CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Dans le discours écologique, le recours au registre religieux ou spirituel est une tendance actuelle qui est loin de passer inaperçue. Citons le discours de Bertrand Piccard, qui au lancement de l’avion solaire Solar Impulse 2 au début 2015, souligne qu’il ne devra pas compter seulement sur l’énergie solaire pour tenter de réaliser un tour du monde, mais également sur les forces puisées dans l’autohypnose, le yoga et la méditation [2]. Le yoga et la méditation seraient-ils alors les nouveaux carburants de la transition énergétique ? Les spiritualités alternatives ont dès les années 1960 accompagné les mouvements de la contre-culture [3], mais c’est au tournant des années 2000 qu’une nouvelle implication du religieux institutionnel et du spirituel est observée.

2Alors que les mouvements et communautés de « spiritualités alternatives » issus de la contre-culture se sont dissous en un ensemble de réseaux alliant spirituel et thérapeutique, ce que Valérie Rocchi [4] qualifie de Post-Nouvelle Age (2003), de nouveaux mouvements de mobilisation écologique tels que « les Colibris » de Pierre Rabhi se sont emparés de valeurs spirituelles et les insèrent à leurs revendications. Mobilisée par ces mouvements, la spiritualité devient synonyme d’authenticité, de créativité, de partage, et de valorisation de « savoirs et sagesses indigènes » ainsi qu’un travail de « transition intérieure », afin de se défaire de son ego, de le purifier ou de le développer.

3À partir de la fin des années 1970, les Églises historiques emboîtent le pas – timidement tout d’abord – et s’engagent dans des réflexions et œuvres environnementales, d’abord au Sud où l’on voit se multiplier des réseaux œcuméniques de « christianisme vert » basés sur les théologies de la libération et de la nature, rendues célèbres par le « cri des pauvres et celui de la terre » [5]. Ces courants vont influencer les Églises au Nord et l’humanisme des œuvres dépendant de celles-ci se teinte d’écologie pour prendre un tournant plus radical. La transformation en 1983 du programme « Justice et paix » du Conseil œcuménique des Églises (Coe) en programme « Justice, paix et sauvegarde de la création » est emblématique de ce tournant. Du côté catholique, relevons la désignation de saint François d’Assise comme le patron de l’écologie [6] par Jean-Paul II en 1979, la requalification, sous Benoît XVI, de sa doctrine sociale qui se recentre sur les enjeux d’éco-justice et de responsabilité intergénérationnelle [7]. Ce tournant de l’Église culmine durant l’été 2015 avec la promulgation de l’encyclique Laudato Si’ par François [8]. Ce verdissement de la religion signerait-il un retour du religieux dans les programmes environnementaux ? Faut-il passer par le spirituel pour faire passer le message de la nécessité d’une transition énergétique dans nos sociétés ?

4Après avoir présenté les principales recherches du domaine dans lequel s’inscrit notre enquête, nous présenterons deux terrains de voisinage entre religion et écologie. Le premier est une association chrétienne œcuménique qu’il est d’usage en Suisse d’appeler une « œuvre » chrétienne : Oeku Église et environnement[9]. Cette œuvre, comme nous le verrons, a été fondée juste après l’accident de Tchernobyl par des théologiens engagés contre l’énergie atomique. Elle s’active pour que les Églises se positionnent en faveur du climat et qu’elles adoptent un comportement écologique. Le second terrain est celui d’un événement organisé par Alternatiba Léman[10], un réseau d’acteurs créant des festivals qui cherche à présenter des initiatives locales face aux défis du changement climatique dans une ambiance festive. Le temps d’un week-end, nous avons participé aux différentes activités du village de stands construit au centre de Genève au mois de septembre 2015. Les observations rassemblées, nous permettrons de percevoir deux mouvements allant d’une action citoyenne pour influencer la société civile (bottom-up), et un autre plus institutionnel qui vise à influencer par le haut des administrations et organisations (top-down) pour qu’elles adoptent un comportement vert. Nous pourrons alors mieux percevoir comment et en quoi le religieux serait un carburant vers la transition énergétique.

Religion et écologie : un champ d’étude redécouvert par la sociologie

5Dans les années 1990, les sociologues étudiaient d’une part l’engagement écologique des chrétiens qui maintenaient une vision dualiste, « anthropocentriste », du rapport entre humains et nature selon laquelle « seuls les humains ont une intériorité distinctive » [11], d’autre part l’émergence dès les années 1970 d’une « new kind of natural religion » [12], une religiosité de la nature basée sur une notion étroite de transcendance et de responsabilité. Plus récemment, hormis de nombreux travaux sur les enjeux philosophiques, éthiques et anthropologiques de la question écologique [13], les réflexions ont rarement abouti à des recherches sociologiques empiriques. The Oxford Handbook of Religion and Ecology sous la direction de Roger S. Gottlieb [14] – la référence dans le domaine – fait un état des lieux de multiples recherches alliant religion et écologie. Mary Evelyn Tucker [15] y offre une vue d’ensemble des disciplines qui ont contribué à penser la conjonction entre religion et écologie. Les analyses relatées dans des disciplines comme la philosophie, la géographie, l’histoire, la théologie et la critique écoféministe sont considérables, mais les travaux en sociologie brillent par leur absence. Cependant, notre étude peut s’appuyer sur quelques études en sociologie des religions.

6Dans le sens de notre étude qui pose la question de la relation entre écologie et religion, Danièle Hervieu-Léger [16] identifie des « affinités », dans le sens des « affinités électives » que Max Weber percevait entre « l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme » [17]. Pour Hervieu-Léger, ces affinités fonctionnent comme « des pivots de cette recomposition des rapports entre la religion et la modernité, qui conduit, aujourd’hui, à réévaluer, sinon à réviser, l’hypothèse classique d’une sécularisation toujours plus poussée des sociétés très avancées » [18]. Au lieu du processus de sécularisation de la société, c’est une conscience écologique – impliquant une forte dimension spirituelle – qui semble se renforcer. Dans la conclusion de cet ouvrage, Beckford [19] n’interprète pas l’apparition du registre religieux ou spirituel dans le champ écologique comme une nouveauté, mais plutôt comme la conséquence d’un processus entamé dans les années 1990. Pour lui :

7

« Le mouvement écologique [serait]… un mouvement spirituel, dans la mesure où il tend à mettre en cause la logique instrumentale de la croissance économique et à revigorer la Lebenswelt ».

8Récemment, Jens Koehrsen [20] s’est intéressé à une question assez identique à la nôtre, à savoir si les groupes religieux promouvaient l’écologie. Son étude empirique portant sur une région allemande, il relève que les Églises participent bien à des projets liés au développement durable. En soutenant des projets, elles disséminent activement des valeurs et encouragent des éco-gestes. Cependant, les résultats de l’étude montrent que l’impact des Églises sur ce plan est moindre par rapport à d’autres acteurs ou sous-systèmes locaux. Cependant, une des lacunes de l’étude de Koehrsen, laquelle nous entendons pallier, est de ne pas avoir considéré la dynamique et le dialogue entre les Églises, les œuvres dépendantes des religions institutionnelles et les spiritualités plus diffuses. Il nous apparaît que, bien que moins visibles, ces dernières sont très actives dans l’investissement écologique.

9Une autre enquête récente menée par Cristián Parker [21] cherche à observer s’il y a une différence entre personnes affiliées à un groupe religieux ou non sur les questions de la transition énergétique. L’enquête menée par Parker est une étude quantitative auprès des étudiants universitaires chiliens. Il constate qu’il existe bien une relation entre l’appartenance religieuse et le changement des modes de vie vers plus de durabilité énergétique. L’appartenance influence positivement la sensibilité aux questions de durabilité. Cette étude introduit l’hypothèse d’affinités pour ce qui en est de la dimension temporelle entre le discours des Églises et les attitudes environnementales.

10Cependant ces études sont à mettre à la lumière des analyses que Miriam Pepper et Rosemary Leonard [22] (2015) ont menées en Australie à partir de deux vagues d’enquêtes quantitatives (2006 et 2011). Elles ont constaté que les attitudes des chrétiens pratiquants face aux changements climatiques étaient similaires ou légèrement plus respectueuses de l’environnement que la population générale. Pour ces auteures, les facteurs influents sont, outre le capital social, la norme de la responsabilité chrétienne envers l’environnement et l’exemple de dirigeants religieux comme sources fiables d’information sur ces questions. Ce dernier point est important, car il souligne le rôle potentiel des acteurs religieux dans la médiation, mais surtout il insère l’appartenance religieuse dans un système social plus large, avec ses spécificités, ses sensibilités et ses niveaux d’engagement et d’action dans les questions environnementales.

11Il existe en effet différentes modalités d’engagement religieux que Laurel Kearns [23] distingue en trois postures types : 1) l’éthique de l’intendance, 2) l’éco-justice et 3) la spiritualité de la création. Chacune implique de cerner et de légitimer des modalités avec des niveaux d’action par des interprétations ou des représentations du monde dans lesquelles la place et le rôle de l’humain sont bien distincts. Pour cet auteur, l’éthique de l’intendance se caractérise par une représentation anthropocentrée d’un mandat divin fait à l’humain de préserver sa création. La spiritualité de la création cherche au contraire à inscrire l’humain dans une représentation biocentrée et panthéistique du monde où chaque forme du vivant fait partie d’un même cosmos et d’une même finalité. L’éco-justice est une posture militante généralement portée par les Églises historiques qui thématisent ensemble les notions de justice sociale et de justice environnementale. Cette posture encourage l’action directement au niveau des structures sociétales plus qu’au niveau d’une cosmovision ou d’une responsabilité individuelle.

12Ces différentes observations provenant des quelques recherches sociologiques sur le lien entre religion et transition énergétique nous incitent à nous intéresser à un point important des Églises qui est celui d’observer le travail et l’action menée d’abord sur les structures et institutions au lieu de s’intéresser uniquement à l’impact sur le fidèle. Ludovic Bertina [24] a d’ailleurs très justement relevé le rôle de l’Église catholique dans le débat éthico-technique sur l’environnement en France. C’est pourquoi nous présenterons particulièrement ici l’œuvre Oeku rattachée aux Églises historiques helvétiques qui déploie une action spécialement sur cet axe sans cependant négliger l’aspect de la responsabilité individuelle du fidèle.

13Aux États-Unis les recherches sociologiques sur le lien entre religion et écologie ont principalement porté sur la promotion de l’écologie par les mouvements de spiritualités alternatives. Dans les années 1990, Jon Bloch [25] a étudié l’engagement écologique dans les milieux de la contre-culture, du New Age et du néo-paganisme. Il observe que le rapport à la nature est un élément fédérateur entre les différents réseaux de pratiques et de systèmes de croyances. Une autre recherche menée par Sarah Strauss et Laura Mandelbaum [26] consistait en une ethnographie du Green Yoga aux États-Unis. Cette pratique sportive et spirituelle explicitement active dans l’écologie fait émerger une classe moyenne globalisée. Selon les auteurs, l’un des attributs consiste à conjointement « psychologiser » et à médicaliser la relation au corps, à la nature et à la santé. Cette tendance « psychologisante » et « médicalisante » est notamment visible dans nombre de mouvements néo-païens qui organisent des rituels pour « guérir la mère terre ».

14Ces études tendent donc à montrer que le religieux institutionnalisé joue pour une part un certain rôle de moteur pour la transition énergétique, cependant, son rôle est plus important quand il agit sur les institutions. Il n’y a, toutefois, pas encore d’étude qui s’attache à montrer comment et pourquoi les Églises peuvent prendre ce rôle, c’est ce que nous tenterons de faire au travers de l’analyse de l’œuvre chrétienne d’Oeku. D’autre part, les études sur les spiritualités alternatives montrent bien le rôle fédérateur et mobilisateur que présente la thématique écologique, mais là encore, peu d’études s’intéressent à comprendre comment ces spiritualités au sein de réseaux issus de la contre-culture mobilisent les acteurs à adopter un comportement écologique. C’est pourquoi nous présenterons ici une enquête de terrain sur le festival Alternatiba Léman où des acteurs écologiques côtoient des acteurs spirituels qui s’activent pour la transition énergétique. Est-ce que ces acteurs spirituels sont en fin de compte des moteurs pour la transition énergétique ou de simples référents symboliques ? Sur le plan empirique, il s’agit pour nous de comprendre la nature des discours qui permettent aux acteurs de particulièrement se mobiliser pour le changement énergétique.

Deux terrains de voisinage écologique et spirituel

15Dans le cadre de la plateforme « Volteface » [27] (2015-2018) de recherche sur les aspects sociaux de la transition énergétique, dirigée par l’Université de Lausanne, nous menons une enquête sur plusieurs terrains en Suisse romande qui ont pour point commun de solliciter et le registre religieux ou spirituel et le registre de la transition énergétique. Parmi les différents terrains investigués à partir de septembre 2015, deux ont été spécialement sélectionnés pour cette présente contribution. Le premier est l’œuvre chrétienne « Oeku Église et environnement », sise à Berne, qui a pour but de promouvoir la responsabilité de la sauvegarde de la création dans la vie et le message de l’Église. Le second est le festival Alternatiba qui a lieu dans plusieurs villes francophones, et particulièrement celui d’Alternatiba Léman qui s’est tenu à Genève les 18-20 septembre 2015. Ces deux cas présentent un voisinage entre mobilisation concrète et technique pour une efficience énergétique et d’autre part une mobilisation de registres et acteurs spirituels. D’autre part ces deux cas soulignent l’un par un engagement spirituel plus diffus et l’autre par un engagement religieux et organisé, deux facettes d’un même mouvement de voisinage du religieux et de l’écologie.

Oeku Église et environnement

16Oeku Église et environnement[28] est une association œcuménique créée le 6 décembre 1986 à l’instigation de Christoph Stückelberger, professeur en théologie systématique à l’Université de Bâle, en collaboration avec Lukas Vischer, qui était alors directeur de la commission « Foi et Constitution » du Coe. C’est Kurt Zaugg-Ott, docteur en théologie et ancien activiste contre l’énergie nucléaire, qui est engagé comme directeur. L’œuvre d’Oeku a été premièrement fondée la même année que l’accident de Tchernobyl en 1986, dans le sillage d’une mobilisation importante et de longue durée de la population s’opposant à l’installation des centrales nucléaires de Kaiseraugst, Verbois et Graben (aucune de ces centrales n’a finalement vu le jour).

17Une deuxième influence importante pour l’émergence de cette œuvre chrétienne est la théologie de la nature, ou plus exactement une théologie de justice sociale et écologique retravaillée au sein du Coe dans la ligne de la théologie de la libération. Cette influence des théologies du Sud s’affirme très fortement au début des années 1980 au Coe, il y a tout d’abord en 1983, la prise en compte de la cause environnementale dans le programme de justice et paix qui devient alors le programme « Justice, paix et sauvegarde de la création ». Il y a ensuite, en 1985, l’élection d’un secrétaire général, Emilio Castro, provenant d’Amérique du Sud (Uruguay). C’était les années où le Coe prenait certains « risques » [29] à faire dialoguer les théologies de la libération, féministes et écologiques. Les personnes actives dans ce dialogue comme Vischer ou Stückelberger ont été les fondateurs d’Oeku.

18On remarque ainsi, au départ d’Oeku, une conjonction de deux mouvements : celui des débuts de la mobilisation écologique et un mouvement théologique de justice sociale et de la nature. Précédemment actif dans le mouvement de lutte contre l’atome, le directeur actuel représente bien cette rencontre de circonstance entre des théologiens et un mouvement de mobilisation écologique. Des réseaux informels de militance, en créant Oeku, ces acteurs religieux ont pu jeter les bases d’une institutionnalisation d’une cause théologique et environnementale au sein des Églises suisses.

19L’aspect de cette institutionnalisation est loin d’être négligeable. En effet, même si Oeku n’emploie actuellement que trois personnes : un théologien, un travailleur social et une secrétaire, il demeure une plateforme reconnue par les Églises pour la cause environnementale. Cela permet à Oeku d’agir avec les autres œuvres chrétiennes sur trois niveaux.

20Le premier niveau est celui des paroisses où Oeku s’active à la prise de conscience écologique et à l’action des fidèles. Chaque année, elle fournit des cahiers de réflexions théologiques qui contiennent un guide liturgique complet « Un temps pour la création » (prières, homélies, cantiques, réflexions). Actuellement, un peu plus de quatre cents paroisses suivent ce programme liturgique. Ensuite, elle agit concrètement pour faire baisser la consommation d’énergie et mettre les bâtiments paroissiaux aux normes écologiques. Elle a produit un guide écologique à l’attention des Églises, « Paroisses vertes[30] » et offre même une certification « Grüner Güggel [31] » (coq vert en Suisse alémanique) aux paroisses qui se conforment aux différents critères donnés dans le livre des Paroisses vertes.

21Le second niveau est celui des Églises où Oeku fonctionne comme organe de compétence dans les grandes questions écologiques discutées dans les synodes cantonaux. C’est ainsi que le directeur d’Oeku a pu être une personne-clé dans la décision du synode de juin 2009 pour les Églises protestante et catholique d’Argovie de créer un Öko-fonds pour rénover les bâtiments paroissiaux du canton dans des normes d’efficience énergétique. En 2012, c’était au tour du Synode de Berne, Jura et Soleure de créer un fonds solaire sous le patronage d’Oeku. Les compétences reconnues de l’œuvre dans le domaine écologique permettent ainsi aux Églises d’avoir des ressources qualifiées à portée de main pour initier une politique environnementale sur le plan cantonal. Oeku est également une ressource de compétence quand les Églises doivent prendre une position officielle sur le climat au niveau fédéral. C’est encore Oeku qui est sollicitée pour produire une position commune aux Églises reconnues, par exemple récemment, lors de la Cop 21 [32].

22Le troisième niveau est d’ordre politique où Oeku fait partie avec d’autres œuvres d’Églises au groupement Alliance Sud. Elles s’engagent dans les « campagnes de Pâques » des Églises pour sensibiliser le citoyen-paroissien et s’activent à faire signer des pétitions pour une cause de justice humaine. Cependant, depuis le milieu des années 2000, ces campagnes abordent des thèmes plus écologiques avec par exemple celle de 2009 qui n’abordait ni justice, ni commerce équitable pour laisser la priorité à l’écologique : « Un climat sain pour assurer le pain quotidien ». On observe ainsi qu’à l’interne d’Alliance Sud, Oeku se profile également comme un pôle de compétences pour des préoccupations d’une grande actualité dans la population suisse. Directement aux prises avec des problèmes de justice sociale et d’écologie et émanant d’Églises ou de mouvements sociaux à l’intérieur des Églises, elles peuvent toucher et mobiliser une partie importante de la population suisse.

23Cette institutionnalisation a permis à un vaste programme de se développer et de mettre en action les Églises autant sur le plan communal que cantonal. Cependant, cette institutionnalisation a également ses limites. Les Églises étant administrativement et politiquement compartimentées en organisation cantonale, il n’est pas toujours évident que des instances cantonales aient recours à Oeku. Par exemple, en automne 2015, le Synode de l’Église évangélique réformée vaudoise était interpellé par un groupe de théologiens pour que l’Église prenne des mesures environnementales sans qu’Oeku ne soit sollicitée. L’institution peut alors ignorer (volontairement ou non) des compétences qu’elle a à disposition. Cela montre qu’Oeku, malgré plusieurs succès, reste une œuvre, au service de l’Église certes, mais en dehors de ses instances propres. Son action est ainsi limitée au bon vouloir ou à l’invitation des synodes et organisations ecclésiales cantonales.

Alternatiba Léman

24Aternatiba est un mouvement citoyen né en 2013 à Bayonne, mobilisant différents acteurs de la société face aux défis du changement climatique. Aujourd’hui, des villages « Alternatiba » font leur apparence éphémère en six pays (Autriche, Belgique, France, Angleterre, Espagne et Suisse). C’est à Genève, en septembre 2015, que nous avons suivi de plus près quelques dynamiques. Dans son auto-présentation, ce mouvement indique vouloir « présenter des alternatives locales au changement climatique et à la crise énergétique, grâce à des initiatives de toute nature, individuelles ou collectives, territoriales ou systémiques » [33]. Toujours dans leurs termes, les objectifs sont ceux de « diffuser le message de l’urgence climatique », de « sensibiliser le grand public et les élus à la nécessité de baisser rapidement et radicalement les émissions de gaz à effet de serre, d’interpeller sur les conséquences dramatiques de l’absence d’accord international ambitieux, efficace, contraignant et juste sur le climat ». Pour ce faire, la nécessité de « combattre l’effet de sidération, le sentiment d’impuissance et la démobilisation que peuvent provoquer la gravité et l’importance du défi climatique, en montrant que les solutions existent et qu’elles sont à notre portée, créatrices d’emploi, porteuses d’un monde plus humain, convivial et solidaire » s’impose. En créant ces villages le temps de quelques jours, les activistes « appellent à mettre en route sans plus attendre la transition énergétique et écologique, sociale et culturelle nécessaire pour éviter le dérèglement profond et irréversible des mécanismes du climat ». Une opposition claire apparaît dans la manière de cadrer la question écologique dans ce mouvement. Elle est basée sur une distinction fondamentale entre ingénieurs et techniciens de l’écologie d’une part, et les alternatifs humanistes d’autre part. Les premiers, « géo-ingénierie, Ogm, agro-carburants, marchés carbone, mécanismes de compensation, nucléaire », ne proposent que des « fausses solutions – injustes, dangereuses et inefficaces ». Au contraire, une alternative valable vient de nombreuses pratiques et initiatives listées sur le site d’Alternatiba. La liste très longue touche de nombreux domaines allant de la production [34] à la consommation [35], en passant par le travail [36], l’économie [37] ou le transport [38]. Un domaine nous intéresse particulièrement ici, celui comprenant l’éthique et le discours spirituel. La charte d’Alternatiba le décrit comme : « villes en transition, sensibilisation à l’environnement, gouvernance et justice alternatives, communication non-violente, écopsychologie et transition intérieure ». En montrant que toutes ces démarches existent déjà, le mouvement vise à les rendre visibles, à « renforcer, développer, multiplier ». Face à l’analyse qui a été faite de la situation écologique – une crise profonde – des solutions existent. Durant les jours du festival, des conférences, expositions et sensibilisations sont offertes par différents acteurs engagés dans la transition énergétique. Elles comptent ainsi « renforcer la dynamique, la prise de conscience, le rapport de force permettant d’avancer vers les bonnes prises de décisions tant au niveau local qu’au niveau global » [39].

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Affiche de l’édition 2016 du festival Alternatiba Léman
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Bannière internet pour Alternatiba Léman au Village Mondial des Alternatives, Montreuil, 2015

25Alternatiba se veut, comme le nom l’indique, une alternative à l’inaction des gouvernements et des politiques, afin de montrer les initiatives locales en faveur d’un mode de vie responsable, solidaire et écologiquement durable. Régulièrement, le « bureau élargi » fait un appel général pour qu’un maximum d’initiatives participe au festival. Un comité d’une douzaine de personnes est au cœur de la dynamique, mais agit en transparence surtout par voie électronique. Page internet, blogs, newsletter, etc. sont autant de moyens visant à inclure toute personne se sentant en lien avec la charte d’Alternatiba. Au final, le festival est monté comme un village de stands, le temps d’un week-end, et se déroule dans une ambiance festive et bon enfant. Il occupe plusieurs rues et places à Genève, ainsi que des lieux symboliques de l’engagement associatif, telles des salles communales. En plein centre de Genève, une pluralité d’initiatives provenant autant d’acteurs séculiers, comme l’agriculture biologique ou les coopératives d’habitations que d’acteurs actifs sur le plan religieux comme le yoga du rire ou la méditation, des Ong, des acteurs locaux privés ou publics exposent et présentent leurs actions. En dehors d’une scène permettant une vingtaine de concerts de musique et des spectacles de rue, le festival organise conférences, débats, projection de films, pièces de théâtre, etc. sur le thème de la transition écologique. L’envergure de l’événement n’est pas négligeable, et les idées de mises en action présentées sont pour la plupart très concrètes : recyclage, pétitions, participation à des protestations, etc.

26Nous avons participé à plusieurs débats, ateliers et conférences proposés lors de cet événement genevois ainsi que simplement observé les acteurs, badauds et stands en déambulant dans les allées du village. Durant cette étude ethnographique, nous nous sommes surtout concentrés sur un espace appelé (dans les plans du village, les brochures, etc.) « transition intérieure ». Dans cet espace, qui se trouvait dans un parc arboré à quelques minutes de la place principale, les initiatives présentées étaient très variées : yoga du rire, contes pour enfants, ateliers sur les cercles restauratifs, ateliers de communication non-violente, l’écoféminisme etc. Une ambiance très calme – à l’abri du bruit du trafic – donnait un air commun au-delà de l’énorme variété des offres. Les passants flânaient par la place affichant un certain sourire béat ou intrigué. L’on pouvait participer aux activités proposées en toute gratuité. Les membres du groupe sahaja yoga[40], aussi présent, invitaient à s’asseoir devant le portrait de la Shri Mataji Nirmala Devi. Ce mouvement spirituel participait en effet au festival sous différentes formes. D’une part, le stand tenu par des bénévoles, des dames autour de 60 ans, vendant des livres [41] sur leur « mère », invitaient à s’asseoir sur des chaises face à l’autel avec la photo de la fondatrice, à fermer les yeux et à les laisser opérer derrière le dos sans le toucher, des mouvements verticaux avec leurs mains pour « éveiller la Kundalini », « purifier le flux énergétique ». D’autre part, l’auteur de plusieurs des livres vendus au stand, Grégoire de Kalbermatten, a animé un atelier. Ce pratiquant du sahaja yoga avait en effet proposé de participer au festival en expliquant, sur la page du site Alternatiba ouverte pour les inscriptions, qu’il a été « Secrétaire exécutif adjoint de la Convention des Nations unies contre la désertification » et a dirigé « un certain nombre de travaux et projets concernant la dégradation des terres et les droits de l’homme (avec Jean Ziegler) » [42]. Il y écrit aussi qu’il soutient la vision de Alternatiba et y organise un atelier de cinquante minutes sur « écosystèmes et spiritualités ». Dès le début et jusqu’à quelques minutes avant la fin de l’atelier, l’ancien diplomate suisse [43] explique dans un vocabulaire savant, visiblement bien maîtrisé, l’état catastrophique dans lequel se trouve notre planète. Une dame, qui animait le stand juste avant l’atelier, participe enthousiaste à la séance. Elle confie que, par ailleurs, elle n’a participé à rien d’autre du festival Alternatiba, car elle était très occupée. Le temps étant écoulé, et le nombre de jeunes inscrits au workshop suivant sur la « sexologie thérapeutique » pressant, de Kalbermatten nous invite rapidement à faire un cycle de pratique proposée par le sahaja yoga. Le cycle est présenté comme devant se terminer dans la sensation d’une énergie subtile et spirituelle – « une brise fraîche sortant de la fontanelle souffle du Saint Esprit » – dans la main au-dessus de la tête. La salle se livre à l’exercice. À la fin, peu confessent sentir l’énergie, mais tous applaudissent pour terminer la séance. Les participantes, participants et l’animateur repartent chacun dans leur côté, laissant ouverte la question du lien entre le diagnostic écocritique du conférencier et une pratique particulière de yoga.

27À plusieurs reprises, nous faisons cette expérience dans l’espace de la « transition intérieure » du festival Alternatiba. Les témoignages recueillis à la rencontre du « cercle de bénédiction » ou à l’atelier sur « la communication non-violente » semblent indiquer que les participants parviennent à travers ces pratiques à un certain bien-être personnel tout en intégrant un groupe ou un réseau. Cependant, l’intérêt pour le festival en général ou pour les stands en dehors de la transition intérieure était faible. Plusieurs conversations ont permis de souligner que le but était soit, du côté des participants, à prendre part à un atelier spécifique ou, du côté des exposants, de promouvoir leurs propres pratiques.

Deux types de mouvements pour une rencontre de circonstance

28Ces deux cas d’études nous permettent, avant de pleinement répondre à la question de recherche, de souligner avec un éclairage nouveau le comment des acteurs religieux s’engagent en faveur de l’écologie. Bien que la réalité soit complexe et entremêlée, on observe toutefois deux grands mouvements régissant l’action : un mouvement bottom-up et l’autre top-down.

29Le mouvement bottom-up est celui constitué par des acteurs mobilisés dans une cause ou une action. Ces acteurs s’impliquent dans des réseaux – souvent informels – qui, par « voisinage », entrent dans une rencontre de circonstance. Une telle rencontre permet alors à des acteurs de plusieurs réseaux de mettre leurs compétences en commun en vue d’un positionnement ou d’action stratégique.

30Le mouvement top-down est formé par des acteurs institués ou des institutions. Par leurs actions, ils peuvent influencer ou agir sur d’autres institutions. À la différence du premier, ce mouvement conduit à une institutionnalisation des décisions. Ainsi, une organisation adopte des règlements favorables à l’environnement, assurant une certaine pérennité à la décision. En bref, il permet à certains discours d’entrer dans le concret de l’action. Mais pour que ce mouvement soit effectif, il y a aussi besoin de « voisinage », à l’instar du mouvement bottom-up, d’une rencontre de circonstance d’acteurs et d’institutions.

31Dans le cas du festival Alternatiba, nous avons pu observer le côtoiement de plusieurs acteurs et de plusieurs sphères sans que cela ne débouche véritablement par l’expression d’une action commune, sinon celle d’un respect du côtoiement dans une forme de charte de « vivre ensemble » promulguée par les organisateurs. Ainsi parmi les ateliers et conférences proposés, les acteurs spirituels restaient principalement centrés sur les activités spirituelles et les acteurs d’une alternative écologique comme les coopératives de cohabitation restaient dans la sphère de l’efficience énergétique, de la gestion des bâtiments et de la cohabitation. Certaines fois, des scientifiques s’exprimaient dans des conférences organisées par des groupes spirituels, comme nous l’avons relevé avec la conférence organisée par un pratiquant du sahaja yoga, sans pour autant que de cette rencontre émerge une action qui favorise un comportement concret vers la transition énergétique. Le scientifique est plutôt là pour donner une caution à une pratique religieuse. Cependant, ce mouvement bottom-up n’est pas à négliger dans la dynamique d’Alternatiba. Le voisinage des différents acteurs ne nous permet pour l’instant pas de montrer que le religieux ou le spirituel est un carburant de la transition énergétique, mais plutôt l’inverse, c’est-à-dire que la transition énergétique est un carburant pour les acteurs religieux et spirituels. Ils peuvent ainsi faire partie d’un réseau alternatif de propositions et d’actions qui les profilent en dehors de la sphère religieuse. Cependant pour Alternatiba, cette présence d’acteurs religieux n’est pas à sous-estimer. Le voisinage d’acteurs de différents horizons – religieux comme non religieux – représente déjà un succès à mettre sur le compte de la multitude des initiatives locales au service du climat. En étant parvenu à ratisser large et impliquer plusieurs réseaux, parfois informels, d’acteurs constitue pour le comité d’Alternatiba déjà une carte de visite d’un vivre ensemble écologique paisible et serein. D’une manière top-down, le comité de la manifestation peut ainsi mettre en place une vision positive et éminemment holiste de ce que s’engager pour le climat signifie.

32Le mouvement top-down est par contre beaucoup plus évident dans le cas de l’œuvre Oeku quand elle peut agir, comme on l’a souligné en Argovie ou à Berne, sur les organisations ecclésiales qui alors font adopter à leurs unités qui les composent un comportement plus écologique. En agissant sur les institutions par le haut, les initiatives de l’œuvre parviennent ainsi à se transformer en projets emblématiques d’une Église. De par une certaine position sociale, ces Églises peuvent alors se targuer et se présenter dans l’espace public local comme des précurseurs et des exemples d’un bon comportement pour la transition énergétique. Dans ce cas également, on observe que pour les Églises, le travail d’Oeku leur permet de se profiler positivement dans la société en étant un exemple local d’action vers la transition énergétique. Le religieux carbure au vert ! Pour l’œuvre Oeku, leur succès avec une action top-down est malheureusement limitée aux institutions ecclésiales qui veulent bien faire appelle à eux. Il est ainsi nécessaire d’avoir également un certain voisinage, une bonne entente, entre les organisations pour qu’une rencontre de circonstance puisse émerger. À l’instar des mouvements bottom-up, c’est la mise en commun de réseaux avec des affinités stratégiques qui permet finalement à une paroisse ou une Église de suivre les recommandations d’Oeku et d’entrer dans ses bonnes pratiques ou d’adopter sa théologie. Le mouvement top-down semble plus efficace et soulignerait une influence effective d’acteurs religieux sur des institutions religieuses tout d’abord et plus largement sur la population. Il est toutefois à relativiser par les limites de voisinage ou d’affinités stratégiques entre acteurs ou institutions dans le champ religieux. On le constate, ces deux mouvements ne fonctionnent pas en opposition et il n’est dès lors pas rare de voir un enchevêtrement des ces deux mouvements avec, par exemple, une mobilisation bottom-up qui facilite une action top-down.

Conclusion

33Ces deux études de cas brièvement décrits nous permettent d’esquisser une première réponse à notre question visant à savoir si le religieux ou le spirituel sont de nouveaux carburants pour la transition énergétique. Un premier constat à tirer consisterait plutôt en ce que le religieux ou le spirituel carburent à la transition énergétique soit pour se positionner stratégiquement, soit pour se renouveler ou se maintenir dans des réseaux. Cependant, les acteurs de la transition énergétique ne sont pas hostiles à ce voisinage, car ils en tirent aussi un certain profit. En effet, pour Altenatiba, le côtoiement d’acteurs religieux et écologiques – sans jamais vraiment se rencontrer – est déjà une démonstration de vivre ensemble positif pour la transition énergétique. Même si la dynamique bottom-up promue par les organisateurs ne produit pas une véritable rencontre de circonstance, le fait que les organisateurs du festival créent un espace « transition intérieure » [44] pour des acteurs religieux dans leur programme indique déjà que le religieux fait partie des alternatives positives en faveur du climat.

34Pour Oeku Église et environnement, son lobbying à l’intérieur des Églises a remporté certains succès. On a vu que plusieurs synodes et paroisses, sous l’influence de la théologie et des conseils prodigués par l’œuvre chrétienne, positionnent l’Église au centre du village écologique. Là encore, on peut souligner que c’est d’abord l’Église qui a besoin de carburer à la transition énergétique plus que l’écologie qui a besoin de recourir à l’Église. L’action top-down d’Oeku lui permet d’engager les Églises concrètement en faveur de la transition énergétique. Toutefois, la nécessité d’une rencontre de circonstance est primordiale. Certains réseaux d’acteurs dans les institutions ecclésiales peuvent inviter ou ignorer le travail d’Oeku. Ainsi, le mouvement top-down suivi par Oeku semble plus efficace pour réellement sensibiliser et mobiliser une Église ou une paroisse dans la transition énergétique, tout en étant limité au bon vouloir des acteurs locaux.

35Au terme de ces deux terrains, nous soulignerons la mobilisation indéniable d’acteurs religieux et spirituels pour la transition énergétique. De ce point de vue, la transition énergétique semble être un moteur pour les acteurs religieux et spirituels. Elle leur permet de regagner une place dans le village écologique. La mobilisation n’est toutefois véritablement présente que sur le registre discursif ou philosophique. Pourtant ce registre accouche aussi parfois d’une réelle prise de conscience des acteurs religieux pour une transition énergétique. Des réseaux de fidèles se mobilisent dans un mouvement buttom-up et surtout des instances d’autorité spirituelle engagent dans un mouvement top-down les communautés vers la transition énergétique. Religions et spiritualités ne sont pas forcément des nouveaux carburants vers la transition énergétique, par contre elles carburent à l’écologie pour maintenir une voix dans la symphonie du vivre ensemble écologique. À force de surfer sur la vague de la transition, avec parfois des actions concrètes engagées pour le climat, elles en deviennent des actrices presque incontournables.

Notes

  • [1]
    En ordre alphabétique. Par ailleurs, cet article a bénéficié d’une relecture précieuse d’Alexandre Grandjean que les auteur-e-s remercient.
  • [2]
    Voir par exemple : http://www.swissinfo.ch/fre/solar-impulse_soleil--yoga-et-autohypnose-pour-un-vol-écologique-autour-du-monde/41277540 (consulté le 2 avril 2016).
  • [3]
    Stephen R. Kellert et Timothy J. Farnham (éd.), The Good in Nature and Humanity : Connecting Science, Religion, and Spirituality, Washington, Island Press, 2002.
  • [4]
    Rocchi Valérie, 2013, « Des nouvelles formes du religieux ? Entre quête de bien-être et logique protestatiare : Le cas des groupes post-Nouvel-Age en France », Social Compass 50 (2), 175-189
  • [5]
    Leonardo Boff, Dignitas Terrae. Ecologia : Grito da Terra, gritos dos Pobres, Sao Paolo, Editora Atica, 1995.
  • [6]
    Bulle papale du 29 novembre 1979 : http://francis35.org/pdf/papal_declaration.fr.pdf (consulté le 31 mars 2015).
  • [7]
    Isacco Turina, « L’Église catholique et la cause de l’environnement », Terrain, 60 (1), 2013, p. 20-35.
  • [8]
    François, Lettre encyclique Laudato si’ du Saint-Père François sur la sauvegarde de la maison commune, Paris, Artège, 2015.
  • [9]
    Site www.oeku.ch (consulté, le 2 mars 2016).
  • [10]
    Site http://www.alternatibaleman.ch (consulté le 2 mars 2016).
  • [11]
    Philippe Descola, L’écologie des autres, Paris, Quae, 2013, p.85.
  • [12]
    Raymond Lemieux, « Compte rendu de D. Hervieu-Léger (éd.), Religion et Écologie », Sociology of Religion, 55(2), 1994, p. 216.
  • [13]
    Dominique Bourg, Le nouvel âge de l’écologie, Paris, Descartes & Cie, 2003 ; Dominique Bourg, Philippe Roch (dir.), Crise écologique, crise des valeurs ? Défis pour l’anthropologie et la spiritualité, Genève, Labor et Fides, 2010 ; Gérald Hess, Éthique de la nature, Paris, Puf, 2013 ; Frédéric Paul Piguet (éd.), Approches spirituelles de l’écologie, Paris, éd. Charles Léopold Mayer, 2003.
  • [14]
    Roger Gottlieb (éd.), The Oxford Handbook of Religion and Ecology, Oxford, Oxford University Press, 2010.
  • [15]
    Mary Evelyn Tucker, “Religion and Ecology : Survey of the Field” in R. Gottlieb (éd.), 2010, op. cit., p.405.
  • [16]
    Danièle Hervieu-Léger (dir.), Écologie et Religion, Paris, Cerf, 1993.
  • [17]
    Max Weber, L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 2004 [1904].
  • [18]
    Danièle Hervieu-Léger (dir.), op. cit., p. 7.
  • [19]
    James Beckford, « Écologie et religion dans les sociétés industrielles avancées », in D. Hervieu-Léger (dir.), 1993, op. cit., p. 247.
  • [20]
    Jens Koehrson, “Does Religion Promote Environmental Sustainability ? Exploring the Role of Religion in Local Energy Transitions”, Social Compass 62(3), 2015, p. 296-310.
  • [21]
    Christiàn Parker, « Religion et transition énergétique : Une étude en Amérique du Sud », Social Compass 62(3), 2015, p. 344-361.
  • [22]
    Miriam D. Pepper, Rosemary J. Leonard, « Les attitudes face aux changements climatiques et les actions pour la décroissance énergétique des chrétiens pratiquants : Les effets des persusasions religieuses et du capital social », Social Compass 62(3), 2015, p. 326-343.
  • [23]
    Laurel Kearns, “Saving the Creation : Christian Environmentalism in the United States”, in Sociology of Religion, 57(1), 1996, p. 55-70.
  • [24]
    Ludovic Bertina, « Écologistes mais pas verts : des catholiques aux prises avec la question politique », in Acte du Colloque « Penser l’écologie politique : Sciences sociales et interdisciplinarité », 2014, disponible en ligne : http ://events.it-sudparis.eu/ ecologiepolitique/rub2/Actes.pdf, consulté le 22.03.2016.
  • [25]
    Jon Bloch, “Alternative Spirituality and Environmentalism”, in Review of Religious Research 40(1), p. 55-73.
  • [26]
    Sarah Strauss, Laura Mandelbaum, “Consuming Yoga, Conserving the Environment : Transcultural Discourses on Sustainable Living”, in B. Hauser (éd.), Yoga Traveling, Transcultural Research, Heidelberg, Springer, 2013, p. 175-200.
  • [27]
    Site http://www.volteface.ch, consulté le 4 avril 2016.
  • [28]
    Que nous simplifions par Oeku ci-après.
  • [29]
    Olivier Fatio, « Le Conseil œcuménique des Églises doit-il survivre ? », in O. Fatio (dir), Pour sortir l’œcuménisme du purgatoire, Genève, Labor et Fides, 1993, p. 9.
  • [30]
    Kurt Aufdereggen (éd.), Paroisses vertes : guide écologique à l’attention des Églises, Genève, Berne, Labor et Fides, Oeku Église et environnement, 2010.
  • [31]
  • [32]
  • [33]
    La source pour toutes les citations de ce paragraphe est la charte publiée sur le site internet du mouvement : https://alternatiba.eu/charte-des-alternatiba, consulté le 4 avril 2016.
  • [34]
    « agriculture paysanne, souveraineté alimentaire, reconversion sociale et écologique de la production, énergies renouvelables » (cf. note précédente).
  • [35]
    « consommation responsable, … réparation et recyclage, réduction des déchets » (cf. notes précédentes)
  • [36]
    « partage du travail et des richesses » (cf. notes précédentes).
  • [37]
    « relocalisation de l’économie, finance éthique, défense des biens communs comme l’eau, la terre ou les forêts, pêche durable » (cf. notes précédentes).
  • [38]
    « transports doux et mobilité soutenable, éco-rénovation » (cf. notes précédentes).
  • [39]
    La page d’accueil du site présente la manifestation comme le « Festival transfrontalier des initiatives locales pour le climat et le bien-vivre ensemble » : https://alternatiba.eu/leman/
  • [40]
  • [41]
    Par exemple le livre de Gregoire de Kalbermatten (The Advent, New York, Daisyamerica LLC, 2003) que l’auteur, un ancien diplomate suisse à différents programmes de l’Onu, en retraçant la vie de Shri Mataji Nirmala Devi, présente l’ouvrage comme un livre qui pose « la problématique écosystèmes, civilisation et spiritualité » (site https://alternatiba.eu/leman/charte-alternatiba, consulté le 4 avril 2016).
  • [42]
  • [43]
    Pour en savoir plus sur l’animateur : http://www.sahajaculture.org/authorgregoiredekalbermatten.aspx (consulté le 10 avril 2016).
  • [44]
    L’espace transition intérieure est une initiative d’un membre du comité d’organisation du festival.
Français

Cet article cherche au travers d’une enquête ethnographique deux terrains particuliers à éclairer le rôle de la religion et de la spiritualité dans la transition énergétique. Le premier est une association chrétienne œcuménique Oeku Église et environnement qui s’active pour que les Eglises se positionnent en faveur du climat et qu’elles adoptent un comportement écologique. Le second terrain est celui d’un événement organisé par Alternatiba Léman, un réseau d’acteurs organisant des festivals qui cherche à présenter des initiatives locales face aux défis du changement climatique. Ces deux cas d’étude, nous permettent d’esquisser le constat que le religieux ou le spirituel carburent à la transition énergétique pour différentes raisons stratégiques ou de circonstance. Un positionnement qui permet aussi aux acteurs non religieux de la transition énergétique de tirer un certain profit. La mobilisation d’acteurs religieux n’est toutefois véritablement présente que sur le registre discursif ou philosophique. Il produit cependant parfois une réelle prise de conscience des acteurs religieux pour un comportement favorable à la transition énergétique.

English

Spirituality and Religion: “New Fuel“ for Energy Transition?

This paper aims through two particular ethnographic cases to enlighten the role of religion and spirituality in energy transition. The first encounter is an ecumenical Christian association “Oeku Church and environment” and provides support for the Churches to become eco-friendly or adopt an ecological behaviour. The second ethnographic case is “Alternatiba Leman”, an event organized by a network of actors which attempts to set up festivals promoting local initiatives to challenge the climate change. Those two case studies allow us to contour that members of a religious or spiritual sphere run on the energy transition for various strategic reasons or contingencies. This positioning allows secular actors in energy transition to benefit by their engagement. The mobilization of religious actors is, however, really mainly present on the discursive or philosophic register. Nevertheless this register sometimes produces a real awareness of the religious actors to an eco-friendly behaviour.

Irene Becci
Christophe Monnot [1]
Université de Lausanne
Institut de sciences sociales des religions (Issrc)
  • [1]
    En ordre alphabétique. Par ailleurs, cet article a bénéficié d’une relecture précieuse d’Alexandre Grandjean que les auteur-e-s remercient.
Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire
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Mis en ligne sur Cairn.info le 15/12/2016
https://doi.org/10.3917/hmc.040.0093
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