Les enjeux monétaires demeurent trop peu discutés quand il s’agit de penser la transition vers une société plus conviviale. Cet article propose une discussion du rôle de la création de monnaie. Il défend l’idée que la rareté d’argent, qui est si souvent invoquée pour justifier des mesures néolibérales d’austérité, est une fiction politiquement construite. À l’opposé de cette fiction, la Modern Money Theory (MMT) offre aujourd’hui un cadre théorique et pratique solidement charpenté pour concevoir un système monétaire à la fois plus démocratique et libéré du « mythe du déficit public ». Non, une nation souveraine au plan monétaire n’a à se soumettre ni à la fiction du surendettement, ni aux sirènes de l’austérité, ni aux diktats des marchés financiers. Cependant, beaucoup de pays ne jouissent pas de la pleine souveraineté monétaire. Il faut également éviter que, dans les pays pleinement souverains, ne se développe un fétichisme de l’État. C’est pourquoi, dans cet article, une combinaison entre une émission de monnaie nationale inspirée par la MMT et l’émission de monnaies locales complémentaires est envisagée comme « optimum » collectif. De la sorte, un sentier serein vers la convivialité peut être imaginé, du moins au plan monétaire et financier.
Article
Face aux incertitudes actuelles, on peut largement s’accorder sur la nécessité de nouvelles façons de vivre, de consommer, de se déplacer, de se cultiver, de se relier aux autres et à notre environnement. Mais quels moyens mobiliser pour parvenir au monde convivial de demain ?
L’enjeu, bien trop rarement abordé dans ce cadre, concerne les questions monétaires. Pourtant, André Gorz avait déjà naguère souligné [Gorz, 2005 ; Fourel, 2019] que, par exemple, le financement d’un revenu de base devrait, pour engager une véritable transformation sociale, nécessairement s’appuyer sur une émission monétaire spécifique. Il avait raison de lier sa pensée écologique et politique à une réflexion plus large sur le modèle monétaire. Nous voulons, nous aussi, nous situer dans cette perspective [Arnsperger, 2015, p. 34-49].
Si Pierre-Joseph Proudhon a autrefois fourni des bases théoriques de pratiques solidaires et coopératives dans la finance, il nous semble qu’une piste de renouveau paradigmatique pertinente pour aujourd’hui est celle proposée par la Modern Money Theory, ou MMT [Wray, 2015 ; Mitchell, Wray et Watts, 2019]. Elle constitue la principale alternative à l’idée, encore très courante, selon laquelle la dette ou l’impôt « financent » les dépenses publiques. En proposant une révision fondamentale des idées reçues sur l’impôt et la dette publique, la MMT apparaît comme l’un des courants les plus prometteurs pour asseoir solIdement les bases macroéconomiques du convivialisme et de ses dynamique…
Résumé
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Auteurs
- Mis en ligne sur Cairn.info le 03/06/2021
- https://doi.org/10.3917/rdm1.057.0129
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