CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Ces dernières années, la démocratie représentative belge est sujette à des transformations inédites marquées du sceau de la participation citoyenne. La question d’un renforcement du rôle du citoyen dans la gestion des affaires publiques s’est imposée au cœur des projets et réflexions visant au renouveau politique. Tandis que ce tournant participatif a longtemps été envisagé sous l’unique angle du développement des outils de démocratie directe  [1], un certain intérêt s’est progressivement marqué pour des formes plus délibératives de participation, en particulier sur le terrain parlementaire  [2].

2Une série de mécanismes de participation citoyenne émergent en vue d’associer des citoyens non élus à la délibération parlementaire. Que ce soit la réforme du droit de pétition, l’institution du processus de dialogue citoyen ou la création de commissions parlementaires mixtes, les outils de participation citoyenne ont comme point commun de faire une place – même limitée – aux citoyens non élus dans la délibération parlementaire, en leur donnant l’opportunité d’intervenir oralement dans le processus parlementaire de discussion et de débat  [3]. Bien que sous des formes et selon des degrés très variables, la plupart des assemblées représentatives du pays entreprennent ainsi de renforcer en leur sein le dialogue entre parlementaires et citoyens. En l’espace de cinq ans, la délibération citoyenne commence à prendre une réelle place dans le paysage parlementaire.

3De manière plus fondamentale encore, les instruments de participation citoyenne commencent à être gravés dans le marbre du droit, si bien qu’il devient difficile de se priver d’une approche juridique du phénomène. La visée du présent Courrier hebdomadaire est donc de passer au crible du droit constitutionnel belge la participation citoyenne à la délibération parlementaire pour identifier les ressources qu’il offre et les obstacles qu’il dresse.

4L’étude sera structurée en trois temps, correspondant chacun à un chapitre.

5Dans un premier temps, il s’agira de replacer la participation citoyenne dans l’histoire des théories de la démocratie, afin de rendre compte des évolutions qui l’amènent aujourd’hui au cœur des réflexions sur le renouveau politique. En effet, si la participation citoyenne à la décision politique n’est pas une pratique inédite, la perspective d’une participation à la délibération marque quant à elle une rupture avec des procédures de participation citoyenne n’étant pas axées sur le dialogue avec les élus, qu’il s’agisse, minimalement, d’outils de consultation de citoyens ou, maximalement, de mécanismes de démocratie directe. À travers ce cadrage théorique, sera ainsi retracé le tournant vers des formes plus délibératives de participation citoyenne, qui ont conduit à un recentrement de celle-ci sur la délibération parlementaire.

6Le deuxième temps visera à faire le point sur l’état général du droit constitutionnel en matière de participation citoyenne. Il s’agira de dresser un tableau des opportunités et des limites auxquelles la participation citoyenne à la délibération parlementaire est confrontée sous l’angle du droit constitutionnel belge, au travers de deux questions fondamentales : d’une part, la question de la constitutionnalité, impliquant plus particulièrement d’examiner la portée et l’impact du principe représentatif sur la participation citoyenne ; et, d’autre part, la question de la formalisation par le droit, laquelle suppose de déterminer les balises, limites et impératifs juridiques qui jalonnent le chemin de l’institutionnalisation des processus de participation citoyenne à la délibération parlementaire.

7Le troisième et dernier temps sera consacré à un examen plus spécifique de chacun des « outils délibératifs » existant actuellement auprès des assemblées parlementaires belges – et qualifiés comme tels en raison de la possibilité qu’ils offrent aux citoyens non élus d’échanger des opinions et arguments dans le cadre d’une procédure de discussion parlementaire – : les auditions parlementaires, le droit d’être entendu dans le cadre du droit de pétition, les panels citoyens informels, le dialogue citoyen et les commissions délibératives. À partir des enseignements tirés du deuxième chapitre, il s’agira de faire état de la manière dont les différents outils de participation citoyenne à la délibération parlementaire récemment formalisés aux échelons fédéral et fédérés se sont fait une place dans le cadre constitutionnel existant.

1. La participation citoyenne au regard des théories démocratiques

8Au cœur de ce Courrier hebdomadaire est mobilisé un concept à la fois intuitif et complexe : la participation citoyenne à la délibération parlementaire, qui renvoie à l’idée d’une implication directe des citoyens non élus dans les discussions parlementaires. L’objectif de ce premier chapitre est de replacer ce concept dans un mouvement plus large de réflexion théorique sur le renouveau démocratique.

9À cette fin, il conviendra d’abord de revenir sur la centralité principielle de la participation citoyenne dans l’exigence démocratique (1.1). Sera ensuite examiné le tournant marqué par l’avènement des théories participatives et délibératives de la démocratie, qui a conduit à investiguer de nouvelles formes de participation (1.2). Cet exposé en deux temps permettra ainsi de mieux saisir la genèse de ce mouvement s’inscrivant à la fois en continuité et en rupture avec l’exigence démocratique traditionnelle.

1.1. Un concept inhérent à l’exigence démocratique

10L’on entend par participation citoyenne (ou participation politique) « l’ensemble des moyens par lesquels un citoyen peut activement faire valoir sa prérogative à participer à l’exercice du pouvoir »  [4]. Ce concept se trouve au cœur de l’idéal démocratique d’autogouvernement du peuple. Selon la définition proposée par Robert Dahl, la démocratie est un système dans lequel chaque membre a un droit égal de participer aux décisions politiques de la communauté (« all the members are equally entitled to participate in the association’s decision about its policies »)  [5]. Cela fait directement écho au principe de la souveraineté populaire, en vertu duquel les décisions politiques qui s’imposent aux citoyens ne sont légitimes que si elles procèdent de la volonté du peuple  [6]. Sans s’y réduire, l’exigence démocratique telle qu’elle a été construite dans l’histoire des théories politiques est donc guidée au premier chef par l’horizon de l’autonomie collective, dont la poursuite nécessite de permettre aux citoyens de prendre part, d’une manière ou d’une autre, à la mise en forme de la volonté générale, et dont l’idéal vise l’élargissement toujours croissant du cercle des citoyens appelés à participer à la décision politique.

11La participation à la chose publique peut toutefois s’incarner avec un degré de médiation variable, qui se cristallise dans l’opposition cardinale entre le modèle de la démocratie directe et celui de la démocratie représentative. Dans le modèle de la démocratie directe, la participation se traduit par le pouvoir pour tous les citoyens de prendre directement des décisions sans l’intermédiaire de représentants. Les structures institutionnelles de la Grèce antique sont généralement présentées comme l’idéal type de la démocratie directe, dès lors que la direction de la cité était confiée à des organes composés de citoyens (les femmes, les esclaves et les étrangers n’étant pas réputés avoir cette qualité à l’époque). Le pouvoir suprême était confié aux citoyens réunis en assemblée (l’Ecclesia) pour prendre les décisions qui les gouvernaient  [7]. En permettant aux citoyens de participer activement à la délibération et au vote, la démocratie athénienne renvoyait donc l’image d’un authentique autogouvernement du peuple, quoique privé de certaines catégories de personnes.

12Cette forme de démocratie a inspiré la pensée de Jean-Jacques Rousseau, pour qui la participation directe du peuple est la seule forme de gouvernement démocratique. Dans son modèle, tous les citoyens votent les lois et les politiques sans délibérer entre eux au préalable  [8]. La volonté générale doit advenir de l’agrégation de toutes les volontés des individus, à défaut de quoi leur liberté serait affectée.

13Si, aujourd’hui, le modèle de démocratie directe n’a de traduction parfaite dans aucun État du monde  [9], il conserve tantôt un rôle de boussole, tantôt un rôle d’épouvantail dans les réflexions sur le renouveau démocratique. Les revendications en faveur d’un retour à une démocratie directe sont portées tantôt par des mouvements sociaux spontanés expérimentant de nouvelles formes d’organisation politique (dont Occupy Wall Street, les Indignés, Nuit debout et les Gilets jaunes sont des exemples récents), tantôt par des scientifiques convaincus par les opportunités inédites qu’offrent les nouvelles technologies (comme la littérature sur l’« e-démocratie »), tantôt encore par des mouvements politiques défendant le modèle d’une démocratie « liquide » ou « délégative » (à l’instar des partis Pirate ou du M5S italien), consistant à permettre à chaque citoyen de participer directement à la prise de décision et à la discussion qui précède, ou de déléguer le cas échéant sa voix à un autre citoyen  [10]. De plus, des mécanismes relevant de la démocratie directe – le référendum, la consultation populaire ou l’initiative populaire – sont régulièrement envisagés et parfois mis en œuvre en vue de renforcer l’implication des citoyens dans le modèle représentatif de la démocratie décrit ci-dessous. La création d’une forme « pure » de démocratie directe, exempte de toute institution représentative, n’en reste pas moins un projet utopique, considéré comme impossible à mettre en œuvre à l’échelle d’un État. Sa nature impraticable est justifiée non seulement par des contraintes démographiques (la taille des sociétés contemporaines rendant une participation permanente de tous les citoyens techniquement et temporellement impossible à instaurer), mais aussi par la complexité des affaires à gérer.

14Dans le modèle représentatif de la démocratie, la participation prend principalement la forme de l’élection des représentants. Contrairement au modèle de la démocratie directe, la souveraineté populaire s’y traduit par un exercice du pouvoir au travers de représentants élus qui agissent en leur nom et pour leur compte. Se caractérisant par l’existence d’un écart entre représentants et représentés, le régime représentatif s’accommode d’une inclusion des citoyens cantonnée à l’endroit de la sélection des représentants. À la fin du XVIIIe siècle, la raison du « cantonnement » du citoyen au rôle d’électeur dans la gestion des affaires publiques est double dans le chef des penseurs du gouvernement représentatif : d’une part, une prise de conscience de l’impossibilité pratique d’associer tous les citoyens de manière permanente dans les sociétés modernes  [11] et, d’autre part, une volonté de réserver le pouvoir de gouverner aux citoyens réputés les plus à même de prendre des décisions conformes à l’intérêt général  [12]. En ce sens, l’élection apparaît comme un mécanisme de sélection des élites et de consentement du peuple à l’exercice du pouvoir par celles-ci. Est ainsi conçu « un système politique dans lequel les citoyens habilitent et légitiment des élites gouvernantes qui ne sont pas strictement tenues de réaliser les vœux de leurs mandants »  [13].

15La participation par l’élection n’équivaut donc pas à une contribution directe à l’élaboration des décisions politiques. Celles-ci sont adoptées à l’issue d’une libre délibération entre élus en vue de dégager le consentement d’une majorité, ce qui requiert l’existence d’une marge d’indépendance des représentants vis-à-vis des représentés  [14]. Si la démocratisation du régime représentatif par le suffrage universel a consacré l’égalité des citoyens devant le suffrage, elle n’a toutefois pas nécessairement emporté un renforcement de la dimension participative de l’exercice du pouvoir politique.

16Cette participation citoyenne limitée dans la gestion des affaires politiques n’a pas permis de contenir la montée d’un sentiment de défiance des citoyens à l’égard des institutions, symptôme principal d’un « syndrome de fatigue démocratique »  [15]. Ce que l’on a tendance à appeler la « crise de la démocratie »  [16] ferait écho à un système usé, incapable de faire face aux demandes croissantes en faveur d’une plus grande participation politique des citoyens. Réduite aux moments électoraux, la relation entre les responsables politiques et les citoyens serait caractérisée par un système monopolistique de la décision et de l’incarnation de l’intérêt général accaparé par les premiers  [17]. Or ceux-ci ne seraient pas suffisamment représentatifs de certaines franges de la population et seraient dès lors incapables de prendre suffisamment en considération leurs intérêts  [18]. Tel un « effet du système »  [19], la distance entre les réalités citoyennes et politiques continuerait ainsi de se creuser, contribuant à un effritement de la confiance mutuelle  [20].

1.2. Le tournant participatif et délibératif

17C’est de ce constat d’échec que sont nées une série de propositions visant à replacer le citoyen au cœur du fonctionnement démocratique. La recherche d’un « nouvel esprit de la démocratie » s’est progressivement dirigée, dans les démocraties contemporaines, vers la « protéiforme démocratie participative »  [21], récemment prolongée dans le champ de la démocratie délibérative  [22]. La participation citoyenne devient ainsi l’une des armes visant à s’attaquer au décalage entre gouvernants et gouvernés  [23].

18La démocratie participative se définit classiquement comme « l’ensemble des procédures, instruments et dispositifs qui favorisent l’implication directe des citoyens dans le gouvernement des affaires publiques »  [24]. L’idée première des théories de la démocratie participative qui se déploient dans les années 1970 est que, en démocratie, les citoyens ne sauraient être restreints à un rôle de délégation du pouvoir à des représentants élus, mais doivent également prendre une part active et effective dans l’élaboration des politiques publiques  [25]. Il s’agit ainsi de contester les théories élitistes de la démocratie, dans lesquelles le citoyen moyen n’est jugé ni suffisamment intéressé par la politique, ni apte à y prendre part activement.

19Trois motifs de justification sont généralement invoqués en soutien de la démocratie participative. Premièrement, comme cela a été dit plus haut, elle marquerait le retour à une interprétation plus exigeante de la démocratie comme gouvernement « par le peuple ». Deuxièmement, elle favoriserait l’égalité politique, en incluant des groupes socio-économiques traditionnellement éloignés de la vie politique – la question de leur participation effective étant un enjeu majeur de cet horizon d’égalité. Troisièmement, elle aurait un effet éducatif bénéfique sur les participants, faisant d’eux des citoyens mieux informés et davantage concernés par la chose publique  [26]. On peut également citer parmi les effets vertueux attendus une amélioration de la qualité des politiques publiques, en tant qu’elles sont co-construites par les personnes directement concernées et en raison de l’apport de la diversité de leurs éclairages, et un surcroît de légitimité de ces politiques publiques du fait de cette co-construction.

20Les éléments qui composent cet ensemble de procédures, d’instruments et de dispositifs à même de favoriser une implication citoyenne directe sont hétérogènes. Sous le vocable de « dispositifs participatifs » peuvent être visés tant des enquêtes publiques que des budgets participatifs, des comités de quartier et des conseils consultatifs, voire des consultations populaires et des référendums  [27]. Dans son sens large, la notion recouvre donc indistinctement les dispositifs organisant une participation de citoyens ou de groupes sociaux à des processus publics de discussion, de décision, de gestion ou encore de contrôle [28].

21Dès lors, d’aucuns ont préféré donner une définition plus serrée de la démocratie participative, reposant sur la défense d’« un vrai partage de pouvoir, pouvant aller jusqu’à des formes poussées de co-gestion ou déboucher sur la création d’un quatrième pouvoir, permettant à des citoyens non élus de prendre des décisions engageant la politique publique »  [29]. Dans cette acception, la démocratie participative consiste en la « combinaison des structures classiques de la démocratie représentative avec des procédures de démocratie directe ou semi-directe dotées d’un pouvoir décisionnel et pas simplement consultatif »  [30]. Par cette définition, la participation est donc entendue comme pouvant prendre la forme d’une association du citoyen au pouvoir de décision, loin d’être circonscrite aux seules consultations dans le processus d’élaboration de la norme ou de la décision.

22Le « tournant délibératif » transforme la nature de la participation citoyenne en exigeant qu’elle soit aussi délibérative  [31]. Selon les théories délibératives de la démocratie qui se développent au début des années 1980 au départ notamment de la pensée habermassienne  [32], la légitimité démocratique trouverait sa source non pas dans l’expression d’une volonté générale prédéterminée, mais dans la formation de cette volonté par la délibération. Bernard Manin énonce dans cet esprit que « la décision légitime n’est pas la volonté de tous, mais celle qui résulte de la délibération de tous »  [33]. La décision politique serait donc légitime « si elle est fondée sur des raisons publiques résultant d’un processus de délibération inclusif et équitable, auquel tous les citoyens peuvent participer et dans lequel ils sont amenés à coopérer librement »  [34].

23Loin d’être le monopole des représentants, l’activité délibérative est réputée trouver sa source dans l’espace public et dans les discussions ordinaires entre les citoyens  [35]. En réalité, il faut faire la distinction entre, d’un côté, les processus informels d’échange et de formation des opinions dans l’espace public et, de l’autre, les délibérations politiques qui doivent mener à la décision, régulées par des processus institutionnels. L’activité délibérative se réalise donc par « l’institutionnalisation de procédures et de conditions appropriées de la communication et par le jeu combiné de délibérations institutionnalisées et des opinions publiques qui se sont formées de façon informelle »  [36].

24Dans les théories délibératives, la décision politique doit reposer, non pas sur un simple processus d’agrégation des préférences individuelles par le vote, ni sur un marchandage entre partis, mais sur un processus d’échange d’arguments rationnels  [37]. En ce sens, la délibération politique ne saurait être qu’un simple passage formel entre les mains des représentants mis au pas de la ligne politique de leur parti, mais devrait être la source d’une décision rationnelle portée par « la force non coercitive du meilleur argument »  [38].

25La participation du plus grand nombre de citoyens à la délibération politique n’en demeure pas moins un élément central des théories délibératives  [39]. La dimension participative de la délibération vise à permettre l’expression des arguments et préférences de tous ceux qui sont concernés par la problématique en question  [40], en ce compris de ceux qui sont traditionnellement éloignés du processus décisionnel. Il ne s’agit pas seulement d’obtenir que le consentement éclairé des citoyens résulte d’une participation plus directe aux décisions qui les concernent, mais aussi que ce consentement repose sur la prise en considération de toutes les raisons pertinentes  [41]. Plus que l’implication dans la décision, c’est l’engagement dans l’échange des raisons précédant l’adoption de cette décision qui est jugé déterminant. Sur le principe, la perspective d’une délibération inclusive tend à la fois à la rendre plus représentative – en garantissant la diversité, notamment socio-économique, des participants (vertu procédurale) – et mieux informée – grâce à une vision plus authentique de ce que pense le peuple (vertu épistémique)  [42]. Dans les théories délibératives, c’est donc l’articulation des dimensions participatives et argumentatives du processus décisionnel qui est constitutive de la légitimité démocratique de celui-ci  [43].

26La participation citoyenne envisagée sous l’angle de la démocratie délibérative est d’une nature différente de celle envisagée au travers des mécanismes de démocratie directe. Les processus délibératifs défendent généralement une « participation qualitative », visant à permettre au citoyen de rendre un « avis argumenté, motivé et réfléchi », là où par exemple la consultation populaire et le référendum, outils caractéristiques de démocratie directe, s’inscrivent davantage dans la perspective d’une participation quantitative, en tant qu’ils cherchent à faire entendre la volonté (de la majorité) du peuple  [44]. Contrairement à ces procédés de démocratie directe, l’ambition des nouveaux outils délibératifs est moins de conférer au peuple un pouvoir de décision plus immédiat que de réserver aux citoyens non élus une place dans le débat politique.

27Le mini-public délibératif apparaît dans cette perspective comme l’un des dispositifs les plus à même de remplir les conditions d’une procédure délibérative  [45]. Il peut se définir comme une assemblée composée de citoyens sélectionnés de manière aléatoire afin de discuter ensemble de solutions à apporter à une problématique politique. Les mini-publics varient généralement quant à leur champ de compétence, leurs modalités d’organisation, leur degré d’institutionnalisation ou le niveau de pouvoir au sein duquel ils interviennent. La caractéristique centrale du dispositif est que les participants sont tirés au sort, donnant ainsi à chaque citoyen des chances égales de prendre part à la délibération. N’ayant, en principe, pas d’intérêts électoraux sous-jacents, les citoyens sont réputés être plus à même d’échanger des arguments rationnels orientés vers le bien commun, à distance des considérations stratégiques  [46].

28L’impératif délibératif gagne du terrain à l’aube du XXIe siècle. Initialement envisagées au niveau local, les expériences de participation citoyenne à la délibération politique se sont progressivement développées à une échelle plus large  [47]. Les mini-assemblées citoyennes sont désormais investies de pouvoirs plus importants et délibèrent sur des questions plus fondamentales  [48]. Parmi les exemples les plus marquants, on relèvera l’assemblée citoyenne sur la réforme du Code électoral en Colombie-Britannique, ainsi que les assemblées citoyennes constituantes en Islande et en Irlande (la dernière ayant conduit à la légalisation du mariage des personnes de même sexe et de l’avortement)  [49].

29La Belgique connaît aussi ce mouvement de renouveau démocratique. Elle a été le théâtre d’un recours croissant aux mini-publics délibératifs  [50], dont le G1000 (2011-2012) constitue, encore à ce jour, l’expérience la plus emblématique  [51]. Bien qu’organisé par la société civile indépendamment de toute structure institutionnelle, le G1000 a vraisemblablement amené un intérêt accru des pouvoirs publics pour la participation citoyenne à la délibération politique.

30Aujourd’hui, le paradigme délibératif gagne le terrain parlementaire, avec l’avènement de nouveaux processus de participation citoyenne à la délibération parlementaire. Si le sentiment de méfiance à l’égard des dispositifs participatifs et délibératifs n’a pas disparu dans la classe politique belge  [52], il n’a pas fait obstacle à l’expérimentation de nouvelles formes d’interaction des citoyens non élus avec les élus. Cela a donné lieu à une multiplication inédite d’initiatives en la matière dans la plupart des assemblées du pays. Cette nouvelle phase s’est accompagnée d’un mouvement d’institutionnalisation des outils de participation citoyenne à la délibération parlementaire. Si la participation citoyenne dans le paysage parlementaire prend des formes diverses et variées, le présent Courrier hebdomadaire visera sous le libellé d’« outils délibératifs » les mécanismes qui offrent aux citoyens la possibilité de communiquer de manière orale, active, directe et dynamique avec les parlementaires. C’est la participation au travail parlementaire par la délibération qui retiendra ici l’attention.

2. La participation citoyenne au regard du droit constitutionnel belge : opportunités et limites

31L’institutionnalisation de nouveaux outils délibératifs au niveau parlementaire suscite une série d’interrogations sur le plan juridique. Ces instruments sont-ils conformes au cadre constitutionnel belge actuel ? Jusqu’où la participation citoyenne peut-elle se développer sans révision de la Constitution ? De quels moyens juridiques les parlements disposent-ils pour mener et poursuivre un projet de renouveau démocratique par la participation ?

32En vue de répondre à ces questions, il apparaît utile d’avoir égard au cadre constitutionnel dans lequel la participation citoyenne est amenée à prendre place. Ce cadre se compose tout d’abord d’un principe représentatif dont il convient d’évaluer les implications sur les outils de participation citoyenne auprès des parlements (2.1). À cela, s’ajoutent trois principes constitutionnels encadrant la manière dont la participation citoyenne à la délibération parlementaire peut juridiquement être mise en œuvre en l’état du droit constitutionnel : l’autonomie parlementaire, l’exigence de légalité et l’autonomie constitutive (2.2).

2.1. Le spectre du principe représentatif : la participation citoyenne est-elle contraire à la Constitution ?

33Depuis ses origines, le droit constitutionnel belge consacre la nature représentative du gouvernement, laquelle est établie dans un décret du Congrès national du 22 novembre 1830  [53] et est façonnée par une série de dispositions constitutionnelles qui règlent l’organisation du pouvoir et le fonctionnement des institutions. À l’époque, les congressistes de 1830-1831 reprennent à leur compte les arguments des théories politiques en faveur de l’option représentative, en opposition à l’option démocratique : l’attribut sélectif de la représentation permettrait de contrer les risques inhérents à un exercice des pouvoirs politiques directement par le peuple, qui ferait place à l’incompétence et aux passions  [54]. La défense de l’intérêt général dans la gestion des affaires publiques serait au contraire mieux assurée en étant confiée à un petit nombre de citoyens se distinguant par leurs aptitudes et leur sagesse, et délibérant entre gens raisonnables  [55].

34Dans le régime représentatif belge originel, la participation de la nation au pouvoir politique est donc principalement envisagée de manière minimale et indirecte, par le biais de l’élection des représentants. Cette « nation » participante exclut même en réalité une grande majorité de citoyens, puisqu’elle ne vise que les hommes de plus de 25 ans pouvant revendiquer le paiement du cens (ancien article 47 de la Constitution)  [56]. Si l’universalisation progressive du suffrage – en 1893, 1919-1921 et 1948 – témoigne d’un élargissement des titulaires de la participation citoyenne, l’objet de cette participation continue néanmoins d’être réduit pour l’essentiel à l’acte électoral tout au long du XXe siècle  [57]. Seul le droit de pétition (doublement gravé dans le marbre constitutionnel à travers les anciens articles 21 et 43) fait exception à la logique d’exclusion de la plupart des individus de toute participation à la vie politique, dès lors qu’il bénéficie à toute personne indépendamment de son niveau de richesse et de sa nationalité. À l’origine toutefois, cette prérogative est assortie de certaines règles procédurales destinées à en restreindre l’accès  [58].

35Le contexte constitutionnel initial dans lequel le gouvernement représentatif belge a été façonné laissait donc peu de place aux citoyens. Mais le principe représentatif s’oppose-t-il en soi à un approfondissement de la participation citoyenne ?

36Notre analyse de la participation citoyenne au regard du principe représentatif s’attachera en premier lieu à examiner les (rares) éléments de réponse fournis par le texte constitutionnel en la matière (2.1.1). Nous reviendrons en deuxième lieu sur les réticences émises par la section de législation du Conseil d’État à l’égard des outils de démocratie directe (2.1.2), et montrerons en troisième lieu qu’une analyse actualisée de sa légisprudence tend à relativiser une application par analogie de sa lecture stricte du principe représentatif aux nouveaux outils délibératifs qui émergent au sein des parlements (2.1.3).

2.1.1. Le silence de la Constitution

37Si la question de la constitutionnalité des processus participatifs est débattue, c’est principalement parce que le texte constitutionnel n’apporte que peu d’éclairage à ce propos. Le fonctionnement représentatif de l’État y est échafaudé sans préciser l’étendue du rôle que le citoyen non élu est susceptible de pouvoir jouer dans la conduite des affaires publiques, au-delà des prérogatives qui lui sont expressément reconnues, comme celle d’électeur occasionnel (article 61 de la Constitution), de citoyen pétitionnaire (articles 28 et 57 de la Constitution) voire, depuis 2014, de partie prenante à une consultation populaire régionale (article 39bis de la Constitution) ou locale (article 41 de la Constitution). La section de législation du Conseil d’État résume ainsi les choses : « Dans le régime constitutionnel actuel, la participation de la population à l’élaboration des lois, décrets et ordonnances est limitée : le corps électoral désigne, conformément aux dispositions de la législation électorale, ses représentants aux assemblées parlementaires. Les citoyens ont en outre le droit d’adresser des pétitions aux autorités publiques (…) et d’user d’un certain nombre de libertés et de droits fondamentaux, comme la liberté d’expression, la liberté de la presse, la liberté de s’assembler et la liberté de s’associer, en vue de développer une activité politique »  [59].

38S’il est vrai, comme cela est ici souligné, que l’on peut prêter à une série de libertés publiques une nature participative en ce qu’elles permettent d’exprimer une opinion et de s’adresser aux autorités publiques, elles ne constituent pas pour autant la reconnaissance d’un droit de participer formellement à l’exercice du pouvoir politique  [60]. Constituant l’un des traits essentiels du régime représentatif  [61], le respect des libertés publiques vise davantage à garantir le libre jugement des gouvernés sur l’action politique.

39Du reste, la Constitution est muette sur le rôle de citoyen dans l’espace politique et aucune disposition ne traite a fortiori de la possibilité pour le citoyen de participer à la délibération parlementaire  [62]. Tout au plus certaines dispositions constitutionnelles concernant l’exercice des pouvoirs peuvent-elles donner quelques indications quant à la portée de la nature représentative de la démocratie belge. C’est ainsi que les articles 33 et 42 de la Constitution sont au fondement du raisonnement de la section de législation du Conseil d’État contestant la constitutionnalité des outils de démocratie directe, comme nous allons le voir dans la section qui suit.

2.1.2. L’inconstitutionnalité des outils de démocratie directe : une légisprudence constante

40La question de la constitutionnalité de la participation citoyenne a longtemps été traitée sous le prisme des procédés de démocratie directe. Dès 1985, la section de législation du Conseil d’État développe en la matière une interprétation de la Constitution qui traduit une certaine réticence à l’endroit de la participation citoyenne. À la faveur d’un avis emblématique rendu le 15 mai 1985 sur plusieurs propositions de loi instaurant la consultation populaire et le référendum, qui sera ensuite consolidé par une légisprudence constante  [63], le Conseil d’État conclut à l’inconstitutionnalité des techniques de démocratie directe pour deux raisons principales : d’une part, l’absence de toute disposition constitutionnelle prévoyant une intervention directe des citoyens à l’exercice du pouvoir et, d’autre part, la représentation comme vecteur exclusif d’expression de la volonté nationale  [64]. À son estime, leur instauration nécessiterait donc une révision préalable de la Constitution.

41Le premier argument repose en réalité sur l’article 33, alinéa 2, de la Constitution, en vertu duquel tous les pouvoirs sont exercés de la manière établie par la Constitution. Le respect de cette disposition suppose que le pouvoir s’exerce uniquement par les autorités limitativement investies par le texte constitutionnel de la compétence d’édicter des normes, selon les procédures fixées par celui-ci. Puisqu’aucune intervention directe des citoyens n’est prévue par la Constitution dans l’exercice des pouvoirs, il convient de ce fait de considérer comme inconstitutionnelle toute technique de participation directe à l’adoption des normes, comme la consultation populaire et le référendum  [65]. Une conclusion identique vaut en ce qui concerne le mécanisme de l’initiative populaire  [66], dès lors que la Constitution réserve expressément aux organes parlementaires et aux gouvernements le pouvoir d’initier une procédure législative ou constituante  [67]. Il importe peu, à cet égard, que l’initiative populaire fasse subsister la liberté de l’assemblée parlementaire d’adopter ou non le contenu de la norme proposée  [68].

42Ainsi, il est admis sur cette base que les citoyens non élus ne peuvent se voir confier, à cadre constitutionnel constant, un pouvoir d’initiative, d’amendement ou de décision dans le cadre d’un processus normatif. C’est dans cette logique que le comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique a affirmé, en 2001, que « l’exclusion par la Constitution de toute forme d’intervention directe du citoyen dans l’adoption des normes suffit à considérer que l’organisation d’un référendum, à quelque niveau que ce soit, est constitutionnellement impossible »  [69]. L’on peut d’ores et déjà relever, dans la foulée de cette légisprudence, que la participation citoyenne n’est toutefois pas automatiquement exclue, pour autant qu’elle n’équivaille pas nécessairement à l’exercice d’un pouvoir déterminé par la Constitution.

43Le Conseil d’État dégage un second argument au départ d’une interprétation spécifique du concept de « souveraineté nationale ». À la lumière de références doctrinales, il indique qu’en son alinéa 1er, l’article 33 de la Constitution exprime le principe de la souveraineté nationale, qui, « à la différence de la souveraineté populaire, justifie l’institution d’un régime représentatif et exclut généralement le gouvernement direct par le peuple »  [70]. L’article 42 de la Constitution, qui dispose que « les membres des deux Chambres représentent la Nation, et non uniquement ceux qui les ont élus », aurait pour effet d’établir que les membres du Parlement national détiennent à eux seuls le pouvoir de vouloir pour la Nation, excluant de la sorte toute expression directe du peuple. Selon le Conseil d’État, il en ressort que « la Nation ne s’identifie pas, dans le régime représentatif, avec la population ou avec les citoyens à un jour donné. Elle a une existence continue ; elle est formée aussi des générations de citoyens qui appartiennent au passé et des générations de l’avenir. Il n’est donc pas possible de reconnaître à un certain nombre de citoyens d’aujourd’hui le pouvoir de se substituer à la représentation nationale instituée par le constituant pour exprimer la volonté de cet être abstrait que la loi fondamentale appelle la Nation »  [71].

44Il ressort de cet argumentaire que le système représentatif tel qu’instauré par la Constitution belge s’oppose, pour le Conseil d’État, à toute technique de démocratie directe.

45Si la consultation populaire n’est pas formellement assortie d’effet obligatoire, le Conseil d’État considère que « le caractère consultatif de ce recours aux citoyens est artificiel, voire purement fictif »  [72]. Le législateur pourrait en réalité difficilement s’écarter du résultat de la consultation, dès lors qu’il s’agirait de l’avis des titulaires de la souveraineté : « Même si les résultats d’une consultation populaire peuvent ne pas être juridiquement obligatoires, l’autorité et la pression de fait qui s’en dégagent sont de nature telle qu’elles risquent de porter atteinte à l’essence du système représentatif instauré par la Constitution par le fait que les représentants du peuple ne décideront plus eux-mêmes mais se sentiront liés en fait par l’avis que leur donne la population »  [73]. En l’état de la Constitution, les représentants ne pourraient donc être liés ni en droit, ni en fait, dans l’exercice de leur mandat et dans l’adoption des décisions qu’ils prennent  [74].

46Bien que reprise par une large partie de la doctrine, cette interprétation stricte du principe représentatif n’est pas pour autant exempte de toute critique. Ainsi, le constitutionnaliste Hugues Dumont souligne-t-il que si le Congrès national a fait le choix, en organisant l’élection de représentants élus, d’un « concours médiat » des citoyens à la fabrication de la loi, rien n’empêche aujourd’hui d’y associer des formes d’expression plus « immédiates » de la volonté des citoyens. Il s’agit de deux manières différentes, mais conciliables, d’approcher l’idéal d’autogouvernement du peuple  [75]. Au final, « ce ne sont pas les articles 33 et 42 de la Constitution qui fondent le choix du “concours médiat” opéré par le Congrès national, mais seulement les dispositions qui régissent la manière dont les pouvoirs doivent être exercés »  [76]. Dans la même veine, le comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique considère également que le principe représentatif ne fait pas en soi obstacle à toute forme de démocratie directe. À son estime, l’avènement de l’idéal démocratique par la consécration du suffrage universel a rendu le régime représentatif « inséparable d’un souci de représentativité réelle », dont la démocratie directe peut constituer une modalité d’accomplissement  [77].

47En tout état de cause, il convient d’admettre que ce n’est pas le principe représentatif qui ferait obstacle à toute participation directe du peuple à l’exercice du pouvoir normatif, mais plutôt les dispositions constitutionnelles qui déterminent pour l’heure les modalités d’exercice de ce pouvoir normatif , qu’il soit réglementaire, législatif ou constituant. Sous l’effet d’une lecture actualisée de la légisprudence du Conseil d’État, il est aujourd’hui exclu de permettre, sans révision préalable de la Constitution, une participation directe du peuple à l’élaboration des normes – que ce soit sous la forme d’une consultation populaire, d’un référendum ou d’une initiative populaire. À cet égard, la consécration d’un fondement constitutionnel à la consultation populaire régionale en 2014 tend à consolider cette thèse.

2.1.3. La question de la constitutionnalité des outils délibératifs : une nouvelle légisprudence en formation ?

48Une telle conclusion vaut-elle également, plus largement, pour les outils délibératifs auprès des parlements ? Autrement dit, l’institution des instruments de participation citoyenne à la délibération parlementaire constitue-t-elle, ou non, une forme de participation à l’exercice de pouvoirs constitutionnellement établis ?

49Cette question appelle une observation préalable : il a toujours existé certaines formes de participation citoyenne à la délibération parlementaire, sans que cela ne suscite de critiques sous l’angle du droit constitutionnel. Les institutions parlementaires sont libres de consulter les citoyens et organes extraparlementaires qu’elles souhaitent sur une thématique déterminée, en vue le cas échéant d’obtenir des informations de leur part, d’entendre leurs observations, ou encore de recueillir leurs recommandations. La démocratie représentative ne saurait donc être perçue comme un mode de gouvernement nécessairement incompatible avec les procédés de dialogue entre élus et citoyens à valeur consultative.

50Dans un avis rendu le 29 décembre 2020 sur une proposition de décret wallon institutionnalisant l’assemblée citoyenne et le conseil citoyen  [78], le Conseil d’État a estimé que son raisonnement vis-à-vis de la consultation populaire n’est pas automatiquement transposable à tout mécanisme de consultation citoyenne. Dans cet avis, le raisonnement du Conseil d’État repose sur une analyse de la portée de l’article 33 de la Constitution au regard d’un processus de délibération citoyenne ayant vocation à conduire à la formulation de recommandations à l’adresse du Parlement.

51Pour commencer, la section de législation se réfère à son célèbre avis rendu trente-cinq ans plus tôt, en rappelant que la « participation [des citoyens] à l’exercice de la puissance publique est strictement limitée »  [79]. Sur le fondement de l’article 33, alinéa 2, de la Constitution, elle expose que « pour faire bénéficier les citoyens d’une nouvelle “manière” au travers de laquelle ils peuvent prendre part à l’exercice de “pouvoirs”, une révision constitutionnelle est chaque fois nécessaire selon les procédures prévues par l’article 195 de la Constitution »  [80]. Or, à son estime, les instances citoyennes que la proposition de décret examinée entend créer ne constituent précisément pas une nouvelle manière d’exercer des pouvoirs, et ce pour deux raisons principales. Tout d’abord, l’assemblée citoyenne et le conseil citoyen n’ont pas vocation à être investis d’un « véritable pouvoir de décision »  [81] : en effet, il s’agit ici uniquement du pouvoir de formuler des recommandations à l’adresse du Parlement, lequel ne sera pas tenu juridiquement d’y faire droit. Plus encore, le Conseil d’État relève que le dispositif délibératif à l’étude ne force pas, non plus, le Parlement wallon à débattre des recommandations. Or, souligne-t-il dans la foulée, « cette circonstance est importante dans l’appréciation du dispositif décrétal au regard de sa conformité à l’article 33, alinéa 2, de la Constitution »  [82].

52De cet avis, un double critère, substantiel et procédural, d’évaluation de la conformité du processus délibératif concerné avec l’article 33 de la Constitution peut être déduit.

53Le premier critère est celui de l’existence ou non d’un « véritable pouvoir de décision » dans le chef des citoyens non élus. Il convient de noter à cet égard que le Conseil d’État ne précise pas ce qu’il entend par « véritable ». S’agit-il d’un pouvoir de décision de facto ou d’un pouvoir de jure ? Il est permis de croire qu’il vise ici l’existence d’un pouvoir de décision en droit, et non l’autorité de fait dont les citoyens seraient susceptibles de jouir. Force est en tout cas de constater que le raisonnement tenu vis-à-vis de la consultation populaire n’est pas reproduit dans le contexte du pouvoir de recommandation dont seraient investis des citoyens tirés au sort. L’absence de toute référence à la question du caractère contraignant de facto d’un pouvoir consultatif semble ainsi confirmer que, aux yeux du Conseil d’État, il convient d’opérer une distinction entre la consultation populaire, qui sollicite l’avis du peuple dans son ensemble, et les autres formes de consultation citoyenne.

54Le second critère est celui de l’existence ou non d’obligations procédurales à destination de l’institution parlementaire. En effet, il ressort du raisonnement du Conseil d’État qu’une règle procédurale qui imposerait à une assemblée parlementaire de débattre des recommandations citoyennes pourrait être considérée comme affectant les modalités d’exercice des pouvoirs telles qu’elles sont déterminées par la Constitution. Cela signifie-t-il pour autant que toute contrainte procédurale pesant sur un parlement – indépendamment de son contenu – dans le cadre de la mise en œuvre d’un outil délibératif devrait être considérée comme contraire à l’article 33, alinéa 2, de la Constitution ? Dès lors que, en l’espèce, le texte qui lui était soumis n’instaurait pas pareille obligation, le Conseil d’État n’a pas été amené à éclaircir ce point.

55Il ressort de cet avis que les outils délibératifs auprès des parlements ne sont pas en soi incompatibles avec le principe représentatif. À ce stade, la légisprudence du Conseil d’État semble indiquer que leur constitutionnalité ne saurait toutefois être tranchée indépendamment d’un examen au cas par cas des implications substantielles et procédurales de chaque outil. Nous analyserons dans le troisième chapitre de cette étude les contours de chaque outil de participation à la délibération parlementaire à l’aune des critères de constitutionnalité que nous venons d’évoquer. Mais avant cela, il convient de poursuivre l’exploration de l’environnement constitutionnel de la participation citoyenne à l’aune d’un examen des balises constitutionnelles ayant vocation à encadrer l’institutionnalisation d’outils délibératifs auprès des parlements.

2.2. La question de la formalisation juridique : quel support normatif pour la participation citoyenne à la délibération parlementaire ?

56Dès lors qu’il semble admis que la nature représentative de la démocratie belge peut s’accommoder – sous réserve de certaines conditions – du développement d’outils de participation citoyenne à la délibération parlementaire, il convient de s’interroger sur la manière dont ceux-ci peuvent être traduits en droit. En dépit de l’absence de disposition constitutionnelle relative aux outils délibératifs auprès des parlements, trois principes du droit constitutionnel peuvent contribuer à encadrer leur formalisation : l’autonomie parlementaire, en vertu de laquelle les modalités d’exercice des attributions d’un parlement sont en règle fixées par la voie du règlement d’assemblée (2.2.1), l’exigence de légalité, qui justifie le recours à la loi lorsque les droits des citoyens tiers au parlement sont en jeu (2.2.2), et l’autonomie constitutive, qui permet au législateur fédéré de régler le fonctionnement de son organe parlementaire dans certains cas bien circonscrits (2.2.3).

2.2.1. Le règlement d’assemblée : source privilégiée du fonctionnement parlementaire

57Au nom de l’autonomie dont elles disposent dans la fixation des modalités d’exercice de leurs attributions, les assemblées parlementaires sont en principe seules compétentes pour instituer elles-mêmes, par la voie du règlement d’assemblée  [83], de nouvelles formes de participation citoyenne en leur sein.

58L’autonomie parlementaire trouve son siège dans l’article 60 de la Constitution, qui dispose que chaque chambre du Parlement fédéral a le pouvoir de déterminer, par son règlement, le mode suivant lequel elle exerce ses attributions. En ce qui concerne les parlements fédérés, l’article 44 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles leur reconnaît également le pouvoir d’organiser comme ils l’entendent l’exercice de leurs attributions  [84].

59Ce principe de droit constitutionnel contribue à la mise en œuvre de la séparation des pouvoirs sur le plan organique, puisqu’il permet à l’institution parlementaire de s’organiser de manière indépendante des autres organes. Il repose sur la volonté d’assurer aux assemblées parlementaires la faculté « d’exercer leurs fonctions sans interférences, perturbations et pressions extérieures »  [85]. Son attribut essentiel est de garantir la non-ingérence des autres autorités publiques investies des pouvoirs étatiques dans le fonctionnement de l’assemblée parlementaire.

60En application du principe d’autonomie parlementaire, la section de législation du Conseil d’État affirme de manière constante qu’« il n’appartient (…) pas, en principe, à la loi ou au décret d’intervenir pour régler le mode suivant lequel les assemblées législatives exercent leurs attributions ou prennent leurs décisions. De la même manière, la loi ne peut créer une commission parlementaire, ni lui attribuer une compétence particulière, ni régler la manière dont celle-ci sera exercée »  [86]. Il est ainsi convenu que toute règle purement procédurale qui concerne exclusivement le fonctionnement du parlement doit en principe être consacrée dans le règlement du parlement, et non dans une norme législative.

61À la lumière de ces considérations, il apparaît que le recours au règlement d’assemblée constitue un vecteur juridique approprié en vue d’ériger des outils de participation citoyenne au sein des parlements. Il en va ainsi, en tout cas, lorsque ces instruments portent sur un aspect de l’organisation ou du fonctionnement du parlement concerné. C’est à ce titre que les assemblées parlementaires bruxelloises (Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Assemblée réunie de la Commission communautaire commune et Assemblée de la Commission communautaire française) et le Parlement wallon ont pu consacrer et encadrer la faculté de créer des commissions parlementaires délibératives composées de députés et invitant des citoyens tirés au sort par la voie réglementaire  [87]. Tel n’a toutefois pas été le choix réalisé pour l’institutionnalisation d’autres outils délibératifs, comme le droit d’être entendu dans le cadre du droit de pétition ou le dialogue citoyen germanophone.

2.2.2. La loi : passage obligé pour la reconnaissance de droits subjectifs ?

62En vertu de l’exigence de légalité, un règlement d’assemblée ne peut contenir des règles ayant des effets juridiques à l’égard de citoyens tiers au parlement  [88]. Dès lors, il serait impossible de consacrer par la voie réglementaire de véritables droits subjectifs au bénéfice des citoyens non élus qui prennent part à une délibération parlementaire.

63De longue date, la section de législation du Conseil d’État indique, concernant l’articulation entre autonomie parlementaire et exigence de légalité, que le législateur peut exceptionnellement intervenir dans le domaine de l’organisation interne des assemblées lorsque les droits des citoyens sont en cause  [89]. En d’autres termes, toute règle relative au fonctionnement du parlement qui concerne les droits et obligations des tiers, qu’il s’agisse de leur reconnaître des droits ou de leur imposer des obligations, doit être reprise dans une disposition légale pour avoir une force contraignante et ne peut être déléguée aux parlements  [90]. Cela a encore été récemment confirmé par le Conseil d’État dans un avis du 29 décembre 2020, lequel a précisé sa légisprudence en affirmant que « lorsque les questions à traiter ne relèvent pas exclusivement de l’autonomie du parlement mais concernent les droits et obligations de tiers, leur règlement ne peut être confié directement au parlement, agissant par la voie d’un règlement d’assemblée ou par l’intermédiaire de ses organes, mais doivent être confiées “conformément au droit commun” au “pouvoir législatif dans toutes ses composantes” »  [91].

64Dans la droite ligne de cette légisprudence, lors de l’examen des récentes réformes prises à différents niveaux en vue d’assortir le droit de pétition d’un droit pour le pétitionnaire d’être entendu par les parlementaires, le Conseil d’État a considéré que le législateur ne pouvait déléguer à un parlement la fixation du nombre de signatures requises pour se prévaloir du droit d’être entendu. Et d’ajouter que les modalités d’exercice de ce droit « sont des règles qui concernent l’exercice des droits par les auteurs de la pétition. Il ne s’agit pas de règles purement procédurales qui concernent exclusivement le fonctionnement du parlement »  [92].

65Dans la même veine encore, concernant les commissions délibératives, il a pu être reproché dans la doctrine que certaines règles encadrant la sélection des participants soient fixées par la voie réglementaire et non légale. Ainsi Koen Muylle considère-t-il que si la participation aux commissions délibératives est certes volontaire, le processus n’en affecte pas moins les droits des tiers. En déterminant les conditions pour pouvoir participer, le régime juridique a tout d’abord pour conséquence de priver certains citoyens de la possibilité de prendre part aux travaux des commissions délibératives. Ensuite, l’organisation du tirage au sort suppose quant à elle un traitement des données à caractère personnel des citoyens  [93]. À ce titre, l’adoption d’une norme législative habilitant les assemblées parlementaires à accéder au registre national est apparue nécessaire pour leur permettre de procéder aux sélections des citoyens non élus siégeant dans les commissions délibératives (cf. infra). Le recours à la voie légale peut donc s’imposer, lorsque la réglementation de l’outil délibératif conduit à affecter les droits des citoyens tiers au parlement.

66En revanche, chaque parlement demeure libre de s’auto-contraindre par la voie du règlement d’assemblée, et d’ainsi s’imposer des obligations – principalement procédurales – dans le cadre d’un processus de participation citoyenne, comme c’est d’ailleurs le cas pour les citoyens tirés au sort siégeant au sein des commissions délibératives bruxelloises (cf. infra). Dans son avis du 29 décembre 2020, le Conseil d’État souligne qu’« une obligation à l’attention du parlement consacrée dans un règlement parlementaire s’analyse en définitive en un ordre que l’assemblée parlementaire s’adresse à elle-même et dont elle demeure maître »  [94].

67Si la loi, le décret ou l’ordonnance constituent le passage obligé pour la reconnaissance de droits subjectifs, cela ne signifie pas pour autant que ces citoyens peuvent être investis de quelque prérogative que ce soit. Comme nous l’avons souligné plus haut, le régime représentatif actuel ne semble pas exclure la possibilité pour le législateur de doter les citoyens de droits subjectifs – que l’on peut également qualifier de « droits de participation » – dans la délibération parlementaire, pour autant à tout le moins que le pouvoir décisionnel revienne exclusivement aux élus.

68En revanche, une incertitude demeure quant à la question de savoir où se trouve la frontière entre ces droits de participation qui peuvent être reconnus aux citoyens par une norme législative, à cadre constitutionnel inchangé, et ceux qui excéderaient ce que la Constitution permet. À ce propos, il convient de distinguer selon que les droits de participation se rattachent ou non à un outil qui, à l’instar du droit de pétition, bénéficie d’un ancrage constitutionnel. S’il apparaît logique que le législateur prévoie des garanties procédurales en soutien d’un instrument jouissant d’un socle constitutionnel  [95], la question est par contre plus délicate lorsqu’il est envisagé de régler l’exercice de droits de participation afférents à des outils qui n’ont aucune base constitutionnelle. Il semble à cet égard que seul un encadrement constitutionnel de la participation citoyenne permettrait de dissiper toute controverse ou ambiguïté sur la question des droits des citoyens non élus  [96].

2.2.3. L’autonomie constitutive : dernier maillon d’un corpus normatif morcelé

69L’analyse constitutionnelle de la participation citoyenne serait incomplète si l’on n’avait pas égard à l’incidence de la structure fédérale de l’État belge sur le développement des outils de participation citoyenne à la délibération parlementaire. En l’occurrence, cela requiert plus particulièrement d’identifier dans quelle mesure les entités fédérées sont compétentes pour adopter leur propre législation en la matière. En principe, celles-ci n’ont pas de prise sur l’organisation et le fonctionnement des institutions politiques, qui relèvent du champ de la Constitution et des lois fédérales – spéciales ou ordinaires. À l’exception de la Commission communautaire commune (COCOM) et de la Commission communautaire française (COCOF), les entités fédérées disposent toutefois de l’autonomie constitutive, à savoir de la compétence de régler dans le respect de la Constitution et des lois de réformes institutionnelles, certaines matières relatives à l’élection, à la composition et au fonctionnement de leurs institutions politiques  [97].

70Les entités fédérées ne peuvent légiférer sur des matières qui relèvent de leur autonomie constitutive que par la voie de décrets spéciaux ou d’ordonnances spéciales. Leur adoption exige une majorité des deux tiers des suffrages exprimés  [98] et, dans le cas du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, une majorité au sein de chaque groupe linguistique  [99]. Ces exigences sont toutefois sans préjudice de la possibilité de renvoyer dans un décret ou une ordonnance ordinaire la fixation des questions techniques ou des règles de détail  [100].

71Dans la mesure où l’autonomie constitutive confère au législateur fédéré le pouvoir de fixer certaines règles relatives à ses institutions politiques, peut-elle servir de fondement à l’institution de nouveaux instruments délibératifs à l’échelle d’une assemblée parlementaire fédérée ?

72Pour répondre à cette question, il convient au préalable de rappeler les limites matérielles qui s’imposent à la faculté d’auto-organisation des Communautés et des Régions. En matière d’autonomie constitutive, les entités fédérées « n’ont d’autres pouvoirs que ceux qui leur sont reconnus, selon les cas, par le constituant ou par le législateur spécial »  [101].

73Ainsi, le fonctionnement des parlements est expressément cité par l’article 118, § 2, de la Constitution comme étant l’une des catégories de matières qui relèvent de cette autonomie constitutive. Toutefois, cela ne signifie pas que le législateur fédéré est compétent pour adopter toute règle qui concernerait le fonctionnement de son parlement, puisque cette disposition constitue le cadre de l’autonomie constitutive, sans en préciser la portée véritable  [102]. C’est au législateur spécial qu’il revient de désigner les règles de fonctionnement que le législateur fédéré a le pouvoir de modifier, compléter, remplacer ou abroger. S’agissant des aspects du fonctionnement parlementaire qui font partie de l’autonomie constitutive, sont ainsi identifiés : l’ouverture et la clôture de la session, la présidence de la séance d’ouverture et l’élection des membres du bureau, la publicité des séances, la présence des membres du gouvernement, le droit de pétition, les compétences du bureau, la nomination et les compétences du greffier  [103], et la signature des résolutions et des décisions  [104].

74À la lumière de ces développements, l’on observe que l’autonomie constitutive des entités fédérées ne confère pas à celles-ci – sauf autorisation constitutionnelle expresse – la compétence de régler le fonctionnement de leurs assemblées ni, a fortiori, de renforcer leur dimension délibérative par l’adoption d’outils de participation citoyenne en leur sein. Parmi les multiples initiatives qui pourraient être prises par les entités fédérées en la matière, seule la réforme du droit de pétition semble entrer dans le champ de l’autonomie constitutive.

75À cet égard, tant le législateur flamand que les législateurs bruxellois et wallon ont chacun saisi l’opportunité de réformer le droit de pétition auprès de leur parlement respectif (cf. infra). S’il est clair que les règles encadrant le droit de présenter des pétitions font bien partie des matières relevant de l’autonomie constitutive dont disposent la plupart des entités fédérées, la section de législation du Conseil d’État rappelle néanmoins que cette compétence ne peut excéder la matière telle qu’elle était alors réglée par l’article 41 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, et dans le respect de la Constitution et des dispositions de la loi spéciale du 8 août 1980 échappant à l’autonomie constitutive  [105].

76Le fait qu’un outil participatif envisagé ne fasse pas partie du champ d’application de l’autonomie constitutive exclut-il pour autant automatiquement toute intervention du législateur fédéré ? Une telle conclusion paraît excessive. Il convient de distinguer selon que les règles apportent ou non des modifications substantielles au fonctionnement du parlement. C’est en tout cas ce qui semble ressortir d’un avis de la section de législation du Conseil d’État du 25 juin 2018, rendu sur une proposition de décret de la COCOF visant à consacrer la faculté de créer des commissions parlementaires mixtes. Il a ainsi été observé que la proposition apportait « des modifications substantielles au fonctionnement de l’Assemblée, allant même jusqu’à la contraindre à délibérer et à voter sur les rapports adoptés par les commissions mixtes. La question pourrait se poser de savoir si de telles modifications ne supposent pas l’octroi d’une autonomie constitutive à la Commission communautaire française. Or il ne résulte ni de la Constitution ni d’aucun autre texte qu’une autonomie constitutive lui aurait été octroyée. La Commission communautaire française ne peut donc adopter un décret réglant le fonctionnement de son Assemblée »  [106]. À la lumière de ces observations, il semble que c’est le caractère substantiel de la modification apportée au fonctionnement du parlement qui justifie que celle-ci ne puisse être adoptée qu’au titre de l’autonomie constitutive, pour autant qu’elle ait été octroyée, sur ce point, à l’entité fédérée concernée. À défaut, l’intervention du législateur fédéré ordinaire demeure donc envisageable.

77La frontière entre ce qui affecte ou non le fonctionnement du parlement de manière substantielle n’est toutefois pas aisée à tracer. Un décret de la Communauté germanophone du 25 février 2019 instaure un système délibératif dans le cadre duquel des assemblées citoyennes composées exclusivement de citoyens tirés au sort sont chargées de délibérer sur des sujets déterminés et de produire des recommandations à l’adresse du Parlement. Bien que le processus se déroule pour l’essentiel à l’écart de toute intervention parlementaire, le décret encadre la discussion, le vote et le suivi des recommandations par le Parlement. Tandis que de telles mesures décrétales relèvent selon toute vraisemblance du fonctionnement du Parlement, ne requéraient-elles pas l’autonomie constitutive de la Communauté germanophone ? Dans son avis rendu le 29 décembre 2020, le Conseil d’État s’est prononcé sur une question similaire à propos d’une proposition de décret wallon s’inspirant du texte germanophone. Selon ses observations, « aucune disposition de la proposition de décret ne règle la manière dont le Parlement exerce ses prérogatives législatives ou ne règle son organisation administrative interne et ses méthodes de travail. Spécialement, on relève que la proposition n’impose aucune modification substantielle au fonctionnement du Parlement et elle ne contraint pas non plus ce dernier à délibérer ou à voter sur les conclusions des travaux de l’assemblée et du conseil créés par la proposition »  [107]. Il ressort implicitement de cette affirmation que la réglementation en question n’entre pas dans le champ d’application de l’autonomie constitutive  [108].

78À l’aune de ces développements, les règles de compétences relatives au fonctionnement des institutions fédérées se présentent comme un obstacle à l’institutionnalisation par la voie législative d’outils de participation citoyenne à la délibération parlementaire. Elle complique tout particulièrement l’adoption de règles reconnaissant aux tiers des droits procéduraux à l’égard du parlement dans le cadre d’un processus délibératif organisé au sein de celui-ci. En effet, alors que nous avons écrit plus haut que l’intervention du législateur est requise pour assortir le processus de droits au bénéfice des tiers participants, le législateur fédéré est susceptible d’être privé de tout pouvoir d’action dès lors qu’il ne disposerait pas de l’autonomie constitutive nécessaire en la matière. Par exemple, les commissions délibératives qui sont instituées par la voie des règlements d’assemblée ne peuvent donc pas faire l’objet d’un décret ou d’une ordonnance visant à compléter leur cadre normatif par la reconnaissance légale de droits subjectifs au bénéfice des citoyens tirés au sort.

79À cet égard, la consécration d’un fondement juridique pour les instruments parlementaires de participation citoyenne dans la Constitution ou la loi spéciale pourrait permettre de remédier à cet obstacle, en élargissant dans ce dernier cas le spectre des matières qui relèvent de l’autonomie constitutive des entités fédérées.

2.3. Conclusion

80D’abord examinée du point de vue des outils de démocratie directe (une légisprudence constante), la question de la constitutionnalité de la participation citoyenne se pose aujourd’hui bien davantage sur le plan des outils délibératifs de participation citoyenne (une légisprudence en formation). Sur cette question, nous avons pu établir que, même si la Constitution reste peu loquace sur le rôle du citoyen dans l’espace politique, le principe représentatif qu’elle y consacre et les dispositions constitutionnelles qui déterminent la manière dont s’exerce le pouvoir politique sans prévoir l’intervention directe des citoyens à l’exercice du pouvoir ne s’opposent pas, en soi, à la mise en œuvre de nouveaux outils délibératifs impliquant les citoyens auprès des parlements. Plus encore, un double critère, substantiel et procédural, d’évaluation de la conformité du processus délibératif concerné avec l’article 33 de la Constitution est établi et doit être examiné au cas par cas : celui de l’existence ou non d’un « véritable pouvoir de décision » dans le chef des citoyens non élus et celui de l’existence ou non d’obligations procédurales à destination de l’institution parlementaire.

81Ce deuxième chapitre a ensuite conduit à traiter la question, au-delà de celle concernant la conformité des outils délibératifs avec le principe représentatif, de la formalisation de ces outils par le droit. Plusieurs leçons peuvent à cet égard être tirées de l’analyse qui précède. Primo, c’est en principe par la voie du règlement d’assemblée qu’il convient d’ériger des outils de participation citoyenne au sein des parlements, dès lors qu’ils concernent l’organisation ou le fonctionnement de l’assemblée parlementaire concernée. Secundo, c’est en revanche par la voie législative qu’il convient d’assortir les outils délibératifs de droits subjectifs au bénéfice des citoyens tiers au parlement ou de mesures affectant leurs droits. À cet égard, il subsiste un certain flou quant à l’étendue des droits de participation qui peuvent être reconnus aux citoyens dans la délibération parlementaire. Tertio, l’intervention du législateur fédéré dans la formalisation juridique des nouveaux outils délibératifs est conditionnée aux limites de l’autonomie constitutive des entités fédérées. Dès lors que la consécration d’outils délibératifs ne constitue pas pour l’heure une matière relevant de leur autonomie constitutive – à l’exception notable du droit de pétition –, les législateurs fédérés ne peuvent en principe intervenir que si la réglementation en question ne constitue pas une modification substantielle au fonctionnement des parlements.

3. Les outils délibératifs auprès des parlements : état des lieux

82Au départ des enseignements constitutionnels qui ont été exposés dans les pages qui précèdent, ce troisième chapitre passe en revue les outils délibératifs existants auprès des assemblées parlementaires belges.

83Comme nous l’avons déjà évoqué, les outils délibératifs institués au sein ou auprès des parlements sont susceptibles de prendre de multiples facettes. Cette multiplicité est liée à différentes variables, que ce soit au niveau du degré d’institutionnalisation de l’instrument, de sa temporalité, de sa proximité avec le parlement, des fonctions auxquelles il est associé, des droits de participation reconnus aux citoyens, etc.

84Le premier outil examiné sera le mécanisme traditionnel de l’audition parlementaire, auquel toutes les assemblées peuvent avoir recours. Bien que la faculté d’auditionner des tiers au parlement soit exploitée aux fins de recueillir l’avis d’experts, elle peut sur le principe constituer une forme souple de participation à la délibération parlementaire dans la mesure où les assemblées sont libres d’inviter des citoyens non élus à venir exprimer leurs vues en séance (3.1). Nous aurons ensuite égard au droit de pétition, en tant qu’il a été renforcé dans la plupart des assemblées du pays par le droit d’être entendu (3.2). Préfigurant la participation citoyenne organisée en tant qu’ils se basent sur la logique des mini-publics, les panels citoyens « informels » retiendront également notre attention (3.3). Enfin, nous étudierons les deux formes institutionnalisées de processus délibératifs au sein des parlements qui ont récemment vu le jour : le « dialogue citoyen permanent » du Parlement de la Communauté germanophone (3.4) et les commissions délibératives, érigées au sein des assemblées parlementaires bruxelloises et du Parlement wallon (3.5).

3.1. Les auditions parlementaires de citoyens

85Bien que la Constitution n’en fasse pas écho, il a toujours été acquis que, lorsqu’elle l’estime nécessaire, une assemblée parlementaire peut inviter un citoyen à lui communiquer son avis sur une problématique donnée. La sélection du citoyen ou du groupe de citoyens – qu’il s’agisse d’experts, de groupes d’intérêts, d’associations, etc. – que le parlement souhaite consulter est laissée à la libre appréciation de ce dernier. La consultation, orale ou écrite, peut intervenir à n’importe quel stade du travail parlementaire que ce soit à l’entame ou à l’issue d’une procédure législative, ou dans le cadre d’une simple mission d’information destinée à mieux renseigner le parlement sur des contours d’une problématique spécifique. Elle peut sur le principe déboucher sur un véritable échange de vues avec les élus.

86Ces consultations parlementaires s’organisent-elles en dehors de tout fondement réglementaire ? Il est possible d’identifier, à travers les différents règlements d’assemblée, un fondement plus ou moins explicite de ces demandes d’avis ou d’audition d’individus ou d’organes externes au parlement.

87Au niveau de la Chambre des représentants, la question de la consultation de personnes extérieures au Parlement est abordée à trois différentes reprises dans le règlement  [109]. En son article 28, n° 1, le règlement consacre tout d’abord la compétence de consultation d’une commission dans le cadre d’une procédure législative : « Pour la préparation du travail législatif qui est de sa compétence spécifique, une commission peut prendre l’avis de personnes ou d’organismes extraparlementaires, prendre des renseignements documentaires auprès d’eux, accepter ou demander leur collaboration ». La consultation doit être décidée à la majorité absolue des membres de la commission et doit s’inscrire dans « la préparation du travail législatif qui est de sa compétence spécifique ». Dans la suite du même article, une deuxième possibilité est évoquée : « La Chambre peut décider qu’une commission entendra contradictoirement, pour la préparation du travail législatif qui est de sa compétence spécifique, des représentants des groupes ou des organismes extraparlementaires dont l’avis est de nature à éclairer ses délibérations »  [110]. Enfin, une disposition supplémentaire a été ajoutée en 1979, et ce afin de permettre aux commissions de consulter des personnes externes indépendamment de tout projet ou proposition de loi : il est prévu, à l’article 32 du règlement, que « les commissions peuvent tenir des réunions en vue de l’information des membres ».

88Au niveau des autres assemblées parlementaires, il existe systématiquement une disposition du règlement qui consacre, de manière claire, la possibilité pour les commissions de prendre, oralement ou par écrit, l’avis de personnes ou de représentants d’organismes extraparlementaires. Si les formulations divergent selon les règlements, le libellé de la disposition en question vise à chaque fois à permettre de recueillir cet avis dès qu’il s’inscrit dans l’accomplissement des missions de l’assemblée parlementaire concernée – et non uniquement à l’occasion de l’examen d’un texte législatif.

89D’autres outils, plus spécifiques, ont pu voir le jour.

90Par exemple, depuis 1996, il existe dans le règlement du Parlement flamand la possibilité d’organiser des débats thématiques. Cela consiste à préparer au sein d’une commission ad hoc un débat parlementaire approfondi sur un thème spécifique  [111]. Des personnes extérieures au parlement – généralement, des experts – peuvent être invitées à accompagner les travaux de la commission  [112]. Le débat en tant que tel se déroule en séance plénière. Une dizaine de « themadebatten » ont ainsi été conduits sur de grands sujets de société, comme la pauvreté et l’exclusion sociale  [113], l’environnement et la santé  [114], l’enseignement supérieur  [115] ou, tout récemment, sur l’évaluation et la poursuite de la mise en œuvre de la politique flamande contre la propagation du Covid-19  [116].

91En 2018, afin de renforcer la participation des citoyens à la rédaction des textes décrétaux, le Parlement wallon a lancé la plateforme « Un décret par tous, un décret pour tous ». Cet outil – qui n’est pas consacré dans le règlement d’assemblée et qui, partant, ne bénéficie d’aucune formalisation juridique quelconque – doit permettre à tout député qui le souhaite d’associer les citoyens à l’élaboration d’une proposition de décret, moyennant le respect d’un processus de participation organisé en cinq étapes : une étape de présentation du projet de consultation ; une étape de consultation permettant aux citoyens de soumettre des propositions, des arguments ou de voter sur les autres propositions ; une étape de synthèse des contributions ; une étape de réponse aux auteurs des contributions les plus soutenues ; et enfin une étape de rencontre entre le député et les participants  [117]. Le processus est censé se clôturer par la rédaction et le dépôt de la proposition de décret. À ce jour, seules deux consultations ont été réalisées (l’une relative à la création de territoire zéro chômeur de longue durée et l’autre relative au commerce de proximité), mais aucune n’a mené au dépôt d’une proposition de décret.

92Lorsque les assemblées parlementaires font le choix de consulter des personnes externes, les protagonistes sont généralement des experts, des organisations représentatives ou des groupes d’intérêts – bien qu’il ne soit sur le principe pas exclu que des individus soient consultés en leur qualité de citoyens. Ces outils ne confèrent jamais de prérogative procédurale à la personne auditionnée et, dès lors, relèvent largement du bon vouloir de chaque assemblée.

3.2. Le droit de pétition réformé

93Venons-en désormais à l’outil de la pétition tel qu’il a été réformé en vue de renforcer sa dimension délibérative. Après avoir procédé à une rapide description de la forme que prend aujourd’hui le droit de pétition parlementaire (3.2.1), nous poserons un regard plus approfondi sur l’encadrement juridique du droit pour le pétitionnaire d’être entendu (3.2.2).

3.2.1. Description de l’instrument

94S’il existe depuis des temps ancestraux  [118], le droit de pétition semblait avoir perdu ses lettres de noblesse au fil du XXe siècle  [119]. Aujourd’hui, il jouit pourtant d’un regain d’intérêt, en tant qu’instrument permettant au citoyen d’apporter sa contribution au débat parlementaire sur une question d’intérêt public.

95Pendant longtemps, le cadre juridique du droit de pétition est demeuré inchangé. Le double fondement constitutionnel (les articles 28 et 57 de la Constitution) était assorti de dispositions propres dans les règlements respectifs de la Chambre des représentants et du Sénat. La volonté de moderniser le droit de pétition s’est manifestée à travers une multiplication des tentatives de réviser la Constitution, avant de se concrétiser par la consécration progressive de droits procéduraux au bénéfice des pétitionnaires, tels que le droit d’obtenir une réponse dans un délai déterminé ou le droit d’être entendu par l’assemblée (cf. infra). Certes, chacune des deux Chambres du Parlement fédéral a toujours disposé de la possibilité d’entendre un pétitionnaire qui exerçait son droit de pétition, mais ce droit du citoyen d’être entendu demeurait à l’entière discrétion de l’assemblée représentative.

96La présente section vise à examiner le droit de pétition en tant qu’il est aujourd’hui renforcé par le droit d’être entendu. En effet, le momentum permis par l’audition du pétitionnaire a pour vocation de créer un véritable dialogue entre les élus et les citoyens. Et c’est précisément en raison de cet aspect du droit de pétition que celui-ci constitue, à notre sens, un outil de participation à la délibération parlementaire.

97Il est aujourd’hui possible de découper la réglementation relative au droit de pétition parlementaire en trois séquences : la phase d’activation de l’instrument, la phase de traitement de la pétition et la phase de suivi des pétitions. Dans ce point, nous revenons de manière résumée et schématique sur chacune de ces étapes.

98Premièrement, le déclenchement du processus est caractérisé par des conditions souples. Le libellé de l’article 28 de la Constitution a pour effet de reconnaître le droit de pétition à toute personne, « quels que soient sa nationalité, son âge et sa qualité, et sans qu’il ne soit requis qu’elle démontre un quelconque intérêt »  [120]. Sur le papier, cela fait donc du droit de pétition un instrument constitutionnel particulièrement indiqué pour renforcer la capacité d’implication individuelle des citoyens dans le débat parlementaire et l’activité démocratique, dès lors qu’il n’est corseté que par très peu de règles. Ce cadre juridique restreint n’empêche toutefois pas les parlements de venir préciser les modalités concrètes d’activation et de traitement du droit de pétition dans leur règlement  [121].

99Deuxièmement, le traitement des pétitions revient essentiellement à la commission parlementaire permanente compétente. C’est à ce stade que certaines assemblées parlementaires reconnaissent au pétitionnaire le droit d’être entendu. C’est ainsi la garantie d’un temps de délibération parlementaire entre le citoyen et les élus – même limité – à propos de l’objet de la pétition. Conformément à l’esprit de cette nouvelle modalité de traitement des pétitions, la condition principale pour qu’une pétition ouvre le droit subjectif d’être auditionné en commission parlementaire est que celle-ci recueille un certain nombre de signatures.

100À ce jour, le règlement du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale constitue la seule ouverture manifeste à la possibilité d’entendre le pétitionnaire en plénière. En effet, il y est prévu que « le bureau élargi décide s’il y a lieu d’organiser un débat en séance plénière »  [122].

101Troisièmement, la question du suivi d’une pétition conduit à s’intéresser à la réponse parlementaire apportée à l’interpellation ou la demande formulée par la voie pétitionnaire. Le droit pour l’auteur d’une pétition d’obtenir une réponse du parlement dans les six mois de l’introduction de la pétition est désormais consacré aux niveaux wallon, bruxellois et flamand. Néanmoins, aucune sanction n’est prévue en cas de dépassement du délai imposé. Il arrive parfois que les réponses parlementaires apportées aux pétitions doivent faire l’objet d’une approbation en séance plénière  [123].

3.2.2. Ancrage juridique de l’instrument

102En reconnaissant au pétitionnaire un droit subjectif à être entendu (moyennant le respect de conditions déterminées), il s’agit de retirer au parlement toute marge d’appréciation dans la décision d’organiser une audition.

103La première réforme substantielle du droit de pétition a émergé d’un niveau fédéré, avec la consécration de garanties procédurales au profit des pétitionnaires s’adressant au Parlement flamand  [124]. Depuis lors, le droit d’être entendu dans le cadre d’une pétition est aujourd’hui consacré dans quatre assemblées parlementaires : la Chambre des représentants, le Parlement wallon, le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale (et l’Assemblée réunie de la COCOM) et le Parlement flamand.

104Au niveau de la Chambre des représentants, l’adoption d’une loi ordinaire  [125] a suffi pour reconnaître le droit d’être entendu. En revanche, la révision des modalités d’exercice du droit de pétition par les entités fédérées agissant dans le cadre de leur autonomie constitutive  [126], dont la reconnaissance du droit d’être entendu, a systématiquement requis l’adoption d’une double législation au niveau du Parlement wallon  [127], du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale  [128] et du Parlement flamand  [129]. D’un côté, en vue d’assortir le droit de pétition d’un droit pour le pétitionnaire d’être entendu, il convenait de modifier le fondement légal du droit de pétition parlementaire fédéré, contenu dans les lois de réformes institutionnelles  [130]. D’un autre côté, la fixation des modalités de mise en œuvre du droit d’être entendu, comme le nombre de signataires nécessaires pour avoir accès à ce droit, pouvait figurer dans un décret ou une ordonnance ordinaire  [131]. Quant à eux, les détails procéduraux figurent dans les règlements d’assemblée.

105Outre le droit d’être entendu, les législations accordent un droit au pétitionnaire de recevoir une réponse. S’agissant des entités fédérées, le droit pour l’auteur d’une pétition d’obtenir une réponse du parlement dans les six mois de l’introduction de la pétition est systématiquement inscrit dans le décret ou l’ordonnance spéciale modifiant les modalités d’exercice du droit de pétition figurant à l’article 41 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles  [132].

106Les réformes législatives entreprises ont été admises par la section de législation du Conseil d’État, à tout le moins sur le principe du renforcement de l’outil par la consécration législative de droits procéduraux. La section de législation a tout d’abord jugé, à propos de la réforme législative bruxelloise, que la modification des règles relatives au droit de pétition respecte les limites de ce que les législateurs fédérés sont en droit de régler au nom de leur autonomie constitutive. Elle a par ailleurs considéré que les différentes législations sont conformes au prescrit de l’article 28 de la Constitution, en ce qu’elles ne soumettent pas le droit de pétition à des conditions additionnelles à celles qui découlent de cette disposition  [133]. Dès lors qu’il s’agit d’un droit constitutionnel à la disposition des citoyens, il a également pu être considéré dans la doctrine que le droit de pétition ne peut faire l’objet d’une interprétation restrictive, et qu’une intervention législative dans le sens d’une démocratisation de l’instrument doit être possible  [134]. La section de législation du Conseil d’État a également admis, à plusieurs reprises, que le législateur garantisse au pétitionnaire la prise en considération de sa pétition par le parlement et le droit d’obtenir une réponse à celle-ci, dans la mesure où cela n’affecte pas le droit de pétition tel que reconnu par l’article 28 de la Constitution  [135]. Dans son avis sur la réforme du droit de pétition au niveau bruxellois, le Conseil d’État a par ailleurs souligné que ces droits reconnus aux pétitionnaires « impliquent certes des obligations pour le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, mais ils n’ont pas pour effet de modifier les fonctions des pétitions introduites »  [136].

107Outre cet avis, rien dans le système constitutionnel belge ne semble donc empêcher d’imposer aux assemblées le respect de certaines exigences procédurales telles que le droit d’être entendu et le droit de recevoir une réponse, dans le cadre du traitement du droit de pétition, dans la mesure où elles servent l’effectivité de ce droit politique consacré par le constituant, et ce pour autant qu’elles soient conformes aux pouvoirs constitutionnels des parlements.

3.3. Les panels citoyens informels

108Comme nous l’avons déjà évoqué plus haut, le mini-public délibératif a progressivement fait son entrée – d’abord de manière informelle – dans différents hémicycles du pays (3.3.1). En dépit de l’absence d’encadrement juridique des premiers panels citoyens, ceux-ci n’ont pas pour autant été dépourvus de toute entreprise de réception parlementaire formalisée (3.2.2).

3.3.1. Description de l’instrument

109Au début des années 2000, s’est progressivement popularisée l’idée selon laquelle il serait possible d’adjoindre aux institutions représentatives existantes des processus délibératifs permettant à des citoyens de prendre part à la discussion sur la prise de décision publique. Au cours des deux dernières décennies, l’idée de faire délibérer entre eux des citoyens tirés au sort en vue de renouer le lien de confiance entre les citoyens et le monde politique a trouvé une assise croissante dans le monde intellectuel belge  [137], notamment avec l’expérience du G1000 (cf. supra).

110Initialement conçues comme des processus délibératifs indépendants des institutions politiques, les expériences de délibération citoyenne ont progressivement pris leur ancrage dans le tissu institutionnel belge et se sont invitées sur le terrain parlementaire. En effet, plusieurs assemblées ont organisé des panels citoyens et des conventions-consensus ayant pour mission de délibérer sur un thème spécifique et de leur adresser des recommandations à l’issue de quelques journées de discussion. En témoignent, en 2017 et 2018, les expériences de panels citoyens au sein du Parlement wallon (l’un – le tout premier – sur les enjeux du vieillissement et l’autre sur les jeunes en Wallonie), du Parlement de la Communauté française (sur l’avenir de l’Europe), du Parlement de la Communauté germanophone (sur la petite enfance), du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale (« Make your Brussels Mobility », sur la mobilité en région bruxelloise)  [138]. Chacune de ces expériences délibératives a débouché sur l’adoption d’un rapport ou d’une résolution citoyenne contenant une série de constats et de recommandations. Une rencontre entre les panélistes et les parlementaires – ainsi que, dans certains cas, un membre du gouvernement – a systématiquement été prévue afin de présenter et de discuter des recommandations. Dans le cadre de certains de ces panels, une réunion de suivi a également été organisée un an plus tard, afin de discuter des politiques mises en œuvre pour répondre aux recommandations.

111Ainsi, le silence de la Constitution et des lois de réformes institutionnelles sur la possibilité de déploiement de processus de délibération citoyenne dans l’exercice du pouvoir politique n’a pas fait obstacle au déploiement d’une série d’initiatives de mini-publics informels dans le cadre parlementaire.

3.3.2. Ancrage juridique de l’instrument

112À première vue, les panels citoyens qui se réalisent de manière informelle n’ont que peu d’intérêt du point de vue du droit constitutionnel. Néanmoins, il convient de constater que même l’absence d’encadrement juridique spécifique du panel n’a pas empêché d’intégrer les citoyens non élus dans l’exercice de l’activité parlementaire par l’intermédiaire d’outils plus classiques.

113À cet égard, l’expérience du panel citoyen bruxellois est un bon exemple, alliant bonne volonté politique et recours à des instruments « traditionnels » du droit parlementaire, alors même qu’aucune formalisation directe du processus n’était envisagée. D’une part, une commission parlementaire spéciale chargée de centraliser le processus et les suites données à ce processus a été créée, permettant ainsi d’auditionner en séance de commission les citoyens qui ont participé au panel. D’autre part, le résultat du panel citoyen a fait l’objet d’une formalisation dans une résolution parlementaire. En l’occurrence, le résultat du travail du panel citoyen bruxellois a consisté en une « résolution citoyenne », comportant un ensemble de propositions concrètes relatives à l’amélioration de la mobilité en région bruxelloise  [139]. Il a été d’emblée affiché que, après les débats au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, ce texte serait transmis au gouvernement bruxellois, « qui pourra intégrer ces recommandations dans son plan de mobilité “Good move” »  [140]. Si l’appropriation par les parlementaires dépendait exclusivement de leur bonne volonté, ceux-ci se sont accordés sur le fait qu’il n’était pas question d’altérer le contenu de la résolution citoyenne et qu’il reviendrait au Parlement et au gouvernement d’en modifier la portée dans le cas où et lorsqu’ils entameraient le processus d’élaboration d’une norme touchant à la matière abordée par la résolution citoyenne . Lors de la deuxième réunion de commission spéciale chargée du suivi du panel citoyen, les parlementaires ont ainsi voté pour l’intégration de la résolution citoyenne dans une résolution parlementaire sans y apporter aucune modification  [141]. Cette résolution a été votée en séance plénière à l’unanimité pour être transmise au gouvernement  [142]. Ensuite, la commission spéciale a entendu le ministre en charge de la Mobilité en réponse à la résolution citoyenne ; les citoyens composant le panel ont été invités à assister à cette audition  [143].

114Ces expériences délibératives ont ouvert la voie à une institutionnalisation des mini-publics, dépassant ainsi une certaine réticence politique initiale. À partir du moment où il est devenu question de conférer aux processus délibératifs un véritable pouvoir d’influence dans la délibération parlementaire, la bonne volonté des élus et le droit existant n’ont plus suffi.

3.4. Le dialogue citoyen

115À la suite de ces expériences informelles de panels citoyens, le dialogue citoyen se présente aujourd’hui comme la première forme « institutionnalisée » d’organe délibératif, composé de citoyens tirés au sort. Une fois le processus décrit à la lumière de son encadrement décrétal (3.4.1), nous reviendrons sur le fondement juridique mobilisé en soutien de la consécration de ce nouvel outil délibératif (3.4.2).

3.4.1. Description de l’instrument

116C’est en 2019 que la Communauté germanophone franchit le pas et érige, par la voie décrétale, un processus de « dialogue citoyen permanent ». Celui-ci est le résultat d’une réflexion menée par les responsables politiques de la Communauté, en étroite collaboration avec le comité de pilotage du G1000 et un groupe d’experts désignés par ce dernier, en vue d’ériger un modèle ad hoc de délibération citoyenne permanente (dans la foulée d’une expérience de panel citoyen sur la politique d’accueil des enfants). Déposé au Parlement sous la forme d’une proposition de décret, le texte a été adopté à l’unanimité  [144].

117Le mécanisme tel qu’adopté vise à permettre la création périodique d’assemblées composées de 25 à 50 citoyens tirés au sort, chargées de délibérer sur des sujets déterminés et de produire des recommandations à l’adresse du Parlement de la Communauté germanophone. Ces assemblées temporaires sont instituées par un conseil citoyen permanent, qui assume également les tâches de préparation, de mise en œuvre et de suivi de ces assemblées  [145]. Ce conseil est composé de 24 citoyens tirés au sort pour dix-huit mois parmi les citoyens ayant siégé dans de précédentes assemblées citoyennes  [146] – aux côtés desquels siège également, avec voix consultative, un secrétaire permanent  [147]. L’une des caractéristiques essentielles de ce processus se situe donc dans la création de deux types d’organes citoyens considérés comme des « organes collatéraux du Parlement »  [148] : le conseil citoyen et les assemblées citoyennes.

118Le processus de dialogue citoyen est composé de deux phases, l’une propre à la délibération citoyenne et l’autre à la délibération parlementaire.

119La première phase délibérative du processus de dialogue citoyen se compose de manière schématique de la préparation de la délibération et du déroulement de celle-ci. Le conseil citoyen et les assemblées citoyennes détiennent la maîtrise de cette phase du processus, et fonctionnent selon des règles et principes qui leur sont propres. Les élus sont absents de la première phase délibérative du processus, qui va de la création des assemblées citoyennes par le conseil citoyen à la rédaction des recommandations par celles-ci.

120Au stade de la préparation de la délibération, la mission du conseil citoyen est double : sélectionner le thème de la délibération et organiser les assemblées citoyennes.

121Au début de chaque session parlementaire, le conseil citoyen détermine le nombre d’assemblées citoyennes qui seront convoquées durant les douze prochains mois (entre une et trois) ainsi que les thématiques qui y seront délibérées. Il peut choisir parmi les propositions émanant d’au moins deux de ses membres, d’un groupe parlementaire, du gouvernement, ou d’au moins 100 citoyens  [149]. Ces propositions doivent fournir une explication du thème souhaité, ainsi qu’une justification que celui-ci se prête bien à une délibération citoyenne.

122Le choix de la thématique est soumis à deux conditions matérielles. La thématique doit, d’une part, être conforme aux droits fondamentaux et, d’autre part, porter sur les compétences de la Communauté germanophone. À titre d’exception à cette deuxième condition, le sujet peut, dans des cas spécialement motivés et avec l’accord du bureau du Parlement, ne pas être (ou être seulement indirectement) en lien avec les compétences de la Communauté germanophone. C’est au conseil citoyen seul qu’il revient d’apprécier si les propositions qui lui sont soumises passent la rampe des deux conditions précitées. Le conseil citoyen est aussi compétent pour fixer d’éventuelles modalités supplémentaires relatives au dépôt des propositions de thématiques  [150].

123Le décret prévoit que, « à l’issue de la discussion sur le choix des thèmes, le conseil citoyen formule précisément la question qui devra être soumise à la consultation dans le cadre d’une assemblée citoyenne »  [151]. Selon les termes du décret, c’est donc à une question précise posée par le conseil citoyen que les assemblées citoyennes doivent répondre.

124Outre le pouvoir de déterminer l’objet des assemblées citoyennes, le conseil citoyen doit encore prendre une série de décisions relatives à leur organisation : il détermine leur composition  [152], leur durée, leur programme et leur budget ; il désigne les animateurs des débats, les experts et représentants d’intérêts qui seront entendus ; il crée un groupe consultatif chargé de la collecte d’informations et de documentation.

125Le tirage au sort est ensuite réalisé par le secrétaire permanent, conformément aux conditions de participation aux assemblées citoyennes prescrites par le décret  [153]. Une fois les personnes composant l’assemblée citoyenne tirées au sort, celles-ci peuvent encore se désister, dès lors que la participation à la délibération citoyenne est volontaire. Quant à lui, le conseil a la possibilité d’exclure certaines des personnes tirées au sort pour des motifs déontologiques, « par exemple, dans le cas d’un très grand intérêt personnel »  [154]. Sa décision doit être dûment motivée et est susceptible de recours auprès du bureau du Parlement  [155].

126Tant au sein du conseil citoyen que des assemblées citoyennes, la prise de décision est soumise à la règle du consensus. Selon les travaux préparatoires, ce principe décisionnel a avant tout pour objectif « de conférer la plus grande légitimité possible aux recommandations »  [156]. Dans l’hypothèse où aucun accord ne peut être trouvé malgré les tentatives de conciliation, des règles de majorité s’appliquent, lesquelles sont différentes selon l’organe concerné. Au niveau du conseil, la décision est prise à la majorité des deux tiers, à la condition que la majorité des membres soit présente. Au niveau des assemblées, les quorums sont plus élevés : la décision doit être prise à la majorité des quatre cinquièmes, à la condition que quatre cinquièmes des membres de l’assemblée citoyenne concernée soient présents. L’objectif est de ne pas altérer la légitimité des recommandations qui sont adoptées par les assemblées  [157]. Il est également prévu que les citoyens ayant voté contre la décision ont le droit de motiver leur opinion divergente dans un avis motivé joint à la décision  [158].

127À l’issue de l’adoption par l’assemblée citoyenne des recommandations qu’elle souhaite adresser au Parlement de la Communauté germanophone, le processus délibératif entre dans une nouvelle phase. Les recommandations sont transmises à une commission parlementaire permanente. Il s’agit d’un moment pivot, dans la mesure où les travaux intègrent le processus parlementaire classique en vue de la mise en œuvre des recommandations.

128La réception des recommandations d’une assemblée citoyenne par la commission permanente compétente initie un nouveau moment délibératif permettant aux citoyens composant ladite assemblée de prendre part à la discussion parlementaire des recommandations avec les mandataires politiques chargés d’en assurer la mise en œuvre  [159]. La procédure prévue repose sur le dialogue et la transparence, de sorte à placer les citoyens et responsables politiques sur un pied d’égalité  [160].

129L’article 9, § 2, du décret du 25 février 2019 prévoit ainsi que la commission parlementaire saisie par le bureau du Parlement des recommandations finales est tenue d’organiser « une séance publique au cours de laquelle les recommandations seront présentées par une délégation de l’assemblée citoyenne et débattues ensuite avec les membres de la commission et les ministres compétents. À cet effet, tous les membres de l’assemblée citoyenne sont invités ». Cette première séance parlementaire doit être suivie de la rédaction par les parlementaires – en collaboration avec les ministres compétents – d’un avis sur chacune des recommandations. Dans les travaux préparatoires, il est indiqué que les réunions consacrées à cette mission ne devraient pas être publiques, afin de préserver les responsables politiques contre toute influence extérieure et d’éviter qu’ils ne définissent leur position sur la base de l’image qu’ils souhaitent renvoyer  [161]. Dans son avis, la commission doit indiquer « si et comment les recommandations devront être mises en œuvre ». Dans l’hypothèse où une recommandation est rejetée, ce rejet doit faire l’objet d’une motivation séparée. Une deuxième réunion publique de commission est alors organisée, en vue de discuter de l’avis rendu avec les membres de l’assemblée citoyenne et, plus particulièrement, de débattre des motifs invoqués en soutien du rejet éventuel de certaines recommandations  [162].

130Le contrôle de la mise en œuvre des recommandations ne s’arrête pas là. Confié au conseil citoyen, ce contrôle dure autant de temps que nécessaire. Le conseil citoyen dispose à cet effet de l’aide du secrétaire permanent, qui est chargé de lui soumettre « à intervalles réguliers des rapports sur l’état d’avancement de la mise en œuvre des recommandations »  [163].

131Si c’est le conseil citoyen qui est logiquement investi de la mission de suivi, les membres de l’assemblée citoyenne à l’origine des recommandations en question sont néanmoins également activement impliqués dans ce suivi. Tout d’abord, les membres de l’assemblée peuvent être informés par le conseil citoyen – « s’il le juge nécessaire » – des éventuelles avancées dans la mise en œuvre de leurs recommandations. Ensuite, et plus fondamentalement, le Parlement doit, dans un délai d’un an suivant la séance parlementaire consacrée à la discussion de l’avis de la commission sur les recommandations de l’assemblée, organiser une nouvelle réunion de commission avec les membres de l’assemblée citoyenne. Les parlementaires sont invités à y présenter et à débattre avec les citoyens présents de l’état d’avancement de la mise en œuvre des recommandations. Le décret prévoit que, si la situation l’exige, d’autres séances parlementaires peuvent être convenues afin de poursuivre le suivi  [164]. L’organisation de celles-ci est alors conditionnée, selon toute vraisemblance, par l’accord du Parlement.

3.4.2. Ancrage juridique de l’instrument

132La validité juridique du processus décrit mérite d’être examinée à l’aune d’une double focale : sous l’angle de la compétence de la Communauté pour agir et sous l’angle de la compétence du législateur décrétal pour agir.

133Sur la question de la compétence de la Communauté germanophone, force est de constater qu’aucune disposition de la Constitution ni des lois de réformes institutionnelles n’investit les entités fédérées du pouvoir de créer un outil délibératif et des organes citoyens. Il était en tout cas exclu que le dialogue citoyen soit fondé sur l’article 118, § 2, de la Constitution, dès lors qu’il s’agissait d’un nouveau processus ne faisant pas partie des matières relevant de l’autonomie constitutive de la Communauté germanophone  [165]. Comme il a été vu précédemment, il est toutefois admis que toute entité fédérée est habilitée à créer des instances consultatives chargées de faire des recommandations sur des sujets qui relèvent de ses compétences. Se référant à un avis rendu en 2004  [166], le Conseil d’État a confirmé cette faculté, affirmant à propos de la proposition de décret wallon visant à instituer des organes délibératifs citoyens que la Région wallonne était compétente pour créer des organes consultatifs de ce type, pour autant que ceux-ci « veillent, dans leurs activités, à assurer un lien à tout le moins indirect avec les compétences de la Région wallonne »  [167].

134Sur la question de la compétence du législateur décrétal, plusieurs raisons justifient le recours au décret plutôt qu’au règlement d’assemblée pour ériger le dialogue citoyen germanophone.

135Tout d’abord, il ne s’agissait pas de créer un processus de délibération citoyenne organiquement intégré à l’institution parlementaire. Bien qu’étroitement lié au Parlement de la Communauté germanophone, ce processus n’est pas de nature parlementaire et les organes citoyens s’organisent de manière autonome par rapport à celui-ci – sous réserve de quelques exceptions sur lesquelles nous reviendrons plus tard. Dès lors que l’essentiel de la réglementation ne concernait pas le fonctionnement du Parlement, il va de soi qu’il n’était pas pertinent d’instituer le dialogue citoyen par le biais du règlement d’assemblée  [168].

136Une autre raison en soutien de recours au décret était la volonté d’adopter des règles ayant des effets juridiques à l’égard des membres des organes citoyens, conformément à l’exigence de légalité (cf. supra). Une série de règles prévues par le décret concernent les droits et obligations de tiers : c’est le cas des règles de sélection des citoyens tirés au sort, des règles relatives au paiement de leurs indemnités, du droit qui leur est reconnu de déposer des recommandations au Parlement ainsi que de participer à une réunion de commission parlementaire ou encore d’obtenir des élus un avis motivé sur chacune des recommandations. Le recours au décret s’avérait également nécessaire, comme le révèle Katrin Stangherlin, afin de doter le secrétaire permanent d’une base légale pour avoir accès au registre national au moment du tirage au sort des citoyens participant au dialogue citoyen  [169]. Le Conseil d’État a confirmé cette lecture dans son avis du 29 décembre 2020, affirmant que « c’est bien au décret qu’il revient [d’instituer l’assemblée citoyenne et le conseil citoyen] puisqu’ils sont créés dans l’orbite du Parlement et qu’il est envisagé de conférer des droits et obligations à leurs membres »  [170].

137Si l’octroi de droits et obligations aux citoyens composant les deux organes du processus justifie le recours au décret plutôt qu’au règlement d’assemblée, il n’en reste pas moins que l’on doit s’interroger sur la compatibilité des obligations s’imposant à l’assemblée parlementaire germanophone avec le cadre constitutionnel. En examinant la compatibilité du processus wallon avec cette disposition, le Conseil d’État a rappelé que les instances mises en place dans le cadre du dialogue citoyen ne peuvent constituer une nouvelle manière d’exercer les pouvoirs établis par la Constitution. Dans cet avis, il valide le régime en raison notamment du fait qu’« aucune disposition de la proposition de décret ne crée une obligation à destination du Parlement wallon de prendre en considération les recommandations faites par l’assemblée citoyenne : selon la proposition de décret, le Parlement n’est pas tenu d’en débattre. Cette circonstance est importante dans l’appréciation du dispositif décrétal au regard de sa conformité à l’article 33, alinéa 2, de la Constitution »  [171].

138Par cet avis, le Conseil d’État jette a posteriori le trouble sur la compatibilité avec l’article 33, alinéa 2, de la Constitution du régime adopté par la Communauté germanophone. Le décret du 25 février 2019 contient, précisément, deux règles qui contraignent le Parlement dans la manière dont il traite les recommandations dans le cadre du processus de dialogue citoyen : l’obligation de débattre avec les membres de chaque assemblée citoyenne des recommandations qu’elles formulent et l’obligation de rendre un avis motivé sur les recommandations (article 9).

139Faut-il dès lors considérer que le législateur décrétal germanophone a excédé la compétence dont il jouissait d’ériger un processus consultatif auprès du Parlement de la Communauté germanophone, en soumettant ce parlement à certaines obligations quant à la manière de délibérer ? La question reste ouverte.

3.5. Les commissions délibératives

140Un autre type d’outil délibératif expérimenté à l’échelle parlementaire a vu le jour au niveau bruxellois. Les commissions délibératives constituent un organe spécifique de discussion entre députés et citoyens non élus (3.5.1). Leur existence a été consacrée par la voie réglementaire et non par la voie légale (3.5.2).

3.5.1. Description de l’instrument

141C’est en décembre 2019 que le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, l’Assemblée réunie de la COCOM et l’Assemblée de la COCOF ont consacré dans leurs règlements d’assemblée respectifs la possibilité d’ériger en leur sein des commissions délibératives  [172]. Ces organes parlementaires d’un nouveau genre ont pour caractéristique d’être composés pour partie de citoyens tirés au sort. Comme l’indiquent les travaux préparatoires, l’existence au sein des institutions parlementaires d’organes de délibération composés de parlementaires et de citoyens non élus a vocation à offrir une réponse constructive face au constat d’une participation politique citoyenne trop faible et dépendante des cycles électoraux, ainsi que de l’absence d’« espaces de dialogue direct et formalisé entre représenté.e.s et représentant.e.s »  [173].

142Le choix d’instaurer une délibération mixte au sein de commissions parlementaires plutôt qu’un processus de délibération citoyenne similaire à la Communauté germanophone n’est pas explicitement justifié. Tout au plus peut-on observer que l’idée avait déjà été traduite dans une proposition d’ordonnance bruxelloise et dans une proposition d’ordonnance de la COCOM lors de la précédente législature  [174], et qu’elle avait été expressément reprise dans la déclaration de politique régionale bruxelloise – ainsi que dans la déclaration de politique du gouvernement de la Région wallonne et dans celle du gouvernement de la Communauté française. L’ambition d’intégrer des citoyens tirés au sort au cœur même du fonctionnement parlementaire préexistait donc l’initiative germanophone.

143En octobre 2020, le Parlement wallon a emboîté le pas aux assemblées parlementaires bruxelloises et a, à son tour, modifié son règlement afin d’encadrer la création de ces commissions parlementaires d’un nouveau type.

144L’originalité des commissions délibératives est de créer un lieu de débat mêlant parlementaires et citoyens non élus. S’il s’intègre pleinement dans les structures de l’institution parlementaire, ce nouvel organe délibératif bouscule en même temps les règles et usages qui président à son organisation et à son fonctionnement. Il convient, tout d’abord, de revenir sur la constitution des commissions délibératives avant de décrire les règles encadrant leur fonctionnement.

145Une proposition de création d’une commission délibérative est soit d’initiative parlementaire, soit d’initiative citoyenne (par le dépôt d’une suggestion citoyenne – papier ou électronique – sur le bureau du Parlement)  [175]. Dans ce dernier cas, le Parlement doit se prononcer dans les deux mois, sur proposition du bureau élargi ou sur rapport de la conférence des présidents  [176].

146Pour être déclarée recevable, une suggestion citoyenne doit être signée par 1 000 personnes – au niveau bruxellois – ou 2 000 personnes – au niveau wallon – âgées de 16 ans accomplis et résidant dans le ressort territorial de l’entité fédérée concernée. En outre, il est requis que la suggestion ne soit pas manifestement offensante, grossière ou contraire aux droits fondamentaux ; qu’elle relève de la compétence de l’entité fédérée concernée ; qu’elle prenne la forme d’une proposition à débattre d’une problématique générale plutôt que d’une ou plusieurs questions fermées  [177]. Une condition supplémentaire est formulée à l’article 130bis du règlement du Parlement wallon : la suggestion doit « respecter les obligations internationales et supranationales de la Belgique ».

147Tant au niveau bruxellois qu’au niveau wallon, il a été convenu que la composante parlementaire d’une commission délibérative comprend les députés de la commission permanente ayant dans ses compétences la thématique débattue. C’est au président de ladite commission permanente qu’il revient de présider la commission délibérative. Chaque commission délibérative est donc, sur le plan organique, une sorte d’extension de l’une des commissions permanentes de l’assemblée parlementaire concernée.

148Quant à elle, la composante citoyenne comprend un nombre de citoyens tirés au sort variable selon les parlements : 45 au niveau du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale (et de l’Assemblée réunie de la COCOM), 36 au niveau de l’Assemblée de la COCOF et 30 au niveau wallon. Ce nombre correspond systématiquement au triple du nombre de députés amenés à siéger au sein d’une commission délibérative, à moins que le parlement ne décide d’augmenter ou de diminuer le nombre de citoyens  [178]. Ce nombre élevé est donc le résultat d’une double intention dans le chef des initiateurs du processus : d’une part, inclure tous les députés siégeant en tant que membres effectifs de la commission permanente compétente et, d’autre part, avoir plus de citoyens tirés au sort que de députés au sein de la commission délibérative.

149La sélection des individus faisant partie de la composante citoyenne d’une commission délibérative est le résultat d’un double tirage au sort, balisé différemment selon l’assemblée concernée. Au niveau bruxellois, sont dans un premier temps envoyées 10 000 invitations à des personnes inscrites au registre de la population ou au registre des étrangers âgées de 16 ans et domiciliées sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale. Au niveau wallon, le règlement prévoit un premier tirage au sort de 3 000 citoyens « parmi les personnes remplissant les conditions pour élire le Parlement wallon »  [179]. Dans les deux cas, les personnes sélectionnées sont invitées à manifester leur volonté ou non de participer à la commission délibérative en vue du second tirage, lequel a lieu sur la base d’une méthode d’échantillonnage destinée à garantir une composition diversifiée.

150Le travail d’une commission délibérative se décline en trois phases, auxquelles sont conviés tant les citoyens tirés au sort que les députés membres de la commission.

151En premier lieu, chaque commission délibérative entame ses travaux par une phase publique préparatoire d’information des citoyens et des députés. Il est procédé à des auditions d’experts – qualifiés de « personnes-ressources », au niveau bruxellois – destinées à « contribuer à l’appropriation et à la connaissance du sujet »  [180]. Ces auditions portent notamment sur la présentation de la fiche d’information, qui est un document accessible en amont du processus et reprenant une série d’éléments jugés nécessaires pour garantir que les informations transmises soient de qualité (comme les enjeux de la problématique, le contexte dans lequel elle s’insère, le positionnement des parties prenantes, etc.)  [181].

152S’ouvre en deuxième lieu la phase des débats, par groupes réduits composés de citoyens et de députés ; ces réunions se tiennent à huis clos. La composition des groupes varie d’une séance de délibération à l’autre, mais dans le respect de deux critères cumulatifs : le ratio citoyens/députés et la diversité socio-démographique. Des facilitateurs externes sont chargés d’encadrer les débats dans chaque groupe. Le huis clos est sans préjudice du droit pour le comité d’accompagnement et les experts d’être présents.

153En troisième lieu, chaque commission délibérative s’achève par une phase de présentation, de débats et de vote des propositions de recommandations. C’est sur la base d’une mise en commun du travail des différents groupes de délibération que les propositions de recommandations sont rédigées. Cette tâche est confiée conjointement à l’opérateur externe et à deux citoyens tirés au sort parmi les personnes volontaires, avec la collaboration des services de l’assemblée  [182]. Une fois rédigées, les propositions de recommandations, « accompagnées des éléments de réflexion qui les motivent », sont présentées à la commission délibérative.

154Après discussion, et pour autant qu’une majorité de citoyens non élus et qu’une majorité de députés soient présents, chaque proposition de recommandation est soumise à un double vote : un vote secret « consultatif » des citoyens et un vote public « délibératif » des députés. Chaque recommandation est réputée adoptée lorsqu’elle est approuvée par une majorité absolue de députés. Une règle particulière est prévue par les règlements d’assemblée dans l’hypothèse où il y aurait une divergence de vues entre la majorité des députés et la majorité des citoyens au moment du vote d’une proposition de recommandation : « Si au moins une majorité absolue des citoyens présents tirés au sort votent en faveur ou en défaveur d’une proposition de recommandation et que la majorité des députés votent dans le sens contraire ou s’abstiennent, les députés ayant voté dans le sens contraire ou s’étant abstenus sont invités à motiver leur vote »  [183].

155À l’issue du vote à la majorité absolue sur les propositions de recommandations conformément aux modalités prévues par le règlement – consultatif pour les citoyens non élus membres de la commission et délibératif pour les députés membres de la commission –, deux députés et deux citoyens élaborent un rapport. Ce rapport est formellement adressé à la commission permanente. La commission permanente qui réceptionne le rapport est composée de la même manière que la commission délibérative qui a rédigé le rapport. Il n’est pas nécessaire que les parlementaires délibèrent une nouvelle fois au sujet de recommandations qu’ils viennent d’adopter. Il est néanmoins prévu que, « si elle estime qu’une ou plusieurs recommandations n’entrent pas dans ses attributions », la commission permanente renvoie ces recommandations au bureau élargi – au niveau bruxellois – ou à la conférence des présidents – au niveau wallon –, qui les transmet à son tour vers la commission jugée compétente. En pareille hypothèse, la commission nouvellement saisie ne doit pas non plus organiser de nouvelle délibération. Elle est soumise aux mêmes obligations de suivi que la commission permanente initialement saisie.

156Au niveau du suivi du rapport des commissions délibératives, la commission permanente saisie du rapport doit rédiger un rapport motivé sur les suites réservées aux recommandations dans les six mois du dépôt du rapport  [184]. Les règlements bruxellois et wallon imposent que les choix de suivi apportés « font l’objet d’une motivation circonstanciée de la commission permanente »  [185]. Le rapport de suivi de la commission permanente est ensuite présenté en séance plénière. Les citoyens ayant participé aux travaux de la commission délibérative sont informés de la date de cette séance plénière, sans pour autant être invités à y prendre part.

3.5.2. Ancrage juridique de l’organe

157Les commissions délibératives trouvent leur fondement juridique respectivement dans l’article 25/1 du règlement commun au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’Assemblée réunie de la COCOM, l’article 42ter du règlement de l’Assemblée de la COCOF et l’article 130bis du règlement du Parlement wallon  [186]. Pourquoi avoir privilégié la voie du règlement d’assemblée au fondement légal pour ériger ce nouveau processus de délibération ?

158Comme cela a été rappelé supra, en vertu du principe d’autonomie qui préside à l’organisation interne des assemblées parlementaires  [187], il était a priori exclu de passer par la voie d’une ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale (et d’une ordonnance de la COCOM), d’un décret de la COCOF ou d’un décret wallon pour consacrer la création d’un nouvel organe parlementaire. Il ne revient en effet pas au législateur – sauf exceptions (cf. infra) – de créer une commission parlementaire, de lui attribuer des compétences particulières, ni de régler la manière dont celles-ci seront exercées. Au vu de ces éléments, la seule voie juridique par laquelle ériger des commissions mixtes au sein des assemblées parlementaires bruxelloises ou du Parlement wallon était donc le règlement d’assemblée, au nom du principe d’autonomie parlementaire.

159Cependant, dès lors que l’autonomie devait s’exercer dans les limites prévues par la Constitution et les lois spéciales, la création réglementaire de ces organes parlementaires d’un nouveau genre se heurtait à une double difficulté.

160La première difficulté se manifestait par la règle selon laquelle seuls peuvent en principe siéger dans des commissions parlementaires les membres de l’assemblée parlementaire concernée. L’article 44 de la loi spéciale du 8 août 1980  [188] impose à chaque parlement fédéré de composer ses commissions « suivant le système de la représentation proportionnelle de ses groupes politiques ». Cette disposition est réputée emporter une obligation légale selon laquelle une commission d’un parlement fédéré doit être exclusivement composée de députés – obligation qui n’a pas d’équivalent au niveau des Chambres fédérales  [189]. La section de législation du Conseil d’État avait d’ailleurs considéré que, « telle qu’elle est conçue », une proposition de décret du 19 décembre 2017 visant à introduire la faculté de créer des commissions mixtes au sein de l’Assemblée de la COCOF était incompatible avec cette disposition légale  [190]. En l’occurrence, le texte en projet envisageait que des citoyens tirés au sort siègent dans les commissions mixtes avec voix délibérative, et qu’ils disposent du pouvoir de voter un rapport à présenter et débattre en plénière  [191]. Dès lors que ces commissions mixtes avaient vocation à jouir de pouvoirs similaires à ceux des autres commissions, elles pouvaient être considérées comme des commissions parlementaires à part entière et tombaient de ce fait sous le champ d’application de l’article 44 précité.

161Finalement, l’obstacle a pu être contourné grâce à la technique des membres avec voix consultative – ou sans voix délibérative. Conformément à l’usage, il est admis que la règle de la représentation proportionnelle des groupes politiques en vue de composer les commissions parlementaires s’applique sans préjudice de la possibilité de désigner des membres supplémentaires avec voix consultative. L’option qui a été privilégiée au niveau bruxellois consiste à considérer les citoyens tirés au sort comme des « invités » des commissions délibératives. L’intitulé de la section du règlement de l’Assemblée de la COCOF consacrée aux commissions délibératives indique d’ailleurs expressément qu’il s’agit de commissions « composées de députés et invitant des citoyens tirés au sort »  [192].

162Il est à noter qu’au niveau wallon, il n’est pas fait référence, dans le libellé de la disposition réglementaire pertinente, à la qualité d’invités des citoyens tirés au sort. L’article 130bis, § 1er, du règlement du Parlement wallon énonce simplement qu’une commission délibérative est « composée de députés et de citoyens tirés au sort ». Toutefois, cette différence terminologique n’a pas de conséquence pratique dès lors que les citoyens tirés au sort sont membres des commissions délibératives sans voix délibérative.

163La deuxième difficulté à laquelle se heurtait la création d’un organe parlementaire composé de citoyens tirés au sort était consécutive à l’impossibilité de prendre, par la voie réglementaire, des mesures produisant des effets juridiques à l’égard de tiers au parlement. Au nom de l’exigence de légalité rappelée supra, il est en effet admis que c’est au législateur d’intervenir lorsque les règles touchent aux droits et obligations des personnes tierces au parlement  [193]. C’est au nom de cette exigence que la ministre fédérale de l’Intérieur a d’ailleurs suspendu l’accès – initialement octroyé – du Parlement wallon et des assemblées parlementaires bruxelloises au registre national pour procéder au tirage au sort des citoyens appelés à siéger dans les commissions délibératives  [194]. Cela a donné lieu au dépôt de propositions de décret et d’ordonnance en vue de conférer aux parlements concernés une habilitation légale permettant d’avoir accès aux données du registre national nécessaires à la bonne organisation du tirage au sort  [195]. Saisie à ce propos d’une demande d’avis par le président du Parlement wallon, l’Autorité de protection des données (APD) a indiqué que la base légale était non seulement requise pour la constitution des commissions délibératives, mais également pour leur gestion dès lors que l’accès aux données était aussi nécessaire pour rentrer en contact avec les citoyens tirés au sort  [196]. Par ailleurs, le fonctionnement effectif des commissions délibératives requérait à tout le moins l’existence de droits procéduraux dans le chef des citoyens-participants, qu’il s’agisse simplement du droit de siéger au sein de la commission ou de prendre la parole. Si l’on peut admettre que les parlements sont libres, par la voie réglementaire, de s’auto-contraindre au bénéfice des tiers  [197], ils ne peuvent en revanche reconnaître à ceux-ci de véritables droits subjectifs dans la procédure parlementaire.

164Aurait-il dès lors été possible de recourir au législateur ordonnantiel ou décrétal pour doter les citoyens tirés au sort de véritables droits de participation à la délibération parlementaire ? La question demeure complexe à un double titre.

165D’un côté, la consécration par la voie légale de droits subjectifs dans le chef des citoyens tirés au sort ne pouvait conduire, pour le motif précité, à faire de ces derniers des membres à part entière d’une commission parlementaire. En effet, l’article 44 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles s’impose aux décrets et aux ordonnances de la même manière qu’aux dispositions réglementaires. Dès lors, il n’aurait pas été possible de reconnaître aux citoyens tirés au sort le droit de siéger avec voix délibérative au sein des commissions. Il s’agit d’une première limite au possible recours à la voie législative pour consacrer des droits de participation dans le chef des citoyens non élus membres de ces commissions délibératives.

166D’un autre côté, il semblerait que les droits de participation des citoyens tirés au sort au sein des commissions délibératives n’auraient pu être consacrés par le législateur fédéré qu’au titre de l’autonomie constitutive des entités fédérées  [198]. En l’espèce, le fait de régler les droits des membres non élus des commissions délibératives – prérogatives qui sont susceptibles de constituer des contraintes sur le fonctionnement d’un organe parlementaire – relève manifestement du fonctionnement du parlement, mais n’est pas repris au titre des matières qui relèvent de l’autonomie constitutive.

167Le Conseil d’État semble en tout cas avoir défendu une telle thèse, dans son avis du 25 juin 2018 rendu sur une proposition de décret de la COCOF visant à consacrer la faculté de créer des commissions mixtes. Comme nous l’avons déjà évoqué supra, il tend dans cet avis à considérer que la seule manière pour le législateur fédéré d’adopter une réglementation qui touche aux commissions mixtes est de disposer de l’autonomie constitutive, dès lors que le fait de contraindre un parlement à délibérer et à voter sur les rapports des commissions mixtes apporterait des modifications substantielles au fonctionnement de cette assemblée.

168Dès lors que les commissions délibératives constituent un nouveau genre d’organes parlementaires, elles ne disposent naturellement d’aucun encadrement dans les lois spéciales et ne font, a fortiori, pas partie des matières que le législateur spécial a désignées comme pouvant être réglées par les législateurs fédérés dans le cadre de leur autonomie constitutive. Pour permettre au législateur fédéré d’intervenir, il faudrait modifier les lois spéciales de réformes institutionnelles afin d’y consacrer un fondement légal en soutien de la création de commissions délibératives.

169À suivre ces enseignements, l’institutionnalisation des commissions délibératives était donc un parcours semé d’embûches. D’une part, il était impossible de créer des commissions parlementaires composées de citoyens tirés au sort avec voix délibérative, en raison de l’article 44 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. D’autre part, le législateur fédéré ne pouvait adopter de norme relative aux commissions délibératives dès lors qu’il s’agit d’une matière relative au fonctionnement du parlement qui relève de l’autonomie constitutive des entités fédérées.

170La solution « à cadre constitutionnel constant » trouvée par le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et l’Assemblée réunie de la COCOM a été de créer un organe délibératif ad hoc sans modifier l’organisation, le fonctionnement et les attributions des autres commissions. Certes, sont reconnus aux citoyens tirés au sort des droits de participation – aussi précaires soient-ils sur le plan constitutionnel – à la délibération au sein des commissions délibératives ; mais l’exercice de ces droits n’affecte pas les attributions des autres organes parlementaires, en particulier dans le cadre de la procédure législative parlementaire.

171Si l’exercice des droits de participation des citoyens tirés au sort n’affecte pas d’un point de vue juridique les attributions des organes parlementaires, il n’en demeure pas moins que les règlements bruxellois et wallon ont des implications certaines sur le travail parlementaire – davantage encore si la volonté politique y est –, et particulièrement le travail de la commission permanente « liée » à la commission délibérative.

172À deux reprises dans le processus – dans l’hypothèse où il y aurait une divergence de vues entre la majorité des citoyens et la majorité des députés au moment du vote d’une proposition de recommandation et lors du suivi donné à la mise en œuvre des recommandations –, les règlements prévoient des règles qui imposent une motivation dans le chef de l’assemblée parlementaire concernée. Cette garantie de motivation offerte par le règlement d’assemblée ne constitue pas la consécration parallèle d’un véritable droit subjectif dans le chef des citoyens tirés au sort et aucune sanction au non-respect de cette obligation n’est prévue. Il s’agit à tout le moins de la démonstration d’un engagement de bonne volonté, de nature politique, à offrir un suivi aux recommandations issues de ce processus délibératif.

173En outre, on relèvera qu’il découle de l’obligation qui pèse sur la commission permanente de fournir une motivation circonstanciée relative au suivi donné par elle aux recommandations, une autre obligation, celle de prendre en considération ces recommandations et d’en débattre.

Conclusion

174L’état des lieux des outils délibératifs dressé dans le présent Courrier hebdomadaire en témoigne : les assemblées parlementaires belges prennent de plus en plus le chemin du renouveau démocratique par la participation citoyenne à la délibération. Cette étude a permis de défricher partiellement ce chemin encore peu balisé sur le plan juridique, au travers notamment des trois principes du droit constitutionnel qui le façonnent : l’autonomie parlementaire, principe au regard duquel les modalités d’exercice des attributions d’un parlement sont fixées dans le règlement d’assemblée ; l’exigence de légalité, qui justifie le recours à la norme législative notamment lorsque les droits des citoyens sont en jeu ; l’autonomie constitutive, qui permet à chaque législateur fédéré de régler le fonctionnement de son organe parlementaire.

175À l’heure de conclure, trois observations méritent encore d’être formulées quant à l’articulation entre l’institutionnalisation des outils délibératifs à la délibération parlementaire et le droit constitutionnel.

176Primo, à cadre constitutionnel constant, les citoyens non élus qui prennent part à la délibération parlementaire ne peuvent se voir confier un pouvoir de décision. L’obstacle à toute participation du peuple à l’exercice du pouvoir normatif n’est pas tant le principe représentatif que les dispositions constitutionnelles qui déterminent les modalités d’exercice de ce pouvoir normatif. Il existe donc un « champ constitutionnel des possibles » en cas de révision de la loi fondamentale, auquel deux limites viennent toutefois se greffer. D’une part, le respect du principe représentatif suppose qu’une modification constitutionnelle visant à confier à des citoyens non élus un pouvoir contraignant dans le processus de décision parlementaire respecte le principe de l’interdiction du mandat impératif. D’autre part, d’aucuns relèvent les difficultés potentielles que pose l’octroi d’un véritable pouvoir de décision aux citoyens non élus, que ce soit au niveau du déficit de légitimité démocratique, de la reddition des comptes ou de la cohérence avec les orientations gouvernementales.

177Secundo, la Constitution ne fait en principe pas obstacle à la consécration de droits de participation au bénéfice des parties prenantes aux processus délibératifs, pour autant que ce soit par la voie législative. Ce constat est toutefois confronté à une double incertitude. Tout d’abord, l’exigence de légalité n’a pas empêché que certains outils délibératifs créés par la voie du règlement d’assemblée soient assortis de droits procéduraux au bénéfice de citoyens non élus, comme c’est le cas pour les commissions délibératives. L’absence de base légale soumet le respect de ces droits au bon vouloir des assemblées, ce qui est, au fil du temps, susceptible d’affecter l’effectivité des mécanismes concernés. Ensuite, demeure ouverte la question de savoir où se situe, à cadre constitutionnel inchangé, la limite à la reconnaissance de droits de participation aux citoyens non élus et des obligations correspondantes susceptibles d’être imposées au parlement. En effet, la frontière entre ce qui serait permis et ce qui excéderait la Constitution n’est pas clairement définie, et le flou subsiste. C’est ainsi que l’on a pu relever, dans le cadre du dialogue citoyen, que l’obligation faite à l’assemblée parlementaire de débattre avec les citoyens non élus des recommandations qu’ils formulent et l’obligation de rendre un avis motivé sur ces recommandations font partie de cette « zone grise » d’incertitude juridique.

178Tertio, il est important d’examiner les organes au sein desquels les citoyens non élus prennent part à la délibération. En effet, en règle, il est interdit de faire siéger les citoyens non élus dans une commission parlementaire. Les outils délibératifs analysés respectent ce principe, dans la mesure où les citoyens non élus sont généralement considérés comme des « invités » au sein d’une commission parlementaire  [199] ou du fait que l’organe délibératif constitue un organe collatéral au parlement. L’interdiction précitée n’en demeure pas moins un obstacle à prendre en considération dans la mise sur pied de futurs outils délibératifs, et plus particulièrement dans la réflexion autour de la création d’une assemblée citoyenne permanente au sein même du parlement.

179Il semble que l’on ne soit encore qu’au début du mouvement d’institutionnalisation des outils délibératifs auprès des parlements. La réflexion sur le renouveau démocratique se poursuit, en particulier au niveau fédéral. Depuis l’entame de la législature actuelle, une commission sénatoriale du Renouveau démocratique et de la Citoyenneté a procédé à l’établissement d’un rapport d’information sur la modernisation du système démocratique belge en complétant la démocratie représentative par une participation accrue des citoyens dans la prise de décisions aux différents niveaux de pouvoir ainsi qu’au sein de la société  [200]. En outre, l’accord du gouvernement fédéral De Croo (PS/MR/Écolo/CD&V/Open VLD/Vooruit/Groen) consacre quelques pages au renouveau démocratique ; le gouvernement s’y engage notamment à enrichir la démocratie représentative « via une participation plus directe des citoyens dans le processus de décision politique ». Sont envisagées, dans la lignée des nouveaux mécanismes délibératifs existants à différents niveaux fédérés, « de nouvelles formes de participation citoyenne, comme les cabinets citoyens ou les panels mixtes à la Chambre réunissant des parlementaires et des citoyens tirés au sort ». On le voit, la participation citoyenne à la délibération parlementaire est plus que jamais à l’agenda politique. Toutefois, en l’absence de cadre constitutionnel bien établi, les initiateurs des outils délibératifs sont contraints de manœuvrer au sein d’un environnement juridique complexe. Tel est vraisemblablement le prix à payer pour moderniser le fonctionnement d’une démocratie dont les structures reposent sur un texte constitutionnel n’ayant jamais prévu la possibilité d’une part active des citoyens non élus dans la délibération parlementaire.

Notes

  • [1]
    * Les auteurs adressent leurs plus vifs remerciements à Norman Vander Putten et Mathias El Berhoumi pour leur relecture méticuleuse et constructive de la présente étude.
    Cf., notamment, les travaux des commissions pour le Renouveau politique créées en 2000 au niveau du Parlement fédéral (Chambre des représentants, Annales, n° 31, 23 décembre 1999 ; Sénat, Annales, n° 23, 20 janvier 2000) et, plus particulièrement, l’avis du comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique (Chambre des représentants et Sénat, Comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique, Le renouveau politique. Démocratie directe (Référendum, consultation populaire, initiative populaire et droit de pétition). Avis, n° 797/2 (Chambre) et n° 416/2 (Sénat), 20 mars 2001).
  • [2]
    Lors des travaux de la commission spéciale du Parlement wallon relative au renouveau démocratique, plusieurs experts auditionnés ont mis l’accent sur la délibération et le tirage au sort comme éléments déterminants de l’innovation démocratique (cf., notamment, les auditions menées sur le thème « Démocratie citoyenne et participative en ses aspects généraux et en ses aspects juridiques » : Parlement wallon, Commission spéciale relative au renouveau démocratique, La démocratie citoyenne et participative en ses aspects généraux et en ses aspects juridiques. Rapport, n° 365/1, 10 décembre 2015). Parallèlement, le groupe de travail chargé du Renouveau politique à la Chambre des représentants a également étudié de nouvelles formes de participation davantage axées sur la délibération, comme l’idée d’une chambre citoyenne tirée au sort, d’un budget citoyen ou de commissions mixtes (Chambre des représentants, Groupe de travail Renouveau politique, Rapport, n° 2584/1, 18 juillet 2017, p. 62-72). Au Parlement flamand aussi, la participation citoyenne a fait l’objet de débats parlementaires, tantôt dans le cadre de la rédaction de la note d’orientation sur la participation citoyenne (Vlaams Parlement, Conceptnota voor nieuwe regelgeving betreffende burgerparticipatie, n° 784/1, 19 mai 2016) tantôt sur des discussions sur des propositions de décret ou de résolution (cf., notamment, Vlaams Parlement, Voorstel van decreet betreffende de invoering van een procedure voor het geven van toegang aan burgers tot de parlementaire besluitvorming via een adviserend deliberatief process, n° 917/1, 11 octobre 2016 ; Vlaams Parlement, Voorstel van resolutie betreffende burgerparticipatie. Tekst aangenomen door de plenaire vergadering, n° 1385/3, 21 février 2018 ; Vlaams Parlement, Voorstel van resolutie betreffende het stimuleren van burgerbetrokkenheid op het lokale beleidsniveau. Tekst aangenomen door de plenaire vergadering, n° 1386/3, 21 février 2018. Pour une analyse plus approfondie de ces discussions, cf. R. Van Crombrugge, « Burgerparticipatie in Vlaanderen: de agenda van de decreetgever geëvalueerd », Tijdschrift voor Bestuurswetenschappen en Publiekrecht, n° 4, 2018, p. 235).
  • [3]
    Ces nouveaux instruments s’ajoutent à d’autres formes, déjà présentes, d’association de citoyens non élus à la délibération politique, qui se déploient tant au sein qu’en dehors de l’enceinte parlementaire. Mentionnons, à titre d’exemple, les auditions d’experts en commission parlementaire et les consultations, concertations ou négociations du gouvernement avec des acteurs de la société civile. À côté de cette catégorie particulière de citoyens non élus, il existe d’autres formes encore de consultation du citoyen non élu, intervenant sans cette qualité d’expert. À cet égard, cf. M. Elst, « De burger als bron van recht », in P. Popelier, J. Van Nieuwenhove (dir.), Wie maakt de wet?, Bruges, La Charte, 2006, p. 221-252.
  • [4]
    J. Pitseys, Démocratie et citoyenneté, Bruxelles, CRISP (Dossier, n° 88), 2017, p. 46.
  • [5]
    R. Dahl, Democracy and its Critics, New Haven, Yale University Press, 1989, p. 37. Dans le même sens, le philosophe Paul Ricœur définit la démocratie dans son rapport avec le pouvoir comme « le régime dans lequel la participation à la décision est assurée à un nombre toujours plus grand de citoyens. C’est donc un régime dans lequel diminue l’écart entre le sujet et le souverain » (P. Ricœur, « Éthique et politique », Esprit, n° 101, 1985, p. 10).
  • [6]
    Cf., notamment, P. Gérard, Droit et démocratie. Réflexions sur la légitimité du droit dans la société démocratique, Bruxelles, Facultés universitaires Saint-Louis, 1995.
  • [7]
    Précisons toutefois que la démocratie athénienne était en réalité loin d’être dépourvue de toute dimension de délégation. Ainsi l’organe central était-il par exemple le Conseil, composé de 500 citoyens tirés au sort. L’Agora pouvait quant à elle accueillir jusqu’à 8 000 personnes, alors qu’environ 30 000 citoyens pouvaient prétendre y participer. Athènes n’était donc pas le modèle pur de la démocratie directe tel que l’on tend parfois à le dépeindre. À ce sujet, cf. H. Landemore,Open Democracy: Reinventing Popular Rule for the Twenty-First Century, Princeton, Princeton University Press, 2020, p. 66-74.
  • [8]
    Sur une telle lecture de J.-J. Rousseau, cf. B. Manin, « Volonté générale ou délibération ? Esquisse d’une théorie de la délibération politique », Le Débat, n° 33, 1985, p. 72-94.
  • [9]
    Tout au plus trouve-t-on parfois encore le maintien de pratiques inspirées de cet héritage au niveau local, à l’instar des Landsgemeinden qui continuent d’être organisés dans certains cantons suisses.
  • [10]
    H. Landemore,Open Democracy, op. cit., p. 53-54. On pourrait également citer les nouveaux modes d’organisation politique défendus par les mouvements municipalistes (à ce sujet, cf. S. Van Outryve, « Le droit réinventé : la lutte des mouvements municipalistes pour le droit de la démocratie directe », in A. Bailleux, M. Messiaen (dir.), À qui profite le droit ? Le droit, marchandise et bien commun, Limal, Anthemis, 2020, p. 221-242).
  • [11]
    Telle était ainsi la pensée d’Emmanuel-Joseph Sieyès, qui considérait que, dans des sociétés reposant sur la division du travail, les individus n’avaient plus le temps nécessaire pour s’occuper en permanence des affaires publiques (sur ce point, cf. B. Manin, Principes du gouvernement représentatif, Paris, Flammarion, 2012, p. 237-238).
  • [12]
    Telle était ainsi la conception de James Madison, assumant l’existence d’un écart entre représentants et représentés : « il soutient que les élus doivent être différents et distincts de leurs électeurs, car le gouvernement républicain exige, comme tout autre régime, que le pouvoir politique soit attribué à ceux qui possèdent “le plus de sagesse et le plus de vertu” » (ibidem, p. 153).
  • [13]
    Y. Lejeune, « Brèves considérations sur la gestion des risques délibératifs dans une démocratie représentative », Revue de la Faculté de droit de l’Université de Liège, n° 2, 2015, p. 431.
  • [14]
    Au sortir de la période révolutionnaire française, la délibération est ainsi censée « protéger la prise de décision de l’influence néfaste des passions égoïstes et irrationnelles du peuple » (C. Girard, A. Le Goff, « Les théories de la démocratie délibérative », in C. Girard, A. Le Goff (éd.), La démocratie délibérative. Anthologie de textes fondamentaux, Paris, Hermann, 2010, p. 74).
  • [15]
    Cf. D. Van Reybrouck, Contre les élections, Arles, Actes Sud, 2014.
  • [16]
    La littérature en la matière est abondante. Cf. notamment, au niveau belge, L. De Winter, P. Dumont, « La crise de la démocratie en Belgique et en Europe : diagnostics et remèdes », in C. Gobin, B. Rihoux (dir.), La démocratie dans tous ses états. Systèmes politiques entre crise et renouveau, Louvain-la-Neuve, Bruylant, 2000, p. 101-108 ; D. Caluwaerts, « L’état de la démocratie représentative », intervention lors du colloque Démocratie représentative : vers la fin d’un modèle ? Diagnostic et remèdes, Bruxelles, Sénat, 22 septembre 2015, p. 17-21 ; L. Damay, C. Mercenier, « Démocratie participative. Quelques éclairages sur les enjeux », Mouvement communal, n° 924, 2018, p. 12-18. On a parfois tendance à recourir trop rapidement au constat de crise pour qualifier l’état de la démocratie représentative et ses évolutions ; pour une critique en ce sens, cf. A.-E. Bourgaux, La démocratisation du gouvernement représentatif en Belgique : une promesse oubliée ?, thèse de doctorat, Université libre de Bruxelles (ULB), 2013.
  • [17]
    M. Gounelle, « Démocratiser le mandat représentatif », Le Débat, n° 4, 2006, p. 111.
  • [18]
    Sur la « représentation descriptive » ou « représentation miroir », cf. notamment J. Pitseys, « Transparence et mutisme de la représentation politique : l’idéal de similarité », Revue philosophique de Louvain, n° 3, 2017, p. 503-530.
  • [19]
    P. Ariès, Nos rêves ne tiennent pas dans les urnes. Éloge de la démocratie participative, Paris, Max Milo, 2013, p. 61.
  • [20]
    Y. Sintomer, Le pouvoir au peuple. Jurys citoyens, tirage au sort et démocratie participative, Paris, La Découverte, 2007, p. 16.
  • [21]
    Cette évolution est bien résumée par L. Blondiaux, Le nouvel esprit de la démocratie. Actualité de la démocratie participative, Paris, Seuil, 2008, p. 39-44.
  • [22]
    Pour une analyse des avantages et des défis qui sous-tendent un rapprochement entre la démocratie participative et la démocratie délibérative, cf. notamment S. Elstub, « Deliberative and Participatory Democracy », in A. Bächtiger, J. S. Dryzek, J. Mansbridge, M. E. Warren (dir.), The Oxford Handbook of Deliberative Democracy, Oxford, Oxford University Press, 2018, p. 187-199.
  • [23]
    M.-H. Bacqué, H. Rey, Y. Sintomer, « Introduction. La démocratie participative, un nouveau paradigme de l’action publique », in M.-H. Bacqué, H. Rey, Y. Sintomer (dir.), Gestion de proximité et démocratie participative. Une perspective comparative, Paris, La Découverte, 2005, p. 9-46.
  • [24]
    S. Rui, « Démocratie participative », in I. Casillo et al. (dir.), Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la participation, Paris, GIS Démocratie et Participation, 2013, www.dicopart.fr.
  • [25]
    Parmi les études les plus importantes, cf. notamment C. Pateman, Participation and Democratic Theory, Cambridge, Cambridge University Press, 1970 ; B. Barber, Strong Democracy: Participatory Politics for a New Age, Berkeley, University of California Press, 1984.
  • [26]
    S. Elstub, « Deliberative and Participatory Democracy », op. cit., p. 189-190.
  • [27]
    Pour une présentation des expériences participatives qui se sont multipliées en Belgique, principalement au niveau local ou de manière sectorielle, cf. A.-E. Bourgaux, La démocratisation du gouvernement représentatif en Belgique, op. cit., p. 22-31. L’auteure se montre très critique vis-à-vis de ce qu’elle appelle « l’imbroglio participatif » : « Derrière les paillettes de leur appellation commune, il est en effet souvent malaisé de distinguer empiriquement ce qui relierait entre eux les différents mécanismes proposés, expérimentés ou réglementés sous le vocable générique de “participation”, tandis que leurs auteurs omettent de justifier en quoi ce qui est institué, proposé, défendu ou analysé serait une nouveauté radicale appelée à répandre sur la communauté ses bienfaits participatifs » (ibidem, p. 26). Cf. également M. Delnoy, La participation du public en droit de l’urbanisme et de l’environnement, Bruxelles, Larcier, 2007.
  • [28]
    S. Rui, « Démocratie participative », op. cit.
  • [29]
    M.-H. Bacqué, Y. Sintomer, « Introduction. Le temps long de la participation », in M.-H. Bacqué, Y. Sintomer (dir.), La démocratie participative. Histoire et généalogie, Paris, La Découverte, 2011, p. 12.
  • [30]
    Ibidem, p. 17 ; Y. Sintomer, « Délibération et participation : affinité élective ou concepts en tension ? », Participations, n° 1, 2011/1, p. 256.
  • [31]
    M. Reuchamps, D. Caluwaerts, « Le tournant participatif et délibératif », in F. Claisse, C. Laviolette, M. Reuchamps, C. Ruyters (dir.), La participation en action, Bruxelles, P.I.E.-Peter Lang, 2013, p. 9. Sur l’articulation des concepts de démocratie participative et délibérative, cf. également A. Bouvier, « Démocratie délibérative, démocratie débattante, démocratie participative », Revue européenne des sciences sociales, n° 136, 2007, p. 5-34 ; Y. Sintomer, « Démocratie participative, démocratie délibérative : l’histoire contrastée de deux catégories émergentes », in M.-H. Bacqué, Y. Sintomer (dir.), La démocratie participative, op. cit., p. 113-134.
  • [32]
    Sur l’émergence des théories de la démocratie délibérative, cf. A. Floridia, « The Origins of the Deliberative Turn », in A. Bächtiger, J. S. Dryzek, J. Mansbridge, M. E. Warren (dir.), The Oxford Handbook of Deliberative Democracy, op. cit., p. 35-51.
  • [33]
    B. Manin, « Volonté générale ou délibération ? », op. cit., p. 81-82.
  • [34]
    L. Blondiaux, Y. Sintomer, « L’impératif délibératif », Rue Descartes, n° 63, 2009, p. 28.
  • [35]
    Ibidem, p. 31-32.
  • [36]
    J. Habermas, Droit et démocratie. Entre faits et normes, Paris, Gallimard, 1997, p. 323.
  • [37]
    J. Cohen, « Délibération et légitimité démocratique », in C. Girard, A. Le Goff (éd.), La démocratie délibérative. Anthologie de textes fondamentaux, op. cit., p. 207-241. Loïc Blondiaux et Yves Sintomer soulignent que si une participation citoyenne accrue est un enjeu du paradigme délibératif, les institutions représentatives n’en restent pas moins le lieu formel de décision : « La place centrale de la représentation dans la politique contemporaine n’est pas considérée comme posant problème, dans la mesure où elle tend à se dissoudre dans la délibération, et ce d’autant plus que se multiplient des dispositifs délibératifs sur toutes les questions publiques » (L. Blondiaux, Y. Sintomer, « L’impératif délibératif », op. cit., p. 32).
  • [38]
    Pour une analyse plus approfondie de ce concept, cf. J. Steiner, The Foundations of Deliberative Democracy, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, p. 139-152 (chapitre 6 : « Force of better argument in deliberation »).
  • [39]
    Cf., notamment, R. E. Goodin,Innovating Democracy: Democratic Theory and Practice after the Deliberative Turn, Oxford, Oxford University Press, 2012, p. 266.
  • [40]
    J. Cohen, « Reflections on Deliberative Democracy », in T. Christiano,J. Christman (dir.), Contemporary Debates in Political Philosophy, Oxford, Wiley-Blackwell, p. 249.
  • [41]
    S. Elstub, « Deliberative and Participatory Democracy », op. cit., p. 191-192.
  • [42]
    H. Landemore, Democratic Reason: Politics, Collective Intelligence, and the Rule of the Many, Princeton, Princeton University Press, 2013.
  • [43]
    H. Pourtois, « Les élections sont-elles essentielles à la démocratie ? », Philosophies, tome 43, n° 2, 2016, p. 414.
  • [44]
    C. Larssen, « L’érosion électorale ? Ou la participation du public au processus décisionnel : pièges et paradoxes de proximité », in Les élections dans tous leurs états : bilan, enjeux et perspectives du droit électoral, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 458-465.
  • [45]
    Les mini-publics sont considérés comme étant « suffisamment petits pour être véritablement délibératifs, et suffisamment représentatifs pour être véritablement démocratiques » (« small enough to be genuinely deliberative, and representative enough to be genuinely democratic » : R. E. Goodin, J. S. Dryzek, « Deliberative Impacts: The Macro-Political Uptake of Mini-Publics », Politics & Society, tome 34, n° 2, 2006, p. 220).
  • [46]
    B. Manin, « Résilience de la démocratie représentative », Revue de la faculté de droit de l’Université de Liège, 2015, p. 423-424.
  • [47]
    M.-H. Bacqué, Y. Sintomer, « Introduction. Le temps long de la participation », op. cit., p. 12.
  • [48]
    Pour un passage en revue des diverses expériences délibératives, cf. notamment M. Reuchamps, J. Suiter (dir.), Constitutional Deliberative Democracy in Europe, Colchester, ECPR Press, 2016 ; D. Courant, Y. Sintomer, « Le tirage au sort au XXIe siècle. Actualité de l’expérimentation démocratique », Participations, n° 1, 2019, p. 5-32.
  • [49]
    Sur ces exemples, cf. D. Van Reybrouck, Contre les élections, op. cit.
  • [50]
    Cf., par exemple, J. Vrydagh, S. Devillers, D. Talukder, V. Jacquet, J. Bottin, « Les mini-publics en Belgique (2001-2018) : expériences de panels citoyens délibératifs », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2477-2478, 2021. Cette contribution permet de démontrer que la plupart des mini-publics ne sont pas initiés par la société civile, mais par les institutions publiques. En outre, ils sont loin d’être l’apanage des collectivités locales, qui y recourent moins que l’autorité fédérale et les collectivités politiques fédérées (ibidem, p. 58-59).
  • [51]
    Le G1000 est une expérience citoyenne de démocratie délibérative, organisée dans le contexte de la crise politique de 2010-2011 (marquée par un processus de négociation de la sixième réforme de l’État et de formation du gouvernement fédéral long de 541 jours), qui visait à réunir 1 000 citoyens tirés au sort en vue discuter ensemble de l’avenir de la Belgique. Ce sont finalement 704 personnes qui ont délibéré, par panels de dix, sur les trois thèmes sélectionnés : l’immigration, la sécurité sociale, la répartition des richesses. Les conclusions formulées à l’issue du sommet citoyen ont ensuite été transformées en recommandations par un groupe plus restreint de citoyens tirés au sort, le G32, avant d’être remises aux différentes assemblées parlementaires du pays. Pour plus de détails sur le processus, cf. M. Reuchamps, D. Caluwaerts, J. Dodeigne, V. Jacquet, J. Moskovic, S. Devillers, « Le G1000 : une expérience citoyenne de démocratie délibérative », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2344-2345, 2017.
  • [52]
    À cet égard, cf. V. Jacquet, N. Schiffino, M. Reuchamps, D. Latinis, « Union sacrée ou union forcée ? Les parlementaires belges face à l’impératif délibératif », Participations, n° 13, 2015, p. 171-203, qui démontre que, encore récemment, une large portion des élus de la Chambre des représentants montrait quelques réticences à l’idée du développement des mécanismes de participation du public. Cf. également C. Niessen, « When Citizen Deliberation Enters Real Politics: How Politicians and Stakeholders Envision the Place of a Deliberative Mini-Public in Political Decision-Making », Policy Sciences, n° 3, 2019, p. 481-503.
  • [53]
    « Au nom du peuple belge, le Congrès national de la Belgique déclare que le peuple belge adopte, pour forme de son gouvernement, la monarchie constitutionnelle représentative, sous un chef héréditaire. »
  • [54]
    Sur les principes aristocratiques qui transcendent la Constitution de 1831, cf. A.-E. Bourgaux, La démocratisation du gouvernement représentatif en Belgique, op. cit., p. 198-272. « Toute la culture politique des congressistes semble les guider vers une seule et même destination : le monopole par le plus petit nombre du gouvernement du plus grand nombre. De la foi en la prédominance des hommes doués de raison à l’attachement pour les vertus filtrantes de la représentation, en passant par la propension romantique à glorifier un passé fondé sur la division de la société en ordres, rien ne les en détourne » (ibidem, p. 198).
  • [55]
    D. Luytens, P. Magnette, « L’idée du parlementarisme en Belgique », in E. Gerard, E. Witte, E. Gubin, J.-P. Nandrin (dir.), Histoire de la Chambre des représentants de Belgique, 1830-2002, Bruxelles, Chambre des représentants, 2003, p. 22.
  • [56]
    É. Huyttens (éd.), Discussions du Congrès national de Belgique (1830-1831), tome 2, Bruxelles, Société typographique belge, 1844, p. 27-30.
  • [57]
    Il convient néanmoins de noter que, lors des discussions autour de la révision constitutionnelle de 1919-1921, qui se présentait expressément comme une phase de démocratisation de l’État, le référendum fait partie des propositions de réforme sous diverses formules. Finalement, le constituant se limite à consacrer le suffrage universel masculin, renonçant à quelques voix près à des réformes plus ambitieuses au niveau participatif. À l’occasion des débats qui ont entouré cette réforme, la question a été posée de savoir si la consultation du peuple en dehors de l’élection était compatible avec le texte constitutionnel indépendamment de toute révision, sans qu’il n’y soit toutefois apporté de réponse claire. À ce sujet, cf. A.-E. Bourgaux, « La consultation populaire régionale : résistance ou résilience de la démocratie représentative belge ? », Administration publique, n° 4, 2015, p. 540-549.
  • [58]
    Le fait que seules les autorités constituées puissent adresser des pétitions en nom collectif et que les pétitions doivent être écrites et signées sont autant de mesures susceptibles d’avoir un effet inhibiteur sur les pétitionnaires. À ce propos, cf. ibidem, p. 255-258.
  • [59]
    Conseil d’État, Avis n° 33.789/AV et 33.791/AV, 30 octobre 2002 (concernant deux propositions de décrets flamands : Vlaams Parlement, Voorstel van decreet houdende instelling van een deelstatelijke volksraadpleging kaderend in de procedure van onderzoek, n° 1131/1, 25 mars 2002 ; Vlaams Parlement, Voorstel van decreet houdende de inrichting van een Vlaamse volksraadpleging, n° 1176/1, 30 avril 2002) ; Conseil d’État, Avis n° 37.804/AG, 23 novembre 2004 (concernant Chambre des représentants, Proposition de loi portant organisation d’une consultation populaire sur le traité établissant une constitution pour l’Europe, n° 281/1, 14 octobre 2003).
  • [60]
    Sur la question des droits et libertés constitutionnellement consacrés comme fondement de la participation citoyenne, cf. notamment E. Lancksweerdt, « Burgerparticipatie bekeken vanuit een Belgisch constitutioneel perspectief », Vereniging voor de vergelijkende studie van het recht van België en Nederland (dir.), Preadviezen, La Haye, Boom Juridisch, 2018, p. 24-25. Cette question s’est notamment posée avec acuité à propos de la participation citoyenne en matière environnementale et de ses rapports avec le droit à un environnement sain consacré à l’article 23 de la Constitution ; à cet égard, cf. B. Jadot, « Les cas dans lesquels une enquête publique doit être organisée en matière d’urbanisme et d’environnement : l’inexorable évolution », in B. Jadot (dir.), La participation du public au processus de décision en matière d’environnement et d’urbanisme, Bruxelles, Bruylant, 2005, p. 85-86.
  • [61]
    B. Manin, Principes du gouvernement représentatif, op. cit., p. 214 et suivantes.
  • [62]
    À cet égard, cf. J. Clarenne, « Réviser l’article 57 de la Constitution. Pour une démocratie plus ouverte aux processus délibératifs au sein des Parlements », Chroniques de droit public, n° 2, 2019, p. 281-290.
  • [63]
    Cf., notamment, Conseil d’État, Avis n° 19.072/9, 19 mai 1989 (concernant Sénat, Proposition de loi instituant une consultation populaire sur l’attribution d’une mission constituante au Parlement européen, n° 595/1, 23 février 1989) ; Conseil d’État, Avis n° 33.789/AV et 33.791/AV, 30 octobre 2002 (précité) ; Conseil d’État, Avis n° 37.804/AG, 23 novembre 2004 (précité) ; Conseil d’État, Avis n° 46.238/2, 14 avril 2009 (concernant Parlement wallon, Proposition de décret instaurant la consultation populaire régionale, n° 944/1, 2 mars 2009). Pour une synthèse récente de la légisprudence et de la doctrine en la matière, cf. H. Dumont, M. El Berhoumi, « Les référendums constitutionnels et constituants dans l’État plurinational belge : un parcours d’obstacles insurmontables ? », in A. Binette, P. Taillon (dir.), La démocratie référendaire dans les ensembles plurinationaux, Québec, Presses de l’université de Laval, 2018, p. 313-382.
  • [64]
    Conseil d’État, Avis n° 15.853/AG, 15.854/AG, 15.969/AG, 15.970/AG et 15.971/AG, 15 mai 1985 (concernant cinq propositions de loi visant à instaurer la consultation populaire ou le référendum : Chambre des représentants, Proposition de loi érigeant la consultation populaire en institution, n° 49/1, 4 février 1982 ; Chambre des représentants, Proposition de loi visant à institutionnaliser le référendum d’initiative populaire, n° 429/1, 10 novembre 1982 ; Chambre des représentants, Proposition de loi instituant la consultation populaire, n° 578/1, 1er mars 1983 ; Chambre des représentants, Proposition de loi instituant la consultation populaire au sujet des missiles de croisière, n° 783/1, 17 novembre 1983 ; Chambre des représentants, Proposition de loi organisant les consultations de la population ou référendums, n° 813/1, 21 décembre 1983). Sur cet avis, cf. également T. Gaudin, V. Jacquet, J.-B. Pilet, M. Reuchamps, « Consultation populaire et référendum en Belgique », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2390-2391, 2018, p. 18-19.
  • [65]
    Conseil d’État, Avis n° 15.853/AG, 15.854/AG, 15.969/AG, 15.970/AG et 15.971/AG, 15 mai 1985 (précité), p. 75, 84 et 87.
  • [66]
    Pour reprendre la définition du comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique, l’initiative populaire constitue « un procédé de démocratie directe qui permet à une fraction de la population de saisir l’assemblée parlementaire ou les assemblées parlementaires d’une proposition de révision constitutionnelle ou d’une proposition de loi, de décret ou d’ordonnance et, par là même, de déclencher la procédure parlementaire » (Chambre des représentants et Sénat, Comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique, Le renouveau politique. Démocratie directe (Référendum, consultation populaire, initiative populaire et droit de pétition). Avis, n° 797/2 (Chambre) et n° 416/2 (Sénat), 20 mars 2001, p. 8).
  • [67]
    Conseil d’État, Avis n° 25.898/8, 21 janvier 1997 (concernant Vlaams Parlement, Voorstel van decreet houdende invoering van een nieuwe wettelijke bepaling genaamd “overweging van decreet”, n° 470/1, 4 novembre 1996).
  • [68]
    M. Elst, « Burgers schrijven wetten. Enkele beschouwingen over het volksinitiatief, het versterkt petitierecht en de volksraadpleging », in M. Adams, P. Popelier (dir.), Recht en democratie. De democratische verbeelding in het recht, Anvers, Intersentia, 2004, p. 293.
  • [69]
    Chambre des représentants et Sénat, Comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique, Le renouveau politique. Démocratie directe (Référendum, consultation populaire, initiative populaire et droit de pétition). Avis, n° 797/2 (Chambre) et n° 416/2 (Sénat), 20 mars 2001, p. 13.
  • [70]
    Conseil d’État, Avis n° 15.853/AG, 15.854/AG, 15.969/AG, 15.970/AG et 15.971/AG, 15 mai 1985 (précité), p. 83.
  • [71]
    Ibidem, p. 112 et 113.
  • [72]
    Ibidem, p. 110.
  • [73]
    Conseil d’État, Avis n° 33.789/AV et 33.791/AV, 30 octobre 2002 (précité) ; Conseil d’État, Avis n° 37.804/AG, 23 novembre 2004 (précité). Le Conseil d’État indique : « Même si l’on invoque le caractère purement consultatif de la consultation populaire, il est clair que l’avis émanant de la population même ne peut pas être comparé à d’autres avis parfois recueillis, soit en vertu d’une obligation légale, soit volontairement » (ibidem, p. 4).
  • [74]
    Conseil d’État, Avis n° 33.789/AV et 33.791/AV, 30 octobre 2002 (précité) ; Conseil d’État, Avis n° 37.804/AG, 23 novembre 2004 (précité).
  • [75]
    H. Dumont, « Le concept de démocratie représentative : de Sieyès à la Constitution belge de 1831 », in F. Bouhon, M. Reuchamps (dir.), Les systèmes électoraux de la Belgique, Bruxelles, Bruylant, 2012, p. 55.
  • [76]
    Ibidem.
  • [77]
    Chambre des représentants et Sénat, Comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique, Le renouveau politique. Démocratie directe (Référendum, consultation populaire, initiative populaire et droit de pétition). Avis, n° 797/2 (Chambre) et n° 416/2 (Sénat), 20 mars 2001, p. 14. Dans cet avis, une partie des experts va toutefois plus loin. Quand bien même on s’en tiendrait à une lecture formaliste de la consultation populaire, celle-ci constituerait une modification du « schéma constitutionnel d’élaboration des normes ». La Constitution n’aurait pas pour seul objet de désigner les autorités compétentes pour adopter des normes, mais aussi de fixer les modalités d’élaboration de ces normes. Or ces modalités ne pourraient être complétées ou précisées « que dans la mesure prévue par la Constitution et à la condition de ne pas remettre en cause le cadre procédural établi par celle-ci » (ibidem, p. 17).
  • [78]
    Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (concernant Parlement wallon, Proposition de décret institutionnalisant l’assemblée citoyenne et le conseil citoyen, n° 221/1, 1er septembre 2020 et n° 221/1bis, 2 septembre 2020).
  • [79]
    Ibidem, p. 14.
  • [80]
    Ibidem, p. 14.
  • [81]
    Ibidem, p. 16.
  • [82]
    Ibidem, p. 16.
  • [83]
    Le règlement d’assemblée est le support juridique privilégié, mais pas exclusif, de la fixation par un parlement des modalités d’exercice de ses attributions. À ce sujet, cf. N. Lagasse, K. Muylle,M. Van der Hulst, « Les actes non législatifs d’un Parlement : sources de hard law et de soft law », in Hachez, Y. Cartuyvels, H. Dumont et al. (dir.), Les sources du droit revisitées, tome 2 : Normes internes infraconstitutionnelles, Limal, Anthemis, 2012, p. 227-268. Cf. également J.-M. Duffau, Les règlements des assemblées parlementaires belges, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, p. 2-3.
  • [84]
    Cf. également l’article 44 de la loi du 31 décembre 1983 de réformes institutionnelles pour la Communauté germanophone (Moniteur belge, 18 janvier 1984) et l’article 28 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises (Moniteur belge, 14 janvier 1989). Nous verrons dans la suite de l’exposé que le régime juridique de l’autonomie des parlements fédérés diffère toutefois à certains égards de celui des Chambres fédérales.
  • [85]
    L. Domingo, Les actes internes du parlement. Étude sur l’autonomie parlementaire (France, Espagne, Italie), Clermont-Ferrand/Paris, Fondation Varenne/Librairie générale de droit et de jurisprudence, 2008, p. 172.
  • [86]
    Cf., notamment, Conseil d’État, Avis n° 18.502/2, 8 juin 1988 (concernant une proposition devenue la loi du 18 juillet 1991 organique du contrôle des services de police et de renseignements, Moniteur belge, 26 juillet 1991) ; Conseil d’État, Avis n° 40.390/2, 5 juillet 2006 (concernant Sénat, Projet de loi instaurant un comité parlementaire chargé du suivi législatif, n° 648/1, 26 avril 2004) ; Conseil d’État, Avis n° 53.935/AG, 27 août 2013 (concernant Sénat, Proposition de loi créant une commission fédérale de déontologie, n° 2245/1, 25 juillet 2013) ; Conseil d’État, Avis n° 58.324/2, 16 novembre 2015 (concernant un avant-projet de décret wallon modifiant le décret du 15 décembre 2011 portant organisation du budget et de la comptabilité des services du gouvernement wallon, le décret du 5 mars 2008 portant constitution de l’Agence wallonne de l’air et du climat et le Code wallon du logement et de l’habitat durable) ; Conseil d’État, Avis n° 60.450/4, 7 décembre 2016 (concernant Chambre des représentants, Projet de loi de programmation militaire des investissements pour la période 2016-2030, n° 2137/1, 7 novembre 2016) ; Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité). Plus généralement, cf. P. Wigny, Propos constitutionnels, Bruxelles, Bruylant, 1963, p. 226 ; H. Van Impe, « De specifieke kenmerken van het Belgisch parlementair recht », Miscellanea W. J. Ganshof van der Meersch, tome 3, Bruxelles, 1972, p. 321 ; J. Velu, Droit public, tome 1 : Le statut des gouvernants, Bruxelles, Bruylant, 1986, p. 523.
  • [87]
    Si la voie réglementaire apparaissait comme la seule option disponible sur le plan juridique, elle présentait également un avantage politique incident, dans la mesure où la réglementation échappait à toute possibilité de contestation devant une juridiction (J. Vrydagh, J. Bottin, M. Reuchamps, F. Bouhon, M. Devillers, « Les commissions délibératives entre parlementaires et citoyens tirés au sort au sein des assemblées bruxelloises », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2492, 2021, p. 14).
  • [88]
    Pour plus de détails sur la tension entre autonomie et légalité, cf. J. Clarenne,C. Romainville, « La légalité face à l’autonomie d’organisation des assemblées parlementaires et des gouvernements », in L. Detroux, M. El Berhoumi, B. Lombaert (dir.), La légalité : un principe de la démocratie belge en péril ?, Bruxelles, Larcier, 2019, p. 423-476.
  • [89]
    Conseil d’État, Avis n° 6.765, 10 avril 1959 (concernant un avant-projet de loi organique des Instituts de radiodiffusion-télévision belge). Cf. J. Velu, Droit public, tome 1, op. cit., p. 524 ; J. Velaers, De Grondwet, een artikelsgewijze commentaar, tome 2 : De machten (de federale Staat, de Gemeenschappen en de Gewesten), Bruges, La Charte, 2019, p. 265. Une autre hypothèse d’ingérence législative dans le domaine de l’autonomie d’organisation des parlements est communément admise : l’uniformité de situation ou de procédure entre les deux Chambres fédérales.
  • [90]
    Le caractère obligatoire du recours à la loi est précisé dans certains avis du Conseil d’État, qui souligne que « dans certaines hypothèses, il a cependant été admis que le législateur intervienne – et même doive intervenir – dans un domaine qui relève du “mode suivant lequel [chaque chambre] exerce ses attributions” » (Conseil d’État, Avis n° 40.390/2, 5 juillet 2006 (précité), p. 4 ; Conseil d’État, Avis n° 58.324/2, 16 novembre 2015 (précité), p. 5 ; nous soulignons).
  • [91]
    Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 20. Cf. également Conseil d’État, Avis n° 48.754/AG/2 et 48.755/AG/2, 15 décembre 2010 (concernant deux avant-projets de décret de la Communauté française portant assentiment à l’accord de coopération conclu le 9 septembre 2010 entre la Communauté française et la Région wallonne portant création d’un service de médiation commun à la Communauté française et à la Région wallonne) ; Conseil d’État, Avis n° 40.390/2, 5 juillet 2006 (précité).
  • [92]
    Conseil d’État, Avis n° 59.014/3 et 59.015/3, 24 mars 2016 (concernant Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance spéciale modifiant les modalités d’exercice du droit de pétition, n° 262/1, 24 novembre 2015 ; Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative au droit d’être entendu dans le cadre d’une pétition adressée au Parlement, n° 302/1, 5 février 2016), p. 20.
  • [93]
    K. Muylle, « Kroniek parlementair recht », Tijdschrift voor Bestuurswetenschappen en Publiekrecht, n° 4, 2020, p. 208.
  • [94]
    Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 16.
  • [95]
    Il est à noter d’ailleurs que l’habilitation peut parfois même être explicite, comme c’est le cas en ce qui concerne la consultation populaire : il est donné aux Régions le pouvoir de régler par décret spécial ou ordonnance spéciale le régime juridique qui s’appliquera (article 39bis de la Constitution).
  • [96]
    En ce sens, cf. J. Clarenne, « Réviser l’article 57 de la Constitution », op. cit., p. 281-290 ; H. Dumont, « De la crise du principe de légalité à son redéploiement à l’aune d’un nouvel équilibre entre État de droit et démocratie », in L. Detroux, M. ElBerhoumi, B. Lombaert (dir.),La légalité, op. cit., p. 851 ; M. Delnoy, La participation du public en droit de l’urbanisme et de l’environnement, op. cit., p. 677.
  • [97]
    Articles 118, § 2, et 123, § 2, de la Constitution. Cf. Q. Peiffer, « L’autonomie constitutive des entités fédérées », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2350-2351, 2017, p. 8.
  • [98]
    Article 35, § 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles (Moniteur belge, 15 août 1980).
  • [99]
    Article 28, alinéa 4, de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.
  • [100]
    Q. Peiffer, « L’autonomie constitutive des entités fédérées », op. cit., p. 33.
  • [101]
    M. Uyttendaele, « L’autonomie constitutive en droit fédéral belge. Réflexions sur l’unicité du pouvoir constituant dans un État fédéral », Administration publique - trimestriel, n° 4, 1993, p. 227.
  • [102]
    F. Tulkens, « L’autonomie constitutive : un nouveau concept de droit constitutionnel belge ? », Administration publique - trimestriel, n° 2-3, 1994, p. 160.
  • [103]
    Cet aspect ne fait toutefois pas partie de l’autonomie constitutive de la Région de Bruxelles-Capitale.
  • [104]
    Cf. l’article 49 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et l’article 31bis de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.
  • [105]
    Conseil d’État, Avis n° 26.693/1/V, 26.694/1/V à 26.695/1/V, 21 août 1997 (concernant plusieurs propositions de décret flamand relatives au droit de pétition : Vlaams Parlement, Voorstel van bijzonder decreet tot wijziging van artikel 41 van de bijzondere wet van 8 augustus 1980 tot hervorming der instellingen, n° 497/1, 4 décembre 1996 ; Vlaams Parlement, Voorstel van decreet houdende regeling van de bij het Vlaams Parlement ingediende verzoekschriften, n° 498/1, 4 décembre 1996 ; Vlaams Parlement, Voorstel van bijzonder decreet houdende wijziging van artikel 41 van de bijzondere wet tot hervorming der instellingen, wat het verzoekschrift betreft, n° 500/1, 5 décembre 1996), p. 4-5 ; Q. Peiffer, « L’autonomie constitutive de la Région de Bruxelles-Capitale : une première ordonnance spéciale symbolique mais riche d’enseignements », Journal des tribunaux, n° 28, 2015, p. 609-613. Les réformes législatives entreprises ont finalement reçu un brevet de constitutionnalité par la section de législation du Conseil d’État (cf. infra).
  • [106]
    Conseil d’État, Avis n° 63.347/2, 25 juin 2018 (concernant Assemblée de la Commission communautaire française, Proposition de décret visant à introduire la faculté de créer des commissions mixtes composées de citoyens tirés au sort et de députés francophones bruxellois, document non reproduit dans les documents parlementaires, date inconnue), p. 3. La proposition de décret a donc été abandonnée, même si l’essentiel de son contenu a été repris, lors de la législature suivante, dans une proposition de modification du règlement (cf. infra).
  • [107]
    Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 11.
  • [108]
    Il est à noter que cette analyse ne saurait être transposée par analogie au décret de la Communauté germanophone car, à la différence de celui-ci, la proposition de décret wallon n’organise pas la manière dont le Parlement doit traiter les recommandations de la délibération citoyenne, que ce soit au niveau de la délibération de celles-ci ou au niveau du suivi de leur mise en œuvre (cf. infra).
  • [109]
    Pour plus de développements, cf. M. Van Der Hulst, K. Muylle, Le Parlement fédéral. Composition, organisation et fonctionnement, Bruxelles, Larcier, 2021, p. 150.
  • [110]
    Article 28, n° 2, du règlement de la Chambre des représentants.
  • [111]
    Article 78 du règlement du Parlement flamand.
  • [112]
    Article 78, n° 3, du règlement du Parlement flamand.
  • [113]
    Vlaams Parlement, Commissie ad hoc Armoede en Uitsluiting, Maatschappelijke beleidsnota. Armoede en sociale uitsluiting, n° 929/1, 9 février 1998.
  • [114]
    Vlaams Parlement, Commissie ad hoc Milieu en Gezondheid, Maatschappelijke beleidsnota. Milieu en Gezondheid, n° 740/1, 6 juin 2001.
  • [115]
    Vlaams Parlement, Commissie ad hoc Hoger Onderwijs, Maatschappelijke beleidsnota over de hervorming van het hoger onderwijs in Vlaanderen, n° 591/1, 25 juin 2010.
  • [116]
    « Themadebat over de evaluatie en verdere uitvoering van het Vlaamse coronabeleid » : commission ad hoc créée le 27 mai 2020.
  • [117]
  • [118]
    L’origine (coutumière) du droit de pétition est souvent située au cours du Moyen Âge, alors que les États généraux adressaient des griefs à leurs représentants. À ce propos, cf. Y.-A. Durelle-Marc, « Nature et origines du droit de pétition », Revue administrative, n° spécial (« L’individu face au pouvoir : les pétitions aux assemblées parlementaires »), 2008, p. 47-60 ; J.-P. Dionnet, « La contribution de la pétition à l’évolution politique dans l’histoire contemporaine : évocation d’une difficile intégration », Droits, n° 37, 2003, p. 173-190 ; C. Riezebos, Recht van petitie. Een rechtsvergelijkend onderzoek naar een juridische mogelijkheid van toegang tot de overheid in Nederland en Duitsland, Zwolle, Tjeensk-Willkink, 1992, p. 9-65.
  • [119]
    Vers la fin du XXe siècle, le constat est tiré que le droit de pétition fédéral est devenu « un moyen d’expression obsolète entre les mains du citoyen » (P. Vandernacht, « L’activité parlementaire des Chambres fédérales en 1993 », Revue belge de droit constitutionnel, 1994, p. 402).
  • [120]
    S’il consacre le droit de pétition dans sa généralité, l’article 28 de la Constitution s’applique également aux pétitions adressées aux assemblées (A. Heraut, G. Pijcke, « Le droit de pétition », in M. Verdussen, N. Bonbled (dir.), Les droits constitutionnels en Belgique, Bruxelles, Bruylant, 2011, p. 690). Cf. également C. Horevoets, « Article 28 », in M. Verdussen (dir.), La Constitution belge. Lignes et entrelignes, Bruxelles, Le Cri, 2004, p. 114 ; L. Veny, S. Castelain, « Het petitierecht in het Europa van de regio’s: een onderzoek naar participatieve democratie », in N. De Batselier (dir.), Levende democratie. De kracht van een Parlement in de 21ste eeuw, Tielt, Lannoo, 2004, p. 144.
  • [121]
    On pense notamment aux exigences d’identification des signatures (nom, prénoms, adresse, date de naissance) ou aux conditions de recevabilité additionnelles telles que le fait qu’il soit exigé que la pétition porte sur une matière qui relève de la compétence de la collectivité politique dont le parlement est l’organe ou, à tout le moins, qu’elle concerne ses intérêts, qu’elle contienne un exposé des motifs, qu’elle contienne une demande concrète, qu’elle soit conforme aux droits fondamentaux, etc.
  • [122]
    Article 123, § 8, du règlement commun au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune. Par une modification récente de son règlement, la Chambre des représentants a inscrit la possibilité d’examiner en séance plénière le rapport qui doit être réalisé sur chaque pétition (article 143, § 2, du règlement de la Chambre des représentants). Cela ne concerne toutefois pas la possibilité d’entendre le pétitionnaire en plénière.
  • [123]
    Tel est ainsi le cas au niveau flamand, où l’assemblée plénière doit se prononcer sur les conclusions de la commission compétente, en vue de garantir que le Parlement dans son ensemble endosse la décision de la commission (cf. l’article 101, § 9, du règlement du Parlement flamand ; M. Elst, « De burger als bron van recht », op. cit., p. 263).
  • [124]
    Décret spécial flamand du 14 juillet 1998 modifiant l’article 41 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles (Moniteur belge, 16 septembre 1998) ; Décret flamand du 14 juillet 1998 relatif aux requêtes présentées au Parlement flamand (Moniteur belge, 15 août 1998).
  • [125]
    Loi du 2 mai 2019 relative aux pétitions adressées à la Chambre des représentants (Moniteur belge, 5 juin 2019).
  • [126]
    Cf. l’article 118, § 2, de la Constitution et les articles 35, § 3, et 49 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. L’autonomie constitutive d’une entité fédérée peut se définir comme « la compétence dont cette entité dispose pour régler, dans le cadre fixé par la Constitution et les lois de réformes institutionnelles, l’organisation de ses pouvoirs, le statut de ses gouvernants et de ses gouvernés » (Q. Peiffer, « L’autonomie constitutive des entités fédérées », op. cit., p. 8).
  • [127]
    Décret spécial wallon du 3 septembre 2020 modifiant l’article 41 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles afin de consacrer le droit pour l’auteur d’une pétition d’être entendu (Moniteur belge, 11 septembre 2020) ; Décret spécial wallon du 3 septembre 2020 modifiant l’article 41 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles afin de consacrer le droit pour l’auteur d’une pétition d’être entendu pour les matières réglées en vertu de l’article 138 de la Constitution (Moniteur belge, 11 septembre 2020) ; Décret wallon du 3 septembre 2020 précisant les modalités du droit pour l’auteur d’une pétition d’être entendu (Moniteur belge, 11 septembre 2020) ; Décret wallon du 3 septembre 2020 précisant les modalités du droit pour l’auteur d’une pétition d’être entendu pour les matières réglées en vertu de l’article 138 de la Constitution (Moniteur belge, 11 septembre 2020).
  • [128]
    Ordonnance spéciale bruxelloise du 20 juillet 2016 modifiant les modalités d’exercice du droit de pétition (Moniteur belge, 14 septembre 2016) ; Ordonnance bruxelloise du 20 juillet 2016 relative au droit d’être entendu dans le cadre d’une pétition adressée au Parlement (Moniteur belge, 14 septembre 2016).
  • [129]
    Décret flamand du 6 juillet 2001 relatif aux modalités du droit de présenter des requêtes au Parlement flamand (Moniteur belge, 3 août 2001), tel que modifié par le décret flamand du 8 juillet 2005 (Moniteur belge, 26 octobre 2005) ; Décret spécial flamand du 7 juillet 2006 relatif aux institutions flamandes (Moniteur belge, 17 octobre 2006).
  • [130]
    Il s’agit plus particulièrement de l’article 41 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
  • [131]
    Pour la Chambre des représentants : l’article 4, 1°, de la loi du 2 mai 2019 précitée reconnaît aux pétitionnaires le droit d’être entendu par la Chambre, pour autant que la pétition soit soutenue par « au moins 25 000 personnes physiques domiciliées en Belgique et âgées de 16 ans accomplis, dont au moins 14 500 domiciliées dans la Région flamande, 2 500 dans la Région de Bruxelles-Capitale et 8 000 dans la Région wallonne ». Pour le Parlement wallon : les articles 2 des décrets du 3 septembre 2020 précités fixent à 1 000 signataires le seuil pour que l’auteur de la pétition soit entendu. Pour le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale : l’ordonnance du 20 juillet 2016 précitée a placé la barre à 5 000 signataires. Il est à noter que l’article 123 point 7 du règlement commun au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune a été modifié le 13 décembre 2019 en vue d’abaisser ce seuil à 1 000 signatures. Le seuil précédemment fixé était jugé « manifestement trop élevé dès lors que, depuis son introduction, aucune pétition n’a recueilli un tel nombre de signatures » (Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et Assemblée réunie de la Commission communautaire commune, Proposition de modification du règlement, n° 105/1 et 22/1, 2 décembre 2019, p. 1). Sur le plan juridique, il apparaît nécessaire qu’une modification de l’ordonnance du 20 juillet 2016 vienne consolider cette réduction du seuil. Pour le Parlement flamand : l’article 4 du décret du 6 juillet 2001 précité, tel que modifié par le décret du 8 juillet 2005, place le seuil à 15 000 signataires au moins (« massapetities »).
  • [132]
    Pour le Parlement wallon : article 2, alinéa 6, des décrets spéciaux du 3 septembre 2020 précités. Pour le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale : article 3, alinéa 5, de l’ordonnance spéciale du 20 juillet 2016 précitée. Pour le Parlement flamand : article 17, § 3, du décret spécial du 7 juillet 2006 précité (le délai peut être prolongé d’une fois trois mois, moyennant une motivation communiquée au pétitionnaire).
  • [133]
    Cf. Conseil d’État, Avis n° 59.014/3 et 59.015/3, 24 mars 2016 (précité), p. 18.
  • [134]
    A. Heraut, G. Pijcke, « Le droit de pétition », op. cit., p. 683-684. À la lumière du droit international des droits de l’homme, certains auteurs considèrent également qu’il est du devoir des États de prendre toutes les mesures adéquates afin de garantir l’effectivité du droit (ibidem, p. 685 ; P. De Keyser, « Het petitierecht afgestoft? », Tijdschrift voor Bestuurswetenschappen en Publiekrecht, n° 8, 2000, p. 604).
  • [135]
    Cf. Conseil d’État, Avis n° 26.693/1/V, 26.694/1/V à 26.695/1/V, 21 août 1997 (précité), p. 5. Le législateur, qu’il soit fédéral, décrétal ou ordonnanciel, est en effet lié par l’article 28 de la Constitution, qui consacre le droit de pétition dans sa généralité (« Chacun a le droit d’adresser aux autorités publiques des pétitions signées par une ou plusieurs personnes »). Il est ainsi admis que le droit de pétition ne peut être soumis à d’autres conditions que celles qui découlent de cette disposition. Toutefois, il convient de noter que le comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique avait considéré que la création d’un droit de pétition renforcé – par voie réglementaire ou législative – nécessiterait une révision constitutionnelle « dès lors que ce système n’est pas compatible avec le système représentatif tel qu’il existe actuellement » (cf. Chambre des représentants et Sénat, Comité scientifique adjoint aux commissions pour le Renouveau politique, Le renouveau politique. Démocratie directe (Référendum, consultation populaire, initiative populaire et droit de pétition). Avis, n° 797/2 (Chambre) et n° 416/2 (Sénat), 20 mars 2001, p. 84).
  • [136]
    Cf. Conseil d’État, Avis n° 59.014/3 et 59.015/3, 24 mars 2016 (précité), p. 17.
  • [137]
    J. Van Damme, V. Jacquet, M. Reuchamps, N. Schiffino, « Public Consultation and Participation in Belgium: Directly Engaging Citizens beyond the Ballot Box? », in B. Marleen, D. Aubin (dir.), Policy Analysis in Belgium, Bristol, Policy Press, 2017, p. 215-234.
  • [138]
    Pour une description de ces différents panels, cf. J. Vrydagh, S. Devillers, D. Talukder, V. Jacquet, J. Bottin, « Les mini-publics en Belgique (2001-2018) : expériences de panels citoyens délibératifs », op. cit., p. 5-72. Cette étude reprend par ailleurs un tableau établissant une typologie théorique des différents mini-publics.
  • [139]
    La résolution citoyenne est articulée autour de cinq enjeux clés de la mobilité. À titre d’exemple, le panel a formulé des recommandations à propos du partage de l’espace, de la carte « Mobilité » et du désengorgement de la ville. Cf. « Make your Brussels Mobility. Résolution citoyenne », 19 novembre 2017, www.parlement.brussels.
  • [140]
    « Panel citoyen », www.parlement.brussels.
  • [141]
    Il est à noter que la grande majorité des recommandations adoptées étaient en phase avec les préférences de la majorité des groupes politiques : cf. J. Vrydagh, D. Caluwaerts, « How do Mini-Publics Affect Public Policy? Disentangling the Influences of a Mini-public on Public Policy Using the Sequential Impact Matrix Framework », Representation. Journal of Representative Democracy (en ligne), 2020, p. 1-20.
  • [142]
    La résolution a été votée par 71 voix pour et 4 abstentions (Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Compte rendu intégral, n° 32, 25 mai 2018, p. 105-106). Sur le contenu de la résolution, cf. Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Commission spéciale chargée du suivi du panel citoyen, Proposition de résolution visant à valider le processus du panel citoyen “Make your Brussels Mobility” et à transmettre la résolution citoyenne au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale. Rapport, n° 644/1, 9 mai 2018.
  • [143]
    Le fichier audio de la réponse donnée par le ministre le 25 juin 2018 est disponible sur le site Web du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale.
  • [144]
    Pour plus de développements sur la genèse dudit processus, cf. C. Niessen, M. Reuchamps, « Le dialogue citoyen permanent en Communauté germanophone », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2426, 2019, p. 10-17.
  • [145]
    Article 4, § 1er, alinéa 1er, du décret germanophone du 25 février 2019 instituant un dialogue citoyen permanent en Communauté germanophone (Moniteur belge, 12 avril 2019).
  • [146]
    Article 4, § 1er, alinéa 1er, du décret germanophone du 25 février 2019 précité.
  • [147]
    Article 4, § 2, alinéa 2, du décret germanophone du 25 février 2019 précité. Peuvent également y être associés, avec voix consultative, le secrétaire général du Parlement et le médiateur. La constitution du premier conseil citoyen fait naturellement l’objet de mesures particulières (article 14, alinéa 1er, du décret).
  • [148]
    Cf., sur un dispositif similaire, Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 7.
  • [149]
    « Le nombre de propositions qui peuvent être soumises par le même groupe et par le gouvernement est limité à trois par année civile. Les propositions présentées par les citoyens doivent indiquer les nom, prénoms, adresse et signature de tous les citoyens soutenant cette initiative » (article 7, § 2, alinéa 2, du décret germanophone du 25 février 2019 précité).
  • [150]
    Article 7, § 2, alinéa 4, du décret germanophone du 25 février 2019 précisé. Selon K. Muylle, les larges compétences réglementaires reconnues au conseil citoyen ne sont pas conformes aux principes généraux de droit public ; dès lors qu’il s’agit d’une délégation du pouvoir réglementaire à un organe non responsable politiquement, cela contreviendrait aux principes d’unité du pouvoir réglementaire et de responsabilité politique (K. Muylle, « Kroniek parlementair recht », op. cit., p. 207).
  • [151]
    Article 7, § 3, du décret germanophone du 25 février 2019 précité. II est précisé qu’« au moins deux tiers des membres du conseil citoyen doivent être présents pour que cette décision puisse être prise ».
  • [152]
    Il est compétent pour la fixation du nombre de citoyens composant chaque assemblée citoyenne, qui peut varier entre 25 et 50 membres. C’est à lui que revient également le pouvoir de fixer librement, sur proposition du secrétariat, les modalités du tirage au sort moyennant la prise en compte « d’une représentation équilibrée des sexes et des tranches d’âge, d’un équilibre géographique et d’une mixité socio-économique » (article 3, § 2, du décret germanophone du 25 février 2019 précité). Il est néanmoins libre d’ajouter des critères de sélection lorsque la nature du thème le requiert.
  • [153]
    Les citoyens doivent avoir leur domicile dans le ressort territorial de la Communauté germanophone, être âgés de 16 ans accomplis, ne pas être sous le coup d’une exclusion ou d’une suspension du droit de vote, et ne pas exercer l’un des mandats ou des fonctions jugés incompatibles par le décret.
  • [154]
    Article 3, § 4, alinéa 2, du décret germanophone du 25 février 2019 précité. « Tel pourrait être le cas, par exemple, si le patron d’une entreprise de construction routière est invité à participer à un dialogue sur le thème de la construction routière. En pareille hypothèse, il serait certainement préférable d’écouter l’entrepreneur en tant qu’expert ou partie prenante plutôt que de l’impliquer directement dans les discussions » (Parlament der Deutschsprachigen Gemeinschaft, Dekretvorschlag zur Einführung eines permanenten Bürgerdialogs in der Deutschsprachigen Gemeinschaft, n° 284/1, 18 février 2019, p. 5).
  • [155]
    On peut se demander si la compétence quasi juridictionnelle reconnue au bureau du Parlement peut être analysée comme une sorte de nouveau (mini)contentieux sur des droits politiques. Selon l’article 145 de la Constitution, ce contentieux est du ressort des cours et tribunaux, « sauf les exceptions établies par la loi » (au sens de la loi fédérale).
  • [156]
    Parlament der Deutschsprachigen Gemeinschaft, Dekretvorschlag zur Einführung eines permanenten Bürgerdialogs in der Deutschsprachigen Gemeinschaft, n° 284/1, 18 février 2019, p. 5-6.
  • [157]
    Le législateur germanophone a jugé que le conseil citoyen ne pouvait être soumis à des exigences de quorum aussi élevées, dès lors que ses décisions portaient essentiellement sur des questions d’organisation, et requérait de ce fait une large capacité d’action (Parlament der Deutschsprachigen Gemeinschaft, Dekretvorschlag zur Einführung eines permanenten Bürgerdialogs in der Deutschsprachigen Gemeinschaft, n° 284/1, 18 février 2019, p. 7).
  • [158]
    Article 3, § 5, du décret germanophone du 25 février 2019 précité.
  • [159]
    Si l’existence de l’assemblée citoyenne prend fin une fois les recommandations adoptées, ses membres ont donc quant à eux encore un rôle à jouer au moment de la remise de celles-ci au Parlement.
  • [160]
    Parlament der Deutschsprachigen Gemeinschaft, Dekretvorschlag zur Einführung eines permanenten Bürgerdialogs in der Deutschsprachigen Gemeinschaft, n° 284/1, 18 février 2019, p. 9.
  • [161]
    Ibidem, p. 9.
  • [162]
    Ibidem, p. 9.
  • [163]
    Article 10, alinéa 2, du décret germanophone du 25 février 2019 précité.
  • [164]
    Article 10, alinéa 3, du décret germanophone du 25 février 2019 précité.
  • [165]
    Le Conseil d’État a également exclu cette possibilité à propos d’une proposition de décret wallon (Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 6).
  • [166]
    Conseil d’État, Avis n° 36.627/VR/1, 16 et 30 mars 2004 (concernant une proposition devenue le décret flamand du 7 mai 2004 portant création d’un Vlaams Instituut voor Vrede en Geweldpreventie (Institut flamand pour la paix et la prévention de la violence) auprès du Parlement flamand, Moniteur belge, 18 août 2004). En l’occurrence, les missions consultatives dont l’Institut était chargé – à savoir délivrer des avis en ce qui concerne l’importation, l’exportation et le transit d’armes, de munitions et de produits, matériaux ou technologies y assimilés ou liés – étaient considérées comme étant en lien direct avec la compétence des Communautés et des Régions en matière de conclusion des traités internationaux, prévue à l’article 6, § 1er, VI, alinéa 1er, 4°, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
  • [167]
    Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 7.
  • [168]
    Tout au plus aurait-il pu être régulier que les débats entre les citoyens et les parlementaires, qui marquent la deuxième phase du processus de dialogue citoyen, soient quant à eux régis par le règlement plutôt que par un décret.
  • [169]
    Ibidem. Cette exigence de légalité en matière d’accès des autorités publiques aux données personnelles a d’ailleurs posé question à propos de la nécessité d’accéder au registre national pour procéder au tirage au sort des citoyens membres des commissions délibératives bruxelloises (cf. infra).
  • [170]
    Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 7.
  • [171]
    Ibidem, p. 8-9.
  • [172]
    À ce sujet, cf. J. Vrydagh, J. Bottin, M. Reuchamps, F. Bouhon, M. Devillers, « Les commissions délibératives entre parlementaires et citoyens tirés au sort au sein des assemblées bruxelloises », op. cit., 2021. À ce jour, trois commissions délibératives ont été lancées en région bruxelloise ; elles portent respectivement sur les critères de déploiement de la 5G, sur le sans-abrisme et sur la question du rôle du citoyen en temps de crise (cf. le site Internet mis en place à cet effet : https://democratie.brussels/assemblies).
  • [173]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et Assemblée réunie de la Commission communautaire commune, Proposition de modification du règlement visant à introduire la faculté de créer des commissions délibératives entre députés et citoyens composées de députés et invitant des citoyens tirés au sort à participer à leurs travaux, n° 100/1 et 19/1, 28 novembre 2019, p. 1-2.
  • [174]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance spéciale visant à introduire la faculté de créer des commissions mixtes composées de citoyens tirés au sort et de députés bruxellois, n° 660/1, 22 mars 2018 ; Assemblée de la Commission communautaire française, Proposition de modification du règlement visant à introduire la faculté de créer des commissions mixtes composées de citoyens tirés au sort et de députés bruxellois, n° 94/1, 19 décembre 2017 ; Assemblée de la Commission communautaire française, Proposition de décret visant à introduire la faculté de créer des commissions mixtes composées de citoyens tirés au sort et de députés francophones bruxellois, document non reproduit dans les documents parlementaires, date inconnue. Chacune de ces propositions visait à permettre la création de commissions parlementaires composées pour moitié de députés et pour moitié de citoyens tirés au sort, tous ayant une voix délibérative.
  • [175]
    Il est possible de faire publier sa suggestion sur le site Internent du parlement concerné. Au niveau bruxellois, il est requis que la suggestion soit soutenue par 100 signatures valables. Une suggestion publiée sur le site est soumise à souscription pendant un délai de 6 mois au niveau wallon, et de 1 an au niveau bruxellois.
  • [176]
    En pareille hypothèse, il prend sa décision sur proposition du bureau élargi (au niveau bruxellois) ou sur rapport de la conférence des présidents (au niveau wallon). Les règlements bruxellois précisent que la décision de rejet doit être motivée.
  • [177]
    Article 25/1, § 2, alinéa 2, du règlement commun au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune ; Article 42ter, § 2, alinéa 2, du règlement de l’Assemblée de la Commission communautaire française ; Article 130bis, § 2, alinéa 2, du règlement du Parlement wallon. Au niveau bruxellois, il est prévu que c’est au président de se prononcer sur la recevabilité des suggestions citoyennes.
  • [178]
    Article 25/1 du règlement commun au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune ; Article 42ter du règlement de l’Assemblée de la Commission communautaire française ; Article 130bis du règlement du Parlement wallon.
  • [179]
    Article 130bis, § 8, du règlement du Parlement wallon.
  • [180]
    Vade-mecum adopté le 10 juillet 2020 par l’Assemblée de la COCOF et le 17 juillet 2020 par le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et l’Assemblée réunie de la COCOM, point 14.1.
  • [181]
    Ibidem, point 11.
  • [182]
    Ibidem, point 14.1. Il est prévu que l’équilibre de genre et l’équilibre linguistique (au niveau du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale ou de l’Assemblée réunie de la COCOM) doivent être respectés. À ce stade, la place des députés dans la rédaction n’est pas très claire, car le texte du règlement indique qu’ils élaborent les propositions avec les citoyens, mais cela n’est pas évoqué dans le vade-mecum, pourtant plus détaillé que le règlement sur cette phase.
  • [183]
    Article 25/1, § 13, du règlement commun au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune ; Article 42ter, § 13, du règlement de l’Assemblée de la Commission communautaire française ; Article 130bis, § 15, du règlement du Parlement wallon.
  • [184]
    Lorsqu’une autre commission permanente a été estimée compétente en ce qui concerne certaines des recommandations, celle-ci bénéficie d’un délai de trois mois supplémentaire pour faire rapport.
  • [185]
    Article 25/1, § 15, alinéa 3, du règlement commun au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et à l’Assemblée réunie de Commission communautaire commune ; Article 42ter, § 15, alinéa 3, du règlement de l’Assemblée de la Commission communautaire française ; Article 130bis, § 17, alinéa 3, du règlement du Parlement wallon.
  • [186]
    Parlement wallon, Proposition de modification du règlement du Parlement de Wallonie visant à consacrer la constitution de commissions délibératives entre députés et citoyens tirés au sort, n° 248/1, 15 septembre 2020. Une toute première proposition de modification du règlement avait déjà été déposée en ce sens en février 2016 (Parlement wallon, Proposition de modification du règlement du Parlement de Wallonie visant à introduire la faculté de créer des commissions mixtes composées de citoyens tirés au sort et de députés wallons, n° 415/1, 25 février 2016).
  • [187]
    Ce principe constitutionnel découle de l’article 60 de la Constitution, qui dispose que « chaque Chambre détermine par son règlement le mode suivant lequel elle exerce ses attributions ».
  • [188]
    Cet article est applicable à la Région de Bruxelles-Capitale en vertu de l’article 28 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises.
  • [189]
    Tout au plus existe-t-il une obligation réglementaire que les nominations auxquelles les Chambres doivent procéder se fassent, sauf exception, à la représentation proportionnelle des groupes politiques (article 158, § 1er, du règlement de la Chambre des représentants ; article 77, § 1er, du règlement du Sénat). C’est vraisemblablement en raison de l’absence de disposition légale ou constitutionnelle comparable à l’article 44 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles qu’il n’a pas été contesté – ni par le Conseil d’État, ni par la doctrine – que quatre experts siègent avec voix délibérative au sein de la commission fédérale de contrôle des dépenses électorales, aux côtés des 17 députés fédéraux (article 1er, 4°, de la loi du 4 juillet 1989 relative à la limitation et au contrôle des dépenses électorales engagées pour l’élection de la Chambre des représentants, ainsi qu’au financement et à la comptabilité ouverte des partis politiques, Moniteur belge, 20 juillet 1989 ; article 150, § 1er, alinéa 2, du règlement de la Chambre des représentants). Pour une analyse récente des différentes commissions de contrôle des dépenses électorales, cf. S. Vandenbosch, E. Vandenbossche, « Quis custodiet ipsos custodes ? Étude du contrôle des dépenses électorales en droit belge », Administration publique, n° 1, 2020, p. 28-46.
  • [190]
    Conseil d’État, Avis n° 63.347/2, 25 juin 2018 (précité).
  • [191]
    Assemblée de la Commission communautaire française, Proposition de modification du règlement visant à introduire la faculté de créer des commissions mixtes composées de citoyens tirés au sort et de députés bruxellois, n° 94/1, 19 décembre 2017.
  • [192]
    Chapitre X, b)/1, du règlement de l’Assemblée de la Commission communautaire française. Cf. également l’intitulé de la section g) du chapitre VII du même règlement.
  • [193]
    Conseil d’État, Avis n° 48.754/AG/2 et 48.755/AG/2, 15 décembre 2010 (précité) ; Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité). Dans ce récent avis, le Conseil d’État a précisé qu’il entendait par « personnes tierces » les personnes extérieures au parlement et à son administration : « Ainsi, le greffier et ses agents ne sont pas parlementaires mais des droits et obligations peuvent être créés à leur égard par règlement. Il en va de même, par extension, pour les attachés parlementaires et pour les experts qui secondent le travail du parlement, notamment au sein de commissions d’enquête, dès lors que, précisément en raison du principe de la séparation des pouvoirs, ces activités ne sont pas susceptibles de ressortir au domaine de la norme législative » (ibidem, p. 20).
  • [194]
    Cette décision, intervenue en juillet 2021, n’a pas eu d’incidence sur les trois premières commissions délibératives bruxelloises, dès lors que la composition de celles-ci avait déjà été entérinée.
  • [195]
    Parlement wallon, Proposition de décret relatif au traitement de données à caractère personnel dans le cadre de la constitution par le Parlement de commissions délibératives entre députés et citoyens au sort, n° 620/1, 16 juin 2021 ; Parlement wallon, Proposition de décret relatif au traitement de données à caractère personnel dans le cadre de la mise en œuvre par le Parlement de commissions délibératives entre députés et citoyens au sort pour les matières réglées en vertu de l’article 138 de la Constitution, n° 621/1, 16 juin 2021 ; Assemblée de la Commission communautaire française, Proposition de décret relatif au traitement de données à caractère personnel dans le cadre de la constitution par l’Assemblée de la Commission communautaire française de commissions délibératives entre députés et citoyens au sort, n° 65/1, 16 décembre 2021 ; Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et Assemblée réunie de la Commission communautaire commune, Proposition d’ordonnance conjointe à la Région de Bruxelles-Capitale et à la Commission communautaire commune relative au traitement de données à caractère personnel dans le cadre de la constitution, par le Parlement ou l’Assemblée réunie, de commissions délibératives entre députés et citoyens au sort, n° 479/1 et 102/1, 16 décembre 2021.
  • [196]
    Autorité de protection des données, Avis n° 145/2021, 10 décembre 2021 (reproduit dans Parlement wallon, Propositions de décret relatif au traitement de données à caractère personnel dans le cadre de la constitution par le Parlement de commissions délibératives entre députés et citoyens tirés au sort [et] relatif au traitement de données à caractère personnel dans le cadre de la mise en œuvre par le Parlement de commissions délibératives entre députés et citoyens tirés au sort pour les matières réglées en vertu de l’article 138 de la Constitution. Avis de l’Autorité de protection des données, n° 620/3 et 621/3, 13 septembre 2021).
  • [197]
    Cela semble avoir été récemment confirmé par le Conseil d’État, qui a affirmé à propos de la question de l’obligation pour une assemblée parlementaire de débattre des recommandations d’une assemblée citoyenne que, « à la différence d’une obligation décrétale, une obligation à l’attention du parlement consacrée dans un règlement parlementaire s’analyse en définitive en un ordre que l’assemblée parlementaire s’adresse à elle-même et dont elle demeure maître » (Conseil d’État, Avis n° 68.041/AG, 29 décembre 2020 (précité), p. 16).
  • [198]
    Pour rappel, conformément à l’article 118 de la Constitution, le fonctionnement des parlements est en principe réglé par le législateur spécial – ou le législateur ordinaire pour ce qui concerne le Parlement de la Communauté germanophone.
  • [199]
    Excepté dans la réglementation wallonne sur les commissions délibératives, qui ne prévoit pas, textuellement, que les citoyens sont des « invités ».
  • [200]
    Sénat, Commission du Renouveau démocratique et de la Citoyenneté, Rapport d’information sur la nécessaire modernisation de notre système démocratique en complétant la démocratie représentative par une participation accrue des citoyens dans la prise de décisions aux différents niveaux de pouvoir ainsi qu’au sein de la société. Rapport, n° 117/4, 31 mai 2021.
  1. Introduction
  2. 1. La participation citoyenne au regard des théories démocratiques
    1. 1.1. Un concept inhérent à l’exigence démocratique
    2. 1.2. Le tournant participatif et délibératif
  3. 2. La participation citoyenne au regard du droit constitutionnel belge : opportunités et limites
    1. 2.1. Le spectre du principe représentatif : la participation citoyenne est-elle contraire à la Constitution ?
      1. 2.1.1. Le silence de la Constitution
      2. 2.1.2. L’inconstitutionnalité des outils de démocratie directe : une légisprudence constante
      3. 2.1.3. La question de la constitutionnalité des outils délibératifs : une nouvelle légisprudence en formation ?
    2. 2.2. La question de la formalisation juridique : quel support normatif pour la participation citoyenne à la délibération parlementaire ?
      1. 2.2.1. Le règlement d’assemblée : source privilégiée du fonctionnement parlementaire
      2. 2.2.2. La loi : passage obligé pour la reconnaissance de droits subjectifs ?
      3. 2.2.3. L’autonomie constitutive : dernier maillon d’un corpus normatif morcelé
    3. 2.3. Conclusion
  4. 3. Les outils délibératifs auprès des parlements : état des lieux
    1. 3.1. Les auditions parlementaires de citoyens
    2. 3.2. Le droit de pétition réformé
      1. 3.2.1. Description de l’instrument
      2. 3.2.2. Ancrage juridique de l’instrument
    3. 3.3. Les panels citoyens informels
      1. 3.3.1. Description de l’instrument
      2. 3.3.2. Ancrage juridique de l’instrument
    4. 3.4. Le dialogue citoyen
      1. 3.4.1. Description de l’instrument
      2. 3.4.2. Ancrage juridique de l’instrument
    5. 3.5. Les commissions délibératives
      1. 3.5.1. Description de l’instrument
      2. 3.5.2. Ancrage juridique de l’organe
  5. Conclusion
Julian Clarenne
Cécile Jadot
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
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De multiples initiatives ont vu le jour au cours des dernières décennies pour renouveler les pratiques démocratiques belges en permettant aux citoyens de s’impliquer plus directement dans la gestion des affaires publiques, au-delà des échéances électorales et des canaux traditionnels. Depuis quelques années, ce mouvement connaît une véritable rupture : désormais, il ne s’agit plus seulement de recueillir les avis de la population sur une thématique, mais de permettre à des citoyens d’être en dialogue direct avec des élus dans le cadre d’un processus délibératif.

En l’espace de cinq ans à peine, ce type de participation citoyenne a pris une réelle place dans le paysage parlementaire en Belgique : sous des formes et selon des degrés très variables, la plupart des assemblées du pays ont décidé de faire une place – même limitée – à des citoyens non élus dans leurs discussions et débats.

Ce Courrier hebdomadaire passe au crible du droit constitutionnel belge la participation citoyenne à la délibération parlementaire, afin d’identifier les ressources que celui-ci offre et les obstacles qu’il dresse. Pour ce faire, cette étude analyse les deux questions fondamentales de la constitutionnalité (quelle est la portée et quel est l’impact du principe représentatif sur la participation citoyenne ?) et de la formalisation par le droit (quelles sont les balises et les limites et quels sont les impératifs juridiques qui jalonnent le chemin de l’institutionnalisation de tels processus de participation citoyenne ?). Elle examine également chacun des « outils délibératifs » existant actuellement auprès des assemblées parlementaires belges : les auditions parlementaires, le droit d’être entendu dans le cadre du droit de pétition, les panels citoyens informels, le dialogue citoyen et les commissions délibératives.

Mis en ligne sur Cairn.info le 11/02/2022
https://doi.org/10.3917/cris.2517.0005
ISBN 9782870752777
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