté majeure de franchissement et, de ce fait, des risques pour la sécurité des pratiquants de loisirs nautiques, le juge estime que l’autorité administrative est en droit d’imposer l’installation par le propriétaire de l’ouvrage d’un dispositif de franchissement. Il est toutefois rappelé que la pratique de ce loisir au travers de la libre circulation sur les cours d’eau des engins de loisirs nautiques motorisés pour être reconnue par la loi, n’en implique pas moins par ses pratiquants le respect du droit de propriété sur les berges des cours d’eau non domaniaux.

44Le juge administratif, au travers de la notion de gestion équilibrée de la ressource en eau et des milieux aquatiques impliquant une conciliation entre les différents usages, harmonise ainsi sa jurisprudence avec celle de la juridiction judiciaire (CA Riom, 4 juin 1992, Association AN Rafting et autres, no 317-2511/91).

45Il vérifie la motivation en cas de refus opposé par le préfet à une demande de révision à la baisse du débit réservé : gains de production trop faible alors qu’aucun effort n’a été fait pour améliorer les rendements pour les années précédentes de nature à justifier une modification de l’autorisation, risque de dégradation du milieu environnemental en l’absence de justification apportée par le demandeur de la garantie en permanence de la vie, de la circulation et de la reproduction des espèces vivant dans les eaux.

46Enfin, en l’absence de toute autre demande concurrente qui s’avérerait mieux adaptée, le préfet ne peut refuser la mise à l’enquête du dossier dès lors que celui-ci est complet et régulier. Sinon dans ce cas, le refus de mise à l’enquête ne peut s’analyser en une décision préparatoire à une décision ultérieure non susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, mais constitue bien un acte administratif faisant grief, le refus de mise à l’enquête pouvant dès lors faire l’objet d’une injonction de prescrire l’enquête.

Littoral

Menace d’effondrement alléguée d’une falaise littorale - Obligation pour le maire ou le préfet de faire procéder à son confortement (non) - Obligation de faire cesser le risque en interdisant l’accès (oui) - Obligation pour l’Etat ou la commune de participer financièrement à des travaux de lutte contre l’action de la mer sur le littoral (non).

47

« Considérant que M. Cheftel, propriétaire d’une maison située sur la commune de Plougonvelin, a demandé au maire de cette commune de faire usage des pouvoirs qu’il détient en application des dispositions précitées pour procéder à des travaux d’enrochement de la falaise bordant sa propriété, au motif que l’effondrement de cette falaise présentait un risque pour la sécurité publique, puis au préfet du Finistère de se substituer au maire de cette commune dans l’exercice de ses pouvoirs de police ; qu’à supposer même que l’existence d’un tel risque soit avéré, et qu’un péril grave et imminent pour la sécurité publique rende obligatoire l’exercice par le maire de Plougonvelin de son pouvoir de police ou par le préfet du Finistère de son pouvoir de substitution, il est constant que ces autorités n’auraient pas été tenues de faire procéder à des travaux de confortement de la falaise en cause, mais qu’il leur appartenait seulement de faire cesser le risque que présente cet effondrement, par exemple en interdisant l’accès aux zones situées à proximité de ladite falaise ; que, par suite, M. Cheftel n’est pas fondé à soutenir que le maire de Plougonvelin et le préfet du Finistère étaient dans l’obligation de faire usage des pouvoirs qu’ils tiennent des dispositions précitées du Code général des collectivités territoriales pour faire réaliser des travaux de consolidation de la falaise bordant sa propriété. »
TA Rennes, 23 avril 2009, M. Cheftel, nos 0603358, 0605105.

48S’agissant d’une falaise située en bord de mer qui en menaçant de s’effondrer risquerait d’endommager la maison d’habitation d’un propriétaire riverain, les règles de la police générale de la sécurité publique (art. L. 2212-2, L. 2212-4 et L. 2215-1 du CGCT), impliquent seulement que le maire, ou en cas de carence de celui-ci le préfet usant de son pouvoir de substitution, interdise l’accès à la zone dangereuse mais en aucun cas que l’autorité de police réalise des travaux de confortement. Ainsi, les dispositions de l’article L. 211-7-I-5o du Code de l’environnement qui, sous couvert d’une procédure de déclaration d’intérêt général, habilitent tant les collectivités territoriales que l’Etat à entreprendre en particulier des travaux de défense contre la mer, laissant ouverte cette faculté qui n’est en aucun cas une obligation. En d’autres termes, la participation financière à l’exécution de tels travaux demeure de la seule appréciation de la collectivité [1].

Nitrates

Demande d’annulation des décrets relatifs respectivement à certaines zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE) et à certaines zones de protection des aires d’alimentation des captages - Défaut de base légale (non) - Atteinte au principe de sécurité juridique (non) - Atteinte au principe de confiance légitime (non) - Légalité des décrets (oui).

49

« Considérant que l’Association pour le maintien de l’élevage en Bretagne (AMEB) demande l’annulation du décret du 14 mai 2007 relatif à certaines zones soumises à contraintes environnementales et modifiant le Code rural ; que ce décret a été pris sur le fondement de l’article L. 211-3 du Code de l’environnement, qui prévoit notamment que des prescriptions spécifiques puissent être édictées pour assurer la protection quantitative et qualitative dans les aires d’alimentation des captages d’eau potable d’importance, en vue de répondre aux objectifs fixés par la directive du 16 juin 1975 et celle du 20 décembre 2000 ; que, par suite, l’association requérante n’est pas fondée à soutenir que le décret qu’elle attaque serait dépourvu de base légale ; Considérant (…) que le décret attaqué, qui donne aux préfets le pouvoir d’arrêter des périmètres et des programmes d’actions en tenant compte le cas échéant des dispositifs réglementaires ou contractuels existant déjà sur les zones concernées (…) et de rendre obligatoires les mesures promues après un délai d’un an s’agissant de celles destinées aux aires d’alimentation des captages, et de trois ans pour les autres, permet aux professionnels concernés de disposer de délais pour s’adapter à des exigences au demeurant déjà bien connues d’eux ; que, dès lors, l’intervention du décret attaqué ne méconnaît pas le principe de sécurité publique. »
CE, 6e et 1re sous-sections réunies, 10 avril 2009, Association pour le maintien de l’élevage en Bretagne (AMEB), no 307513 (conclusions de Mme De Silva publiées dans la RJE, no 1-2010, p. 99).

50

Considérant (…) que le principe de confiance légitime, qui fait partie des principes généraux du droit communautaire ne trouve pas à s’appliquer dans l’ordre juridique national que lorsque la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit communautaire ; que tel est le cas d’un recours dirigé contre un décret pris pour tirer les conséquences d’une procédure en manquement engagée contre la France par la Commission européenne en raison de l’inobservation des obligations résultant de la directive no 75/440/CEE du 16 juin 1975 du Conseil relative à la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d’eau alimentaire ; Considérant que si l’article R. 1148-8 du Code rural, issu du décret du 14 mai 2007, prévoit que dans les zones de protection des aires d’alimentation des captages, le préfet ne rend obligatoires, dans les douze mois qui suivent la publication du programme d’action, que les mesures de ce programme pour lesquelles il estime que les objectifs prévus ne seront pas atteints à l’issue de cette période de douze mois, des considérations d’intérêt public impérieuses que ne pouvaient ignorer les professionnels concernés, résultant de la procédure de manquement engagée contre la France, s’attachaient à ce que le décret attaqué déroge à ces dispositions, dans les zones de captage visées par l’arrêt de manquement, afin de rendre obligatoires, dès le 1er janvier 2008, l’ensemble des mesures des programmes d’actions concernant ces zones ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de confiance légitime ne peut qu’être écarté. »
CE, 6e et 1re sous-sections réunies, 10 avril 2009, Association pour le maintien de l’élevage en Bretagne (AMEB), no 310184 (conclusions de Mme De Silva publiées dans la RJE, no 1-2010, p. 99).

51Si ces deux textes ont été pris expressément afin d’imposer des mesures de protection des captages d’eau destinée à être potabilisée pour la consommation humaine, le décret du 29 août 2007 l’a été en extrême urgence pour assurer l’exécution, certes tardive, de l’arrêt de la CJCE du 8 mars 2001 (aff. C-266/99) qui avait condamné l’Etat français pour carence dans la lutte contre la pollution des eaux de Bretagne par les nitrates, les eaux brutes étant impropres à leur transformation en eau potable eu égard aux teneurs en nitrates dépassant les 50 milligrammes par litre tolérés. Il s’agissait par là même d’éviter une nouvelle condamnation sur le même sujet qui n’aurait pas manqué de se conclure par une condamnation, cette fois pécuniaire, de la France avec le risque d’être assujettie à des astreintes financières, tant que les mesures requises n’auraient pas été prises.

52Le Conseil d’Etat rejette le défaut de base légale invoqué pour chacun des décrets par la requérante, le premier ayant été pris sur le fondement de l’article L. 211-3 du Code de l’environnement, le second sur celui des dispositions combinées des articles L. 114-1 du Code rural et L. 211-3 du Code de l’environnement.

53Il écarte également les arguments selon lesquels il aurait été porté atteinte au principe de sécurité juridique alors même que les mesures prescrites dans des périmètres délimités de façon précise par les préfets et les programmes d’action prévus ne devenaient obligatoires qu’à l’issue d’un délai d’un à trois ans pour imposer des exigences que ne pouvaient ignorer des professionnels informés de longue date d’un tel état de fait.

54Le Conseil d’Etat écarte enfin le moyen tiré de la méconnaissance du principe de confiance légitime qui s’applique lorsque la situation dont le juge est saisi se trouve régie par le droit communautaire (CE 9 mai 2001, Entreprise personnelle de transport FREYMUTH, Rec. tables p. 865 et 1151). Tel est bien le cas en l’occurrence s’agissant d’un recours dirigé contre un décret pris pour tirer les conséquences d’une procédure en manquement engagé contre la France pour non respect des obligations d’une directive (la directive 75/440/CEE du 16 juin 1975 « Eaux brutes potabilisables »).

55Le décret ne pouvait que déroger aux dispositions de droit commun dans les zones de captage visées précisément par l’arrêt en manquement pour en renforcer les effets attendus et atteindre ainsi les objectifs prescrits, cela au nom de « considérations d’intérêt public impérieuses que ne pouvaient ignorer les professionnels concernés ».

Périmètres de protection

Dérivation d’eaux souterraines - Inconvénients excessifs pour une exploitation agricole (non) - Contexte de croissance démographique - Utilité publique (oui) - Méconnaissance de la Charte de l’environnement (non).

56

« Considérant que le syndicat intercommunal eau et assainissement des trois cantons regroupe 24 communes d’une population totale de 11 165 habitants en 1999 ; qu’en raison de la croissance démographique, les besoins moyens estimés seront de 4 800 m3/heure et pourront atteindre 6 500 m3/heure ; que seuls les deux puits P4 et P2 du syndicat sont actuellement exploités à raison de 285 m3/heure ; que les puits P1 et P3 peuvent apporter un appoint de 100 m3/heure pouvant satisfaire les besoins complémentaires ou de pointes ; qu’ainsi, le projet permet d’assurer la satisfaction des besoins à terme ou en cas d’arrêt du puits 4 nécessité éventuellement par une pollution du gave de Pau ou par une inondation du champ captant ; qu’ainsi, l’utilité publique de l’opération est démontrée ; que si le requérant reproche à l’arrêté contesté, notamment au regard des interdictions et limitations qu’il impose, de la contraindre à revoir l’organisation de son exploitation et d’entraîner des pertes de production, il n’établit nullement qu’il en résulterait pour la gestion ou l’exploitation de ses parcelles des inconvénients excessifs eu égard à l’intérêt pour la santé publique que présente la protection desdits captages ;
Considérant que, lorsque des dispositions législatives ont été prises pour assurer la mise en œuvre des principes énoncés aux articles premier, 2 et 6 de la Charte de l’environnement de 2004, à laquelle le préambule de la Constitution fait référence en vertu de la loi constitutionnelle no 2005-205 du 1er mars 2005, la légalité des décisions administratives s’apprécie par rapport à ces dispositions, sous réserve, s’agissant de dispositions législatives antérieures à l’entrée en vigueur de la charte de l’environnement, qu’elles ne soient pas incompatibles avec les exigences qui découlent de cette charte ; qu’ainsi, la légalité de l’arrêté attaqué doit être appréciée au regard des dispositions législatives du Code de l’environnement et du Code de la santé publique qui imposent des sujétions destinées à assurer la protection de la qualité des eaux autour du point de prélèvement par l’instauration d’un périmètre de protection à l’intérieur duquel peuvent être réglementés les activités, installations et dépôts ; que le requérant ne démontre pas l’incompatibilité de ces dispositions antérieures à l’entrée en vigueur de la charte avec les principes qu’elle consacre ; que dès lors et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance de la charte de l’environnement doit être écarté. »
TA Pau, 5 mai 2009, M. Doumecq, no 0700672.

Mélange des eaux de plusieurs captages rendu nécessaire par la dégradation de la qualité de l’eau causée par les pratiques agricoles - Omission de la fixation d’un délai d’expropriation - Formalité substantielle (non) - Utilité publique (oui).

57

« Considérant (…) que les captages, dont l’arrêté contesté déclare d’utilité publique les périmètres de protection et instaure les servitudes y afférentes, assurent l’alimentation en eau potable de 2 300 abonnés ; que la teneur en nitrate dans les eaux des captages des Aulnais et de Méjanot est passée de 30 mg/l en 1983 à respectivement 70 et 52,7 mg/l en 2002 ; que, selon l’hydrogéologue agréé, seul le mélange des eaux de ces deux captages avec celui de la Baronnerie, dont la teneur des eaux en nitrate est passée de 1,3 mg/l en 1989 à 25 mg/l en 2002, permet de respecter la valeur limite de 50 mg/l dans l’eau distribuée ; que cette dégradation de la qualité de l’eau provient essentiellement des pratiques agricoles ; que, dans ces conditions, l’instauration de périmètres de protection présente un caractère d’utilité publique. »
TA Rennes, 3 février 2009, M. et Mme Leroux, no 053039.

Obligation de consulter la commission locale de l’eau d’un SAGE non encore approuvé (non) - Complétude du document d’incidences (oui) - Compatibilité avec le SDAGE (oui).

58

« Considérant (…) que le dossier soumis à autorisation comportait une étude d’incidence en date de 2001, ainsi qu’un complément d’étude réalisé en octobre 2006 pour tenir compte des évolutions, évaluer les incidences du projet au regard des objectifs fixés par Natura 2000 et justifier de la compatibilité du projet avec le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux ; que si la commune requérante soutient que cette étude serait insuffisante dans la mesure où elle ne comporte pas de documents mis à jour, elle n’établit pas par les seules pièces qu’elle produit que les données y figurant seraient trop anciennes pour être pertinentes ; que, par ailleurs, ladite étude comprend une analyse des incidences du projet sur la ressource en eau et au regard des objectifs de conservation du site Natura 2000 ; qu’un diagnostic floristique a été réalisé en juillet 2006 afin de connaître l’incidence des forages F1 et F4 de Saint-Germain-sur-Sèves sur la flore du marais et spécifiquement sur la flore tourbeuse sensible aux variations hydriques ; que figurent également à l’étude d’incidences et son complément, les mesures compensatoires envisagées en application des dispositions du d) de l’article R. 214-6 précité, dont il ne ressort pas qu’elles seraient insuffisantes compte tenu de l’importance du projet et du site choisi ; que contrairement à ce que soutient la commune de Sainteny, il est par ailleurs justifié de la compatibilité du projet avec le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux du Bassin Seine-Normandie dans le complément à l’étude d’incidences ; qu’ainsi, le moyen tiré de l’insuffisance de l’étude prévue par l’article R. 214-6 du Code de l’environnement susvisé manque en fait. »
TA Caen, mai 2009 (14 esp.), Commune de Sainteny c/ Préfet de la Manche, no 0801347-2 ; M. Cotelle, no 0801717-2 ; Mme Lepigeon, no 0801718-2 ; M. Levasseur, no 0801719-2 ; GAEC des Quesnels, no 0801721-2 ; Société SAS Lapourry, no 0801727-2 ; M. et Mme Lepourry, no 0801730-2 ; EARL du Scy, no 0801729-2 ; SCEA La Sagerie, no 00801731-2 ; M. Eliard, no 0801732-2 ; M. Lepourry, no 00801733-2 ; EARL du Château, no 0801735-2 ; Mme Lesaulnier, no 0801743-2 et Mme Fiquet-Vallerend, no 0801744-2.

Création d’une servitude de passage - Objet de la DUP (non) - Caractère d’utilité publique (oui).

59

« Considérant que l’arrêté attaqué, par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a déclaré d’utilité publique les travaux à entreprendre par la commune d’Egliseneuve-d’Entraigues en vue de la dérivation des eaux souterraines et l’instauration de périmètres de protection des points d’eau et a autorisé le prélèvement et la distribution d’eau pour la consommation humaine, n’a par lui-même ni pour objet ni pour effet d’instituer une servitude de passage sur la parcelle cadastrée A 403 appartenant à la SCI du Lac de la Fage, de déclarer d’utilité publique cette servitude, ou encore de poser l’obligation de créer une servitude à la charge de la commune, et ce même si son article 6 mentionne que "dans le cas où le périmètre de protection immédiate se trouve sur une ou des parcelles enclavées, la collectivité devra prendre toutes dispositions en vue de créer un accès aux ouvrages, soit par acquisition par voie amiable ou par voie d’expropriation dans les périmètres de protection rapprochée, soit par création de servitudes de passage" et qu’il comporte en annexe des indications sur la "création d’une servitude de passage sur ladite parcelle" ; qu’en conséquence, la société requérante ne peut utilement soutenir que l’institution d’une servitude sur la parcelle cadastrée A 403 ne comporterait aucun caractère d’utilité publique. »
CAA Lyon, 12 mai 2009, SCI du Lac de la Fage, no 07LY01043.

Absence de mention des dépenses relatives aux indemnités dues aux propriétaires ou occupants de terrains - Vice de procédure (oui) - Utilité publique (non).

60

« Considérant que l’appréciation sommaire des dépenses a pour objet de permettre à tous les intéressés de s’assurer que les travaux ou ouvrages, compte tenu de leur coût total réel, tel qu’il pouvait être raisonnablement apprécié à l’époque de l’enquête, présentent un caractère d’utilité publique ; qu’il ressort des pièces du dossier que les dépenses relatives aux indemnités dues aux propriétaires ou occupants des terrains compris dans le périmètre de protection de prélèvement d’eau destinée à l’alimentation des collectivités humaines ne figurent pas dans cette appréciation sommaire, ni dans aucun autre élément du dossier soumis à enquête publique, lequel ne permet par conséquent pas de connaître le coût total du projet en raison de l’omission d’une catégorie non négligeable de dépenses prévisibles ; que le GAEC Aubert et autres sont, par suite, fondés à soutenir que la déclaration d’utilité publique et la définition du périmètre de protection du captage d’eau sont entachées de vice de procédure. »
TA Nancy, 12 mai 2009, GAEC Aubert et autres, no 0700781.

61Se superposant à la DUP requise au titre du Code de la santé publique pour la remise en œuvre des périmètres de protection autour des captages d’eau destinée à la consommation humaine, la dérivation des eaux d’un cours d’eau non domanial, d’une source ou d’eaux souterraines doit elle-même faire l’objet d’une procédure de DUP.

62En effet, il s’agissait de protéger ces eaux non domaniales – donc sujettes à un droit d’usage issu du droit de propriété et auquel on ne peut porter atteinte que pour des motifs d’intérêt général – de prélèvements effectués par des collectivités publiques dans des proportions qui pourraient s’avérer préjudiciables à l’exercice du droit de propriété et du droit d’usage de l’eau y afférent, tant des propriétaires riverains que des propriétaires du dessus.

63Par ailleurs, le juge examine également la compatibilité avec le SDAGE pour autant que celui-ci soit effectivement approuvé.

64Enfin, l’absence au dossier d’enquête de la mention des sommes relatives aux indemnités dues aux propriétaires ou occupants des terrains expropriés ou grevés de servitudes constitue à elle seule un vice de procédure de nature à entacher la reconnaissance de l’utilité publique du projet.

Sanctions administratives

Réalisation d’un plan d’eau sans autorisation - Obstacle à la libre circulation du poisson et modification du peuplement piscicole, faunistique et floristique - Injonction de détruire l’ouvrage et de remettre les lieux en état - Consignation de la somme correspondant au montant des travaux à réaliser - Légalité (oui).

65

« Considérant (…) que M. Desnoues a notamment fait édifier une digue d’environ 40 mètres de long et 5 mètres de large, à l’effet de barrer le lit mineur des cours d’eau confluents de la Bresme et du Tournelune ; que cet ouvrage fait apparaître un dénivelé entre la ligne d’eau amont (ligne d’eau de l’étang) et la ligne d’eau aval (buse) d’environ 200 centimètres, est un obstacle à la circulation du poisson et modifie le peuplement piscicole, faunistique et floristique, entraînant une uniformisation et une diminution de la biodiversité ; que c’est sans erreur d’appréciation que le préfet a estimé que ces travaux entrent dans le champ d’application des dispositions précitées du Code de l’environnement qui les soumettent à autorisation, sans qu’y fasse obstacle la circonstance que ces travaux auraient pour effet de restaurer un étang attesté au XIIe siècle ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que c’est à bon droit que le préfet d’Indre-et-Loire a ordonné la destruction de l’ouvrage non autorisé ainsi que la remise en état des lieux, et qu’en application des dispositions de l’article L. 216-1 du Code de l’environnement, il a obligé M. Desnoues à consigner une somme correspondant au montant des travaux à réaliser. »
TA Orléans, 6 avril 2009, M. Desnoues, no 0701760.

Assèchement de zone humide réalisé sans autorisation - Injonction d’enlever les remblais et de supprimer les plans d’eau créés - Légalité (oui).

66

« Considérant que le requérant a réalisé des travaux se traduisant notamment par un assèchement, remblaiement et modification d’une zone humide, la zone asséchée étant supérieure à un hectare ; que ces travaux, (…) ne pouvaient être réalisés sans autorisation préalable ;
Considérant (…) que le requérant ne peut pas plus utilement faire valoir que les plans d’eau qu’il a créés sont harmonieux, qu’il va satisfaire aux demandes des services préfectoraux et régulariser sa situation ; qu’enfin, le requérant ne peut pas plus utilement soutenir que les travaux réalisés ne porteraient atteinte ni à la faune ni à la flore, dès lors qu’ils sont au nombre de ceux visés à l’article L. 214-3 du Code de l’environnement, pour lesquels une autorisation est nécessaire, et alors au surplus que les zones humides font l’objet d’une protection particulière en vertu de la loi. »
TA Besançon, 7 mai 2009, M. Duboz, no 0800234.

Construction réalisée sans autorisation dans le lit majeur d’un cours d’eau-Mise en demeure de déposer un dossier d’autorisation non suivie d’effet-Mise en œuvre d’une procédure de consignation - Légalité (oui).

67

« Considérant (…) que M. Ruggieri a, dans le cadre de son activité professionnelle de concessionnaire automobile, construit une cabine de peinture et un mur de clôture dans le lit majeur du cours d’eau le Raumartin situé sur le territoire de la commune de Marignane ; que ces constructions relèvent du régime de l’autorisation au titre [de la police de l’eau], que M. Ruggieri n’a pas déposé de demande d’autorisation sur le fondement de [cette police] alors qu’il avait été mis en demeure de le faire, par un arrêté préfectoral (…) ; qu’il suit de là que le préfet des Bouches-du-Rhône pouvait légalement engager à son encontre une procédure de consignation. »
TA Marseille, 20 novembre 2008, M. Ruggieri, no 0702913.

68Dès lors que l’exploitant ou le propriétaire d’une installation réalisée sans l’autorisation (ou la déclaration) requise au titre de la police de l’eau a déjà fait l’objet d’une mise en demeure restée sans effet de régulariser sa situation, la remise en l’état des lieux, éventuellement assortie d’une procédure de consignation, peut intervenir en toute légalité, pour autant que la mise en demeure ait bien été adressée par l’autorité administrative au « bon » destinataire.

Urbanisme

69Permis de construire une station d’épuration en zone littorale - Schéma d’aménagement régional valant schéma de mise en valeur de la mer - Limitation des constructions à l’extension des constructions existantes et aux équipements légers liés à l’accueil et à la découverte du milieu - Station d’épuration ne rentrant pas dans ces critères - Annulation du permis de construire (oui).

70

« Considérant (…) que le schéma d’aménagement régional de la Guadeloupe (…), qui a valeur de schéma de mise en valeur de la mer, est directement opposable aux demandes de permis de construire ; qu’il ressort des pièces du dossier, et notamment des cartes y figurant, que la construction autorisée de la station d’épuration est située en bordure du littoral de la commune requérante dans un "espace à vocation naturelle", où selon les dispositions de l’article 2.1.2.4 dudit schéma "ne sont admis que les extensions limitées de constructions existantes ainsi que les aménagements et équipements légers liés à l’accueil et à la découverte du milieu" ; qu’il est constant que la construction autorisée n’est pas l’extension d’une construction existante et qu’elle ne peut être regardée comme un équipement d’accueil et de découverte du milieu ; que, la circonstance alléguée par la commune de Capesterre de Marie-Galante, que le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres lui a délivré une autorisation d’occupation temporaire lui permettant l’accès de la station d’épuration, est sans incidence sur l’appréciation de la légalité du permis de construire attaqué au regard des dispositions du schéma d’aménagement régional de la Guadeloupe ; qu’en annulant le permis de construire litigieux pour le motif qu’il avait été pris en méconnaissance des dispositions du schéma d’aménagement régional de la Guadeloupe, le tribunal administratif de Basse-Terre n’a pas commis d’erreur de droit (…). »
CAA Bordeaux, 23 octobre 2008, Commune de Capesterre de Marie-Galante, no 07BX01751.

71Le schéma d’aménagement régional a pour objet de fixer dans les régions d’outre-mer les orientations fondamentales à moyen terme en matière de développement durable, de mise en valeur du territoire et de protection de l’environnement selon les dispositions de l’article L. 4433-7 du Code général des collectivités territoriales. Ce schéma vaut lui-même schéma de mise en valeur de la mer (SMVM), notamment en ce qui concerne les orientations fondamentales de la protection, de l’aménagement et de l’exploitation du littoral, lequel peut prévoir des sujétions particulières intéressant les espaces maritime, fluvial ou terrestre attenant, nécessaires à la préservation du milieu marin et littoral (art. L. 4433-15 CGCT et 57 de la loi no 83-8 du 7 janvier 1983).

72C’est ainsi que la construction d’une station d’épuration peut n’être admise que s’il s’agit de l’extension d’une implantation existante.

Notes

  • [1]
    Loi du 16 septembre 1807, article 33 : « Lorsqu’il s’agira de construire des digues à la mer, ou contre les fleuves, rivières ou torrents navigables ou non navigables, la nécessité en sera constatée par le Gouvernement et la dépense supportée par les propriétés protégées, dans la proportion de leur intérêt aux travaux ; sauf le cas où le Gouvernement croirait utile et juste d’accorder des secours sur les fonds ».
Jacques Sironneau
Direction de l’eau et de la biodiversité, chef du bureau de la législation de l’eau.
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