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L’idée d’une fongibilité de la monnaie est une croyance largement répandue parmi les économistes qui considèrent que les moyens de paiement ayant cours dans une société dite « moderne » y sont totalement substituables. Dans cette perspective, seules des réglementations limiteraient l’acceptation de chacun des différents instruments (pièces, billets, cartes de crédit ou chèques) ou au contraire rendraient obligatoire l’usage de certains et pas d’autres. À ces réglementations viennent s’ajouter des habitudes liées aux cultures et histoires nationales marquées par la confiance-défiance accumulée vis-à-vis de tel ou tel mode de paiement (illustrée par la prédilection des Allemands ou des Nord-Américains pour le cash, comparée à celles des Français naguère pour le chèque et aujourd’hui pour la carte bancaire). À l’opposé, les anthropologues et sociologues observent depuis longtemps des variations considérables de formes, significations et usages de l’argent selon l’époque et le lieu. Cette variété et variabilité ne doivent néanmoins pas éclipser certaines régularités.
Ainsi, contrairement à une affirmation commune, la monnaie ne permet pas de « tout » acheter. Partout on observe des bornes à l’aliénabilité et le monde occidental n’y échappe pas. Par ailleurs, la monnaie ne sert pas qu’à acheter car elle fait l’objet de dons privés et elle est support de la fiscalité et de la redistribution par les États. Chaque société dessine ainsi par ses pratiques monétaires, les contours de l’ordre marchand et non-marchand dans le but d’articuler au mieux les sphères d’échanges : notamment celle des échanges de court terme dominés par les intérêts individuels, et celle du long terme assurant la reproduction du groupe (maintien de son identité, protection et cohésio…

Français

Les économistes appréhendent généralement la monnaie comme un élément fongible, et ont de ce fait une vision fonctionnelle des divers instruments de paiement, selon laquelle cash, chèque, etc., seraient utilisés indifféremment. C’est occulter le rapport symbolique à la monnaie. À partir d’exemples contemporains empruntés à des communautés paysannes et indiennes du Mexique et aux banlieues françaises, cet article montre comment et pourquoi les populations cloisonnent les usages de l’argent.

Solène Morvant-Roux
Université de Genève
Jean-Michel Servet
IHEID Genève
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Mis en ligne sur Cairn.info le 08/11/2021
https://doi.org/10.3917/sensi.009.0048
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