CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Le programme puis la politique du gouvernement fédéral Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD), installé quelques mois après les élections du 25 mai 2014, ont provoqué une vague de contestations au sein du monde associatif et syndical, émanant tant d’acteurs institutionnalisés que d’organes moins structurés ou d’apparition plus récente  [1]. Ainsi, dès le mois de décembre 2014, les syndicats ont organisé nombre de manifestations de protestation. Parallèlement, de nouveaux mouvements sociaux et citoyens ont émergé, tels que Hart boven Hard (HBH), Tout autre chose (TAC), la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés (BxlRefugees) et les Gilets jaunes. S’y est ensuite ajouté le mouvement des marches (notamment estudiantines) pour le climat.

2 Craignant de voir la coalition fédérale au pouvoir être reconduite après les élections du 26 mai 2019 – et cela d’autant plus que les actions syndicales se faisaient plus rares et que des mouvements comme HBH et TAC semblaient tourner au ralenti –, différents acteurs mobilisés contre le gouvernement Michel I ont œuvré, à partir du mois de janvier 2017, à mettre en place une campagne d’information, de sensibilisation et de mobilisation en vue du scrutin à venir : la campagne TAM TAM.

3 La présente livraison du Courrier hebdomadaire propose une analyse détaillée de la campagne TAM TAM. Elle est divisée en six chapitres, consacrés respectivement à la genèse et à la mise en place de TAM TAM (contexte d’émergence, liens avec TAC, acteurs, etc.), au déroulement de la campagne (divisé en trois « saisons » entre février 2018 et mai 2019), à la nature et à l’objectif de TAM TAM, à l’organe central de TAM TAM qu’est le bureau (évolution de la composition, importance de la présence syndicaliste et mutuelliste, etc.), au financement de la campagne et à la communication de TAM TAM.

4 Cette étude repose sur des observations (menées notamment lors de la plupart des réunions du bureau, des assemblées générales et des activités de TAM TAM), des entretiens avec les membres du bureau, des sources écrites internes (courriels et procès-verbaux) ou externes (tracts, affiches, notes, sites Internet, communiqués de presse, messages postés sur les réseaux dits sociaux ou envoyés par liste de diffusion électronique) et des articles de presse.

1. La genèse et la mise en place de TAM TAM

5 TAM TAM voit le jour dans le courant de l’année 2017, époque à laquelle la Belgique est confrontée à une situation critique sur les plans social, climatique et migratoire. L’initiative se situe partiellement dans l’héritage de TAC, même si elle veille clairement à s’en différencier. La phase de préparation et de mise en place de TAM TAM se clôt par une assemblée générale à la mi-décembre 2017, qui fédère les multiples associations partenaires. La campagne proprement dite est lancée au tout début du mois de février 2018.

1.1. Un contexte de crises sociale, climatique et migratoire

6Le contexte politique de l’émergence de la campagne TAM TAM est exactement le même que celui de Hart boven Hard (HBH) et de Tout autre chose (TAC)  [2]. Depuis 2014, le pays est dirigé par le gouvernement fédéral Michel I, composé de partis de droite ou de centre-droit (N-VA/MR/CD&V/Open VLD). La Flandre a un gouvernement assez similaire à sa tête : le gouvernement Bourgeois (N-VA/CD&V/Open VLD). En revanche, la Wallonie et la Communauté française sont gouvernées par des coalitions de centre-gauche : respectivement, le gouvernement Magnette et le gouvernement Demotte III (tous deux PS/CDH). En Région de Bruxelles-Capitale, le gouvernement Vervoort II regroupe six partis (PS/FDF/CDH/Open VLD/SP.A/CD&V).

7 Si le contexte d’émergence de la campagne TAM TAM est identique à celui de TAC, la perspective politique est quant à elle sensiblement différente. Alors que TAC déplorait la configuration politique issue des élections du 25 mai 2014, la campagne TAM TAM a en ligne de mire les élections du 26 mai 2019. Il ne s’agit donc pas de réagir aux résultats d’un récent scrutin, mais de faire campagne pour tenter d’influencer ceux d’un scrutin à venir dans un futur proche.

8 Tout comme TAC, TAM TAM est essentiellement centrée sur le niveau fédéral. Nombre des membres de la campagne, notamment ceux issus de la Fédération générale du travail de Belgique (FGTB), établissent un parallèle entre le gouvernement Michel I et les trois gouvernements dits Martens-Gol dans les années 1980 : les gouvernements nationaux Martens V, VI et VII, qui se sont succédé entre le 17 décembre 1981 et le 9 mai 1988 et qui réunissaient les sociaux-chrétiens (CVP et PSC) et les libéraux (PRL et PVV). À leurs yeux, les similitudes sont fortes : réformes (anti-)sociales (assurance chômage et saut d’index), remise en cause de l’emploi subventionné dans le monde associatif et bras de fer avec les syndicats, le tout dans un contexte international tendu, avec des blocs qui s’opposent (dans les années 1980, la Guerre froide) et une présence terroriste (à l’époque, les Cellules communistes combattantes - CCC) induisant un climat de tension et la présence de l’armée dans les rues.

9 Trois changements politiques d’envergure se produisent entre le début de l’année 2017 et le scrutin de mai 2019 : le premier au niveau wallon et les deux autres au niveau fédéral. Tout d’abord, le 26 juillet 2017, le gouvernement Magnette est remplacé par le gouvernement Borsus (MR/CDH) à la tête de la Wallonie, suite à l’éjection du PS par le CDH de la coalition régionale ; le 18 mars 2019, le nouveau gouvernement devient minoritaire en raison de la défection d’une députée MR. Ensuite, le 9 décembre 2018, suite à la démission de ses membres N-VA, le gouvernement fédéral Michel I fait place au gouvernement Michel II (MR/CD&V/Open VLD). Enfin, quelques jours plus tard, le 18 décembre 2018, le Premier ministre, Charles Michel (MR), annonce sa démission en raison de la menace du dépôt d’une motion de méfiance par l’opposition ; le 21 décembre, le roi Philippe accepte la démission du gouvernement Michel II et le charge d’expédier les affaires courantes jusqu’aux prochaines élections fédérales.

10 Trois autres éléments de contexte doivent également être mentionnés ici. Primo, le mouvement des Gilets jaunes contre la hausse du prix des carburants automobiles : né en France et ayant pris racine en Belgique à partir du 16 novembre 2018, il fait écho aux difficultés financières croissantes d’une partie de la population  [3]. Secundo, le mouvement climatique : il prend notamment pour forme de nombreuses marches citoyennes qui se tiennent à partir de la fin de l’année 2018 et qui appellent les mandataires politiques à adopter des mesures aptes à lutter contre les changements climatiques d’origine anthropique. Tertio, le mouvement de solidarité à l’égard des migrants : il s’incarne entre autres dans la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés (BxlRefugees), qui œuvre d’abord à venir au secours des personnes vivant dans le Parc Maximilien à Bruxelles, puis à coordonner l’hébergement des migrants et enfin à collaborer à l’ouverture d’un centre d’accueil pour réfugiés (à savoir le complexe de la Porte d’Ulysse, à Evere). Ces divers mouvements d’opposition à la politique menée par les gouvernements Michel I et II correspondent à autant de thématiques cruciales pour TAM TAM : la justice sociale, la justice climatique et la justice migratoire.

1.2. De Tout autre chose à TAM TAM

11Un lien de continuité directe existe de facto entre la campagne TAM TAM et TAC, même si les acteurs impliqués dans les deux initiatives tiennent à ce que celles-ci soient clairement distinguées.

12 Apparu en décembre 2014 dans la lignée de son homologue néerlandophone HBH, TAC avait su s’imposer au sein de la société civile comme un vecteur de mobilisation contre les politiques d’austérité et en faveur de la promotion d’alternatives. Mais deux ans après sa naissance, en décembre 2016, ses principaux acteurs dressaient le constat d’une mort clinique du mouvement.

13 Certains membres de TAC résument la vie du mouvement en quatre phases, qui sont communes dans leur succession à nombre de mouvements sociaux.

14 Primo, au retour de l’été 2014, des individus issus de la société civile, du monde artistique et du monde académique se sont rencontrés pour discuter de la possibilité de la mise en place d’un équivalent francophone de HBH.

15Secundo, dès la fin de l’année 2014, TAC a pris de l’ampleur grâce à une percée dans les sphères médiatique et politique et grâce à une mobilisation des associations signataires de l’« appel » lancé par le mouvement. Cette phase d’expansion de TAC a permis de mettre en place des sections locales et des groupes de travail thématiques. Mais elle a eu des effets négatifs en termes de démocratie interne, problématique qui constituait un élément crucial aux yeux des membres. Une méfiance s’est peu à peu installée entre le comité de coordination (constitué des associations) et les sections locales (rassemblant des particuliers), en raison d’une carence de transparence du bureau (ainsi, il était difficile de connaître la composition exacte de celui-ci), de défaillances dans la transmission de l’information entre les différentes instances, et d’un manque d’équilibre entre associations et citoyens.

16Tertio, au cours de l’année 2015, de nombreuses personnes représentant de grandes organisations qui avaient rejoint TAC à ses débuts l’ont quitté, en raison des contraintes inhérentes à une telle implication et de l’efficacité jugée limitée du mouvement. Peu à peu, TAC est entré en phase de déclin. Certes, quelques sections locales ont pris des initiatives (surtout celle de Saint-Gilles/Forest) et des groupes thématiques ont produit des documents de travail (par exemple, les groupes Tout autre école et Travail digne). Mais la crise démocratique traversée par le mouvement s’est approfondie. Rares sont devenus les membres qui acceptaient de se rendre aux réunions du comité de coordination, organe qui était lui-même paralysé par les interventions de certains particuliers remettant largement en question le fonctionnement de TAC. De plus, une réelle tension subsistait au niveau de la communication externe et des actions de TAC, explicitée comme ceci dans une note interne sur la stratégie du mouvement (datant de mars 2016) : « Il apparaît clairement (…) que TAC est partagé entre ceux qui pensent qu’il faut avant tout entrer en résistance (résistance à l’austérité et à la déferlante néolibérale, au démantèlement de la SNCB, etc.) et ceux qui pensent que la création et le développement d’alternatives permettra de tendre vers une société conforme à nos balises ». Plus loin, on lit encore : « Or (…) la principale guerre à mener pour combattre les puissants est la guerre de la communication. Mais il faut s’en donner les moyens pour pouvoir agir de manière professionnelle »  [4].

17Quarto, à partir de 2016, TAC s’est mis en veille. Cependant, le mouvement a encore posté parfois des prises de position sur son site Internet (par exemple, en réaction à l’actualité des Gilets jaunes ou en soutien à la Grève des femmes du 8 mars 2019). De même, le compte Facebook de TAC a régulièrement renseigné les actions et mobilisations des associations partenaires, et a mis en avant des alternatives mises en place dans diverses villes ou pays. Quant au compte Twitter, il a disparu pour réapparaître sous le nom de « Tout autre chose Mouvement citoyen » en novembre 2018 (mais il ne publie rien). Une note interne de mars 2016 indique cependant que « TAC est un lieu irremplaçable en ce sens que des personnes y militent qui ne militeraient nulle part ailleurs si TAC n’existait pas », et précise que certaines de ces personnes continuent de militer, au nom de TAC, au sein d’un groupe thématique, d’une section locale ou d’un autre mouvement né à la suite de TAC.

18 L’impulsion de TAM TAM vient notamment de plusieurs membres de TAC, qui s’engagent en tant que tels dans TAM TAM. Dès les discussions tenues lors des premières réunions initiant la campagne TAM TAM, au début de l’année 2017, est cependant exprimée la volonté nette de se démarquer de TAC, que ce soit en termes de structure, de fonctionnement ou d’objectifs. Pour la plupart des instigateurs de la future campagne, il est hors de question de repartir sur les mêmes bases que TAC ou, plus précisément, de connaître la même évolution que TAC : « Au début de TAC, on voulait montrer que des alternatives existent. Puis c’est parti dans des débats hyper-internes, de structuration et de démocratie locale interne. On doit se concentrer sur des objectifs politiques avec de l’efficacité », indique une de ces personnes  [5]. Par la suite, TAM TAM décidera de couper court à toute impression de filiation étroite entre TAC et TAM TAM en consacrant un item à ce sujet au sein de la « foire aux questions » (FAQ) présente sur son site Internet : « TAC soutient activement la campagne TAM TAM et mettra à la disposition de la campagne ses moyens d’information et de communication. Les associations, signataires et groupes locaux de TAC sont invités à se joindre à TAM TAM en prenant des initiatives à leurs niveaux. Des membres de [la] coordination [de TAC] participent à la coordination de TAM TAM. Cependant, la campagne dépasse largement le seul cadre de TAC »  [6]. Au sein de la campagne TAM TAM et de ses structures, TAC est donc une association partenaire (presque) comme une autre.

19 Toutefois, au cours de la campagne, des critiques se feront entendre quant à un héritage trop évident des pratiques de TAC, que ce soit au niveau du lexique de communication ou de l’identité iconographique. Ainsi, la sémantique « Tout autre chose » resterait fort présente dans les textes écrits (FAQ, tracts, script de la première capsule vidéo, etc.) et le logo de TAM TAM serait trop proche de celui de TAC (cf. infra). De plus, les toutes premières annonces relatives à la campagne sont diffusées via le site Internet de TAC, et non via un site Internet propre.

20 Inévitablement, tout mouvement social hérite, volontairement ou non, de certaines pratiques (notamment sur le plan discursif) des mouvements qui l’ont précédé ou s’inspire, consciemment ou non, de celles d’autres mouvements. Un membre du bureau de TAM TAM – qui par ailleurs insiste fortement pour que la distance avec TAC soit nettement marquée – indique ainsi avoir eu l’idée de lancer une campagne réunissant différents acteurs de la société civile après avoir vu une affiche de la campagne Stop TTIP, qui regroupe plusieurs logos d’associations partenaires  [7]. Il importe pour l’analyste de saisir ces héritages et inspirations pour comprendre une campagne, que ce soit au niveau de son répertoire d’actions  [8] ou du cadrage de sa communication  [9].

1.3. Les acteurs à l’origine de TAM TAM

21Les discussions posant les bases de la campagne TAM TAM prennent place de janvier à décembre 2017. L’initiative en revient essentiellement à trois groupes d’acteurs, qui seront d’ailleurs présentés tels quels sur le site Internet de TAM TAM :

22

« TAM TAM est le nom d’une campagne d’information, de sensibilisation et de mobilisation qui a été suscitée par la convergence de plusieurs volontés :
- celle d’acteurs du monde de la culture, de la santé mentale, ou encore de la justice de rejoindre un mouvement social plus large ;
- celle de la coordination de Tout autre chose désirant lancer une campagne de résistance contre les politiques des gouvernements ;
- celle du groupe thématique “Travail digne” de TAC, soucieux de traiter de la question des réformes de la [sécurité sociale]. »  [10]

23Le premier groupe a pour principale figure Manuela Cadelli, alors présidente de l’Association syndicale des magistrats (ASM). Lors d’un conseil d’administration de l’ASM en décembre 2016, celle-ci a estimé qu’il était essentiel que les acteurs des différents milieux qui subissent des coupes budgétaires se rassemblent et protestent ensemble. En dépit d’une carte blanche qu’elle a publiée dans le journal Le Soir du 3 mars 2016 sous le titre « Le néolibéralisme est un fascisme » et de quelques rassemblements de magistrats s’étant tenus devant le palais de justice de Bruxelles (qui ont, par exemple, réuni 3 000 personnes en mars 2015), elle constate une inaction de la part des mandataires politiques fédéraux quant à un refinancement de la justice. Elle prend alors contact avec Jean-François Tamellini, secrétaire fédéral de la FGTB, qui la dirige vers Felipe Van Keirsbilck, secrétaire général de la Centrale nationale des employés (CNE, affiliée à la Confédération des syndicats chrétiens de Belgique - CSC), qui lui-même la met en lien avec Robert Verteneuil, secrétaire général de la FGTB. Les premiers contacts avec le monde syndical sont ainsi pris.

24 Le deuxième groupe rassemble des membres ou anciens membres de TAC qui, déçus de la perte d’engouement citoyen à l’égard de leur mouvement, décident de créer un nouveau groupe thématique au sein de celui-ci. Le 20 février 2017, le comité de coordination de TAC donne mandat à ce groupe pour « envisager une “campagne de résistance” contre le gouvernement et sa politique ». Ainsi, Éric Buyssens (FGTB), Jo De Leeuw (HBH), Patrick Jonniaux, F. Van Keirsbilck, Gabriel Maissin (Université catholique de Louvain - UCL et Éconosphère) et Clarisse Van Tichelen (Pour des alternatives écologiques, démocratiques et sociales - Réseau ADES) se réunissent le 3 mars 2017 afin d’élaborer une proposition de « campagne anti-néolibérale de TAC » à mener avant les élections de mai 2019  [11].

25 Le troisième groupe est constitué de membres du groupe de travail thématique « Travail digne » de TAC – et, plus spécifiquement, de Pascale Vielle et Marc Zune (tous deux professeurs à l’UCL) –, qui estiment que le gouvernement fédéral Michel I attaque de manière inédite le fonctionnement et le fondement même de la social-démocratie. Ils proposent de produire du contenu scientifique (sous la forme de notes) qui serait ensuite vulgarisé (sous la forme de courtes capsules vidéo didactiques, à l’image de ce que propose DataGueule  [12]), pour mettre en évidence les effets du néo-libéralisme dans une série de pans de la société (travail, sécurité sociale, environnement, concertation sociale, démocratie, etc.).

26 Ces différents acteurs se coordonnent pour organiser une première assemblée générale, qui se tient le 9 mars 2017 dans les locaux du Centre national de coopération au développement (CNCD-11.11.11). L’objectif est de discuter de la forme que pourrait prendre cette nouvelle mobilisation de la société civile. D’emblée, il est décidé de prendre comme angles d’approche des thématiques socio-économiques. Sont présents : Anissa Benchekroun (Association pour une taxation sur les transactions financières et l’action citoyenne Wallonie-Bruxelles - ATTAC Wallonie-Bruxelles), M. Cadelli (ASM), Michel Cermak (CNCD-11.11.11, Collectif Roosevelt.be et Plateforme STOP TTIP), Delphine Chabbert (Ligue des familles), Alexis Deswaef (Ligue des droits de l’homme - LDH), Jean-Claude Garot (magazine alternatif POUR [13]), P. Jonniaux (TAC), Philippe Lamberts (eurodéputé Écolo), G. Maissin (TAC), David Murgia (monde culturel), F. Van Keirsbilck (CNE) et des représentants d’associations d’étudiants (Fédération des étudiant·e·s francophones - FEF et Union des étudiants de la Communauté française - UNECOF). Par ailleurs, sont excusés : Myriam Djegham (Mouvement ouvrier chrétien - MOC), Vincent Engel (professeur à l’UCL), Michel Genet (Etopia, centre d’étude du parti Écolo), Michel Gevers (professeur à l’UCL), Vincent Gilles (Syndicat libre de la fonction publique Police - SLFP-Police), Christine Mahy (Réseau wallon de lutte contre la pauvreté - RWLP), Jean-François Neven (magistrat et maître de conférence à l’UCL et à l’Université libre de Bruxelles - ULB), Annemie Schaus (avocate et professeure à l’ULB), J.-F. Tamellini (FGTB), Nicolas Van Nuffel (CNCD-11.11.11 et Coalition Climat), Philippe Vansnick (CSC) et R. Verteneuil (FGTB).

27 Une autre réunion importante se tient le 17 mai 2017 au centre public d’action sociale (CPAS) de Saint-Gilles. Les propositions avancées à cette occasion seront validées lors de l’assemblée générale suivante, ce qui leur conférera une influence sensible sur la suite du processus. Primo, TAM TAM est une campagne et non un mouvement, une organisation ou un parti ; il s’agit d’une mutualisation de moyens visant à adopter une communication et un calendrier thématiques communs, chaque partenaire de la campagne organisant ses propres actions et soutenant celles des autres partenaires (même lorsqu’elles ne concernent pas directement son domaine). Secundo, en raison de la multitude et de la variété des intérêts défendus en présence, le parti pris est de fédérer autour de « non » aux politiques néolibérales plutôt qu’autour de « oui » à des solutions alternatives. Tertio, TAM TAM est constitué d’un bureau de « grands partenaires » (représentants des mutualité et syndicats socialistes, des mutualité et syndicats chrétiens, de TAC et de Smart, et des chercheurs académiques), qui est son organe principal et qui détient l’essentiel du pouvoir décisionnel, ainsi que d’une assemblée générale, dont le rôle premier consiste à permettre une concertation idéologique, stratégique et opérationnelle. Nous développerons tous ces éléments infra.

28 Une seconde assemblée générale est organisée le 22 juin 2017. Des réunions se tiennent dans l’intervalle (30 mars, 19 avril et 15 mai). Rassemblant la plupart des acteurs déjà cités, les discussions ont pour but de fixer les grandes lignes des différents aspects de la campagne : ses objectifs, ses moyens d’action, son budget, son calendrier, sa communication, etc. Il est notamment décidé que la campagne TAM TAM reposera essentiellement sur un plan de mobilisation inter-sectorielle (réunissant avec des secteurs qui n’ont pas l’habitude d’agir ensemble) et sur des actions très visibles. La dimension communicationnelle de ce plan sera prise en charge par l’association sans but lucratif (asbl) Z! (proche du Réseau ADES et connue par ailleurs pour être l’organisatrice du festival de musique du monde Esperanzah!), sise à Floreffe.

29 Des réunions d’information se tiennent également entre début avril et la mi-mai ; elles visent à accroître le nombre d’associations (organisations, mouvements, groupes, collectifs, etc.) qui seront partenaires de la campagne. Y participent notamment des représentants d’Acteurs des temps présents (ATP), du CPAS de Namur  [14], de la Fédération des services sociaux (FDSS), de l’asbl Kukaracha et de ZIN TV, ainsi que ceux de nombre des associations qui seront citées ci-après.

1.4. Le lancement de la campagne

30La campagne TAM TAM est lancée en trois temps : une assemblée générale pour fédérer les associations partenaires, une conférence-débat à destination des sympathisants et un lancement médiatique (à destination des médias traditionnels et des médias sociaux). Cette manière de procéder permet de segmenter les publics cibles et d’adapter la communication à ceux-ci, depuis les militants jusqu’aux personnes non encore sensibilisées  [15].

31 L’assemblée générale du 12 décembre 2017 prend place dans les locaux bruxellois de la CSC et rassemble une cinquantaine de participants : les membres du bureau – É. Buyssens, M. Cadelli, J. De Leeuw, Fanny Dubois (Solidaris - Mutualité socialiste), J.-C. Garot, G. Maissin, P. Vielle, F. Van Keirsbilck et M. Zune –, les membres d’associations présentes dans le bureau – Estelle Ceulemans pour la FGTB ; Bart Deceukelier, Anne-Thérèse Destrebecq et P. Vansnick pour la CSC ; Rudy Janssens et Johan Seynhave pour la Centrale générale des services publics (CGSP, affiliée à la FGTB) ; Jean Hermesse pour les Mutualités chrétiennes ; des membres de l’ASM et de TAC – ainsi que des représentants de diverses associations : Sébastien Kennes pour l’Alliance D19-20 et Rencontre des continents (RDC), Delphine Houba pour le Collectif Roosevelt.be, Jean-François Libotte pour le Comité pour l’abolition des dettes illégitimes (CADTM), Kelly Timperman pour la Confédération bruxelloise des entreprises non marchandes (CBENM), Benoît Van Keirsbilck pour Défense des enfants International Belgique (DEI-Belgique), Maxime Mori pour la FEF, Michel Vanhoorne pour le Forum gauche écologie-Links Ecologisch Forum (FGE-LEF)  [16], Arno Kempynck pour HBH, Pierre Guindja pour Kairos Europe Wallonie-Bruxelles, Robin Van Leeckwyck pour Les Bloemekets, Marie-Pierre de Buisseret pour la LDH, D. Chabbert pour la Ligue des familles, Pietro Emili pour la Maison du peuple d’Europe (MPE), Michel Roland pour Médecins du monde Belgique, Christian Wiertz pour le Milcherzeuger Interessengemeinschaft (MIG), Patrick Feltesse et Frederic Ligot pour le MOC, Julie Maenaut pour la Plateforme d’action santé et solidarité, Damien Dupuis pour la Plateforme Justice pour tous, Pauline Delgrange et Olivier Stein pour le Progress Lawyers Network (PLN), C. Van Tichelen pour le Réseau ADES, François Gobbe pour le Réseau pour la justice fiscale (RJF), C. Mahy pour le RWLP, Barbara Garbarczyk pour Solidarité des alternatives wallonnes et bruxelloises (SAW-B), Sarah de Heusch pour Smart, et Louise Laperche, Charlotte Morjane et Isabelle Verhaegen pour le Syndicat des avocats pour la démocratie (SAD)  [17]. Sont également présents des chercheurs universitaires (Olivier Servais, de l’UCL, et Albert Martens, de la Katholieke Universiteit Leuven - KULeuven), ainsi que deux citoyens à titre personnel. La campagne TAM TAM rassemble ainsi un large spectre d’acteurs – selon la presse, ceux-ci sont 72 à s’apprêter à participer à la campagne –, provenant du milieu associatif et syndical.

32L’objectif de la réunion est, d’une part, de rallier un maximum d’associations à la campagne TAM TAM et, d’autre part, de valider le plan prévu pour la saison 1 (cf. infra). Tous les participants saluent le travail effectué et décident, au nom de leur association, de prendre part à la campagne. Cependant, les grandes organisations craignent que la lenteur de leurs appareils de communication ne complique la diffusion du message ; ainsi, il semble impensable aux Mutualités chrétiennes de parvenir à mobiliser les militants pour la date du 1er février. D’autres intervenants insistent sur la nécessité de constituer des sections locales (comme celles de TAC) et de toucher toute la population, et non pas uniquement les citoyens déjà politisés. La question d’une implication de HBH est soulevée ainsi que, plus largement, celle de l’appui du côté néerlandophone. Beaucoup de participants insistent sur la nécessité de la mutualisation des moyens déjà mise en place, sur l’importance de la diversité des modes d’action (afin que chacun puisse communiquer et agir à sa manière afin de toucher son propre public cible) et sur le fait qu’il convient que chaque association et chaque individu devienne un agent mobilisateur pour la campagne.

33 La question de la désobéissance civile est également abordée, ce qui déplaît à certains participants (issus principalement de la magistrature). Cependant, une seule voix dissonante se fait entendre lors de l’assemblée : elle dénonce un certain parti-pris « à gauche », qui rendrait inaudibles les discours auprès des membres de son association d’agriculteurs, à savoir le MIG, et déplore des messages trop tournés vers la plainte et pas assez vers des propositions d’alternatives.

34 Un mois plus tard, le 19 janvier 2018, une conférence-débat prend place dans les locaux de la CNE à Bruxelles. Elle a pour thème « Comment sortir de l’emprise néolibérale ? » et accueille des interventions d’Olivier De Schutter (professeur à l’UCL) pour le côté francophone et de Manu Claeys (du collectif stRaten-generaal d’Anvers) pour le côté néerlandophone. La soirée est introduite par Alexandra Van Reusel et Brieuc Wathelet (coordinateurs de TAM TAM)  [18] et modérée par Karin Verelst (HBH et professeure à la Vrije Universiteit Brussel - VUB). Une petite centaine d’individus est présente.

35 Enfin, le 2 février 2018, se tient la conférence de presse par laquelle est annoncé publiquement le lancement de la campagne. Elle se tient au café « La feuille en papier doré », à Bruxelles. Le bureau mise sur une exclusivité du sujet pour la Radio-télévision belge de la Communauté française (RTBF) et le quotidien Le Soir. Les médias commenceront à diffuser l’information trois jours plus tard, jour de la sortie de la première capsule vidéo (cf. infra).

36Il est à souligner que, à la fin du mois de janvier 2018, soit quelques jours à peine avant le lancement officiel de la campagne, les nombreuses tensions qui traversent le bureau quant au cadrage de celle-ci (cf. infra) ont conduit au retrait de l’ASM. Les magistrats – qui estiment avoir, en leur qualité de représentants du pouvoir judiciaire, un devoir de réserve envers les pouvoirs exécutif et législatif, ce qui implique notamment de ne pas porter d’attaque contre un gouvernement – avaient demandé à plusieurs reprises à ce que le gouvernement fédéral Michel I ne soit pas mentionné dans la capsule vidéo relative à la thématique de la santé. N’ayant pas obtenu gain de cause, ils ont mis fin à leur participation à TAM TAM. Plus largement, le grand nombre d’associations faisant partie de TAM TAM empêchait l’ASM d’avoir, comme elle le souhaitait, un certain contrôle sur les aspects politiques de la communication de la campagne.

2. Le déroulement de la campagne

37La campagne TAM TAM se déroule en trois temps, appelés « saisons ». La saison 1 (février-juin 2018) est centrée sur trois thématiques : santé, justice et travail. Après l’été 2018, qui permet notamment de dresser un premier bilan, la saison 2 (octobre 2018-mars 2019) se décline autour de quatre autres thématiques : inégalités, climat, fiscalité et discrimination. Enfin, la saison 3, qui chevauche partiellement la saison 2 sur le plan temporel (janvier-mai 2019), consiste, d’une part, en une enquête menée auprès de la population et, d’autre part, en une « grande marche ». Celle-ci se tient le dimanche 12 mai 2019, soit deux semaines avant le jour des élections.

38 Trois types d’actions sont à distinguer dans le cadre de la campagne TAM TAM : les actions organisées par TAM TAM uniquement ; les actions organisées par des associations partenaires en concertation avec TAM TAM ; les actions organisées par des associations partenaires sans concertation préalable avec TAM TAM.

2.1. La saison 1 (février-juin 2018)

39La saison 1 court de février à juin 2018. Elle voit trois thématiques se succéder et se clôt, le 17 juin 2018, par une journée festive « Summer Jam TAM TAM » (organisée par TAM TAM).

2.1.1. Le plan de communication original

40Lors d’une réunion du 15 mai 2017, ont été proposés quatre thèmes prioritaires (sécurité sociale, justice, santé, travail) et trois thèmes transversaux (« fiscalité & budget », « démocratie & délibération », « transition écologique et sociale »). Les thématiques finalement retenues pour la saison 1 sont au nombre de trois : santé, justice et travail, en tant que chacune d’entre elles touche un public large et est en lien direct et étroit avec le core-business des principales associations alors impliquées dans la campagne (respectivement les mutualités, l’ASM et les syndicats).

41 Il est prévu que chaque thématique fera l’objet d’une séquence de six semaines, rythmée par trois phases correspondant aux mots d’ordre « sensibiliser », « percuter » et « mobiliser » (cf. Tableau 1). À chacune de ces phases seront liés des outils  [19] et des canaux de communication, reposant sur le slogan « Leurs mots, notre réalité »  [20] et des déclinaisons de celui-ci. La volonté est de fournir du matériel d’analyse des politiques actuelles, et plus spécifiquement des discours des mandataires politiques (« leurs mots »), puis de confronter ceux-ci au quotidien des citoyens (« notre réalité »). Une partie de la population est donc regroupée sous la forme linguistique élocutive du « nous »  [21], opposée à un « eux » rassemblant les gouvernements appliquant des politiques néolibérales et d’austérité ; il s’agit là d’un procédé courant au sein des mouvements sociaux (ainsi, TAC l’a utilisé régulièrement).

Tableau 1. Description de la communication pour chaque thématique de la saison 1

Objectif SensibiliserPercuterMobiliser
Durée 3 semaines1 semaine2 semaines
Type d’actions Conférences, débats, rencontresAction(s) coup de poingMobilisation vers un flash mob ou une manifestation
Outils Capsule vidéo en motion design ; Visuel #NotreRéalitéRecueil de témoignages ; Relais des actionsPenser le concept de l’action ; Visuel de mobilisation
Slogans Leurs mots, notre réalitéÉcho de la réalité ; Un nouvel écho dans la résistanceAgissons sur #NotreRéalité

Tableau 1. Description de la communication pour chaque thématique de la saison 1

Source : Assemblée générale du 12 décembre 2017.

42 La première phase (« Sensibiliser ») consistera à faire comprendre aux destinataires du message que les mesures politiques actuelles ont un impact concret, généralement négatif, sur leur quotidien. Elle prendra la forme de conférences, de débats et de rencontres, et s’appuiera sur une capsule vidéo d’animation graphique (en « motion design ») et d’un visuel « #NotreRéalité ». La deuxième phase (« Percuter ») visera à toucher l’opinion publique via une ou plusieurs « actions coup de poing », soutenues par un recueil de témoignages et un relais desdites actions. La troisième phase (« Mobiliser ») consistera à susciter la participation des citoyens : ceux-ci seront alors invités à partager sur les réseaux sociaux leurs témoignages quant à leur propre quotidien, en le faisant suivre du hashtag « #NotreRéalité », et à se rassembler lors d’un événement de type plus conventionnel (manifestation ou flash mob).

43 Cette manière de fonctionner répond au concept de sphère publique proposé par le philosophe allemand Jürgen Habermas  [22], c’est-à-dire les espaces matériels et immatériels de discussions et de délibérations entre des individus privés sur des thématiques publiques, ayant pour but d’influencer les décideurs politiques. Le rôle de TAM TAM sera ici de fournir le contenu pour alimenter ces discussions entre citoyens. Selon les termes de l’asbl Z!, il s’agira de « parler aux intelligences, pas seulement aux émotions », « d’imposer “nos” thèmes dans le débat public »  [23] et de « faire converger les nombreuses oppositions au néolibéralisme »  [24].

44 Pour faire parvenir ces outils aux publics, il est proposé de passer par des canaux en ligne (principalement les réseaux sociaux) et hors ligne (support « papier ») et d’essayer d’attirer l’attention des médias. L’idée d’« une publication argumentaire “texte de fond” (type 6 à 10 pages, un argumentaire pour militants, journalistes, politiques…) qui montre 1° que beaucoup mieux serait possible, et 2° que les mesures du gouvernement Michel sont catastrophiques et touchent au cœur même du système » est évoquée en septembre 2017 ; il s’avérera qu’elle sera surtout mise en application au cours de la saison 1.

45 Tous les outils sont disponibles sur le principe du « copy-left », c’est-à-dire, explique le site Internet de la campagne, que « toutes personnes voulant utiliser le contenu et le matériel produit par TAM TAM peuvent le faire. Si les associations veulent l’améliorer, le modifier ou aller plus loin sur certains aspects, elles sont les bienvenues et sont invitées à le faire, en respectant les règles du copy-left (…) : obligation de citer la source et interdiction de rendre payant ce qui est mis gratuitement à disposition par TAM TAM. Rien n’appartient à TAM TAM, tout est fait par et pour les associations »  [25].

46 La communication de chaque thématique suit un ordre précis : conférence de presse, lancement d’une capsule vidéo sur les réseaux sociaux, prise en main de la thématique par les associations partenaires (organisation d’événements ou d’actions), et mobilisation finale rassemblant les acteurs autour de la thématique.

47 Les capsules vidéo en motion design s’appuient sur des notes rédigées par des experts et sont réalisées par la société de production française StoryCircus (la même que celle qui réalise DataGueule).

2.1.2. La thématique « Santé » (février-mars 2018)

48Lors de la conférence de presse du 2 février 2018 (cf. supra), est dévoilée la capsule vidéo en motion design relative à la santé, accompagnée d’interventions d’experts. Cette capsule vidéo est basée sur une note de 20 pages, intitulée « À notre santé ! » et due à Georges Bauherz (médecin) et M. Roland (ULB et Médecins du monde Belgique), ainsi qu’à F. Dubois, Pauline van Cutsem (Mutualités chrétiennes) et B. Wathelet  [26]. La capsule vidéo est postée sur les réseaux sociaux le 5 février (principalement Facebook et YouTube). La thématique Santé est celle qui suscitera le principal engouement auprès des associations partenaires (près de 19 conférences-débats seront recensées sur le site Internet de TAM TAM) et dans les médias.

49 Deux actions plus militantes sont également organisées. Au petit matin du 14 mars 2018, devant le cabinet de la ministre fédérale des Affaires sociales et de la Santé publique, Maggie De Block (Open VLD), et plus largement sur l’esplanade de la Tour des Finances (qui est également le siège du SPF Finances) à Bruxelles, le collectif TOM TOM  [27] procède à un collage d’affiches symbolisant les victimes des mesures du gouvernement fédéral en matière de santé, en reproduisant des témoignages de personnes confrontées à des difficultés d’accès aux soins pour cause de manque de moyens financiers. Le communiqué de presse publié le jour même par le collectif indique : « De nombreuses mesures de Maggie De Block attaquent l’accès aux soins de santé des patient.e.s : aujourd’hui, elles et ils répliquent et s’affichent. Leur slogan : “Invisible et bientôt plus là”. Invisible : l’indifférence du gouvernement envers les plus précaires est énorme. Le gouvernement prend des décisions en étant complètement détaché du vécu des citoyen.ne.s. Bientôt plus là : la plupart des patient.e.s qui s’affichent pour l’action ont une espérance de vie largement inférieure à la moyenne. (…) Cette action d’affichage répond à l’appel lancé par la campagne TAM TAM qui dénonce l’impact des politiques néolibérales sur notre système de santé ». Deux jours plus tard, une action « Occupy for life » réunissant quelque 80 personnes se tient au siège de l’Association générale de l’industrie du médicament (Pharma.be) à Watermael-Boitsfort  [28] pour « dénoncer les accords secrets entre le cabinet De Block et les industries pharmaceutiques »  [29].

50Par ailleurs, une livraison du magazine POUR est consacrée à la thématique Santé ; elle est distribuée gratuitement à raison de 30 000 exemplaires.

51L’action de clôture consiste en une soirée festive de synthèse, qui est organisée par Laura Van Binsbergen et C. Van Tichelen (mandatées pour ce faire par le bureau de TAM TAM) et qui a lieu le 24 mars 2018 au centre culturel La Tentation, à Bruxelles : la « Jam TAM TAM ». Elle rassemble des intervenants comme M. Cadelli, Pierre Cools (Solidaris - Mutualité socialiste), Hélène Dispas (Fédération des maisons médicales et collectifs de santé francophones - FMMCSF), Yves Hellendorff (CNE et Plateforme d’action santé et solidarité), C. Mahy, Paul Mosseray (Centre des arts scéniques - CAS), Vinciane Saliez (iCare), Edgar Szoc (La Revue nouvelle), Rik Van Coillie (Syndicat des employés, techniciens et cadres - SETCA, affilié à la FGTB), Kati Verstrepen (Liga voor Mensenrechten) et B. Wathelet. Suit un repas servi par un collectif des femmes kurdes et un concert de l’orchestre bruxellois « La nouvelle flibuste ». En parallèle, le dessinateur de presse Yakana propose des illustrations en temps réel. Est également diffusée une vidéo de la campagne « 50 nuances de black »  [30], campagne soutenue et financée par les syndicats.

2.1.3. La thématique « Justice » (mars-avril 2018)

52Le 15 mars 2018, la thématique Justice s’ouvre par une conférence de presse. La capsule vidéo en motion design est postée sur les réseaux sociaux le 19 mars. Elle est basée sur une note de 21 pages, intitulée « Notre justice empêchée » et rédigée par Vincent Letellier (avocat, assistant à l’ULB), J.-F. Neven et A. Schaus  [31]. Le lancement de la capsule vidéo est suivi, dès le lendemain, par une journée de mobilisation des magistrats et des avocats devant les différents palais de justice du pays (comme cela a lieu chaque année depuis 2015). La thématique Justice ne suscitera l’organisation que de deux conférences-débats.

53Outre le rassemblement du 20 mars, deux actions sont entreprises par des associations soutenant la campagne TAM TAM mais ne faisant pas partie du bureau : la première le 28 mars 2018 (utilisant un jeu de la marelle dont chacune des cases permet d’expliquer et de dénoncer les frais et conditions nécessaires pour avoir accès à la justice) et la seconde le 25 avril (une file de personnes se place devant le palais de justice de Bruxelles pour symboliser le retard occasionné par le manque de financement). Il est à noter que, parallèlement à ces événements, l’ASM – qui s’est retirée de TAM TAM (cf. supra) – mène ses propres actions de sensibilisation au sous-financement de la justice (dans le cadre de sa campagne « Parlons justice »).

2.1.4. La thématique « Travail » (mai-juin 2018)

54La conférence de presse relative à la thématique Travail se tient le 26 avril 2018, en présence de M. Cermak, Marie-Caroline Collard (directrice de SAW-B), Stan De Spiegelaere (European Trade Union Institute - ETUI), Ilse de Vooght (Femma), Marie-Hélène Ska (secrétaire générale de la CSC), R. Verteneuil et M. Zune  [32]. Est présentée la note « Jobs, jobs, jobs  [33] : oui... mais lesquels ? » (26 pages) due à E. Ceulemans, Michael Maira (CNE), Esteban Martinez (professeur à l’ULB), Nabil Sheikh Hassan (CSC) et M. Zune. La capsule vidéo en motion design correspondante sort le 1er mai, jour de la Fête du travail, symbole des luttes collectives et syndicales pour des conditions de travail décentes.

55 Du 28 avril au 14 juin 2018, se tiennent cinq conférences dédiées au travail. Aucune action n’est organisée durant cette période, les militants étant déjà impliqués dans les festivités du Premier Mai ou dans l’organisation de l’événement destiné à marquer le terme de cette première saison : la « Summer Jam TAM TAM ».

2.1.5. La journée de clôture festive « Summer Jam TAM TAM » (17 juin 2018)

56Pour clore la saison 1, le bureau décide d’organiser une « Summer Jam TAM TAM » le dimanche 17 juin 2018, sur la place d’Espagne à Bruxelles, pour mettre une nouvelle fois en avant les trois thématiques abordées : Santé, Justice et Travail. Comme pour la Jam TAM TAM, ce sont principalement L. Van Binsbergen et C. Van Tichelen qui portent l’organisation de l’événement, épaulées par Nadia Cornejo (présidente du Conseil de la jeunesse catholique - CJC) et B. Wathelet.

57 Un « bar vivant » prend place en début d’après-midi, permettant de se mettre à la table d’un intervenant spécialisé dans l’une des thématiques de la saison 1. Pour la santé : P. van Cutsem, J. Maenaut, Denis Mannaerts (Cultures&Santé), François Perl (Institut national d’assurance maladie-invalidité - INAMI), Céline Prescott (Cultures&Santé), Arne Robbe (Greenpeace Belgium) et Pierre Verbeeren (Médecins du monde Belgique). Pour la justice : Antonio Gambini (CNCD-11.11.11) et Laurent Moulin (Comité des habitants de Haren  [34]). Pour le travail : D. Houba (Collectif Roosevelt.be et échevine PS à la Ville de Bruxelles depuis les élections communales d’octobre 2018), Camille Latin (conférence gesticulée « Burn-out »), Cédric Leterme (Groupe de recherche pour une stratégie économique alternative - GRESEA et Riposte-CTE  [35]), Thierry Müller (Riposte-CTE), N. Sheikh Hassan, Olivier Vermeulen (conférence gesticulée « Ça chauff... au travail ! ») et des représentants du SETCA ayant été engagés dans le récent conflit social survenu au sein de la chaîne de magasins Lidl Belgique  [36]. S’y ajoutent M. Cermak, Saïd Codm Elouizi (mouvement des sans-papiers), Ariane Estenne (présidente du MOC), C. Mahy, M. Mori, Grégoire Wallenborn (ULB et Climat et justice sociale) et Arnaud Zacharie (président du CNCD-11.11.11).

58Ensuite, trois ateliers de travail organisés (« workshops ») prennent place, également autour des thématiques de la saison 1 : « Santé. Les firmes pharmaceutiques : remède ou poison ? » avec Christophe Cocu (FMMCSF) et Jean-Pascal Labille (secrétaire général de Solidaris - Mutualité socialiste et ancien ministre fédéral PS) ; « Justice. Les droits de l’homme en recul ? » avec M. Cadelli et Olivia Venet (présidente de la Ligue des droits humains - LDH, nouveau nom de la Ligue des droits de l’homme depuis le 26 mai 2018) ; « Emploi. Réduction collective du temps de travail : utopie ou réalité ? » avec Pierre Larrouturou (économiste français) et M.-H. Ska.

59 En parallèle, on trouve des stands de sérigraphie, de grimage et d’ateliers clown, ainsi qu’un bar. Les discussions sont suivies de deux concerts (fanfare « Pas ce soir chéri » et groupe musical « Sysmo ») entrecoupés par un repas servi par CollectActif.

60 Pour le bureau, le bilan est nuancé. Certes, la soirée a été l’occasion de rencontres entre des acteurs n’ayant pas l’habitude de se côtoyer. Cependant, les workshops n’ont chacun rassemblé qu’une vingtaine de personnes, et le concert une grosse centaine tout au plus.

2.2. La saison 2 (octobre 2018-mars 2019)

61Lors de la saison 2, qui court d’octobre 2018 à mars 2019, sont mises en avant les quatre thématiques suivantes : inégalités, climat, fiscalité et discriminations.

2.2.1. Présentation générale

62La saison 2 reprend le même format que la saison 1. Cependant, deux différences essentielles sont à noter. Elles sont dues au fait que, suite à une demande de la Mutualité chrétienne et des syndicats chrétiens (CSC et CNE), TAM TAM s’est adjoint la coopération de HBH pour mener la campagne dans la partie néerlandophone du pays (cf. infra).

63Primo, la campagne n’est plus nécessairement axée sur la critique des gouvernements et du néolibéralisme. Certes, elle conserve largement cette optique du côté francophone. Mais désormais, et cela essentiellement du côté néerlandophone (conformément à la volonté de HBH), la campagne consiste également, voire surtout, à valoriser des alternatives. Il s’agit donc là d’un changement de nature réel par rapport aux orientations initiales (cf. infra). Plus précisément, la campagne vise dorénavant à insister sur la nécessité de trouver aux politiques d’austérité des solutions qui respectent l’article 23 de la Constitution belge. Pour rappel, celui-ci (qui fait partie du titre II « Des Belges et de leurs droits ») dispose :

64

« Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. À cette fin, la loi, le décret ou [l’ordonnance] garantissent, en tenant compte des obligations correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de leur exercice. Ces droits comprennent notamment :
  1° le droit au travail et au libre choix d’une activité professionnelle dans le cadre d’une politique générale de l’emploi, visant entre autres à assurer un niveau d’emploi aussi stable et élevé que possible, le droit à des conditions de travail et à une rémunération équitables, ainsi que le droit d’information, de consultation et de négociation collective ;
  2° le droit à la sécurité sociale, à la protection de la santé et à l’aide sociale, médicale et juridique ;
  3° le droit à un logement décent ;
  4° le droit à la protection d’un environnement sain ;
  5° le droit à l’épanouissement culturel et social ;
  6° le droit aux prestations familiales. »

65Secundo, même si la campagne reste nationale (ou, plus exactement, si elle cesse d’avoir une audience essentiellement francophone pour commencer à avoir une existence réelle du côté néerlandophone également), une scission s’opère au niveau de son identité. En Belgique francophone, son nom officiel demeure « Campagne TAM TAM ». En revanche, en Belgique néerlandophone ainsi qu’au niveau national, elle s’intitule à présent « Art. 23 ». Inévitablement, cela a un impact certain sur la communication de la campagne, à commencer par la manière dont TAM TAM se présente au grand public.

66Tertio, les modes d’action de TAM TAM se transforment : on passe d’une campagne inspirée de l’éducation permanente à une tentative de redéfinir les codes de la mobilisation sur un régime plus festif, à la manière de HBH.

67 Quelques autres changements sont à noter. Du côté des membres académiques du bureau, M. Zune se concentre sur les aspects financiers de la campagne, tandis que P. Vielle est en année sabbatique à Nantes ; de cela notamment, découle une difficulté à maintenir le lien avec le milieu universitaire pour l’écriture de notes de fond (qui, par ailleurs, sont désormais originellement rédigées en néerlandais) sur lesquelles reposent les capsules vidéo en motion design. Cependant, seule la thématique Fiscalité ne donne pas lieu à une telle note d’experts, les grandes organisations estimant que leurs mémorandums sont suffisants. Afin de diminuer les frais de production, TAM TAM ne fait plus appel à StoryCircus mais à un graphiste. À la fin de l’année 2018, le CNCD-11.11.11 décide de s’impliquer dans la campagne TAM TAM ; il désigne un de ses employés (Jean-Gabriel Vermeire) pour épauler l’organisation de la marche du 12 mai. Enfin, une connaissance de B. Wathelet vient lui donner un coup de main bénévolement au sein du bureau : Antoine Scalliet.

2.2.2. La thématique « Inégalités » (octobre-novembre 2018)

68La capsule vidéo en motion design relative à la thématique Inégalités est diffusée à partir du 2 novembre 2018 (et non, comme initialement prévu, du 23 octobre). Hormis un appel relatif à la nécessité de mener campagne sur l’article 23 de la Constitution et de mieux pallier les inégalités au sein de la société, aucune activité n’est organisée autour de ce thème, ni par TAM TAM ni par les associations partenaires. Cela est dû entre autres à un engouement croissant pour la thématique Climat, qui va suivre.

2.2.3. La thématique « Climat » (novembre-décembre 2018)

69La thématique Climat repose sur la note « La transition énergétique sera politique et sociale ou ne sera pas ! », écrite par Daniel Tanuro (Climat et justice sociale) et G. Wallenborn.

70La capsule vidéo en motion design sort le 26 novembre 2018, soit quelques jours avant la manifestation du mouvement climatique prévue pour le 2 décembre, et qui rassemblera près de 70 000 participants dans les rues de Bruxelles (100 000 selon les organisateurs) afin de réclamer des mesures politiques concrètes pour contrer les changements climatiques et qui sera suivie de nombreuses autres mobilisations. TAM TAM n’a certes pas pris part à la mise sur pied de cet événement du 2 décembre, mais a contribué à lui faire prendre de l’ampleur. Ainsi, B. Wathelet a œuvré à ce que des syndicalistes et des mutuellistes se joignent à cette initiative de défense du climat. Plus largement, dans un entretien accordé au magazine Imagine demain le monde (et paru sous le titre « Coalition climat : état d’urgence climatique » dans le numéro 132 de mars-avril 2019), un responsable de Coalition Climat, N. Van Nuffel, citera TAM TAM comme l’un des facteurs ayant mobilisé et favorisé l’émergence d’un mouvement social en faveur du climat.

71Il est à noter que, au cours de la campagne TAM TAM, certains militants déplorent le fait que la thématique Climat ait tendance à occulter les autres terrains de lutte (principalement, la justice sociale et la justice migratoire).

2.2.4. La thématique « Fiscalité » (janvier-février 2019)

72Le 4 janvier 2019, la thématique Fiscalité débute par une action menée devant le square du Bois à Bruxelles (rue privée surnommée le « square des milliardaires », située au sortir du bois de la Cambre au début de l’avenue Louise). Cet événement prend la forme d’un rassemblement ironique intitulé « Buvons à la santé des grosses fortunes ». Les participants sont essentiellement des syndicalistes, ainsi que des membres du RJF  [37]. Une autre action prend place le 26 janvier dans le magasin Apple Store de l’avenue de la Toison d’Or, à Ixelles. Afin de dénoncer l’évasion fiscale de l’entreprise multinationale états-unienne Apple, des activistes habillés en PacMan (personnage du jeu vidéo éponyme) circulent dans le magasin à la recherche de ballons jaunes symbolisant les euros que l’État belge ne parvient pas à taxer  [38].

73 La capsule vidéo en motion design ne sort que le 4 avril 2019. En effet, les membres du bureau chargés de l’écriture du script n’ont pu se procurer l’ensemble des chiffres relatifs à l’évasion fiscale dans les temps initialement impartis.

74 Par ailleurs, une livraison du magazine POUR est consacrée à la thématique Fiscalité.

2.2.5. La thématique « Discriminations » (février-mars 2019)

75Le contenu de la dernière thématique a suscité des désaccords au sein du bureau. Initialement, l’idée était de traiter des questions du racisme et de l’immigration. Mais certains membres ont craint que cela ne donne de l’eau au moulin de la N-VA, ces sujets constituant l’un des terrains de prédilection du parti nationaliste flamand. Dès lors, le bureau a opté pour le titre, plus large, de « Discriminations ».

76 La capsule vidéo en motion design sort le 22 mars 2019 ; elle n’aura que très peu d’écho, que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans les médias traditionnels. Deux jours plus tard, se tient une manifestation contre le racisme (organisée par la Plateforme 21/03 et soutenue, entre autres, par TAC et HBH) autour de la revendication « L’interdiction du foulard sur le lieu de travail et dans l’enseignement secondaire et supérieur » ; la FGTB n’y participe pas, estimant que cette revendication ne relève pas de la lutte contre le racisme et les discriminations, ainsi qu’eu égard à ses convictions laïques (impliquant notamment la tolérance en matière de pratique religieuse).

77Il est à noter que la question de l’égalité femmes-hommes est absente de la capsule vidéo Discriminations (pourtant ouverte aux discriminations au sens large, et non uniquement centrée sur le racisme), ce qui conduit à quelques tensions au sein de la campagne. D’une manière générale, les problématiques féministes sont fort peu présentes au sein de TAM TAM : rares sont les collaborations nouées avec des collectifs féministes (hormis le Collecti.e.f 8 maars, Vie féminine et les Femmes prévoyantes socialistes - FPS) et une seule revendication est liée aux inégalités femmes-hommes (en lien avec le monde du travail).

2.2.6. Un incident parallèle

78Le 5 février 2019, Joke Schauvliege (CD&V) démissionne de son poste de ministre flamande de l’Environnement, de la Nature et de l’Agriculture. Quelques jours plus tôt, lors d’un discours devant le Boerenbond, elle avait tenu des propos proches de la théorie du complot concernant les mobilisations citoyennes pour le climat ; un scandale s’en était suivi. Pour expliquer son faux-pas, elle dénonce l’oppression constante dont elle serait victime sur sa boîte aux lettres électronique et son téléphone portable, nuit et jour. Cette situation serait notamment due au fait que, dans la nuit du 29 janvier au 30 janvier 2019, des militants du mouvement Act for Climate Justice (AFCJ) – pratiquant l’action directe en vue de dénoncer les acteurs responsables des changements climatiques – ont placardé sur divers espaces publicitaires des affiches appelant les citoyens à interpeller leurs ministres (« Wake up your Ministers »)  [39] via des lettres, des courriels et des tweets, voire via des appels sur leur téléphone portable (les numéros professionnels des quatre ministres belges en charge de l’environnement étant divulgués).

79 AFCJ est une initiative clairement distincte de TAM TAM. Cependant, la vidéo de la campagne AFCJ a été relayée sur le compte Facebook de TAM TAM (ainsi que sur ceux de TAC et de HBH). Surtout, le soir même, A. Kempynck, en tant que porte-parole de la campagne AFCJ du côté néerlandophone, intervient sur le plateau de la chaîne publique Vlaamse Radio- en Televisieomroeporganisatie (VRT) au sujet de la démission de la ministre. Or A. Kempynck est également l’une des figures de la campagne TAM TAM (à partir de la saison 2). Sur le plateau, il est accusé d’avoir organisé une oppression massive à l’encontre de la ministre flamande, la poussant au bord du désespoir.

80 Certaines associations membres de la campagne TAM TAM (principalement les Mutualités chrétiennes et beweging.net) n’apprécient guère qu’une ministre issue d’un parti de tradition sociale-chrétienne ait dû démissionner en raison des suites d’une action soutenue par TAM TAM. Afin d’éviter qu’elles ne se retirent de la campagne (d’autant qu’un retrait de beweging.net entraînerait vraisemblablement celui de tout le pilier chrétien – dont cet organisme est la coupole du côté néerlandophone –, dont la CSC), le bureau de TAM TAM envoie le courriel suivant aux Mutualités chrétiennes et à beweging.net : «  Le bureau de la campagne Art 23, menée par TAM TAM et Hart boven Hard, a pris connaissance du contenu des articles de presse sur Arno Kempynck et des confusions possibles qu’ils pourraient engendrer avec la campagne d’Act for Climate Justice suite à la démission de la ministre Joke Schauvliege. Le bureau unanime tient à clarifier les deux points suivants. 1. L’appel “Act for Climate Justice” n’est pas une des organisations fondatrices de TAM TAM / Hart boven Hard. 2. La campagne Art 23 (TAM TAM & Hart boven Hard) n’a pas organisé ni commandité l’action “Wake up your Ministers”. Il n’y a aucun lien entre cette action et la campagne, comme peuvent en témoigner les procès-verbaux du bureau et les diverses publications. Plus que jamais nous pensons que la lutte pour la défense de l’environnement et pour une transition climatique juste est essentielle. Plus que jamais nous avons besoin d’un soutien et d’un engagement clair des associations, organisations et citoyens pour converger dans cette lutte. Ne nous laissons pas piéger par des manœuvres de polarisation dont l’objectif réel est de casser la large campagne pour les alternatives et les droits fondamentaux que nous menons ensemble ».

2.3. La saison 3 (janvier-mai 2019)

81Au cours de la saison 2, deux assemblées générales se sont tenues : l’une le 1er octobre 2018 et l’autre le 23 janvier 2019. La seconde a notamment été l’occasion de présenter les grandes lignes de la saison 3. Celle-ci, qui court de janvier à mai 2019 et chevauche donc dans le temps une partie de la saison 2, ne prend pas la même forme que les deux précédentes. Il s’agit d’organiser, d’une part, une grande consultation populaire permettant de mettre en avant six grands axes de revendications que la population considère comme importants et, d’autre part, une large mobilisation citoyenne le 30 mars et, surtout, le 12 mai 2019.

2.3.1. L’enquête (mars 2019)

82L’enquête est disponible en ligne (www.art23.be) et en version papier (les réponses récoltées étant alors ensuite encodées par les membres du bureau). Elle porte sur six grands axes : « Le droit à la justice sociale », « Le droit à la protection d’un milieu sain », « Le droit à l’égalité et à la liberté dans la diversité », « Le droit au travail », « Le droit à un impôt juste » et « Le droit à la protection de la santé »  [40]. Il est demandé aux répondants de classer diverses propositions de mesures par ordre de pertinence.

83 Cette enquête est d’abord prise en charge par TAM TAM, puis par l’agence de sondage iVOX (après que celle-ci a obtenu le droit d’utiliser le questionnaire initial auprès de ses échantillons). Quelque 15 000 réponses sont collectées entre le 1er et le 25 mars 2019. Selon iVOX, elles sont représentatives en termes de genre, de région et d’âge, avec une marge d’erreur estimée à 1,03 %. Une analyse des résultats est réalisée ; elle circule en interne et est diffusée auprès de divers partis politiques. Les résultats sont également publiés dans le journal Le Soir du 23 avril 2019. Pour chacune des six thématiques énumérées ci-avant, la proposition la plus plébiscitée a respectivement été : « Relever les minimas sociaux au-dessus du seuil de pauvreté », « 4 milliards de plus dans le train, le tram et le bus », « Une migration digne », « Égalité de rémunération et de pension entre les hommes et les femmes », « Stop à la grande évasion fiscale ! » et « Une régulation publique et démocratique des prix des médicaments ».

84Par ailleurs, TAM TAM a demandé aux principaux partis politiques francophones et néerlandophones démocratiques  [41] de se positionner par rapport aux revendications issues de la grande enquête. Du côté francophone, le PS, Écolo et le PTB soutiennent toutes les revendications, le CDH et Défi la grande majorité d’entre elles, et le MR près de la moitié (alors même que ces revendications sont considérées par TAM TAM comme allant à l’inverse de la politique menée par les gouvernements Michel I et II). Du côté néerlandophone, le SP.A, et le PVDA soutiennent toutes les revendications, Groen la grande majorité d’entre elles, et le CD&V et l’Open VLD près de la moitié (alors qu’eux également font partie des coalitions fédérale et flamande au pouvoir durant la législature 2014-2019) ; pour sa part, la N-VA n’a pas répondu. Tous ces résultats ont été partiellement rendus publics, par des articles parus dans la presse (Le Soir et De Morgen) ; cependant, les données complètes et détaillées sont restées inédites.

85Il est à noter que, alors que l’enquête prend fin, a lieu l’action « Occupy for Climate ». Celle-ci n’est pas une action de la campagne TAM TAM, même si B. Wathelet a fortement contribué à coordonner l’événement, en accord avec le bureau, et a tenté de faire converger les acteurs sociaux et les acteurs climatiques. Cette action a pour objectif d’inciter la Chambre des représentants à adopter une proposition de révision de l’article 7bis de la Constitution, visant à contraindre l’État belge à prendre des mesures plus ambitieuses pour contrer les changements climatiques. Le blocage débute le dimanche 24 mars 2019, vers 18 heures, rue de la Loi à Bruxelles (rue qui accueille notamment les bureaux du Premier ministre, la salle du Conseil des ministres, les bureaux du président de la Chambre et une entrée – il est vrai généralement condamnée – donnant accès au Palais de la Nation). Quelque 300 participants sont présents, qui ne sont pas tous des habitués de ce genre d’action directe (qualifiée de désobéissance civile) et viennent de diverses associations : TAM TAM, Youth for Climate, AFCJ, syndicats, organisations non gouvernementales (ONG), Gilets jaunes  [42], etc. On relève notamment la présence de J.-P. Labille, de M.-H. Ska et de R. Verteneuil. La rue de la Loi étant en partie en zone neutre, la police intervient pour déplacer les manifestants à quelques centaines de mètres. Ils se retrouvent finalement place du Trône jusqu’au mardi 26 mars. Ce jour-là, ils se réjouissent du vote intervenu en commission de Révision de la Constitution et de la Réforme des institutions : par 9 voix contre 8, elle adopte la proposition de révision de l’article 7bis. Toutefois, deux jours plus tard, la proposition est rejetée en séance plénière de la Chambre, faute d’un soutien suffisant dans le groupe linguistique néerlandais.

2.3.2. « Right(s) here » (30 mars 2019) et « Right(s) now » (12 mai 2019)

86La mobilisation finale se tient en deux temps : « Right(s) here » le 30 mars 2019 et « Right(s) now » le 12 mai 2019.

87Right(s) here consiste en une journée de réflexion visant à tirer un bilan de la législature fédérale 2014-2019 sous la forme d’un tribunal populaire, créatif et artistique (à l’image des actions de HBH), et de dresser une liste des alternatives aux politiques actuelles par le moyen d’un « forum des alternatives ». Devant le tribunal populaire, un témoin accuse le gouvernement fédéral de ne pas respecter l’article 23 de la Constitution dans une matière donnée. Interviennent ensuite les avocats du gouvernement et les avocats du plaignant (ces rôles étant interprétés par des spécialistes des matières traitées). Le juge propose alors au public de décider par vote si le gouvernement fédéral est coupable ou non.

88Le point d’orgue de la campagne TAM TAM est Right(s) now, qui rassemble les citoyens opposés aux mesures gouvernementales d’austérité ayant cours en Belgique. Près de 15 000 personnes selon la presse (20 000 selon TAM TAM) participent à cette grande marche  [43], qui défile depuis la gare de Bruxelles-Nord jusqu’au parc du Cinquantenaire sous le nom de « Marche pour le climat et la justice sociale pour tou.te.s ». Lors de cette manifestation, sont mises en avant les six revendications dégagées lors de l’enquête (cf. supra).

89Le CNCD-11.11.11 a organisé des départs groupés depuis différentes villes de Wallonie afin de rejoindre la gare de Bruxelles-Nord ; par ailleurs, la SNCB a émis des billets à tarif réduit pour les personnes souhaitant se rendre en train à la manifestation. Le cortège se constitue au niveau du boulevard du roi Albert II, avant de se diviser en sept blocs : justice sociale, climat, santé, féminisme, justice et justice fiscale, migration et anti-racisme, travail. La marche est précédée par un cortège de cyclistes ; une chorale se produit au niveau du rond-point Robert Schuman. Bien que le parcours comprenne notamment la rue de la Loi, le cortège ne passe guère devant des lieux symboliques. Cependant, sept « checkpoints » sont disposés le long du parcours ; chacun d’entre eux correspond à la thématique de l’un des blocs, et propose une animation en fonction de ses envies et des forces vives à disposition. Derrière les arcades du parc du Cinquantenaire, une scène attend les participants, laquelle accueille quelques prises de parole suivies de concerts et de prestations de disc-jockeys. En dépit de la volonté initiale d’établir un petit village des alternatives sur place, rares sont les stands (un du CNCD-11.11.11 et un des Gilets jaunes), en ce compris ceux proposant de se restaurer.

90 Aux yeux du bureau, le fait que Right(s) now parvienne à mobiliser autant de milliers de personnes était inespéré. Toutefois, en comparaison avec nombre de marches et autres manifestations du début de l’année 2019 (notamment les marches hebdomadaires pour le climat), il ne s’agit que d’une semi-réussite. Il est vrai que l’événement prend place en fin de course (après plus d’un an de campagne et deux ans de préparation) et a pâti de difficultés de communication entre les personnes en charge des différentes thématiques (difficulté de la convergence des luttes et contacts tardifs avec certaines associations). En outre, la FGTB a été amenée à conserver ses forces vives en vue de la mobilisation syndicale qu’elle tiendra deux jours plus tard, le mardi 14 mai (à savoir une journée d’actions visant à mettre la question du pouvoir d’achat au centre des débats électoraux).

91 Une assemblée générale de clôture termine la campagne TAM TAM le 26 juin 2019. Trois jours plus tard, un post Facebook proclame : « Mercredi, c’était la dernière AG TAM TAM & HBH pour clôturer 15 mois de campagne. Faire converger beaucoup d’acteurs de la société civile pour dénoncer des mécanismes et proposer ensemble des alternatives qui nous ressemblent, c’était notre ambition. Le chemin est encore long, mais, avec ou sans nous, les luttes continuent ! » Cette publication peut être considérée comme marquant le terme définitif de la campagne TAM TAM. En effet, il s’avérera qu’elle constitue la dernière activité du compte Facebook ; quant au site Internet www.campagnetamtam.be, il disparaîtra purement et simplement quelques mois plus tard.

2.4. Trois profils d’organisateurs complémentaires

92Parmi les organisateurs de la campagne, trois profils sont à pointer tout spécialement : les chercheurs universitaires, les syndicalistes et les activistes. Tous trois sont complémentaires. Les chercheurs universitaires apportent leur expertise scientifique : ils rédigent des notes d’analyse approfondie, qui permettent de développer l’argumentaire contre les mesures néolibérales d’austérité visées en démontrant leur impact négatif sur la population belge et en soulignant leur caractère transversal. Les syndicalistes apportent leur potentiel de mobilisation (adhérents, canaux de communication, etc.), leur expertise dans l’organisation d’actions telles qu’un rassemblement ou une manifestation, et des ressources humaines, matérielles et financières. Les activistes apportent l’implication d’une génération plus jeune, un élargissement des publics cibles, et des modes d’action plus diversifiés et plus directs (dont les actions « coup de poing » qui, par ailleurs, bénéficient généralement d’une meilleure couverture médiatique que les traditionnelles actions syndicales, souvent taxées de trop routinières).

93 Le syndicalisme et l’activisme constituent deux mondes fort différents. Le premier repose sur des structures très institutionnalisées et hiérarchiques, fonctionne par consensus, rassemble un grand nombre d’adhérents et a sa place à la table des négociations avec les responsables politiques. Le second a une structure beaucoup plus fluide et horizontale, est organisé selon des pratiques d’intelligence collective, n’a pas d’adhérents à proprement parler et ne prend part à aucun espace de discussion formel avec les mandataires politiques. Cependant, même si certes quelques incompréhensions naissent de part et d’autre durant la campagne TAM TAM, syndicalistes et activistes parviennent à collaborer tout au long de celle-ci.

94 L’importance du rôle joué par les activistes dans la bonne organisation de la campagne est notamment perceptible au cours de la saison 1 : nombre d’actions, de conférences et d’événements sont pris en main par des militants du Réseau ADES, notamment l’organisation de la Jam TAM TAM et de la Summer Jam TAM TAM. Les activistes saluent le succès de la campagne pour rassembler des acteurs venant d’horizons différents (convergence des luttes) et percer dans les médias, mais beaucoup d’entre eux regrettent la faiblesse de la présence syndicale lors des événements.

95 Des tensions sont aussi apparues entre les experts de terrain et les chercheurs académiques, les premiers nourrissant parfois une certaine défiance envers les seconds. Cela explique la qualité scientifique inégale des différents supports vidéo, selon l’existence ou non de notes de fond préalables et, le cas échéant, selon l’origine de ces notes.

3. La nature et l’objectif de TAM TAM

96La nature de TAM TAM est d’emblée et clairement fixée : il s’agit d’être, non une nouvelle structure pérenne, mais une initiative visant à fédérer divers acteurs du monde associatif et syndical et ayant une existence bien délimitée dans le temps (l’horizon étant le scrutin multiple du 26 mai 2019). En revanche, la définition de l’objectif de la campagne connaît des évolutions et demeure peu précise.

3.1. La nature : une « campagne de convergence », mais ni une nouvelle organisation ni un nouveau parti politique

97TAM TAM indique clairement n’être ni une nouvelle organisation, ni un nouveau parti politique, ni même un nouveau mouvement citoyen, mais être une « campagne de convergence »  [44].

98Ainsi, dans la FAQ, le site Internet de TAM TAM consacre deux items – par ailleurs en grande partie redondants – à cet élément : « TAM TAM est le nom d’une campagne nationale de convergence entre des personnalités, les associations, les syndicats et toutes personnes qui souhaitent un changement politique et qui veulent ouvrir de véritables débats avant les élections de 2019. Il n’est ni question de construire un parti politique, ni de construire une organisation, ni même de re-faire un mouvement citoyen »  [45].

99Une insistance particulière est mise sur le fait que la campagne n’est pas et n’a pas vocation à devenir un nouvel acteur partisan : « En aucun cas, TAM TAM ne se transformera en un parti politique. (…) Ni aujourd’hui, ni demain ! » Plus largement, TAM TAM veille à souligner dans sa communication qu’elle « n’a pas de liens avec les partis politiques. Ceux-ci ne sont pas présents dans la coordination, ne financent pas la campagne, et n’ont aucune influence sur notre agenda. Il s’agit d’un engagement explicite au sein de TAM TAM. Nous voulons être indépendants de toute influence partisane. (…). Il n’est [pas] question de pousser à voter pour tel ou tel parti. (…) Nous sommes autonomes, sincères et transparents. Si la campagne se déroule pendant la période électorale, c’est précisément parce que nous sommes convaincus qu’il n’appartient pas aux partis de décider quelles sont les questions importantes du débat public. Trop souvent, cela conduit à des débats qui n’intéressent que les appareils particratiques ».

100 En réalité, TAM TAM se définit avant tout comme un « rassemblement d’acteurs qui mettent en commun des informations, des analyses, des moyens de communication »  [46] et qui est « au service de ces acteurs ». Elle indique être une « campagne d’information, de sensibilisation et de mobilisation » (l’insistance étant essentiellement mise sur l’aspect mobilisation) qui « s’inscrit en complémentarité et en solidarité avec le mouvement syndical, mutualiste, et les autres mouvements sociaux (comme celui pour le droit à la santé, ou celui des magistrats, etc.) »  [47].

101 D’ailleurs, TAM TAM tient à rester « un groupement de fait sans aucune personnalité juridique » (et, donc, à ne pas devenir une asbl) : « Nous ne voulons pas “institutionnaliser” TAM TAM puisqu’il s’agit d’une campagne qui aura une fin ». Cette nature d’initiative circonscrite dans le temps est répétée à deux autres reprises encore dans la FAQ ; « TAM TAM a un début et aura une fin »  [48].

3.2. L’objectif : une définition floue et évolutive

102 Définir un objectif est une étape indispensable dans la formation d’un mouvement social. Celui-ci doit opérer un choix et cadrer ce qui est, pour lui, le plus important. Ce cadrage (« framing ») est un aspect clé dans l’établissement d’une ligne de communication  [49]. Il est défini ainsi par Robert Entman : « Cadrer, c’est sélectionner certains aspects d’une perception de la réalité et les mettre en avant dans un texte de communication, d’une manière à promouvoir une définition particulière d’un problème, une interprétation causale, une évaluation morale et/ou une recommandation de traitement pour le sujet décrit »  [50]. Les acteurs impliqués dans un mouvement social n’ayant pas tous un profil identique (origine socio-économique, habitudes militantes, etc.), ils n’ont pas tous la même perception de la réalité, ni la même évaluation morale ou la même recommandation de traitement.

103 Reprenant le concept de cadrage, Florence Carion distingue trois étapes permettant de définir un mouvement social : le diagnostic, le pronostic et le cadrage motivationnel  [51]. Dans le cas de la campagne TAM TAM, même si les acteurs impliqués s’accordent sur le diagnostic (l’austérité économique induit une augmentation des inégalités) et largement sur le pronostic (des alternatives existent, telles que celles recommandées par TAC et HBH), il n’en va pas de même en ce qui concerne le cadrage motivationnel. Les textes produits par TAM TAM témoignent d’une certaine ambivalence à cet égard : ils manquent de clarté quant à l’objectif de la campagne.

3.2.1. Contre le néolibéralisme ou contre le gouvernement fédéral Michel I ?

104Les initiateurs du TAM TAM souhaitent ne pas reproduire ce qu’ils estiment avoir été l’erreur de TAC et de HBH, à savoir centrer les discussions sur le pronostic (les « alternatives »). Pour leur part, ils tiennent à se focaliser sur le diagnostic, c’est-à-dire sur les responsables de la situation actuelle.

105 Le constat commun qu’ils partagent est le suivant. Depuis les années 1980, et notamment depuis les années Thatcher-Reagan, le néolibéralisme s’est imposé dans la sphère politique, induisant une austérité économique à tous les niveaux. En Belgique, les gouvernements qui se sont succédé depuis plus de trente ans, et cela quel que soit le niveau de pouvoir envisagé, pratiquent cette austérité économique, réduisant les budgets dans de nombreux domaines. La période des élections du 26 mai 2019 approchant, il est temps de mettre en place un contre-pouvoir capable d’arrêter la machine néolibérale, qui se fait d’autant plus ressentir depuis la mise en place du gouvernement Michel I, qui a intensifié et approfondi la logique dénoncée.

106Malgré ce constat commun, les acteurs ne parviennent pas à s’accorder sur l’identification du responsable qu’il convient de pointer lors de la campagne. Faut-il blâmer le concept de néolibéralisme ? Ou directement le gouvernement fédéral Michel I ? Voire l’ensemble des gouvernements passés et actuels ? Ces trois cadrages peuvent en outre se recouper entre eux.

107Pour certains, il convient de s’attaquer à l’idéologie néolibérale présente dans la sphère politique depuis plus de trois décennies. À leurs yeux, le gouvernement Michel I n’est qu’une manifestation parmi tant d’autres de ce courant économique et politique. Par exemple, tel est le cadrage défendu par l’ASM, dont la présidente a déjà vivement critiqué le néolibéralisme (cf. supra). La première conférence-débat, intitulée « Comment sortir de l’emprise néolibérale ? » (19 janvier 2018, cf. supra), suit d’ailleurs cette lignée en ne mentionnant pas les gouvernements mais uniquement le concept de néolibéralisme. De même, la carte blanche publiée à la mi-février 2018 en réponse à une sortie médiatique du directeur du centre d’étude du MR (Centre Jean Gol - CJG), Corentin de Salle, porte sur l’existence même du néolibéralisme (cf. infra).

108Pour d’autres, la priorité est à donner à la critique du gouvernement fédéral Michel I. En effet, celui-ci a « détricoté » certains acquis sociaux, ce qui constitue un fait bien plus grave que nombre des mesures prises par les gouvernements précédents  [52] puisqu’il s’agit d’une attaque contre l’essence même de la sécurité sociale, au point de saper les fondements du contrat social. Selon eux, il convient donc de centrer la campagne avant tout sur les mesures prises par ce gouvernement et sur les impacts concrets qu’elles ont sur la population.

109 Enfin, certains craignent que cette posture d’opposition au gouvernement fédéral Michel I ne fasse croire à une campagne issue de l’opposition parlementaire (en particulier du PS, mais également d’Écolo et du PTB). Ils souhaitent inclure les gouvernements précédents, entre autres afin que puisse être également critiquée la politique menée par le PS lorsque celui-ci était au pouvoir au niveau fédéral. C’est notamment afin que la critique de la majorité gouvernementale fédérale ne se traduise pas de facto par un soutien aux partis de l’opposition que TAM TAM proposera à l’ensemble des formations politiques de respecter l’article 23 de la Constitution durant la saison 2 et incitera la population à appuyer des revendications lors de la saison 3 (cf. supra).

110 Concrètement, les documents de travail élaborés durant la phase de préparation et de mise en place montrent un glissement concernant la formulation de l’objectif : « Contre ce gouvernement, contre l’absurdité néolibérale, nous entrons en résistance » en mai 2017, « Contre les politiques d’austérité et du chacun pour soi, nous entrons en résistance et nous ferons entendre nos alternatives ! » en septembre 2017, et enfin « Nous vous invitons à donner de la voix, ensemble et avec force ! Entrons en résistance pour que l’avenir reste ouvert » en décembre 2017. Le terme « néolibéralisme » a donc été retiré au profit de « austérité », qui a ensuite lui-même disparu (les deux termes continuant toutefois à figurer dans des textes explicatifs).

111 À la question « Quel est l’objectif de la campagne TAM TAM ? » de la FAQ, le site Internet répond par le texte suivant. Celui-ci est représentatif des tensions qui traversent le bureau à cet égard (et qui ont notamment amené au retrait de l’ASM, cf. supra). Il montre que les membres du bureau sont dans l’impossibilité de trouver un consensus entre eux, c’est-à-dire de choisir entre les différents cadrages envisagés.

112

« La campagne TAM TAM crée des espaces d’information et d’expression où artistes, universitaires, associations, syndicats et mouvements citoyens peuvent se coordonner, s’organiser ensemble et renforcer leur communication et leur mobilisation.
Les tentatives de sensibilisation qui se sont multipliées au cours des derniers mois n’ont atteint que certains publics cibles, avec une double difficulté : faire comprendre l’enjeu de chaque réforme, souvent très complexe, d’une part, et, de l’autre, montrer comment cette réforme s’inscrit dans un projet global : démanteler le “modèle social belge” qui pour la plupart d’entre nous semble tellement acquis que la connaissance et la compréhension de ses bases se sont avec le temps estompées. Nous pensons qu’il est urgent de produire un contre-discours à cette politique globale de déshumanisation et d’assèchement des services publics, discours que nous voulons fondé sur une information objective, pédagogique et diffusable auprès du plus grand nombre. Il ne s’agit pas de glorifier un hypothétique âge d’or de la Belgique vers lequel il faudrait revenir. Il s’agit de rendre compte de la logique destructrice des options néolibérales qui, en s’appuyant uniquement sur des arguments budgétaires abusivement érigés en contraintes objectives, empêche de progresser vers un horizon que nous souhaitons : celui d’un modèle de société basée sur des valeurs et principes de solidarité, d’égalité, d’inclusion, de liberté et de droit, d’approfondissement de la démocratie et de défense de l’environnement.
Les analyses co-rédigées par des chercheurs universitaires et des acteurs de la société civile soulignent que les choix pris par les politiques au cours des 25 dernières années, mais en particulier par le gouvernement Michel depuis 2014, instituent un changement important de paradigme dans notre société. À partir de ces analyses, nous proposons une panoplie d’outils destinés à être très largement diffusés, et à s’articuler à des actions et mobilisations citoyennes de toutes natures, dans les enceintes et contextes les plus variés. Nous voulons investir le champ des débats publics et combattre la pensée unique qui y règne et qui prétend justifier cette austérité aveugle et injuste ainsi que la marchandisation de tout et la mise en concurrence de tous. »

113 L’absence de cadrage commun et exprimé de façon concise et accessible à tout un chacun nuira à la campagne TAM TAM, en la privant d’une identité forte à laquelle les acteurs pourraient se rattacher.

3.2.2. Contre un ennemi ou pour des alternatives ?

114Dès l’entame de la saison 2, et plus encore lors de la saison 3, un important changement de cadrage est opéré, suite à l’alliance avec HBH : désormais, la campagne se concentrera sur le pronostic plutôt que sur le diagnostic (cf. infra).

115Dorénavant centrée sur le respect de l’article 23 de la Constitution belge, la campagne lance l’appel suivant pour la saison 2 : « Avec la campagne bilingue TAM TAM - HBH, nous luttons ensemble pour l’article 23. Dans les mois à venir, nous élaborerons [des] propositions que nous présenterons à des milliers de personnes : comment voulons-nous que le prochain gouvernement applique l’article 23 au XXIe siècle ? Pour nous, ce sera l’enjeu des élections de mai : ce n’est pas l’économie de croissance qui devrait être la pierre de touche des programmes électoraux et de la prochaine législature, mais notre humanité elle-même. À “tout pour la croissance”, nous opposons “la croissance pour tous”. Nos enfants nous y obligent. Après les mots, il faut des actions. Parce qu’il y a une alternative ». Il n’est donc plus question de dénoncer l’austérité ou le néolibéralisme, mais de promouvoir des politiques qui respectent l’article 23.

116 Certains membres de TAM TAM déplorent ce changement d’orientation, considérant que l’intérêt de la démarche jusqu’alors sous-jacente à la campagne est justement de se fonder sur un « diagnostic scientifique » faisant consensus, et non de se réunir derrière des alternatives qui ne permettent pas nécessairement de faire front commun. Mais la décision du bureau est prise  [53].

117 Le nouveau cadrage rappelle fortement les « balises » et « horizons » de TAC. Mais les propositions de TAM TAM seront plus concrètes que celles-ci.

3.2.3. Quelle priorité dans les revendications ?

118En vue de la saison 3, les acteurs associés au sein de la campagne TAM TAM ont à établir une liste de 25 revendications (qui seront finalement au nombre de 23) à soumettre à la population par le moyen d’une enquête. Mais ils ne décident pas eux-mêmes de l’ordre de priorité de celles-ci : cet ordre sera déterminé par les votants (cf. supra). Il s’agit donc cette fois d’un processus bottom-up, par lequel les citoyens font part de leurs principales revendications à une organisation centralisatrice, et non plus top-down  [54] comme au cours des saisons 1 et 2. Lors du processus d’établissement des revendications, TAM TAM a demandé aux associations partenaires de présenter leurs trois priorités absolues, qui ont ensuite été discutées en groupes de travail avec HBH, avant d’être validées par le bureau de la campagne.

119 Reste encore à déterminer le titre de la marche du 12 mai 2019. Les discussions sont intenses au sein du bureau pour décider quelles thématiques vont y apparaître (justice sociale, justice climatique et justice migratoire), sous quelle forme et dans quel ordre. Diverses propositions sont soumises au bureau : « Marche pour la justice climatique, sociale et migratoire », « Marche pour la justice climatique et sociale », « Mars voor klimaat, sociale rechtvaardigheid en menselijke migratie » (« Marche pour le climat, la justice sociale et une migration humaine »), « Mars voor een ecologische, sociale en inclusieve toekomst » (« Marche pour un futur écologique, social et inclusif »), « Mars voor een ecologische en sociale toekomst » (« Marche pour un futur écologique et social »), « Samen op straat voor mens en klimaat » (« Ensemble dans la rue pour l’humain et le climat »), « Samen op straat voor een sociaal en menselijk klimaat » (« Ensemble dans la rue pour un climat social et humain »), « Samen op straat voor een sociaal klimaat voor iedereen » (« Ensemble dans la rue pour un climat social pour tou.te.s »), « Samen op straat voor het klimaat en sociale en gelijke rechten » (« Ensemble dans la rue pour le climat et des droits sociaux et égaux »), « Mars voor een ecologische, sociale en menswaardige toekomst » (« Marche pour un futur écologique, social et digne »). In fine, afin d’éviter un nom trop long, le bureau retient le nom « Marche pour le climat et la justice sociale pour tou.te.s » (en néerlandais, « Mars voor het klimaat en sociale rechten voor iedereen »). Est ainsi laissée de côté la thématique migratoire, notamment en tant qu’elle constitue un terrain de prédilection de la N-VA au sein de la sphère médiatique. Le titre retenu donne également une bonne idée des principales associations portant la marche du 12 mai.

4. L’organe central de TAM TAM : le bureau

120Dès juin 2017, il est décidé de mettre en place une structure réunissant les acteurs les plus impliqués dans la future campagne (que ce soit sur le plan humain ou sur le plan financier) : le bureau. Celui-ci se réunit deux à trois fois par mois. Il s’agit d’un organe bien distinct de l’assemblée générale, qui se réunit tous les six mois et qui est ouverte à toutes les associations partenaires ainsi qu’aux éventuels citoyens curieux d’en savoir plus sur TAM TAM.

121 Les décisions sont prises par le bureau, sans que celui-ci ait recours à un système de vote formel. La procédure est la suivante (que ce soit lors d’une réunion à l’occasion d’échanges par courriel). Lorsqu’une proposition est formulée, chacun est libre de la soutenir ou de s’opposer à elle. Si aucune opposition forte ne se manifeste, la proposition est adoptée par une sorte de consensus par recoupement.

4.1. L’évolution de la composition du bureau

122Dans un premier temps, la composition du bureau n’est pas formellement fixée : elle dépend du temps dont dispose chacun et de la perception qu’a chacun de sa légitimité ou non à prendre part aux réunions de cet organe. Cette manière de procéder est courante au sein des mouvements sociaux, que cela résulte ou non d’une volonté. Elle présente l’avantage de l’efficacité et de la rapidité (puisqu’elle permet d’éviter les débats trop longs et de voir les décisions prises par un cercle d’individus restreint ; en ce sens, elle prévient les problèmes de fonctionnement démocratique qui avaient été rencontrés au sein de TAC), mais l’inconvénient de conduire potentiellement à une certaine professionnalisation de la militance et à l’enfermement de quelques militants très engagés dans une bulle déconnectée du reste du mouvement  [55].

123 Au cours de la saison 1, des tensions apparaissent au sein du bureau de TAM TAM. Elles sont similaires à celles que TAC a pu connaître : certains membres estiment que les choses n’avancent pas assez vite (surtout au sein de l’aile néerlandophone) et que des individus ralentissent la prise de décision au bureau. En outre, certaines personnes soupçonnent la CSC (considérée comme flamande) de ralentir la campagne étant donné son lien avec le CD&V, membre des gouvernements fédéral et flamand. Dès lors, la composition du bureau est quelque peu formalisée en vue de la saison 2  [56]. L’objectif est notamment d’éloigner du bureau toute personne qui ne soit pas un représentant ou au moins un membre de l’une des associations partenaires (outre les chercheurs académiques). Il s’agit aussi de montrer que TAM TAM n’est pas un mouvement citoyen, mais une campagne qui mutualise les efforts et les moyens d’une série d’acteurs et qui n’a pas vocation à vivre au-delà de son objectif. Le procès-verbal d’une réunion du 13 avril 2018 indique ainsi : « Il y a de nombreux lieux (groupe de travail Mobilisation…) où on peut développer TAM TAM sans être “membre du bureau”. Si toutes les “petites et moyennes organisations” qui se mobilisent actuellement devaient siéger au bureau, nous serions au moins 60 à chaque réunion. Les “grandes organisations” sont essentielles pas seulement pour leur apport financier, mais aussi parce que le but de la campagne est de mobiliser de vastes groupes de militants et de citoyens, et que ces grandes organisations sont un des canaux essentiels pour ça ».

124 Le tableau 2 reprend, d’après ce que nous avons pu observer, les évolutions de la composition du bureau. Il est à noter que, par moments, certaines autres personnes ont été présentes de manière plus ou moins régulière, comme S. de Heusch.

125 Ce tableau appelle plusieurs commentaires. La composition de l’équipe chargée de la coordination veille initialement à une mixité tant en termes de genre que d’appartenance linguistique ; ainsi, la coordination est tout d’abord confiée à B. Wathelet (homme, francophone) et à A. Van Reusel (femme, néerlandophone). Dès la saison 2 toutefois, la coordination ne compte plus aucune femme dans ses rangs. Comme on le sait, l’ASM quitte la campagne à la veille de son lancement pour des raisons de cadrage de la communication externe. Dès l’origine, la CNE mandate F. Van Keirsbilck ; à partir de la saison 1, la CSC fédérale fait de même avec B. Deceukelier (qui est surtout présent à partir de la fin de cette même saison). La FGTB fédérale ne mandate aucun représentant ; la FGTB bruxelloise et la FGTB Centrale générale (CG), qui participent de manière autonome, mandatent respectivement le directeur du centre d’études (É. Buyssens) et la secrétaire générale adjointe (F. Lepoivre). Vers la fin de la première saison, la FGTB mandate L. Vander Linden pour remplacer É. Buyssens (qui continuera cependant à être présent). Les mutualités chrétiennes et socialistes sont représentées respectivement par P. van Cutsem et F. Dubois. Les secrétaires généraux des instances nationales des mutualités ne siègent pas formellement au bureau, même si J. Hermesse (Mutualités chrétiennes) a assisté à quelques séances ; pour sa part, J.-P. Labille (Solidaris - Mutualité socialiste) n’a été présent à aucune réunion du bureau. Au cours des discussions, les représentants des syndicats interviennent sur tous les sujets, alors que ceux des mutualités prennent essentiellement la parole au sujet des thèmes relatifs à la santé.

Tableau 2. Évolution de la composition du bureau de la campagne TAM TAM

Période de mise en place et de préparation Saison 1 Saison 2 et saison 3
Coordination Brieuc Wathelet
Alexandra Van Reusel
Brieuc Wathelet
Alexandra Van Reusel
Brieuc Wathelet
Arno Kempynck
Seppe Malfait
Communication (asbl Z!)Jérôme Van RuycheveltJérôme Van RuycheveltNaïké Garny
Représentants des associations partenaires ASMManuela Cadelli
CSCFelipe Van Keirsbilck (CNE) Felipe Van Keirsbilck (CNE)
(Bart Deceukelier)
Felipe Van Keirsbilck (CNE)
Bart Deceukelier
FGTB Éric Buyssens
Florence Lepoivre
Éric Buyssens
Florence Lepoivre
(Lander Vander Linden)
Éric Buyssens
Florence Lepoivre
Lander Vander Linden
HBH Wouter Hillaert
Veerle Duflou
Mutualités chrétiennesPauline van CutsemPauline van CutsemPauline van Cutsem
Magazine POUR Jean-Claude GarotJean-Claude GarotJean-Claude Garot
Solidaris - Mutualité socialisteFanny DuboisFanny DuboisFanny Dubois
TAC Gabriel Maissin
Jo De Leeuw (HBH)
Gabriel MaissinYasmina El Mouhib
Membres académiques Marc Zune
Pascale Vielle
Marc Zune
Pascale Vielle
(Karin Vereslt)
Marc Zune
(Pascale Vielle )

Tableau 2. Évolution de la composition du bureau de la campagne TAM TAM

126La forte présence de TAC au sein du noyau dur de TAM TAM est à souligner : G. Maissin (puis Y. El Mouhib), P. Vielle, F. Van Keirsbilck, J. Van Ruychevelt et M. Zune (pour sa part, P. Jonniaux aurait souhaité prendre part au bureau, mais il n’a jamais pu se libérer pour raison professionnelle, les réunions ayant lieu en semaine durant la journée). Même si TAM TAM a la volonté assez nette de se distancier de TAC, les acteurs impliqués dans les deux initiatives sont donc partiellement les mêmes. De même, de nombreux membres de HBH composent le bureau : J. De Leeuw, V. Duflou, A. Kempynck, S. Malfait, M. Vanhoorne, K. Verelst et W. Hillaert.

4.2. La forte présence des syndicats et des mutualités

127Pour une large part, la campagne TAM TAM repose sur les organisations mutuellistes et syndicales des deux principaux « piliers » qui structurent la société belge : le pilier chrétien (Mutualités chrétiennes et CSC) et le pilier socialiste (Solidaris - Mutualité socialiste et FGTB). Pratiquement, ces organisations composent la moitié du bureau TAM TAM. En théorie, elles peuvent donc contrôler la prise de décision au sein de la campagne.

128 Classiquement, les mutualités ne s’expriment guère publiquement sur la politique des gouvernements (si ce n’est en matière de soins de santé). Leur implication au sein d’une campagne largement axée sur la critique de l’exécutif fédéral est donc quelque peu inhabituelle. En outre, leur participation au processus de prise de décision de certaines mesures gouvernementales les amène à tempérer certains projets. Ainsi, le 13 mars 2018, lorsqu’est évoquée la possibilité de réagir à la volonté exprimée par la ministre fédérale, M. De Block, de limiter le remboursement du dépistage du cancer du sein aux femmes âgées d’entre 45 et 74 ans, tous les membres du bureau approuvent l’idée, hormis les représentants des mutualités. En effet, le projet ministériel a été avalisé par les représentants des médecins et par les mutualités, sur la base du fait que les mammographies peuvent influencer l’apparition du cancer et qu’elles sont considérées comme inutiles avant 50 ans (hors personnes à risque).

129 Du côté du syndicat chrétien, l’impulsion part de la CNE. Pour celle-ci, du fait de l’absence d’élections sociales et de négociations pour un accord interprofessionnel (AIP), l’année 2018 constitue une opportunité pour sortir des sentiers battus, comme par exemple mener une campagne anti-gouvernement et anti-néolibéralisme. Lors de la saison 1, seule la CNE apporte son soutien à la campagne. Une fois nouée l’alliance avec HBH, l’ensemble de la CSC se rallie à la campagne.

130 Au sein du syndicat socialiste, la participation à TAM TAM est d’abord le fait de la FGTB bruxelloise (eu égard à sa tradition, depuis plusieurs années, de partenariats avec le milieu associatif pour un « syndicalisme urbain », concentré sur des matières interprofessionnelles). Lors de la saison 1, la FGTB bruxelloise soutient TAM TAM, de même que la FGTB nationale et la FGTB wallonne  [57]. En revanche, le soutien de la FGTB flamande n’est ni clair ni précis ; en effet, cette régionale estime que la campagne est trop francophone. L’alliance avec HBH permet de résoudre cette réticence.

131 Quelles sont les principales raisons qui incitent les deux plus grandes organisations syndicales belges (la CSC et la FGTB) à s’investir dans la campagne ? Tout d’abord, les syndicats peinent désormais à mobiliser leur propre public, et encore davantage à sensibiliser un public plus large. Des initiatives comme TAM TAM sont donc autant d’opportunités de toucher un autre public, plus jeune ou a priori plus réticent à l’égard du syndicalisme. Ensuite, les syndicats sont à la recherche de nouvelles pratiques communicationnelles (à commencer par les outils en ligne, dont les réseaux sociaux) et d’un élargissement de leur répertoire d’actions (le leur restant pour ainsi dire limité aux grèves et aux manifestations, actions qui plus est largement ritualisées et fortement critiquées par les médias traditionnels et certains partis politiques). Enfin, les syndicats souhaitent contrer la politique du gouvernement fédéral, mais ils veillent à ne pas agir de manière trop directe contre celui-ci afin de ne pas menacer la place qu’ils occupent à ses côtés dans de nombreux organes de concertation. Une collaboration avec le milieu associatif leur offre donc une voie intéressante pour faire entendre leurs positions et revendications.

132 Au sein du bureau, ce sont essentiellement les syndicats qui œuvrent à l’organisation de la campagne TAM TAM. Il convient cependant de rappeler que les syndicats ne sont pas des structures homogènes : ils sont composés de différentes instances (régionales, interprofessionnelles, etc.) qui ne partagent pas nécessairement le même avis sur tous les sujets.

4.3. L’alliance avec HBH : origines et conséquences

133En Belgique, le fait de constituer un mouvement bilingue constitue pour ainsi dire une condition sine qua non pour être pris en considération par les sphères politiques fédérales. Le bilinguisme de la campagne TAM TAM est d’ailleurs régulièrement mis en avant par des journalistes pour appuyer sa légitimité  [58].

134 À la question « Est-ce que TAM TAM est une campagne francophone ou flamande ? », le site Internet répond : « TAM TAM est une campagne bilingue. Tous les outils de communications sont soit entièrement bilingues, soit produits simultanément dans les deux langues. Les assemblées générales sont traduites simultanément en français et en néerlandais. Certaines associations qui se sont engagées dès le début dans la campagne (syndicats, mutualités) sont nationales, et donc bilingues ». Ailleurs, dans la réponse à la question relative à l’implication de TAC, on lit également : « La campagne dépasse largement le seul cadre de TAC. Elle est bilingue et sera menée à l’échelle de la Belgique : elle est portée par des organisations francophones, des organisations flamandes et des organisations fédérales bilingues ».

135 Sur le papier, la communication de TAM TAM est effectivement bilingue. Ainsi, tous les outils de la saison 1 (dont les capsules vidéo en motion design) sont disponibles dans deux versions : l’une en français et l’autre en néerlandais. La communication néerlandophone n’est cependant qu’une traduction des productions francophones, ce qui constitue un problème potentiel. De plus, d’un point de vue pratique, la campagne TAM TAM est divisée en deux sous-campagnes : la première, francophone, qui semble obtenir certains résultats, et la seconde, néerlandophone, qui peine davantage à percer dans l’espace politique et médiatique (si ce n’est dans le média alternatif DeWereldMorgen).

136 Au cours de la saison 1, des tensions linguistiques apparaissent au sein du bureau de TAM TAM. L’aile francophone est satisfaite du travail effectué en Wallonie et en Région bruxelloise, et demande des comptes à l’aile néerlandophone (alors constituée de J. De Leeuw et A. Van Reusel comme membres permanents du bureau, ainsi que de M. Vanhoorne et K. Verelst, qui viennent plus sporadiquement au bureau)  [59] quant à ses résultats moindres. Une partie de l’aile francophone avance alors l’idée d’une collaboration avec HBH, susceptible d’être un bon relais au sein de l’espace public néerlandophone  [60]. Cette suggestion ne fait pas l’unanimité. Pour certains, HBH serait noyauté par le PTB. Pour d’autres, HBH ne serait pas assez radical sur le plan politique. Pour d’autres encore, HBH n’a en réalité pas beaucoup d’influence en Flandre et son mode de mobilisation est aux antipodes de ce qui a été originellement décidé par la campagne TAM TAM.

137 Ces tensions se cristallisent lors de la réunion du 27 avril 2018. Une discussion est prévue entre l’aile francophone et l’aile néerlandophone de TAM TAM, conviant plusieurs personnalités néerlandophones, à savoir outre l’équipe susmentionnée, Johan Seynaeve (artiste), R. Van Coillie et L. Vandecruys. Mais les désistements s’étant accumulés du côté francophone, les coordinateurs annulent la réunion en dernière minute. Les membres de l’aile néerlandophone y voient une tentative de les mettre de côté. Ils décident finalement de se retirer (ce qui explique le changement de composition de bureau lors du passage de la saison 1 à la saison 2). À leurs yeux en effet, l’alliance avec HBH enlève tout l’intérêt de la campagne TAM TAM. D’une part, le ton change : la campagne est dorénavant moins orientée sur une critique du néolibéralisme et des gouvernements, au profit d’un accent sur les alternatives possibles (cf. supra). D’autre part, il s’agit désormais d’une campagne avec des stratégies différentes de part et d’autre de la frontière linguistique (« anti-gouvernement Michel I » du côté francophone et « pro-alternatives » du côté néerlandophone). Certes, aux yeux du bureau, il ne s’agit que de décliner une même campagne en l’adaptant au mieux aux caractéristiques culturelles qui différencient les deux grandes communautés linguistiques du pays. Mais il n’empêche que la situation se brouille désormais.

138 Ainsi, et alors même que la présence du logo de TAC sur les supports de communication de TAM TAM avait fait l’objet de vives critiques, le logo de HBH y figure maintenant au même niveau que celui de TAM TAM (cf. infra). Le site Internet de la campagne indique dans la FAQ : « HBH porte toute la campagne TAM TAM du côté néerlandophone du pays ». Alors que TAC est simplement un soutien, voire un outil, de la campagne TAM TAM du côté francophone, HBH est dorénavant le représentant de TAM TAM du côté néerlandophone. D’ailleurs, à partir de la saison 2, la page d’accueil du site Internet www.campagnetamtam.be renvoie vers les pages (en français) de ce même site lorsque l’internaute choisit de continuer en langue française, tandis qu’elle renvoie vers le site Internet de HBH (www.hartbovenhard.be) lorsqu’il opte pour la langue néerlandaise. Inévitablement, un tel élément nuit à l’image d’une campagne unique, nationale et bilingue.

139 Alors que, jusqu’à présent, l’aile néerlandophone de TAM TAM avait cherché à ce que la campagne adopte un ton assez radical (à l’instar de ce qui continue à prévaloir largement du côté francophone), HBH veille désormais à atténuer la virulence des messages de la campagne. Par là, elle veille à éviter de perdre des sympathisants. D’aucuns y voient en outre le sigle de ses liens avec le PTB (HBH veillerait à ce que TAM TAM ne fasse pas de l’ombre au PTB en ayant recours au même registre de langage).

5. Le financement de la campagne

140La question financière est régulièrement mise à l’ordre du jour du bureau de TAM TAM, étant donné la difficulté de trouver les fonds nécessaires pour la campagne.

141La réponse à la question « Comment la campagne TAM TAM est-elle financée ? » est formulée ainsi dans la FAQ du site Internet : « L’essentiel des moyens de TAM TAM est constitué de l’investissement bénévole de chercheurs universitaires et associatifs, et du travail gratuit des groupes et organisations qui orchestrent concrètement la campagne. Pour ce qui entraîne des coûts de réalisation (journaux, affiches, vidéos), TAM TAM se financera par deux sources : les dons des citoyen.ne.s qui, en découvrant la campagne, voudront qu’elle se poursuive (nous l’espérons du moins), et les apports de départ de diverses organisations sociales, de toutes les tendances, et du Nord et du Sud du pays. Mis à part la réalisation des vidéos, l’impression des journaux et des visuels pour la communication, la campagne TAM TAM n’a pas besoin de gros budgets puisque ce sont les associations qui font campagne sur le terrain et qui peuvent utiliser le matériel de communication de TAM TAM ».

142 Pour se financer, TAM TAM mise sur une multitude de sources : crowdfunding, dons individuels et participations des associations partenaires (ASM  [61], FEF, MOC, etc.), avec des contributions plus importantes de la part des plus grandes organisations (syndicats et mutuelles). Du côté citoyen, TAM TAM lance un crowdfunding qui permet de rassembler la somme de 18 015 euros (pour un objectif fixé à 18 000 euros)  [62]. Du côté des associations partenaires, deux éléments sont à relever. D’une part, la contribution du pilier socialiste est sensiblement plus élevée que celle du pilier chrétien (qui provient par ailleurs principalement de la CNE)  [63]. D’autre part, Smart aligne sa contribution sur celle de la FGTB nationale. Au total, le budget accordé à TAM TAM par les grandes organisations reste faible au regard des moyens habituellement mobilisés pour des actions collectives d’envergure.

143 TAM TAM peut également compter sur la mutualisation de ressources logistiques partagées par les associations partenaires (impression, aide lors d’événements, diffusion par les instruments de communication des associations, etc.).

144 En ce qui concerne les dépenses, la volonté est de diminuer les frais de personnel  [64], afin de pouvoir consacrer l’essentiel des ressources financières disponibles à la production et à la diffusion (notamment des capsules vidéo en motion design). Par exemple, lors de la saison 1, les frais sont les suivants : 37 500 euros pour la production des trois capsules vidéo (StoryCircus), 10 000 euros pour la rémunération d’une personne à temps partiel (1/5e temps) et la production d’outils pour la communication (asbl Z!)  [65], 10 000 euros pour les frais salariaux (mi-temps), 5 000 euros pour l’impression de la livraison du magazine POUR relative à la thématique Santé  [66], 3 000 euros pour les frais de fonctionnement (organisation de réceptions, déplacements, location de salles, etc.). C’est afin de diminuer drastiquement le budget que TAM TAM fait appel à un graphiste belge indépendant pour la réalisation des capsules vidéo de la saison 2 (et non plus à une société effectuant, en sus du motion design, un travail journalistique de recoupement des sources) : Brice van Durne. Cette opération permet d’abaisser les frais à 5 000 euros par capsule vidéo.

6. La communication de TAM TAM

145La communication de TAM TAM prend place en et hors ligne. Elle est servie par un souci d’externalisation et de professionnalisation, mais pâtit des divers changements de nom et de logo.

146 En théorie, la communication en ligne est un support didactique en vue de la mobilisation hors ligne. En pratique, il existe une prédominance de la communication en ligne, étant donné la difficulté rencontrée par TAM TAM pour mobiliser hors ligne.

6.1. L’externalisation et la professionnalisation de la communication

147Dans le but de s’assurer d’agir de manière professionnelle dans sa communication, TAM TAM opte pour une externalisation partielle. D’une part, l’asbl Z! est chargée des tâches suivantes : « création de l’identité et de l’univers de la campagne », « création d’un site Internet », « maintenance et mise à jour du site Internet bilingue », « community management », « vigilance stratégique », « coordination générale de la campagne de communication » pour la saison 1 (et « continuation créative et stratégique de l’univers du concept #NotreRéalité »), et « création des outils » et « couverture communicationnelle des événements » pour les saisons 2 et 3. D’autre part, la réalisation des capsules vidéo en motion design est confiée à StoryCircus pour la saison 1 puis au graphiste B. van Durne pour la saison 2. Tant l’asbl Z! que les réalisateurs de capsules vidéo sont rémunérés – alors que d’autres aspects de la campagne, par exemple l’écriture de note de fonds, ne sont pas pris en charge financièrement par TAM TAM.

148 L’un des intérêts de l’externalisation de la communication est de pouvoir faire appel à des pratiques communicationnelles qui sont différentes de celles habituellement usitées par les mouvements sociaux et de s’adresser adéquatement au grand public (c’est-à-dire sans tomber dans le piège de l’utilisation de codes, notamment au niveau du vocabulaire, donnant extérieurement l’impression d’un entre-soi militant). Il est cependant à noter que ces pratiques communicationnelles « professionnelles » se rapprochent bien davantage du marketing traditionnel (« marketing social »  [67]) que de l’éducation permanente (qui mise davantage sur une communication de terrain, en vue d’une sensibilisation par la discussion, que sur les outils « grand public »), même si certains acteurs ont utilisé les capsules vidéo lors de formations. Par ailleurs, TAM TAM compte beaucoup sur un « effet viral » dont bénéficieraient les capsules vidéo de la campagne sur les réseaux sociaux pour assurer leur diffusion parmi le grand public – ce qui s’avérera peu efficace.

149 Tout au long de la campagne, les personnes chargées de la communication prennent le temps d’analyser leur propre communication, mettant en avant les points forts et les points faibles de leur travail. Ces acteurs conçoivent la communication politique comme devant jouer sur les plans cognitif, émotionnel et comportemental. En outre, ils segmentent leur public en différentes catégories selon l’âge, la région de résidence et le genre. Ainsi, ayant appris que leur public type était bruxellois et âgé de 40 ans en moyenne, ils décident d’adapter la communication pour toucher davantage les Wallons et les plus jeunes. Au cours de la saison 2, B. Wathelet est mis en avant afin notamment de « personnifier » la campagne : il fait part des raisons de son engagement (« affect ») à travers une manière de raconter efficace (« story telling ») et attise la curiosité du public en parlant d’un outil encore jamais utilisé (« hameçon »).

150 Il est à noter que les consultants externes déplorent régulièrement la lenteur décisionnelle du bureau de TAM TAM (qui empêche par exemple de lancer le motion design d’une capsule vidéo parce que le scénario tarde à être approuvé), ainsi qu’un manque de précision dans les instructions générales qui leur sont données (en raison des différences d’opinion entre des acteurs provenant d’horizons différents quant au cadrage à arrêter en vue d’une communication efficiente).

6.2. Les noms et les logos

151Initialement, le nom TAM TAM est un acronyme signifiant « [Nous voulons] un tout autre modèle pour [vivre dans] un tout autre monde ». Rapidement, ce nom est conservé et il n’est plus jamais fait référence à la signification de ces lettres, notamment en raison du souci de la campagne de s’éloigner de la référence à TAC et d’avoir une identité fédératrice se focalisant sur le pronostic et non le diagnostic. L’explication généralement donnée au choix du nom sera celle du tam-tam (l’instrument) dont l’écho au sein de la société rassemble les citoyens.

152 Le logo initial de TAM TAM reprend exactement la même esthétique visuelle que les logos de TAC et de HBH, c’est-à-dire de grandes lettres épaisses, en rouge et noir sur fond blanc, occupant tout l’espace  [68]. Dans ce cas également, la filiation avec TAC apparaît donc clairement, alors même que cela entre en contradiction avec la volonté de TAM TAM de se distancer de ce mouvement.

153 Il est à noter que ce premier logo a été précédé, pendant la phase de mise en place et de préparation, d’un pré-logo, où le premier « TAM » n’est pas totalement rempli et où figure la mention « loading » (chargement).

Figure 1

Pré-logo et première version du logo

Pré-logo et première version du logo

154Le virage que connaît la campagne au moment du passage de la saison 1 à la saison 2 (alliance avec HBH sous la forme du partenariat « Art 23 », modification dans la composition du bureau, promotion d’alternatives, etc.) se traduit par un changement de logo. Il ne s’agit plus de mettre en avant l’identité propre de la campagne, mais son objectif principal. Désormais, le logo est construit autour de la référence à l’article 23 de la Constitution (raccourci en « art 23 » pour correspondre aux deux principales langues nationales : « article » et « artikel »). Ce logo est disponible en deux déclinaisons, la différence étant que les mentions « Hart boven Hard » (en haut) et « TAM TAM » (en bas) figurent sur la seconde et non sur la première. Pour le reste, ce second logo reprend les mêmes couleurs que le premier (le rouge et le noir sur fond blanc), avec des déclinaisons de rouge pour constituer le « 23 ». Une forme ronde et un aspect granuleux font référence à un cachet. La présence d’un croisillon « # »  [69] devant « art » rappelle la présence de la campagne sur les réseaux sociaux. Du côté néerlandophone, existe une troisième déclinaison.

Figure 2

Déclinaisons de la seconde version du logo

Déclinaisons de la seconde version du logo

155Le changement opéré entre les saisons 1 et 2 est source de confusion : il est malaisé pour le grand public de saisir si la campagne « Art 23 » remplace la campagne TAM TAM, si elle est synonyme de celle-ci ou si elle constitue le fruit d’une alliance entre la campagne TAM TAM et HBH.

156 En fin de campagne, la lisibilité se brouille davantage encore. L’action « Right(s) now » du 12 mai 2019, également connue sous le nom de « Marche pour le climat et la justice sociale pour tou.te.s », est préparée durant les semaines qui la précèdent autour du mot d’ordre « 12 mai » (et non plus TAM TAM ou Art 23). L’affiche qui appelle à prendre part à cette marche ne reprend ni le logo TAC, ni le logo HBH, ni le logo TAM TAM, ni le logo Art 23. Ce n’est que le 12 mai qu’intervient un certain rappel des filiations de la marche. À l’initiative du bureau, un badge est distribué aux participants, sur lequel figurent les inscriptions « Je vote / Ik stem » en blanc sur fond rouge et « Right(s) now! » en blanc sur fond vert. Or, pour les initiés, ce badge est clairement un rappel des badges TAC ou HBH.

157 Le fait que des appellations multiples soient successivement ou simultanément utilisées durant quinze mois nuit probablement à la perception de la campagne par le grand public.

Figure 3

Affiche pour la marche du 12 mai 2019

Affiche pour la marche du 12 mai 2019

6.3. Les outils et les canaux de diffusion et de communication hors ligne

158Occuper l’espace public, et pas uniquement l’espace digital, est une préoccupation de la campagne TAM TAM. Ainsi, le bureau a à cœur que soient organisés des rassemblements, afin que les militants puissent se rencontrer et discuter. En particulier, tel est l’objectif, durant la saison 1, avec l’organisation de la Jam TAM TAM et la Summer Jam TAM TAM ; toutefois, celles-ci ne réunissent guère qu’une centaine de participants chacune. Quant à la marche du 12 mai 2019, censée être le point d’orgue de la campagne, elle rassemble quelque 15 000 personnes selon la presse (20 000 selon les organisateurs), chiffre bien inférieur à nombre de manifestations syndicales de la législature 2014-2019 ou aux marches pour le climat de 2018-2019 (en particulier celle du 2 décembre 2018), mais similaire aux « grandes parades » de TAC et HBH (30 000 personnes en 2015, 20 000 personnes en 2016 et 10 000 en 2017). TAM TAM soutient également l’organisation de conférences-débats par les associations partenaires ; ces événements sont nombreux lors de la saison 1, mais ils disparaissent quasiment par la suite. Enfin, même si TAM TAM n’organise pas d’actions à proprement parler, des individus impliqués au sein de la campagne prennent part à diverses actions directes mises sur pied par ailleurs, telles que Occupy for Life, Occupy for Climate, Buvons à la santé des grosses fortunes, etc.

159 En cours de campagne, TAM TAM imprime des tracts (comme pour l’appel à participer à la saison 1) et des affiches (pour la marche du 12 mai 2019), et contribue à l’impression d’une livraison du magazine POUR consacrée à la thématique de la santé. Cependant, il apparaît que la distribution ne suit que difficilement, voire est défaillante. Dès lors, ces outils de communication hors ligne ne sont guère présents au cours de la campagne.

160 Enfin, TAM TAM occupe des stands de sensibilisation lors de divers événements (comme lors du festival Esperanzah!, par exemple), mais aucun support papier n’est fourni.

6.4. Les outils et les canaux de diffusion et de communication en ligne

161La communication digitale est une évidence pour tous les acteurs impliqués dans la campagne TAM TAM  [70]. Ainsi, les chercheurs universitaires y voient un moyen de vulgariser le contenu des notes, les syndicalistes un moyen de toucher un public plus jeune, et les activistes un moyen de sortir de leur bulle militante. Notamment, les membres du bureau  [71] apprécient l’utilisation qui est faite des réseaux sociaux afin de toucher une audience plus large que d’habitude  [72].

6.4.1. Le contenu posté sur le site Internet et les comptes de réseaux sociaux

162Outre un site Internet  [73] – ne contenant plus, à partir de la saison 2, que du contenu en français alors que, pour le contenu en néerlandais, l’internaute est dirigé vers le site de HBH (cf. supra) –, TAM TAM se crée un compte sur les trois principaux réseaux dits sociaux : Facebook, Twitter et Instagram. Les personnes chargées de la communication établissent une distinction stratégique quant à l’usage de chacun de ceux-ci : Facebook sert de canal pour transmettre les supports de communication propres à la campagne et pour partager les actualités en lien avec la campagne ; Twitter sert plutôt à contacter les mandataires politiques et les médias ; Instagram sert à poster des photos des coulisses de la campagne. Pour la saison 1, chaque compte est unique et bilingue, dans l’esprit d’une campagne nationale. Par la suite, il existe un compte en français (TAM TAM) et un autre en néerlandais (HBH).

163 Pour l’essentiel, la communication de la campagne TAM TAM est focalisée sur Facebook. Le compte Facebook de TAM TAM est lancé le 8 janvier 2018. Un an et demi plus tard, à la date du 12 juin 2019, 317 posts y ont été publiés : 116 vidéos (soit 36,6 % des posts), 114 photos (36,0 %) et 82 liens (25,9 %), mais seulement 5 posts ne comportant que du texte (1,6 %). Les vidéos sont de trois types : les capsules vidéo en motion design, qui sont l’outil principal de communication de la campagne ; des vidéos de couverture des actions menées dans le cadre de la campagne ; des vidéos de témoignage (d’acteurs impliqués ou non dans la campagne). Les photos sont des constructions graphiques conçues pour « faire le buzz », comme des citations de mandataires politiques ou des dessins expressément réalisés pour des actions. Les liens dirigent vers des actions ou des témoignages.

164Sur Facebook  [74] (et que ce soit sur le compte de la campagne ou sur des comptes privés), les capsules vidéo en motion design les plus consultées sont celles relatives aux thématiques Fiscalité, Santé, Inégalités et surtout Climat en français, et celles relatives aux thématiques Fiscalité et surtout Inégalités en néerlandais. Du côté néerlandophone, le partenariat noué avec HBH se traduit par des consultations bien plus nombreuses durant la saison 2 que durant la saison 1  [75]. Lors de l’assemblée générale de clôture du 26 juin 2019, il est indiqué que la capsule vidéo Santé a été partagée 2 800 fois du côté francophone et 157 du côté néerlandophone, que le nombre de vues s’élève à 148 000 au total, et qu’il est estimé que 230 000 personnes ont visionné cette capsule vidéo. Il convient cependant d’ajouter que la durée moyenne de visionnage a été de 9 secondes (alors que cette capsule vidéo dure 3 minutes et 27 secondes).

165 Deux éléments sont encore à noter. D’une part, certaines capsules vidéo obtiennent de moins bonnes statistiques de visionnage (et de partage) que d’autres vidéos, pourtant produites à des coûts bien plus bas, comme une intervention de M. Cadelli devant le palais de Justice de Bruxelles le 20 mars 2018. D’autre part, certaines associations ont utilisé des capsules vidéo comme outils d’éducation permanente au sein de leur structure ; dans ces cas, un visionnage équivaut parfois à une salle entière de spectateurs.

6.4.2. Le relais sur les sites et comptes des internautes

166Un des objectifs de la communication sur les réseaux sociaux est que les internautes se réapproprient les posts et les partagent sur leur propre site ou compte (ce qui constitue en quelque sorte le bouche-à-oreille digital)  [76].

167 Sur Facebook, il existe ainsi trois fonctionnalités d’interaction : « réagir » (le plus souvent sous la forme de la mention « J’aime »), « commenter » et « partager ». Sur le compte Facebook « Campagne TAM TAM », ces interactions interviennent essentiellement à trois périodes. Tout d’abord, entre mars et juillet 2018, soit grosso modo durant la saison 1, avec deux pics particulièrement marqués en mars et en juin. Ensuite, en novembre et décembre 2018, c’est-à-dire au moment de la thématique Climat lors de la saison 2. Enfin, entre mars et mai 2019, soit lorsque la saison 3 bat son plein. Les interactions les plus courantes sont les réactions (ainsi, à la date du 12 juin 2019, soit après un an et demi d’existence, le compte Facebook de TAM TAM totalise 10 780 mentions « J’aime »  [77]), puis les partages ; quant aux commentaires, ils sont bien plus rares. Il existe donc différents niveaux d’engagement, correspondant à ces différents types d’interaction : d’abord la simple réaction, ensuite le partage et enfin le commentaire. Toutefois, il est très difficile de définir ce niveau d’engagement et de déterminer à quelle implication politique exacte correspondent ces actes  [78].

168 La possibilité de laisser un « avis » sur le compte Facebook de TAM TAM (en octroyant une note comprise entre 1 et 5 et éventuellement en mettant un commentaire) a été saisie par 127 internautes. En moyenne, le compte récolte un score de 4,6/5, la majorité des personnes donnant une note de 5/5. Cela signifie donc soit que les profils qui arrivent sur le compte TAM TAM sont ceux de personnes en accord avec les constats et propositions du compte (bulle de filtres), soit que les individus qui prennent le temps de mettre une note sont majoritairement ceux dont les opinions vont dans le même sens que TAM TAM (polarisation).

169 Les commentaires des profils ayant mis une note de 1/5 sont instructifs. Les critiques ainsi émises à l’égard de TAM TAM sont les suivants : « Beaucoup de contre-vérités », « Ils se disent libres de toute appartenance politique mais mènent une campagne anti-MR... De plus, être soutenu par certains professeurs universitaires ne signifie pas détenir la vérité... Les sciences humaines sont profondément inexactes », « Désinformation, approximations et manipulation. Peu de crédit à apporter à un mouvement de gauche radicale de plus, oscillant entre PTB et Écolo », « Beaucoup de critiques… Aucune solution alternative… Bref comme tout ce genre de groupes : celui-ci est suivi car la critique est facile et rend populaire mais on n’a rien de mieux à proposer », « J’aimerais un peu d’objectivité pour contrer la désinformation du gouvernement, pas une “contre-désinformation” qui va très vite conduire à une et une seule question : qui se trouve derrière TAM TAM ? Des militants proches du PS ou du PTB ou de réels citoyens libres qui analysent objectivement la situation en dénonçant les abus mais en parlant également des points positifs ». Ces critiques sont relativement similaires à celles que l’on peut lire dans la presse et touchent à trois thématiques principales : information et contre-information, vérité et contre-vérité ; identité des associations derrière TAM TAM ; campagne axée trop sur les critiques et pas assez sur les alternatives.

170 L’équipe chargée de la communication comptait aussi sur une participation citoyenne via le hashtag « #NotreRéalité », sous la bannière duquel tout un chacun aurait témoigné de l’influence concrète d’une mesure politique sur son quotidien. Cette tentative s’est soldée par un échec complet.

171 Enfin, on note que, même parmi les membres du bureau de TAM TAM, peu de personnes prennent la peine d’inviter leurs connaissances Facebook aux événements de la campagne ; il s’agit essentiellement des coordinateurs et des individus les plus impliqués dans lesdits événements. Par exemple, ces personnes sont F. Van Keirsbilck, P. Vielle et B. Wathelet pour la conférence-débat du 19 janvier 2018, et M. Cermak, N. Garny, A. Kempynck (sous le nom « Arno HBH »), S. Malfait, Maxime Michiels (président de la FEF), Carine Thibault (CNCD-11.11.11), L. Vander Linden, F. Van Keirsbilck et B. Wathelet pour la marche du 12 mai 2019. En dehors du bureau, le travail de mobilisation prenant la forme d’invitations envoyées à un grand nombre de personnes est surtout le fait de personnes comme Simon Moutquin (Association belgo-palestinienne - ABP), Patrick Besure (CNCD-11.11.11), Dorsan Van Cutsem (Assemblée générale des étudiant·e·s de Louvain - AGL), N. Van Nuffel et A. Gambini (CNCD-11.11.11).

172 Les organisateurs suivent régulièrement les chiffres de personnes répondant aux invitations soit qu’elles sont intéressées par l’événement concerné soit même qu’elles comptent y participer, en tant que ces chiffres constituent un marqueur de l’efficacité de la mobilisation en cours. Ainsi, quatre jours avant la marche « Right(s) now » du 12 mai 2019 à Bruxelles, une réunion de crise est organisée par le bureau de TAM TAM. En effet, celui-ci vient d’apprendre qu’une marche va être organisée l’après-midi du même jour, à Anvers, en réaction au meurtre de Julie Van Espen (étudiante de 23 ans disparue le 4 mai et dont le corps sans vie a été retrouvé dans le canal Albert le 6). L’inquiétude de TAM TAM provient du fait que des associations, féministes entre autres, ont lancé un appel à participer à cette manifestation anversoise du 12 mai. Sur Facebook, en date du 8, la marche TAM TAM affiche 30 253 invités, 6 999 personnes se disant intéressées et 2 642 annonçant leur participation, tandis que la marche à la mémoire de J. Van Espen affiche déjà 35 144 invités, 23 696 intéressés et 5 939 participants. Face à une telle situation, le bureau de TAM TAM doit choisir entre trois options : maintenir la marche « Right(s) now » au 12 mai, la déplacer à une date ultérieure (ce qui serait compliqué, étant donné l’agenda chargé des semaines précédant les élections, dont la grève pour le climat du 24 mai) ou l’annuler purement et simplement. Le bureau décide finalement de maintenir la marche, en publiant un communiqué de presse soutenant la marche d’Anvers  [79]. Les deux marches rassembleront finalement le même nombre de participants : aux alentours de 15 000 chacune.

6.5. Le relais par les associations partenaires

173TAM TAM compte également sur ses associations partenaires (dont il espère qu’elles soient autant d’agents de mobilisation). Celles-ci relaient les informations relatives à la campagne dans leurs magazines, sur leurs sites Internet, sur leurs comptes de réseaux sociaux, etc.

174 Il est malaisé de déterminer l’ampleur de l’effort de mobilisation déployé par chacune des associations partenaires. À titre d’indice, signalons que Facebook permet de connaître les comptes qui ont été les meilleurs relais pour les capsules vidéo en motion design. Outre celui de la campagne TAM TAM lui-même, on trouve dans cette liste les comptes de différentes associations partenaires : la CSC, la FGTB, la Ligue des familles (compte « Le Ligueur des parents »), Médecins du monde Belgique, le magazine POUR, le RWLP, Smart, Solidaris - Mutualité socialiste (via son organisation Les Solidarités et J.-P. Labille) et bien entendu TAC  [80]. S’y ajoutent les comptes de collectifs plus ou moins éloignés de la campagne, comme ATTAC Wallonie-Bruxelles, BxlRefugees, Climate Express, le Collectif contre l’islamophobie en Belgique (CCIB) et les Jeunes anticapitalistes (JAC). Par ailleurs, on note la présence de comptes de partis, organisations ou personnalités politiques, de centre-gauche ou de gauche : le PS, Écolo j (qui est l’organisation de jeunesse d’Écolo), Elio Di Rupo (député fédéral PS, président du parti, ancien Premier ministre, ancien ministre-président wallon et, jusqu’en décembre 2018, bourgmestre de Mons) et Raoul Hedebouw (député fédéral PTB, porte-parole du parti et conseiller communal à Liège).

Tableau 3. Comptes Facebook ayant été les meilleurs relais pour les différentes capsules vidéo en motion design de la campagne TAM TAM

1er 2e 3e 4e 5e
Santé Raoul Hedebouw (PTB)Magazine POUR Parti socialiste (PS)Campagne TAM TAMLes Solidarités (Solidaris)
Justice Le Ligueur des parents (Ligue des familles)CSCRéseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP)Jeunes anticapitalistes (JAC)CSC Liège
Travail Elio Di Rupo (PS)Magazine POUR Parti socialiste (PS)Belgo-dérision BlogSmart
Inégalités Magazine POUR Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés (BxlRefugees)FGTBTout autre chose (TAC)Les Solidarités (Solidaris)
Climat Climate ExpressMagazine POUR Les Solidarités (Solidaris)SKI Action (ski Baraque Fraiture)Tout autre chose (TAC)
Fiscalité Magazine POUR SmartMédecins du monde BelgiqueJean-Pascal LabilleCampagne TAM TAM
Discriminations Collectif contre l’islamophobie en Belgique (CCIB)Réseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP)ATTAC Wallonie-BruxellesFGTB Centrale généraleÉcolo j

Tableau 3. Comptes Facebook ayant été les meilleurs relais pour les différentes capsules vidéo en motion design de la campagne TAM TAM

Remarque : Seules sont prises en considération ici les versions françaises des capsules vidéo.

175Le bureau appelle à plusieurs reprises les associations partenaires – et cela déjà lors de l’assemblée générale du 12 décembre 2017 – à jouer davantage le rôle d’agents de mobilisation.

6.6. La présence dans les médias

176Enfin, TAM TAM espère se faire connaître du grand public via les médias traditionnels ou alternatifs, en leur qualité de caisses de résonance potentielles pour les communiqués de presse, les actions, les événements, etc.

6.6.1. Les médias traditionnels

177Les membres du bureau sont globalement satisfaits de la percée médiatique de TAM TAM. Les médias traditionnels consacrent divers articles à la campagne, allant du simple relais d’un communiqué de presse ou d’une dépêche de l’Agence télégraphique belge de presse (Belga) à une analyse critique de la campagne, en passant par des comptes rendus d’actions ou d’événements  [81] et par la confrontation entre les partisans de la campagne et ses opposants pour susciter le débat. Toutefois, une fois passée la saison 1, l’intérêt des médias traditionnels s’essouffle (hormis pour le lancement de la saison 2, l’ouverture et les résultats de la grande enquête, et la marche finale du 12 mai 2019). En outre, du côté néerlandophone, la couverture médiatique est quasiment nulle. Enfin, nombre des articles de presse dans lesquels il est question de la campagne TAM TAM sont des articles en ligne, qui n’apparaissent pas dans les éditions papier. C’est sans doute la thématique Santé, qui marque le véritable lancement de la campagne TAM TAM, qui obtient le principal écho dans les médias (débat télévisé sur RTL-TVi et sur BX1 ainsi que sur les ondes de la RTBF en radio et télévision).

178 Une sortie médiatique est source de remous au sein du bureau. Il s’agit d’une carte blanche signée par Nicolas Lemoine (« syndicaliste étudiant »), P. Vielle et M. Zune, intitulée « Le néolibéralisme existe : on peut le définir, l’observer et le dépasser » et publiée dans l’édition du 15 février 2018 du quotidien La Libre Belgique. Les trois auteurs n’indiquent pas écrire en tant que membres de la campagne TAM TAM, mais ils font référence à celle-ci par deux fois dans leur texte. Ce billet constitue une réponse à la carte blanche du directeur du CJG (centre d’études du MR), C. de Salle, parue dans le même journal la veille et ayant pour titre « Le néolibéralisme : une mystification intellectuelle ». Ce texte s’ouvrait par ce chapeau : « Sous la bannière “Non au néolibéralisme”, le collectif TAM TAM attaque le gouvernement fédéral. Mais le néolibéralisme est un mot inventé par la gauche pour mettre sur le dos des libéraux la faillite de la social-démocratie ». L’usage du droit de réponse à la carte blanche du directeur du CJG ne fait pas l’unanimité au sein du bureau de TAM TAM. Certes, une partie des membres considèrent qu’il s’agit d’une opportunité unique de publier un argumentaire permettant de faire passer quelques fondamentaux auprès d’un large public et que le débat d’idées est aussi important qu’une campagne sur le terrain. Mais d’autres doutent de l’opportunité de répondre au texte de C. de Salle, dans laquelle ils perçoivent une stratégie visant à déplacer le débat du concret (les chiffres, les faits, les décisions gouvernementales, l’impact sur la population) vers l’abstrait (l’existence du néolibéralisme).

6.6.2. Les médias alternatifs

179Les responsables de la communication de TAM TAM recherchent davantage de relais parmi les médias traditionnels que parmi les médias alternatifs. Sans doute cela s’explique-t-il par la capacité des médias traditionnels à toucher un public bien plus large et bien plus diversifié que celui des médias alternatifs (qui, en outre, recouvrent probablement en partie celui que TAM TAM atteint déjà via les réseaux sociaux).

180Par « médias alternatifs », nous entendons ici des médias offrant de l’information politiquement progressiste et alternative à l’hégémonie dominante, proposant un modèle socio-économique tendant vers une structure horizontale et indépendante de toutes sources de revenus pouvant influencer leur contenu, et impliquant des citoyens dans la structure et/ou le processus de production d’information [82]. Ces médias sont donc structurellement proches de certains mouvements sociaux, dont ils peuvent d’ailleurs servir la communication.

181La campagne TAM TAM – qui, d’un certain point de vue, peut en elle-même être considérée comme une entité proposant différents outils s’apparentant à des médias alternatifs – conclut un partenariat avec le magazine POUR autour de la thématique Santé de la saison 1 (cf. supra). De plus, comme on l’a vu, le compte Facebook de POUR partage régulièrement le contenu du compte « Campagne TAM TAM ».

182La revue Politique, qui avait été un grand soutien pour TAC  [83], ne couvre pas la campagne TAM TAM. Sur son site Internet, est toutefois publié un article de M. Cermak, « Pour une semaine de 4 jours de travail » (4 avril 2019), qui invite à compléter la grande enquête et à manifester le 12 mai 2019 : « Le mouvement social a obtenu en Belgique la journée de huit heures en 1921 et la semaine de cinq jours en 1960, sans perte de salaire. À nous d’obtenir maintenant la semaine de quatre jours “à la carte”. Cet objectif est repris dans l’agenda de convergence de la campagne TAM TAM, qui organise une grande enquête, une sorte de “référendum d’initiative citoyenne autogéré”  [84], pour définir les revendications prioritaires à porter à la veille des élections – sur la justice climatique, sociale, fiscale, migratoire, etc. – lors de la mobilisation de masse du 12 mai prochain. (…) Une enquête à laquelle chacun.e peut répondre dès maintenant – en priorisant, pourquoi pas, la semaine de 4 jours – sur www.art23.be . Ce sera le lieu de convergence pour porter un agenda progressiste commun à la veille des élections de 2019. Plus d’information sur www.campagnetamtam.be  ». Par ailleurs, dans les colonnes du journal Le Soir du 11 juin 2019, la rédaction de la revue Politique fait paraître une carte blanche titrée « PS, Écolo, PTB : prenez vos responsabilités ! » en co-signature avec une cinquantaine de membres de la société civile, dont B. Wathelet et de nombreuses autres personnalités impliquées dans la campagne TAM TAM.

183Enfin, un média vidéo présent uniquement en ligne (« pure player »), plus spécifiquement sur les réseaux sociaux, Tout va bien – qui, le fait n’est pas anodin, est produit par l’asbl Z! – diffuse une vidéo appelant à marcher avec TAM TAM le 12 mai 2019 (et, par ailleurs, qui propose un bilan des cinq années des gouvernements fédéraux Michel I et II avec le hashtag #MerciAuRevoir  [85].

184 Du côté néerlandophone – où, il est vrai, l ’offre médiatique alternative est moindre –, seul le pure player DeWereldMorgen partage régulièrement du contenu de la campagne TAM TAM sur son site Internet. Certains articles s’apparentent à des cartes blanches publiées par des collectifs.

Conclusion

185Il est évidemment impossible de mesurer l’impact qu’a eu la campagne TAM TAM sur le cours et les résultats du scrutin du 26 mai 2019 – et même de savoir si impact il y a eu. Ni TAM TAM ni aucun membre de son bureau n’a d’ailleurs donné de consigne de vote : le but de la campagne se bornait à faire prendre conscience d’une inadéquation entre les mesures politiques actuelles et les crises sociale, climatique et migratoire, et à appeler au respect et à l’application de l’article 23 de la Constitution.

186Certains membres du bureau de TAM TAM présument que la campagne a bien eu une influence sur les résultats des élections provinciales et communales du 14 octobre 2018 (du côté francophone, puisque la campagne n’avait alors pas encore commencé à percer de l’autre côté de la frontière linguistique) et sur ceux des élections européennes, fédérales, régionales et communautaires du 26 mai 2019. Certes, ces scrutins ont vu une progression de partis favorables à davantage de justice sociale, climatique et migratoire (Écolo, Groen et le PTB). Et sans aucun doute, la campagne TAM TAM est révélatrice de l’évolution de l’état d’esprit d’une partie croissante de l’opinion publique à cet égard. Mais il est impossible de déterminer dans quelle mesure TAM TAM a pu contribuer ou non à accentuer cette tendance actuellement observée dans le corps électoral et dans la société en général. Par ailleurs, plusieurs personnes liées à TAM TAM ont figuré sur les listes de candidats des élections du 26 mai 2019, comme D. Chabbert (candidate d’ouverture PS), F. Lepoivre (militante PS) et P. van Cutsem (candidate d’ouverture Écolo). On se rappellera aussi que deux mandataires politiques Écolo ont été présents à certaines réunions de la phase de mise en place et de préparation (P. Defeyt et P. Lamberts). Enfin, il est à signaler que, lors de la phase de formation du nouveau gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale qui suivra les élections du 26 mai 2019, TAM TAM et HBH seront invités par les principaux négociateurs (Laurette Onkelinx et Rudi Vervoort pour le PS, et Elke Van den Brandt pour Groen) à leur présenter leur liste de revendications, en tant que représentants de la société civile  [86].

187 Le fait que la question de son influence reste ouverte n’empêche nullement de constater que la campagne TAM TAM est parvenue à rassembler et à mobiliser des dizaines d’acteurs du monde associatif et syndical, dont beaucoup n’avaient jusqu’alors guère l’habitude de travailler ensemble, voire simplement de se fréquenter. De plus, tout au long de sa courte existence, TAM TAM a œuvré, en coulisses, à la consolidation non seulement des liens au sein du milieu associatif et syndical mais également à celle des contacts qu’entretient celui-ci avec les milieux académique et activiste. En outre, TAM TAM a réussi à former une dynamique presque nationale, œuvrant des deux côtés de la frontière linguistique grâce à l’implication de HBH à partir de la saison 2. De ce point de vue, TAM TAM a été un acteur, parmi d’autres, de l’union des luttes pour la justice sociale, pour la justice climatique et pour la justice migratoire en Belgique.

188 L’expérience TAM TAM est riche d’enseignement sur les mobilisations sociales  [87]. La grande majorité des mouvements sociaux ou citoyens partagent actuellement un même constat : celui de coupes budgétaires dues aux politiques d’austérité et induisant une augmentation des inégalités. Ils sont régulièrement prêts à s’unir, que ce soit sur le court ou sur le long terme, pour dénoncer cette situation. Toutefois, des points de rupture existent entre les associations et individus impliqués, qui suffisent parfois à ralentir voire à empêcher une convergence : cadrage motivationnel (diagnostic versus pronostic), répertoires d’actions (actions traditionnelles, actions coup de poing, désobéissance civile, éducation permanente, etc.), degré de pilarisation (appartenance plus ou moins forte au pilier chrétien, au pilier socialiste, etc.), profil (magistrats, chercheurs académiques, experts de terrain, etc.), mode d’organisation (structurée, hiérarchique, anarchiste, horizontale, etc.) et conception de la place, voire du rôle, à accorder aux citoyens (masse à sensibiliser, à convaincre et à mobiliser, ou potentiel humain, matériel, financier, organisationnel, etc.).

189 Aujourd’hui, les nouveaux mouvements sociaux ou citoyens envisagent essentiellement leur communication sous la forme d’un recours aux médias sociaux en ligne. Il s’avère que ces outils sont utiles aux structures sur le plan de la communication interne (coordination, etc.). En revanche, leur performance est bien moindre sur celui de la communication externe. Certes, ces instruments semblent donner aux contenus ainsi diffusés une importante visibilité au sein du « grand public ». Mais en réalité, les contenus ne circulent qu’au sein d’une « bulle » d’individus déjà sensibilisés. Cependant, compter uniquement sur les éventuels échos offerts par les médias traditionnels constitue également une stratégie risquée.

190 Depuis plusieurs décennies déjà, la plupart des mouvements sociaux ou citoyens considèrent que le succès de leurs opérations de mobilisation est conditionné à un renouveau bien dosé : il s’agit d’innover par rapport aux formes d’action traditionnelles, afin de susciter intérêt et adhésion, mais aussi de bannir toute innovation qui risquerait d’être perçue comme une rupture malheureuse vis-à-vis de celles-ci, afin d’éviter incompréhension et rejet. Cet équilibre leur semble difficile à trouver, d’autant qu’il est sans cesse à réinventer.

Annexe

Propositions de revendications soumises au public lors de l’enquête de mars 2019

191 Le droit à la justice sociale

192 Relever les minimas sociaux au-dessus du seuil de pauvreté. Vivre en dessous du seuil de pauvreté ne garantit pas une vie digne à chacun.e d’entre nous.

193 Des structures d’accueil accessibles et de qualité pour tous. Avec plus de services de garde gratuits et de qualité, tous les parents peuvent participer à la vie en société.

194 100 000 logements sociaux supplémentaires par législature fédérale. Afin de garantir le droit au logement décent pour tous, nous devons construire et rénover des logements écologiques et sociaux.

195 Des classes de 20 élèves maximum. Une attention et des conseils suffisants pour chaque élève garantissent plus d’inclusion et d’égalité en matière d’éducation.

196Le droit à la protection d’un milieu sain

197 4 milliards de plus dans le train, le tram et le bus. Moins de circulation grâce à des transports en commun ponctuels et abordables.

198 Notre argent loin des combustibles fossiles. D’ici 2030, le gouvernement, les banques et les fonds ne doivent plus être autorisés à investir dans le pétrole, le gaz ou le charbon : investissons notre argent dans les énergies renouvelables.

199 Planter 200 km2 supplémentaires de forêt. Arrêtons la déforestation et replantons 20 000 hectares de forêt d’ici 2025.

200 Sortir du nucléaire pour 2025. La Belgique tient sa promesse de passer pleinement aux énergies renouvelables, arrête de produire des déchets radioactifs et ferme immédiatement les réacteurs fissurés Tihange 2 et Doel 3.

201 Le droit à l’égalité et à la liberté dans la diversité

202 Traquer et punir les discriminations. Renforcer l’égalité pour les personnes à la recherche d’un emploi ou d’un logement grâce à des inspections plus strictes (telles que des tests pratiques) et à des sanctions en cas de traitement inéquitable des candidats.

203 Investir davantage dans le travail communautaire et social. Engager plus de travailleurs de rue pour assister les personnes vulnérables dans la réalisation de leurs droits fondamentaux.

204 Une migration digne. Interdire les retours forcés et organiser au niveau européen des voies légales et sûres de migration pour que les migrants aient une vie digne et humaine. L’article 23 s’applique à tou.te.s.

205 Décoloniser l’école et les espaces publics. Les méfaits et les conséquences du colonialisme doivent être inclus dans tous les programmes scolaires et être discutés de manière critique. Les noms des nouvelles rues/places/monuments doivent être à l’image de la diversité culturelle de notre société.

206 Le droit au travail

207 La semaine de 4 jours ! Réduction collective du temps de travail sans perte de rémunération et avec embauche compensatoire pour un meilleur équilibre entre travail et loisirs.

208 Égalité de rémunération et de pension entre les hommes et les femmes. Grâce à de nouvelles règles strictes, les femmes gagneront autant que leurs collègues masculins.

209 Augmenter le salaire minimum et les pensions. Augmenter les pensions à 1 500 euros/mois et le salaire minimum à 14 euros/heure ou 2 300 euros/mois (brut) pour assurer une vie digne à chacun.e de nous.

210 Limiter l’écart salarial de 1 à 8. Pour le secteur public et privé, le salaire le plus élevé ne peut être 8 fois supérieur au salaire le plus bas.

211 Le droit à un impôt juste

212 Stop à la grande évasion fiscale ! Éviter les nouveaux LuxLeaks et Panama Papers en doublant le nombre d’inspecteurs en Belgique et en signant un traité international de coopération et de transparence en matière de fiscalité.

213 Un impôt progressif sur la fortune. Les personnes possédant plus de 1 million d’euros (maison non comprise) paient un pourcentage croissant d’impôts : ce sont les plus grandes épaules qui supportent les charges les plus grosses.

214 Un impôt minimum européen sur tous les bénéfices des entreprises. Nous mettons fin à la concurrence fiscale entre les pays européens et permettons à toutes les entreprises de contribuer au budget de l’État.

215 Le droit à la protection de la santé

216 Supprimer la publicité pour la malbouffe. L’alcool, le sucre et les aliments riches en matières grasses ne doivent plus être mis en avant dans des publicités afin d’encourager les individus à manger plus sainement.

217 Une régulation publique et démocratique des prix des médicaments. Maintenir le coût des médicaments à un prix abordable et limiter le lobby des sociétés pharmaceutiques.

218 Une maison médicale accessible et à proximité de tous ! Pour que tous les citoyens puissent avoir accès aux soins de santé de première ligne.

219 Suppression des suppléments d’honoraires dans les hôpitaux. Aucun.e patient.e ne paye des frais supplémentaires à l’hôpital en plus des honoraires du médecin.

Notes

  • [1]
    Cf. notamment I. Gracos, « Grèves et conflictualité sociale en 2014 », « Grèves et conflictualité sociale en 2015 », « Grèves et conflictualité sociale en 2016 », « Grèves et conflictualité sociale en 2017 » et « Grèves et conflictualité sociale en 2018 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2246-2247 (2015), n° 2291-2292 (2016), n° 2341-2342 (2017), n° 2383-2384 (2018) et n° 2422-2423 et 2424-2425 (2019).
  • [2]
    Sur ces deux acteurs, cf. S. Govaert, « Hart boven Hard et Tout autre chose », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2262, 2015. Sur le second, cf. également R. Van Leeckwyck, « La communication des mouvements sociaux : Alliance D19-20 et Tout autre chose », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2323, 2016.
  • [3]
    Cf. A. Dufresne, C. Gobin, M. Zune, « Le mouvement social des Gilets jaunes en Belgique : une contestation largement atypique », in I. Gracos, « Grèves et conflictualité sociale en 2018. I. Mobilisations transversales », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2422-2423, 2019, p. 45-61.
  • [4]
    Cela conduisait l’auteur de la note à opter pour la mise en place d’un média alternatif, en précisant que le magazine POUR (cf. infra) réunissait toutes les caractéristiques souhaitées.
  • [5]
    Procès-verbal du 9 mars 2017 (intervention de David Murgia, artiste ayant figuré parmi les membres fondateurs de TAC).
  • [6]
    Dans un autre point de la FAQ, on lira également : « Une des multiples impulsions qui ont conduit à la création de TAM TAM vient (…) de Tout autre chose. Nous sommes donc en lien avec TAC mais certainement pas en concurrence ».
  • [7]
    Pour plus d’information, cf. le site Internet de la plateforme (www.stopttip.be) ; la liste des associations partenaires témoigne d’une présence syndicale forte. Concernant Stop TTIP, cf. A. Dufresne, C. Leterme, « La mobilisation contre le TTIP et le CETA », in I. Gracos, « Grèves et conflictualité sociale en 2016 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2341-2342, 2017, p. 97-110.
  • [8]
    C. Tilly, « Les origines du répertoire d’action collective contemporaine en France et en Grande-Bretagne », Vingtième siècle. Revue d’histoire, n° 4, 1984, p. 89-108.
  • [9]
    D. A. Snow, R. D. Benford, « Ideology, Frame Resonance, and Participant Mobilization », in B. Klandermans, H. Kriesi, S. G. Tarrow (dir.), From Structure to Action: Social Movement Research across Cultures, Greenwich, JAI Press, 1988. p. 197-217.
  • [10]
    Le site ajoute encore, mais sans faire là référence à un groupe d’acteurs spécifique : « - celle de différentes associations de relancer des actions transversales et de dresser un bilan des politiques menées depuis 2014 ».
  • [11]
    Procès-verbal du 3 mars 2017.
  • [12]
    « DataGueule (ou #DataGueule) est une émission de télévision et une websérie à publication variable (un ou deux épisodes tous les mois) diffusée depuis juin 2014 sur France 4 ainsi que sur YouTube, Dailymotion et PeerTube. L’émission propose des vidéos d’animation traitant de l’actualité sur un mode ludique et condensé, dans un but didactique. Chaque épisode tente de révéler et décrypter les mécanismes de la société et leurs aspects méconnus » (Wikipedia, https://fr.wikipedia.org).
  • [13]
    POUR est édité par Pour écrire la liberté, coopérative créée le 31 janvier 2017 et ayant pour objectif « de contribuer à l’édification d’une société démocratique, libre, juste, solidaire et durable » (cf. https://pour.press). Cf. R. Van Leeckwyck, « The Printed (French-Speaking) Alternative Media in Belgium: Journalism or Activism? », Journal of Alternative and Community Media, volume 4, n° 2, 2019, p. 44-59.
  • [14]
    À savoir le directeur, Philippe Defeyt (membre du parti Écolo).
  • [15]
    Ce qui rappelle les cercles concentriques d’individus autour d’un idéal politique (cf. B. Rihoux, « Partis politiques et mouvements sociaux : d’où venons-nous, où allons-nous ? », La Revue nouvelle, n° 3, 2004, p. 24-37).
  • [16]
    M. Vanhoorne est également membre de HBH.
  • [17]
    Par ailleurs, sont excusées les personnes suivantes : Mil Kooyman et Erik Goeman (Associatief Netwerk voor een Taks op Financiële Transacties en voor het Aansterken van de Civiele Maatschappij Vlaanderen - ATTAC Vlaanderen), Liesbeth Van de Kerckhove (beweging.net), Luc Vandecruys (CGSP), Filip De Bodt (Climaxi et ’t Uilekot), Katrijn Ruts (Gelijke Rechten voor Iedere Persoon met een Handicap - GRIP), Kitty Snieders (Greenpeace Belgium) et Freddy De Pauw (Uitpers).
  • [18]
    B. Wathelet est en outre un ancien président de la FEF.
  • [19]
    Des « outils de communication et d’éducation populaire », selon la présentation faite lors de l’assemblée générale du 12 décembre 2017.
  • [20]
    Il s’agit du troisième slogan proposé par l’asbl Z!, les deux premiers (à savoir « La fin des privilèges » et « Bonne chance ») ayant été refusés par le bureau de TAM TAM.
  • [21]
    Cf. P. Charaudeau, Le discours politique : les masques du pouvoir, Paris, Vuibert, 2005.
  • [22]
    J. Habermas, L’espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot, 1993.
  • [23]
    Il s’agit là d’une pratique classique des mouvements sociaux (cf. D. Cefaï, Pourquoi se mobilise-t-on ? Les théories de l’action collective, Paris, La Découverte, 2007, p. 727).
  • [24]
    Cet idéal de convergence des luttes est fortement présent dans l’imaginaire militant.
  • [25]
    Cf. aussi : « Toutes les associations sont invitées à partager les outils de communication qui seront proposés par TAM TAM (vidéo en “motion design”, visuels, communication réseaux sociaux, journaux, etc.) ».
  • [26]
    Ces notes sont disponibles sur le site Internet de TAM TAM : www.campagnetamtam.be.
  • [27]
    Le collectif TOM TOM est un groupe d’activistes pratiquant l’action directe ; son nom a été choisi uniquement dans le but de faire référence à TAM TAM.
  • [28]
    BX1, 16 mars 2018, https://bx1.be.
  • [29]
    Post sur le compte Facebook « Campagne TAM TAM », 16 mars 2018.
  • [30]
  • [31]
    Ces noms sont ceux inscrits sur la page de garde de la note. Toutefois, il semble que le texte soit dû en grande partie à M. Cadelli, dont le nom ne pouvait pas figurer étant donné que l’ASM s’est retirée de la campagne.
  • [32]
    Les interventions sont filmées et mises en ligne sur YouTube.
  • [33]
    Allusion à la formule « Jobs, jobs, jobs » maintes fois répétée par le Premier ministre C. Michel pour exposer les objectifs de son gouvernement en matière de création d’emplois.
  • [34]
    Pour rappel, le ministre fédéral de la Justice projette la construction d’un vaste complexe pénitentiaire (d’une capacité d’accueil de 1 190 détenus) dans cette section de la Ville de Bruxelles, afin de remplacer à terme les établissements de Berkendael (à Ixelles), de Forest et de Saint-Gilles, devenus trop vétustes.
  • [35]
    CTE pour « chômeurs et travailleurs engagés ».
  • [36]
    À ce propos, cf. A. Orban, L. Guttierrez Florez, « La grande distribution à nouveau sous tensions : conflits chez Carrefour, Mestdagh et Lidl », in I. Gracos, « Grèves et conflictualité sociale en 2018. II. Conflits d’entreprise », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2424-2425, 2019, p. 17-26.
  • [37]
    RTBF, 4 janvier 2019, www.rtbf.be.
  • [38]
    RTBF, 26 janvier 2019, www.rtbf.be.
  • [39]
    Cf. www.wakeupyourministers.be (le site n’est désormais plus actif).
  • [40]
    Cf. l’annexe du présent Courrier hebdomadaire.
  • [41]
    Le Vlaams Belang n’a pas été sollicité.
  • [42]
    Il est à noter que, au cours de la campagne, il n’y a pas de rapprochement entre TAM TAM et le mouvement belge des Gilets jaunes, en dépit du fait que, selon B. Wathelet et M. Zune (qui se sont rendus à deux blocages organisés à Wandre et à Wierde pour prendre des contacts avec les Gilets jaunes), les membres de celui-ci sont « à 95 % TAM TAM compatibles » : ils mènent une action citoyenne contre les mesures gouvernementales, ils se coordonnent via les réseaux sociaux (Facebook et WhatsApp), ils refusent toute appartenance à un parti politique afin de faire consensus et d’éviter les divisions, etc. Cependant, TAM TAM et le mouvement belge des Gilets jaunes prennent part à des événements communs (cf. infra). En outre, TAM TAM peut compter sur la présence d’une représentante des Gilets jaunes lors de conférences ou d’actions : Marie Libert-Gobert.
  • [43]
    Le même jour a lieu à Anvers une marche en réaction à un récent féminicide (cf. infra) ; une partie des sympathisants de HBH y participant, ils ne peuvent être présents à Bruxelles.
  • [44]
    Toutes les citations reproduites dans cette section sont extraites de la FAQ.
  • [45]
    Cf. aussi : « TAM TAM est le nom d’une campagne de convergence entre les associations, les syndicats et toutes personnes qui souhaitent un changement politique et qui veulent mettre en débat les questions sociales et culturelles essentielles d’ici aux élections de 2019. Il n’est question ni de construire un parti politique, (…) ni de construire une organisation, ni même de refaire un mouvement citoyen ».
  • [46]
    Cf. aussi : « L’objectif est de mutualiser, le temps d’une campagne, les forces de différents acteurs de la société civile, pour produire de meilleurs outils d’information, de sensibilisation et de mobilisation » ; « TAM TAM est avant tout un langage, un format et une façon de travailler ensemble ».
  • [47]
    Cf. aussi : « La campagne TAM TAM est complémentaire aux outils propres des associations étudiantes ou professionnelles, des ONG, des mutualités, des syndicats, etc. » ; « La campagne TAM TAM se construira en complémentarité et en solidarité avec toutes les composantes du mouvement social » ; « Nous voulons faire en sorte que toutes les associations parlent et se mobilisent en même temps sur le même sujet, mais aussi que tous les secteurs se solidarisent autour des enjeux portés par chacun d’eux ».
  • [48]
    À ce propos, il est à noter à nouveau que, à l’heure de publier ce Courrier hebdomadaire, le site Internet www.campagnetamtam n’existe déjà plus ; quant au compte Facebook « Campagne TAM TAM », il est arrêté à la date du 29 juin 2019 (cf. supra).
  • [49]
    E. Goffman, Les cadres de l’expérience, Paris, Éditions de Minuit, 1991.
  • [50]
    R. M. Entman, « Framing: Toward Clarification of a Fractured Paradigm », Journal of Communication, volume 43, n° 4, 1993, p 52.
  • [51]
    F. Carion, « Pour une approche communicationnelle des organisations de mouvement social », Communication et organisation, n° 31, 2007, p. 64-77.
  • [52]
    L’évocation des mesures prises par le gouvernement fédéral Di Rupo (PS/CD&V/MR/SP.A/Open VLD/ CDH) en matière d’assurance chômage pour les jeunes entre 2011 et 2014 (cf. V. Lefebve, « Les réformes de l’assurance chômage (2011-2019) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2438-2439, 2019, p. 31-77) constitue le contre-argument le plus souvent opposé à cette option de cadrage.
  • [53]
    Ce type de débat (s’opposer à quelque chose versus promouvoir une autre chose) est récurrent au sein des mouvements sociaux. Généralement, un mouvement qui se prononce en faveur d’alternatives est mieux perçu par les médias et donc par le « grand public » qu’un mouvement qui s’oppose à un état de fait.
  • [54]
    Un mouvement top-down est un mouvement coordonné par un groupe restreint d’individus généralement issus de milieux favorisés, qui tente de rassembler la population sous sa bannière. Un mouvement bottom-up surgit quand une partie de la population se mobilise, hors des milieux associatifs et institutionnalisés, pour tenter d’influencer les instances politiques au pouvoir.
  • [55]
    Par exemple, cela a été observé dans le cas du mouvement des Indignados en Espagne (cf. H. Nez, « Délibérer au sein d’un mouvement social. Ethnographie des assemblées des Indignés à Madrid ». Participations, volume 4, n° 3, 2012, p. 79-102).
  • [56]
    Une proposition en vue de la saison 2 vise à une composition formellement prédéterminée afin d’éviter les tensions survenues en cours de saison 1 : le bureau serait limité à 16 personnes, à savoir 4 syndicalistes (la CSC et la FGTB nommant chacune une personne provenant d’une centrale et une autre provenant d’une interprofessionnelle), 2 mutuellistes (l’un issu des Mutualités chrétiennes et l’autre de Solidaris), 4 académiques (2 francophones et 2 néerlandophones), 2 coordinateurs, 1 représentant de TAC et 1 représentant de HBH (si ce mouvement décide de s’impliquer dans la campagne), 2 experts en communication (1 francophone et 1 néerlandophone) et 2 représentants des mouvements jeunes (étudiants ou environnementalistes). Cette proposition ne sera pas adoptée par le bureau.
  • [57]
    Cela en dépit du fait que certains membres de la FGTB wallonne considèrent que la campagne TAM TAM est trop bruxelloise.
  • [58]
    Cf. par exemple RTBF, 5 février 2018.
  • [59]
    Il est à noter que G. Maissin s’est souvent positionné en faveur d’un plus grand soutien de la campagne à son aile néerlandophone.
  • [60]
    Le rôle du syndicat chrétien dans la conclusion de l’alliance avec HBH est à souligner : au cours de la saison 1, la CSC a fait pression sur TAM TAM en vue de la réalisation d’une campagne nationale en collaboration avec HBH.
  • [61]
    Le versement de la somme provenant de l’ASM est effectué avant le début de la campagne.
  • [62]
    Growfunding, « Marche pour le climat et la justice sociale pour tout.e.s », www.growfunding.be.
  • [63]
    Pour expliquer cette différence, certains évoquent les difficultés financières du pilier chrétien liées à l’affaire Arco (au sujet de celle-ci, cf. S. Govaert, « Le dossier Arco », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2361-2362, 2017).
  • [64]
    La FAQ du site Internet indique : « Deux coordinateurs (…) sont engagés à mi-temps pour organiser la mobilisation sur le terrain ».
  • [65]
    Au total de la campagne, les services de l’asbl Z! sont facturés à TAM TAM à hauteur de quelque 40 000 euros, ce qui est modique par rapport aux tarifs habituellement pratiqués par les agences de communication.
  • [66]
    En revanche, la livraison relative à la thématique Fiscalité n’a pas été soutenue financièrement par TAM TAM. Cela a d’ailleurs donné lieu à des tensions entre TAM TAM et POUR.
  • [67]
    G. Hastings, M. Saren, « The Critical Contribution of Social Marketing: Theory and Application », Marketing Theory (en ligne), volume 3, n° 3, 2003.
  • [68]
    Pour une reproduction de ces logos, cf. R. Van Leeckwyck, « La communication des mouvements sociaux : Alliance D19-20 et Tout autre chose », op. cit., p. 33.
  • [69]
    Le croisillon est le signe typographique par lequel est entamé un mot-dièse (ou « hashtag »), qui est un mot-clé cliquable.
  • [70]
    Tel n’est pas le cas de tous les mouvements sociaux. Certains d’entre eux (essentiellement situés à la gauche de l’échiquier politique) nourrissent une méfiance vis-à-vis de Facebook pour sa capacité à modifier les algorithmes à la demande des États dans le but de restreindre leur visibilité sur ce réseau social (cf. Le Monde, 28 septembre 2018 ; Mediapart, 19 juillet 2019).
  • [71]
    Au sein du bureau, la différence entre les membres les plus jeunes et les plus âgés se marque principalement au niveau des nouvelles technologies de l’information et de la communication (TIC), à commencer par les réseaux sociaux : maîtrise de ces outils, conviction de la pertinence d’utiliser ces outils et expérience de la communication sur ces outils.
  • [72]
    Il est à noter que cette capacité à toucher un vaste public est régulièrement remise en question dans la littérature scientifique. Pour certains chercheurs, les réseaux sociaux sont des entreprises capitalistes dont le but principal est le profit, ce qui s’opère en maintenant un utilisateur le plus longtemps possible sur la plateforme et en le confrontant au plus grand nombre de publicités possible, cela grâce à des algorithmes qui identifient le profil de l’utilisateur et lui proposent du contenu en adéquation avec ce qui lui plaît ; ce phénomène, qualifié de bulle de filtres (« filter bubbles »), où chaque individu est enfermé dans sa bulle d’opinions, peut mener à une polarisation des individus en fonction de leurs opinions (cf. C. Fuchs, « Social Media and Capitalism », in T. Olsson (dir.), Producing the Internet: Critical Perspectives of Social Media, Göteborg, Nordicom. 2013, p. 25-44 ; D. Spohr, « Fake News and Ideological Polarization: Filter Bubbles and Selective Exposure on Social Media », Business Information Review (en ligne), volume 34, n° 3, 2017). D’autres chercheurs considèrent que, en dépit de cet effet, les réseaux sociaux n’en sont pas moins des outils permettant à des individus ou à des associations de toucher un public qui n’est pas nécessairement en accord avec leurs opinions, ce qui favorise la diffusion de leurs idées (E. Bakshy, S. Messing, L. Adamic, « Exposure to Ideologically Diverse News and Opinion on Facebook », Science, volume 348, n° 6239, 2015, p. 1130-1132). Ces considérations théoriques peuvent désormais être confrontées à des situations réelles dans lesquelles l’usage des réseaux sociaux est susceptible d’avoir été déterminant politiquement, tels l’élection présidentielle états-unienne de 2016 (R. Faris et al., Partisanship, Propaganda, and Disinformation: Online Media and the 2016 U.S. Presidential Election, Harvard, Berkman Klein Center for Internet and Society, 2017 ; N. Persily, « The 2016 U.S. Election: Can Democracy Survive the Internet? », Journal of Democracy, volume 28, n° 2, 2017, p. 63-76) et le Brexit (M. Del Vicario et al., « Mapping Social Dynamics on Facebook: the Brexit Debate », Social Networks, n° 50, 2017, p 6-16). Dans le cas de la Belgique, on peut citer l’investissement financier du parti d’extrême droite flamand Vlaams Belang dans le sponsoring de posts Facebook lors de la campagne électorale en vue du scrutin multiple du 26 mai 2019 (Le Soir, 27 mai 2019).
  • [73]
    Il est possible de s’abonner à une liste de diffusion électronique (« newsletter ») ; celle-ci est envoyée depuis les adresses électroniques bureau-tamtam@lists.toutautrechose.be et tamtam@hartbovenhard.be.
  • [74]
    Les capsules vidéo sont également postées sur YouTube, mais elles y sont nettement moins consultées.
  • [75]
    Les quatre capsules vidéo de la saison 2 en version néerlandaise ont été publiées sur le compte de HBH, et non plus sur celui de TAM TAM comme durant la saison 1.
  • [76]
    Il est à noter que TAM TAM n’utilise que très peu les espaces publicitaires disponibles en ligne. Quelques posts Facebook sont cependant sponsorisés (pour un montant d’environ 250 euros par sponsorisation), afin que la campagne apparaisse plus souvent sur le fil d’actualité des personnes qui suivent le compte ainsi que sur celui de leurs connaissances Facebook.
  • [77]
    À titre de comparaison, les comptes Facebook de TAC et de HBH totalisent respectivement 28 208 et 33 436 mentions « J’aime » à la même date, c’est-à-dire pourtant après quatre ans et demi d’existence.
  • [78]
    Selon certains chercheurs, l’activité en ligne remplace l’activité politique hors ligne ; pour désigner cette réalité, ils ont forgé les concepts de slacktivisme (activisme fainéant) ou de clicktivisme (activisme par le clic) (cf. C. L. Glenn, « Activism or “Slacktivism”?: Digital Media and Organizing for Social Change », Communication Teacher, volume 29, n° 2, 2015, p. 81-85 ; M. Butler, « Clicktivism, Slacktivism, or “Real” Activism? Cultural Codes of American Activism in the Internet Era », Thèse de doctorat, University of Colorado, 2011). Pour d’autres chercheurs, il s’agit d’une manière de compléter l’activité hors ligne.
  • [79]
    On y lit notamment : « Right(s) now est une manifestation nationale qui rassemble diverses organisations de la société civile. Initiée par la campagne TAM TAM, nous sommes solidaires de la marche silencieuse organisée à Anvers ce dimanche. Pendant plus d’un an, nous n’avons cessé de dénoncer les conséquences du sous-financement de la justice ainsi que les inégalités, les discriminations et les violences faites aux femmes. (…) Ce dimanche 12 mai, la manifestation Right(s) now se terminera par une minute de silence et de recueillement pour Julie Van Espen et pour toutes les victimes de féminicides. Nous marcherons pour réclamer une société plus juste pour toutes et tous et porterons les noms des femmes décédées pour avoir été femmes. (…) Bruxelles marchera avec Anvers ce dimanche. Nous sommes convaincus que la transformation de ce système ne pourra s’opérer que par la mutualisation des mobilisations collectives. Pour que ces “plus jamais ça” ne soient pas vains, il nous faut agir, maintenant ! »
  • [80]
    Le CNCD-11.11.11 n’apparaît pas dans cette liste, alors qu’il a fait montre d’une importante implication dans la mobilisation.
  • [81]
    La thématique Santé est celle qui bénéficie de l’écho le plus important.
  • [82]
    W. K. Carroll, R. A. Hackett, « Democratic Media Activism through the Lens of Social Movement Theory », Media, Culture & Society, volume 28, n° 1, 2006, p. 83-104.
  • [83]
    Le logo de TAC avait figuré sur la couverture de presque tous les numéros de la revue entre 2015 et 2016.
  • [84]
    Le concept de « référendum d’initiative citoyenne autogéré » est emprunté au mouvement des Gilets jaunes.
  • [85]
    Le collectif d’artistes Bristol (dont la composition est fortement similaire au collectif TOM TOM) soutient cette démarche en placardant dans la capitale des affiches représentant divers membres des gouvernements fédéraux Michel I et II dans des situations provoquées par les mesures qu’ils ont mises en place : C. Michel, Premier ministre, est dessiné faisant la file à la porte d’un CPAS ; Marie-Christine Marghem (MR), ministre de l’Énergie, de l’Environnement et du Développement durable, est figurée portant un masque à gaz au cœur d’un monde dévasté ; Theo Francken (N-VA), ancien secrétaire d’État à l’Asile et la Migration, apparaît en déporté ; M. De Block (Open VLD), ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, est montrée allongée et sous intraveineuse dans un hôpital bondé ; Koen Geens (CD&V), ministre de la Justice, est représenté derrière des barreaux. Au bas de chaque affiche, figure la mention « Dites-lui #MerciAuRevoir » suivi du numéro de téléphone portable de la personne figurée.
  • [86]
    Par ailleurs, B. Wathelet figure parmi les initiateurs de la « déclaration non gouvernementale ». Approuvé le 11 juin 2019 et remis aux personnes chargées de former le futur gouvernement bruxellois, ce texte est le fruit de deux ans d’échanges au sein d’une coordination composée d’une trentaine de personnes issues de la société civile (cf. www.lacoordination.org). Cf. B. Biard, P. Blaise, J. Faniel, S. Govaert, C. Istasse, « La formation des gouvernements régionaux et communautaires après les scrutins du 26 mai 2019 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2444-2445, 2019.
  • [87]
    À ce sujet, cf. J. Faniel, C. Gobin, D. Paternotte (dir.), Se mobiliser en Belgique. Raisons, cadres et formes de la contestation sociale contemporaine, Louvain-la-Neuve / Paris, Academia / L’Harmattan, 2020.
  1. Introduction
  2. 1. La genèse et la mise en place de TAM TAM
    1. 1.1. Un contexte de crises sociale, climatique et migratoire
    2. 1.2. De Tout autre chose à TAM TAM
    3. 1.3. Les acteurs à l’origine de TAM TAM
    4. 1.4. Le lancement de la campagne
  3. 2. Le déroulement de la campagne
    1. 2.1. La saison 1 (février-juin 2018)
      1. 2.1.1. Le plan de communication original
      2. 2.1.2. La thématique « Santé » (février-mars 2018)
      3. 2.1.3. La thématique « Justice » (mars-avril 2018)
      4. 2.1.4. La thématique « Travail » (mai-juin 2018)
      5. 2.1.5. La journée de clôture festive « Summer Jam TAM TAM » (17 juin 2018)
    2. 2.2. La saison 2 (octobre 2018-mars 2019)
      1. 2.2.1. Présentation générale
      2. 2.2.2. La thématique « Inégalités » (octobre-novembre 2018)
      3. 2.2.3. La thématique « Climat » (novembre-décembre 2018)
      4. 2.2.4. La thématique « Fiscalité » (janvier-février 2019)
      5. 2.2.5. La thématique « Discriminations » (février-mars 2019)
      6. 2.2.6. Un incident parallèle
    3. 2.3. La saison 3 (janvier-mai 2019)
      1. 2.3.1. L’enquête (mars 2019)
      2. 2.3.2. « Right(s) here » (30 mars 2019) et « Right(s) now » (12 mai 2019)
    4. 2.4. Trois profils d’organisateurs complémentaires
  4. 3. La nature et l’objectif de TAM TAM
    1. 3.1. La nature : une « campagne de convergence », mais ni une nouvelle organisation ni un nouveau parti politique
    2. 3.2. L’objectif : une définition floue et évolutive
      1. 3.2.1. Contre le néolibéralisme ou contre le gouvernement fédéral Michel I ?
      2. 3.2.2. Contre un ennemi ou pour des alternatives ?
      3. 3.2.3. Quelle priorité dans les revendications ?
  5. 4. L’organe central de TAM TAM : le bureau
    1. 4.1. L’évolution de la composition du bureau
    2. 4.2. La forte présence des syndicats et des mutualités
    3. 4.3. L’alliance avec HBH : origines et conséquences
  6. 5. Le financement de la campagne
  7. 6. La communication de TAM TAM
    1. 6.1. L’externalisation et la professionnalisation de la communication
    2. 6.2. Les noms et les logos
    3. 6.3. Les outils et les canaux de diffusion et de communication hors ligne
    4. 6.4. Les outils et les canaux de diffusion et de communication en ligne
      1. 6.4.1. Le contenu posté sur le site Internet et les comptes de réseaux sociaux
      2. 6.4.2. Le relais sur les sites et comptes des internautes
    5. 6.5. Le relais par les associations partenaires
    6. 6.6. La présence dans les médias
      1. 6.6.1. Les médias traditionnels
      2. 6.6.2. Les médias alternatifs
  8. Conclusion
Robin Van Leeckwyck
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Le programme puis la politique du gouvernement fédéral Michel I (N-VA/MR/CD&V/Open VLD) ont provoqué une vague de contestations. Entre 2014 et 2019, les syndicats ont organisé nombre de manifestations de protestation. Parallèlement, au sein du monde associatif, de nouveaux mouvements sociaux et citoyens ont émergé, tels que Hart boven Hard (HBH), Tout autre chose (TAC), la Plateforme citoyenne de soutien aux réfugiés (BxlRefugees), les Gilets jaunes ou les marches pour le climat. Craignant de voir la coalition fédérale au pouvoir être reconduite après les élections du 26 mai 2019, différents acteurs mobilisés contre le gouvernement Michel I ont œuvré, à partir du mois de janvier 2017, à mettre en place une campagne nationale d’information, de sensibilisation et de mobilisation en vue du scrutin à venir : la campagne TAM TAM (acronyme signifiant initialement « Un tout autre mouvement pour un tout autre monde »).

Ce Courrier hebdomadaire propose une analyse détaillée de cette campagne. Il s’intéresse successivement à la genèse et à la mise en place de TAM TAM, au déroulement de la campagne (divisé en trois « saisons » entre février 2018 et mai 2019), à la nature et à l’objectif de TAM TAM, à l’organe central de TAM TAM qu’est le bureau (évolution de la composition, importance de la présence syndicaliste et mutuelliste, etc.), au financement de la campagne et à la communication de TAM TAM.

Il n’est certes pas possible de mesurer l’influence que la campagne a eue in fine sur le cours et les résultats du scrutin du 26 mai 2019 – ni même de savoir si impact il y a eu. Il n’en reste pas moins que, tout au long de sa courte existence, TAM TAM a été l’un des acteurs de l’union des luttes menées au sein du milieu associatif et syndical pour la justice sociale, climatique et migratoire.

Mis en ligne sur Cairn.info le 26/05/2020
https://doi.org/10.3917/cris.2448.0005
ISBN 9782870752357
Pour citer cet article
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