CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1 Dans le cours de la Première Guerre mondiale, Verdun n’a ressemblé à aucune des grandes confrontations franco-allemandes. La culture militaire tant française qu’allemande n’incitait absolument pas à s’engager dans ce type de batailles sans perspectives stratégiques.

Les projets français pour 1916

2 L’idée n’en est certes pas venue du camp français. Le Haut commandement français, féru d’études napoléoniennes, après, en début de guerre, s’être laissé emporter par le fantasme de l’offensive à outrance, avait été contraint ensuite à se plier à une manœuvre en retraite, en défensive dynamique, pour gagner la bataille de la Marne. En 1915, tout l’effort du GQG avait été tendu vers l’idée de la percée suivie d’exploitation décisive. Au printemps 1915, la tentative avait eu lieu en Artois, puis à une échelle plus importante, à l’automne, en simultané, en Champagne et en Artois. Devant cet échec, avec toujours l’idée de percer sur des terrains favorables, on en était arrivé en décembre 1915 à persister dans ce modèle tactico-stratégique et à vouloir l’étendre à toutes les armées alliées. Aussi avait-il été admis que, pour donner plus de forces à ce modèle, l’assaut serait mené simultanément sur leurs théâtres d’opérations respectifs par Russes, Italiens, Britanniques et Français. On pensait ainsi déstabiliser la défense allemande dans cette attaque sur plusieurs fronts. Pour le Franco-Britannique, le théâtre d’engagement avait été choisi : la Somme. Dès lors tous les efforts du GQG, à partir de janvier 1916, s’étaient orientés vers la préparation de cette bataille, sur large front, avec définition d’objectifs lointains en lançant, percée faite, la cavalerie en direction du Nord-Est. On s’était, par ailleurs, peu soucié finalement de ce que pourrait être une initiative des Allemands en 1916 : procédés et lieu d’application. La seule parade prévue était de se conserver en arrière du front un certain nombre de divisions en réserve, au cas où. Certes, en 1915, l’armée allemande n’avait fait que se défendre, très efficacement d’ailleurs, mais n’avait rien entrepris d’aussi important que les offensives françaises. Le camp allié, pour faire oublier ses échecs de percée, avait répandu le bruit que ces attaques, infructueuses, avaient eu en fait pour but de retenir en France des forces qui, sans cela, auraient été déployées sur le front russe. Mais, pour 1916, on en restait aux procédés de 1915, étendus en moyens et espace.

La démarche allemande

3 Du côté allemand, la stratégie menée en 1915 s’était révélée bonne, conservant, au moindre prix les acquis, mais elle n’avait pas apporté la victoire et il fallait donc en changer, si on voulait conclure. En 1915, le choix avait été de mener une stricte politique défensive à l’Ouest afin de tenter, pendant ce temps, d’annihiler le géant russe. Le succès tactique avait couronné les efforts à l’Est, mais les Russes, fortement bousculés, avaient profité de la profondeur de l’espace dont ils disposaient, pour se retirer vers leurs frontières nationales sans être défaits. Succès allemand donc, complété par un second dans les Balkans, où, en contribuant à l’écrasement de l’armée serbe, elle avait conforté son allié autrichien et assuré ses liaisons avec la Turquie, victorieuse elle-même de la lutte dans les Dardanelles. Réussites donc, mais sans résultat décisif. Devant ces demi-résultats, décision avait été prise de rechercher la solution en 1916 sur le front Ouest contre les Franco-Britanniques et à s’attaquer prioritairement à l’armée française. La lutte contre les Britanniques devait s’orienter vers la création d’un contre blocus sur mer à partir de la flotte de haute mer et surtout des sous-marins. Restait le choix du lieu d’application de l’anéantissement des forces françaises. À tort ou à raison, le commandement allemand estima ne pas disposer du volume de forces suffisant pour, après une ouverture de brèche, entretenir une bataille d’exploitation, en rase campagne, sur large front. Sa force, et ce depuis le début du conflit, résidait dans son avance qualitative et quantitative dans le domaine de l’artillerie : supériorité en tubes, en calibres, en rapidité de tir, en portée. Beaucoup a été écrit sur le choix de Verdun. Certains s’appuient sur ce que Falkenhayn a écrit pour justifier son choix : obliger l’armée française à venir se faire massacrer sous les canons allemands dans une aire délimitée, et pour ce faire, l’appâter en menaçant la ville-forteresse de Verdun. La prise de décision a dû être plus complexe.

La Ve Armée allemande

4 Au Nord de Verdun stationnait la Ve Armée allemande commandée par le Kronprinz. Cette armée avait bien joué son rôle à la bataille des frontières, mais n’avait pas recueilli le lustre de celles de von Kluck et de Bülow. Elle n’avait pu avoir raison de la IIIe Armée du général Sarrail, qui, s’appuyant sur Verdun, avait résisté à toutes les tentatives d’encerclement. Depuis le repli allemand post-Marne, cette armée allemande avait pris ses aises et, assurée d’un bon soutien logistique facilité sur les arrières par la place de Metz et un solide réseau ferré, rêvait d’en découdre. Son chef d’état-major, durant le mois de janvier 1916, a mis la pression pour que soient confiés à son armée les projets offensifs, se faisant fort, à condition d’être renforcé, d’offrir à l’Allemagne la capitulation de la forteresse de Verdun, même défendue par sa ceinture de forts.

Une attaque allemande sur Verdun inimaginable et à la limite souhaitable par le GQG

5 Il faut rendre justice au scepticisme du commandement français en ce qui concerne un tel projet. Attaquer sur un secteur aussi difficile à parcourir avec pour but ultime la saisie de Verdun, lui a paru surréaliste, car, de Verdun, le terrain ne se prête absolument pas à la relance des importantes réserves nécessaires pour faire irruption dans la profondeur du dispositif et battre l’armée française. En août-septembre 1914, le GQG avait démontré son quasi-dédain des villes pour bâtir sa stratégie. Le bassin minier de Briey, les villes de Lille, Soissons, Reims, avaient été abandonnées sans combat à l’envahisseur, avec l’idée que ce serait grâce aux manœuvres en rase campagne qu’on récupérerait ces agglomérations. Bien mieux, le général Sarrail avait été critiqué pour s’être accroché à Verdun en septembre 1914, au risque, pour ses détracteurs, de la perte de son armée menacée par les attaques sur ses flancs découverts. On lui avait fait la leçon en lui disant qu’il aurait dû se contenter de suivre la retraite de la IVe Armée et laisser Verdun se défendre en enfant perdu, sa capitulation éventuelle ne constituant qu’une péripétie du grand combat.

Un secteur affaibli

6 Or, ce désintérêt ne s’était pas modifié au cours de la mise en place de la guerre de stabilisation. Par un décret du 5 août 1915 la place forte de Verdun avait été rebaptisée Région fortifiée de Verdun (RFV). Cela signifiait que Verdun ne serait plus défendu par le gouverneur de cette place mais par un officier général qui allait prendre en compte le front au nord de Verdun avec les forces dans les tranchées. En même temps, sans le claironner médiatiquement, on en profitait pour retirer la majorité des pièces d’artillerie armant les forts et les munitions stockées attenantes.

7 Cette ponction avait été signifiée au président de la République et à la Commission de l’Armée du Sénat et de la Chambre des députés, dont les membres étaient tenus à la discrétion.

8 Au sein de la Commission du Sénat, Charles Humbert, sénateur de la Meuse, bon connaisseur de la région et des armées, était intervenu dans la séance du 26 août 1915 : « Le général Dubail nous a dit formellement que, le cas échéant, Verdun ne sera pas défendu ; […] Une place forte aussi peu défendue doit tomber fatalement entre les mains de l’ennemi et le gouvernement et le commandement en chef ont le devoir de ne pas la défendre et de l’évacuer au plus vite en disant au public les raisons auxquelles ils obéissent afin d’éviter toute émotion ». […] Je serais le premier à demander que Verdun fût défendu si la chose était possible ; or, elle ne l’est pas. La conclusion, c’est qu’il faut enlever de Verdun dès à présent tout ce qui s’y trouve en artillerie, munitions et vivres et qui n’y est plus nécessaire, de façon que l’ennemi venant à s’emparer de la ville n’y fasse aucun butin de guerre ».

9 À cette occasion, Charles Humbert insistait pour développer le réseau ferré afin de faciliter ces évacuations, suggestion qui ne sera pas reprise par le commandement.

10 Ainsi, sans démenti du général Dubail, responsable en tant que commandant du Groupe d’armée Est de la défense de Verdun, la perspective de la capture de Verdun ne faisait sursauter ni politiques, ni militaires. On trouve trace de cette orientation dans les directives reçues par le général Herr, nommé commandant des forces de la RFV. Directive du 9 août 1915 du GQG : « La place de Verdun ne doit en aucun cas être défendue pour elle-même et le général qui la commande ne doit en aucun prix s’y laisser investir. […] La défense d’une aussi vaste région fortifiée ne peut se comprendre que par la manœuvre ».

11 Au reçu de ses directives, le général Herr, confronté à la maigreur des effectifs qui lui étaient accordés, en avait tiré les conclusions en mettant en place un dispositif lui permettant de manœuvrer.

12 Cela n’avait pas échappé au lieutenant-colonel de Thomasson lors de son passage sur le secteur comme il l’écrit dans son ouvrage Préliminaires de Verdun : « Je ne crois pas me tromper en disant que le Haut commandement […] était beaucoup plus préoccupé d’assurer dans de bonnes conditions l’évacuation de la place et le rétablissement ultérieur du front sur la rive gauche de la Meuse que de renforcer les organisations existantes en vue d’une défense obstinée sur la rive droite ».

Le général Dubail applique les plans du GQG

13 Sur place, la « Région fortifiée de Verdun » était de la responsabilité du Groupe d’armées de l’Est du général Dubail. Ce dernier avait retiré le maximum de divisions du front afin de se constituer des réserves qu’on instruisait en même temps à l’arrière. Cet allégement avait été systématisé sur le front de Verdun car un no man’s land de plus de 600 mètres minimum séparait les adversaires. C’est ce qu’avait découvert fin janvier, le colonel Jacquand : « 60 km pour le 30e Corps, plus que le front de la IVe Armée tout entière, dont 21 pour 4 régiments territoriaux, par conséquent, pas d’artillerie, densité d’infanterie minima et pas de bras pour travailler, pour s’organiser… Il n’y avait pas d’abris, ce qui crée une différence énorme entre la capacité de résistance sous le bombardement et par suite l’arrivée de l’infanterie ».

14 Le Haut commandement français a-t-il été alerté de cette attaque improbable stratégiquement ?

15 En dépit des précautions de camouflage, menée par une armée qui connaissait bien le terrain, la mise en place du dispositif lourd d’artillerie allemand avait été décelée par les troupes au contact, tandis que par l’espionnage, via Strasbourg, l’alerte avait été transmise par l’intermédiaire du service de recueil de renseignements de Belfort. Des déserteurs avaient particulièrement montré la proclamation du Kronprinz aux troupes les informant de leur mission qui était de prendre Verdun. Se répandait aussi l’idée que, la conquête faite, le gouvernement allemand arriverait à obtenir de la France une paix séparée.

Les alertes étaient parvenues jusqu’au Parlement par le truchement du député-colonel Driant

16 Le 8 janvier 1916, alors que la menace se précisait, le lieutenant-colonel Herbillon avait été rapporter à Joffre les inquiétudes du président du Conseil et du président de la République concernant Verdun. La réponse de Joffre, célèbre pour son économie de parole, avait été : « Je ne demande qu’une chose, c’est que les Allemands m’attaquent et, s’ils m’attaquent, que ce soit sur Verdun. Dites-le ».

17 Quelle singulière réaction ! À y regarder de plus près, toutefois et compte tenu de la conception des jeunes officiers de l’EM qui entourait Joffre, une poussée allemande sur une direction non stratégique pourrait, à leurs yeux, faciliter l’offensive alliée y attirant sur un axe non important une partie des forces allemandes, indisponibles dès lors, pour contrer la réalisation du projet offensif de Joffre. Laisser s’enferrer les Allemands dans le cul-de-sac de Verdun, au prix peut-être de la perte de la ville, ne serait qu’un plus pour la réussite de la grandiose offensive alliée.

18 On a l’impression de revivre l’erreur de perception de 1914, où l’annonce que les Allemands débordaient plus à l’ouest que prévu, a été interprétée comme une bonne nouvelle, cet étirement rendant plus facile la percée du flanc allemand dans les Ardennes.

19 Intégré dans un schéma a priori, mener un combat défensif à Verdun, à condition de le livrer avec le minimum de moyens possibles contre un adversaire qui serait obligé d’y engager des moyens bien supérieurs, contribuerait à la réussite du plan d’ensemble. En cas de poussée trop forte, il suffirait de lâcher du terrain sur cette direction non stratégique.

Un changement de responsabilité avant le combat

20 C’est de ce dispositif non renforcé qu’héritèrent, à sa surprise, fin janvier, le Groupe d’armées du Centre du général de Langle de Cary et son chef d’état-major Jacquand. Ainsi, alors que la menace se précisait, le GQG confiait le sort de la bataille à venir à un commandement qui ne l’avait pas préparée.

La réaction politique

21 L’annonce de l’attaque le 21 février laissa de prime abord le GQG de marbre. Il fut toutefois surpris d’une réaction qu’il n’avait pas prise en compte : celle du pouvoir politique.

22 Herbillon s’entend dire le 23 février par Briand, président du Conseil : « Eh bien puisqu’il (Joffre) voulait être attaqué à Verdun, il doit être content et en a pour son rhume ». Le message politique est clair : Verdun ne doit pas tomber. Lors de sa première visite à Verdun, le président Poincaré, à l’hypothèse soulevée par Pétain d’un repli sur la rive gauche sous la pression, s’écrie : « Vous n’y pensez pas, Général ! Ce serait une catastrophe parlementaire ! ».

23 N’ayant pas anticipé cette réaction, Joffre se trouve dans une situation délicate. Les milieux parlementaires évoquent son remplacement. On a imposé auprès de lui le général de Castelnau, pour éventuellement le remplacer ou prendre à son compte une partie du commandement et il sait que le nouveau ministre de la Guerre, Gallieni, ne sera pas aussi accommodant que son prédécesseur civil, Millerand.

24 Ce même 23 février il envoie sur place à Verdun son aide-major général pour les opérations, le général Claudel. Ce dernier a passé son année 1915 tout d’abord à la région fortifiée de Verdun puis à l’EM du général Dubail et suivait particulièrement le front de Verdun ; il vient de rejoindre tout récemment en janvier le GQG. On le suppose parti avec les consignes du général Joffre.

25 Il observe la situation le 24 février et, au vu des événements, provoque une réunion à trois : général Herr, général de Langle de Cary et lui-même. Les ordres donnés à l’issue par téléphone vers 22 h sont inattendus, venant d’un envoyé de Joffre : évacuation immédiate de la plaine de Woëvre. On abandonne ainsi sans combat dans la nuit, positions et pièces d’artillerie et impedimenta non évacuables.

26 Le général de Cary y ajoute : interdiction d’envoi de renforts sur la rive droite de la Meuse. Ce n’est pas l’avis du GQG qui fait connaître dans la nuit sa position : « Primo : j’approuve par avance les décisions que vous prendrez en ce qui concerne le repli sur les Hauts de Meuse des troupes disposées dans la poche de Woëvre si vous le jugez nécessaire. Vous êtes seul juge des nécessités du combat. Secundo : mais vous devez tenir face au Nord sur le front entre Meuse et Woëvre, par tous moyens dont vous disposez. Employez-y tout le 20e CA sans hésiter. Son engagement est certainement nécessaire pour permettre l’arrivée des divisions de renfort dont vous devez hâter la montée vers la Meuse ».

27 De Langle de Cary, réveillé dans la nuit à l’arrivée de ce message, annule dès lors vers 3 heures du matin son interdiction de faire passer la Meuse à la 39e Division. Cette nuit est particulièrement agitée. Tout d’abord, après envoi de l’ordre de Joffre, le général Castelnau avait pris la route pour prendre en main les choses sur place. Il arrivait à 4 heures 30 au QG de la IVe Armée et confirmait l’ordre de tenir entre Meuse et Woëvre. Il repartait ensuite pour Dugny afin d’y rencontrer directement le responsable de la défense, le général Herr.

28 Le GQG agissait aussi. Il demandait que le général Pétain soit le lendemain à 8 heures à Chantilly pour recevoir des ordres. Ce dernier était alors disponible, adjoint depuis la mi-janvier du général Foch pour la future bataille de la Somme. Avec son état-major, il n’en était alors qu’au début des études. Sa mission changeait du tout au tout. Il devait « prendre le commandement des troupes de la rive gauche de la Meuse en vue de soutenir et de recueillir au besoin les troupes de la Région fortifiée de Verdun si elles étaient obligées de repasser la Meuse ».

29 Cet ordre est surprenant car en deçà de celui envoyé au général Herr dans la nuit précédente. Le GQG l’envoyait en catastrophe gérer une éventuelle défaillance du général réduit au commandement de la rive droite. Dans l’absolu, la conservation de Verdun n’entrait pas dans les attributions du général Pétain, manière implicite d’indiquer que sa conservation n’était pas prioritaire.

30 La première action de Castelnau, au matin du 25 avait été de confirmer l’absolue nécessité de se battre au Nord de Verdun. Il constatait d’un côté le désordre immédiat sur place mais aussi l’action intelligente qu’avait menée le général Herr. Manquant désespérément d’infanterie pour s’opposer à l’ennemi, bien secondé par le général Boichut et le colonel Wasser, artilleurs comme lui, il avait su tirer le meilleur parti de ses pièces d’artillerie, en particulier d’artillerie lourde, en les positionnant hors de l’atteinte adverse, en mesure de prendre en écharpe depuis la rive gauche et au sud-est l’avancée allemande. Après son irruption à 8 km de sa base de départ, l’infanterie allemande, moins soutenue par son artillerie restée en arrière, avait, sous les coups de notre artillerie, dû arrêter momentanément sa progression sur les hauteurs de la rive droite comme Falkenhayn l’a reconnu dans ses mémoires.

31 Ce répit allait donner le temps de réorganiser le commandement sur place. Pétain arrivait vers 17 heures et découvrait que les termes de sa mission avaient changé : « Tenir à tout prix face au Nord sur les deux rives avec mise sous subordination de Pétain des troupes tant de la rive gauche que de la rive droite ». Cet ordre lui était donné directement par le général Castelnau par délégation du commandant en chef. Le général Herr passait sous ses ordres.

32 Une bataille qui allait occuper toute l’année commençait, non anticipée. Pétain, pragmatique définissait rapidement les priorités.

33 Devant la situation que lui brossait son chef de 2e Bureau, de Cointet, il lâchait : « C’est la lutte d’une route contre trois lignes de chemins de fer ». Une semaine plus tard, il faisait part de son refus de se laisser aller à la sacralisation : « Bataille d’opinion », disait-il au général Guillaumat qui lui demandait son sentiment.

34 C’est cette saine évaluation des rapports de force en ce 25 février, cette lucidité, ce refus de se laisser entraîner dans une surenchère guerrière et, bien sûr, l’héroïsme des troupes qui, durant des mois, vont supporter sans se désunir le pilonnage incessant des obus d’artillerie lourde sur un sol défoncé et sans quasi-abris, qui sont à l’origine du redressement d’une situation, mal perçue avant et pendant la bataille, par le GQG. Ce rétablissement est dû aussi de manière indissociable aux actions des généraux Herr et Castelnau et de leurs collaborateurs. C’est de cette impulsion initiale qu’est né l’échec allemand.

Français

La bataille de Verdun n’avait été ni anticipée ni réfléchie du côté français, contrairement au commandement allemand qui avait soigneusement préparé son offensive. Au-delà de la surprise tactique et de l’improvisation initiale, le commandement français sut réagir avec efficacité.

English

Verdun February 1916, an improbable battle

The battle of Verdun was neither anticipated nor considered by the French side, contrary to the German command that was carefully prepared for its attack. Beyond the tactic surprise and the initial improvisation, the French command knew how to react with efficiency.

André Bach
Général de brigade (2S). Ancien directeur du Service historique de l’Armée de terre (SHAT). Historien, vice-président du Collectif de recherche international et de débat sur la guerre de 1914-1918.
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 17/02/2020
https://doi.org/10.3917/rdna.787.0029
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