Successeur du dispositif de Volontariat à l’aide technique, le Volontariat de service civique (VSC) encourage l’investissement de jeunes diplômé·es dans des missions hors du droit du travail au sein des administrations déconcentrées de l’État français dans les départements ultramarins. Précaires, au sens où ils et elles ne sont pas stabilisé·es dans l’emploi avant leur départ, la majorité de ces volontaires sont originaires de la France hexagonale. Une enquête à partir d’entretiens réalisés en Guadeloupe permet de penser l’usage de ce programme par les administrations, qui cherchent à faciliter la mise en place de politiques publiques sans faire appel à des fonctionnaires titulaires et contractuel·les. De fait, par une procédure floue et discriminante, le VSC participe à l’exclusion des Guadeloupéen·nes, tout en confiant à de jeunes Hexagonaux·les la prise en charge des enjeux environnementaux de l’île. À partir de cette situation inégalitaire, au fondement de l’« exceptionnalité ultramarine », ces « quasi-expat » découvrent et construisent leur blanchité, tant dans les hiérarchies professionnelles que dans leur mode de vie, contribuant à la fois à la reproduction de l’État français en outre-mer et à leur propre insertion professionnelle.
Article
Mai 2015. Je réalise un terrain de recherche sur le service civique à La Réunion. Ce dispositif inscrit au Code du service national propose un engagement dans une mission d’intérêt général de six à douze mois pour des individus âgés de 16 ans à 25 ans en contrepartie d’une indemnité de 580 euros par mois. Un ami d’ami, Olivier, vient me voir pour me poser des questions sur ma thèse. Il est lui-même docteur en océanographie et m’explique qu’il est en service civique dans un centre de recherche réunionnais. Je suis surprise car ce dispositif suppose généralement un engagement et un recrutement détachés de toute compétence. Pensant qu’il n’a pas compris ce qu’est le service civique, je n’ose le contredire. Un peu plus tard cependant, Olivier revient sur le service civique : face à la crise de l’emploi universitaire, il a accepté de passer deux ans à La Réunion pour diriger des recherches sur la réserve marine. Comme d’autres collègues dans des centres de recherche sur la faune et la flore locales, il est indemnisé 1 520 euros nets par mois, sans qu’aucune cotisation sociale soit attachée à cette rémunération. La fiche de poste qu’il me présente évoque expressément la nécessité d’un doctorat, ce qui est interdit dans le cadre de l’engagement de service civique. En fait, il s’agit d’un dispositif spécifique, le Volontariat de service civique (VSC), qui relève du régime d’exception, juridique, mais aussi symbolique, des départements ultramarins. J’étudie le service civique depuis près de cinq ans, et je n’en ai jamais entendu parler…
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Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 19/05/2022
- https://doi.org/10.3917/crii.095.0046
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