CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Entre avril 1975, date de l’entrée des forces khmères rouges dans Phnom Penh, et leur éviction par les troupes vietnamiennes en janvier 1979, plus du tiers de la population cambodgienne est décédé. En moins de quatre ans, le régime de Pol Pot a ainsi obtenu l’effroyable résultat d’avoir éliminé presque deux millions de personnes alors que l’arrivée de ses troupes dans la capitale le 17 avril 1975 devait signer la fin de la guerre. En ce sens, ce crime relève ni d’une guerre ni d’une guerre civile, mais bien d’un système d’épuration systématique organisé et assumé par les autorités de l’époque (Chandler, 1993 ; Kiernan, 1998). Quarante ans plus tard, les principaux responsables ont enfin été traduits en justice malgré l’absence de leur chef Pol Pot, alias frère numéro un, décédé dans la jungle en 1998.

2 La juridiction inventée pour juger les responsables politiques et militaires de ces crimes contre l’humanité est avant tout le produit des enjeux géopolitiques qui n’ont cessé de complexifier la situation cambodgienne. Avec un régime en place composé d’ancien Khmers rouges dissidents, mais néanmoins impliqués dans les crimes perpétrés durant les deux premières années du régime, et des puissances régionales – le Vietnam et la Chine – peu enclines à devoir répondre de leur implication politico-militaire, seul un montage permettant de circonscrire les poursuites à quelques présumés coupables, pouvait être accepté par les différentes parties. La création en 2001 des « Chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (cetc) pour la poursuite des crimes commis pendant la période du Kampuchéa Démocratique » fut la réponse apportée par l’onu à la demande du gouvernement cambodgien [1]. C’est-à-dire, un tribunal mixte cambodgien et international ne jugeant que les principaux responsables et scindé en plusieurs procès. Le procès 001 examinant le cas de Kaing Guek Eav, alias Duch, le chef du centre d’interrogatoire et d’extermination S21 situé à Phnom Penh, s’est conclu en février 2012 par la condamnation en seconde instance de l’intéressé à la perpétuité. Le procès 002-01 contre les quatre principaux co-accusés mais dont seulement les deux premiers, Nuon Chéa, numéro deux du régime, et Khieu Samphan Président du Kampuchéa Démocratique, seront jugés et condamnés en première instance à la perpétuité pour crime contre l’humanité. En effet, Ieng Sary ministre des Affaires étrangères décède en mars 2013 avant le début des audiences, tandis que son épouse Ieng Thirith, ministre de l’Action sociale, atteinte de la maladie d’Alzheimer est écartée en 2011 et décède en août 2015.

3 Malgré toutes les critiques qui furent de toutes parts adressées à ces procès, les minutes des audiences, comme les témoignages des parties civiles pour la première fois acceptées dans une procédure de cette ampleur, livrent un matériel unique sur la réalité quotidienne d’un régime génocidaire. On y découvre qu’à l’époque des Khmers rouge, vivre ou mourir relevait d’une simple décision politique. Le pourquoi la guerre de Freud résonne étrangement avec ce crime de génocide où l’administration de la mort, dans le double sens d’exécuter et de gouverner, s’exerce sans la guerre, et nous révèle comment des hommes ordinaires firent de la mise à mort un métier civil (presque) comme un autre.

Chroniques de bourreaux ordinaires

Les ordonnateurs

4 Lors de son procès Kaing Guek Eav, alias Duch, le chef du tristement célèbre centre S21 de Phnom Penh où plus de 15 000 personnes furent suppliciées avant d’être assassinées et jetées dans les fosses communes de Choeung Ek à quelques kilomètres de la capitale, a reconnu la quasi totalité des crimes dont il était accusé. Certes, les preuves étaient accablantes. Les archives de S21, les photos des suppliciés, les milliers de pages de confessions extorquées sous la torture et annotées de sa main, interdisaient à sa défense d’imaginer pouvoir plaider l’absence de culpabilité. Ce fut d’ailleurs la condition imposée par son co-avocat français, François Roux. Grand spécialiste de la cause des insoumis et des objecteurs de conscience, cet avocat réputé avait accepté de défendre l’indéfendable au nom des mêmes valeurs que celles qui guidaient sa pratique, à savoir : dénoncer les méfaits de l’obéissance aveugle et défendre l’insoumission lorsque la règle, la loi, ou l’ordre étaient injustes. Le cas Duch lui offrait l’occasion de plaider l’atténuation de la responsabilité et de demander la clémence pour un homme victime de sa passion de l’ordre et de l’obéissance. Et jusqu’aux derniers instants de son procès, Duch a joué son rôle à la perfection. Collaborant avec le tribunal, corrigeant les erreurs historiques des témoins, même lorsque sa rectification l’accablait encore un peu plus (Cruvellier, 2011). Acceptant d’être filmé dans sa prison par le cinéaste cambodgien Rithy Panh, il se prêtera docilement à cet exercice fascinant jusqu’à livrer des détails jusqu’alors inconnus (Panh, 2012). Récusant l’accusation d’avoir tué de ses propres mains, Duch admettra toutefois sa pleine responsabilité d’ordonnateur. Professeur de mathématiques, admirateur de la littérature française, il se plaisait à se décrire comme un homme rigoureux et respectueux, obéissant tout aussi servilement aux demandes de précisions du président du tribunal des Chambres extraordinaires, qu’aux ordres des hauts dirigeants khmers rouges. De son point de vue, il n’y avait pas une grande différence entre le fait d’accepter de répondre à la question d’une autorité reconnue, comme celle du président du tribunal, et celui de faire assassiner ceux que le Kampuchéa Démocratique considérait comme des ennemis et des traitres. Dans les deux cas, l’obéissance n’était que la résultante de la légitimité de l’autorité ordonnatrice. Rien de plus.

5 Pourtant, à la surprise générale, Duch change radicalement de stratégie de défense au moment des plaidoiries finales et demande sa libération en prenant à contre-pied son co-avocat français, qu’il révoque brutalement quinze jours avant l’énoncé du verdict. Ce revirement a été largement commenté, y compris par François Roux, tous y voient la marque du régime en place et sa volonté d’en finir avec ce procès. Pour autant, l’argumentaire développé par l’accusé mérite que l’on s’y attarde. Car Duch ne demande pas son acquittement au nom du fait qu’il aurait été un simple soldat obéissant aux ordres, à la manière d’un Eichmann jouant sur l’obéissance servile que tout officier doit à ses supérieurs. Le chef de S21 va beaucoup plus loin. Il regrette les morts innocentes et s’excuse auprès des familles de ceux qui auraient été injustement éliminés. Mais seulement de ceux là, dit-il en substance. Les autres, les traitres et les ennemis du Kampuchéa Démocratique devaient être neutralisés, la technique de cette neutralisation important moins que son efficacité. En ce sens, dira-t-il, s’il y a eu crime, c’est un crime politique. Or, pour Duch, un crime politique n’est pas un crime, mais une politique. Et lui, ne saurait être condamné pour une politique élaborée par d’autres et qu’il a appliqué avec la rigueur d’un bon chef de la police. D’ailleurs, dira-t-il, si les Khmers rouges avaient gagné, il serait un héros aujourd’hui et non un accusé. Ne rêvait-il pas de se voir décerner le titre de « meilleur instrument du Parti ». Devant la caméra de Rithy Panh, c’est sans doute la chose qu’il regrette encore le plus sincèrement lorsque du fond de sa prison il concède avec dépit l’avoir raté de si peu (Rechtman, 2011) !

6 Le cas de Duch est tragiquement exemplaire de ces hommes qui n’hésitèrent pas à envoyer à la mort des centaines, des milliers, voire des centaines de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants pour d’obscures raisons idéologiques. Il rejoint en ce sens un Eichmann (Arendt, 1966), et tant d’autres semblables qui, malgré leurs différences, se retrouvent dans cette odieuse justification de penser le politique à travers l’administration de la mort.

7 Mais Duch ou Eichmann, comme tant d’autres cadres intermédiaires de ces entreprises génocidaires, récusent l’idée même d’avoir mis la main à la pâte. Eux ont ordonné, mais ils n’ont pas tué de leurs propres mains. Duch dira qu’il n’aurait pas pu le supporter, cela l’aurait dégoûté, il se serait senti physiquement trop mal, risquant à chaque instant la nausée ou la perte de connaissance qui l’auraient définitivement déconsidéré aux yeux de ses subalternes (Panh, 2012). C’est là le point essentiel de son argumentaire. La preuve de sa non participation directe et physique au crime de masse réside essentiellement dans sa faible corpulence et sa trop grande sensibilité. Il faut de la force physique pour torturer un homme, dit-il, et surtout ne pas être trop émotif. Lui, c’est un intellectuel, un être de culture, sensible et passionné, en un mot c’est un chef, il ordonne, mais ne tue pas. Administrer la mort, c’est effectivement la faire exécuter par d’autres mains.

Les exécuteurs

8 Mais si le profil de ces criminels de guerre ou de ces auteurs de crimes contre l’humanité est aujourd’hui mieux connu, notamment grâce aux procès internationaux devant lesquels ils ont dû répondre de leurs actes. La fascination qu’ils exercent sur ceux qui cherchent à comprendre la radicalité de leur crime n’est sans doute pas propice à l’analyse des raisons, des conditions et des motifs de ceux qui, en bout de chaîne, tuent de leurs mains. Ceux là se retrouvent rarement devant les tribunaux. Au Cambodge, ils n’y seront pas convoqués, sauf pour certains, mais en simple qualité de témoin, pour renforcer l’accusation contre les chefs. Mais justement, dans ce derniers cas, ce ne seront pas de leurs actes dont ils devront répondre. De cela, au fond, ils ne diront rien, ou si peu.

9 En Indonésie, les bourreaux ordinaires des massacres de plus d’un million de personnes en 1965 se pavanent encore dans les rues de la capitale et s’affichent comme les héros d’une guerre éclair contre des ennemis politiques pourtant désarmés. Devant la caméra du cinéaste Joshua Oppenheimer, ils n’hésiteront pas un seul instant à refaire les gestes macabres de ces tueries quotidiennes (Oppenheimer, 2013). Eux non plus ne seront pas jugés. Et en dehors de ce témoignage filmique, on ne saura pas grand-chose d’eux ni de leur histoire, sauf que ces hommes ne semblent pas éprouver de remords, encore moins de honte ou de culpabilité.

10 Au Rwanda les choses furent assez différentes. En effet, tandis que les principaux responsables du génocide étaient jugés devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda d’Arusha (Tanzanie), les acteurs quotidiens des massacres relevaient, eux, d’une juridiction locale et collaborative, les Gacacas, dans laquelle des milliers d’accusés furent entendus. Les témoignages des bourreaux y ont été largement recueillis et analysés, permettant, pour la première fois sans doute, d’avoir une vision précise de l’ordinaire d’un criminel de masse (Hatzfeld, 2003), (Dumas, 2014). C’est pourtant cette connaissance qui manque le plus souvent.

11 Tantôt au nom de la réconciliation, tantôt pour récupérer à d’autres fins criminelles une main d’œuvre tortionnaire bien formée (comme ce fut le cas pendant les dictatures latino-américaines où de nombreux criminels de guerre nazis trouvèrent rapidement un nouvel emploi, mais aussi aux États-Unis pendant la guerre froide), mais le plus souvent pour de simples raisons numériques, parce qu’il serait impossible de juger des milliers de criminels de guerre, ces hommes et ces femmes n’ont jamais eu à répondre de leurs actes et donc à s’expliquer. Et même lorsque certains furent inquiétés, lorsque d’autres eurent à comparaître devant leurs juges ou simplement acceptèrent de se livrer devant une caméra [2], il semble que quelque chose de leur témoignage intime résiste à l’entendement. Pourtant, la plupart l’expriment sans gène. Ils n’ont rien éprouvé de particulier, ils n’ont pas ressenti l’horreur de leurs actes, ils ne se sont pas dit qu’ils n’avaient pas d’autres choix que de faire le mal, ils ont juste reconnu avoir parfois éprouvé du dégoût, souvent ressenti de la fatigue et régulièrement de la lassitude à reproduire chaque jour les mêmes gestes. C’est là leur seul secret !

12 Malgré cela, depuis la Seconde Guerre mondiale la littérature scientifique – psychologique, sociologique, psychosociologique et psychanalytique – s’évertue à chercher les mécanismes intimes qui permettraient enfin de comprendre pourquoi ces hommes et ces femmes pensent et disent ne pas avoir éprouvé ce que la conscience humaine nous dit qu’ils auraient dû éprouver. Comme si, au fond, seul le déni de cette supposée conscience humaine permettait d’expliquer la possibilité matérielle du meurtre de masse.

13 Pour y répondre, alors que Les Considérations actuelles sur la guerre et la mort de Freud en avait déjà anticipé les grandes lignes dès 1915 (Freud, 1915b), la pulsion de mort d’un côté et la soumission à l’autorité, de l’autre, allaient offrir le cadre explicatif le plus courant et, paradoxalement, le moins dérangeant.

Comment peut-on Être bourreau ?

L’hypothèse morale

14 Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la découverte des camps d’extermination, où parallèlement aux millions de combattants décimés le monde apprenait l’élimination systématique et industrielle de millions de Juifs et de centaines de milliers de Tsiganes, a sans doute anéantie les derniers espoirs placés dans l’œuvre civilisatrice de l’Occident. Comprendre ce qui s’était passé et pourquoi cela avait pu se produire au cœur de l’Europe devenait une nécessité historique et morale.

15 Dans ce mouvement pour rechercher l’explication au déferlement de violence et d’horreur sur tout un continent, certains travaux scientifiques con­nurent un vif succès. Les travaux du psycho-sociologue Stanley Milgram sur la soumission à l’autorité sont sans doute les plus représentatifs (Milgram, 1974) [3]. Ils témoignent de cet intérêt grandissant pour la compréhension de ce qui transforme un homme ordinaire en bourreau.

16 Dans le contexte de l’après guerre, ces expérimentations évoquaient bien sûr l’obéissance servile et la soumission aux ordres plaidées par la défense des anciens nazis. En ce sens, elles apportaient une réponse à la fois effrayante et néanmoins réconfortante. Car à la question comment est-il possible de devenir bourreau, Milgram contribuait à apporter une réponse morale : n’importe qui peut commettre une violence aveugle dès lors qu’une autorité respectée le lui impose. Inutile d’invoquer la peur ou la perversité pour justifier un tel comportement, la simple obéissance suffit. Effrayante, parce qu’elle laissait entendre que n’importe qui pouvait devenir bourreau, même en dehors d’un contexte de guerre. Mais néanmoins réconfortante puisqu’elle extrayait les bourreaux (les Européens) de la monstruosité pour en faire des hommes ordinaires placé dans des conditions extraordinaires dont le jugement était amoindri par la soumission. En témoigne l’effroi et la culpabilité qu’éprouvaient les participants lorsqu’ils découvraient à l’issue de l’expérience jusqu’où ils avaient été capables d’aller, prenant subitement conscience de l’horreur de leur acte.

17 Alors que l’ampleur des massacres commis durant la Seconde Guerre mondiale apportait un démenti formel à la vision simpliste que seuls les monstres ou les pervers pouvaient devenir des bourreaux, Milgram apportait une réponse néanmoins plus acceptable pour l’Occident puisqu’à la terreur de la soumission passive pouvait répondre l’espoir d’un éveil des consciences.

18 Mais cette façon de se faire peur en se représentant sous un angle moral (la soumission passive) le passage de l’homme ordinaire au bourreau, n’a finalement rien à voir avec le quotidien d’un fonctionnaire d’une bureaucratie génocidaire. L’expérience de Milgram restera surtout pour ce qu’elle révèle du désarroi intellectuel et moral dans lequel l’Occident fut plongé pour rendre compte de la barbarie nazie. Elle témoigne avant tout de la façon dont les sociétés occidentales ont tenté de résorber l’épineuse question de la responsabilité individuelle dans les crimes contre l’humanité. Car, si dans la réalité d’un exterminateur l’obéissance existe, l’aveuglement est, en revanche, précisément absent. Lorsque les bourreaux ordinaires se lèvent le matin, ils savent qu’ils vont aller tuer, aucune surprise ne les attend, aucun piège ne leur est tendu. Et dès qu’ils se couchent, ils savent aussi qu’il faudra recommencer le lendemain et le surlendemain, et ainsi de suite. À l’ignorance des malheureux cobayes de Milgram, lesquels ne recommencent jamais une deuxième fois, répond la parfaite conscience des fonctionnaires de la mort. Mais ce n’était justement pas ce que l’Occident blessé pouvait entendre, tout au moins tant que la question de la possibilité du crime de masse relevait d’une philosophie de l’humain. En effet, à la question comment est-il possible de…, avec le sous-entendu que cela devrait être normalement impossible, les chercheurs, les chroniqueurs, jusqu’aux hommes de lois ont essayé de trouver les mécanismes psychiques qui expliqueraient le franchissement de ce qui, philosophiquement, se devait d’être impossible.

L’hypothèse technique

19 Les travaux de Raul Hilberg, dès le milieu des années 1950, vont largement contribuer à transformer la perspective d’analyse et plus encore per­mettre de s’écarter de l’interrogation morale pour rendre compte des conditions de possibilité du génocide (Hilberg, 2006). À la question « comment est-il possible d’exterminer plusieurs millions d’individus ?», Hilberg apportera une réponse technique. Le décompte des convois, les itinéraires, les traces dans les archives, les techniques de mise à mort, leurs évolutions, l’évaluation de leur efficacité, les avancées de productivité… autrement dit, toute l’industrialisation et le quotidien du crime, des bureaucrates aux simples exécutants, tout est pris en compte par l’historien pour méticuleusement montrer comment justement la réalisation du meurtre de masse fut techniquement possible. Christopher Browning ira encore plus loin dans la description du quotidien de la mise à mort à partir des discours des exécuteurs. Dans son ouvrage sur le 101e bataillon de réserve de la police allemande, l’auteur analyse les récits et les témoignages de ces hommes qui abattirent plus de 40 000 juifs d’une balle dans la tête en un peu moins de deux ans (Browning, 2006). Le résultat est saisissant et bien plus terrible que l’expérience de Milgram. Ces hommes ordinaires ont chaque jour ou presque, tué, parfois avec des états d’âme, souvent sans, généralement avec lassitude et fatigue, sachant ce qu’ils allaient faire et pourquoi ils devaient le faire. Ils n’avaient pas mauvaise conscience, pas même besoin de s’inventer une bonne conscience pour dissimuler la nécessairement mauvaise conscience qu’ils auraient dû avoir, telle qu’aujourd’hui on voudrait s’imaginer qu’ils aient eu. Chacun de ces récits montre que cette nécessité n’existe pas.

20 Les bourreaux ordinaires du génocide perpétré par les Khmers rouges n’ont pas la même verve que leur chef Duch. Ils ignorent la dialectique et ne sauraient faire la différence entre un crime politique et un assassinat crapuleux. Ils n’ont pas été formés à l’école du parti. Nombreux viennent des campagnes et furent avant tout de bon riziculteurs, de bons voisins aussi, partageant leurs maigres revenus avec leurs proches, voire avec les rares étrangers qui exceptionnellement passaient à proximité. Pourtant, sans haine, ni passion, sans désir de revanche sociale, sans plaisir non plus, ils tuèrent bien plus d’hommes, de femmes, d’enfants, et de vieillards que leur mémoire ne leur permet aujourd’hui de comptabiliser. Approximativement deux mille de ses propres mains dira l’un d’entre eux, mais ça lui semble beaucoup, ajoutera-t-il. En fait, il ne sait pas le nombre, il a oublié. Pas ce qu’il faisait cela va de soi, on n’oublie pas des conditions de travail aussi pénibles. Au gourdin, vous imaginez, c’est difficile de tuer quelqu’un d’un seul coup ! Il ne se souvient d’aucun visage, pas le temps de les voir et encore moins de les fixer (Suon, 2010). De même, cet autre qui devant la caméra de Rob Lemkin se souvient avec une grande précision de la technique qu’il employait pour égorger ses victimes. Pas du nombre, il y en avait trop, mais des gestes et de la douleur qu’il ressentait chaque soir après l’effort. Pour preuve du grand nombre, il reproduira les gestes exacts de la mise à mort : le condamné est allongé sur le ventre attaché les mains dans le dos, il lui enfonce le dos avec le genou, soulève rapidement la tête par les cheveux en lui imprimant une flexion arrière, puis tranche d’un coup vif de gauche à droite. Le soir, il n’en pouvait plus de fatigue et exécutait les derniers en leur enfonçant simplement le couteau dans la gorge tellement il avait de crampes au poignet à force de faire ce balayage de gauche à droite (Lemkin & Thet, 2012). Oui, il se souvient précisément des gestes, des courbatures, mais d’aucun visage, ni du nombre. Encore aujourd’hui, les corps sont tous là, pas loin, dans des fosses communes que la nature a recouvertes. Personne ne les cherche, personne ne les pleure et lui, leur bourreau, ne sait même pas le nombre, alors le visage de chacun, pensez vous ! Aujourd’hui, il n’a pas plus de haine que de mauvaise conscience. D’abord, il n’a jamais aimé faire ce qu’il faisait. Mais il le faisait du mieux qu’il pouvait, comme on fait son travail sous les ordres d’un chef, en l’occurrence une puisque sa cheffe était une cadre du parti, qui vous hurle dessus pour que les cadences soient respectées. Il préfèrerait n’avoir jamais tué autant de personnes, il espère ne jamais avoir à recommencer. Il semble comprendre le désarroi de son interlocuteur dont la famille a disparu dans des massacres équivalents, mais en même temps il ne ressent pas grand-chose. Pas plus qu’à l’époque. Il ne cherche même pas à se donner bonne conscience en reconnaissant ses crimes, ni même mauvaise conscience en les avouant. Au fond, ces hommes nous montre que l’on ne ressent rien lorsque l’on tue sans autre motif que d’avoir à le faire chaque jour, comme n’importe quel travail, et que l’on ne se souvient pas plus du nombre de personnes tuées ou de leurs visages, que du nombre de seaux que l’on a dû vider pour nettoyer le sol.

21 Cette technique de mise à mort, ces corps laissés à l’abandon, cette disparition du souvenir des visages, tout cela fait authentiquement partie du programme génocidaire dont l’essentiel n’est pas seulement de faire mourir, mais bien plus de faire disparaître jusqu’au souvenir de l’existant (Rechtman, 2013). Réduire le mort à une simple dépouille que l’on jette comme un déchet pour lui interdire de rejoindre l’univers protecteur des défunts. Toute l’administration de la mort mise en œuvre par les Khmers rouge repose sur cette ambition de tuer la mort, d’interdire les rites funéraires et de ne considérer les vivants destinés à la destruction que comme des cadavres en puissance (Rechtman, 2006).

En guise d’épilogue à « pourquoi la guerre ? »

22 Dans sa réponse à l’invitation d’Albert Einstein, Freud livre un commentaire quelque peu désabusé sur la guerre et fait coïncider la haine entre les peuples avec certaines motions intrapsychiques (Freud, 1933b [1932]). Profondément marqué par la Grande Guerre et son effroyable brutalité, le désenchantement de Freud n’a sans doute pas d’autre égal que sa déception d’avoir cru, plus tôt, que sa méthode permettrait de déjouer le pire. Au crépuscule de sa vie, il semble faire le triste constat que la psychanalyse n’y pourra rien, sauf à la marge peut-être, comme avec la religion, c’est-à-dire juste pour en dévoiler l’illusion. La religion ne porte pas le salut de l’homme. L’homme non plus, nous laisse-t-il comprendre.

23 Pour l’auteur du Malaise dans la civilisation, la réponse à ce « Pourquoi la guerre ? » est donc encore plus cinglante. Il n’y a pas grand chose à attendre de l’homme, dit-il en substance, et surtout pas de la masse. Et si d’aventure la société se montre encore plus féroce, si elle encourage la brutalité, si elle désigne ceux sur lesquels cette cruauté pourra se déchaîner, alors le pire sera au-delà de l’imaginable. L’histoire du xx esiècle lui a malheureusement donné raison. La Seconde Guerre mondiale, Hiroshima, la Shoah, les épurations staliniennes, la Révolution culturelle maoïste, le génocide perpétré par les Khmers Rouge, le génocide des Tutsies, la répression sanglante dans l’Indonésie des années 1960, et d’autres encore. Le troisième millénaire ne s’annonce pas moins violent. Déjà l’Orient est en feu. Et les anciennes puissances coloniales ne sont pas en reste.

24 Freud avait donc raison, pourrions-nous dire. Mais si Freud a pu ainsi penser que le pire pouvait arriver, et nous en annoncer la couleur, n’est-ce pas parce que, pendant longtemps, il n’y a justement pas cru ou pas voulu y croire ? N’aurait-il pas plus exactement cru à l’existence dans l’homme de forces intrapsychiques capables de transformer la haine en conflit et de sublimer la cruauté ? N’a-t-il pas espéré, au moins pendant toutes les années d’invention, que la psychanalyse saurait faire triompher des modes de résolution bien moins brutaux ? La déception freudienne réside sans doute dans cet espoir trahit. Le mal est possible, souhaité, réalisable et réalisé. Donc l’homme est potentiellement mauvais (pulsionnellement devrait-on dire). Voilà où Freud se retrouve alors même qu’il a toujours voulu esquiver cette question.

25 Étonnamment, au travers de son explication de la guerre, l’inventeur de la psychanalyse reste hanté par une question morale, dans laquelle la pulsion de mort et le Mal sont en étroite correspondance. Or, ce que nous apprennent les témoignages des bourreaux ordinaires des génocides contemporains [4] est finalement plus simple. Il n’est pas indispensable de laisser libre court à ses pulsions pour être un criminel de masse. Ceux qui s’y livrent prennent peut-être plus de plaisir, mais en fait, très vite, ils se lassent et poursuivent sans jouissance. D’autres trouveront cela déplaisant, voire pénible à cause des odeurs, du bruit, du sang, de l’effort et donc de la fatigue, et pourtant poursuivront. D’autres, enfin, n’y trouveront rien, et tâcheront toujours de faire au plus vite pour passer à autre chose, mais le feront quand même. Il n’est pas non plus indispensable de développer une surenchère de mécanismes psychologiques comme le déni, le déplacement, ou l’évitement pour ne pas voir le Mal. Car pour eux, le Mal ne réside pas là, puisqu’ils ne font que ce qu’ils doivent faire : leur job, un point c’est tout. Même la douleur qu’ils provoquent n’a rien à voir avec le Mal. D’ailleurs, ils n’ignorent pas les souffrances qu’ils induisent, pour certains c’est même cela le bien : le faire quand même. Pour d’autres, c’est insignifiant, c’est-à-dire que ni le mal ni le bien ne sont en jeux dans ce qu’ils doivent accomplir. Le Mal, ils le rencontrent ailleurs dans leur vie et savent s’en protéger pour défendre leurs proches, par exemple. Ils n’ont donc pas besoin de suspendre leur jugement moral pour commettre leurs crimes, leur jugement moral est incontestablement intact, mais il ne se trouve pas là !

26 Hannah Arendt, tout comme Sigmund Freud avant elle, aurait-elle voulu croire à l’existence de quelque chose de spécial chez ces auteurs de crimes de masse qui simultanément leur permettrait de saisir l’horreur de leurs actes et aussitôt d’en dénier la portée morale ? L’expression « banalité du mal » traduit justement cette coexistence ambivalente de deux termes en tous points opposés. La formule, pour terrible qu’elle soit, résonne néanmoins comme une ultime tentative d’accorder à ces hommes le bénéfice d’un doute : au moins ils savaient que ce qu’ils faisaient était inacceptable. Or rien ne laisse supposer que cette tentative de leur préserver un soupçon de lucidité sur l’horreur commise soit empiriquement justifiée. Eux mêmes avouent plus volontiers avoir agit conformément à ce qu’ils devaient faire. Même leurs efforts pour faire disparaître les traces des corps suppliciés ne relèvent pas d’une quelconque tentative de dissimuler leurs méfaits. À l’inverse, la destruction des corps fait intégralement partie du processus génocidaire et traduit l’ambition de tuer la mort. Autrement dit, d’éliminer justement tout le genos du groupe à détruire, c’est-à- dire jusqu’aux morts, de leur dépouille à leur souvenir.

27 En ce sens, il me semble que la pulsion de mort n’est pas plus convoquée pour permettre de tuer en masse que pour accepter de vider les poubelles d’une ville ou d’exercer la médecine. Tuer est un job, souvent rien de plus, comme ils le disent tous. Mais derrière cette première évidence qui semble s’appliquer à tous les auteurs de crimes de guerre ou de masse, ces tueurs sont en fait tous différents, ils obéissent à leurs supérieurs pour des raisons généralement bien différentes les uns des autres. Parfois par peur, souvent pour se faire bien voir, par esprit de revanche pour certains, sans aucune idée particulière pour d’autres encore.

28 Au fond, on ne sait pas pourquoi les hommes tuent avec une telle facilité en temps de guerre et a fortiori au cours des génocides. Mais une chose est au moins sûre, ils le font, et dans des proportions toujours plus importantes à mesure que la technique leur offre des instruments de mort plus perfectionnés (Audoin-Rouzeau, 2008). En invoquant un « on ne sait pas pourquoi », il s’agit avant tout de souligner que les raisons singulières qui poussent un homme ou une femme à accepter et donc à décider d’endosser le rôle de tueur de masse, c’est-à-dire de tueur d’hommes, de femmes, d’enfants, de vieillards désarmés et ne représentant aucun danger direct pour celui ou celle qui les assassinera, nous sont généralement totalement inconnues, sauf à les entendre chacun s’en expliquer. Dès lors, les crimes commis lors de l’exercice de ce métier de tueur de masse ne devraient bénéficier d’aucune atténuation a priori de la responsabilité de leurs auteurs, ni d’aucune indulgence a posteriori. Ni la soumission à l’autorité, ni la pulsion de mort ne sauraient valoir pour tous et donc collectivement expliquer le meurtre, et encore moins disculper chaque auteur de la décision qui précède le meurtre.

29 Certes, pour des raisons politiques, voire judiciaires, ces hommes et ces femmes ne seront jamais individuellement traduits en justice. Certes, face aux crimes contre l’humanité les sociétés occidentales ont un jour décidé de n’entendre devant leurs tribunaux que les responsables de hauts rangs, laissant aux autres, c’est-à-dire à ceux qui tuèrent au quotidien, le droit de s’évanouir dans la nature et de se réinsérer tranquillement. Mais il me semble plus difficilement acceptable que les scientifiques de tous bords cautionnent aveuglement cet effacement des responsabilités, au nom d’une supposée commune expérience collective des bourreaux dédouanant l’engagement personnel de chacun, alors qu’aucune clinique, ni aucune sociologie ne vient empiriquement corroborer cette assertion. Au fond, ne pas poursuivre ces hommes et ces femmes relève d’un choix politique, rien de plus. Mais les psychanalystes savent aussi que le déni de l’acte singulier appelle sa répétition.

Notes

  • [1]
    Sur le site du cetc, on trouve l’ensemble de l’instruction et les débats qui ont eu lieu lors des procès. http://www.eccc.gov.kh/fr/
  • [2]
    Le célèbre film Shoah de Claude Lanzmann est sans doute le prototype de ce type de documentaire forçant la parole des bourreaux à se révéler.
  • [3]
    Le modèle de cette expérience a été largement reproduit, il s’agissait de demander à un examinateur volontaire de délivrer un choc électrique de puissance croissante à chaque erreur commise par un candidat censé retenir une nouvelle méthode d’apprentissage. Bien sûr, les chocs n’étaient pas réels et le candidat un acteur, mais, dans la majorité des cas, des chocs réputés mortels étaient infligés par l’examinateur volontaire.
  • [4]
    On retrouve le même détachement chez les complices plus ou moins dociles des exécuteurs : voir les archives visuelles de témoins participatifs de la Shoah par balles collectées par l’équipe Yahad-In Unum du Père Desbois : http://www.yahadinunum.org/?lang=fr
Français

Entre avril 1975 et en janvier 1979, plus du tiers de la population cambodgienne, soit près de deux millions de personnes, est décédé sous le régime des Khmers rouges. Après avoir décrit et analyser l’administration de la mort comme organisation politique du régime génocidaire de Pol Pot, cet article se propose de revenir sur l’ordinaire d’un génocidaire pour souligner que ni la soumission à l’autorité, ni l’invocation de la pulsion de mort ne suffisent à expliquer pourquoi les hommes tuent et torturent si facilement. Il s’agira de mettre en perspective le texte de Freud Pourquoi la guerre avec les propos que les bourreaux eux-mêmes tiennent sur leur acte.

Mots-clés

  • Génocide
  • crime de masse
  • Khmers rouges
  • pulsion de mort
  • bourreaux ordinaires
  • banalité du mal
Deutsch

Töten und nicht leben lassen. Bemerkungen über die völkermörderische Verwaltung des Todes

Zwischen April 1975 und Januar 1979 sind mehr als ein Drittel der kambodschanischen Bevölkerung, d.h. fast zwei Millionen Menschen unter dem Regime der Roten Khmer gestorben. Nach der Beschreibung und Analyse dieses Todesunternehmens als politischer Organisation des völkermörderischen Regimes von Pol Pot, kommt dieser Artikel auf das gewöhnliche eines Völkermörders zu sprechen, um zu unterstreichen, dass weder die Unterwerfung unter die Autorität, noch der Verweis auf den Todestrieb hinreichen, um zu erklären, warum Menschen so leicht misshandeln und töten. Es geht darum, Freuds Text Warum Krieg? mit den Aussagen der Täter selbst über ihre Taten in Beziehung zu setzen.

Stichwörter

  • Völkermord
  • Massenverbrechen
  • Rote Khmer
  • Todestrieb
  • Gewöhnliche Täter
  • Banalität des Bösen
Español

Llevar a la muerte y no dejar vivir. Apuntes sobre la administración genocida de la muerte

Entre abril de 1975 y enero de 1979, más de un tercio de la población camboyana, o sea más de dos millones de personas, murieron durante el régimen de los Jemeres rojos. Luego de describir y analizar la administración de la muerte como organización política del régimen genocida de Pol Pot, el artículo se propone retornar a lo cotidiano de un genocidio para subrayar que ni la sumisión a la autoridad, ni la invocación de la pulsión de muerte bastan para explicar porqué los hombres mataban y torturaban tan fácilmente. Se tratará pues de dar perspectiva al texto de Freud, Por qué la guerra en relación con los propósitos que expresan los torturadores sobre sus actos.

Palabras claves

  • Genocidio
  • Crimen de masa
  • Jemeres rojos
  • Pulsión de muerte
  • Verdugos ordinarios
  • Banalización del mal
Italiano

Far morire e non lasciar vivere: osservazioni sulla somministrazione genocidaria della morte

Tra l’aprile del 1975 e il gennaio del 1979, più di un terzo della popolazione cambogiana, cioè circa due milioni di persone, è morta sotto il regime dei khmer rossi. Dopo aver descritto e analizzato la somministrazione della morte come organizzazione politica del regime di Pol Pot basata sul genocidio, questo articolo si propone di ritornare sugli aspetti quotidiani di un genocidio per sottolineare che né la sottomissione all’autorità né l’invocazione della pulsione di morte bastano a spiegare perchè gli uomini uccidono e torturano cosi’ facilmente. Si tratterà di mettere in prospettiva il testo di Freud Perchè la guerra con le parole che i boia stessi usano per parlare dei loro atti.

Parole-chiave

  • Genocidio
  • Crimine di massa
  • Khmer rossi
  • Pulsione di morte
  • Boia ordinari
  • Banalità del male

Références bibliographiques

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Richard Rechtman
Psychiatre, psychanalyste et anthropologue, Directeur d’études à l’ehess. Responsable depuis 1990 du dispositif de consultations spécialisées pour réfugiés cambodgiens au sein du centre Philippe Paumelle de Paris 13e (asm13), et membre du Centre de ressources audiovisuelles du Cambodge (Centre Bophana de Phnom Penh) fondé par le cinéaste cambodgien Rithy Panh.
Richard Rechtman,
EHESS,
190 av de France
75013 Paris
rechtman@ehess.fr
Mis en ligne sur Cairn.info le 21/03/2016
https://doi.org/10.3917/rfp.801.0136
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