CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Le présent Courrier hebdomadaire s’inscrit dans la tradition du CRISP de consigner et d’analyser les résultats des élections européennes dans les différents États membres, et ce depuis la première élection directe des députés au Parlement européen en 1979 [*][2].

2Entre le 23 et le 26 mai 2019, quelque 200 millions d’électeurs des 28 États membres de l’Union européenne (UE) se sont rendus aux urnes pour procéder, pour la neuvième fois, à l’élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct. Plus précisément, le scrutin s’est tenu le jeudi 23 mai 2019 aux Pays-Bas et au Royaume-Uni ; le vendredi 24 mai 2019 en Irlande et en République tchèque (1er jour) ; le samedi 25 mai 2019 en Lettonie, à Malte, en République tchèque (2e jour), en Slovaquie et dans une partie de l’Outre-mer française ; le dimanche 26 mai 2019 en Allemagne, en Autriche, en Belgique, en Bulgarie, en Croatie, à Chypre, au Danemark, en Espagne, en Estonie, en Finlande, en France, en Grèce, en Hongrie, en Italie, en Lituanie, au Luxembourg, en Pologne, au Portugal, en Roumanie, en Slovénie et en Suède.

3Le système électoral est resté largement inchangé depuis le précédent scrutin européen  [3], qui s’était tenu du 22 au 25 mai 2014. Rappelons simplement ici que, parmi les règles communes à l’ensemble des États membres, et outre le principe même de l’élection au suffrage universel direct, figurent le droit de vote et d’éligibilité des non-ressortissants ayant la nationalité d’un autre État membre de l’UE que celui dans lequel ils résident, la représentation proportionnelle (avec la possibilité d’utiliser soit le système de listes soit le système de vote unique transférable), le plafonnement des seuils électoraux à 5 % des suffrages et une série d’incompatibilités du mandat parlementaire (surtout au niveau européen). Pour le reste, les modalités continuent de relever de la compétence de chaque État membre, notamment en ce qui concerne le système électoral précis retenu, les seuils applicables endéans la limite des 5 %, le découpage en circonscriptions électorales et, surtout, les conditions d’exercice du droit de vote (âge électoral, vote obligatoire ou non, notion de résidence et d’inscription pour les non-ressortissants dans le pays d’accueil, possibilité de voter depuis l’étranger) et celles d’éligibilité et de candidature (signatures, caution, date au sein de la période définie)  [4]. Au niveau européen, une révision des règles européennes tendant vers plus d’homogénéité des législations électorales nationales a bien été adoptée par le Conseil de l’Union européenne au cours de la législature 2014-2019  [5] – laquelle révision contient entre autres des dispositions sur les seuils électoraux (en particulier la mise en place d’un seuil obligatoire dans les grandes circonscriptions), les différentes méthodes de vote, la pénalisation du « double vote » et le respect d’un délai de trois semaines pour la soumission des listes. Les États membres n’ayant cependant pas tous ratifié le texte à temps, les élections européennes de mai 2019 se sont déroulées selon les règles précédemment en vigueur  [6]. L’idée de listes transnationales, qui consisterait à ce qu’une partie des eurodéputés soient élus dans une circonscription unique à l’échelle européenne, a quant à elle été écartée.

4Entre les élections européennes de mai 2014 et celles de mai 2019, aucune modification n’est intervenue dans la répartition des sièges entre États membres. En revanche, un certain nombre de changements dans cette répartition interviendront au moment de la sortie effective du Royaume-Uni de l’Union européenne, si et quand celle-ci aura lieu (cf. Tableau 1)  [7]. Il sera alors procédé à une redistribution d’une partie du quota britannique vers des États membres que la distribution actuelle défavorise, et ce afin de réduire divers écarts de représentation entre États membres. Car si le Traité de Lisbonne actuellement en vigueur fixe un minimum (6) et un maximum (96) d’eurodéputés par État membre, un principe de « proportionnalité dégressive » doit également être respecté. Proportionnalité, d’une part, parce qu’un pays comptant une population plus importante ne peut pas se voir attribuer moins de sièges au Parlement européen qu’un pays moins peuplé (autrement dit, plus un État est peuplé, plus il a d’eurodéputés). Dégressive, d’autre part, car plus un État est peuplé, plus le nombre de députés européens par habitant de cet État est faible. Un eurodéputé élu en Allemagne (pays qui est le plus grand État de l’UE) représente donc nettement plus de citoyens européens qu’un eurodéputé élu à Malte (pays qui est le plus petit État membre de l’UE). Néanmoins, l’établissement des contingents d’eurodéputés et les tractations qui l’ont accompagné ont conduit à certains déséquilibres flagrants et notamment à une sous-représentation de certains pays (Espagne, France et Italie en tête)  [8]. Dans la répartition actuelle, l’Espagne compte un député européen pour 865 000 habitants, là où par exemple cette proportion est d’un eurodéputé pour 540 000 personnes en Belgique. Si le Brexit se produit, 27 des 73 sièges jusqu’à présent britanniques seront donc réattribués pour réduire ces déséquilibres ; en particulier, l’Espagne et la France disposeront chacune de 5 sièges de plus, l’Italie et les Pays-Bas gagneront 3 sièges, et l’Irlande se verra attribuer 2 sièges supplémentaires. Pour leur part, les 46 sièges anciennement britanniques restants seront purement et simplement supprimés. De 751, le Parlement européen passera donc à 705 membres. Pour l’instant, les sièges à réattribuer sont temporairement « gelés » : les personnes élues pour les occuper ne peuvent pas encore siéger au Parlement européen. L’impact du Brexit sera donc aussi à mesurer en fonction du nouveau rapport de force qui émergera au Parlement européen suite à cette redistribution.

Tableau 1. Nombre de sièges à pourvoir au Parlement européen par État membre pour les législatures 2014-2019 et 2019-2024

Tableau 1. Nombre de sièges à pourvoir au Parlement européen par État membre pour les législatures 2014-2019 et 2019-2024

Tableau 1. Nombre de sièges à pourvoir au Parlement européen par État membre pour les législatures 2014-2019 et 2019-2024

* Total des sièges après la sortie effective du Royaume-Uni de l’Union européenne. Avant cette date, qui reste encore à définir, le nombre de sièges reste identique à celui de la législature précédente.

5Comme toujours dans le cas des élections européennes, l’enjeu principal du scrutin réside dans l’intérêt porté par les citoyens aux questions européennes. Chaque scrutin est l’occasion de se demander à quel point la qualification d’« élections de second ordre »  [9] – c’est-à-dire de moindre importance que d’autres types de scrutin (à commencer par les scrutins nationaux) dans le chef des électeurs comme dans celui des partis – s’applique, ou si, au contraire, l’intérêt pour les questions européennes va grandissant. La campagne électorale, souvent courte, et le relai dont elle fait l’objet dans les médias constituent un premier marqueur de cette prise de conscience ou de son absence. En 2019, à l’approche des élections européennes, le Parlement européen a lancé une campagne intitulée « Cette fois, je vote », basée sur un site Internet et sur un clip vidéo, lesquels ont été assez largement diffusés.

6En 2014, pour la première fois, les élections européennes semblaient avoir pris une dimension européenne, mais il s’était avéré que cet intérêt n’avait en réalité été que fortuit : il s’agissait en grande partie de préoccupations nationales, lesquelles – dans le sillage de la crise économique et financière et des politiques d’austérité – avaient revêtu une dimension européenne dans un « reflet déformé des préoccupations politiques nationales »  [10]. S’il fallait trouver un enjeu européen au scrutin de 2019, on penserait assez spontanément à la crise migratoire de l’automne 2015, laquelle – au-delà de la question humanitaire – a mis en lumière l’impasse dans laquelle se trouve le système de décision européen en cas de non-coopération d’une partie des États membres. Il ne faut pas pour autant oublier les autres enjeux qui ont rythmé la législature 2014-2019, et notamment les suites de la crise économique et financière. Un certain nombre d’États membres ont continué, au cours des cinq années écoulées, à mettre en œuvre des plans de rigueur budgétaire afin de pouvoir bénéficier d’aides financières internationales. En Grèce, si la population a massivement rejeté par référendum le projet de la « troïka » – Commission européenne, Banque centrale européenne (BCE) et Fonds monétaire international (FMI) – en 2015, le gouvernement a néanmoins été contraint de maintenir des mesures d’austérité drastiques. En Italie, la détérioration des comptes publics et l’augmentation de la dette dans la troisième économie de la zone euro a conduit la Commission européenne à ouvrir une procédure pour déficit excessif au printemps 2019. Le débat suscité par ces questions reste vif et, bien entendu, non dépourvu de considérations idéologiques. Dans le même temps, les préoccupations environnementales ont occupé une place croissante. Initiées par la Suédoise Greta Thunberg à l’été 2018, des « grèves scolaires et étudiantes pour le climat » ont fait florès, des élèves et des étudiants quittant les établissements d’enseignement pour prendre part à des manifestations en faveur de mesures climatiques plus ambitieuses. Soutenus par des scientifiques, les fridays for future (« vendredis pour l’avenir ») organisés par plusieurs mouvements (Youth for Climate, Students for Climate, etc.) ont pris de l’ampleur au printemps 2019 et ont eu un grand retentissement dans plusieurs pays européens, au premier rang desquels l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.

7Au niveau institutionnel, les élections européennes de mai 2014, les premières à s’être déroulées après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, avaient inauguré le système dit des Spitzenkandidaten. Alors que le Traité prévoyait simplement qu’il devait être tenu compte du résultat du scrutin européen lors de la désignation du président de la Commission européenne  [11], les partis politiques au niveau européen  [12] s’étaient saisis de cette disposition pour présenter chacun leur « candidat désigné » à cette fonction. Une « campagne européenne » avait même été organisée, incluant des débats publics contradictoires entre ces différents candidats. Force est de constater que cette nouveauté, qui avait pour ambition de réconcilier les citoyens avec les systèmes politique européen, n’avait guère ému l’opinion publique et n’avait dès lors pas réellement pesé sur l’issue du vote. Il n’en demeure pas moins que le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, Spitzenkandidat du Parti populaire européen (PPE), avait été désigné comme président de la Commission européenne, en parfait accord tant avec l’esprit qu’avec la lettre du Traité.

8Le scrutin de mai 2019 devait donc faire, à cet égard, figure de test. Mais le candidat désigné par le parti arrivé en tête (une nouvelle fois le PPE, cf. infra), l’Allemand Manfred Weber, a été rapidement considéré comme trop inexpérimenté pour remplir la plus haute fonction exécutive de l’UE. Le Conseil européen, l’institution qui réunit les chefs d’État ou de gouvernement, a alors repris la main sur le processus et s’est lancé dans de longues négociations qui ont abouti, le 2 juillet 2019, à un « package » de désignations aux quatre plus hautes fonctions de l’UE : l’Allemande Ursula von der Leyen à la présidence de la Commission européenne, le Belge Charles Michel à celle du Conseil européen, l’Espagnol Josep Borrell comme haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et la Française Christine Lagarde à la présidence de la BCE.

9Après que ces éléments ont permis de replacer le scrutin européen de mai 2019 dans son contexte à l’échelle du continent, le premier chapitre du présent Courrier hebdomadaire propose une vue rapprochée, s’attachant à décrire et à analyser les résultats électoraux pays par pays. Pour chaque État membre est respecté un canevas identique. D’une part, il est proposé un rappel succinct des résultats des élections européennes de mai 2014 et un bref résumé de l’évolution de la situation politique dans cet État membre entre 2014 et 2019. D’autre part, les résultats des élections européennes de mai 2019 sont détaillés. Rassemblant les pièces du puzzle, le second chapitre de l’étude brosse un tableau général du scrutin de mai 2019 à l’échelle européenne.

10La présente étude se fonde sur différentes sources de données : les résultats tels que publiés sur le site Internet du Parlement européen, les sites des Ministères de l’Intérieur des différents États membres et la base de données ParlGov  [13].

1. Résultats des élections européennes par État membre

11Ce premier chapitre s’attache à décrire et à analyser, État membre par État membre, les résultats du scrutin européen de mai 2019.

12Dans un premier temps, est détaillée l’évolution de la situation politique dans le pays depuis l’élection européenne de mai 2014, avec pour principal fil conducteur les scrutins nationaux ayant pris place au cours de la législature européenne 2014-2019 et les principales compositions et recompositions gouvernementales étant intervenues au cours de cette période  [14]. Exceptionnellement, des éléments antérieurs sont rappelés afin de mieux contextualiser les événements. Dans un second temps, les résultats de l’élection européenne de mai 2019 sont mis en contexte et sont comparés à ceux des élections européennes de mai 2014. Pour les illustrer, un tableau procède à une comparaison des scrutins de 2014 et de 2019  [15].

13Il est à noter que les résultats présentés sont par défaut ceux agrégés au niveau national  [16]. Quand cela est nécessaire, des indications sont données quant aux scores dans les circonscriptions (en particulier, dans le cas de la Belgique et du Royaume-Uni). Le nombre de circonscriptions utilisées pour l’élection européenne est systématiquement donné, hormis lorsque ce nombre est d’une seule circonscription.

1.1. Allemagne

1.1.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

14Au moment des élections européennes de mai 2014, l’Allemagne est gouvernée depuis le 22 septembre 2013 par une « grande coalition » alliant la Christlich Demokratische Union (CDU : Union chrétienne démocrate), la Christlich-Soziale Union in Bayern (CSU : Union chrétienne sociale de Bavière) et le Sozialdemokratische Partei Deutschlands (SPD : Parti social-démocrate d’Allemagne). Ce gouvernement est dirigé par la chancelière Angela Merkel (CDU).

15Le sort des principaux partenaires du gouvernement allemand au scrutin européen de mai 2014 par rapport aux élections européennes de 2009 est contrasté : tandis qu’un certain recul est observé dans le chef de la CDU (– 0,7 % des voix et – 5 sièges), dont le résultat s’établit à 30,0 % et 29 sièges, et dans celui de son allié bavarois, la CSU (– 1,9 % et – 3 sièges), à 5,3 % et 5 sièges, le SPD progresse nettement (+ 6,5 % et 4 sièges) en décrochant 27,3 % et 27 sièges. Une tendance inverse est observée chez la formation écologiste Bündnis 90 / Die Grünen (B90/DG : Alliance 90 / Les Verts), qui passe de 12,1 % et 14 sièges à 10,7 % et 11 sièges. Le parti de gauche radicale Die Linke (DL : La Gauche) ne s’en sort guère mieux : en récoltant 7,4 % et 7 sièges, il ne recule certes que de – 0,1 %, mais cela se traduit par la perte d’un siège. Son résultat s’établit ainsi au même niveau que celui de son exact opposé sur l’échiquier politique : l’Alternative für Deutschland (AfD : Alternative pour l’Allemagne), lequel, pour sa première participation à un scrutin européen, s’adjuge 7 sièges avec 7,1 % des voix. Cette performance contraste avec le recul spectaculaire enregistré par le Freie Demokratische Partei (FDP : Parti libéral-démocrate), qui ne récolte plus que 3,4 % des suffrages (– 7,6 %) et perd les trois quarts de sa représentation parlementaire (de 12 à 3 sièges). Du fait de la suppression du seuil électoral de 5 % auparavant nécessaire pour participer à la dévolution des sièges  [17], les autres grands vainqueurs du scrutin sont à trouver dans la myriade de petits partis n’ayant jamais recueilli de siège, voire ne s’étant jamais présentés à un scrutin européen auparavant. Ainsi, sept autres formations politiques font leur entrée au Parlement européen, en récoltant un seul siège chacune : les Freie Wahler (FW : Électeurs libres) avec 1,5 %, le Piratenpartei Deutschland (Piraten : Parti pirate d’Allemagne) avec 1,4 %, le Partei Mensch Umwelt Tierschutz (Tierschutzpartei : Parti de la protection animale) avec 1,2 %, le Nationaldemokratische Partei Deutschlands (NPD : Parti national-démocratique d’Allemagne) avec 1,0 %, le Familien-Partei Deutschlands (Familie : Parti des familles d’Allemagne) avec 0,7 %, le Partei für Arbeit, Rechtsstaat, Tierschutz, Elitenförderung & Basisdemokratische Initiative (Die Partei : Parti pour le travail, l’État de droit, la protection des animaux, l’élitisme et l’initiative démocratique) avec 0,6 % et enfin l’Ökologisch-Demokratisch Partei (ÖDP : Parti écologiste-démocrate) avec 0,6 %.

16En mars 2017, Frank-Walter Steinmeier (SPD) devient président de la République fédérale d’Allemagne, succédant ainsi à Joachim Gauck, qui avait choisi de ne pas se représenter.

17Les élections législatives du 24 septembre 2017 sont marquées par un recul des deux grands partis historiques : la CDU-CSU, qui ne recueille plus que 33,0 % des voix et 246 sièges au Bundestag (– 8,5 % et – 65 sièges), et le SPD, qui totalise à peine 20,5 % des suffrages et 153 sièges (– 5,2 % et surtout – 40 sièges), soit leurs pires résultats respectifs depuis 1945. Surtout, le scrutin de 2017 voit l’entrée au Bundestag de l’AfD : ce parti obtient 12,6 % des suffrages (+ 7,9 %), score qui lui permet d’obtenir d’un seul coup 94 sièges. Cette entrée massive au Parlement fédéral d’un parti généralement classé à l’extrême droite, et ce pour la première fois depuis 1949, marque fortement les esprits, d’autant qu’elle semble liée assez directement à la crise des réfugiés, qui s’est avérée particulièrement clivante outre-Rhin. Un autre fait marquant du scrutin est le retour du FDP (qui progresse de + 5,9 %, passant ainsi à 10,7 %) au Bundestag avec 80 sièges  [18]. B90/DG progresse peu, passant de 8,4 % à 8,9 % et s’adjugeant 67 sièges (+ 4). Il est encore à noter que le score de DL s’établit lors de ce scrutin à 9,2 % (+ 0,6 %), avec 69 sièges (+ 5).

18Si écologistes et libéraux sont d’abord pressentis pour former un gouvernement avec les chrétiens-démocrates, les négociations pour la mise en place d’une coalition « Jamaïque » échouent finalement. Une grande coalition CDU-CSU/SPD est donc à nouveau mise en place le 14 février 2018 (gouvernement Merkel IV). Si la mise en place de la coalition s’est avérée particulièrement compliquée, sa gestion l’est tout autant et beaucoup d’incertitudes demeurent sur sa pérennité, notamment au vu des perspectives de croissance économique peu réjouissantes. C’est dans ce contexte troublé qu’A. Merkel annonce son départ de la présidence de la CDU et que s’organise sa succession. L’élection à la tête du parti est remportée, en décembre 2018, par Annegret Kramp-Karrenbauer, ancienne ministre-présidente de la Sarre.

1.1.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

19L’Allemagne dispose de 96 sièges au Parlement européen, soit autant qu’en 2014. Le taux de participation a été de 61,4 %, soit un très net regain de participation (+ 13,3 %) par rapport à 2014 (48,1 %).

20Avec 28,9 %, l’union CDU-CSU est en fort recul en pourcents (– 6,4 %) et en sièges (de 34 à 29, soit – 5 sièges), bien que sa chute soit nettement moins vertigineuse que celle de son partenaire de coalition, le SPD, qui passe de 27,3 % à 15,8 % (– 11,5 %) et de 27 à 16 sièges (– 11), perdant par là sa deuxième place au profit des écologistes. Ainsi, DG/B90 se redresse nettement avec 20,5 % des suffrages (+ 9,8 %) et 21 sièges (+ 10). Le grand gagnant des élections fédérales de 2017, l’AfD, est en léger recul par rapport à celles-ci, mais améliore toutefois son score européen de 2014, en enregistrant 11,0 % des voix (+ 4,1 %) et 11 sièges (+ 4). Le résultat de DL s’établit à 5,5 % (– 1,9 %) et 5 sièges (– 2). Le FDP ne parvient pas à réitérer son score fédéral, mais progresse toutefois de + 2,1 % et + 2 sièges (5,4 % et 5 sièges).

21Pour la seconde fois, principalement en raison de l’absence de seuil électoral, le scrutin européen en Allemagne est marqué par l’obtention de sièges par un grand nombre de formations mineures. Deux d’entre elles, entrées en 2014, parviennent à doubler leur nombre de sièges en en obtenant 2 : Die Partei, qui passe de 0,6 % à 2,4 %, et les FW, qui progressent de 1,5 % à 2,2 %. Les formations suivantes conservent leur seul siège acquis en 2014 : le Tierschutzpartei avec 1,4 % (+ 0,2 %), l’ÖDP avec 1,0 % (+ 0,4 %), le Piraten avec 0,7 % (tout en divisant son score précédent par deux : – 0,7 %) et le Familie qui réalise le même score que précédemment, avec 0,7 % des suffrages. Un nouveau parti fait son entrée au Parlement européen : le mouvement pro-européen et transnational Volt Europa (VOLT), en obtenant lui aussi 0,7 % des voix, tandis que le parti néo-nazi NPD perd son seul siège (0,3 % ; – 0,7 %).

Tableau 2. Élection du Parlement européen. Résultats en Allemagne (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 2. Élection du Parlement européen. Résultats en Allemagne (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 2. Élection du Parlement européen. Résultats en Allemagne (en % et en sièges, 2014-2019)

1.2. Autriche

1.2.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

22À partir de 2014, l’Autriche dispose de 18 sièges au Parlement européen. Le système électoral autrichien présente la particularité, au sein de l’UE, d’accorder le droit de vote dès l’âge de 16 ans (seule Malte le fait également).

23À l’occasion du cinquième scrutin européen organisé dans le pays, en mai 2014, le Sozialdemokratische Partei Österreichs (SPÖ : Parti social-démocrate d’Autriche) est en léger progrès de + 0,4 % (de 23,7 % à 24,1 %), réduisant ainsi son écart en pourcentage des suffrages exprimés par rapport au conservateur Österreichische Volkspartei (ÖVP : Parti populaire autrichien), qui recule pour sa part de – 3,0 % (de 30,0 % à 27,0 %). Les deux formations récoltent cependant toutes les deux 5 sièges, soit + 1 pour le SPÖ et – 1 pour l’ÖVP. En bien plus net progrès, de + 7,0 % (de 12,7 % à 19,7 %), le Freiheitliche Partei Österreichs (FPÖ : Parti de la liberté d’Autriche) double, quant à lui, sa représentation parlementaire (passant de 2 à 4 sièges) et se hisse à la troisième place. Le parti Die Grünen (G : Les Verts) est lui aussi en net progrès, gagnant + 4,6 % (de 9,9 % à 14,5 %), et s’adjuge un siège supplémentaire (3 au lieu de 2). Le parti libéral Das Neue Österreich (NEOS : La nouvelle Autriche), déjà implanté au niveau national depuis 2013, fait son entrée au Parlement européen avec 8,1 % des voix et 1 siège. La Liste Hans-Peter Martin (HPM : Liste de Hans-Peter Martin) disparaît de l’assemblée européenne, où elle disposait précédemment de 3 sièges.

24L’Autriche est sans conteste l’un des pays connaissant les plus grands bouleversements politiques au cours de la législature européenne 2014-2019. Elle passe d’un gouvernement de « grande coalition » dominé par le SPÖ suite aux élections du 29 septembre 2013 à une alliance entre l’ÖVP (dominé par son aile droite) et le FPÖ (qui est un parti d’extrême droite) à partir de 2017.

25Cette évolution se dessine avec l’élection du président de la République en 2016. Ce scrutin, bien qu’assez largement honorifique, donne lieu à une forte polarisation entre la gauche (qui s’unit sans grande conviction derrière Alexander Van der Bellen, candidat indépendant mais soutenu par les G) et l’extrême droite (et son candidat Norbert Hofer), alors même que, pour la première fois en 65 ans, les deux formations traditionnelles autrichiennes ne franchissent pas le premier tour de ce scrutin. Si les résultats, très serrés, du second tour, sont entachés d’irrégularité et finalement invalidés par la Cour constitutionnelle, le candidat écologiste l’emporte finalement en décembre 2016.

26Les élections fédérales du 15 octobre 2017 entérinent les transformations du système partisan autrichien. Assez paradoxalement, les partenaires de la « grande coalition » ne subissent pas de revers électoral. Le SPÖ se maintient à son score de 2013 en obtenant 26,9 % des suffrages (+ 0,1 %) et 52 sièges (statu quo). L’ÖVP, sous la houlette de son nouveau leader, Sebastian Kurz, progresse même très nettement en s’établissant à 31,5 % (+ 7,5 %) et 62 sièges (+ 15). C’est donc surtout le changement de parti dominant, pourtant assez fréquent dans le pays, qui provoque un changement d’alliance. L’ÖVP, qui a la main, décide de former un gouvernement avec le FPÖ, dont le progrès dans les urnes, bien que relativement mesuré, le place à quelques encablures à peine du SPÖ : 26,0 % (+ 5,5 %) et 51 sièges (contre 40 auparavant). Derrière ces trois partis dominants, les autres formations éprouvent des difficultés à tirer leur épingle du jeu : NEOS ne progresse guère, avec 5,3 % (+ 0,3 %) et 10 sièges (+ 1), tandis que les G, en net recul avec 3,8 % (– 8,6 %), ne parviennent pas à passer le seuil électoral de 4 % et perdent ainsi toute représentation au Nationalrat (– 24 sièges). La Team Stronach für Österreich(TS : Équipe Stronach pour l’Autriche) se retire du scrutin et perd donc ses 11 sièges au Nationalrat. Une nouvelle formation politique, issue du départ de Peter Pilz des G, la Peter Pilz List (Pilz : Liste Peter Pilz), fait son entrée avec 8 élus et 4,4 % des voix.

27La coalition qui se met en place le 18 décembre 2017, dite turquoise-bleue, est l’une des plus conservatrices en Europe ; également en Autriche, une coalition similaire avait déjà été mise en place entre 2000 et 2007. Le gouvernement Kurz dispose d’une large majorité de 113 sièges sur 183 au Nationalrat.

28À l’aube du scrutin européen de 2019, le 18 mai précisément, le leader du FPÖ et vice-chancelier Heinz-Christian Strache est contraint à la démission sur fond d’un scandale politico-financier : l’« Ibizagate ». Dans une vidéo tournée en « caméra cachée » datant de 2017, on le voit proposer à une femme – qui se serait présentée à lui comme la nièce d’un oligarque russe – l’octroi de contrats publics en échange d’un financement de la campagne électorale du FPÖ, notamment à travers l’achat de parts d’un tabloïd autrichien, le Kronen Zeitung. Dans le sillage de ce scandale, sont annoncées des élections législatives anticipées pour septembre 2019 ; le ministre de l’Intérieur (Herbert Kickl, FPÖ) est exclu du gouvernement, avant que ne démissionnent l’ensemble des ministres du parti d’extrême droite, remplacés par des indépendants. Une motion de censure déposée par les députés de JETZT - Liste Pilz (Maintenant - Liste Pilz) est adoptée grâce au soutien du SPÖ et du FPÖ ; elle aboutit au renversement du gouvernement. Le vice-chancelier Hartwig Löger (ÖVP) assure l’intérim pendant six jours, avant que la présidente de la Cour constitutionnelle, Brigitte Bierlein, soit désignée chancelière par le président de la République jusqu’aux prochaines élections. Première femme à occuper ce poste, elle s’appuie sur un gouvernement de technocrates.

29Les législatives anticipées auront lieu le 29 septembre 2019 et confirmeront la prééminence de l’ÖVP, qui récoltera 37,5 % des voix et 71 des 183 sièges au Nationalrat, assez nettement devant le SPÖ (21,2 % et 40 sièges). Même si le FPÖ subira un revers important, il totalisera tout de même encore 16,2 % et 31 députés, ce qui continuera de le placer devant les G (13,9 % et 26 sièges) qui, en enregistrant pourtant un rebond de plus de 10 %, seront souvent présentés comme les principaux vainqueurs du scrutin. NEOS complétera la représentation parlementaire avec 8,1 % et 15 sièges.

1.2.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

30Si le nombre de sièges à pourvoir par la délégation autrichienne reste inchangé en 2019 (18), celle-ci se verra renforcée d’un siège (soit 19 au total) en cas de sortie effective du Royaume-Uni de l’UE. La participation lors du scrutin européen du 26 mai 2019 s’établit à 59,8 % en Autriche, soit un net progrès (+ 14,4 %) par rapport à 2014 (45,4 %). Si l’on exclut les premières élections européennes ayant eu lieu dans le pays en 1996, c’est le meilleur taux de participation jamais enregistré à ce type de scrutin. Ajoutons que le taux de participation y est potentiellement abaissé par le droit de vote des jeunes (dès 16 ans), lesquels votent structurellement moins, et l’on peut alors prendre la pleine mesure de l’ampleur de la mobilisation pour ce scrutin.

31Le scrutin européen de mai 2019 confirme la domination actuelle de l’ÖVP sur l’échiquier politique autrichien. Le parti du Premier ministre obtient 34,6 % des suffrages et 7 sièges, ce qui en fait la seule formation politique en net progrès par rapport au scrutin de 2014 (+ 7,6 % et + 2 sièges). Le SPÖ se maintient (– 0,2 % ; 23,9 %) et conserve ses 5 sièges. Le recul du FPÖ est certes un peu plus net par rapport à 2014 (– 2,5 % et – 1 siège ; 17,2 % et 3 sièges), mais c’est surtout un revers au vu de ses bons résultats aux élections fédérales d’octobre 2017. À l’inverse, les G, privés de représentation au Nationalrat, se rassurent à l’occasion d’un scrutin qui leur est certes, structurellement comme conjoncturellement, plus favorable : ils obtiennent 14,1 % des voix, soit quasiment leur niveau de 2014 (– 0,4 %) et, s’ils perdent leur troisième siège, celui-ci leur sera réattribué si et au moment où le Brexit se produit. Le dernier siège revient au NEOS avec un progrès très mesuré (+ 0,3 % avec 8,4 % ; statu quo au niveau des sièges). La JETZT - Liste Pilz échoue à remporter un siège.

Tableau 3. Élection du Parlement européen. Résultats en Autriche (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 3. Élection du Parlement européen. Résultats en Autriche (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 3. Élection du Parlement européen. Résultats en Autriche (en % et en sièges, 2014-2019)

1.3. Belgique

1.3.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

32En Belgique, les élections européennes de mai 2014 sont non seulement couplées aux élections régionales et communautaires (ce qui est toujours le cas), mais également, pour la deuxième fois dans l’histoire politique belge, aux élections fédérales. Dès lors, le débat politique porte très peu sur le niveau européen.

33Parmi les 8 sièges devant être attribués au collège électoral français, le Mouvement réformateur (MR) gagne 1 siège (de 2 à 3) en progressant de 26,1 % à 27,1 % (+ 1,0 %). Tant le Centre démocrate humaniste (CDH) (en recul de 13,3 % à 11,4 %, soit – 1,9 %) que le Parti socialiste (PS) (en très léger progrès de 29,1 % à 29,3 %, soit + 0,2 %) conservent leur représentation parlementaire, soit respectivement 1 et 3 sièges. Écolo perd la moitié de son électorat (de 22,9 % à 11,7 %, soit – 11,2 %) et ne conserve qu’un seul de ses 2 strapontins.

34Au sein du collège électoral néerlandais, pourvoyeur de 12 sièges, l’événement marquant est sans conteste la nette victoire de la Nieuw-Vlaamse Alliantie (N-VA : Nouvelle alliance flamande), qui passe de 9,9 % et 1 siège en 2009 à 26,7 % et 4 sièges (soit + 16,8 % et + 3 sièges)  [19]. L’Open Vlaamse Liberalen en Democraten (Open VLD : Libéraux et démocrates flamands ouverts) conserve ses 3 élus en dépit d’un léger tassement de – 0,2 % (de 20,6 % à 20,4 %). Bien que son score soit stable en pourcents (13,2 %), le Socialistische Partij Anders (SP.A : Parti socialiste autrement) perd 1 siège (il passe de 2 à 1). Le Christen-Democratisch en Vlaams (CD&V : Chrétiens-démocrates et flamands) perd également 1 siège (de 3 à 2), reculant de 23,3 % à 20,0 % (– 3,3 %). Groen (Groen : Vert) progresse de + 2,7 % (de 7,9 % à 10,6 %) en voix, mais enregistre un statu quo en sièges (1). Le Vlaams Belang (VB : Intérêt flamand) s’effondre de 15,9 % à 6,8 % (– 9,1 %) et ne conserve qu’un seul de ses 2 sièges. Enfin, le parti Libertair, Direct, Democratisch (LDD : Libertaire, direct, démocratique), qui avait 1 siège dans l’assemblée sortante, ne présente plus de liste.

35Au sein du collège électoral germanophone, l’unique siège à pourvoir reste dévolu au Christlich Soziale Partei (CSP : Parti social-chrétien), qui recule cependant de 32,3 % à 30,3 % (– 2,0 %). Le Partei für Freiheit und Fortschritt (PFF : Parti pour la liberté et le progrès) est en net recul de – 4,3 % (de 20,4 % à 16,1 %). Le Sozialistische Partei (SP : Parti socialiste) et Ecolo progressent, respectivement de + 0,5 % (de 14,6 % à 15,1 %) et de + 1,0 % (de 15,6 % à 16,6 %). Le parti régionaliste Pro Deutschsprachigen Gemeinschaft (ProDG : Pro-Communauté germanophone) progresse pour sa part plus nettement, de 10,1 % à 13,2 % (+ 3,1 %).

36À quelques nuances près, les résultats des élections fédérales et des élections régionales et communautaires du même jour suivent une répartition des voix similaire  [20]. À la suite de ces différents scrutins, sont formés le gouvernement fédéral et les gouvernements des entités fédérées  [21]. Alors que le gouvernement flamand est orienté à droite (N-VA/CD&V/ Open VLD), le gouvernement wallon et celui de la Communauté française sont des exécutifs de centre-gauche, alliant PS et CDH. En Région de Bruxelles-Capitale, les Fédéralistes démocrates francophones (FDF) se joignent à ces mêmes partenaires de coalition, PS et CDH, du côté francophone, tandis que le côté néerlandophone de l’attelage comprend l’Open VLD, le SP.A et le CD&V. Au niveau fédéral, les négociations durent près de cinq mois, avant que ne se noue, fin octobre 2014, une coalition inédite qui ne comprend qu’un seul parti francophone, le MR, allié aux trois grands partis flamands de droite, la N-VA, grand vainqueur des élections, le CD&V et l’Open VLD. Les libéraux francophones disposent du poste de Premier ministre (qui revient à Charles Michel).

37En décembre 2018, la N-VA quitte le gouvernement fédéral Michel I suite à son désaccord quant à la signature par la Belgique du Pacte mondial de l’ONU pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, dit Pacte de Marrakech. La perspective d’élections anticipées est assez rapidement écartée, et le gouvernement fédéral Michel II (MR/CD&V/Open VLD) finit la législature en affaires courantes, avec trois partis qui, ensemble, ne représentent plus que 52 sièges sur 150 à la Chambre des représentants. Pour sa part, le gouvernement wallon Borsus (MR/CDH – qui a succédé au gouvernement Magnette (PS/CDH) en juillet 2017 – perd sa majorité en fin de législature suite à la défection d’une députée MR.

1.3.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

38En 2019, la Belgique doit, comme en 2014, élire 21 députés au Parlement européen, à raison de 8 sièges pour le collège électoral français, 12 pour le collège électoral néerlandais et 1 pour le collège électoral germanophone. Le taux de participation est de 88,5 %, contre 89,6 % en 2014 (soit – 1,1 %), soit le plus taux le plus bas jamais enregistré dans le pays pour un scrutin européen (et ce alors que le vote y est obligatoire).

39Pour les élections européennes, le territoire belge est découpé en quatre circonscriptions (wallonne, flamande, de Bruxelles-Capitale et germanophone), tandis que les listes de candidats et les électeurs sont répartis en trois collèges linguistiques (français, néerlandais et germanophone). Dans la circonscription wallonne, qui correspond à la région de langue française, les électeurs appartiennent tous au collège français. Dans la circonscription flamande, qui correspond à la région de langue néerlandaise, les électeurs appartiennent tous au collège néerlandais. Dans la circonscription de Bruxelles-Capitale, qui correspond à la région bilingue de Bruxelles-Capitale, ainsi que dans le canton de Rhode-Saint-Genèse (situé en région flamande et regroupant les six communes dites à facilité linguistique de la périphérie bruxelloise), les électeurs choisissent par leur vote d’appartenir au collège français ou au collège néerlandais. Dans la circonscription germanophone, qui correspond à la région de langue allemande, les électeurs appartiennent tous au collège germanophone.

40Au sein du collège électoral français, les deux grands vainqueurs en termes de progression sont Écolo, dont le score croît de + 8,2 % (19,9 %) et qui reprend le second siège qu’il avait perdu en 2014, et le Parti du travail de Belgique (PTB), qui progresse de + 9,1 % (14,6 %) et conquiert son premier siège européen. Ces deux sièges sont conquis aux dépens du PS et du MR. Le score du PS s’établit à 26,7 %, soit un recul de – 2,6 % par rapport aux élections européennes de 2014, et le parti perd un de ses 3 sièges. Néanmoins, le PS conserve la place de premier parti qu’il occupe sans discontinuer depuis 1979 à ce niveau de pouvoir, à l’exception du scrutin de 1999. Le MR connaît le même sort en sièges, même si son recul est nettement plus marqué en voix (– 7,8 % ; 19,3 %). Le CDH recule plus légèrement (– 2,5 % ; 8,9 %) mais conserve son unique siège.

41Au sein du collège électoral néerlandais, seul le VB progresse significativement, passant de 6,8 à 12,3 % des suffrages exprimés et triplant sa représentation (en passant de 1 à 3 sièges). Les partis ayant été membres du gouvernement fédéral et du gouvernement flamand durant la législature se tassent tous : la N-VA perd 4,3 % et 1 siège (22,4 % ; 3 sièges), l’Open VLD recule de – 4,4 % et cède 1 siège également (16,0 % ; 2 sièges), le CD&V conserve ses 2 sièges malgré une chute de – 5,5 % (14,5 %). Pour sa part, le SP.A sauve son unique strapontin malgré une perte sèche de – 3,0 % (10,2 %). C’est donc à la N-VA et à l’Open VLD que le VB prend des sièges. Cette situation n’est pas sans rappeler celle de 2004, où le VB s’était adjugé la deuxième place, juste derrière le cartel CD&V–N-VA. Le score de Groen, qui, avec 12,4 %, gagne + 1,8 % et conserve son siège, est relativement décevant au vu des résultats escomptés.

42Au sein du collège électoral germanophone, sans suspense, le CSP garde l’unique siège à pourvoir, tout en progressant nettement (+ 4,6 % ; 34,9 %). Rappelons que le parti avait subit un recul particulièrement important lors du dernier scrutin européen, qu’il réussit donc à combler en partie. Il relègue à bonne distance ces principaux concurrents, dont presque aucun ne parvient à progresser.

Tableau 4. Élection du Parlement européen. Résultats en Belgique (en % et en sièges, 2009-2014)

Tableau 4. Élection du Parlement européen. Résultats en Belgique (en % et en sièges, 2009-2014). A. Collège électoral français .B. Collège électoral néerlandais. C. Collège électoral germanophone

Tableau 4. Élection du Parlement européen. Résultats en Belgique (en % et en sièges, 2009-2014)

1.4. Bulgarie

1.4.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

43À l’occasion du scrutin européen de 2014 en Bulgarie, le Grazdani za Evropeisko Razvitie na Balgarija (GERB : Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie) confirme largement sa prééminence sur la scène politique bulgare en obtenant 30,4 % (+ 6,0 % par rapport aux élections européennes de juin 2009) et 6 sièges (+ 1). Le parti de centre-droit précède de loin le social-démocrate Bulgarska Sotsialisticheska Partiya (BSP : Parti socialiste bulgare), qui progresse pourtant très légèrement en voix par rapport au scrutin européen précédent, avec 18,9 % (+ 0,4 %) mais pas en sièges (4 sièges, statu quo). Le Dvizhenie za Prava i Svobodi (DPS : Mouvement des droits et des libertés), parti libéral principalement centré sur la défense des intérêts des Turcs et musulmans de Bulgarie, progresse plus nettement, en s’établissant à 17,2 % (+ 2,8 %) et 4 sièges (+ 1). Deux coalitions obtiennent des sièges d’eurodéputé. La première est la Bulgaria bez Cenzury (BBT : Bulgarie sans censure), qui regroupe notamment l’eurosceptique VMRO - Bulgarsko Natsionalno Dvizhenie (VMRO-BND : VMRO - Mouvement national bulgare), la Zemedelski Naroden Sajuz (ZNS : Union populaire agrarienne) et le Dvizhenie Gergyovden (DG : Mouvement du jour de Saint-Georges). La seconde est le Reformatorski Blok (RB : Bloc réformiste), qui réunit cinq formations : Sayuz na Demokratichnite Sili (SDS : Union des forces démocratiques), Bǎlgarski Zemedelski Naroden Sǎjuz (BZNS : Union nationale agraire bulgare), Demokrati za Silna Bălgarija (DSB : Démocrates pour une Bulgarie forte), Dvizhenie « Bulgariya na Grazhdanite » (BG : Mouvement « Bulgarie pour les citoyens ») et Hürriyet ve Şeref Halk Partisi / Narodna Partija Svoboda i Dostojnstvo (HŞHP / NPSD : Parti national pour la liberté et la dignité). Elles glanent respectivement 10,6 % et 2 sièges, et 6,4 % et 1 siège.

44La Bulgarie connaît ensuite une période de grande instabilité politique. Dans la foulée des élections européennes, des manifestations de grande ampleur entraînent la chute du gouvernement du Premier ministre Plamen Oresharski (BPS), qui n’a plus de majorité au Parlement. Un gouvernement de transition dirigé par l’indépendant Gueorgui Bliznachki est mis en place le 6 août, jusqu’aux élections législatives anticipées du 5 octobre 2014. Ce scrutin, qui a lieu moins de 18 mois après celui du 12 mai 2013, est remporté par le GERB. Avec 32,7 % des voix (+ 2,2 %), la formation de centre-droit ne parvient cependant à s’adjuger que 84 des 240 sièges du Parlement monocaméral bulgare (– 13 sièges), le Narodno Săbranie. L’autre fait marquant du scrutin est l’entrée, pour la première fois, de huit partis au Parlement. À bonne distance du GERB, la Koalitsiya za Balgariya (KzB : Coalition pour la Bulgarie), alliance électorale formée autour du BSP depuis les années 1990 et qui regroupe cette fois un ensemble impressionnant de 13 formations de centre-gauche, ne recueille que 15,4 % (– 11,2 %) et 39 sièges (– 45). Le DPS s’adjuge 14,8 % des suffrages (+ 3,5 %) et 38 sièges (+ 2). Les cinq autres formations se situent toutes entre 4 % (le seuil électoral) et 10 % : le RB à 8,9 % et 23 sièges, la dizaine de forces politiques nationalistes réunies au sein de l’alliance Patriotichen Front (PF : Front patriotique) à 7,3 % et 19 sièges, la formation Prezaredi Balgariya (PB : Recharger la Bulgarie), nouvelle appellation du BBT, à 5,7 % et 15 sièges, Nacionalno Obedinenie Ataka (Ataka : Union nationale Attaque) à 4,5 % et 11 sièges, et l’Alternativa za Balgarsko Vazrazhdane (ABV : Alternative pour la renaissance bulgare), issue d’une scission du BSP, à 4,2 % et également 11 élus.

45Boïko Borissov, qui avait déjà été à la tête d’un premier gouvernement entre 2009 et 2013, met alors sur pied très rapidement, le 7 novembre 2017, une coalition centriste regroupant le GERB, le RB et l’ABV, ce dernier parti étant classé au centre-gauche. Cet attelage ne rassemble pas la majorité des sièges (118 sur 240), mais il est soutenu de l’extérieur par le PF et le PB, deux formations davantage conservatrices et souvent étiquetées comme populistes. À la fin de l’année 2015, insatisfaits de l’état d’avancement de la réforme judiciaire, une partie des députés du RB, ceux affiliés au DSB, se retirent de la majorité. En mai 2016, le retrait de l’ABV rend inéluctable la chute du gouvernement, qui intervient en novembre, après la défaite de la candidate du GERB, Tsetska Tsacheva, à l’élection présidentielle. Ce scrutin, remporté par l’indépendant Roumen Radev, est organisé concomitamment à un référendum qui propose notamment un changement du système électoral et l’introduction du vote obligatoire (cette dernière ayant déjà été approuvée par le Parlement). Les résultats sont nettement favorables aux propositions, mais le quorum n’est pas atteint.

46Le 26 mars 2017, les élections générales anticipées sont à nouveau remportées par le GERB, qui s’offre même le luxe de progresser légèrement en voix (+ 0,8 % ; 33,5 %) mais plus nettement en sièges (+ 11 ; 95). Néanmoins, le principal vainqueur du scrutin est l’opposition incarnée par la KzB, qui sort extrêmement renforcée des urnes : avec 27,9 % (+ 12,5 %), elle se voit octroyer un tiers des sièges de l’assemblée (80, soit + 41). L’alliance électorale Оbеdineni Patrioti (OP : Patriotes unis) – qui est l’héritière du PF et qui, en plus du Natzionalen Front za Spasenie na Bălgarija (NFSB : Front national pour le salut de la Bulgarie) et du VMRO-BND, comprend le parti d’extrême droite Ataka – recueille 9,3 % des voix et 27 sièges, soit un certain recul par rapport aux scores cumulés d’Ataka et du PF lors du scrutin de 2014. Le DPS ne parvient pas à renouveler le très bon score qui avait été le sien en 2014, retombant à 9,2 % (– 5,6 %) et 26 sièges (– 12). Enfin, le parti anti-système et nationaliste Volya (Pouvoir) fait de justesse son entrée au Parlement avec 4,3 % et 12 sièges. Toutes les autres formations échouent à franchir le seuil électoral.

47À la tête du premier parti, B. Borissov est chargé de composer le gouvernement. Le 4 mai 2017, il succède au poste de Premier ministre à Ognyan Guerdjikov, qui avait occupé cette fonction à partir du 27 janvier après la démission de B. Borissov. Pour son troisième mandat à la tête du gouvernement, B. Borissov signe un accord de coalition avec l’alliance nationaliste OP, qui s’état auparavant contentée de soutenir le gouvernement de l’extérieur. L’orientation de la nouvelle mouture est assez claire, sans compter que le gouvernement s’appuie également sur l’autre formation politique de la droite de la droite, Volya, qui le soutient sans toutefois en être membre. En juillet 2019, Ataka quittera cependant l’OP.

1.4.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

48La participation aux élections européennes de mai 2019 en Bulgarie s’élève à 32,6 % (soit 3,2 % de moins qu’au scrutin européen précédent), accentuant ainsi le déclin déjà entamé en 2014, et plaçant la Bulgarie en queue de peloton européen en termes de participation (23e sur 28). La Bulgarie dispose, tout comme en 2014, de 17 sièges au Parlement européen sous cette nouvelle législature.

49Les élections européennes de mai 2019 confirment la prééminence du GERB sur la scène politique bulgare. Avec 31,1 %, le parti est certes quelque peu en deçà de son résultat aux dernières législatives organisées dans le pays (où il avait obtenu 33,5 %), mais en léger progrès de + 0,7 % par rapport au scrutin européen précédent. Il conserve ainsi ses 6 sièges et maintient le BSP, qui n’en décroche que 5 (+ 1) à distance, malgré un net progrès de ce dernier dans les urnes (+ 5,4 % ; 24,3 %). Bien que son score soit relativement stable (– 0,7 %, passant de 17,3 % à 16,6 %), le DPS perd l’un de ses sièges d’eurodéputé : il n’en a désormais plus que 3. Le VMRO-BND, qui se présente cette fois distinctement de son partenaire le NFSB, décroche 2 sièges en s’établissant à 7,4 %. Le dernier des 17 députés bulgares provient du Demokratichna Bălgarija (DB : Bulgarie démocratique), une alliance électorale classée au centre-droit et qui comprend le DSB, le Zeleno Dvizhenie (Mouvement vert) et le mouvement Da, Bulgaria! (Oui, Bulgarie !), qui recueille 6,1 % des voix. C’est Radan Kanev, issu des rangs du DSB – et ancien leader du RB avant la sécession de son parti du bloc –, qui occupera ce siège. Il est enfin à noter que la BBT, qui ne participe pas au scrutin, perd automatiquement les 2 sièges acquis en 2014.

Tableau 5. Élection du Parlement européen. Résultats en Bulgarie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 5. Élection du Parlement européen. Résultats en Bulgarie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 5. Élection du Parlement européen. Résultats en Bulgarie (en % et en sièges, 2014-2019)

* Coalition électorale réunissant BBT, VMRO-BND, ZNS et DG.
** Coalition électorale réunissant SDS, BZNS, DSB, BG et HŞHP / NPSD.

1.5. Chypre

1.5.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

50Les élections européennes de mai 2014 à Chypre ont pour particularité de déboucher sur un statu quo total du nombre de sièges des différentes formations par rapport au scrutin précédent de 2009, et ce en dépit de variations parfois importantes en pourcents. À ce titre, seul le conservateur Dimokratikos Synagermos (DISY : Rassemblement démocratique) progresse parmi les partis représentés au Parlement européen, passant de 35,7 % à 37,7 % (+ 2,0 %), notamment à la faveur de son alliance avec le parti nationaliste grec-chypriote Evropaïko Kómma (EVROKO : Parti européen). Les autres partis reculent : le Kinima Sosialdimokraton EDEK (EDEK : Mouvement pour la démocratie sociale) de 9,9 % à 7,7 % (– 2,2 %), le Dimokratikó Kómma (DIKO : Parti démocratique) de 12,3 % à 10,8 % (– 1,5 %) et surtout l’Anorthotikó Kómma Ergazómenou Laoú (AKEL : Parti progressiste des travailleurs) de 34,9 % à 26,9 % (– 8,0 %). En strapontins, la répartition s’établit donc à nouveau à 2 sièges chacun pour le DISY et l’AKEL, et à 1 siège chacun pour l’EDEK et le DIKO.

51Au niveau national, c’est le DISY, sous la houlette de Níkos Anastasiádis, qui tient les rênes du pouvoir chypriote depuis le 28 février 2013. À la fois président et chef du gouvernement (comme le prévoit le système présidentiel de l’île), N. Anastasiádis dirige d’abord un gouvernement de coalition qui associe son parti au DIKO et à l’EVROKO, puis sans le DIKO, qui se retire en février 2014. Au cours de cette mandature, est menée une politique de réformes contribuant à faire baisser le chômage alors que, dans le même temps, le produit intérieur brut (PIB) du pays chute drastiquement.

52Le 22 mai 2016, le DISY remporte les élections législatives avec 30,7 % des suffrages et 18 sièges sur 56  [22], mais il perd 3,6 % des voix et 2 sièges par rapport au scrutin du 22 mai 2011. Il assoit néanmoins son avance sur son principal concurrent et prédécesseur au pouvoir, l’AKEL, qui obtient 25,7 % des suffrages (– 7,0 %) et 16 députés (– 3). Les deux autres partis traditionnels de l’échiquier politique chypriote, le DIKO et l’EDEK, sont eux aussi en recul par rapport au scrutin de 2011, avec respectivement 14,5 % (– 1,3 %) et 6,2 % (– 2,7 %). La dissolution de l’EVROKO pour être intégré au parti nationaliste Kinima Allilengyi (KINHMA : Mouvement solidarité), créé par la députée européenne ex-DISY Eléni Theochárous, lui permet d’obtenir 5,3 % des voix et 3 sièges. Enfin, deux autres partis bénéficient d’une représentation parlementaire : le Kinima Oikologoi Perivallontistoi (KOP : Mouvement écologiste et environnementaliste), qui passe de 2,2 % à 4,8 % et gagne un second siège, et le Ethniko Laiko Metopo (ELAM : Front populaire national), un parti ultranationaliste eurosceptique inspiré du parti grec Laïkós Sýndesmos - Chrysí Avgí (XA : Aube dorée), qui fait son entrée dans l’assemblée monocamérale en glanant 3,7 % des voix (+ 2,6 %) et 2 sièges.

53Au début de l’année 2018, N. Anastasiádis est renouvelé dans ses fonctions en remportant sa seconde élection présidentielle avec 56,0 % des voix au second tour. Son second gouvernement est constitué de quatre ministres du DISY et de sept indépendants. Ce gouvernement minoritaire est soutenu par une autre force politique : le KOP, renommé Kínima Oikológon - Synergasía Politón (KO-SP : Mouvement écologiste - Coopération citoyenne), sans portefeuille.

1.5.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

54Chypre dispose de 6 députés au Parlement européen, un nombre inchangé depuis l’adhésion du pays à l’UE en 2004. En 2019, le taux de participation aux élections européennes est de 45,0 %, soit un léger progrès (+ 1,0 %) par rapport à 2014 (44,0 %). Rappelons que le vote est obligatoire dans ce pays mais que, en l’absence de sanctions, la participation y demeure relativement faible.

55Une fois encore, les mouvements de voix ne se traduisent pas, en raison du faible nombre de strapontins à pourvoir, par des mouvements en sièges. Le résultat global du scrutin donne donc à voir un statu quo total en termes de représentation parlementaire. Le DISY connaît le revers traditionnel des partis de gouvernement aux élections européennes en perdant près de 9,0 % des suffrages (29,0 % ; 2 sièges), à la différence qu’il se présente cette fois-ci seul. Il se maintient néanmoins comme premier parti, un rang qu’il occupe sans discontinuer depuis les premières élections européennes dans ce pays insulaire, en 2004. L’AKEL revient presque à sa hauteur, avec 27,5 % des voix (+ 0,6 %) et 2 sièges. Fait unique depuis l’entrée du pays dans l’UE, l’un de ses deux députés, Niyazi Kızılyürek, est un Chypriote turc. Le DIKO et l’EDEK s’établissent respectivement à 13,8 % et à 10,6 % en connaissant des progressions similaires, autour des + 3 %, qui leur permettent de conserver leur représentation, même minimale (1 siège chacun). Mais pour ce faire, le DIKO s’est appuyé sur une alliance avec le KINHMA – avec lequel, pour rappel, EVROKO a fusionné en 2016. ELAM ne parvient pas à décrocher ce dernier siège que certains sondages lui prédisaient, et qui revient finalement à l’EDEK.

Tableau 6. Élection du Parlement européen. Résultats à Chypre (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 6. Élection du Parlement européen. Résultats à Chypre (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 6. Élection du Parlement européen. Résultats à Chypre (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, le parti est allié à l’Evropaïko Kómma (EVROKO).
** En 2019, le parti est allié au Kinima Allilengyi (KINHMA).

1.6. Croatie

1.6.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

56Lors du scrutin européen de 2014, le second seulement après l’adhésion du pays à l’UE en 2013, seul un électeur croate sur quatre se rend aux urnes. La liste « HDZ + HSP-AS + HSS », plus tard baptisée Domoljubna Koalicija (DK : Coalition patriotique), de centre-droit, réunit la formation conservatrice Hrvatska Demokratska Zajednica (HDZ : Union démocratique croate), le Hrvatska Stranka Prava dr. Ante Starčević (HSP-AS : Parti croate du droit - Docteur Ante Starčević) et le Hrvatska Seljačka Stranka (HSS : Parti paysan croate). Elle obtient 41,4 % des voix (+ 8,5 % par rapport aux élections européennes de 2013) et 6 sièges (statu quo). Lui faisant face sur l’échiquier politique, la liste « SDP + HNS-LD + HSU + SDSS + IDS » ou Kukuriku Koalicija (KK : Coalition cocorico), de centre-gauche, réunit les cinq partis suivants : le Socialdemokratska Partija Hrvatske (SDP : Parti social-démocrate croate), le Hrvatska Narodna Stranka - Liberalni Demokrati (HNS-LD : Parti populaire croate - Démocrates libéraux), le Hrvatska Stranka Umirovljenika (HSU : Parti croate des retraités), le Samostalna Demokratska Srpska Stranka (SDSS : Parti démocratique indépendant serbe) et l’Istarski Demokratski Sabor (IDS : Diète démocrate istrienne). Elle obtient 29,9 % (– 2,2 %) et 4 sièges (– 1). Le nouveau parti Održivi Razvoj Hrvatske (ORaH : Développement durable croate, « noix »), fondé par une ancienne ministre de l’Environnement, fait son entrée au Parlement européen, en obtenant 9,4 % des voix et 1 siège. La liste Hrvatskih Laburista - Stranka Rada (HL-SR : Travaillistes croates - Parti du travail) n’obtient quant à elle que 3,4 % des voix (– 2,3 %) et perd son unique siège européen.

57En 2015 et 2016, la Croatie connaît un calendrier électoral particulièrement chargé : deux élections législatives et un scrutin présidentiel.

58En janvier 2015, Kolinda Grabar-Kitarović (HDZ), ancienne ministre des Affaires étrangères, est élue présidente de la République au second tour avec 50,4 % des voix, aux dépens du président sortant, Ivo Josipović (SDP). Elle devient à cette occasion la première femme à occuper ce poste.

59Les élections législatives du 8 novembre 2015 voient à nouveau s’opposer deux blocs principaux : d’une part, le HDZ et ses alliés, réunis au sein de la DK et, d’autre part, le SDP et ses alliés (dont le HNS-LD), rassemblés au sein de la Narodna Koalicija (NK : Coalition populaire). Les deux coalitions se retrouvent au coude-à-coude dans les urnes, la première remportant 34,1 % et 59 sièges, la seconde 32,8 % et 56 sièges, plaçant le réformiste Most Nezavisnih Lista (MOST : Pont des listes indépendantes), avec 13,4 % et 19 sièges, en position d’arbitre entre les deux blocs. En effet, aucune autre formation politique n’obtient plus de 3 sièges, alors que 8 des 151 sièges sont réservés aux minorités. Après de longues négociations, le MOST, mouvement principalement composé d’élus locaux indépendants, et la droite s’entendent sur la formation d’un gouvernement dirigé par l’indépendant Tihomir Orešković.

60Dès le mois de juin suivant, soit cinq mois seulement après sa mise en place, le gouvernement est renversé par une motion de défiance après le retrait du HDZ de la coalition. Dans la foulée, l’assemblée monocamérale croate, la Hrvatski Sabor, se saborde en adoptant une motion de dissolution. Cette crise gouvernementale est l’aboutissement de ce que nombre d’observateurs internationaux ainsi qu’une partie de la société civile croate ont pu qualifier de dérives nationalistes et autoritaires du pouvoir : nomination d’un ministre accusé de révisionnisme, relativisation des crimes oustachis durant la Seconde Guerre mondiale, renforcement du contrôle des médias, remise en cause de l’avortement, rôle croissant de l’Église.

61Un nouveau scrutin est organisé le 11 septembre 2016, mais celui-ci ne rebat pas véritablement les cartes. Il est à nouveau remporté par le HDZ et ses alliés électoraux, avec 35,2 % (+ 1,1 %) et 61 sièges. Bien qu’il ne s’agisse pas véritablement d’une consécration, ce score permet au HDZ de tenir à distance le SDP, lequel ne parvient pas à tirer profit de l’échec de la coalition gouvernementale. Sa coalition NK recueille 32,2 % des voix (– 0,6 %) et 54 sièges. C’est le MOST qui semble subir le plus l’échec du gouvernement, en perdant – 4,0 % des voix et en s’établissant à 9,4 % (avec 13 sièges au lieu de 19 précédemment). Une quatrième force politique, la Koalicija « Jedina Opcija » (Coalition « La seule option »), composée de plusieurs mouvements d’inspiration populiste, notamment le Živi Zid (ŽZ : Bouclier humain) effectue une percée avec 5,9 % et 8 sièges. Le HDZ choisit à nouveau de s’allier avec le MOST. Andrej Plenković est désigné comme Premier ministre d’une coalition qui, regroupant ces deux formations, est minoritaire (avec 74 sièges sur 151). Il est néanmoins soutenu de l’extérieur par le HSS, le Bandić Milan 365 - Stranka rada i solidarnosti (BM 365 : Bandić Milan 365 - Parti du travail et de la solidarité) – parti de l’ancien maire de Zagreb, Milan Bandić (ex-SDP) –, ainsi que par des représentants des minorités nationales. En avril 2017, A. Plenković se sépare du MOST, puis réussit à rallier une partie du HNS-LD, pourtant traditionnellement plus proche du SDP et qui avait remporté 9 des 54 sièges de la coalition électorale NK.

1.6.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

62La Croatie dispose à l’heure actuelle de 11 sièges au Parlement européen, mais elle en gagnera un supplémentaire après le Brexit si celui-ci a lieu. Aux élections européennes de 2019, le taux de participation s’établit à 29,9 % dans le pays. S’il s’agit d’un net progrès par rapport à 2014 (+ 4,7 %), ce chiffre continue de placer la Croatie en queue de peloton de la participation aux élections européennes.

63Le scrutin de 2019 est marqué, par rapport à celui de 2014, pas une forte recomposition des alliances. Les deux grands partis, HDZ et SDP, se défont de leurs attelages précédents et font chacun cavalier seul, remportant respectivement 22,7 % et 18,7 % des suffrages, soit 4 sièges chacun (dont un gelé pour le SDP jusqu’à l’éventuel Brexit). Le SDP voit ainsi son nombre de sièges comme parti individuel grimper de 2 unités. Deux nouvelles coalitions sont formées et obtiennent chacune 1 siège. D’une part, la coalition Hrvatski Suverenisti (HS : Souverainistes croates) regroupe les partis Hrvatski Rast (Hrast : Croissance croate), Hrvatska Konzervativna Stranka (HKS : Parti conservateur croate) – des rangs duquel sera issue la députée Ruža Tomašić (qui conserve ainsi son siège) –, le HSP-AS, ainsi que les Ujedinjeni Hrvatski Domoljubi (UHP : Patriotes croates unis) ; elle remporte 8,5 % des suffrages. D’autre part, la coalition dite Amsterdam est composée de sept partis, à savoir Građansko-Liberalnog Saveza (GLAS : Alliance civique libérale), IDS, HSS, Primorsko Goranskog Saveza (PGS : Alliance de Primorje-Gorski Kotar), Demokrati (Démocrates), HL-SR et HSU ; elle remporte 5,2 % des voix. C’est Valter Figo (IDS) qui représentera la coalition Amsterdam au Parlement européen ; auparavant, les partis composant cette alliance avaient 2 députés européens. Cette alliance s’effritera juste après les élections européennes, avec le départ du HSU qui rejoindra le SDP en vue des élections nationales de 2020. Un autre parti réussit à faire son entrée dans l’assemblée européenne : le ŽZ, en obtenant 5,7 % des suffrages (+ 5,2 %). Enfin, et c’est peut-être là le fait politique le plus marquant, un candidat indépendant, Mislav Kolakušić, un juge et activiste anti-corruption, parvient à se faire élire avec 7,9 % des suffrages. Quant à lui, l’ORaH disparaît de l’hémicycle européen.

Tableau 7. Élection du Parlement européen. Résultats en Croatie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 7. Élection du Parlement européen. Résultats en Croatie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 7. Élection du Parlement européen. Résultats en Croatie (en % et en sièges, 2014-2019)

* Coalition électorale réunissant Hrast, HKS, HSP-AS et UHP.
** Candidat indépendant.
*** Coalition électorale réunissant GLAS, IDS, HSS, PGS, Demokrati HL-SR et HSU.
**** Coalition électorale réunissant HDZ (4 sièges), HSP-AS (1 siège) et HSS (1 siège). Elle ne sera formalisée sous l’appellation « Domoljubna Koalicija » qu’en 2015.
***** Coalition électorale réunissant SDP (2 sièges), HNS-LD (1 siège), HSU, SDSS et IDS (1 siège).

1.7. Danemark

1.7.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

64Le Danemark est dirigé depuis le 3 octobre 2011 par une coalition qui réunit le Socialdemokraterne (SD : Sociaux-démocrates), le parti social-libéral Radikale Venstre (RV : Radical de gauche) et le Socialistik Folkeparti (SF : Parti populaire socialiste), sous la houlette de Helle Thorning-Schmidt. Minoritaire, le gouvernement est soutenu de l’extérieur par les élus de la Enhedslisten - De Rød-Grønne (Ø : Liste de l’unité - Les rouges-verts) et quelques députés ultramarins. En janvier 2014, les ministres du SF quittent le gouvernement afin de marquer leur opposition à la vente de l’entreprise publique d’énergie danoise, laissant place à une coalition bipartite.

65L’incontestable vainqueur du scrutin européen de mai 2014, tant en valeur absolue des suffrages exprimés qu’en termes de progression que cela représente, est le parti d’extrême droite Dansk Folkeparti (DF : Parti populaire danois), qui totalise 26,6 % des voix (+ 11,8 % par rapport au scrutin européen de 2009) et obtient 4 sièges d’eurodéputé (+ 2). Autres succès, ceux du RV, dont le score croît de 4,1 % à 6,5 % (+ 2,4 %) et qui retrouve 1 siège, et du Folkebevægelsen mod UE (N : Mouvement populaire contre l’Union européenne), l’une des listes explicitement anti-UE se présentant aux suffrages des électeurs alors qu’elles sont absentes des scrutins nationaux, qui progresse de 7,2 % à 8,1 % (+ 1,0 %) et conserve son strapontin. Les autres formations sont en recul : le SD passe de 20,9 % à 19,1 % (– 1,8 %) et perd 1 siège (de 4 à 3), le parti libéral Venstre (V : Gauche) passe de 19,6 % à 16,7 % (– 2,9 %) et de 3 à 2 sièges (– 1), et le SF recule de 15,4 % à 10,9 % (– 4,5 %) et perd 1 siège (1 au lieu de 2). Le Konservative Folkeparti (KF : Parti populaire conservateur) garde son unique siège, bien qu’il recule en pourcents (9,2 % au lieu de 12,3 %, soit – 3,1 %).

66Les élections législatives du 18 juin 2015 confirment la prééminence de trois partis : SD, DF et V, dans un ordre cependant quelque peu inversé. Elles sont remportées par le SD d’H. Thorning-Schmidt avec 26,4 % des voix (soit en progrès de + 0,7 % par rapport aux élections législatives du 15 septembre 2011) et 47 sièges (+ 3). Le DF se hisse à la deuxième place en remportant 21,1 % des suffrages et 37 sièges, soit un gain de + 8,8 % et + 15 sièges par rapport au scrutin précédent. Bien qu’il n’arrive qu’en troisième position et ne récolte que 19,5 % des voix et 34 sièges (– 7,2 % et – 13 sièges), le V s’impose comme parti pivot pour former le gouvernement. En effet, de façon quelque peu paradoxale, alors que la tête du gouvernement était revenue au SD entre 2011 et 2015 (alors que ce parti ne s’était hissé qu’à la deuxième place au scrutin de septembre 2011), sa victoire en 2015 ne lui permet pas de rester au gouvernement, le bloc de droite étant légèrement majoritaire (avec 90 députés, contre 79 pour le bloc de gauche). Dans un premier temps, le V forme un gouvernement composé d’un seul parti et donc ultra-minoritaire, soutenu de l’extérieur par trois partis : la Liberal Alliance (LA : Alliance libérale) – qui avait remporté 13 sièges (+ 4) en passant de 5,0 % à 7,5 % –, le KF et le DF. Dans un second temps, à partir de novembre 2016, la LA et le KF rejoignent le gouvernement de Lars Løkke Rasmussen (lequel reste cependant minoritaire), qui doit continuer à compter sur le soutien externe du DF.

1.7.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

67Le Danemark dispose de 13 sièges au Parlement européen, mais en aura 14 si la sortie du Royaume-Uni de l’UE est actée. Le taux de participation est de 66,0 % en 2019, soit un progrès de + 9,7 % par rapport à 2014 (56,3 %), ce qui place le pays en quatrième position en matière de participation électorale à ce scrutin, et même en deuxième position si l’on exclut les pays à vote obligatoire.

68C’est le parti V qui remporte le scrutin (23,5 %), tout en enregistrant la plus forte progression parmi l’ensemble des partis danois par rapport à 2014 (+ 6,8 %). Il se place 2,0 % devant le SD, ce qui lui permettra d’obtenir un siège de plus que son principal rival en cas de Brexit. Le SD récolte donc quant à lui 21,5 % (+ 2,4 %) et 3 sièges (statu quo). Si ces deux partis creusent nettement l’écart avec les autres formations politiques, c’est le SF qui réussit à se hisser sur le podium avec 13,2 % des voix (+ 2,3 %) et remporte ainsi 2 sièges (+ 1). Le RV augmente également sa représentation d’une unité en ayant regroupé 10,1 % des électeurs (+ 3,6 % ; 2 sièges). Le fait marquant du scrutin se situe pourtant ailleurs : l’effondrement du DF, qui chute de – 15,8 % (et plus de 10 % par rapport aux dernières législatives) et – 3 sièges, ne réussissant à en sauver qu’un avec 10,8 %. Pour sa part, le KF parvient à conserver son unique siège avec 6,2 % (– 3,0 %). Enfin, la liste Ø, qui se présentait pour la première fois aux élections européennes, récupère le siège perdu par le N, qu’elle soutenait précédemment lors de ces scrutins, avec 5,5 % des suffrages.

69Des élections législatives se tiendront le 5 juin 2019. Elles seront une nouvelle fois remportées par le SD (25,9 %) devant le V (23,4 %), tandis que le DF confirmera le recul enregistré aux élections européennes (8,7 %).

Tableau 8. Élection du Parlement européen. Résultats au Danemark (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 8. Élection du Parlement européen. Résultats au Danemark (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 8. Élection du Parlement européen. Résultats au Danemark (en % et en sièges, 2014-2019)

1.8. Espagne

1.8.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

70Le 17 avril 2011, des élections législatives anticipées avaient été convoquées par le Premier ministre socialiste José Luis Zapatero dans un contexte économique et social extrêmement tendu (crise des subprimes ayant conduit à l’éclatement de la bulle immobilière espagnole, plan d’austérité suite à la crise de la dette souveraine, mouvement des Indignados). Le Partido Socialista Obrero Español (PSOE : Parti socialiste ouvrier espagnol) avait alors enregistré le pire score de son histoire et les rênes du pouvoir étaient revenus à Mariano Rajoy, qui avait formé un gouvernement conservateur constitué du seul Partido Popular (PP : Parti populaire) et soutenu de l’extérieur par des petites formations régionalistes : le Foru Asturies / Foro Asturias (Foro : Forum des Asturies) et l’Unión del Pueblo Navarro (UPN : Union du peuple navarrais). C’est sans conteste la poursuite et même l’accentuation de l’orthodoxie budgétaire menée par son prédécesseur qui a contribué, au-delà des difficultés socio-économiques croissantes, à la détérioration du climat politique, les deux partis historiques étant tour à tour pointés du doigt dans la mise en place de mesures d’austérité très impopulaires. Cette situation a mené à l’éclosion de deux partis : le parti de gauche radicale Podemos - Por la Democracia Social (Podemos : Nous pouvons - Pour la démocratie sociale) et le parti libéral centriste Ciudadanos - Partido de la Ciudadanía (C’s : Citoyens - Parti de la citoyenneté), ce dernier se profilant davantage comme un parti de cadres qui tente de se situer en dehors (ou au-dessus) des clivages traditionnels. À cet égard, les élections européennes de mai 2014 constituent en quelque sorte l’épreuve de vérité de la recomposition du système partisan.

71Et de fait, en mai 2014, les deux principaux partis espagnols connaissent un cinglant revers par rapport aux élections européennes de juin 2009 : le PP chute de 42,2 % à 26,1 % (– 16,1 %) et de 23 à 16 sièges (– 7), tandis que le PSOE – qui fait liste commune avec sa branche catalane, le Partit dels Socialistes de Catalunya (PSC : Parti des socialistes de Catalogne) – passe de 38,5 % à 23,0 % (– 15,5 %) et de 21 à 14 sièges (– 7). L’Unión, Progreso y Democracia (UPyD : Union, progrès et démocratie) conforte à l’inverse sa présence au Parlement européen : ce parti progresse de 2,9 % et 1 siège à 6,5 % et 4 sièges (soit + 3,6 % et + 3 sièges). Podemos, avec 8,0 % et 5 sièges, et C’s, avec 3,2 % et 2 sièges, font leur entrée au Parlement européen. Les autres sièges reviennent à des coalitions de partis régionalistes. La liste de coalition Izquierda Plural (IP : Gauche plurielle) réunit l’Esquerra Unida i Alternativa / Izquierda Unida y Alternativa (EUiA : Gauche unie et alternative), l’Iniciativa per Catalunya - Verds (ICV : Initiative pour la Catalogne - Verts) et le galicien Anova - Irmandade Nacionalista (IAN : Anova - Fraternité nationaliste) ; elle obtient 10,0 % des voix et 6 sièges. La liste Coalición por Europa (CEU : Coalition pour l’Europe) englobe le Partido NacionalistaVasco (PNV : Parti nationaliste basque), la Coalición Canaria (CC : Coalition canarienne), la Convergència Democràtica de Catalunya (CDC : Convergence démocratique de Catalogne), l’Unió Democràtica de Catalunya (UDC : Union démocratique de Catalogne) et le Compromiso por Galicia (CxG : Engagement pour la Galice) ; elle s’arroge 5,4 % et 3 sièges. La liste de coalition La Izquierda por el Derecho a Decidir (IPDD : La gauche pour le droit de décider) allie notamment l’Esquerra Republicana de Catalunya / Izquierda Republicana de Cataluña (ERC : Gauche républicaine de Catalogne), la Nova Esquerra Catalana (NeCat : Nouvelle gauche catalane), Catalunya Sí (Oui à la Catalogne) et des indépendants ; elle recueille 4,0 % et 2 sièges. La liste Los Pueblos Deciden (LPD : Les peuples décident) fédère entre autres le Bloque Nacionalista Galego / Bloque Nacionalista Gallego (BNG : Bloc nationaliste galicien) et Euskal Herria Bildu (EH Bildu : Réunir le Pays basque) ; elle obtient 2,1 % et 1 siège. Enfin, la liste de coalition Primavera Europea (PE : Printemps européen) comprend en particulier des candidats de la Coalició Compromís (Compromís : Coalition de l’engagement) – une coalition électorale du Pays valencien –, du parti écologiste Equo et de la Chunta Aragonesista (CHA : Union aragonaisiste) ; elle parvient à convaincre 1,9 % des électeurs et déroche 1 siège.

72Mais c’est surtout le scrutin législatif du 20 décembre 2015 qui entame une période de grande incertitude politique. Le PP chute de – 13,2 % et perd près d’un tiers de ses électeurs acquis en 2011 avec l’appoint de petites formations régionalistes, en recueillant tout de même encore 28,7 % des suffrages et 123 sièges sur les 350 que compte le Congreso de los Diputados (– 63 sièges). Le PSOE ne parvient pas à redresser la barre mais tout juste à freiner sa chute en récoltant 22,0 % (– 3,5 %) ; la sanction est plus sévère en termes de sièges (90 au lieu de 110 précédemment). C’s et Podemos sont au coude-à-coude : si le premier s’en sort mieux dans les urnes (13,9 % contre 12,7 %), le second remporte davantage de sièges (40 contre 42), essentiellement du fait du système électoral, certes proportionnel plurinominal, mais se déroulant dans 52 circonscriptions de petite taille. Il faut par ailleurs certainement créditer à Podemos, d’une part, les 12 sièges de la liste En Comú Podem (En commun, nous pouvons), coalition qui regroupe Podemos Cataluña et de petites formations de la gauche de la gauche catalane : l’ICV, l’EUiA et la plateforme Barcelona en Comú (Barcelone en commun). D’autre part, les 9 sièges de la coalition Compromís - Podemos - És el Moment (Engagement - Nous pouvons - C’est le moment), qui regroupe Podemos et Compromís dans la Communauté autonome de Valence, ainsi que les 6 députés acquis via la liste En Marea (En marée), qui suit la même logique en regroupant Podemos, l’EUiA et ANOVA en Galice, sont également à mettre au compteur de la formation de gauche radicale. Les autres partis et coalitions remportent tous entre 2 (IP, EH Bildu) et 9 sièges (ERC). Le principal enseignement du scrutin, au-delà de la percée significative des deux nouvelles forces politiques, est la perte de majorité du gouvernement de M. Rajoy, qui passe de 186 à 123 sièges. Dans l’impossibilité de trouver les soutiens nécessaires, le PP passe la main au PSOE. Son leader et secrétaire général, Pedro Sánchez, tente alors de mettre sur pied une coalition avec C’s, mais son investiture sera rejetée par le Congreso de los Diputados, amenant à de nouvelles élections.

73Lors du scrutin anticipé du 26 juin 2016, le bipartisme espagnol plie mais ne rompt pas. Certes, les progrès des deux grands partis historiques sont mesurés, le PP obtenant 33,0 % (+ 4,3 %) et 137 sièges (+ 14), et le PSOE 22,7 % (+ 0,7 %) et 85 sièges (– 5). Mais ce dernier réussit toutefois à maintenir la coalition de gauche radicale Unidos Podemos (Unis, nous pouvons) – qui allie Podemos à un ensemble de formation de la gauche radicale – à distance, au moins en termes de sièges (21,1 % ; 71 sièges). L’autre challenger, C’s, ne parvient pas véritablement à tirer son épingle du jeu, en ne glanant que 13,1 % des voix (– 0,8 %) et 32 sièges (– 8). Le PP forme alors un gouvernement minoritaire – qui n’est soutenu de l’extérieur que par de petites formations : l’UPN navarrais, le Foro et le Partido Aragonés (PAR : Parti aragonais) –, mais peut compter sur C’s et la CC lors du vote d’investiture. Celle-ci est finalement obtenue à la quatrième tentative, le 29 octobre 2016, grâce à l’abstention du PSOE ; le gouvernement Rajoy II succède directement au gouvernement Rajoy I, puisqu’aucun gouvernement n’avait pu être investi au cours de la législature précédente.

74Dès juin 2018, sur fond de scandales de corruption dans les rangs du PP, le PSOE parvient à faire adopter une motion de censure et à reprendre la tête du gouvernement, sous la houlette de P. Sánchez et avec le soutien de Podemos. Néanmoins, ne parvenant pas à faire adopter le projet de loi de finances pour l’année 2019, le PSOE est à nouveau contraint de convoquer des élections anticipées. La question de l’indépendance catalane  [23], qui avait largement entaché le mandat du gouvernement dirigé par M. Rajoy, s’invite dans la campagne avec la tenue du procès des ex-dirigeants indépendantistes catalans.

75Ces nouvelles élections ont lieu le 28 avril 2019, soit un mois avant les élections européennes. À leur issue, la chambre basse des Cortes Generales voit à nouveau sa composition bousculée. Le PSOE remporte une élection générale pour la première fois en dix ans, avec 28,7 % des voix (+ 6,0 %), soit 123 sièges au Congreso de los Diputados (+ 38). Le PP subit un revers historique en perdant 77 sièges (n’en retenant que 66) et quasiment la moitié de son électorat (en passant de 33,0 % à 16,7 % des suffrages). C’s se hisse même juste derrière lui à la troisième place avec 15,9 % et 57 sièges, en progrès de + 2,8 % et + 25 sièges. Podemos, qui s’est présenté au sein de l’alliance Unidas Podemos (UP : Unies, nous pouvons), subit un premier revers ; le résultat de sa coalition s’établit à 14,4 % et 42 sièges (– 6,7 % et – 29 sièges). L’autre fait marquant du scrutin est sans conteste l’entrée de Vox (Voix) au Parlement avec 10,3 % des voix et 24 sièges ; il s’agit là d’une première pour un parti d’extrême droite depuis la chute du régime franquiste en 1975.

76Incapable de reconduire la coalition sortante ou d’en former une nouvelle, le monde politique devra se résoudre à un retour aux urnes, entériné par le roi Felipe VI le 17 septembre. Le scrutin, programmé pour le 10 novembre, sera le quatrième scrutin en quatre ans, ce qui correspond normalement à la durée d’une seule législature.

1.8.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

77L’Espagne dispose de 54 sièges au Parlement européen. Pays le plus notoirement défavorisé en termes de représentation par la distribution actuelle, cinq sièges de plus lui seront attribués en cas de sortie du Royaume-Uni de l’UE. Le taux de participation en 2019 en Espagne est de 60,7 %, soit + 16,9 % par rapport à 2014 (43,8 %), soit le rebond le plus important parmi les « anciens » États membres. Ce regain de participation est d’autant plus surprenant eu égard au nombre important de scrutins nationaux auxquels les Espagnols ont été amenés à prendre part ces dernières années, et nonobstant les scrutins infra-nationaux – et notamment régionaux – qui revêtent des enjeux politiques particulièrement importants dans le pays.

78Les grands équilibres sont relativement similaires à ceux issus du dernier scrutin national, lequel, rappelons-le, s’est tenu moins d’un mois avant le scrutin européen. Le PSOE s’impose avec 32,9 % des voix et 20 sièges, gagnant ainsi + 9,9 % par rapport aux élections européennes de 2014 et progressant de 6 sièges. Le PP recueille 20,2 % (– 5,9 %) et 12 sièges (– 4). C’s, qui fait liste commune avec UPyD, conserve sa troisième place au niveau national mais en se faisant quelque peu distancer, puisque n’obtenant que 12,2 % et 7 sièges. La coalition UP, largement resserrée autour de Podemos, de l’EUiA, d’Equo et du parti catalan Catalunya en Comú (Catalogne en commun), obtient 10,2 % des voix et 6 sièges, dont 5 vont au groupe GUE/NGL et un seul (celui d’Equo) au groupe Verts-ALE. Vox fait son entrée au Parlement européen mais, avec 6,2 % des voix (+ 4,6 % par rapport au scrutin européen de 2014) et 3 sièges, son score est largement en deçà de celui obtenu aux élections législatives d’avril.

79Derrière lui, se hissent trois coalitions de petites formations régionalistes, comme c’est traditionnellement le cas en Espagne. La première, l’alliance Ahora Repúblicas (AR : Des Républiques maintenant), est composée de l’ERC, de l’EH Bildu, du BNG et d’autres petites formations régionalistes de gauche. Elle remporte 3 sièges en recueillant 5,6 % des suffrages. La deuxième, Lliures per Europa / Libres por Europa (Lliures : Libres pour l’Europe), regroupe, derrière C. Puigdemont, des formations indépendantistes catalanes : la CDC, le Partit Demòcrata Europeu Català / Partido Demócrata Europeo Catalán (PDeCAT : Parti démocrate européen catalan), et Junts per Catalunya / Juntos por Cataluña (JxCat : Ensemble pour la Catalogne). Elle s’adjuge 2 strapontins grâce à son score de 4,5 %. Les deux candidats élus, C. Puigdemont et Toni Comín (ancien membre du gouvernement régional Puigdemont), ne pourront pas prendre leurs fonctions au Parlement européen lors de la séance inaugurale, car il leur sera demandé au préalable de prêter serment à Madrid, où ils seraient arrêtés. La troisième, Coalición por una Europa Solidaria (CEUS : Coalition pour une Europe solidaire), plutôt située au centre-droit, est l’héritière de la coalition CEU, essentiellement bâtie autour du PNV et de la CC. Glanant 2,8 % des voix, elle parvient à décrocher 1 siège. À l’inverse, l’alliance Compromiso por Europa (CPE : Engagement pour l’Europe), qui, héritière de la coalition PE, s’articule autour de la coalition Compromís (laquelle, en 2014, avait obtenu le siège décroché par PE) et d’autres formations régionalistes, ne parvient pas à obtenir de siège.

80Si le Brexit devient effectif, cinq formations gagneront un siège d’eurodéputé supplémentaire : le PSOE, le PP, C’s, Vox et la coalition Lliures.

Tableau 9. Élection du Parlement européen. Résultats en Espagne (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 9. Élection du Parlement européen. Résultats en Espagne (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 9. Élection du Parlement européen. Résultats en Espagne (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, l’EUiA fait partie de la coalition électorale IP (réunissant aussi ICV et IAN).
** En 2014, l’ERC fait partie de la coalition électorale IPDD (réunissant aussi, entre autres, ERC, NeCat et Catalunya Sí).
*** En 2014, l’EH Bildu et le BNG font partie de la coalition électorale LPD.
**** En 2014, coalition électorale Coalición por Europa (CEU), réunissant, outre le PNV et le CC, la CDC (laquelle s’est ensuite en grande partie fondue dans le PDeCAT), l’UDC et le CxG.
***** En 2014, coalition électorale Primavera Europea (PE) ; le siège était échu à la Coalició Compromís (Compromís).
# Les groupes parlementaires indiqués entre parenthèses sont ceux des trois députés catalans privés de leur siège (2 de JxCat et 1 de l’ERC).

1.9. Estonie

1.9.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

81En Estonie, la décennie 2010 est, tout comme la fin de la précédente, marquée par la prééminence du parti libéral de centre-droit Eesti Reformierakond (ER : Parti de la réforme). En mars 2014, la démission du Premier ministre Andrus Ansip (ER) mène à la nomination à ce poste de Taavi Rõivas (ER). Celui-ci change de partenaire de coalition en écartant la formation chrétienne-démocrate Erakond Isamaa ja Res Publica Liit (IRL : Union pro patria et res publica) et en s’alliant avec le parti de centre-gauche Sotsiaaldemokraatlik Erakond (SDE : Parti social-démocrate).

82Aux élections européennes de mai 2014, l’ER enregistre un net progrès par rapport au scrutin européen précédent, avec 24,3 % (+ 9,0 %) et 2 sièges (+ 1). Le social-libéral Eesti Keskerakond (EK : Parti du centre), principal concurrent de l’ER au cours des vingt dernières années au niveau national, recule à 22,4 % (– 3,7 %) et 1 siège (– 1). L’IRL et le SDE voient tous deux leurs résultats croître en voix mais pas en sièges, avec respectivement 13,9 % (+ 1,7 %) et 1 siège (statu quo), et 13,6 % (+ 4,9 %) et 1 siège (statu quo). L’eurodéputé indépendant Indrek Tarand conserve son siège malgré un net recul dans les urnes avec 13,2 % (– 12,6 %).

83Les élections législatives suivantes ont lieu le 1er mars 2015. L’ER les remporte : le parti totalise 27,7 % des suffrages (– 0,9 %) et 30 sièges (– 3). T. Rõivas est reconduit dans ses fonctions de chef du gouvernement. Cependant, le partenaire de gouvernement de l’ER, le SDE, sort affaibli du scrutin, avec 15,2 % (– 1,9 %) et surtout 15 sièges au lieu de 19 précédemment. T. Rõivas est donc forcé d’élargir sa coalition devenue minoritaire ; en l’occurrence, c’est l’IRL (13,7 % et 14 sièges ; – 6,8 % et – 9 sièges) qui rejoint l’attelage gouvernemental. Au final, ne participent pas au gouvernement les deux principaux partis ayant progressé dans les urnes : d’une part, l’EK (+ 1,5 % et + 1 siège ; 24,8 % et 27 sièges) et l’eurosceptique et nationaliste Eesti Konservatiivne Rahvaerakond (EKRE : Parti populaire conservateur d’Estonie) (+ 6,1 % et + 7 sièges  [24] ; 8,2 % et 7 sièges). Le panorama des forces politiques alors représentées au Riigikogu, le Parlement monocaméral estonien, est complété par la présence de 8 députés de l’Eesti Vabaerakond (EVA : Parti libre d’Estonie), formation populiste de droite fondée en 2014 et ayant remporté 8,7 % des suffrages.

84L’année 2016 est marquée par un double changement particulièrement compliqué à la tête de l’exécutif. L’élection présidentielle manque de peu d’aboutir à une crise institutionnelle. Principalement en raison de l’éparpillement des candidatures et du multi-partisme, aucun des candidats ne parvient à obtenir la majorité requise des deux tiers au Riigikogu, chaque parti refusant de donner ses voix au candidat d’un autre parti. Après cinq tours de scrutin (trois au Parlement et deux au sein d’un collège électoral) – une première depuis l’indépendance du pays – et devant l’impasse, les partis se mettent d’accord sur le nom d’une candidate indépendante, Kersti Kaljulaid, qui est élue en octobre au sixième tour avec 81 voix sur 101. Il s’agit de la première femme à devenir chef de l’État dans le plus petit des trois pays baltes. En parallèle, peu après son entrée en fonction, en novembre, le Premier ministre est désavoué par ses partenaires de coalition sur fond de désaccord sur la politique économique du pays, puis forcé à la démission par une motion de censure. L’EK se substitue alors logiquement à l’ER et son leader, Jüri Ratas, dirige un gouvernement EK/SDE/IRL.

85Début mars 2019, soit moins de trois mois avant le scrutin européen, de nouvelles élections nationales sont organisées. Elles sont remportées par l’ER, comme cela a été systématiquement le cas depuis 2007. Sous le leadership de Kaja Kallas, fille d’un ancien Premier ministre et commissaire européen, l’ER remporte 28,9 % des voix (+ 1,2 %) et décroche 34 des 101 sièges du Riigikogu (+ 4). Il creuse ainsi l’écart avec l’EK, qui récolte tout de même 23,1 % des suffrages (– 1,7 %) et 26 sièges (– 1). L’EKRE continue son ascension et se hisse à la troisième place avec 17,8 % (+ 9,6 %) ; il sera représenté par 19 députés (+ 12). Dans le même temps, l’IRL – renommée Isamaa (Patrie) – ne pointe plus qu’à 11,4 % (– 2,3 %) et 12 sièges (– 2), tandis que le SDE chute sous la barre des 10 % (– 5,4 %) et ne retient que 10 sièges (– 5). Bien que la coalition au pouvoir soit nettement sanctionnée, l’EK garde la main. Le gouvernement Ratas II est composé de trois partis : l’EK, l’EKRE et Isamaa. Il prend ses fonctions le 29 avril 2019.

1.9.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

86L’Estonie dispose depuis son adhésion de 6 sièges au Parlement européen. Elle s’en verra attribuer un supplémentaire au moment de l’éventuel départ des députés britanniques de l’assemblée européenne. Le taux de participation est de 37,6 % en 2019, soit un léger progrès de + 1,1 % par rapport à 2014 (36,5 %), mais ce chiffre continue de placer le pays largement en-deçà de la moyenne européenne (50,7 %).

87L’ER s’adjuge une nouvelle fois la victoire au scrutin européen du 26 mai 2019 avec 26,2 %. Il progresse en voix (+ 2,1 %), sans toutefois gagner de sièges étant donné le faible nombre à attribuer par le pays. Le scrutin est surtout le théâtre du redressement du SDE, qui gagne presque 10 % par rapport aux élections européennes de 2014 : il recueille 23,3 % des suffrages et 2 sièges, doublant ainsi sa représentation. Le parti du Premier ministre connaît une fortune inverse : en ne totalisant plus que 14,4 %, l’EK perd – 8,0 % par rapport à 2014 (et encore davantage par rapport au scrutin national d’avril 2019). Malgré tout, il conserve son unique strapontin. Le parti Isamaa, tout en se maintenant relativement mieux à 10,3 % contre 13,9 % précédemment, perd son siège (qu’il récupérera cependant en cas de Brexit), au profit de l’EKRE, qui, en pointant à 12,7 %, enregistre la seconde meilleure progression (+ 8,7 %) derrière celle du SDE. Du fait de la perte par Isamaa de son siège, l’Estonie n’aura donc, dans un premier temps et jusqu’à la sortie du Royaume-Uni de l’UE si cet événement se produit, aucun représentant siégeant au sein du groupe PPE. Enfin, l’indépendant I. Tarrand ne s’est pas représenté.

Tableau 10. Élection du Parlement européen. Résultats en Estonie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 10. Élection du Parlement européen. Résultats en Estonie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 10. Élection du Parlement européen. Résultats en Estonie (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Erakond Isamaa ja Res Publica Liit (IRL).
** Candidat indépendant.

1.10. Finlande

1.10.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

88Au soir des élections européennes du 25 mai 2014, les trois grands partis traditionnels finlandais conservent à l’identique leur représentation au Parlement européen : 3 sièges vont au parti conservateur Kansallinen Kokoomus (KOK : Parti de la coalition nationale), qui passe de 23,2 % à 22,6 % (soit – 0,6 % par rapport aux élections européennes de juin 2009) ; 3 au parti libéral Suomen Keskusta (KESK : Parti du centre), dont le score reste stable de 19,0 % à 19,7 % (soit + 0,7 %) ; et 2 au Suomen Sosialidemokraattinen Puolue (SDP : Parti social-démocrate de Finlande), malgré un recul net de 17,5 % à 12,3 % (soit – 5,2 %). La seule formation finlandaise en net progrès est le parti de gauche radicale Vasemmistoliitto (Vas : Alliance de gauche), qui passe de 5,9 % à 9,3 % (soit + 3,4 %) et revient ainsi au Parlement européen avec 1 siège. Le Svenska Folkpartiet i Finland (SFP : Parti populaire suédois de Finlande) progresse lui aussi très légèrement, de 6,1 % à 6,8 % (+ 0,7 %), et conserve son unique siège d’eurodéputé. Le parti d’extrême droite Perussuomalaiset (PS : Vrais Finlandais  [25]) recule, de 14,0 % à 12,9 % (– 1,1 %), mais voit sa représentation inchangée, à 2 sièges. Seul le parti écologiste Vihreä Liitto (Vihr : Ligue verte) perd 1 siège (1 au lieu de 2), en reculant de 12,4 % à 9,3 % (– 3,1 %).

89Entre 2014 et 2015, le pays est dirigé par Alexander Stubb (KOK), à la tête d’une coalition relativement large, regroupant également le SDP, le Vihr, le SFP et les Kristillisdemokraatit (KD : Chrétiens-démocrates). Il fait suite au gouvernement de Jyrki Katainen (juin 2011 - juin 2014), désormais commissaire européen, qui s’appuyait sur la même majorité.

90C’est indéniablement le KESK qui remporte les élections législatives du 19 avril 2015 : avec 21,1 % et 49 sièges sur les 200 que compte l’Eduskunta – l’unique chambre du Parlement finlandais –, il retrouve le rang de premier parti qu’il avait occupé quasiment tout au long de la décennie 2000, tout en enregistrant le plus gros progrès par rapport au scrutin législatif précédent du 17 avril 2011 (+ 5,3 % et + 14 sièges). Le PS et le KOK sont au coude-à-coude : si le premier remporte un siège de plus que le second (38 contre 37), il recueille pourtant moins de suffrages que lui (17,7 % contre 18,2 %) ; l’évolution électorale est de – 1,4 % et – 1 siège pour le PS et de – 2,2 % et – 7 sièges pour le KOK. Pour la première fois depuis l’instauration du suffrage universel (en ce compris féminin) en Finlande en 1906-1907, le SDP ne figure pas dans le trio de tête à une élection législative. Avec 16,5 % des voix (– 2,6 %) et 34 sièges (– 8), il est quatrième. Quatre autres formations, de taille plus modeste, décrochent une représentation à l’issue de ce scrutin : le Vihr avec 8,5 % (+ 1,2 %) et 15 sièges (+ 5), le Vas avec 7,1 % (– 1,0 %) et 12 sièges (– 2), le SFP avec 4,9 % (+ 0,6 %) et 9 sièges (statu quo), et les KD avec 3,5 % (– 0,5 %) et 5 sièges (– 1). Le dernier siège revient à un représentant des Îles Åland, désigné sur ce territoire au scrutin uninominal majoritaire à un tour, alors que l’ensemble des autres députés sont désignés au scrutin proportionnel dans douze circonscriptions.

91Au lendemain des élections, le gouvernement Stubb cède logiquement la place à un exécutif dirigé par le KESK. Ce gouvernement, qui a à sa tête Juha Sipilä, regroupe également le KOK ainsi que le PS. Toutefois, ce dernier parti est exclu du gouvernement le 12 juin 2017. Quelques jours plus tard, il est remplacé par le Sininen Tulevaisuus (SIN : Réforme bleue), un groupe conservateur et eurosceptique né de la scission de 20 députés du PS.

92Alors même que le renouvellement de l’Eduskunta est normalement programmé pour avril 2019, le gouvernement présente sa démission le 8 mars 2019 à la suite de l’échec de son programme de réformes sociales et de santé, conduisant à une période d’affaires courantes. Les résultats des élections législatives du 14 avril 2019 désavouent largement le gouvernement sortant. Pour la première fois depuis vingt ans, c’est le SDP d’Antti Rinne qui remporte le scrutin avec 17,7 % des suffrages (+ 1,2 %) et 40 sièges (+ 6). Pourtant, le principal enseignement du scrutin est plutôt à trouver dans l’éparpillement des voix, aucun parti ne parvenant à capter plus de 20 % de l’électorat. Ainsi, la formation d’extrême droite PS talonne le SDP avec 17,5 % des voix (– 0,2 %) et 39 sièges (+ 1), et échoue à distancier le KOK, dont le résultat s’établit à 17,0 % (– 1,2 %) et 38 sièges (+ 1). Mais c’est bien le KESK du Premier ministre démissionnaire J. Sipilä qui enregistre le plus gros recul tant en voix (– 7,3 % ; 13,8 %) qu’en sièges (31 députés, soit 18 de moins qu’en 2015). Les quatre autres principales formations conservent une représentation parlementaire : 11,5 % pour le Vihr (20 sièges), 8,2 % pour le Vas (16 sièges), 4,5 % pour le SFP (9 sièges) et 3,9 % pour le KD (5 sièges). Le gouvernement formé par A. Rinne, le 6 juin 2019, comprend, outre le SDP, le KESK, le Vihr, le Vas et le SFP.

93Bien que la Finlande ne soit plus à proprement parler un système semi-présidentiel, il convient de préciser que, en janvier 2018, Sauli Niinistö (KOK) est reconduit à la tête de l’État, en s’imposant dès le premier tour de l’élection présidentielle – laquelle se déroule au suffrage universel direct – avec 62,7 % des votes.

1.10.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

94La Finlande dispose de 13 sièges au Parlement européen, soit un statu quo par rapport à 2014. Elle en obtiendra 14 (+ 1) en cas de départ des députés britanniques de l’assemblée européenne. Le taux de participation est de 40,7 % dans ce pays en 2019, soit une hausse modérée de + 1,6 % par rapport à 2014 (39,1 %).

95L’ordre des partis tel qu’issu du scrutin européen de mai 2019 est une nouvelle fois chamboulé, tant au regard des élections européennes précédentes que du scrutin national qui s’est tenu six semaines auparavant. Le KOK, qui a été exclu des négociations gouvernementales au niveau national, est le premier parti dans les urnes avec 20,8 % (– 1,8 %) et conserve ainsi ses 3 sièges. La principale surprise est le résultat du Vihr, parti qui enregistre une très forte progression en voix (+ 7,3 % ; 16,0 %), ce qui lui permet de doubler sa représentation au Parlement européen (2 sièges), et même de la tripler (3 sièges) lorsque sera appliquée la nouvelle répartition consécutive au Brexit si celui-ci devient effectif. Le SDP poursuit son redressement, avec 14,6 % des voix (+ 2,3 %) et 2 sièges (statu quo). C’est également le nombre de sièges que glane le PS, qui ne se hisse certes qu’à la quatrième place, mais continue cependant de progresser (13,8 %, soit + 0,9 %). Le siège gagné par le Vihr provient du KESK (2 sièges au lieu de 3 précédemment), qui ne parvient pas à renverser la tendance déjà observée au niveau national et dont le score s’établit à 13,5 % (– 6,2 %), ce qui ne fait du parti du Premier ministre sortant que la cinquième force politique du pays. Deux partis maintiennent leur unique siège tout en perdant des voix : le Vas (6,9 % ; – 2,4 %) et le SFP (6,3 % ; – 0,5 %).

Tableau 11. Élection du Parlement européen. Résultats en Finlande (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 11. Élection du Parlement européen. Résultats en Finlande (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 11. Élection du Parlement européen. Résultats en Finlande (en % et en sièges, 2014-2019)

1.11. France

1.11.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

96Lors du scrutin présidentiel des 22 avril et 6 mai 2012, le candidat du Parti socialiste (PS), François Hollande, s’impose avec 51,6 % de suffrages lors du second tour, face au président de la République sortant et candidat de l’Union pour un mouvement populaire (UMP), Nicolas Sarkozy. La gauche transforme l’essai lors des élections législatives organisées les 10 et 17 juin suivants. F. Hollande nomme alors Jean-Marc Ayrault (PS) comme Premier ministre, à la tête d’un gouvernement majoritairement composé de membres du PS, mais aussi de quelques représentants du Parti radical de gauche (PRG) et d’Europe Écologie Les Verts (EELV). À l’aube du scrutin européen de mai 2014, la sévère défaite enregistrée par la gauche aux élections municipales des 23 et 30 mars précédents entraîne un remaniement gouvernemental : Manuel Valls (PS) devient Premier ministre d’un gouvernement auquel EELV ne participe plus.

97Les élections européennes de 2014 se déroulent donc après deux ans de présidence de F. Hollande et alors que le PS connaît une crise de légitimité sans précédent. L’annonce des résultats, au soir des élections européennes, a l’effet d’un coup de tonnerre : pour la première fois, le Front national (FN) arrive en tête d’un scrutin de dimension nationale. Le parti d’extrême droite progresse de façon spectaculaire : de 6,3 % et 3 sièges en 2009, il passe à 25,0 % et 24 sièges en 2014 (soit + 18,7 % et + 21 sièges). À droite, l’UMP chute lourdement, de 27,8 % à 20,8 % (– 7,0 %) et de 29 à 20 sièges (– 9). Au centre, les listes « Alternative », présentées par le Mouvement démocrate (MoDem) et par l’Union des démocrates et indépendants (UDI, qui est une fédération de partis), s’adjugent 10,0 % des voix et 7 des 74 sièges à pourvoir. À gauche, le PS – qui présente une liste conjointe avec le PRG – recule de 16,5 % à 14,0 % (– 2,5 %), tout en limitant les dégâts en termes de sièges (– 1 ; 13 sièges). Pour sa part, dans l’alternance entre bons et mauvais résultats qui lui est propre, EELV se retrouve dans le creux de la vague, avec 8,9 % (– 7,4 %) et 6 sièges (– 8). À la gauche de la gauche, le Front de gauche (FG) – constitué du Parti communiste français (PCF), du Parti de gauche (PG) et d’une myriade de plus petites organisations et mouvements de gauche, notamment Ensemble ! – s’adjuge 6,3 % et 3 sièges. S’y ajoute le siège conservé par l’Alliance des Outre-Mers (AOM), qui est attribué au Parti communiste réunionnais (PCR).

98À partir de l’été 2016, se dessine un bouleversement majeur du système politique français  [26]. La baisse continue du niveau de popularité du chef de l’État, doublée de tensions internes particulièrement exacerbées – tant au sein du groupe PS à l’Assemblée nationale avec les « frondeurs » (députés incarnant l’aile gauche contestataire du parti) qu’entre le Premier ministre et le président de la République –, mène à la décision de F. Hollande de ne pas se représenter à la primaire devant départager les prétendants des partis de gauche lors de la prochaine élection présidentielle. Alors que l’on croyait la voie toute tracée pour M. Valls, c’est Benoît Hamon, un candidat au profil très à gauche, qui remporte l’exercice, matérialisant ainsi certaines des mises en garde des détracteurs des primaires. En parallèle, Emmanuel Macron, qui est ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique et qui jouit d’une grande popularité, lance son mouvement d’inspiration libérale En Marche (EM) au printemps 2016. Il quitte le gouvernement à la fin du mois d’août 2016 et déclare sa candidature à l’élection présidentielle en novembre.

99Dans le même temps, à droite, alors que la primaire ouverte nouvellement instaurée à l’UMP – parti rebaptisé Les Républicains (LR) – aurait dû conduire à un affrontement entre N. Sarkozy et l’ancien Premier ministre Alain Juppé, c’est l’ancien Premier ministre François Fillon qui s’y impose. En tête dans tous les sondages pour s’opposer à la candidate du FN, Marine Le Pen, au second tour de l’élection présidentielle, F. Fillon est cependant touché par un scandale politico-médiatique (impliquant notamment la rémunération fictive de son épouse comme assistante parlementaire). Le premier tour de l’élection présidentielle devient dès lors très incertain, puisqu’il se joue entre cinq candidats principaux : B. Hamon, E. Macron, F. Fillon et M. Le Pen, ainsi que Jean-Luc Mélenchon (France insoumise - FI). Ce sont finalement le candidat d’EM et celle du FN qui s’affrontent au second tour, le 7 mai 2017 ; E. Macron l’emporte avec 66,1 % des voix.

100La logique du système semi-présidentiel et du scrutin uninominal joue pleinement son effet lors des élections législatives qui suivent directement le scrutin présidentiel, les 11 et 18 juin 2017 : La République en marche (LREM) du président élu rafle la mise avec – en comptant les sièges réservés à son allié du MoDem – 350 sièges sur 577. Le PS tombe à 7,4 % et 30 sièges (soit une perte impressionnante de – 22,0 % et – 250 sièges). L’alliance LR–UDI chute à 136 sièges avec 21,6 % (– 13,0 % et – 93 sièges par rapport aux scores cumulés des membres de l’accord électoral de la droite parlementaire au premier tour des élections législatives des 10 et 17 juin 2012). Le FN réalise une petite percée en sièges (+ 6 ; 8 sièges) mais pas en pourcentage des suffrages exprimés (– 0,4 % au premier tour comparé au premier tour de 2012 ; 13,2 %). Parmi les partis de la nouvelle opposition, c’est surtout la FI – mouvement créé en 2016 pour soutenir la candidature de J.-L. Mélenchon à l’élection présidentielle et qui prend appui sur la structure du PG – qui tire son épingle du jeu, avec 11,0 % et 17 sièges à l’issue du second tour. Le PCF, qui avait soutenu J.-L. Mélenchon au scrutin présidentiel, n’est plus allié à la FI ; du fait de nombreuses divergences de vue entre leurs programmes respectifs, il n’y a pas d’alliance entre les deux partis au niveau national – même si des accords de désistement voient le jour dans un nombre limité de circonscriptions (c’est-à-dire des retraits de candidatures de part et d’autre, pour permettre au candidat restant de l’emporter). Avec seulement 2,7 %, les communistes peuvent, par le truchement du scrutin uninominal, finalement prétendre à 10 sièges. En novembre 2018, le PCF entérinera la fin du FG.

101Le début du mandat présidentiel d’E. Macron ancre la politique du gouvernement au centre-droit. La première moitié du mandat est notamment marquée par des réductions d’impôts pour les entreprises et des cotisations salariales, par un durcissement de la politique migratoire, par un bilan mitigé en matière de climat et d’environnement, et par de grands projets de privatisation. À l’automne 2018, le mouvement populaire des Gilets jaunes, qui revendique au départ une baisse des taxes sur les carburants, envahit le débat politique tout autant que les rues et les axes de circulation routière. En plus d’occupations permanentes notamment des ronds-points, entre le 17 novembre et le 26 mai 2019, a lieu, chaque samedi, un nouvel acte de mobilisation regroupant des dizaines de milliers de personnes à travers le pays et notamment à Paris. À partir de juin, le mouvement s’essoufflera cependant.

1.11.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

102La France dispose de 79 sièges au Parlement européen, soit 5 de plus qu’en 2014 (74), mais ces sièges sont gelés jusqu’à la sortie effective du Royaume-Uni de l’UE. Le taux de participation est de 50,1 % en 2019, soit une hausse de + 7,7 % par rapport à 2014 (42,4 %). Ces chiffres sont intéressants à plusieurs égards. Tout d’abord, il s’agit de la première hausse de la participation à des élections européennes dans le pays depuis 1994 et de la plus forte hausse entre deux scrutins à ce niveau jamais enregistrée. Ensuite, pour la première fois, le niveau de la participation aux élections européennes est supérieur à celui enregistré aux élections législatives précédentes. Enfin, tant en valeur absolue qu’en différence avec l’élection européenne de 2014, la participation en France est celle dont les chiffres se rapprochent le plus de la moyenne européenne.

103Lors des élections européennes de mai 2019, le Rassemblement national (RN) – nouveau nom du FN – arrive en tête pour le deuxième scrutin européen consécutif, avec 23,3 % des voix et 22 sièges. La baisse par rapport au scrutin européen précédent (– 1,6 % et – 2 sièges) n’est que relative ; du fait de la hausse de la participation, le RN obtient en réalité plus de 500 000 électeurs de plus qu’en 2014. Dans une large mesure, ce résultat valide dans les urnes la stratégie de ce parti, ayant consisté à centrer la campagne autour de l’affrontement entre partisans d’une plus grande intégration européenne et opposants à celle-ci – un clivage qui semble en outre largement recouper celui entre mondialistes et nationalistes. En effet, la formation d’extrême droite n’a qu’un seul concurrent direct : LREM, dont la liste, baptisée Renaissance, comprend notamment des candidats du MoDem et d’Agir, la droite constructive (Agir) – parti créé en novembre 2017 par des députés exclus de LR ou s’étant distanciés du parti notamment en raison de l’élection à venir de Laurent Wauquiez à la tête du parti. Cette liste Renaissance récolte 22,4 % et 21 sièges. La majorité présidentielle perd donc son bras de fer face à l’extrême droite eurosceptique, au moins provisoirement, puisque l’égalité en sièges sera totale quand sera mise en place la nouvelle répartition consécutive au Brexit si celui-ci se produit. Pourtant, bien que le parti d’E. Macron n’ait pas réussi à se hisser à la première place, la victoire de LREM est à trouver ailleurs : à savoir dans l’absence de sanction réelle subie par le parti au pouvoir à un scrutin intervenant approximativement à mi-mandat (avec un score somme toute peu éloigné de celui du premier tour de l’élection présidentielle – qui était de 24,0 %) et dans un contexte national particulièrement tendu, mais surtout dans le quasi-anéantissement des adversaires politiques au sein du camp pro-européen.

104Le parti LR (ex-UMP), avec 8,5 % des suffrages et 8 sièges, est en chute libre (– 12,3 % et – 12 sièges). Si l’échec semble plus attendu et, à première vue, la chute moins vertigineuse pour le PS et ses alliés (6,2 % et 5 sièges, soit – 7,8 % et – 8 sièges, mais – 7 sièges en cas de Brexit), ce n’est qu’à la faveur d’un score déjà particulièrement bas en 2014 (14,0 %). C’est aussi moins bien que la FI, séparée du PCF, qui totalise 6,3 % des voix et 6 sièges, soit à la décimale près le même score que l’alliance FG en 2014, mais en décrochant bien plus de sièges (6 au lieu de 3  [27]), du fait du système électoral davantage proportionnel permis par le passage à une circonscription unique (au lieu de 8 précédemment). Entre les anciens partis de gouvernement et les deux nouvelles forces politiques dominantes telles qu’issues du premier tour du scrutin présidentiel de 2017, s’intercale EELV, qui récolte 13,5 % et 12 sièges à l’issue de la première répartition (13 en cas de Brexit), soit une hausse de + 4,5 % et 6 sièges. Pour le reste, l’UDI, qui n’a pas pu reconduire son alliance avec le MoDem désormais intégré à la majorité présidentielle, et le PCF esseulé perdent toute représentation.

105Si le Brexit devient effectif, LREM gagnera 2 sièges, tandis que le RN, EELV et le PS en obtiendront un de plus chacun.

Tableau 12. Élection du Parlement européen. Résultats en France (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 12. Élection du Parlement européen. Résultats en France (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 12. Élection du Parlement européen. Résultats en France (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Front national (FN).
** En 2014, Union pour un mouvement populaire (UMP).
*** En 2014, coalition électorale PS–PRG ; en 2019, coalition électorale PS–Place publique–Nouvelle donne–PRG.
**** Coalition électorale constituée notamment du Parti communiste français (PCF) et du Parti de gauche (PG).

1.12. Grèce

1.12.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

106Au moment des élections européennes de mai 2014, la Grèce est dirigée depuis le 20 juin 2012 par un gouvernement emmené par le conservateur Antónis Samaras, président de la Nea Demokratia (ND : Nouvelle démocratie), soutenue par le parti social-démocrate Panellínio Sosialistikó Kínima (PASOK : Mouvement socialiste panhellénique) et la petite formation de gauche Dimokratiki Aristera (DIMAR : Gauche démocrate). Cette dernière s’est cependant désolidarisée du gouvernement en juin 2013, pour marquer son désaccord sur la fermeture de la partie télévisuelle de l’audiovisuel public grec.

107Les élections européennes de 2014 consacrent dans les urnes le progrès du mouvement Synaspismós Rizospastikís Aristerás (SYRIZA : Coalition de la gauche radicale), qui obtient 26,6 % (+ 21,9 % par rapport aux élections européennes de juin 2009) et 6 élus (+ 5). La ND chute lourdement, passant de 32,3 % et 8 sièges en 2009 à 22,7 % (– 9,6 %) et 5 sièges (– 3) en 2014. Mais ce n’est rien comparé à l’effondrement total du PASOK, qui – bien que s’étant allié à d’autres petites formations politiques, comme Sumphōnía gia tē Néa Elláda (Accord pour une nouvelle Grèce), Dunamikē Elláda (Grèce dynamique) et Néoi Metarruthmistés (Nouveaux réformateurs), au sein d’une coalition électorale du nom d’Eliá - Dimokratikí Parataxi (Elia : Olivier - Alignement démocratique) – n’obtient que 8,0 % des voix (en recul de – 28,6 %) et 2 sièges (– 6). Quant à lui, le Kommounistikó Kómma Elládas (KKE : Parti communiste de Grèce) recule légèrement (à 6,1 %, soit – 2,2 %) mais conserve ses 2 sièges. La représentation de la gauche semble ainsi s’être largement reportée sur SYRIZA. Trois listes apparues ou réapparues sur la scène politique grecque lors de ce scrutin réussissent également à s’adjuger une représentation au Parlement européen. Il s’agit du parti néo-nazi Laïkós Sýndesmos - Chrysí Avgí (XA : Association populaire - Aube dorée), avec 9,4 % et 3 sièges, du parti centriste To Potámi (La rivière), avec 6,6 % et 2 sièges, et du parti de droite souverainiste Anexártiti Éllines (ANEL : Grecs indépendants), avec 3,5 % et 1 siège.

108Initiée par le scrutin européen, une recomposition majeure du paysage politique grec se dessine. L’impopularité grandissante des deux principaux partis grecs depuis la fin du régime autoritaire des Colonels en 1974, la ND et le PASOK, tous deux associés aux plans d’austérité sans égal en Europe imposés au pays, conduit à leur éviction du pouvoir. Dans la foulée des élections européennes, le Premier ministre A. Samaras procède à un remaniement ministériel en juin 2014. Quelques mois plus tard, en janvier 2015, dans l’impossibilité de faire élire un nouveau président de la République après trois tours de scrutin, A. Samaras est contraint de dissoudre le Parlement.

109Les élections législatives anticipées du 25 janvier 2015 donnent lieu à un bouleversement sans précédent dans l’histoire politique de la Grèce depuis le Metapolítefsi, la transition démocratique. SYRIZA, qui avait entamé son irrésistible ascension lors du précédent scrutin de 2012, remporte une victoire historique, avec 36,3 % des voix (+ 9,4 %) et – en partie du fait de la prime de 50 sièges attribuée au parti ayant recueilli le plus grand nombre de suffrages – 149 sièges (+ 78). Si la ND résiste plutôt bien (27,8 %, soit – 1,9 % ; mais, ne bénéficiant plus de la prime, 76 sièges, soit – 53), le PASOK s’effondre (4,7 %, soit – 7,6 % ; 13 sièges, soit – 20). Ce score le place près de 40 % en dessous de ses résultats de 2009, et n’en fait plus que le septième parti. Entre les deux partis historiques s’intercalent XA (6,3 % et 17 sièges), To Potámi (6,1 % et 17 sièges également), le KKE (5,5 % et 15 sièges) et ANEL (4,8 % et 13 sièges).

110Manquant de peu la majorité absolue des sièges (149 sièges, soit un progrès de + 78 sièges par rapport au scrutin législatif précédent), SYRIZA forme un gouvernement de coalition avec l’ANEL. Aléxis Tsípras, leader du parti, devient Premier ministre d’un gouvernement qui compte notamment dans ses rangs Yánis Varoufákis, économiste et éminent critique des politiques d’austérité. Pourtant, ce dernier se retire le 5 juillet 2015, au lendemain du référendum organisé par le gouvernement relativement aux réformes demandées par les créanciers du pays en échange d’un nouveau plan d’aide. En effet, bien que le plan proposé par les institutions financières internationales soit massivement rejeté par les Grecs (à 61,3 % des suffrages), aucune modification fondamentale n’est obtenue auprès de la « troïka » et des autres États membres de l’UE. De fait, un troisième mémorandum, et donc un nouveau round de mesures d’austérité, est soumis au Parlement grec le 13 août ; il est adopté notamment grâce aux voix de l’opposition. Dans le sillage de Y. Varoufákis, une quarantaine de députés de la majorité se retirent de celle-ci, rendant ainsi minoritaire le gouvernement Tsípras. Un gouvernement intérimaire est mis en place le 27 août ; il s’agit du premier exécutif dirigé par une femme dans ce pays, Vassilikí Thánou-Christophílou.

111Lors des élections législatives anticipées du 20 septembre 2015, les électeurs de SYRIZA lui réitèrent presque intégralement leur confiance (avec 35,5 % des suffrages et 145 sièges, soit une baisse de – 0,9 % et de – 4 sièges). Le gouvernement Tsípras II est alors mis en place, qui allie à nouveau SYRIZA à ANEL. Son allié de coalition se retire finalement en janvier 2019, en raison de son opposition à l’accord sur le nom de la République de Macédoine du Nord. Désormais minoritaire, le gouvernement Tsípras II se maintient néanmoins grâce à des appuis extérieurs.

112Des élections législatives auront lieu le 7 juillet 2019, légèrement avancées – de trois mois et demi. Elles verront le retour en grâce de la ND, qui remportera 39,9 % des voix et 158 des 300 sièges du Parlement, permettant à Kyriákos Mitsotákis de former un gouvernement uniquement composé du parti de centre-droit. Du fait du système électoral (et notamment de la prime de 50 sièges attribuée au parti arrivant en tête), SYRIZA, sans pourtant subir un véritable revers électoral (– 4,0 % ; 31,5 %) ne détiendra plus que 86 sièges (– 59).

1.12.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

113La Grèce dispose de 21 sièges au Parlement européen. Le taux de participation est de 58,8 % en 2019, soit une légère baisse de – 1,2 % par rapport à 2014 (60,0 %). La Grèce est donc l’un des 8 pays où la participation au scrutin de 2019 a été inférieure à celle de 2014, et l’un des quatre pays à vote obligatoire (sur cinq) où cela a été le cas.

114C’est véritablement lors de ce scrutin, qui laisse préfigurer les élections législatives à venir au mois de juillet suivant, que la ND, encore dans l’opposition, connaît un retour de fortune. Elle s’impose avec 33,1 % des voix (+ 10,4 %) et 7 sièges (+ 2), devant SYRIZA. Bien que celui-ci, qui est alors le principal parti du gouvernement, se maintienne relativement bien au niveau européen à 23,8 % (– 2,8 %) des voix et 6 sièges (statu quo), ce score est le plus faible enregistré par SYRIZA à un scrutin d’ampleur nationale depuis 2012. En outre, il se double d’une défaite aux scrutins régionaux et locaux organisés le même jour. Surtout, cette relative déroute vient concrétiser dans les urnes la baisse de popularité d’A. Tsípras et semble donc devoir être interprétée comme un vote de sanction à son égard.

115Pour le reste, le PASOK se maintient tant bien que mal au sein d’une nouvelle alliance avec le Kinima Dimokraton Sosialiston (KIDISO : Mouvement des socialistes démocrates), alliance intitulée Kinima Allagis (KINAL : Mouvement pour le changement) et qui recueille 7,7 % des voix (– 0,3 % par rapport à la coalition Elias cinq ans plus tôt) et 2 sièges (statu quo). De même, le KKE préserve ses 2 strapontins avec 5,4 % (– 0,7 %). XA est en net recul à 4,9 %, soit à peine un peu plus de la moitié de son score de 2014, et perd un de ses 3 sièges. Le parti Elliniki Lisi (EL : Solution grecque), un parti eurosceptique proche de l’Église orthodoxe, fait son entrée au Parlement européen en décrochant 1 siège et 4,2 % des voix. Dans le même temps, ANEL, fraîchement sorti du gouvernement, et To Potámi perdent toute représentation au sein de l’assemblée européenne.

Tableau 13. Élection du Parlement européen. Résultats en Grèce (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 13. Élection du Parlement européen. Résultats en Grèce (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 13. Élection du Parlement européen. Résultats en Grèce (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, coalition électorale Eliá réunissant plusieurs petites formations autour du PASOK ; en 2019, coalition électorale réunissant PASOK et KIDISO.

1.13. Hongrie

1.13.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

116À partir des élections européennes de juin 2009 et surtout des élections législatives anticipées des 11 et 25 avril 2010, et suite au retour au poste de Premier ministre de Viktor Orbán (qui avait déjà occupé cette fonction entre 1998 et 2002), le parti conservateur Fidesz - Magyar Polgári Szövetség (Fidesz-MPSz : Fidesz - Union civique hongroise) s’impose comme la principale formation politique de la scène politique hongroise. En mai 2012, János Áder, président de ce parti, est élu à la présidence de la République par l’Assemblée nationale (Magyar Országgyűlés). Aux élections législatives du 6 avril 2014, la victoire du Fidesz-MPSz – en liste commune avec le Kereszténydemokrata Néppárt (KDNP : Parti populaire chrétien-démocrate) est sans appel : le parti récolte 44,9 % des voix. Il devance ainsi nettement l’alliance Összefogás (Unité), réunissant diverses formations du centre et de la gauche : le parti social-démocrate Magyar Szocialista Párt (MSzP : Parti socialiste hongrois), le parti social-libéral Együtt 2014 (Együtt : Ensemble 2014) – qui est lui-même une alliance formée en opposition à la politique du Fidesz-MPSz et réunissant plusieurs mouvements et organisations –, la Demokratikus Koalíció (DK : Coalition démocratique) – issue d’une scission du MSzP – et le Magyar Liberális Párt (MLP : Parti libéral hongrois), laquelle alliance n’obtient que 25,6 % des voix. Lors de ce même scrutin, le mouvement d’extrême droite Jobbik Magyarországért Mozgalom (Jobbik : Mouvement pour une meilleure Hongrie) recueille 20,2 % des suffrages, et la liste écologiste Lehet más a Politika (LMP : La politique peut être différente) 5,3 %.

117Aux élections européennes de 2014, qui ont lieu le mois suivant, bien que toujours ultra-dominant, le Fidesz-MPSz, toujours en coalition avec le KDNP, recule néanmoins par rapport au scrutin européen de 2009, en perdant – 4,9 % et – 2 sièges ; il conserve toutefois 51,5 % des suffrages et 12 sièges. Le score du Jobbik est stable, avec 14,7 % (– 0,1 %) et 3 sièges (statu quo). Avec 10,9 %, le MSzP perd – 6,5 % et ne conserve que 2 sièges sur 4. Trois nouvelles formations font leur entrée au Parlement européen : la DK, avec 9,8 % et 2 sièges ; Együtt, allié à l’écologiste Párbeszéd Magyarországért Párt (PM : Parti du dialogue pour la Hongrie) – issu d’une scission de LMP –, avec 7,3 % et 1 siège ; LMP, qui s’adjuge 5,0 % et 1 siège.

118Les élections législatives du 8 avril 2018 enregistrent une participation record de 69,4 %. La coalition Fidesz–KDNP, qui s’offre le luxe de progresser encore par rapport au scrutin législatif précédent à 49,3 % des voix (+ 4,4 %), conserve ses 133 sièges sur les 199 que compte le Parlement unicaméral hongrois, confirmant et confortant V. Orbán dans son rôle de Premier ministre. À l’issue de ce scrutin, Jobbik, qui a obtenu 26 sièges et 19,1 % des voix, bien qu’en léger tassement (– 1,1 % mais + 3 sièges) se positionne comme principal parti d’opposition, tandis que le MSzP, allié au PM, ne recueille plus que 11,9 % des voix (– 13,7 % par rapport au score de l’alliance Összefogás en 2014) et 20 sièges (– 9). LMP continue sa progression avec 7,1 % (+ 1,8 %) et 8 sièges (+ 3). La DK et Együtt, qui se présentent seuls, recueillent respectivement 5,4 % et 9 sièges et 0,7 % et 1 siège.

119Au cours de cette décennie sans réel partage du pouvoir au niveau national, sont adoptées une série de mesures controversées sur la scène internationale. Une nouvelle Constitution (entrée en vigueur en 2012) s’accompagne d’un ensemble de lois autoritaires visant à réguler le fonctionnement de la justice, de la Banque centrale hongroise, des médias, des Églises ou encore de l’autorité de protection des données. Mais c’est surtout sa politique migratoire qui attire à V. Orbán les foudres de Bruxelles : en s’opposant aux quotas, en faisant ériger un mur à la frontière avec la Serbie et en permettant la détention systématique des demandeurs d’asile, le gouvernement s’expose à des sanctions de l’UE. En septembre 2018, le Parlement européen vote finalement à l’encontre de la Hongrie l’activation d’une procédure communautaire exceptionnelle (prévue par l’article 7 du TUE) pour « risque clair de violation grave de l’État de droit ».

1.13.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

120La Hongrie dispose de 21 sièges au Parlement européen. Le taux de participation est de 43,4 % en 2019, soit un bond de + 14,4 % par rapport à 2014 (29,0 %).

121Le Fidesz-MPSz, toujours allié au KDNP, réussit l’exploit de progresser encore au niveau européen (52,1 % et 13 sièges, soit + 0,7 % et + 1 siège), et ce malgré l’important regain de participation, qui aurait pu lui être défavorable. Il fait même mieux qu’aux élections nationales, ce qui est peu courant pour un parti au pouvoir. Il s’agit en fait du parti réalisant le meilleur score au niveau national pour ces élections européennes (à l’exception du Partit Laburista maltais, mais qui évolue lui dans un système bi-partisan). La coalition DK s’arroge la deuxième place avec 16,3 % des voix et 4 sièges, ce qui constitue une percée appréciable non seulement au vu des élections législatives de 2018, mais également des élections européennes de 2014 (+ 6,5 % et + 2 sièges). Un nouveau parti, le Momentum Mozgalom (MoMo : Mouvement Momentum), généralement qualifié de libéral et ayant été fondé à la suite d’une pétition réclamant un référendum à Budapest sur la candidature de la ville à l’organisation des Jeux olympiques de 2024, crée la surprise en réunissant 9,9 % des électeurs hongrois et recevant par là même 2 sièges. Le MSzP continue sa dégringolade dans les urnes et, même allié au PM, n’arrive qu’en cinquième position, avec 6,7 % (– 4,2 %) et perd la moitié de sa représentation en ne conservant qu’un seul siège. Rappelons que, lors du premier scrutin européen en Hongrie en 2004, le MSzP avait réuni 34,3 % de l’électorat magyar. À moyen terme, la pente est encore plus vertigineuse pour Jobbik, dont le score est divisé par plus de deux (6,4 %, soit – 8,3 %) et qui perd 2 des 3 sièges conquis en 2014. LMP ne réussit pas à conserver son siège. Quant à Együtt, il a été dissous en 2018 à la suite des résultats décevants enregistrés aux élections législatives.

Tableau 14. Élection du Parlement européen. Résultats en Hongrie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 14. Élection du Parlement européen. Résultats en Hongrie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 14. Élection du Parlement européen. Résultats en Hongrie (en % et en sièges, 2014-2019)

1.14. Irlande

1.14.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

122De 2011 à 2016, l’Irlande est dirigée par un gouvernement alliant deux partis, le parti de centre-droit Fine Gael (FG : Clan des Gaels) et celui de centre-gauche Irish Labour Party (PL ou LAB : Parti travailliste), et dirigé par le Premier ministre Enda Kenny (FG).

123Caractéristique typique de l’Irlande et de son système électoral (le vote unique transférable), lors du scrutin européen de mai 2014, la première force qui émerge est constituée de l’ensemble des candidats indépendants. Ils atteignent alors ensemble 25,7 % des voix et 3 d’entre eux sont élus. Les deux premiers partis politiques du pays, tous deux ancrés au centre-droit, le FG et le Fianna Fáil (FF : Soldats de la destinée, parti républicain), sont au coude-à-coude en pourcents (22,3 % des voix chacun, soit un recul respectif de – 6,8 % et de – 1,8 % par rapport aux élections européennes de juin 2009) mais, du fait du système électoral, le FG obtient 4 sièges (statu quo) pour 1 seul au FF (– 2). À gauche, le PL recule sèchement de 13,9 % à 5,3 % (– 8,6 %) et perd ses 3 élus, disparaissant ainsi du Parlement européen. Inversement, le parti nationaliste de gauche Sinn Féin (SF : Nous-mêmes) progresse de 11,2 % à 19,5 % (+ 8,3 %) et s’adjuge 3 sièges (+ 3). À l’extrême gauche, le Socialist Party (SP : Parti socialiste) ne s’est pas représenté et perd donc son seul élu. Quant au Green Party (GP : Parti vert), malgré un score de 4,9 %, il échoue à rejoindre l’assemblée européenne.

124Des élections législatives ont lieu le 26 février 2016. Avec 25,5 % des voix et 50 sièges sur 158 au Dáil Éireann et malgré un net recul (– 10,6 % et en perdant un tiers de sa représentation parlementaire), le FG sort vainqueur du scrutin. L’effondrement du PL (6,6 %, soit – 12,8 %), qui ne conserve que 7 sièges (– 30), ne permet cependant pas au FG de reconduire la coalition sortante. Ce sont le SF, avec 13,9 % (+ 4,0 %) et 23 sièges (+ 9), et surtout le FF, avec 24,4 % (+ 6,9 %) et 44 sièges (+ 24) qui bénéficient, semble-t-il, le plus du report des voix de la majorité sortante. Cinq autres formations obtiennent des sièges à la chambre basse, dont 6 strapontins pour la coalition formée par Solidarity / Anti-Austerity Alliance (AAA : Solidarité / Alliance anti-austérité) et le People before Profit Alliance (PBP : Le peuple avant le profit). Il faut deux mois de négociations au FG avant de pouvoir poursuivre à la tête du gouvernement, cette fois avec l’autre parti de centre-droit, le FF, qui se contente toutefois de soutenir l’exécutif de l’extérieur. C’est donc un gouvernement minoritaire qui est mis en place, regroupant des ministres FG et des indépendants.

125En juin 2017, à la suite de la démission d’E. Kenny de la présidence de son parti et, par là même, de son poste de Taoiseach, Leo Varadkar lui succède. Âgé de 38 ans, il devient ainsi le plus jeune Premier ministre irlandais, tout en égalant à l’échelle européenne le record de précocité à la tête d’un exécutif du Premier ministre belge Charles Michel – quelques mois plus tard, il sera devancé à ce titre par Sebastian Kurz lorsque ce dernier deviendra chancelier autrichien.

126Une autre particularité du pays insulaire réside dans les référendums. Les Irlandais sont consultés directement sur cinq projets d’amendements de la Constitutions au cours de la législature européenne 2014-2019. Notamment, ils adoptent par ce moyen l’abrogation de l’interdiction de l’avortement, par 66,4 % et après une campagne particulièrement virulente, en mai 2018.

1.14.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

127L’Irlande dispose de 11 sièges au Parlement européen. À compter de la date de sortie du Royaume-Uni de l’UE si celle-ci a lieu, 2 autres sièges s’y ajouteront. Pour tenir compte de cette attribution à venir, l’Irlande a procédé à un redécoupage partiel des trois circonscriptions électorales qui avaient prévalu en 2014. Le district Midlands-Nord-Ouest perd deux comtés tout en conservant ses 4 sièges ; lesquels comtés sont réalloués au district du sud du pays, où sera disputé un siège supplémentaire (5 au lieu de 4). Enfin, la dernière circonscription, celle de Dublin, reste inchangée géographiquement mais gagne 1 siège (passant de 3 à 4). Il va sans dire que, bien au-delà de la question des sièges gelés, l’Irlande serait le pays de l’UE le plus directement touché par un retrait du Royaume-Uni et que la question du Brexit y a un retentissement significatif.

128Le taux de participation est de 49,7 % en 2019, soit un recul de – 2,7 % par rapport à 2014 (52,4 %).

129Les deux principaux enseignements du scrutin sont sans conteste la nette victoire du FG, d’une part, et la considérable progression du GP, d’autre part. En accroissant son score en voix (+ 7,4 % ; 29,6 %) mais pas en sièges (4), le FG parvient à maintenir l’écart avec son grand rival, le FF (16,6 %, soit – 5,7 % ; 1 siège, statu quo) – qui, tout comme lui, bénéficiera d’une représentation corrigée d’un siège au moment où prendra légalement effet l’éventuel retrait du Royaume-Uni de l’UE. Entre eux, s’intercalent deux partis. Avec 11,6 % des suffrages, le GP fait plus que doubler son score de 2014 (+ 6,5 %) et décroche 2 sièges d’un seul coup. Le nouveau parti d’inspiration socialiste Independents 4 Change (I4C : Indépendants pour le changement) recueille 7,4 % des voix et envoie également 2 députés au Parlement européen. Ceux-ci siégeront dans le même groupe parlementaire (à savoir le GUE/NGL) que le SF, qui est celui des partis traditionnels irlandais qui enregistre le plus net recul (– 7,8 % à 11,7 % ; de 3 à 1 siège), et que l’indépendant Luke « Ming » Flanagan – ce dernier étant le seul des trois sortants sans étiquette qui conserve son siège. Il est encore à noter que le PL ne parvient à récupérer aucun de ses 3 sièges perdus en 2014, loin s’en faut, puisqu’il ne totalise que 3,1 % des voix à l’échelle du pays (– 2,2 %) et reste donc absent de l’assemblée européenne.

Tableau 15. Élection du Parlement européen. Résultats en Irlande (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 15. Élection du Parlement européen. Résultats en Irlande (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 15. Élection du Parlement européen. Résultats en Irlande (en % et en sièges, 2014-2019)

* Luke « Ming » Flanagan.

1.15. Italie

1.15.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

130La législature européenne 2014-2019 ne fait pas exception à l’incessante recomposition du paysage politique italien ayant cours depuis les années 1990. Les 24 et 25 février 2013, le centre-gauche remporte les élections législatives mais, en l’absence de majorité, c’est un gouvernement d’union nationale, avec le social-démocrate Partido Democratico(PD : Parti démocrate) aux manœuvres, qui remplace le gouvernement technique précédemment mis en place. Ce nouveau gouvernement est dirigé par Enrico Letta, lequel n’avait pourtant pas été candidat aux primaires de son propre camp. Il ne reste en place qu’un peu plus de neuf mois. La rigueur budgétaire et les dissensions internes poussent le PD à un vote de défiance interne qui signe la fin du gouvernement Letta et l’arrivée sans grand suspense du secrétaire général du parti et maire de Florence, Matteo Renzi, à la présidence du Conseil des ministres. Dans un premier temps, le gouvernement et surtout son Premier ministre jouissent d’une certaine popularité, notamment grâce à l’annonce d’un important plan de relance de l’économie.

131Un an après son retour au pouvoir au niveau national, le PD remporte une victoire historique aux élections européennes de mai 2014 avec 40,8 % (soit + 14,7 % par rapport aux élections européennes de 2009) et passe ainsi de 21 à 31 sièges (+ 10). Pour sa première participation à un scrutin européen, le Movimento Cinque Stelle (M5S : Mouvement cinq étoiles), parti anti-establishment et généralement considéré comme populiste, s’adjuge 21,2 % des voix et 17 sièges. Avec 16,8 % et 13 sièges, la formation de centre-droit Forza Italia (FI : Allez l’Italie) est en net recul par rapport au score obtenu en 2009 par Il Popolo delle Libertà (PdL, Le peuple de la liberté) : 35,3 % et 29 sièges, soit – 18,5 % et – 16 sièges. Il en va de même pour la Lega Nord (LN : Ligue du Nord), qui passe de 10,2 % et 9 élus en 2009 à 6,2 % (– 4,1 %) et 5 élus (– 4) en 2014. La liste de coalition centriste unissant le Nuovo Centrodestra(NCD : Nouveau centre-droit), l’Unione di Centro (UDC : Union du centre) et les Popolari per l’Italia (PPI : Populaires pour l’Italie) obtient 4,4 % des voix et 3 élus. La liste de gauche radicale L’Altra Europa con Tsipras (AECT : L’autre Europe avec Tsípras) récolte 4,0 % et 3 sièges. Le mouvement régionaliste Südtiroler Volkspartei(SVP : Parti populaire sud-tyrolien) voit ses résultats demeurer stables à 0,5 % et conserve son unique élu.

132Le gouvernement italien tombe en décembre 2016, en raison de l’échec d’un référendum constitutionnel qui proposait de réduire drastiquement le nombre de sénateurs et leurs pouvoirs, mais également de supprimer les provinces ou encore de modifier la loi électorale pour instaurer un système davantage majoritaire. La confection d’une nouvelle loi électorale s’impose d’ailleurs comme la tâche principale du successeur de M. Renzi, l’ancien ministre des Affaires étrangères Paolo Gentiloni, nommé au Palais Chigi par le nouveau président de la République, Sergio Mattarella.

133Le 4 mars 2018, les élections législatives chamboulent, très certainement encore davantage que toutes les précédentes sous la Seconde République, la donne politique italienne. L’élection des deux chambres, c’est-à-dire des 630 députés et des 315 sénateurs, s’opère de manière quasi identique via un nouveau mode de scrutin mixte, un peu plus d’un tiers des sièges étant alloués au scrutin uninominal majoritaire à un tour et le reste à la proportionnelle. La différence majeure réside dans la taille du corps électoral, puisque seuls les électeurs de plus de 25 ans peuvent voter aux sénatoriales.

134Le M5S arrive en tête avec 33,3 % (+ 7,4 %) des suffrages à la Camera dei Deputati et y décroche 227 sièges. Il n’est devancé numériquement que par l’addition des scores des partis de la coalition formée entre FI de l’ancien président du Conseil Silvio Berlusconi, la Lega (Ligue) d’extrême droite de Matteo Salvini – nouveau nom de la LN – et deux autres petites formations de droite – le parti nationaliste de droite radicale Fratelli d’Italia(FDI : Frères d’Italie) et le parti libéral-conservateur Noi con l’Italia(NCI : Nous avec l’Italie) –, qui obtiennent ensemble 37,0 % des voix. Au sein de cette coalition électorale largement informelle de droite, le leadership change de camp, puisque c’est la Lega qui prend l’ascendant (avec 17,4 % des suffrages et 124 sièges, contre 14,0 % et 106 sièges à FI). La coalition de centre-gauche de M. Renzi accuse le coup avec 23,1 % des voix (soit – 6,9 % par rapport à la coalition Italia. Bene Comune en 2013  [28]) et 112 sièges pour le seul PD (soit une perte sèche de pas moins de – 185 sièges). Les équilibres sont grosso modo les mêmes au sénat, élu le même jour.

135Le président S. Mattarella mène une série de consultations et se place au centre de tractations compliquées, au terme desquelles un accord entre les deux partis arrivés en tête lors du scrutin, tous deux « antisystème », le M5S et la Lega – cette dernière étant forcée, bon gré mal gré, de se séparer de son allié de coalition, FI –, forment un gouvernement. C’est le juriste indépendant mais proche du M5S Giuseppe Conte qui est chargé de mener les négociations à cet effet, les plus longues jamais connues par l’Italie, cette tâche s’avérant particulièrement compliquée notamment du fait de la vigilance du président de la République. Dirigé par un novice en politique, le gouvernement Conte a pour figures de proue deux vice-présidents du Conseil des ministres : Luigi Di Maio, chef de file du M5S, qui est en charge du Développement économique, du Travail et des Politiques sociales, et Matteo Salvini (Lega), qui hérite du Ministère de l’Intérieur, un portefeuille grâce auquel il s’impose comme le nouveau chantre des politiques anti-migratoires en Europe.

136En août 2019, la situation se crispera prima facie autour de la question de la liaison ferroviaire Lyon-Turin. Le 8 août, M. Salvini, en position de force dans les sondages, retirera son parti de la coalition et déposera une motion de défiance à l’encontre du gouvernement. G. Conte remettra sa démission le 20 août, à la suite de ce qui sera essentiellement perçu comme un coup de poker de M. Salvini en vue d’obtenir des élections législatives anticipées qui lui seraient, selon les derniers sondages, extrêmement favorables. Pourtant, grâce à un accord de principe entre le M5S et le PD, le président de la République confiera à G. Conte la mission de former un nouveau gouvernement. L’exécutif Conte II s’articulera autour de ces deux forces politiques, le parti Liberi e Uguali (LeU : Libres et égaux) – une petite formation de gauche ayant obtenu 3,4 % des voix et 14 députés aux élections législatives de 2018 –, faisant l’appoint. La nouvelle majorité disposera ainsi de 341 sièges sur 630 à la chambre basse et de 162 sur 319 au sénat. Le 17 septembre, énième rebondissement, M. Renzi annoncera son départ du PD et la création d’un nouveau mouvement, tout en affirmant continuer de soutenir le gouvernement Conte II.

1.15.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

137L’Italie dispose de 76 sièges au Parlement européen, soit + 3 par rapport à 2014 (73), mais ceux-ci ne lui seront attribués qu’en cas de départ du Royaume-Uni de l’UE. Le taux de participation est de 54,5 % en 2019, soit un recul de – 2,7 % par rapport à 2014 (57,2 %). Rappelons que l’Italie est divisée en cinq circonscriptions, élisant chacune entre 8 et 20 députés européens.

138Le vainqueur incontesté et nouveau parti dominant de la scène politique italienne à l’issue du scrutin européen du 26 mai 2019 est la Lega – sous le nom de Lega Salvini Premier (LSP) –, qui remporte 34,3 % des suffrages (+ 28,1 %), passant ainsi de 5 à 28 sièges (+ 23). Tous pays confondus, la Lega devient, en nombre de sièges, le premier parti national représenté au Parlement européen ; elle est seulement dépassée par le Brexit Party qui en compte 29, mais cette situation ne sera que temporaire en cas de Brexit. En amont du scrutin, la Lega a initié un rapprochement des partis nationalistes au Parlement européen en lançant l’Alliance européenne des peuples et des nations (AEPN), une forme de coalition transnationale qui a abouti à la création du groupe parlementaire Identité et démocratie (ID), en remplacement du groupe de l’Europe des nations et des libertés (ENL).

139Ce scrutin se déroulant avant les rebondissements internes de l’été 2019, il annonce très largement ceux-ci. Par son résultat aux élections européennes, la Lega renverse en effet la tendance au sein de la coalition gouvernementale italienne, en obtenant deux fois plus de voix que le M5S, dont le résultat s’établit à 17,1 % et 14 sièges (– 4,1 % et – 3 sièges) – soit exactement la situation inverse de celle qui avait prévalu aux élections législatives de 2018. Le PD enregistre certes un impressionnant recul par rapport au scrutin européen précédent (– 18,1 % ; 22,7 %) – lors duquel il avait, il est vrai, remporté une victoire historique – et perd par là même 12 de ses 31 sièges (19), mais il se redresse par rapport au scrutin national de 2018. Le recul est peut-être encore plus net pour FI, qui enregistre tout simplement son plus mauvais résultat à un scrutin européen en ne recueillant que 8,8 % des suffrages (– 8,0 %) et ne parvient à conserver que moins de la moitié de ses sièges strasbourgeois (6 sur 13). De même, si l’on considère l’alliance formée autour de FI, qui comporte par ailleurs un ensemble de petites formations – l’UDC, la fédération Cantiere popolare (CP : Chantier populaire), le Partito Pensionati (PP : Parti des pensionnés), le NCI et le SVP –, celle-ci enregistre également le pire score de la coalition de centre-droit aux élections européennes depuis leur instauration. Notons que S. Berlusconi était lui-même tête de liste dans quatre des cinq circonscriptions italiennes, tandis que le président sortant du Parlement européen, Antonio Tajani, l’était dans la dernière. En 2014, le FDI – alors en coalition avec l’Alleanza Nazionale (AN : Alliance national e) – n’avait pas réussi à décrocher de siège d’eurodéputé, échouant de peu à franchir le seuil électoral de 4 % (3,7 %) ; en 2019, allié cette fois au Centrodestra Nazionale (CN : Centre droit national), il décroche 6,4 % (+ 2,7 %) et 5 sièges. Enfin, le SVP parvient à maintenir son unique siège en se présentant également au sein de la coalition de centre-droit et en décrochant 0,5 % des suffrages. Herbert Dorfmann effectuera ainsi un troisième mandat, bien que le parti n’obtienne au total qu’un peu plus de 142 000 voix.

140Parmi les partis représentés sous la législature précédente, la gauche de la gauche perd toute représentation au Parlement européen. La coalition La Sinistra (La gauche), qui a pris la succession de l’AECT et qui est composée principalement de la Sinistra Italiana - Sinistra Ecologia Libertà (SI : Gauche italienne – Gauche écologie liberté) et du Partito della Rifondazione Comunista (PRC : Parti de la refondation communiste), ne récolte que 1,8 % des suffrages.

141Le NCD, qui s’est dissous dans l’Alternativa Popolare (AP : Alternative populaire) se présentant en 2019 sur des listes Il Popolo della Famiglia - AlternativaPopolare (PDF-AP : Le peuple de la famille - Alternative populaire), échoue à obtenir un siège, de même que les PPI.

142En cas de Brexit, les trois formations qui bénéficieront d’un siège supplémentaire sont la Lega, FI et FDI–CN.

Tableau 16. Élection du Parlement européen. Résultats en Italie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 16. Élection du Parlement européen. Résultats en Italie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 16. Élection du Parlement européen. Résultats en Italie (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Lega Nord (LN).
** En 2014, coalition électorale Fratelli d’Italia – Alleanza Nazionale (FDI–AN).
*** En 2014, coalition électorale Altra Europa con Tsipras (AECT).

1.16. Lettonie

1.16.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

143La Lettonie s’est longtemps caractérisée par un système politique et partisan pour le moins instable, ayant compté pas moins de quinze gouvernements successifs au cours de ces vingt dernières années. Depuis 2014, cette valse des gouvernements ne s’est guère ralentie, avec trois Premiers ministres différents en cinq ans. La période qui nous intéresse s’ouvre sur la nomination de la première femme à occuper ce poste, Laimdota Straujuma, le 22 janvier 2014. Cette nomination fait suite à la démission de Valdis Dombrovskis, qui a assumé ainsi la responsabilité politique de l’effondrement d’un supermarché dans la capitale lettone, Rīga, qui a fait 54 morts en novembre de l’année précédente.

144Aux élections européennes de mai 2014, le parti de centre-droit Vienotība (V : Unité), formé en 2010 sur la base d’une alliance électorale, s’adjuge 46,2 % des voix et 4 sièges. Son partenaire de coalition nationaliste, la Nacionālā Apvienība (NA : Alliance nationale) – créée en 2010 par la réunion de deux formations : le Partija « Visu Latvijai! » (VL : Parti « Tout pour la Lettonie ! ») et Tēvzemei un Brīvībai / LNNK (TB/LNNK : Pour la patrie et la liberté / LNNK) – s’octroie 14,3 % des suffrages et 1 siège. Tous deux réussissent le pari de contrer le Sociāldemokrātiskā Partija « Saskaņa » (SDPS : Parti social-démocrate « Harmonie »), lequel n’obtient que 13,0 % (en recul de – 6,6 % par rapport au scrutin européen de 2009) et 1 siège (– 1). La coalition agrarienne de centre-droit Zaļo un Zemnieku Savienība (ZZS : Union des verts et des paysans) s’adjuge 8,3 % (+ 4,6 %) et 1 siège (+ 1). Et enfin, la Latvijas Krievu Savienībā (LKS : Union russe de Lettonie), nouveau nom du parti centré essentiellement sur la défense des intérêts de la minorité russophone Par Cilvēka Tiesībām Vienotā Latvijā (PCTVL : Pour les droits de l’homme dans une Lettonie unie), recueille 6,4 % (– 3,3 %) et décroche le dernier siège (statu quo).

145Moins de six mois après le scrutin européen, ont lieu des élections législatives dont l’issue est assez radicalement différente. C’est le SDPS qui remporte le scrutin (avec 23,0 % des voix, mais en recul de – 5,4 % par rapport au scrutin législatif précédent, datant du 17 septembre 2011). V, qui s’allie au Reformu Partija(PR : Parti réformateur) avant de l’absorber définitivement, obtient 21,9 % des voix (+ 3,0 %). Ses partenaires gouvernementaux, la ZZS et la NA, enregistrent respectivement 19,5 % et 16,6 % (en progrès de + 7,3 % et de + 2,7 %). Ainsi, loin d’être désavoués dans les urnes, les trois partis de la coalition sortante disposent désormais de 61 sièges sur les 100 que compte la Saeima, le Parlement monocaméral letton. L. Straujuma est reconduite dans ses fonctions de Première ministre, soutenue par la même majorité. Elle démissionne néanmoins en décembre 2015, sur fond de critiques sur l’action de son gouvernement (problème de mise en place du budget, hausse des impôts, grève dans l’enseignement). Il revient alors à Raimonds Vējonis (ZZS), président de la République récemment élu par la Saeima et premier président d’un État membre de l’UE issu d’un parti écologiste, de lui trouver un successeur. C’est Māris Kučinskis, également issu des rangs de la ZZS (ou, plus précisément, d’un petit parti local en son sein), qu’il désigne pour terminer la législature.

146À l’occasion des élections législatives du 6 octobre 2018, le SDPS, bien qu’en léger recul (– 3,1 %), arrive une nouvelle fois en tête avec 19,9 % des voix. Le nouveau parti populiste Kam Pieder Valsts? (KPV LV : Qui possède l’État ?), fondé en 2016, se hissent à la deuxième position avec 14,3 %, devant le Jaunā Konservatīvā Partij (JKP : Nouveau parti conservateur), également populiste, qui arrive en troisième place avec 13,7 %. La coalition libérale et pro-européenne Attīstībai / Par! (AP! : Développement / Pour !), elle aussi fraîchement formée  [29], s’arroge la quatrième place avec 12,1 % des voix. Ces trois nouvelles formations politiques et le SDPS dament donc le pion aux partis de la coalition sortante, qui sont tous trois en très net recul : la NA ne récolte que 11,1 % des suffrages (– 5,5 %), la ZZS du Premier ministre sortant voit son score s’établir à 10,0 % (– 9,6 %) et, surtout, V n’est plus qu’à 6,7 % (enregistrant ainsi une perte sèche de plus de – 15 % par rapport au scrutin de 2014). À l’issue du scrutin, le Parlement apparaît donc extrêmement fragmenté. Il faut trois mois pour mettre en place un gouvernement. Alors que le JKP puis le KPV LV échouent tour à tour à former une majorité, le président de la République confie cette mission à Arturs Krišjānis Kariņš (V), alors député européen. Ce dernier prend finalement la direction en janvier 2019 d’une large coalition gouvernementale regroupant V , JKP, KPV LV, NA et AP!.

1.16.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

147En 2019, la Lettonie envoie 8 députés au Parlement européen, soit le même nombre qu’en 2014. Le taux de participation est de 33,5 %, soit un progrès de + 3,2 % par rapport à 2014 (30,2 %), qui continue toutefois à placer cet État balte parmi les mauvais élèves de l’UE en termes de participation.

148Le parti V s’arroge 26,2 % des voix, ce qui constitue un quasi-effondrement si l’on s’en réfère au scrutin européen précédent (– 20,0 % et la moitié de ces 4 sièges), mais pourtant un certain rebond par rapport au scrutin législatif national de 2018. À l’inverse, si le SDPS progresse à 17,5 % (+ 4,5 %) et gagne 1 siège supplémentaire (soit 2 au total), il reste en deçà de son score national. La NA, bien que parti de gouvernement, se redresse quelque peu à 16,4 % (soit + 2,1 % par rapport au scrutin européen de 2014 et même 6,4 % de plus qu’au scrutin national de 2018). La coalition AP! – qui comprend entre autres le parti LA, lequel n’avait obtenu que 2,1 % des voix en 2014 – obtient un score de 12,4 % et fait son entrée au Parlement européen avec un siège. Le LKS voit son score rester stable à 6,2 % (– 0,2 %) et conserve ainsi le dernier strapontin letton. Enfin, la ZZS, le parti du président de la République alors en toute fin de mandat, perd – 3,0 % (à 5,3 %) et son unique siège d’eurodéputé.

Tableau 17. Élection du Parlement européen. Résultats en Lettonie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 17. Élection du Parlement européen. Résultats en Lettonie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 17. Élection du Parlement européen. Résultats en Lettonie (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Latvijas Attīstībai (LA) ; en 2019, coalition électorale réunissant PAR, LA et Izaugsme.

1.17. Lituanie

1.17.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

149Depuis les élections législatives des 14 et 28 octobre 2012, la Lituanie est dirigée par un gouvernement constitué d’une alliance entre le Lietuvos Socialdemokratų Partija (LSDP : Parti social-démocrate lituanien), le social-libéral Darbo Partija (DP : Parti du travail), le nationaliste et conservateur Tvarka ir Teisingumas (TT : Ordre et justice) et le parti de défense des intérêts de la minorité polonaise Lietuvos Lenkų Rinkimų Akcija (LLRA : Action électorale polonaise de Lituanie). Ce gouvernement a Algirdas Butkevičius (LSDP) à sa tête.

150La particularité du scrutin européen de mai 2014 dans la plus grande et la plus peuplée des trois républiques baltes tient au fait qu’il est organisé le même jour que le second tour du scrutin présidentiel. Ce dernier est remporté par Dalia Grybauskaitė  ; l’ancienne commissaire européenne d’obédience de centre-droit et première femme présidente est ainsi reconduite à ce poste.

151Le parti Tėvynės Sąjunga - Lietuvos Krikščionys Demokratai (TS-LKD : Union patriotique - Chrétiens-démocrates lituaniens) est tout à la fois le perdant du scrutin européen de 2014, qui le voit chuter à 17,4 % et 2 sièges (soit – 9,5 % et – 2 sièges par rapport aux élections européennes de juin 2009) et son principal vainqueur, en se maintenant malgré tout à la place de premier parti. Les plus fortes progressions sont celles du Lietuvos Respublikos Liberalų Sąjūdis (LRLS : Mouvement libéral de la République de Lituanie), qui obtient 16,6 % des voix (+ 9,2 %) et 2 sièges (+ 1), et de la Lietuvos Valstiečių ir Žaliųjų Sąjunga (LVŽS : Union des paysans et des verts de Lituanie), nouvelle venue dans l’hémicycle européen avec 6,6 % (+ 0,2 %) et 1 siège. Les partis de la coalition au pouvoir ne sont pas pour autant sanctionnés. Le LSDP se tasse à 17,3 % et 2 sièges (– 1,3 % et – 1 siège), de même que la LLRA (8,0 % et 1 siège, soit – 0,4 % et statu quo en termes de sièges). Le TT, avec 14,3 % et 2 sièges (soit + 2,1 % et statu quo), et le DP, qui recueille 12,8 % et 1 siège (soit + 4,0 % et statu quo), sont même en légère progression par rapport au scrutin européen précédent.

152Les 9 et 23 octobre 2016, c’est la LVŽS qui remporte les élections législatives avec 22,5 % des voix (+ 18,6 % par rapport aux élections législatives d’octobre 2012). Les verts décrochent ainsi 35 des 71 députés élus au scrutin majoritaire à deux tours, et 19 des 70 députés élus à la proportionnelle, soit 54 au total. Si la TS-LKD fait légèrement mieux en voix (22,6 %, avec également une bonne progression de + 7,6 %), il profite moins du système mixte et ne récolte que 31 sièges. Cette fois-ci, les partenaires du gouvernement sortant perdent tous des plumes : le LSDP est à 15,0 % (– 3,3 %), la LLRA à 5,7 % (– 0,1 %) et le TT à 5,6 % (– 1,8 %), mais c’est surtout le DP qui s’effondre à 4,9 % (– 14,9 %) et ne parvient à sauver que 2 sièges. Au total, la majorité sortante perd 52 des 87 sièges qu’elle détenait précédemment.

153La présidente de la République charge alors immédiatement la LVŽS de former un gouvernement. Ce parti met en place une coalition avec le LSDP, pourtant grand perdant du scrutin. Ils disposent ensemble de la plus petite majorité possible : 71 sièges sur 141 à la Seimas, le Parlement monocaméral lituanien. Ils placent à la tête du gouvernement Saulius Skvernelis, un indépendant proche de la LVŽS et ancien ministre de l’Intérieur.

154En 2019, le choix est à nouveau fait de coupler l’élection européenne au second tour du scrutin présidentiel. Le nombre de mandats présidentiels étant limité à deux, la présidente sortante, D. Grybauskaitė, ne se représente pas. C’est le candidat indépendant de centre-droit Gitanas Nausėda qui remporte le scrutin avec 66,5 % des voix, devançant Ingrida Šimonytė (TS-LKD).

1.17.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

155La Lituanie dispose de 11 sièges au Parlement européen, soit le même nombre qu’en 2014. Le taux de participation est de 53,5 % en 2019, soit une hausse de + 6,1 % par rapport à 2014 (47,4 %).

156Lors du scrutin de mai 2019, comme cela a déjà été le cas en 2014, pas moins de sept formations politiques se partagent les 11 sièges, attestant du niveau élevé de fragmentation du système partisan lituanien. La TS-LKD arrive à nouveau en tête du scrutin européen avec 19,7 % des voix (+ 2,3 %) et 3 sièges (+ 1). Bien que cela la tienne éloignée de ses scores historiques (26,9 % en 2009), cela lui permet néanmoins de maintenir son principal concurrent social-démocrate à distance. Le LSDP ne fait ainsi guère mieux qu’au scrutin législatif précédent avec 15,9 % (et 2 sièges). Rapporté aux résultats des élections européennes de 2014, cela représente une faible perte de – 1,4 %, sans que sa représentation en sièges n’en soit affectée. Mais c’est bien sûr le score de la LVŽS qui est le plus scruté, en tant que ce parti est au pouvoir au niveau national depuis deux ans et demi. Alors qu’il avait obtenu 22,5 % et s’était hissé premier parti aux élections législatives de 2016, il n’est que troisième avec 12,6 % au scrutin européen. Pourtant, si l’on s’en tient à l’analyse des scrutins européens, les verts sont bien en nette progression (+ 6,0 % et + 1 siège par rapport à 2014).

157Les 4 sièges restants se répartissent à parts égales entre quatre formations politiques. Avec 9,0 %, le DP – qui avait écrasé le premier scrutin européen organisé dans le pays en 2004 avec plus de 30 % des voix – revient à son niveau de 2009 (– 3,8 % par rapport à 2014). Le LRLS, dont l’image a été considérablement ternie par une affaire de corruption en 2016, voit son score s’établir à 6,6 % en perdant plus de la moitié de ses électeurs (– 10,0 %) et la moitié de ses sièges (de 2 à 1). Une seule candidate indépendante, Aušra Maldeikienė, réussit à se faire élire. Afin de pouvoir se présenter à l’élection, elle a dû mettre sur pied un comité électoral (Visuomeninis Rinkimų Komitetas « Aušros Maldeikienės traukinys » : VKM-ART, « Train d’Aušra Maldeikienė ») composé d’un certain nombre d’électeurs et a ainsi réussi à rassembler assez de signatures électroniques. Même si elle ne disposait que d’un budget de campagne très limité, sa liste parvient à récolter 6,5 % des voix. Enfin, la LLRA, bien qu’en baisse (– 2,6 %) parvient à sauver son siège ; elle se présentait cette fois en coalition avec la Krikščioniškų Ŝeimų Sąjunga (KŜS : Union des chrétiens). Tout cela se fait aux dépens du TT, qui est évincé du Parlement européen, en subissant le plus gros revers parmi les différents partis en lice (– 11,5 %, soit 2,7 %) et en perdant d’un seul coup ses 2 sièges.

Tableau 18. Élection du Parlement européen. Résultats en Lituanie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 18. Élection du Parlement européen. Résultats en Lituanie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 18. Élection du Parlement européen. Résultats en Lituanie (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Lietuvos Lenkų Rinkimų Akcija (LLRA).

1.18. Luxembourg

1.18.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

158À la suite des élections anticipées du 20 octobre 2013, le libéral Xavier Bettel est Premier ministre du Luxembourg, à la tête d’une coalition alliant son Parti démocrate / Demokratesch Partei (PD/DP) au Parti ouvrier socialiste luxembourgeois / Lëtzebuerger Sozialistesch Aarbechterpartei (POSL/LSAP) et à LesVerts / Déi Gréng (G). Pour la première fois depuis 1974, le Parti populaire chrétien-social / Chrëschtlech-Sozial Vollekspartei (PCS/CSV) est donc absent du gouvernement, une situation faisant suite à la chute du gouvernement Juncker-Asselborn II. En effet, le Premier ministre Jean-Claude Juncker (qui a occupé cette fonction presque 19 ans) a été contraint à la démission en raison d’un scandale impliquant les services de renseignement luxembourgeois.

159Pour la première fois depuis leur instauration en 1979, les élections européennes de 2014 sont découplées des élections législatives au Luxembourg (le dernier scrutin national ayant eu lieu de façon anticipée). Le scrutin européen de mai 2014 voit le PCS/CSV non seulement confirmer sa place de premier parti (37,7 %) mais également se renforcer encore (+ 6,4 % par rapport aux élections européennes de juin 2009). Dans le même temps, les trois autres principales formations, lesquelles se partagent le pouvoir au niveau national, reculent : le PD/DP passe de 18,7 % à 14,8 % (– 3,9 %), le POSL/LSAP de 19,4 % à 11,8 % (– 7,6 %) et G de 16,8 % à 15,0 % (– 1,8 %). La répartition des sièges reste toutefois inchangée : 3 pour le PCS/CSP, et 1 chacun pour le PD/DP, le POSL/LASP et G.

160À la suite de ces élections européennes et de la victoire du Parti populaire européen (PPE) au sein de la nouvelle assemblée, parti dont il a été désigné Spitzenkandidat, l’ancien Premier ministre J.-C. Juncker devient président de la Commission européenne. Désigné par le Conseil européen, il est élu par le Parlement européen le 15 juillet 2014, conformément à la nouvelle procédure mise en place par le Traité de Lisbonne.

161L’immédiat après-Juncker au niveau national est surtout marqué par le scandale financier des « LuxLeaks », qui révèle la conclusion par l’administration fiscale du pays d’accords fiscaux très avantageux avec des cabinets comptables mandatés par de grandes entreprises multinationales. Bien qu’alors légaux, les « rescrits fiscaux » constituent une forme de dumping fiscal et sont largement dénoncés comme mettant à mal la justice fiscale. J.-C. Juncker reconnaîtra en être politiquement responsable.

162Au soir des élections législatives du 14 octobre 2018, la coalition sortante reste majoritaire de justesse. Car c’est bien le PCS/CSV qui l’emporte avec 27,1 % des voix (– 6,6 %) et 21 sièges. Toutefois, les forces combinées du DP, deuxième avec 16,4 % (– 1,9 %) et 12 sièges, du POSL/LSAP, troisième avec 15,7 % (– 4,6 %) et 10 sièges, et de G, quatrième avec 14,1 % (+ 4,0 %) et 9 sièges, leur permettent de décrocher 31 des 60 sièges à la Chambre des députés, rendant ainsi possible le maintien de leur coalition. Pour le reste, deux coalitions électorales décrochent une représentation au Parlement monocaméral luxembourgeois. La formation de droite radicale, populiste et eurosceptique Parti réformiste d’alternative démocratique / Alternativ Demokratesch Reformpartei(ADR), allié au mouvement Wee2050 (Chemin vers 2050)  [30], obtient 4 sièges avec 8,0 % des voix, soit un progrès de + 1,4 % par rapport au score de l’ADR au scrutin législatif de 2013. Par ailleurs, le Parti pour la démocratie intégrale / Partei fir Integral Demokratie (PID) s’est présenté sur les listes du Parti pirate luxembourgeois / Piratepartei Lëtzebuerg (PPL) ; cette coalition recueille 6,2 % et décroche 2 sièges. Enfin, La Gauche / Déi Lénk (DL) obtient 4,7 % (– 0,2 %) des voix et conserve ses 2 sièges.

163Au lendemain des élections, X. Bettel forme un nouveau gouvernement qui comprend les mêmes partis que précédemment : DP, LSAP, G (gouvernement Bettel-Schneider-Braz).

1.18.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

164Le Luxembourg envoie 6 représentants au Parlement européen, un nombre inchangé depuis 1979. Le taux de participation est de 84,2 % en 2019, soit en léger recul de – 1,4 % par rapport à 2014 (85,6 %). Rappelons que le vote est obligatoire dans ce pays.

165Les élections européennes de mai 2019 au Luxembourg sont un véritable coup de théâtre : c’est tout simplement la première fois que le PCS/CSV ne remporte pas une élection disputée au niveau national au Luxembourg, le parti chrétien-démocrate (le PCS/CSV et son prédécesseur le Rietspartei) étant arrivé en tête – en sièges et, le plus souvent, en voix  [31] – de tous les scrutins, législatifs et européens, disputés dans le Grand-Duché depuis 1919. Par rapport aux élections européennes de 2014 et aux élections législatives de 2018, qui constituaient déjà un certain revers, le scrutin européen de 2019 est de fait nettement moins favorable au PCS/CSV. Avec 21,1 % des suffrages, il subit une lourde perte (– 16,6 %) et se voit logiquement privé de l’un de ses 3 sièges. Celui-ci est récupéré par le PD/DP, qui s’adjuge la première place (21,4 % ; + 6,6 %) et qui semble quant à lui mieux profiter du découplage des élections européennes du scrutin législatif, ce dernier lui ayant été quelque peu moins favorable. Il est désormais à 2 sièges également (+ 1). G progresse moins bien que les libéraux et se classe troisième, à 18,9 % (+ 3,9 %) et 1 siège (statu quo). L’autre grand enseignement du scrutin est la relégation à la quatrième place du POSL/LSAP (12,2 %, soit + 0,4 % ; 1 siège, soit statu quo). Ces résultats donnent donc à voir un effet particulièrement défavorable du découplage des scrutins pour les deux grands partis historiquement majeurs.

Tableau 19. Élection du Parlement européen. Résultats au Luxembourg (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 19. Élection du Parlement européen. Résultats au Luxembourg (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 19. Élection du Parlement européen. Résultats au Luxembourg (en % et en sièges, 2014-2019)

1.19. Malte

1.19.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

166Depuis l’après-guerre, la vie politique maltaise se caractérise par un bipartisme particulièrement résilient, avec une alternance au pouvoir entre le Partit Nazzjonalista (PN : Parti nationaliste) positionné au centre-droit et le Partit Laburista (PL : Parti travailliste) positionné au centre-gauche. Ce dernier remporte les élections législatives anticipées du 9 mars 2013, et c’est Joseph Muscat qui devient alors Premier ministre du petit pays insulaire. Quelques semaines avant le scrutin européen de 2014, la ministre des Affaires sociales, Marie-Louise Coleiro Preca (PL), est élue présidente de la République.

167Aux élections européennes de mai 2014, Malte bénéficie d’un siège d’eurodéputé supplémentaire par rapport à 2009. Les scores des deux formations qui dominent l’échiquier politique maltais restent relativement stables par rapport aux résultats enregistrés cinq ans plus tôt. Le PL garde ses 3 sièges en perdant 1,4 % des voix (de 54,8 % à 53,4 %), alors que le PN, bien qu’en léger recul lui aussi, de 40,5 % à 40,0 % (– 0,5 %), récolte également 3 sièges (+ 1). Ce parfait équilibre semble résumer à lui seul l’état des forces politiques du pays.

168Au cours de la période 2014-2019, Malte se trouve au cœur des problèmes liés à la gestion des flux migratoires vers l’UE. À cela s’ajoute le scandale politico-financier des « Panama Papers » qui touche particulièrement le pays, impliquant vraisemblablement des proches du Premier ministre. Dans leur sillage, a lieu l’assassinat, dans une explosion à la voiture piégée, de la journaliste Daphne Caruana Galizia, qui enquêtait sur le milieu politique maltais. Malgré tout, grâce à un bilan économique jugé globalement positif, le PL remporte les élections législatives du 3 juin 2017 avec 55,0 % des suffrages (37 sièges). Pour sa part, le PN recueille 43,7 % (30 sièges). Les résultats des deux principales formations politiques sont en fait remarquablement stables par rapport à l’élection législative précédente (+ 0,2 % et + 0,3 %, respectivement). Le PL perd néanmoins 2 sièges, du fait essentiellement de la spécificité du mode de scrutin maltais, lequel allie l’élection de 65 députés au vote unique transférable dans 13 circonscriptions comptant chacune 5 sièges à un correctif proportionnel qui permet de distribuer jusqu’à 4 sièges supplémentaires. À eux deux, PL et PN raflent, comme c’est le cas depuis 1962, l’ensemble des sièges du Parlement unicaméral, la Kamra tad-Deputati. Ainsi, pour la première fois depuis 40 ans, le PL réussit l’exploit de remporter deux élections législatives consécutives.

1.19.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

169Malte dispose de 6 sièges au Parlement européen, une représentation inchangée par rapport à 2014. Le taux de participation est de 72,7 % en 2019, soit un recul de – 2,1 % par rapport à 2014 (74,8 %). Il s’agit néanmoins du pays à vote non obligatoire qui présente le plus haut taux de participation. Malte est l’un des rares pays de l’UE (avec l’Autriche) à accorder le droit de vote dès 16 ans. Tout comme aux élections législatives, c’est le système du vote unique transférable qui est utilisé aux élections européennes à Malte.

170Lors des élections européennes de mai 2019, la victoire revient au PL déjà au pouvoir au niveau national : il s’adjuge 54,3 % des voix (+ 0,9 %) et 4 sièges (+ 1), contre 37,9 % (– 2,1 %) et 2 sièges (– 1) au PN. Cette situation rompt donc l’équilibre en sièges entre les deux formations qui avait prévalu lors de l’élection précédente : le déséquilibre se crée en faveur du PL. À cet égard, il convient de souligner que le PL a remporté en voix tous les scrutins européens ayant été disputés dans le pays depuis son adhésion à l’UE en 2004.

Tableau 20. Élection du Parlement européen. Résultats à Malte (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 20. Élection du Parlement européen. Résultats à Malte (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 20. Élection du Parlement européen. Résultats à Malte (en % et en sièges, 2014-2019)

1.20. Pays-Bas

1.20.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

171Entre novembre 2012 et février 2017, les Pays-Bas sont dirigés par le cabinet Rutte-Asscher , à la tête d’une coalition « violette » formée par le libéral-conservateur Volkspartij voor Vrijheid en Democratie (VVD : Parti populaire pour la liberté et la démocratie) et le social-démocrate Partij van de Arbeid (PvdA : Parti du travail).

172Lors des élections européennes de mai 2014, les deux partis libéraux sont en progrès : le VVD passe de 11,4 % à 12,2 % (+ 0,8 % par rapport au scrutin européen de 2009) et conserve ses 3 sièges, tandis que la formation progressiste Democraten 66 (D66 : Démocrates 66) gagne + 4,2 % des voix (de 11,3 % à 15,5 %) et progresse de 3 à 4 sièges (+ 1). Le parti de centre-droit Christen-Democratisch Appèl (CDA : Appel démocrate-chrétien) conserve ses 5 sièges mais perd – 4,9 % des voix (de 20,1 % à 15,2 %). Alors que de nombreux observateurs annonçaient une victoire de l’extrême droite xénophobe et eurosceptique incarnée par le Partij voor de Vrijheid (PVV : Parti pour la liberté) de Geert Wilders, ce parti ne réalise pas le résultat attendu. Au contraire, il recule nettement, de 17,0 % à 13,3 % des voix (– 3,7 %), tout en préservant ses 4 sièges. Le PvdA conserve ses 3 députés mais recule de 12,1 % à 9,4 % (– 2,7 %). À la gauche de la gauche, le Socialistische Partij (SP : Parti socialiste) progresse en pourcents (de 7,1 % à 9,6 %, soit + 2,5 %) mais stagne à 2 élus, alors que la formation écologiste GroenLinks (GL : Gauche verte) recule de – 1,9 % (de 8,9 % à 7,0 %) et perd un de ses élus (2 au lieu de 3). L’habituelle liste commune des partis orthodoxes protestants de la ChristenUnie (CU : Union chrétienne) et du Staatskundig Gereformeerde Partij (SGP : Parti politique réformé) s’adjuge 2 sièges, avec 7,7 % des suffrages. Avec 4,2 %, le parti animaliste Partij voor de Dieren (PvdD : Parti pour les animaux) fait son entrée au Parlement européen, avec 1 siège.

173En amont du scrutin législatif du 15 mars 2017, le statut de favori revient à nouveau au PVV. Bien que finalement devancé par le VVD (21,3 % et 33 sièges sur les 150 que compte la Tweede Kamer der Staten-Generaal), le parti de G. Wilders réalise effectivement une percée (13,1 %, soit + 3,0 % par rapport aux élections législatives du 12 septembre 2012 ; 20 sièges). S’il ne parvient pas à égaler son score historique de 2010 (15,5 %), il se place en deuxième position pour la première fois à un scrutin législatif national. Le VVD perd 5,3 % et 8 sièges (et voit donc son résultat s’établir à 21,3 % et 33 sièges). Il ne pourra par ailleurs plus compter sur son partenaire de coalition, le PvdA, qui dégringole à son plus bas niveau historique à 5,7 % des voix (– 19,1 %) et ne compte plus que 9 sièges (– 29). Le PvdA devient le septième parti, puisqu’il est devancé également par le CDA (12,4 % ; 19 sièges), D66 (12,2 % ; également 19 sièges), GL (9,1 % ; 14 sièges) et le SP (même score). La proportionnelle intégrale  [32] permet à une myriade de petits partis d’accéder à la chambre basse , parmi lesquels un nouveau venu sur la scène politique néerlandaise : le parti de droite radicale nationaliste et eurosceptique Forum voor Democratie (FvD : Forum pour la démocratie), qui obtient 1,8 % des voix et 2 sièges.

174Les négociations en vue de former une coalition, les premières sous le règne du roi Guillaume-Alexandre, durent plus de sept mois. Le cabinet Rutte III regroupe finalement les deux partis libéraux, VVD et D66, ainsi que le CDA et la CU. En mars 2019, les élections provinciales sont remportées par le FvD de Thierry Baudet ; elles ont pour conséquence la perte de la majorité au sénat pour la coalition quadripartite du fait de l’élection indirecte par les conseillers provinciaux de la chambre haute, l’Eerste Kamer der Staten-Generaal, laquelle élection se tiendra dans la foulée immédiate du scrutin européen (le 27 mai 2019).

1.20.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

175Les Pays-Bas disposent de 29 sièges au Parlement européen, soit + 3 par rapport à 2014 (26) ; ces sièges supplémentaires ne lui seront toutefois attribués qu’en cas de sortie définitive du Royaume-Uni de l’UE. Le taux de participation est de 41,9 % en 2019, soit un net progrès de + 4,6 % par rapport à 2014 (37,3 %).

176Les élections européennes de mai 2019 tout à la fois renversent largement la donne du scrutin législatif de 2017 et rebattent considérablement les cartes de la représentation néerlandaise au Parlement européen. C’est le PvdA qui remporte le scrutin, sous la houlette de Frans Timmermans, qui avait été désigné Spitzenkandidat du Parti socialiste européen (PSE), c’est-à-dire candidat à la présidence de la Commission européenne pour l’ensemble des partis sociaux-démocrates européens. Le PvdA voit son score s’établir à 19,6 % et décroche 6 sièges (+ 9,4 % par rapport au scrutin de 2014 et + 3 sièges). Ce résultat (dévoilé par des sondages à la sortie des urnes) a un certain retentissement au niveau européen, étant donné que les Pays-Bas sont, avec le Royaume-Uni, le premier pays de l’UE à se rendre aux urnes, le jeudi 23 mai. Le VVD se hisse à la deuxième place, en léger progrès, à 14,6 % (+ 2,6 %). Il décroche 4 sièges (+ 1), mais son total s’établira à 5 (+ 2) en cas de départ des députés britanniques. Les autres partenaires de la coalition sont en recul : le CDA passe de 15,2 % à 12,2 % (– 3,0 %) et perd 1 siège (il lui en reste 4) et, surtout, D66 perd plus de la moitié de son électorat (en passant de 15,5 à 7,1 %, soit – 8,4 %) et 2 de ses 4 sièges. La CU, autre partenaire du gouvernement, semble certes mieux se maintenir, mais l’analyse est compliquée du fait de son alliance historique avec le SGP pour les scrutins européens  [33]. Ensemble, CU et SGP récoltent 6,8 % (– 0,9 %) et conservent leurs 2 sièges.

177Mais la sensation de ce scrutin vient surtout du FvD. Après avoir remporté les élections provinciales de mars, ce parti s’adjuge 3 sièges pour sa première participation aux élections européennes (11,0 %) et même 4 en cas de Brexit. Son score semble devoir être mis en miroir avec celui du PVV, qui s’effondre en passant de 13,3 % à 3,5 % (– 11,8 %) et perd l’ensemble de ses 4 sièges : il ne reviendra au Parlement européen, avec 1 siège, qu’à la condition que le Royaume-Uni sorte effectivement de l’UE.

178Pour le reste, GL continue sa progression avec 10,9 % (+ 3,9 %) et 3 sièges (+ 1), confirmant ainsi les percées réalisées lors du scrutin législatif de 2017 et aux élections provinciales de 2019. Seuls deux partis obtiennent directement un seul siège : le PvdD, dont le score est stable (4,0 %, contre 4,2 % en 2014) et qui conserve ainsi son strapontin, et la liste 50PLUS (50+), défendant les intérêts des seniors, qui fait son entrée à l’assemblée européenne à la faveur d’un rebond électoral pourtant minime (+ 0,2 % ; 3,9 %), et ce du fait du seuil électoral « naturel » s’établissant à 3,8 % (1/26e). En parallèle, les 3,4 % (– 6,2 %) du SP ne lui permettent pas de se maintenir dans le jeu politique au niveau européen et il perd du même coup ses 2 sièges.

Tableau 21. Élection du Parlement européen. Résultats aux Pays-Bas (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 21. Élection du Parlement européen. Résultats aux Pays-Bas (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 21. Élection du Parlement européen. Résultats aux Pays-Bas (en % et en sièges, 2014-2019)

1.21. Pologne

1.21.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

179Les élections européennes de mai 2014 placent les deux principales formations politiques polonaises au coude-à-coude. En effet, le parti libéral-conservateur Platforma Obywatelska (PO : Plate-forme civique), au pouvoir depuis 2007, recule très nettement, avec 32,1 % (– 12,2 % par rapport aux élections européennes de 2009) et 19 sièges (– 6), alors que le parti ultra-conservateur et souverainiste Prawo i Sprawiedliwość (PiS : Droit et justice) progresse, avec 31,8 % (+ 4,4 %) et 19 sièges (+ 4). En troisième position, arrive la Sojusz Lewicy Demokratycznej (SLD : Alliance de la gauche démocratique) : elle décroche 9,4 % et 5 sièges, soit – 2,9 % et – 2 sièges par rapport à la coalition que ce parti formait cinq ans plus tôt avec l’Unia Pracy (UP : Union du travail). Le parti eurosceptique de droite radicale Kongres Nowej Prawicy - Janusza Korwin-Mikke (KNP : Congrès de la nouvelle droite - Janusz Korwin-Mikke) obtient 7,2 % et 4 sièges, tandis que le partenaire de coalition de la PO, la formation agrarienne Polskie Stronnictwo Ludowe (PSL : Parti paysan polonais) récolte 6,8 % et 4 sièges (soit + 0,2 % et + 1 siège).

180Analysé a posteriori, le scrutin européen de 2014 marque un tournant dans l’histoire politique récente du pays. À sa suite, se dessine une transformation majeure de la vie politique polonaise. Dès août 2014, le Premier ministre Donald Tusk (PO) est nommé par ses pairs à la tête du Conseil européen (institution qui réunit les chefs d’État ou de gouvernement des États membres de l’UE et qui élit un président depuis 2009). Il est remplacé à la tête du gouvernement polonais par la présidente de la Diète (chambre b asse du Parlement polonais), Ewa Kopacz . Bien qu’elle soit relativement populaire, le vent tourne alors rapidement pour la formation de centre-droit, étiquetée libérale sur l’échiquier politique polonais. En mai 2015, alors que la réélection du président sortant Bronisław Komorowski (PO) ne faisait guère de doute quelques semaines avant le scrutin, l’élection présidentielle tourne à l’avantage du candidat du PiS, Andrzej Duda, député européen largement inconnu du grand public.

181Moins de six mois plus tard, les élections législatives du 25 octobre 2015 confirment le retour en force du PiS, qui remporte 37,6 % des suffrages (soit un progrès de + 7,7 % par rapport aux élections législatives du 9 octobre 2011) et une majorité des sièges à la Diète (235 sur 460), en arrivant en tête dans 33 des 41 circonscriptions. Son score est encore plus impressionnant au sénat, où il totalise 40,0 % des voix et obtient 61 sièges sur 100 par la voie du scrutin uninominal majoritaire à un tour qui y prévaut dans 100 circonscriptions. La PO est largement distancée, ne totalisant plus que 24,1 % des voix (– 15,1 %) et 138 sièges à la Diète. Si l’ampleur de la chute y est moins importante pour le SLD en voix (de 8,2 % à 7,6 %), il perd tout bonnement toute représentation. Malgré un résultat moindre à l’échelle nationale (5,1 % ; – 3,3 %), le PSL profite mieux du système électoral et conserve 16 députés. Deux nouvelles formations s’installent dans le paysage politique : Kukiz’15 – mouvement fondé par le chanteur pop rock Paweł Kukiz – (avec 8,8 % et 42 sièges) et la formation libérale .Nowoczesna (N : .Moderne) – créée par un économiste ancien membre de la PO – (avec 7,6 % et 28 sièges).

182Pour la première fois depuis la fin de l’ère communiste, un parti dispose de la majorité absolue et peut donc gouverner seul [34] Beata Szydło prend la présidence du Conseil des ministres, lequel associe néanmoins au PiS les deux petites formations auxquelles il s’était allié aux élections : Solidarna Polska (SP : Pologne solidaire) et Polska Razem (PR : La Pologne ensemble), en leur confiant à chacune un portefeuille ministériel. Le retour du PiS aux affaires se traduit par une série de controverses sur les questions politiques et sociales, au premier chef desquelles, en 2016, un encadrement de la justice par une réforme accusée de remettre en cause l’indépendance de l’institution judiciaire. Après plusieurs recommandations, la Commission européenne enclenche, en décembre 2017 et pour la première fois, le mécanisme communautaire (prévu par l’article 7 du TUE) pour « violation grave » des valeurs fondamentales. Cette procédure donne lieu à des auditions du gouvernement polonais devant le Conseil des ministres de l’UE (l’institution qui représente les gouvernements des États membres). Dans le viseur, se trouve notamment une loi abaissant l’âge de la retraite des juges de la Cour suprême et des procureurs (à 60 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes), laquelle sera finalement jugée contraire au droit européen par la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) siégeant à Luxembourg. Dans le même temps, se dessine une augmentation des pouvoirs de l’exécutif, un contrôle accru des médias – avec la nomination et la révocation des responsables des médias publics directement par le ministre du Trésor – et un durcissement de la loi anti-avortement [35]. Sur le plan social, le gouvernement octroie une série de prestations et d’aides directes particulièrement généreuses, notamment des allocations familiales (le programme 500+, qui alloue 500 zlotys pas mois à partir du second enfant, voire du premier dans le cas des familles les plus pauvres) parfois décriées comme une politique nataliste et décourageant de surcroît les femmes à travailler.

183En décembre 2017, B. Szydło remet sa démission, affaiblie par une motion de défiance envers le gouvernement à la Diète, laquelle motion avait pourtant été rejetée. La direction du PiS recommande Mateusz Morawiecki pour la formation d’un nouveau gouvernement.

184Les élections législatives suivantes auront lieu le 13 octobre 2019 et verront, une nouvelle fois, la victoire du PiS (45,2 %) qui, emmené par Jarosław Kaczynski, s’assurera à nouveau une majorité absolue à la Diète (en conservant la totalité des 235 sièges qu’il détenait auparavant), mais la perdra au sénat (où il disposera tout de même de 48 sièges sur 100). Ce scrutin entérinera la division de la société polonaise, déjà donnée à voir lors du scrutin européen de mai. La victoire du PiS semblera due à la stratégie ultra-conservatrice du parti d’attaque systématique des valeurs et élites libérales avec le soutien à peine masqué de l’Église catholique et, surtout, à son programme socio-économique (promesses de nouvelles allocations familiales, baisse des impôts, hausse des salaires les plus bas).

1.21.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

185Si le Brexit se produit, la Pologne disposera de 52 sièges au Parlement européen, soit + 1 par rapport à 2014 (51). Le taux de participation est de 45,7 % en 2019, soit une hausse spectaculaire de + 21,9 % par rapport à 2014 (23,8 %). Il s’agit tout simplement de la plus forte progression de la participation parmi les 28 États membres entre ces deux scrutins. Pour les élections euroépennes, la Pologne est divisée en 13 circonscriptions, mais les sièges sont attribués au niveau national aux listes ayant obtenu plus de 5,0 % des suffrages. Seules six commissions électorales (c’est-à-dire six coalitions) ont présenté des listes dans l’ensemble des circonscriptions en 2019, soit le plus petit nombre jamais atteint pour un scrutin européen dans le pays.

186Alors que les élections européennes de 2014 avaient placé le PO et le PiS sur un pied d’égalité, le scrutin de mai 2019 confirme le fossé qui s’est creusé depuis lors entre les deux formations. Avec 45,4 % et 26 sièges, le PiS est le grand vainqueur ; il progresse non seulement nettement par rapport au scrutin européen précédent (+ 13,6 % et + 7 sièges), mais également, fait assez rare pour être relevé, par rapport aux dernières législatives organisées dans le pays (en 2015), s’ouvrant ainsi largement la voie des élections législatives à venir en octobre. La PO, qui a noué une alliance avec d’autres forces pro-européennes au sein de la Koalicja Europejska (KE : Coalition européenne) – qui comprend, outre la PO, N., le SLD, le PSL et le Partia Zieloni (PZ : Parti vert  [36]) –, sauve certes les meubles, mais le score de la coalition (38,5 % et 22 sièges) reste en dessous de celui obtenu par l’addition de ces différentes forces en 2014.

187Symbole de la ligne de fracture entre anti- et pro-européens, une seule autre formation, Wiosna (Printemps), réussit à décrocher des sièges (au nombre de 3, avec 6,1 % des voix). Le parti de droite eurosceptique Koalicja Odnowy Rzeczypospolitej Wolność i Nadzieja (KORWiN : Coalition pour la restauration de la liberté et de l’espoir de la République), mis sur pied par Janusz Korwin-Mikke à la suite de son exclusion du KNP, échoue à franchir le seuil électoral. Cet ancien député européen s’était fait connaître au cours de la législature écoulée pour avoir qualifié les migrants d’« ordures humaines », exécuté un salut nazi ou encore argumenté que les femmes sont moins payées que les hommes car elles sont « plus petites, plus faibles et moins intelligentes ». Son revers électoral démontre, si besoin en était encore, le monopole désormais exercé par le PiS à la droite de la droite. Quant au KNP seul, il ne récolte cette fois que 0,1 %.

Tableau 22. Élection du Parlement européen. Résultats en Pologne (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 22. Élection du Parlement européen. Résultats en Pologne (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 22. Élection du Parlement européen. Résultats en Pologne (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Kongres Nowej Prawicy - Janusza Korwin-Mikke (KNP).
** En 2014, membre du KNP.

1.22. Portugal

1.22.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

188Au pouvoir ensemble depuis les élections législatives du 5 juin 2011, le libéral Partido Social Democrata (PSD : Parti social-démocrate) et le conservateur Partido do Centro Democrático e Social - Partido Popular (CDS-PP : Parti du centre démocratique et social - Parti populaire) présentent une liste commune aux élections européennes de mai 2014, laquelle s’adjuge 30,0 % des voix et 7 sièges. C’est un net recul pour les deux formations de centre-droit par rapport à leur total cumulé aux élections européennes de 2009 (à savoir 34,0 % et 8 sièges pour le PSD, et 9,0 % et 2 sièges pour le CDS-PP). De son côté, le Partido Socialista (PS : Parti socialiste), alors principal parti d’opposition, progresse nettement, passant de 28,4 % à 34,0 % (soit + 5,6 %) et gagnant 1 siège (8 au lieu de 7). À l’extrême gauche, le Bloco de Esquerda (BE : Bloc de gauche) chute lourdement, de 11,5 % à 4,9 % (soit – 6,6 %), et ne conserve qu’un seul de ses 3 sièges. Pour sa part, la Coligação Democrática Unitária (CDU : Coalition démocratique unitaire) – qui regroupe notamment le Partido Comunista Português (PCP : Parti communiste portugais) et le Partido Ecologista « Os Verdes » (PEV : Parti écologiste « Les Verts ») – progresse sensiblement, de 11,4 % à 13,7 % (+ 2,3 %), et s’adjuge 1 strapontin supplémentaire (3 au lieu de 2). Le parti écologiste de centre-droit Partido da Terra (MPT : Parti de la terre) fait par ailleurs son entrée au Parlement européen à l’occasion de ce scrutin, avec 7,1 % des voix et 2 sièges.

189Les élections législatives suivantes ont lieu le 4 octobre 2015. Le gouvernement sortant de centre-droit présente le bilan de sa politique de rigueur (privatisations, diminution des salaires, hausse des impôts et des cotisations sociales, baisse drastique du nombre de fonctionnaires), celle-ci étant en fait en grande partie le prolongement de l’action menée par le précédent gouvernement de centre-gauche, dirigé par José Sócrates (PS). Lors de ce scrutin, le PSD, toujours allié au CDS-PP au sein de la coalition électorale intitulée Portugal à Frente(PàF : Portugal en avant), se maintient bien et arrive en tête avec 39,8 % (– 0,5 %) et 107 sièges. Le PS, bien qu’en progrès par rapport au scrutin de 2011 (+ 4,5 %), ne parvient pas à se hisser à la hauteur de la coalition PàF (33,6 % et 86 sièges). Dans une alternance qui semble leur être coutumière, les deux partis de la gauche de la gauche, le BE et la CDU, progressent à des rythmes inégaux. Cette fois-ci, c’est le BE qui tire le mieux son épingle du jeu et crée la surprise avec 10,6 % et 19 sièges (soit un net progrès de + 5,2 % et + 11 sièges ) tandis que la CDU ne progresse que peu : 8,6 % et 17 sièges (+ 0,4 % et + 1 siège).

190Au soir des élections, si la coalition sortante de centre-droit n’est pas désavouée, mathématiquement, avec 107 sièges au lieu de 132 précédemment sur 230, elle ne dispose plus de majorité absolue au sein de l’Assembleia da República, le Parlement monocaméral portugais . Malgré la volonté affichée du PS de former une coalition de gauche avec le BE et la CDU, le président de la République confie dans un premier temps au Premier ministre sortant, Pedro Passos Coelho (PSD), la mission de former un nouveau gouvernement (PSD/CDS-PP). Celui-ci ne parvient toutefois à se maintenir que 27 jours. En effet, une motion de rejet du programme du gouvernement, déposée par le PS, est adoptée en novembre. C’est la première fois dans l’histoire politique portugaise qu’un gouvernement tombe ainsi, si rapidement et juste après la tenue d’élections. Se met alors en place un gouvernement minoritaire socialiste, soutenu de l’extérieur par trois partis de gauche : le BE, le PEV et PCP. Cette alliance ne se noue pas sans peine, dans la mesure où le PS est traditionnellement plus proche du centre que de la gauche radicale ; une coalition alliant centre-gauche et centre-droit avait dès lors la faveur d’une partie de cette formation politique.

191Dirigé par António Costa, le gouvernement prend rapidement le contre-pied des mesures d’austérité prises depuis 2011, en menant une politique de relance : augmentation du salaire minimum, diminution de la taxation touchant les classes moyennes, et hausse des pensions et des allocations familiales. Selon la plupart des observateurs, les résultats sont au rendez-vous (baisse du chômage et retour à l’équilibre budgétaire), quoique quelque peu en trompe-l’œil (dette publique toujours très élevée, emplois créés surtout précaires et faible niveau d’investissements de l’État, qui reste soumis à une série d’engagements).

192En janvier 2016, l’éparpillement des candidatures de gauche lors de l’élection présidentielle au suffrage universel direct conduit à la victoire, dès le premier tour, du candidat du PSD, Marcelo Rebelo de Sousa, qui remplace Aníbal Cavaco Silva – lequel achevait son second mandat et ne pouvait donc se représenter.

193Les élections législatives suivantes, qui se tiendront le 6 octobre 2019, soit moins de cinq mois après le scrutin européen de mai 2019, conforteront largement A. Costa dans sa politique, en désignant son parti comme grand vainqueur du scrutin avec 36,3 % des voix et en lui octroyant 108 sièges, un score conduisant logiquement à la reconduction de la coalition gouvernementale, cependant moins fortement minoritaire qu’auparavant.

1.22.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

194Le Portugal dispose de 21 sièges au Parlement européen pour la nouvelle législature, soit autant que lors de la précédente. Le taux de participation est de 30,8 % en 2019, soit un recul de – 2,9 % par rapport à 2014 (33,7 %).

195Lors de ce scrutin, le PS vire largement en tête avec 35,9 % des suffrages (soit + 1,9 % par rapport à 2014) et 9 sièges (+ 1). Grâce à ce score, le meilleur du parti à un scrutin d’envergure nationale en dix ans, le PS se place ainsi dans une dynamique ascendante qui sera confirmée lors du scrutin législatif d’octobre 2019. L’addition des scores du PSD (23,6 % et 6 sièges) et du CDS-PP (6,7 % et 1 siège), qui se présentent cette fois-ci séparément, les amène à un résultat quasi similaire à celui enregistré en 2014 : 30,3 % au lieu de 30,0 %, et autant de sièges (7). Les résultats en dents de scie du BE (5,1 % en 2004, 11,5 % en 2009, 4,9 % en 2014) l’amènent, à l’occasion de ce scrutin, à doubler ses voix (en s’établissant à 10,6 %) et par là même sa représentation (2 sièges au lieu de 1 précédemment). En miroir et potentiellement par un jeu de vases communicants entre les deux formations de la gauche radicale, la CDU subit un recul d’ampleur similaire au progrès du BE : elle ne convainc plus que 7,4 % des électeurs (– 6,3 %) et perd 1 siège, n’en conservant que 2. Devenu insolvable suite à des décisions de justice, le MPT n’a pas présenté de listes et perd donc automatiquement ses 2 députés.

Tableau 23. Élection du Parlement européen. Résultats au Portugal (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 23. Élection du Parlement européen. Résultats au Portugal (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 23. Élection du Parlement européen. Résultats au Portugal (en % et en sièges, 2014-2019)

1.23. République tchèque

1.23.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

196À la suite des élections anticipées des 25 et 26 octobre 2013, la République tchèque est dirigée par une coalition regroupant le Česká Strana Sociálně Demokratická (ČSSD : Parti social-démocrate tchèque), le parti libéral souvent qualifié de populiste ANO 2011 (ANO : Oui 2011) – héritier du mouvement Akce Nespokojených Občanů (ANO : Action des citoyens mécontents) – et la Křesťanská a Demokratická Unie - Československá Strana Lidová (KDU-ČSL : Union chrétienne démocrate - Parti populaire tchécoslovaque). Le chef du gouvernement est Bohuslav Sobotka, leader du ČSSD.

197Sept formations politiques se partagent les 21 sièges dévolus au pays lors des élections européennes de mai 2014. La victoire revient à deux formations politiques dont c’était la première participation à un scrutin européen. Avec 16,1 % des voix, ANO 2011 devance d’extrême justesse la coalition de centre-droit formée par Tradice, Odpovědnost, Prosperita 09 (TOP09 : Tradition, responsabilité, prospérité) avec les Starostové a Nezávislí (STAN : Maires et indépendants), coalition qui recueille 16,0 %. Moins de 3 000 voix les séparent. Elles s’adjugent chacune 4 sièges. À l’inverse, les grands perdants du scrutin sont à trouver parmi les formations arrivées en tête aux élections européennes de 2009 : le ČSSD, bien que troisième, recule de 22,4 % et 7 sièges à 14,2 % (– 8,2 %) et 4 sièges (– 3), alors que, de ses 31,5 % et 9 sièges en 2009, la formation conservatrice Občanská Demokratická Strana (ODS : Parti démocratique civique) ne conserve que 7,7 % et 2 sièges, soit une chute spectaculaire de – 23,8 % et – 7 sièges. Entre les deux s’intercalent deux partis. D’une part, le Komunistická Strana Čech a Moravy (KSČM : Parti communiste de Bohême et Moravie), qui recule de 14,2 % à 11,0 % (– 3,2 %) et perd un de ses sièges (de 4 à 3). D’autre part, la KDU-ČSL, qui progresse de 7,6 % à 10,0 % (+ 2,4 %) et passe de 2 à 3 sièges (+ 1). Enfin, la formation libérale-conservatrice et eurosceptique Strana Svobodných Občanů (Svobodní : Parti des citoyens libres) ferme la marche en glanant 1 siège, avec 5,2 % des voix.

198Ces tendances s’affirment et même se renforcent à l’occasion des élections législatives des 20 et 21 octobre 2017. ANO remporte le second scrutin législatif auquel il participe, en totalisant 29,6 % des suffrages (+ 10,9 % par rapport aux élections législatives de 2013) et 78 des 200 sièges que compte la Poslanecká Sněmovna, la chambre basse du Parlement tchèque. L’ODS est quant à lui certes en léger progrès (+ 3,6 % ; 11,3 %) ; cependant, s’il parvient à se hisser à la deuxième place, c’est surtout du fait du score désastreux des autres partis traditionnels, dont ce scrutin consacre le net recul. Si la KDU-ČSL sauve les meubles essentiellement du fait d’un score déjà particulièrement bas au scrutin précédent (5,8 %, soit – 1,0 %), le KSČM chute de – 7,1 % (en s’établissant à 7,8 %) ; surtout, le ČSSD perd 13,2 % (ne parvenant plus à convaincre que 7,3 % des électeurs tchèques). S’intercalent deux partis, qui font pour la première fois leur entrée au Parlement, avec 22 sièges chacun : le Česká Pirátská Strana (Piráti : Parti pirate tchèque) avec 10,8 % et la formation d’extrême droite Svoboda a Přímá Demokracie - Tomio Okamura (SPD : Liberté et démocratie directe - Tomio Okamura) – fraîchement créée en 2015 – avec 10,6 %. Le reste des sièges à pourvoir revient à TOP09 (5,3 % et 7 sièges) et au STAN (5,2 % et 6 sièges) qui, en se présentant séparément, franchissent de justesse le seuil électoral chacun (fixé à 5,0 % à l’échelle nationale pour un parti mais qui aurait été de 10,0 % s’ils s’étaient présentés ensemble au sein d’une coalition à deux partis).

199La mission de former un gouvernement revient à Andrej Babiš (ANO), qui est l’une des principales fortunes du pays et tient un discours anti-corruption (mais qui a été mis en examen dans une affaire de détournements de fonds européens) et anti-élites. Il se révèle être le tenant d’une politique migratoire très restrictive et être un eurosceptique notoire. Sans soutien, le « Trump tchèque » table dans un premier temps sur un gouvernement minoritaire. Mais se voyant refuser la confiance de la chambre basse, il met sur pied une coalition incluant son propre parti et le ČSSD. Ce gouvernement Babiš II est finalement investi en juin 2018, avec le soutien du KSČM.

200Dans le système politique tchèque, l’autre rendez-vous qui rythme la vie politique du pays est l’élection du président de la République (qui se déroule au suffrage universel direct depuis 2011), bien que le rôle du chef de l’État soit essentiellement représentatif. L’élection présidentielle de janvier 2018 se déroule au plus fort de la crise gouvernementale. Elle voit la réélection, avec 51,4 % des suffrages au second tour, du président sortant, l’ancien Premier ministre d’allégeance sociale-démocrate Miloš Zeman. Également souvent classé parmi les populistes, il avait mené campagne en dénonçant les « dangers » de l’immigration et en proposant un référendum sur le « Tchexit ».

1.23.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

201La République tchèque dispose de 21 sièges au Parlement européen, un chiffre inchangé par rapport à 2014. Le taux de participation est de 28,7 % en 2019, soit un net progrès de + 10,5 % par rapport à 2014 (18,2 %). En dépit de cette augmentation significative, le chiffre de la participation continue néanmoins de placer la République tchèque en avant-dernière position au niveau européen, juste devant la Slovaquie. Le scrutin européen se déroule les 24 et 25 mai 2019, faisant de la République tchèque le seul État qui permet à ses électeurs de voter durant deux jours.

202En termes de résultats électoraux, les deux partenaires de la coalition au pouvoir à Prague connaissent des fortunes fort différentes. ANO s’adjuge une nouvelle victoire, la troisième d’affilée pour un scrutin d’ampleur nationale, avec 21,2 % (+ 5,1 % par rapport à 2014) et 6 sièges (+ 2). Si ce score demeure en deçà de celui obtenu aux élections législatives de 2017, il ne saurait toutefois être interprété comme une sanction ou un revers du principal parti au pouvoir, tant le fossé avec ses principaux adversaires politiques est important. Dans le même temps, le ČSSD chute de – 10,2 % et, avec 4,0 % des suffrages, se place sous le seuil électoral (qui est de 5,0 %), perdant ainsi – pour la première fois de son histoire – toute représentation européenne. Il n’y aura donc aucun parti tchèque au sein du groupe S&D au Parlement européen sous la législature 2019-2024. L’ODS, qui avait remporté les deux premiers scrutins européens organisés dans le pays, parvient, tout comme aux dernières élections législatives, à se hisser à la deuxième place. Avec 14,5 % des voix (+ 6,8 %), il double sa représentation au Parlement européen (4 sièges au lieu de 2 précédemment). Mais la plus grosse percée est à mettre à l’actif de Piráti, qui recueille 14,0 % (+ 9,2 %) et décroche d’un seul coup 3 sièges. Ainsi, l’ordre des trois premiers partis reste inchangé par rapport au scrutin législatif de 2017.

203À nouveau réunis au sein d’une liste commune, TOP09 et STAN, sans renouveler l’exploit de 2014 (ils avaient obtenu 16,0 % des voix), réalisent un score honorable avec 11,7 % et en conservant 3 de leurs 4 sièges. Si comme pour Piráti, il ne s’agit pas d’une surprise au vu de son score aux dernières élections législatives, le SPD s’attire les faveurs de 9,1 % des électeurs pour sa première participation à un scrutin européen. Ce parti, qui tient un discours eurosceptique, obtient 2 sièges, c’est-à-dire autant que la KDU-ČSL, qui ne pointe plus qu’à 7,2 % (– 2,8 %) et perd un strapontin. Le KSČM ferme la marche et continue sa lente érosion (second avec 20,3 % en 2004 ; troisième avec 14,2 % en 2009 ; quatrième avec 11,0 % en 2014 ; septième avec 6,9 % en 2019) en ne retenant qu’un seul des 3 sièges acquis en 2014.

204Quant au parti sans doute le plus eurosceptique de l’échiquier politique tchèque, Svobodní – qui s’est allié avec Liberland et le Radostné Česko (RC : La Tchéquie joyeuse) sur une liste officiellement intitulée Odejdeme bez Placení (Nous partirons sans payer) –, il ne recueille que 0,7 % des suffrages et perd donc son unique siège.

Tableau 24. Élection du Parlement européen. Résultats en République tchèque (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 24. Élection du Parlement européen. Résultats en République tchèque (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 24. Élection du Parlement européen. Résultats en République tchèque (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Strana Svobodných Občanů (Svobodní) ; en 2019, coalition électorale réunissant Svobodní, Liberland et RC.

1.24. Roumanie

1.24.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

205Aux élections européennes de mai 2014, la liste commune entre le Partidul Social Democrat (PSD : Parti social-démocrate), le Partidul Conservator (PC : Parti conservateur) et l’Uniunea Națională pentru Progresul României (UNPR : Union nationale pour le progrès de la Roumanie) obtient 37,6 % des voix et 16 sièges, soit un net progrès par rapport à la liste PSD–PC qui avait obtenu 31,1 % et 11 sièges aux élections européennes de 2009 (+ 6,5 % et + 5 sièges). Pour sa part, le libéral-conservateur Partidul Național Liberal (PNL : Parti national libéral) ne progresse que légèrement, de 14,5 % à 15,0 % (+ 0,5 %), mais s’adjuge 1 siège de plus qu’en 2009 (il passe de 5 à 6). Le parti chrétien-démocrate Partidul Democrat Liberal (PDL : Parti démocrate libéral) s’effondre, de 29,7 % à 12,2 % (– 17,5 %), et perd la moitié de sa représentation parlementaire européenne (de 10 à 5). Le parti défendant les intérêts de la minorité hongroise, l’Uniunea Democrată Maghiară din România (UDMR : Union démocrate magyare de Roumanie), est en léger recul, de 8,9 % et 3 sièges à 6,3 % (– 2,6 %) et 2 sièges (– 1). Le Partidul Mișcarea Populară (PMP : Parti du mouvement populaire) – fondé en 2013 par des soutiens du président roumain Traian Băsescu et à la suite d’une scission du PDL – fait son entrée au Parlement européen, avec 6,2 % et 2 sièges. Spécificité de la Roumanie, qui est le seul pays européen utilisant un système électoral proportionnel avec des listes fermées autorisant les indépendants à se présenter  [37], un candidat indépendant, Mircea Diaconu, est élu avec 6,8 % des voix.

206La liste commune qui remporte les élections européennes de 2014 n’est autre que le reflet de la coalition Uniunea Social Democrat (USD : Union sociale-démocrate) – composée du PSD, du PC et de l’UNPR, avec l’appoint de l’UDMR – bâtie par Victor Ponta en février 2014 pour pallier le départ du PNL de la majorité. Ce retrait, intervenu en février 2014, du PNL de la coalition hétérogène qui prévalait jusqu’alors et appelée Uniunea Social-Liberală (USL : Union sociale libérale) faisait suite à la décision de V. Ponta de ne pas désigner le maire de Sibiu, Klaus Iohannis (PNL), comme ministre de l’Intérieur. En filigrane, se dessinait en fait la course à l’élection présidentielle. Alors que l’accord de coalition prévoyait que le candidat soutenu par la majorité gouvernementale serait issu des rangs du PNL, il était devenu de plus en plus évident que le PSD souhaitait présenter un des siens.

207Le scrutin présidentiel a lieu en novembre 2014, soit six mois après les élections européennes, et doit permettre de remplacer T. Băsescu, qui, ayant déjà effectué deux mandats, ne peut se représenter. Celui-ci se retire donc à la suite d’un bras de fer politique et juridique de plusieurs mois avec le gouvernement Ponta, qui a notamment tenté de le destituer. Bien que les sondages prédisaient presque unanimement la victoire de V. Ponta, c’est le candidat du PNL, qui n’est autre que K. Iohannis, qui est élu président de la République au second tour du scrutin, avec 54,4 % des voix.

208La période 2014-2019 est essentiellement marquée par une valse des gouvernements, rythmée par une série de scandales qui touche les plus hautes sphères de l’État. Défait à l’élection présidentielle, V. Ponta continue d’exercer son mandat de Premier ministre mais doit faire face à la défection de l’UDMR. Au printemps 2015, des poursuites pénales sont lancées contre lui ; il est accusé dans une affaire d’évasion fiscale, de complicité de blanchiment d’argent et de conflit d’intérêts. Il ne démissionne pourtant de son poste de Premier ministre que le 4 novembre, à la suite d’une vague de manifestations faisant suite à l’incendie d’une discothèque, qui a fait 63 morts dans la capitale roumaine. Baptisées « Révolution CTRL ALT DEL », ces manifestations spontanées dénoncent le lien entre les scandales de corruption et l’incendie, et appellent explicitement à la démission du Premier ministre et à celle du maire de secteur où a eu lieu la tragédie. C’est alors l’indépendant et ancien commissaire européen Dacian Cioloș qui est désigné par le président pour assurer la transition pendant une période d’un an, jusqu’aux élections législatives du 11 décembre 2016. Il forme un gouvernement essentiellement composé de technocrates, mais soutenu de l’extérieur par une majorité importante (PSD, PNL, UNPR, UDMR et représentants des minorités nationales).

209Le scrutin législatif de fin 2016 est à nouveau remporté assez largement par le PSD, qui s’adjuge 45,5 % des suffrages et 154 des 329 sièges de la Camera Deputaților, la chambre basse du Parlement roumain. Fort de ce score, le parti parvient en outre à garder son ancien allié libéral-conservateur à bonne distance, le PNL ne décrochant que 20,0 % et 69 sièges. Un nouveau parti, largement bâti sur une plateforme anti-corruption, se hisse à la troisième place : l’Uniunea Salvați România (USR : Union sauvez la Roumanie), fondé à la suite du succès de l’Uniunea Salvați Bucureștiul (Union sauvez Bucarest) aux élections locales du 5 juin 2016. Il obtient 8,9 % des voix et 30 sièges. Pour sa part, avec 6,2 % et 21 sièges, l’UDMR progresse légèrement (+ 1,1 % et + 3 sièges). La nouvelle formation de centre-droit Alianța Liberalilor și Democraților (ALDE : Alliance des libéraux et démocrates) – créée en 2015 par la fusion de deux partis politiques : le Partidul Liberal Reformator (PLR : Parti libéral-réformateur) et le PC – s’adjuge 5,6 % des voix et 20 sièges. Enfin, le PMP, en passe d’absorber l’UNPR, fait son entrée au Parlement roumain avec 5,4 % et 18 sièges. Le reste de la représentation est dévolu aux organisations roumaines représentant les communautés dites ethniques, c’est-à-dire composées de députés élus sur des listes de minorités nationales.

210À la suite du scrutin, le poste de Premier ministre aurait dû revenir à Liviu Dragnea, président du PSD depuis 2015, mais cela est rendu impossible du fait de sa condamnation en avril 2016 à une peine de prison avec sursis pour fraude électorale. C’est Sorin Grindeanu qui est alors choisi pour diriger le pays ; il se place à la tête d’une coalition de centre-gauche alliant PSD et ALDE (et regroupant ainsi 174 sur 329 sièges à la chambre basse et 76 sur 136 au sénat). Cependant, il est rapidement confronté lui aussi à une vague de manifestations, suite à une série d’ordonnances perçues par l’opinion comme autant de tentatives de faire obstacle à la lutte contre la corruption, notamment une modification du Code pénal permettant de faciliter les amnisties et les grâces dans les cas d’abus de pouvoir ou encore une dépénalisation de plusieurs infractions. Quelque 200 000 personnes dénoncent ces initiatives dans la rue, ce qui en fait la plus grande manifestation de la période post-communiste dans le pays. La réaction de la communauté internationale est également assez vive, non seulement de la part des ambassades, dont certaines expriment leur inquiétude via une déclaration commune, mais également de la part de la Commission européenne.

211Si le gouvernement sauve sa tête dans un premier temps en procédant à des remaniements et en confiant les réformes au Parlement, le comité exécutif du PSD retire finalement son soutien au Premier ministre en juin 2017, soit moins de six mois après son entrée en fonction. Après avoir tenté en vain de rejeter la responsabilité sur le PSD, S. Grindeanu est finalement renversé par une motion de censure. L’ancien ministre de l’Économie, Mihai Tudose, le remplace alors. Rapidement confronté à des désaccords avec le président de son parti et accusé de plagiat dans sa thèse de doctorat, M. Tudose ne reste, lui aussi, que six mois (juin 2017-janvier 2018). S’ensuit la nomination comme Première ministre de la députée européenne Viorica Dăncilă (PSD), première femme à occuper ce poste en Roumanie.

212Dans la foulée du scrutin européen de mai 2019, la coalition gouvernementale se délitera, une fois de plus en raison des désignations en vue de la future élection présidentielle (prévue en novembre 2019). Le 10 octobre, la première Ministre et candidate du PSD à l’élection présidentielle sera renversée par une motion de censure (la quatrième) déposée à son encontre. Le gouvernement Dăncilă aura duré un an et huit mois, ce qui en fait de loin le plus long de la période étudiée ici.

213Sur le plan européen, il est à noter que, bien que la Commission européenne ait donné son feu vert à l’entrée de la Roumanie dans l’espace Schengen, l’opposition de certains États membres n’a jusqu’à présent pas permis de rendre cette accession effective.

1.24.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

214À compter de l’éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’UE, la Roumanie, septième pays le plus peuplé de l’UE, disposera de 33 sièges au Parlement européen, soit + 1 par rapport à 2014 (32), récupérant ainsi le siège perdu suite à l’adoption du Traité de Lisbonne. Le taux de participation est de 51,1 % en 2019, soit en progrès de + 18,7 % par rapport à 2014 (32,4 %). C’est la seconde plus forte progression de la participation entre les deux derniers scrutins européens parmi les États membres. Il est à relever que la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne est assurée par la Roumanie lors du premier semestre de l’année 2019, semestre pendant lequel se déroulent les élections européennes.

215Le scrutin européen de mai 2019 est le tout premier scrutin d’ampleur nationale remporté par le PNL sous sa propre bannière (c’est-à-dire sans faire partie d’une coalition électorale). Il triple quasiment le nombre de ses électeurs par rapport à 2014, notamment en raison de la hausse spectaculaire de la participation : son score passe de 15,0 % à 27,0 %, et son nombre de sièges de 6 à 10. Ce résultat est cependant à relativiser, du fait de la fusion du PDL dans le PNL qui a eu lieu peu après le scrutin de 2014. De fait, l’addition des scores obtenus par chacun des deux partis en 2014 est très proche de – et même légèrement supérieur à – celui du PNL en 2019 (27,2 %, contre 27,0 %).

216Le PSD, qui se présente également seul, et ce pour la première fois à un scrutin européen si l’on exclut les élections ayant eu lieu au moment de l’adhésion en 2007, voit son résultat s’établir à 22,5 % et 8 sièges. Même s’il est difficile de comparer son score avec celui obtenu en 2014 par la liste commune PSD–PC–UNPR, il peut néanmoins être souligné que les candidats du PSD occupaient 12 des 16 sièges conquis par cette coalition en 2014. Le PSD ne se place que d’extrême justesse devant la coalition électorale intitulée Alianța 2020 USR–PLUS, laquelle regroupe l’USR et le nouveau parti pro-européen Partidul Libertății, Unității și Solidarității (PLUS : Parti de la liberté, de l’unité et de la solidarité) créé par D. Cioloș en 2018. Cette liste recueille 22,4 % des suffrages et décroche d’un seul coup 8 sièges. Les 12 000 voix supplémentaires glanées par le PSD par rapport à la liste USR–PLUS lui permettront de s’adjuger le 33e et dernier siège qui reviendra au pays en cas de Brexit.

217Un autre nouveau venu sur la scène politique roumaine, le parti social-libéral PRO România (PRO : Pour la Roumanie), récolte 6,4 % des voix et envoie 2 représentants au Parlement européen. Sa tête de liste n’était autre que V. Ponta, exclu du PSD pour son soutien à S. Grindeanu au moment de la crise gouvernementale de 2017. Il ne siégera pas, à la différence de l’ancienne commissaire européenne Corina Crețu, et sera remplacé par un autre ancien Premier ministre : M. Tudose.

218Les deux derniers partis à franchir le seuil électoral sont, d’une part, le PMP – dont la fusion avec l’UNPR a finalement avorté – et d’autre part, l’UDMR. Avec respectivement 5,8 % (– 0,4 %) et 5,4 % (– 1,0 %), ils réussissent tous deux à conserver leurs 2 sièges. L’ancien président T. Băsescu siégera dans les rangs du PMP.

219Avec ces résultats, la Roumanie rompt avec sa tradition, ininterrompue jusqu’alors, de faire élire au Parlement européen des indépendants (László Tőkés en 2007, Elena Băsescu en 2009, Mircea Diaconu en 2014).

220Le score désastreux de l’ALDE, partenaire junior de la majorité gouvernementale, tout comme le recul manifeste du PSD, permettent d’interpréter les résultats du scrutin comme une nette sanction à l’égard du gouvernement.

Tableau 25. Élection du Parlement européen. Résultats en Roumanie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 25. Élection du Parlement européen. Résultats en Roumanie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 25. Élection du Parlement européen. Résultats en Roumanie (en % et en sièges, 2014-2019)

* Coalition électorale réunissant PSD, PC et UNPR.
** Candidat indépendant.

1.25. Royaume-Uni

1.25.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

221Au cours des dernières années, la question de l’appartenance européenne a entièrement phagocyté la vie politique du Royaume-Uni comme elle ne l’avait jamais fait dans aucun autre pays auparavant.

222En mai 2014, le parti de droite souverainiste et eurosceptique UK Independence Party (UKIP : Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni) se positionne comme l’incontestable vainqueur des élections européennes, s’adjugeant 27,5 % des voix et 24 sièges, soit une progression de + 11,0 % et + 11 sièges par rapport aux élections européennes de juin 2009. Ce succès d’un parti, certes anti-immigration et souvent qualifié de populiste, mais dont l’agenda politique est essentiellement et avant tout axé sur le retrait du Royaume-Uni de l’UE, préfigure largement les évolutions à venir. Lors de ce même scrutin, le Labour Party (Lab : Parti travailliste) progresse lui aussi, de 15,7 % à 25,4 % (+ 9,7 %) et de 13 à 20 sièges (+ 7), tandis que le Conservative and Unionist Party (Cons : Parti conservateur et unioniste) limite les dégâts, bien que davantage en voix qu’en sièges, en passant de 27,7 % à 23,9 % (– 3,8 %) et de 25 à 19 sièges (– 6).

223Le grand perdant du scrutin est le parti Liberal Democrats (LibDems : Démocrates libéraux), parti le plus europhile de l’échiquier politique outre-Manche, qui perd la moitié de ses électeurs en chutant de 15,7 % à 6,9 % (soit – 6,8 %) et qui, surtout, ne conserve qu’un seul des 11 sièges acquis en 2009 (– 10), largement du fait du découpage de la Grande-Bretagne en 12 circonscriptions. Pour la même raison, bien qu’en recul en pourcents à l’échelle nationale (de 8,6 % à 7,9 %, soit – 0,7 %), mais à la faveur d’un progrès modéré dans une seule circonscription – celle du Sud-Ouest –, le Green Party of England and Wales (Greens : Parti vert de l’Angleterre et du Pays de Galles) gagne 1 siège (il passe de 2 à 3). Avec respectivement 0,7 % et 2,5 % à l’échelle nationale, mais 15,3 % au Pays de Galles et 29,0 % en Écosse, les partis régionalistes Plaid Cymru (PC : Parti du Pays de Galles) et Scottish National Party (SNP : Parti national écossais) conservent intactes leurs représentations respectives au Parlement européen : respectivement 1 et 2 sièges.

224S’agissant de l’Irlande du Nord, régie par un autre système électoral (celui du vote unique transférable), les 3 sièges reviennent aux mêmes formations qu’en 2009, à savoir au parti nationaliste catholique Sinn Féin (SF : Nous-mêmes) avec 1,0 % à l’échelle du pays – soit 25,5 % (– 0,6 %) à l’échelle de l’Irlande du Nord –, au parti protestant unioniste Democratic Unionist Party (DUP : Parti unioniste démocratique) avec 0,8 % – soit 20,9 % dans la circonscription nord-irlandaise (+ 2,7 %) –, et au parti conservateur Ulster Unionist Party (UUP : Parti unioniste d’Ulster) avec 0,5 % – soit 13,3 % (– 3,8 %).

225Au cours des années 2014-2019, la vie politique, économique et sociale britannique est rythmée par la question européenne, dans des proportions jamais atteintes ni même imaginées. Bien que le débat sur l’appartenance du pays à l’UE soit récurrent, notamment au sein du Cons, les élections législatives du 7 mai 2015 placent la question au cœur de l’agenda politique national. Même si le Cons ne progresse que légèrement en voix par rapport aux élections générales précédentes, qui s’étaient tenues le 6 mai 2010 – de 36,1 % à 36,9 % (+ 0,8 %) –, le mode de scrutin uninominal majoritaire à un tour lui permet de décrocher une majorité absolue de 337 des 650 députés de la House of Commons. Le Lab tire moins bien son épingle du jeu : malgré un progrès de + 1,5 % dans les urnes (qui le place à 30,5 %), il perd nombre de circonscriptions précédemment acquises et passe de 258 à 232 sièges. Le scrutin est surtout marqué par un chassé-croisé entre les LibDems et le SNP. Les premiers dégringolent de 23,0 % à 7,9 % des voix (et de 57 à 8 sièges), tandis que le second progresse de 1,7 % à 4,7 % (et de 6 à 56 députés), profitant de sa popularité acquise dans le cadre de l’organisation du référendum sur l’indépendance de l’Écosse, qui a eu lieu le 18 septembre 2014. Glanant dans les circonscriptions du nord du pays la plupart des sièges auparavant dévolus au Lab et aux LibDems, le SNP totalise 56 des 59 députés que l’Écosse envoie à Westminster. Avec ses 12,7 %, l’UKIP ne parvient à glaner qu’un seul siège, alors qu’il en avait remporté 2 lors de scrutins partiels qui s’étaient tenus en 2014.

226Ces résultats mettent un terme à la collaboration entre Cons et LibDems qui avait prévalu sous la précédente législature. Le Cons gouverne désormais seul. À la fin du mois de février 2016, est conclu un accord sur la relation du Royaume-Uni avec l’UE, qui fait suite à des négociations menées par le Premier ministre David Cameron avec les instances européennes depuis 2014. Mais cet accord est ambigu, notamment du fait de l’absence de statut légal de certaines de ses dispositions, ce qui conduit D. Cameron à mettre en œuvre sa promesse de campagne consistant à organiser un référendum sur la sortie de son pays de l’UE  [38]. Si Cons est divisé et choisit ne pas adopter de position, le Premier ministre et la plupart des membres du gouvernement se prononcent clairement en faveur du maintien, de même que les LibDems, le SNP et la majorité du Lab, tandis que l’aile la plus conservatrice et eurosceptique du Cons et l’UKIP sont pour la sortie.

227Le référendum a lieu le 23 juin 2016 et voit la victoire du « Leave », 51,9 % des votants indiquant vouloir que leur pays quitte l’UE. À l’issue du scrutin, D. Cameron démissionne. Il est remplacé par l’ancienne secrétaire d’État à l’Intérieur, Theresa May, suite à une élection interne au Cons. La demande officielle d’activation de l’article 50 du TUE pour lancer la procédure de retrait du Royaume-Uni est envoyée à l’UE par la Première ministre le 29 mars 2017. En avril, T. May demande une dissolution de la House of Commons, afin de conforter sa majorité en vue des négociations avec l’UE. Cette demande est validée par les députés, ce qui conduit à un scrutin anticipé le 8 juin 2017. Le 22 mai et le 3 juin, le pays est frappé par deux attentats islamistes : l’un à Manchester (22 morts) et le second à Londres (8 morts).

228Le principal résultat du scrutin législatif est la perte de la majorité absolue du Cons – lequel n’a plus que 318 sièges –, malgré, encore une fois, un net progrès dans les urnes (42,5 % des voix, soit + 5,6 %). Le Lab reprend du poil de la bête (avec 262 sièges et 40,0 % des voix, soit + 9,5 %). Le SNP est en net recul (3,0 %, soit – 1,7 %)  [39] mais se maintient dans 35 circonscriptions sur les 56 précédemment acquises. Les LibDems enregistrent un score relativement stable, en s’établissant cette fois à 7,4 % (– 0,4 %), mais profitent davantage du système électoral en parvenant à glaner 12 sièges. L’un des faits marquants du scrutin est que l’UKIP, privé de sa principale revendication et de la présidence duquel Nigel Farage a démissionné, s’effondre à 1,8 % (– 10,9 %).

229Le Cons choisit de poursuivre avec un gouvernement minoritaire, qui s’appuie à la Chambre des communes sur les 10 sièges récoltés par le DUP en Irlande du Nord mais qui, du fait de dissensions internes, ne permettent pas de faire valider les accords successifs de sortie conclus par T. May avec l’UE. En effet, entre janvier et avril 2019, le Parlement britannique rejette par trois votes successifs la dernière mouture de l’accord, tout comme ses alternatives, conduisant à des reports successifs de la date d’entrée en vigueur du Brexit (29 mars 2019, 12 avril 2019  [40], 31 octobre 2019 et, désormais, 31 janvier 2020).

230En juin 2019, à la suite de démissions en cascade au sein de son gouvernement et devant les blocages sur le plan du Brexit, T. May se retirera de sa fonction de chef du Cons, provoquant des élections à la direction du parti, et par là même la chute de son gouvernement. Fin juillet, Boris Johnson, l’ancien maire de Londres qui avait notoirement fait campagne en faveur du « Leave » lors du référendum, puis avait été nommé de manière quelque peu surprenante secrétaire d’État aux Affaires étrangères avant de démissionner avec fracas de ce poste en juillet 2018 – précisément du fait d’un désaccord sur la gestion de la mise en œuvre du Brexit –, remportera l’élection interne et accédera au 10 Downing Street. Afin de tenter de tenir sa promesse de rendre effective la sortie de son pays de l’UE au 31 octobre et devant les blocages qui se profilent, il décidera purement et simplement de suspendre le Parlement britannique. Débouté par la Cour suprême, il sera contraint de négocier rapidement un nouvel accord avec les dirigeants européens au cours du mois d’octobre, lequel sera à nouveau rejeté par la Chambre des communes, laquelle forcera le Premier ministre, contre sa volonté, à demander un nouveau report du Brexit au 31 janvier 2020.

231C’est seulement lorsque ce nouveau report aura été accepté par l’UE et que le « no deal » aura été formellement (et au moins provisoirement) écarté que les députés accéderont à la demande de B. Johnson d’organiser des élections législatives anticipées. Ainsi, bien que cela soit normalement impossible en cours de législature depuis 2011, la loi électorale en vigueur sera contournée par le Early Parliamentary General Election Act 2019, qui sera adopté en un jour seulement et qui conduira à la dissolution du Parlement le 6 novembre et à l’organisation d’élections anticipées le 12 décembre.

1.25.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

232Le Royaume-Uni est sans conteste le pays dans lequel et au sujet duquel les élections européennes de mai 2019 font couler le plus d’encre. Moins d’un mois avant la date prévue, la tenue du scrutin y est toujours incertaine en raison des reports successifs de la sortie du pays de l’UE. En effet, jusqu’au 7 mai, il n’a pas été certain que soient organisées ces élections dans le pays, la date effective du Brexit étant censée advenir avant leur tenue. C’est donc dans un contexte éminemment différent que, tout comme en 2014, le Royaume-Uni doit finalement élire 73 députés au Parlement européen – qui ont vocation à quitter l’assemblée lorsque le Royaume-Uni sortira de l’UE –, à concurrence de 70 pour la Grande-Bretagne et de 3 pour l’Irlande du Nord.

233Le scrutin se déroule le jeudi 23 mai 2019 ; de façon quelque peu paradoxale, le pays est donc l’un des deux premiers à voter (avec les Pays-Bas). Le taux de participation est de 37,1 %, soit un léger progrès de + 1,5 % par rapport à 2014 (35,6 %).

234C’est le Brexit Party (BP : Parti du Brexit) qui remporte très largement le scrutin. Avec 31,6 % des voix, il décroche 29 sièges, ce qui en fait, au début de la législature 2019-2024, tout simplement le parti politique le mieux représenté au Parlement européen, tous pays confondus  [41]. Créé en vue de ces élections européennes par d’anciens cadres de l’UKIP à la suite de désaccords sur la ligne du parti, et avec le soutien de N. Farage – ancien leader et principal artisan de la victoire de l’UKIP en 2014 –, il peut donc être considéré à certains égards comme le successeur de l’UKIP. En effet, si ce dernier continue d’exister en parallèle, son score désastreux (3,3 %) ne lui permet pas de se maintenir dans l’assemblée européenne ; il ne dispose désormais plus de représentants que dans des assemblées locales et régionales (notamment, 2 députés à l’Assemblée nationale du Pays de Galles) – ainsi que d’un représentant à la Chambre des Lords.

235Pour leur part, les LibDems se redressent très nettement et enregistrent la meilleure progression entre ces deux scrutins européens (+ 13,4 %), en totalisant 20,3 % des voix et 16 sièges (+ 15). À l’inverse, ces élections constituent une lourde défaite pour le Lab, qui, en passant de 25,4 % à 14,1 %, perd pas moins de la moitié de sa représentation européenne (10 au lieu de 20 sièges). Mais ce n’est rien comparé à l’effondrement du Cons : ses 9,1 % et 4 sièges représentent une perte sèche de – 14,8 % et – 15 sièges. N’ayant convaincu que moins d’un électeur sur 10, il s’agit de loin de son pire résultat à un scrutin à l’échelle nationale depuis la création du parti en 1834. Entre les deux formations historiques s’intercalent les Greens. Ayant jusqu’à présent stagné en termes de représentation au Parlement européen (en glanant 2 sièges à chaque élection entre 1999 et 2009, puis 3 en 2014), ils réussissent cette fois-ci un bond quantitatif important : 12,1 % (soit + 4,2 %) et 7 sièges (+ 4).

236Ces observations combinées (victoire du BP, remontée de l’europhile LibDems, progrès des Greens et lourde chute des deux partis historiques, qui n’ont cessé de montrer leurs divisions internes sur la question du Brexit) démontrent, si besoin en était encore, la profonde fracture qui demeure au sein de la société britannique sur l’opportunité de la sortie du Royaume-Uni.

237Le reste de la représentation parlementaire est dévolu à des partis régionalistes. Le SNP progresse de + 1,1 % à l’échelle nationale et de + 8,8 % (de 29,0 % à 37,8 %) dans la circonscription écossaise, où il remporte la moitié des sièges disponibles (3 sur 6). Au Pays de Galles, le PC s’adjuge 19,6 % des suffrages (1,0 % si on reporte ce score à l’ensemble des circonscriptions britanniques) et un des 4 sièges – le BP en décrochant 2 et le Lab 1.

238En Irlande du Nord, le SF et le DUP, au coude-à-coude avec respectivement 22,2 % et 21,8 % des voix, conservent chacun leur unique siège. Le troisième et dernier strapontin revient à l’Alliance Party of Northern Ireland (APNI : Parti de l’alliance d’Irlande du Nord), formation libérale emmenée par Naomi Long et qui récolte 18,1 % des suffrages dans la circonscription ; elle dame ainsi le pion à l’UUP, qui n’obtient plus le vote que de 9,3 % des électeurs.

Tableau 26. Élection du Parlement européen. Résultats au Royaume-Uni (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 26. Élection du Parlement européen. Résultats au Royaume-Uni (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 26. Élection du Parlement européen. Résultats au Royaume-Uni (en % et en sièges, 2014-2019)

NB : Dans le tableau A (Grande-Bretagne), les scores sont à l’échelle du Royaume-Uni. Dans le tableau B (Irlande du Nord), les scores sont à l’échelle de cette seule circonscription.

1.26. Slovaquie

1.26.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

239Depuis 2006, la vie politique slovaque est dominée par le parti SMER - Sociálna Demokracia (Smer-SD : Direction - Social-démocratie), qui a dirigé quatre des cinq derniers gouvernements du pays et remporté toutes les élections disputées à l’échelon national, tant législatives qu’européennes. Le scrutin européen de mai 2014 se tient à la mi-mandat du second gouvernement de Robert Fico. Le Smer-SD est en effet revenu au pouvoir en mars 2012 à la faveur d’élections anticipées, lesquelles faisaient suite à la chute du gouvernement de centre-droit d’Iveta Radičová, qui s’était délité sur la question du renforcement du Fonds européen de stabilité financière. Le Smer-SD gouverne alors seul, disposant de 83 députés sur 150 au Národná Rada, le Parlement monocaméral slovaque.

240Lors des élections européennes de 2014, le Smer-SD conserve son statut de premier parti mais enregistre un net recul par rapport aux élections européennes de 2009, en ne recueillant plus que 24,1 % des suffrages (– 7,9 %) et 4 sièges (– 1). La Slovenská Demokratická a Kresťanská Únia - Demokratická Strana (SDKÚ-DS : Union démocrate et chrétienne slovaque - Parti démocrate), qui dirigeait le gouvernement précédent, semble tout autant sanctionnée ; elle ne récolte que 7,7 % des suffrages (– 9,3 %) et 2 sièges (statu quo). Seuls quatre partis réussissent véritablement à tirer profit de ce scrutin. Le premier est l’autre formation chrétienne-démocrate : le Kresťanskodemokratické Hnutie (KDH : Mouvement chrétien-démocrate), arrivé second au scrutin législatif du 10 mars 2012 et dont la recrudescence semble se confirmer par un léger progrès enregistré en voix (13,2 %, soit + 2,3 %), même si le parti ne conquiert aucun siège supplémentaire (2 sièges). Le second est le nouveau parti libéral-conservateur Nová Väčšina (Nova : Nouvelle majorité), créé en 2012 à la suite d’une scission de deux figures de proue du KDH puis rejoint par des membres de la faction la plus libérale du parti libéral-conservateur et généralement qualifiée d’eurosceptique Sloboda a Solidarita (SaS : Liberté et solidarité). Nova obtient 6,8 % et 1 siège, à la faveur d’une coalition avec deux formations conservatrices : l’Občianska Konzervatívna Strana (OKS : Parti civique conservateur) et les Konzervatívni Demokrati Slovenska (KDS : Démocrates conservateurs de Slovaquie). Enfin, le SaS, principal artisan de la chute du gouvernement Radičová, parvient à s’adjuger son premier strapontin européen avec 6,7 % (+ 2,0 %).

241Pour le reste, le parti de la minorité hongroise Strana Maďarskej Koalície / Magyar Közösség Pártja (SMK-MKP : Parti de la coalition hongroise) – fortement soutenu par le Fidesz-MPSz de Viktor Orbán – est en recul à 6,5 % (– 4,8 %) et ne conserve qu’un de ses 2 sièges. Deux nouveaux partis font leur entrée et complètent la représentation slovaque au Parlement européen avec 1 siège chacun : le populiste Obyčajní Ľudia (OĽaNO : Les gens ordinaires et personnalités indépendantes), qui recueille 7,5 %, et le parti social-libéral Most-Híd - Az Együttműködés Pártja / Strana Spolupráce (Most-Híd : Pont - Parti de la coopération) – parti de défense des intérêts de la minorité hongroise et défenseur de la coopération inter-ethnique, fondé par des dissidents du SMK-MKP –, avec 5,8 %.

242Les élections du 5 mars 2016 sont une fois de plus à double tranchant pour le Smer-SD : elles confirment sa prééminence avec 28,3 % des voix, soit plus de 16 % au-dessus de son premier poursuivant, mais lui font enregistrer de lourdes pertes : en chute de plus de 16 % par rapport aux dernières législatives de mars 2012, le parti passe de 83 à 49 sièges. Le rapport de force semble alors tourner à l’avantage d’un ensemble de petites formations de la droite de l’échiquier politique. C’est le SaS, en alliance avec l’OKS, qui se hisse à la deuxième place, avec 12,1 % (+ 6,2 % par rapport au score du seul SaS en 2012) et décroche 21 sièges (+ 10). OĽaNO, allié à NOVA, et le parti conservateur et nationaliste Slovenská Národná Strana (SNS : Parti national slovaque) sortent également renforcés à 11,0 % et 8,6 % (respectivement + 2,5 % et + 4,1 %). Mais c’est surtout la percée du parti d’extrême droite Kotleba - Ľudová Strana Naše Slovensko (K-ĽSNS : Kotleba - Parti populaire Notre Slovaquie) qui marque les esprits. Ce parti ultranationaliste, souvent qualifié de néo-nazi, obtient 8,0 % des voix (+ 6,4 %) et fait son entrée au Parlement en décrochant 14 sièges d’un coup. Autre fait marquant, le scrutin est le théâtre de l’effondrement du KDH – lequel était encore la deuxième force politique du pays aux élections législatives de 2012 –, tout comme de la SDKÚ-DS – qui avait dirigé le pays entre 2010 et 2012. Aucun de ces deux partis chrétiens-démocrates ne parvient à franchir le seuil électoral et ils perdent toute représentation au Parlement slovaque. Deux nouvelles forces politiques les remplacent : Sme Rodina– Boris Kollár (SR : Nous sommes une famille – Boris Kollár) avec 6,6 % et 11 sièges et le #SIEŤ (SIEŤ : Réseau), un parti de centre-droit fondé par des dissidents du KDH et que les sondages avaient parfois placé en deuxième position, mais qui ne récolte finalement que 5,6 % des voix et 10 sièges. Entre les deux s’intercale le Most-Híd, dont le score est relativement stable avec 6,5 % (– 0,4 %) et 11 sièges (– 2), alors que l’autre parti de la minorité hongroise dont il est issu, le SMK-MKP, n’obtient toujours pas de représentation parlementaire au niveau national.

243À la suite de ces élections, le constat est sans appel pour le Smer-SD : ayant perdu sa majorité absolue en sièges, s’il veut continuer à gouverner, il doit désormais former une coalition. Il choisit alors de s’allier avec le SNS ainsi qu’avec les formations de centre-droit Most-Híd et SIEŤ. Si ce choix paraît surprenant à première vue, le Smer-SD avait déjà fait le choix de s’allier au SNS en 2006, ce qui lui avait d’ailleurs valu d’être suspendu du Parti socialiste européen (PSE). Une première fois levée, cette sanction avait à nouveau été brandie en 2015, en raison de déclarations polémiques du gouvernement Fico II – lequel ne comprenait alors pourtant plus que le Smer-SD –, qui s’était opposé aux quotas de répartition des réfugiés, refusant notamment d’accueillir des musulmans en Slovaquie, ou encore avait déclaré impossible l’intégration des Roms.

244En mars 2018, R. Fico, qui a été à la tête de trois gouvernements, et ce pendant dix des douze dernières années, est contraint à la démission du fait de l’assassinat du journaliste Ján Kuciak (et de sa compagne, Martina Kušnírová) en février, alors que celui-ci enquêtait sur des liens entre la mafia calabraise et des mandataires politiques slovaques. S’ensuit une vague de manifestations anti-corruption et en opposition au gouvernement. L’ancien vice-président du gouvernement Peter Pellegrini est nommé à la tête du pays, sur la base de la même majorité simplement amputée des deux députés restants du SIEŤ (le parti s’étant désagrégé suite aux élections).

245À la veille du scrutin européen de 2019, a lieu une élection présidentielle, qui est remportée par la candidate Zuzana Čaputová, vice-présidente du parti social-libéral et pro-européen Progresívne Slovensko (PS : Slovaquie progressiste), récemment créé (2017) et qui ne dispose d’aucun parlementaire. Elle remporte le scrutin avec 53,8 % des voix et succède ainsi à l’indépendant Andrej Kiska comme présidente de la République de Slovaquie, un poste cependant largement honorifique.

1.26.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

246La Slovaquie dispose au moment des élections de 13 sièges au Parlement européen, soit un statu quo par rapport à 2014. Elle en récupérera cependant un supplémentaire si et quand le Brexit se produit, ce qui portera son total à 14. Le taux de participation est de 22,8 % en 2019, soit un net progrès de + 9,7 % par rapport à 2014 (13,1 %). Malgré cela, et avec moins d’un électeur sur quatre s’étant déplacé, la Slovaquie reste l’État membre au plus faible taux de participation aux élections européennes de 2019.

247Lors des élections européennes de mai 2019, c’est la coalition électorale entre le nouveau parti vainqueur de la récente élection présidentielle, le PS, et le SPOLU - Občianska Demokracia (SPOLU : Ensemble - Démocratie civique) qui remporte le scrutin, avec 20,1 % des voix et 4 sièges. Avec 15,7 % et 3 sièges, le Smer-SD accuse le coup par rapport au scrutin de 2014 (– 9,4 % et – 1 siège). Il s’agit là du premier scrutin européen non remporté par ce parti depuis l’adhésion du pays à l’UE en 2004 (scrutin où il avait fini troisième, mais à 0,2 % et moins de 1 500 voix du premier). Le Smer-SD devance un trio de partis remportant chacun 2 sièges. Le K-ĽSNS continue son irrésistible ascension avec 12,1 % (+ 10,4 %), gagnant par ailleurs plus de 4 % par rapport au scrutin législatif slovaque de 2016 (même s’il s’attire les faveurs d’un nombre bien moindre d’électeurs du fait de la faible participation au scrutin européen). Le SaS semble réussir son implantation dans la vie politique slovaque, même si, avec 9,6 % (+ 2,9 %) et 2 sièges (+ 1), sa performance est largement en deçà de sa deuxième place aux élections législatives de 2016. Absent du Parlement slovaque, le KDH sauve les meubles au niveau européen en conservant 9,7 % des voix (– 3,5 %), mais il lui faudra attendre l’éventuelle sortie du Royaume-Uni pour récupérer son second siège. Pour compléter le tableau, OĽaNO, malgré un net recul (– 2,2 %) se maintient de justesse au-dessus du seuil électoral de 5 %, et du même coup dans l’assemblé européenne. À l’inverse, quatre partis perdent leur siège d’eurodéputé : les deux partis de la minorité hongroise, le SMK-MKP et Most-Híd, mais également la SDKÚ-DS et NOVA, ces deux dernières formations ne se représentant pas  [42].

Tableau 27. Élection du Parlement européen. Résultats en Slovaquie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 27. Élection du Parlement européen. Résultats en Slovaquie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 27. Élection du Parlement européen. Résultats en Slovaquie (en % et en sièges, 2014-2019)

1.27. Slovénie

1.27.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

248À l’approche des élections européennes, le 25 avril 2014, la Première ministre Alenka Bratušek présente sa démission à la suite d’un désaveu interne à son parti, la formation sociale-libérale Pozitivna Slovenija (PS : Slovénie positive). Les élections européennes de mai 2014 se déroulent donc dans un certain flou politique au niveau national.

249Cinq partis se partagent la représentation slovène au Parlement européen suite à ce scrutin. Le parti conservateur Slovenska Demokratska Stranka (SDS : Parti démocratique slovène) arrive, comme c’était déjà le cas aux élections européennes de juin 2009, en tête ; s’il recule en pourcents de 26,7 % à 24,8 % (– 1,9 %), il progresse néanmoins de 2 à 3 sièges (+ 1). La coalition électorale formée par le parti chrétien-démocrate Nova Slovenija - Krščanski Demokrati (NSi : Nouvelle Slovénie - Parti chrétien populaire) et la formation conservatrice et agrarienne Slovenska Ljudska Stranka (SLS : Parti populaire slovène) s’adjuge 16,6 % et 2 sièges, soit exactement le même score que celui obtenu par la NSi seule en 2009. Enfin, trois partis obtiennent 1 siège chacun : le nouveau parti Verjamem (Verjamen : Je crois), situé au centre-gauche, avec 10,3 %, et qui choisira de siéger dans le groupe des Verts/ALE ; la formation centriste de défense des intérêts des seniors Demokratična Stranka Upokojencev Slovenije (DeSUS : Parti démocrate des retraités slovènes) avec 8,1 % (soit + 0,9 % et + 1 siège) ; et les progressistes Socialni Demokrati (SD : Sociaux-démocrates), qui, en ne totalisant plus que 8,1 % des voix et 1 siège, sont en chute libre (– 10,3 % et – 1 siège).

250Le 1er juin, soit moins d’une semaine après les élections européennes, la Državni Zbor, chambre basse du Parlement slovène, est dissoute par le président de la République Borut Pahor. Le pays se dirige donc vers des élections législatives anticipées, qui se déroulent le 13 juillet. Elles sont remportées par la toute nouvelle formation sociale-libérale, fondée au lendemain de la dissolution de la chambre, Stranka Mira Cerarja (SMC : Parti de Miro Cerar), qui s’adjuge 34,5 % des voix et 36 des 90 députés. Le SDS, largement distancé, arrive en deuxième position avec 20,7 % et 21 sièges (soit – 5,5 % et – 5 sièges par rapport au précédent scrutin législatif, ayant eu lieu le 4 décembre 2011). Avec 10,2 % des suffrages (+ 3,2 %), DeSUS se hisse pour la première fois à la troisième place d’un scrutin à l’échelle nationale (10,2 %, soit + 3,2 %) et décroche 10 sièges (+ 4). Quant à lui, le SD ne recueille plus que les faveurs de 6,0 % des électeurs slovènes (– 4,5 %) et n’a plus que 6 représentants (au lieu de 10 précédemment), ce qui place ce parti bien en deçà de ses scores historiques puisque, en 2004 et en 2008, il avait totalisé aux alentours de 30 %. Le même nombre de voix (à 60 près) et de sièges reviennent à une alliance électorale formée de petits partis de gauche, la Združena Levica (ZL : Gauche unie). Comme à son habitude, NSi voit son résultat s’établir très loin de celui qu’il a obtenu aux élections européennes : le parti ne récolte que 5,6 % des voix (+ 0,7 %) et 5 sièges (+ 1). Le reste des 88 sièges distribués au scrutin proportionnel de listes revient à la Zavezništvo Alenke Bratušek (ZaAB : Alliance d’Alenka Bratušek), fondée par l’ancienne Première ministre suite à son éviction de la tête du PS, qui l’avait amenée à renoncer à son mandat. Grâce aux 4,4 % du ZaAB, A. Bratušek dame le pion à son ancien parti, qui ne réussit quant à lui pas à franchir le seuil électoral de 4,0 %. Enfin, comme le veut le système, 2 sièges reviennent aux minorités italienne et hongroise et sont attribués au scrutin uninominal pondéré. Au lendemain du scrutin, c’est le président du SMC, l’avocat Miro Cerar, qui devient Premier ministre. Il dirige une coalition comprenant, outre son propre parti, le DeSUS et les SD, et disposant d’une confortable majorité de 52 sièges.

251À l’automne 2017, l’indépendant B. Pahor est réélu lors du scrutin présidentiel ; il s’impose avec 53,1 % des voix au second tour, mais l’élection a été marquée par un niveau d’abstention record pour ce type de scrutin. Sa victoire se fait au détriment d’un ancien acteur et journaliste, Marjan Šarec, qui avait lancé son propre parti, éponyme : la Lista Marjana Šarca (LMŠ : Liste de Marjan Šarec).

252M. Cerar démissionne en mars 2018, à la suite de la décision de la Cour constitutionnelle slovène de rendre invalides les résultats d’un référendum de septembre 2017 qui portait sur un projet d’infrastructure ferroviaire, cher au gouvernement tout autant qu’au budget, puisque son coût estimé était d’un milliard d’euros. Le « oui » l’avait emporté, mais le financement de cette campagne via des fonds publics a entraîné le désaveu de la Cour. Cette démission intervient par ailleurs dans un contexte tendu, plusieurs grèves – notamment celles de fonctionnaires en quête de meilleurs salaires – ayant immobilisé le pays, mais aussi de tensions au sein de la majorité à l’approche des élections, qui devaient normalement se tenir en juillet. Le scrutin n’est finalement que légèrement anticipé et a lieu le 3 juin. Le SDS le remporte avec 24,9 % des voix (+ 4,2 % par rapport au scrutin législatif de 2014) et 25 sièges (+ 4). Tout comme à l’élection présidentielle, bien que via un système électoral fort différent, c’est la LMŠ qui s’adjuge la deuxième place pour sa première participation avec 12,6 % et 13 sièges. Deux des trois anciens partenaires de la coalition sortante sont au coude-à-coude tout en connaissant des fortunes différentes : le SMC, devenu Stranka Modernega Centra (Parti du centre moderne) – un changement de nom lui permettant de conserver son acronyme – recueille 9,8 % en chutant de près de 25 %, tandis que le SD redresse la barre à 9,9 % (+ 3,9 %). Ils obtiennent 10 sièges chacun. Levica (Levica : La gauche), parti héritier de l’alliance ZL, est en embuscade à 9,3 % et 9 sièges, devant la NSi (7,2 %, soit + 1,6 % ; 7 sièges). Les autres partis parvenant à franchir le seuil électoral sont : la ZaAB, devenue Stranka Alenke Bratušek (SAB : Parti d’Alenka Bratušek), qui réitère sa bonne performance des élections législatives de 2014 avec 5,1 % (+ 0,7 %) et gagne même 1 siège (elle en a désormais 5) ; DeSUS, qui est fortement sanctionné dans les urnes et perd la moitié de son électorat (– 5,3 % ; 4,9 %) et par là même de sa représentation (5 députés au lieu de 10 précédemment) ; et le parti nationaliste Slovenska Nacionalna Stranka (SNS : Parti national slovène), qui revient à la chambre basse qu’il avait dû quitter en 2011 avec 4,2 % (+ 2,0 %) et 4 sièges. À défaut d’être devenu chef de l’État, M. Šarec devient chef de gouvernement. Il met en place une coalition gouvernementale minoritaire de centre-gauche composée de la LMŠ, des indétrônables SD, d’un SMC fortement diminué, de la SAB et de DeSUS, et soutenue de l’extérieur par Levica.

1.27.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

253La Slovénie dispose de 8 sièges au Parlement européen, soit autant qu’en 2014. Le taux de participation est de 28,9 % en 2019, soit un progrès de + 4,3 % par rapport à 2014 (24,6 %). Ce faible taux la place sur le podium des pays présentant la plus faible participation au scrutin de mai 2019.

254À l’instar de ce qui s’était produit lors du dernier scrutin législatif national, c’est le SDS qui se place en tête aux élections européennes de mai 2019, à la faveur d’une alliance avec l’autre parti conservateur, le SLS. Ensemble, ils totalisent 26,3 % des voix, soit un léger progrès de + 1,5 % par rapport au score obtenu par le SDS seul en mai 2014. Ainsi, si 3 sièges sont bien mis au carcan de la coalition, seuls 2 reviennent au SDS, le troisième étant dévolu à son nouveau partenaire. Dès lors, les vainqueurs du scrutin sont peut-être davantage à trouver dans les rangs des SD, qui réalisent un rebond significatif de + 10,6 %, les plaçant à 18,7 % des suffrages et leur permettant de doubler leur représentation parlementaire européenne (avec 2 strapontins). Ils se placent ainsi en voix devant la LMŠ, qui ne récolte quant à elle que 15,4 % des voix et glane 2 sièges également. En perdant son partenaire de coalition (le SLS), la NSi perd également 5,5 % des électeurs. Si un des deux sièges acquis en 2014 par son ancienne coalition 2014 lui échappe, elle enverra toujours un représentant au Parlement européen, portant à 4 sur 8 le total des députés slovènes (avec ceux du SDS et du SLS) qui siégeront dans le groupe PPE. DeSUS et Verjamem n’envoient plus de représentants dans l’assemblée européenne : le premier, en ne recueillant plus que 5,7 % des voix (– 2,4 %) s’établit sous le seuil électoral naturel permettant de distribuer les 8 sièges, tandis que le second a été en partie absorbé par le SAB, qui subit le même sort que DeSUS, en pointant à 4,0 %.

Tableau 28. Élection du Parlement européen. Résultats en Slovénie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 28. Élection du Parlement européen. Résultats en Slovénie (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 28. Élection du Parlement européen. Résultats en Slovénie (en % et en sièges, 2014-2019)

1.28. Suède

1.28.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique

255Entre 2006 et 2014, la Suède est dirigée par une coalition de centre-droit, surnommée l’Alliansen (Alliance), qui comprend le parti conservateur Moderata Samlingspartiet (M : Parti du rassemblement modéré), le parti social-libéral Centerpartiet (C : Parti centriste), le Folkpartiet Liberalerna (FP : Parti populaire libéral) et le Kristdemokraterna (KD : Chrétiens-démocrates). Elle est dirigée par Fredrik Reinfeldt (M).

256Au scrutin européen de mai 2014, la première formation du pays et principale force d’opposition au niveau national, le Sveriges Socialdemokratiska Arbetareparti (SAP : Parti social-démocrate suédois des travailleurs) maintient son rang avec 24,2 % (soit – 0,2 % par rapport aux élections européennes de juin 2009) et 5 sièges (statu quo). L’écologiste Miljöpartiet - De Gröna (MP : Parti de l’environnement - Les Verts) progresse, passant de 11,0 % des voix et 2 sièges à 15,4 % (+ 4,4 %) et 4 sièges (+ 2). Le parti de gauche radicale Vänsterpartiet (V : Parti de gauche) progresse légèrement en pourcents (de 5,7 % à 6,3 %, soit + 0,6 %), mais reste à 1 siège. Du côté des quatre partis dits bourgeois de la coalition en place, le bilan est mitigé. D’une part, le M recule, de 18,8 % à 13,7 % (– 5,1 %), et perd 1 siège (3 au lieu de 4). Le FP subit le même sort, perdant lui aussi 1 siège (2 au lieu de 3) en reculant de 13,6 % à 9,9 % (– 3,7 %). D’autre part, le KD est en progrès, de 4,7 % à 5,9 % (+ 1,2 %) ; il garde son unique siège. Il en va de même pour le C, qui progresse de 5,5 % à 6,5 % (+ 1,0 %) et garde son seul élu. Mais l’élection est surtout marquée par l’entrée de la formation nationaliste d’extrême droite eurosceptique Sverigedemokraterna (SD : Démocrates suédois) au Parlement européen. Ayant obtenu 9,7 % des suffrages (+ 6,4 %), elle dispose de 2 sièges. Enfin, un autre parti apparaît également dans l’hémicycle européen : la Feministikt Initiativ (Fi ou F! : Initiative féministe), avec 5,3 % des voix (+ 3,3 %) et 1 siège.

257Peu de temps après le scrutin européen, le 14 septembre 2014, se tiennent, comme tous les quatre ans, des élections législatives. Comme c’est le cas sans exception depuis 1914, le SAP arrive en tête. Avec 31,0 % des voix, en très léger progrès de + 0,3 % par rapport aux élections législatives précédentes s’étant tenues le 19 septembre 2010, il récolte 113 des 349 sièges du Riksdag, le parlement monocaméral suédois. Les grands perdants du scrutin sont sans conteste les partis de la coalition gouvernementale sortante : le M perd 23 sièges et 6,8 % des suffrages (ne conservant que 84 députés et 23,3 %) ; le C ne s’adjuge plus que 6,1 % et 22 sièges (– 0,5 % et – 1 siège) ; le FP 5,4 % et 19 sièges (– 1,7 % et – 5 sièges) ; et le KD 4,6 % et 16 sièges (– 1,0 % et – 3 sièges). À l’inverse, la victoire la plus nette est celle de la droite de la droite, le SD enregistrant une progression spectaculaire tant en voix (passant de 5,7 à 12,9 %) qu’en sièges (de 20 à 49). Les résultats du MP sont relativement stables, avec 25 sièges (statu quo) pour 6,9 % (– 0,4 %), de même que ceux de la gauche de la gauche, le V glanant 5,7 % des voix (+ 0,1 %) et 21 sièges (+ 2).

258À la suite du scrutin, le chef de gouvernement sortant, le conservateur F. Reinfeldt, cède sa place à Stefan Löfven (SAP), lequel forme un gouvernement avec, pour la première fois de son histoire, le MP. La coalition est largement minoritaire, ne rassemblant que 138 des 349 sièges, et le soutien extérieur du V au Parlement ne suffit pas à remédier à cette situation. En effet, en raison de la poussée de l’extrême droite, aucun des deux blocs (ni celui réunissant les partis du gouvernement sortant ni celui unissant ceux du nouveau gouvernement) ne parvient à rassembler une majorité. Les limites de cette situation se font sentir dès le mois de décembre 2014, lorsque le Riksdag refuse d’approuver le budget de l’État. À la suite de ce rejet, orchestré par les anciens partenaires gouvernementaux de l’Alliansen et le SD, le Premier ministre s’oriente vers des élections anticipées. Cette perspective est cependant abandonnée suite à un accord conclu entre la majorité et l’opposition entre Noël et le Nouvel An. Le « Decemberöverenskommelsen » (« Accord de décembre ») prévoit que, à l’avenir, les six partis traditionnels ne voteront pas à l’encontre d’un budget proposé par le gouvernement Löfven, et ce afin de contenir les velléités du SD. Cet accord tient trois ans, mais il est rompu à la fin de l’année 2017 par le départ du KD. Il permet néanmoins à la coalition minoritaire de se maintenir jusqu’aux élections législatives du 9 septembre 2018.

259Ce nouveau scrutin est marqué par le recul des deux principales forces politiques du pays. D’une part, le SAP : avec 28,3 % des voix et 100 sièges, il recule de 2,7 % et perd 13 sièges. D’autre part, le M, qui aura perdu dix points de pourcent en l’espace de deux élections : son résultat s’établit désormais à 19,8 % et 70 sièges (– 3,5 % et – 14 sièges). Pour la deuxième fois consécutive, le SD se hisse à la troisième place, recueillant 17,5 % des suffrages et 62 sièges (+ 4,6 % et + 13 sièges), ce qui le place cependant plus bas que les sondages ne le prédisaient. Suivent quatre plus petites formations, toutes en léger progrès : le C avec 8,6 % (+ 2,5 %) et 31 sièges ; le V – qui n’avait pas pris part aux accords de décembre 2014 – avec 8,0 % (+ 2,3 %) et 28 sièges ; le KD avec 6,3 % (+ 1,7 %) et 22 sièges ; et enfin, le L – le FP ayant entre-temps été rebaptisé Liberalerna (L : Libéraux) – avec 5,5 % (+ 0,1 %) et 20 sièges. Le MP subit un important revers et devient la plus petite formation représentée au Parlement avec 16 sièges, le partenaire mineur de la coalition sortante ne recueillant plus que 4,4 % des suffrages (– 2,5 %).

260Les résultats de ce scrutin débouchent donc à nouveau sur un Parlement divisé, avec 144 sièges pour les trois partis du bloc de gauche dit rouge-vert (le SAP et le MP de la coalition sortante, ainsi que le V, leur ancien allié) et 143 pour l’Alliansen (M, C, L, KD). Le 25 septembre, une motion de censure est votée à l’encontre du gouvernement sortant. Bien que l’Alliansen obtienne le soutien du SD lui permettant dès lors de former un gouvernement, C et L refusent cette alternative. De nombreux rebondissements, y compris la nomination de plusieurs candidats au poste de Premier ministre et, pour la première fois, une série de votes négatifs du Parlement sur les coalitions pressenties, aboutissent finalement à la reconduction de S. Löfven au poste de Premier ministre, le 18 janvier 2019. La coalition rouge-verte est désormais soutenue par le C et le L, une nouvelle fois dans le but avoué de faire barrage au SD. Ne disposant plus que de 116 sièges, le SAP et le MP sont amenés à faire un certain nombre de concessions à leurs soutiens : modifications du droit du travail, libéralisation du marché du logement, baisse de la fiscalité avec notamment une diminution du taux d’imposition pour les plus hauts revenus.

1.28.2. Résultats des élections européennes de mai 2019

261La Suède dispose de 21 sièges, soit + 1 par rapport à 2014 (20), siège supplémentaire qu’elle n’obtiendra toutefois qu’en cas de sortie effective du Royaume-Uni de l’UE. Le taux de participation est de 55,3 % en 2019, soit une hausse de la participation de + 4,2 % par rapport à 2014 (51,1 %), ce qui place le pays bien au-dessus de la moyenne européenne.

262Comme cela a été invariablement le cas depuis le premier scrutin européen organisé dans le pays en 1995, c’est le SAP qui s’impose. En légère baisse par rapport à 2014 (– 0,7 %), il récolte néanmoins encore 23,5 % des suffrages, ce qui lui permet de conserver ses 5 sièges. À la faveur d’une bonne progression (+ 3,1 % ; 16,8 %), le M retrouve la deuxième place qu’il avait occupée sans discontinuer jusqu’au scrutin de 2014 et récupère 1 siège, élevant son total à 4. Le SD suit une courbe de progression similaire à celle enregistrée au niveau national. En passant de 9,7 % à 15,3 %, il passe de 2 à 3 sièges. Le MP échoue quant à lui à réitérer son exploit de 2014 ; si le recul est plus impressionnant en sièges (il passe de 4 à 2) qu’en voix (de 15,4 % à 11,5 %), un strapontin lui sera néanmoins réattribué lors du départ des députés britanniques du Parlement européen si le Brexit se produit. Assez paradoxalement, l’action de la jeune militante écologiste Greta Thunberg ne semble pas s’être traduite dans les urnes par un vote pour le parti vert, du moins pas dans son propre pays. Au moins provisoirement, le MP dispose du même nombre de députés européens que le C, d’une part, qui le talonne en recueillant 10,8 % des suffrages (soit + 4,3 %), et que le KD, d’autre part, qui totalise 8,6 % des voix (+ 2,7 %). Tous deux s’adjugent un siège supplémentaire, ce que ne parvient pas à faire le V, dont le compteur reste bloqué à 1 avec un score de 6,8 % (+ 0,5 %). Le L ferme la marche des partis participant à la dévolution des sièges. Avec 4,1 % des voix, il franchit de justesse le seuil électoral de 4,0 % et ne conserve qu’un de ses 2 eurodéputés. Une des explications de la relative déroute de ce parti (– 5,8 %) est certainement à trouver dans le succès, en miroir, du C. Pour compléter cette comparaison des résultats de 2014 et de 2019, il convient enfin de signaler que le parti féministe Fi, qui avait bénéficié d’une très bonne visibilité en 2014, ne parvient pas à se maintenir au sein de l’assemblée européenne, en ne recueillant plus que 0,8 % des suffrages (– 4,7 %).

Tableau 29. Élection du Parlement européen. Résultats en Suède (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 29. Élection du Parlement européen. Résultats en Suède (en % et en sièges, 2014-2019)

Tableau 29. Élection du Parlement européen. Résultats en Suède (en % et en sièges, 2014-2019)

* En 2014, Folkpartiet Liberalerna (FL).

2. Principaux enseignements du scrutin

263De très nombreux pays ont connu des transformations majeures de leur paysage politique national entre l’élection européenne de mai 2014 et celle de mai 2019. Dans des pays comme la France ou l’Italie, les deux partis traditionnels qui formaient le socle d’un système bipartisan éprouvé se sont littéralement effondrés pour laisser place à de nouvelles forces politiques. Des pays que l’on pensait éloignés de la tentation de l’extrême droite comme l’Allemagne et l’Espagne ont vu des partis ultranationalistes faire leur entrée au parlement national  [43]. Et que dire alors du Royaume-Uni, où l’imbroglio politique sur le Brexit a potentiellement atteint un point de non-retour ?

264Dans une large mesure, de telles recompositions placent encore et toujours les élections européennes dans l’ombre des conflits politiques nationaux, ce qui a valu à celles-ci la qualification de scrutins de « second-ordre »  [44] – c’est-à-dire de scrutins considérés, à la fois par les électeurs, par les médias et par les partis politiques, comme revêtant une importance moindre que d’autres, a fortiori les élections nationales. Une explication commune de cet état de fait met en évidence que les électeurs sont davantage préoccupés par les problèmes nationaux et par les résultats obtenus par leur gouvernement national que motivés par des attitudes vis-à-vis de l’UE et des questions européennes. Bien que le consensus général soit que les attitudes et les enjeux européens aient progressivement gagné en importance – en particulier à mesure que l’intégration européenne devenait de plus en plus politisée et contestée –, les électeurs européens demeurent néanmoins moins familiarisés avec la politique à ce niveau et moins conscients des enjeux. En conséquence, d’une part, les électeurs sont moins susceptibles de se rendre aux urnes et d’autre part, quand ils s’y rendent, ils tendent à soutenir d’autres partis qu’aux scrutins nationaux  [45]. Avant de dégager les grands équilibres qui en découlent, un examen transversal des résultats d’un scrutin européen ne peut donc faire l’impasse sur une analyse de la participation et des comportements de vote.

2.1. La participation électorale

265Comme toujours dans le cas des élections européennes, la participation  [46] constitue un enjeu majeur ou, à tout le moins, un indicateur important de la mobilisation de l’électorat pour la « chose publique » européenne. Or, l’abstention avait été en hausse continue depuis le premier scrutin européen de 1979 jusqu’en 2014 : à chaque élection, sans exception, la participation de l’ensemble des citoyens européens était plus faible qu’à la précédente. Des taux de participation extrêmement bas avaient même été atteints lors du scrutin européen de mai 2014, en particulier dans certains pays d’Europe centrale et orientale : en Slovaquie (13,1 %), en République tchèque (18,2 %) et en Pologne (23,8 %) notamment. À cet égard, on observe en 2019, par rapport à 2014, une hausse au niveau de l’ensemble de l’UE (cf. Tableau 30). Si l’on place la focale au niveau des États, ce constat d’une participation rehaussée s’applique dans 20 des 28 États membres. Dans certains pays, des variations importantes à la hausse peuvent même être observées entre les scrutins de 2014 et 2019 : + 21,9 % en Pologne et + 18,7 % en Roumanie. Il n’en demeure pas moins que, dans 8 États, la participation continue de baisser, singulièrement en Bulgarie, où le vote vient pourtant d’être rendu obligatoire. Rappelons à ce propos que le vote est actuellement obligatoire dans cinq États membres : la Belgique, Chypre, la Grèce, le Luxembourg et, depuis 2016, la Bulgarie  [47].

266Les variations constatées doivent être mises en perspective. Dans certains États membres, d’autres scrutins ont en effet été organisés concomitamment aux élections européennes de mai 2019. Dans certains cas, il s’agissait d’élections de première importance, comme les élections fédérales, régionales et communautaires en Belgique ou l’élection présidentielle en Lituanie. Dans d’autres, il s’agissait de scrutins isolés ou aux enjeux plus mineurs, comme des élections régionales et locales (élections régionales dans le Land de Brême, renouvellement des parlements des Communautés autonomes et élections municipales en Espagne, élections municipales et référendum concomitants en Irlande, élections régionales et locales en Grèce, élections municipales dans la moitié des communes italiennes et du Conseil régional du Piémont). Dans d’autres encore, l’électeur avait déjà été invité à s’exprimer récemment, une situation étant généralement réputée peser négativement sur la participation : en Espagne, des élections générales s’étaient tenues fin avril ; en Slovaquie, une nouvelle présidente de la République avait été élue en mars.

Tableau 30. Taux de participation lors des élections européennes (en %, 1979-2019)

Tableau 30. Taux de participation lors des élections européennes (en %, 1979-2019)

Tableau 30. Taux de participation lors des élections européennes (en %, 1979-2019)

En grisé: scrutins pour lesquels le vote était obligatoire.
Source : Site du Parlement européen, Résultats officiels des élections européennes 2019, https://resultats-elections.eu.

2.2. Les comportements de vote 

267Participation en hausse, enjeux européens, Brexit, Spitzenkandidaten, etc. : comment tout cela s’est-il traduit (ou non) dans les urnes ? Le premier constat au niveau agrégé est immanquablement celui de la diversité des situations nationales, laquelle rend particulièrement difficile l’identification d’enseignements généraux : c’est en vain que l’on cherchera une « tendance lourde » qui traverserait les frontières. Les conclusions sont en fait très variables selon les pays, et on observe à première vue autant de « votes-sanctions » à l’égard du pouvoir en place dans les États membres (Estonie, Grèce, Lituanie, Roumanie, République tchèque, Royaume-Uni, Slovaquie) que de « votes-confirmations » (Autriche, Espagne, Hongrie, Irlande, Lettonie, Pologne, Portugal). Dans certains cas encore, les partis de gouvernement sont en recul mais conservent leur rang (Allemagne, Chypre, Croatie). Bien souvent, les partenaires de coalition subissent des sorts électoraux différents (Danemark, Finlande, Italie, Slovénie, Suède). Pour tenter d’analyser ces résultats plus en détails, le tableau 31 s’attache à retracer ces évolutions en comparant les scores obtenus par les principaux partis au pouvoir lors des élections européennes de 2019 avec le score obtenu lors des dernières législatives au niveau national  [48].

Tableau 31. Résultats électoraux des partis de gouvernement aux élections européennes de 2019 (en %)

Tableau 31. Résultats électoraux des partis de gouvernement aux élections européennes de 2019 (en %)

Tableau 31. Résultats électoraux des partis de gouvernement aux élections européennes de 2019 (en %)

Remarque : Ne sont repris que les partis représentés dans les gouvernements nationaux ; les partis qui soutiennent un gouvernement de l’extérieur sont donc exclus du tableau.
* En Finlande, des élections sont intervenues en avril 2019, mais le nouveau gouvernement n’a été formé qu’en juin 2019, c’est-à-dire après les élections européennes de mai 2019. Sont donc pris en considération les scores du KOK et du KESK au scrutin d’avril 2015, puisque c’est suite à celui-ci que ces deux partis ont pris part au gouvernement Sipilä. Ce dernier a également compris, dans un premier temps, le Perussuomalaiset (PS) mais celui-ci a été exclu du gouvernement en juin 2017 et a été remplacé par le Sininen Tulevaisuus (SIN) qui, étant le résultat d’une scission du PS intervenue à cette occasion, n’a pas eu à proprement parler de score électoral en avril 2015.
** Aux élections législatives, CU seul ; aux élections européennes, alliance électorale avec le Staatkundig Gereformeerde Partij (SGP).

268Tentons de dégager les principaux enseignements de ce tableau. Sur les 60 partis qui détenaient les rênes du pouvoir exécutif dans les États membres, 32 se voient sanctionner, alors que seulement 23 se voient confirmer  [49]. En affinant le constat aux partis perdant au moins 5 % dans les urnes depuis le dernier scrutin national, cela concerne 10 partis, alors que, dans le même temps, seules 5 formations politiques gagnent au moins 5 %. De même il n’y a guère que deux partis qui gagnent plus de 10 % à l’échelle de leur pays : la Lega en Italie et le Vienotība (V) en Lettonie, quand, en miroir, cinq autres formations connaissent le sort inverse. C’est pour le parti britannique Conservative and Unionist Party (Cons) que le message est le moins équivoque : ce parti réalise le plus mauvais score de son histoire et perd 33,1 % de l’électorat en l’espace de deux années. Il est également relativement limpide pour le Movimento Cinque Stelle (M5S) italien, le Partidul Social Democrat (PSD) roumain, le SMER - Sociálna Demokracia (Smer-SD) slovaque et, dans une moindre mesure, pour Synaspismós Rhizospastikís Aristerás (SYRIZA) en Grèce. Néanmoins, dans la plupart des pays, si sanction il y a, celle-ci est beaucoup moins nette, la plus grande part des déconvenues (17 sur 34) comme des remontées (16 sur 24) étant de faible ampleur. Les scores de certains partis sont même remarquablement stables, à l’instar de ceux du Partit Laburista (PL) maltais. À cet égard, alors que l’on s’attend généralement à ce que l’insatisfaction des citoyens s’exprime de manière plus claire en un vote à l’encontre du gouvernement lorsque celui-ci n’est composé que d’un seul parti (rendant l’identification du parti « responsable » de la situation du pays plus aisée), les résultats des élections européennes de mai 2019 sont extrêmement favorables aux formations politiques gouvernant seules : l’Österreichische Volkspartei (ÖVP) en Autriche, le Partido Socialista Obrero Español (PSOE) en Espagne, le Fidesz - Magyar Polgari Szovetseg / Kereszténydemokrata Néppárt (Fidesz–KDNP) en Hongrie, le Fine Gael (FG) en Irlande, le Prawo i Sprawiedliwość (PiS) en Pologne. Au vu de la stabilité du PL maltais et du Dimokratikos Synagermos (DISY) chypriote, seule la lourde défaite du Cons britannique semble contredire cette observation.

2.3. Les rapports de force au Parlement européen

269Comment ce (nouveau) rapport de force électoral se traduit-il (ou non) dans un nouvel équilibre des forces politiques au sein du Parlement européen ? Les résultats pays par pays et la formation relativement précoce des groupes politiques qui structurent le Parlement européen permettent de dégager une série d’enseignements.

270Le premier de ces enseignements porte incontestablement sur les gains électoraux engrangés par les forces eurosceptiques, à l’encontre desquelles les spéculations pré-électorales avaient une nouvelle fois servi d’avertissement. Il est indéniable que, au total, les populistes eurosceptiques ont nettement progressé. En Italie, la Lega est devenue la plus grande formation politique du pays. Mieux, dans les grands pays dans lesquels ils étaient déjà prééminents, les populistes ont réussi à se maintenir. En France, le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen – alors même que celle-ci ne se présentait pas en personne à l’élection – a non seulement réussi à battre la liste de la majorité présidentielle d’Emmanuel Macron, mais elle a par là même obtenu sa seconde victoire d’affilée à un scrutin européen. Le même exploit est à mettre au crédit de Nigel Farage au Royaume-Uni, qui réitère sa prouesse avec un autre parti qu’en mai 2014 : il s’agit cette fois du nouveau Brexit Party (BP), qui remporte plus d’un vote sur quatre outre-Manche.

271Malgré cela, les résultats de l’extrême droite sont variables : l’apparition ou le retour en force de certaines formations – le Forum voor Democratie (FvD) aux Pays-Bas, le Vlaams Belang (VB) en Belgique néerlandophone, le Sverigedemokraterna (SD) en Suède et l’Eesti Konservatiivne Rahvaerakond (EKRE) en Estonie – masquent mal le recul du Freiheitliche Partei Österreichs (FPÖ) en Autriche, de Laïkós Sýndesmos - Chrysí Avgí (XA : Aube dorée) en Grèce, du Dansk Folkeparti (DF) au Danemark ou la disparition de l’assemblé parlementaire européenne de l’UK Independence Party (UKIP) britannique (temporairement au moins) ou du Partij voor de Vrijheid (PVV) néerlandais.

272Mais alors que, auparavant, les partis de la droite de la droite, souvent d’essence nationaliste, se trouvaient généralement confrontés à la difficulté de former des groupes parlementaires cohérents, une série de rencontres et de tractations en amont permettent la création rapide du groupe Identité et démocratie (ID). Composé de neuf partis et 73 parlementaires, il prend la suite de celui du groupe de l’Europe des nations et des libertés (ENL). Quant à lui, l’autre grand groupe eurosceptique populiste mais moins aisément classable à l’extrême droite qui existait sous la législature précédente, l’Europe de la liberté et de la démocratie directe (ELDD), ne parvient pas à se maintenir du fait de la disparition de nombre de ses membres de l’assemblée européenne – le Strana Svobodných Občanů (Svobodní) tchèque, Les Patriotes (LP) français, le Tvarka ir Teisingumas (TT) lituanien et le Koalicja Odnowy Rzeczypospolitej Wolność i Nadzieja (KORWiN) polonais –, alors même que l’Alternative für Deutschland (AfD) allemande a rejoint le groupe ID et que le Brexit Party (BP) britannique ne constitue pas un allié fiable, puisque voué à quitter l’assemblée. Si l’on s’en tient à la distinction généralement admise entre eurosceptiques « hard » et « soft »  [50], l’analyse du succès des eurosceptiques doit alors également inclure les Conservateurs et réformistes européens (groupe CRE). La composante conservatrice perd du terrain, au niveau tant du nombre des députés (62 au lieu de 77) que de celui des partis représentés. Ainsi, si les partis qualifiés d’« eurosceptiques » sont sans doute, à l’échelle du Parlement européen, la composante qui progresse le plus, le phénomène doit être relativisé, notamment dans la mesure où bon nombre de commentateurs tendent à utiliser, sans beaucoup de discernement, les qualificatifs « eurosceptique », « nationaliste », « populiste » et « d’extrême droite ». Il n’en demeure pas moins que l’un des points d’interrogation qui accompagnent cette montée en puissance des formations politiques dites eurosceptiques réside dans leurs objectifs au Parlement européen et au-delà. Le processus du Brexit et la grande confusion qui règne encore dans sa mise en œuvre au moment d’écrire ces lignes semblent notamment avoir réduit au silence ces partis sur la question de rester ou non dans l’UE.

273Le deuxième enseignement du scrutin au niveau agrégé concerne la perte sèche subie par les deux plus grandes formations du Parlement européen : les chrétiens-démocrates et conservateurs réunis au sein du groupe Parti populaire européen (PPE) et les sociaux-démocrates de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates (S&D). S’ils passent de respectivement 216 et 185 dans l’assemblée sortante à 182 et 154 sièges lors de la session constitutive de 2019, leur sort électoral reste néanmoins largement enviable et leur permet de rester les deux premières familles politiques à l’échelle du continent. Les partis affiliés au PPE ont remporté le scrutin européen en Allemagne, en Autriche, en Belgique germanophone, en Bulgarie, à Chypre, en Croatie, en Finlande, en Grèce, en Hongrie, en Irlande, en Lettonie, en Lituanie, en Roumanie et en Slovénie, alors que, dans le même temps, les sociaux-démocrates se sont imposés en Belgique francophone, en Espagne, au Portugal, aux Pays-Bas et en Suède. Toutefois, pour la première fois depuis l’élection directe du Parlement européen, ces deux groupes se retrouvent dans l’incapacité de réunir à eux seuls une majorité des députés. Autrement dit, aucune législation ne pourra être adoptée au Parlement européen sur la seule base d’une entente entre ces deux formations, qui se retrouvent donc, pour la première fois, dans l’absolue nécessité de former des alliances. Cela ne signifie pas pour autant qu’un changement est forcément à prévoir dans la manière dont sont prises les décisions au Parlement européen : dans les faits, la « grande coalition » PPE/S&D n’avait déjà plus cours depuis 2016, et la plupart des textes étaient votés avec des majorités alternatives, incluant le plus souvent l’Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ALDE)  [51].

274C’est précisément le groupe ALDE qui est concerné par le troisième grand enseignement du scrutin. Le groupe des libéraux – renommé bon gré mal gré Renew Europe (RE) – progresse nettement, passant de 69 à 108 sièges. Il regagne ainsi sa troisième place, à la faveur des résultats favorables obtenus dans les grands États membres : Ciudadanos - Partido de la Ciudadanía (C’s) en Espagne, liste Renaissance en France  [52], liste Alianța 2020 USR–PLUS (USR–PLUS) en Roumanie  [53], Liberal Democrats (LibDems) au Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, Freie Demokratische Partei (FDP) en Allemagne. Mais il enregistre également une bonne progression dans nombre de « petits » États membres, comme au Danemark, en Estonie, en Lettonie, au Luxembourg, en République tchèque et en Slovaquie. Il est même fréquent que deux partis ou plus du même pays soient affiliés au groupe libéral : le Venstre (V) et le Radikale Venstre (RV) au Danemark, l’ensemble des partis ayant formé la liste Renaissance en France, le Volkspartij voor Vrijheid en Democratie (VVD) et les Democraten 66 (D66) aux Pays-Bas, le Centerpartiet (C) et le Liberalerna (L) en Suède.

275À ce décompte, auraient pu en outre être ajoutés au moins 2 des 3 sièges glanés par les indépendantistes catalans de Junts per Catalunya / Juntos por Cataluña (JxCat), au sort controversé : condamnés en Espagne, ils ne s’y sont pas rendus pour prêter serment comme le veut le code électoral espagnol, et il leur est dès lors interdit de siéger au Parlement européen. Pour comprendre l’influence possible du nouveau groupe centriste sur le système de décision européen, il faut par ailleurs prendre en compte la dynamique impulsée par les libéraux au Conseil européen et dans les autres instances intergouvernementales, où ils représentent quatre des six États fondateurs (Belgique, France, Luxembourg et Pays-Bas).

276À côté du succès des eurosceptiques et des libéraux, le scrutin consacre également un net progrès de la famille écologiste. Le Groupe des Verts/Alliance libre européenne (Verts/ALE) gagne + 22 sièges (passant de 52 à 74) en bénéficiant de l’effet du net rebond enregistré par les partis verts en Allemagne et en France (traditionnellement les délégations les plus importantes), mais également en Belgique francophone, au Danemark, en Finlande, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Le groupe n’est par contre que très peu épaulé dans sa progression par sa composante régionaliste, et ne peut toujours pas compter sur une véritable implantation en Europe centrale et orientale, à l’exception notoire de la Lettonie et de la Lituanie, où des formations politiques agrariennes se sont hissées aux plus hautes sphères du pouvoir au cours des dernières années.

277Enfin, les partis de la gauche de la gauche, regroupés au Parlement européen au sein du Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique (GUE/NGL), font partie des perdants du scrutin. Ils passent de 52 à 41 sièges. Alors que, dans le sillage de la crise de la zone euro en 2014, ils avaient su tirer leur épingle du jeu, Podemos - Por la Democracia Social (Podemos) en Espagne, Synaspismós Rizospastikís Aristerás (SYRIZA) en Grèce, le Komunistická Strana Čech a Moravy (KSČM) en République tchèque et même Die Linke (DL) en Allemagne perdent des plumes lors du scrutin de mai 2019. La GUE/NGL devient ainsi le plus petit groupe du Parlement européen.

Tableau 32. Répartition des députés européens élus en mai 2019, par État membre et par groupe politique au Parlement européen

Tableau 32. Répartition des députés européens élus en mai 2019, par État membre et par groupe politique au Parlement européen

Tableau 32. Répartition des députés européens élus en mai 2019, par État membre et par groupe politique au Parlement européen

* Les chiffres entre parenthèses correspondent aux trois députés catalans privés de leur siège.
Source : Site du Parlement européen - Résultats officiels.

278Somme toute, le bilan des forces politiques représentées dans le tableau 32 donne surtout à voir un Parlement européen davantage fragmenté qu’auparavant. Comme les précédents scrutins organisés à ce niveau, ces élections européennes de mai 2019 n’ont pas véritablement produit de changement radical quant à l’équilibre entre les groupes. La raison principale qui sous-tend ce constat est très certainement le fait que les recompositions du paysage politique, parfois d’ampleur significative au sein d’un État pris isolément, ne se produisent pas de concert entre les États, et tendent donc plutôt à se compenser. Par ailleurs, les mouvements en voix et en sièges dans les grands États sont logiquement plus à même de bousculer les grands équilibres au sein de l’assemblée, là où des bouleversements majeurs dans de petits États auront moins d’effet sur la dynamique de l’institution.

279Dès lors, les résultats annoncés au lendemain du scrutin sont bien souvent en trompe-l’œil. Dans une large mesure, les résultats de mai 2019 s’inscrivent en fait dans une tendance plus générale, également observée au niveau national et souvent exacerbée au niveau européen, de déclin des partis traditionnels, chrétiens-démocrates et sociaux-démocrates en tête. La perte de majorité que connaissent ces partis historiques n’est que la concrétisation d’un déclin amorcé il y a déjà bien longtemps. Pourtant, cette recomposition, bien que mathématiquement de faible ampleur, est à même de produire des effets assez nets dans le système politique européen. Elle élargit le champ des possibles des majorités, tout autant que l’horizon des deux grands groupes pris isolément, lesquels n’ont plus la solution de repli de la « grande coalition ». La constitution de la nouvelle Commission européenne et ses déboires illustrent à merveille ce qui attend le Parlement européen dans la législature à venir. Mais « déscotcher » les chrétiens-démocrates du PPE des sociaux-démocrates du S&D pourrait bien s’avérer positif à moyen terme, en rompant avec l’idée largement répandue que gauche et droite se confondent au niveau européen, et en repolitisant ainsi le Parlement européen.

280Bien d’autres analyses pourraient encore être dégagées en termes de représentation. L’une d’entre elles concerne la proportion de femmes parmi les eurodéputés lors de l’installation du Parlement européen, le 2 juillet 2019. Avec 302 femmes sur 751 députés  [54], soit 40,2 % de femmes (et même 40,4 % si on exclut du décompte les trois députés catalans privés de leur siège), le Parlement européen reste sous la barre des 50 % tout en continuant sa lente mais irrésistible progression (ce taux était de 16 % en 1979, de 18 % en 1984, de 19 % en 1989, de 26 % en 1994, de 30 % en 1999, de 31 % en 2004, de 35 % en 2009 et de 37 % en 2014).

281Les élections européennes de mai 2019 ont ainsi été particulières à plus d’un titre : du regain de participation au test potentiellement décisif du processus des Spitzenkandidaten, en passant par la perte de majorité des deux « grands ». Il s’agissait également du premier scrutin ne devant pas accommoder des nouveaux États membres et même, au contraire, devant permettre d’assurer la transition vers la sortie d’un État membre, à savoir le Royaume-Uni.

Notes

  • [*]
    L’auteure remercie Simon Willocq et Julien Navarro pour leur relecture attentive des différentes parties du présent Courrier hebdomadaire. Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet H2020 Reconnect.
  • [2]
    « Les élections européennes, 7-10 juin 1979 », Courrier hebdomadaire, n° 861, 1979 ; X. Mabille, « Les résultats des élections européennes de juin 1984 », Courrier hebdomadaire, n° 1043, 1984 ; É. Lentzen, X. Mabille, J. Vanlaer, « Les élections européennes de juin 1989 », Courrier hebdomadaire, n° 1242, 1989 ; P. Blaise, É. Lentzen, « Les élections européennes de juin 1994 », Courrier hebdomadaire, n° 1443-1444, 1994 ; C. Sägesser, « Les résultats des élections européennes de juin 1999 », Courrier hebdomadaire, n° 1678, 2000 ; T. Coosemans, « L’élection du Parlement européen de juin 2004 », Courrier hebdomadaire, n° 1843-1844, 2004 ; T. Coosemans, « Les résultats des élections européennes de juin 2009 dans les États membres », Courrier hebdomadaire, n° 2038, 2009 ; T. Coosemans, « Les résultats des élections européennes de mai 2014 dans les États membres », Courrier hebdomadaire, n° 2221-2222, 2014.
  • [3]
    Cf. V. Demertzis, « Élire le Parlement européen », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2211-2212, 2014, p. 62-79.
  • [4]
    Par exemple, la France a décidé de faire élire l’ensemble de ses députés européens au sein d’une circonscription unique en 2019, alors que le territoire français était découpé en huit circonscriptions auparavant.
  • [5]
    Décision (UE, Euratom) 2018/994 du Conseil du 13 juillet 2018 modifiant l’acte portant élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct, annexé à la décision 76/787/CECA, CEE, Euratom du Conseil du 20 septembre 1976.
  • [6]
    C’est donc l’acte du 20 septembre 1976 portant élection des représentants à l’Assemblée au suffrage universel direct qui prévaut (annexé à la décision 76/787/CECA, CEE, Euratom du Conseil et qui a été ensuite modifié par la décision 2002/772/CE, Euratom), ainsi que l’article 14 du Traité sur l’Union européenne (TUE) et les articles 20, 22 et 223 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).
  • [7]
    Décision (UE) 2018/937 du Conseil européen du 28 juin 2018 fixant la composition du Parlement européen, ST/7/2018/REV/1 (Journal officiel de l’Union européenne, L 165I, 2 juillet 2018).
  • [8]
    L’une des questions épineuses réside dans le calcul même de la population devant être représentée : résidents d’un État membre ? citoyens européens résidant dans un État donné (excluant du décompte ceux qui n’ont pas le droit de vote au scrutin européen) ? citoyens de l’État membre uniquement (puisqu’il est parfois, mais pas toujours, possible de voter depuis l’étranger) ? À cela s’ajoute la nécessité de prendre en compte l’évolution démographique.
  • [9]
    K. Reif, H. Schmitt, « Nine second-order national elections. A conceptual framework for the analysis of European elections results », European Journal of Political Research, volume 8, n° 1, 1980, p. 3-44.
  • [10]
    L. De Sio, M. Franklin, L. Russo, « Introduction », in L. De Sio, M. Franklin, L. Russo (dir.), The European Parliament elections of 2019, Rome, Luiss University Press, 2019, p. 9.
  • [11]
    Traité sur l’Union européenne (version consolidée), Journal officiel de l’Union européenne, C 326, 26 octobre 2012. Cf. V. Demertzis, « Vers une véritable élection du président de la Commission européenne par le Parlement européen ? », Les analyses du CRISP en ligne, www.crisp.be, 4 novembre 2013 ; V. Demertzis, « Élire le Parlement européen », op. cit., p. 14-15.
  • [12]
    Sur ces acteurs, cf. T. Coosemans, « Les partis politiques européens », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2201-2202, 2014 ; V. Demertzis, « Élire le Parlement européen », op. cit., p. 83-87.
  • [13]
    H. Döring, P. Manow, « Parliaments and governments database (ParlGov): Information on parties, elections and cabinets in modern democracies », 2019.
  • [14]
    Pour retracer ces évolutions, les fiches « pays » du portail d’information Toute l’Europe (www.touteleurope.eu) nous ont été d’une aide précieuse.
  • [15]
    Les partis politiques retenus dans les tableaux sont ceux qui ont obtenu au moins un siège en 2014 ou en 2019. Les tableaux précisent également à quel groupe politique au Parlement européen appartiennent les députés européens de chaque parti lors de la session inaugurale du Parlement européen, qui a eu lieu le 2 juillet 2019. Seuls sont ainsi repris les noms (et en l’occurrence : les acronymes) des groupes parlementaires tels que formés suite aux élections de mai 2019. Pour les partis ayant perdu toute représentation au Parlement européen en 2019, aucune affiliation au niveau européen n’est donc indiquée. Les nombres de sièges donnés entre parenthèses sont ceux après l’éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’UE.
  • [16]
    Par ailleurs, conformément à l’habitude du CRISP, les évolutions sont présentées en pourcents (et non en points de pourcent).
  • [17]
    Le seuil de 5 % pour l’attribution des sièges a été supprimé suite à un arrêt de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe.
  • [18]
    En 2013, et pour la première fois de son histoire, le FDP n’avait pas réussi à atteindre le seuil électoral de 5 % (4,8 %) et avait donc perdu sa représentation au Bundestag.
  • [19]
    La N-VA change alors de groupe politique au sein du Parlement européen en s’affiliant au groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE).
  • [20]
    Pour les résultats détaillés des autres scrutins, cf. P. Blaise, V. Demertzis, J. Faniel, C. Istasse, J. Pitseys, « Les résultats des élections régionales et communautaires du 25 mai 2014 » et « Les résultats des élections fédérales et européennes du 25 mai 2014 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2223-2224 et 2242-2243, 2014.
  • [21]
    Cf. V. Demertzis, J. Faniel, S. Govaert, C. Istasse, « La formation des gouvernements après les scrutins du 25 mai 2014 », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2275-2276, 2015.
  • [22]
    Il est à noter que, en plus des 56 sièges mis au vote lors du scrutin proportionnel, 3 sont réservés aux représentants des minorités et 24 autres à la communauté turque.
  • [23]
    Le 1er octobre 2017, a eu lieu référendum d’autodétermination de la Catalogne. Il s’est tenu à l’initiative du gouvernement régional de Catalogne – à commencer par le président de la Generalitat de Catalunya, Carles Puigdemont – et après avoir approuvé par le Parlement de Catalogne (le 6 septembre précédent), mais qui a été jugé illégal et même inconstitutionnel par le Tribunal constitutionnel espagnol (dès les 7 et 12 septembre, puis à nouveau le 17 octobre 2017). Avec un taux de participation de 42,4 %, le « oui » l’a emporté à 90,2 %. Le 10 octobre 2017, C. Puigdemont a annoncé l’indépendance, mais en indiquant qu’il suspendait celle-ci dans l’attente d’un dialogue avec le gouvernement espagnol. Le 27 octobre, le parlement catalan a proclamé l’indépendance (sous la forme d’une République), mais le gouvernement espagnol a alors mis la Catalogne sous tutelle, a destitué le parlement et le gouvernement régionaux et a lancé des élections régionales. Celles-ci, qui se sont tenues le 21 décembre 2017, ont donné une nouvelle majorité absolue aux partis indépendantistes. Entretemps, les dirigeants responsables du référendum et de la proclamation d’indépendance ont été accusés par la justice espagnole de « rébellion, sédition, détournement de fonds publics et désobéissance à l’autorité » ; certains d’entre eux se sont réfugiés à l’étranger, dont C. Puigdemont (à Waterloo, en Belgique).
  • [24]
    Si l’on considère que l’EKRE succède à l’Eestimaa Rahvaliit (ERL : Union populaire estonienne).
  • [25]
    Littéralement, le nom du parti signifie « Finlandais de base », « Finlandais ordinaires » ou « Finlandais simples » en français. Toutefois, le PS a choisi initialement de se faire appeler « True Finns » en anglais, ce qui a été traduit par « Vrais Finlandais » – et ce qui reste largement en usage (et cela bien que, depuis août 2011, le PS se fasse appeler « Finns Party » en anglais) – dans la littérature en langue française.
  • [26]
    Cf. notamment les travaux du politologue Pierre Martin, qui parle de « réalignement » du système partisan en France.
  • [27]
    Pour être exact, il faut porter au total des sièges du FG en 2014 celui obtenu par l’AOM qu’il soutenait, soit 4.
  • [28]
    Italia. Bene Comune (IBC : Italie. Bien commun) était une coalition rassemblant le PD, Sinistra Ecologia Libertà (SEL : Gauche Écologie Liberté), le Partito socialista italiano (PSI : Parti socialiste italien) et le Centro Democratico (CD : Centre démocrate).
  • [29]
    Alliance fondée le 20 avril 2018 en vue des élections législatives d’octobre, elle est composée de trois partis : Kustība « Par! » (PAR : Mouvement « Pour » !), Latvijas Attīstībai (LA : Développement letton) et Izaugsme (Croissance).
  • [30]
    Successeur du mouvement Nee2015 (Non 2015), créé lors du référendum constitutionnel de 2015 et qui prônait le « non » aux trois questions posées ( abaissement de l’âge d’obtention du droit de vote de 18 à 16 ans, extension du droit de vote aux étrangers ayant leur résidence dans le pays et limitation du mandat des membres du gouvernement à 10 ans), qui toutes avaient été largement rejetées.
  • [31]
    Lors des élections législatives, les sociaux-démocrates ont déjà devancé en voix à quatre reprises les chrétiens-démocrates (1928, 1948, 1964, 1974), mais jamais en sièges.
  • [32]
    Les élections législatives néerlandaises se déroulent dans une circonscription nationale unique, au scrutin proportionnel plurinominal. Il n’y a pas de seuil électoral (résultat minimum nécessaire pour pouvoir participer à la répartition des sièges), si ce n’est le seuil électoral naturel de 1/150e, soit 0,67 %.
  • [33]
    Depuis la deuxième élection directe du Parlement européen en 1984, les partis eurosceptiques protestants orthodoxes font liste commune : le SGP, la Reformatorische Politieke Federatie (RPF : Fédération politique réformatrice) et la Gereformeerd Politiek Verbond (GPV : Ligue politique réformée) entre 1984 et 2004, et le cartel CU–SGP depuis lors suite à la fusion de la RPF et de la GPV dans la CU.
  • [34]
    Le PiS a bien gouverné seul pendant 6 mois entre 2005 et 2006, mais il s’agissait alors d’un gouvernement minoritaire.
  • [35]
    Si un premier projet de loi pouvant être assimilé à une interdiction pure et dure avait « avorté » suite à d’importantes manifestations à l’automne 2016, sa seconde mouture, présentée en janvier 2018, vise à rendre illégales les interruptions volontaires de grossesse (IVG) en cas de malformation du fœtus.
  • [36]
    En 2014, le PZ ne s’était présenté que dans quelques circonscriptions ; il avait obtenu 0,3 % des suffrages.
  • [37]
    Le Royaume-Uni le permet également lors du scrutin européen, mais son système de circonscriptions n’a jamais permis de faire élire un député européen indépendant.
  • [38]
    Rappelons qu’il s’agit du second référendum de ce type, puisqu’un premier avait été organisé sur le maintien du pays dans les Communautés européennes dès 1975, deux ans et demi seulement après son adhésion.
  • [39]
    À l’échelle de l’Écosse : 36,9 %, soit – 13, 1 %.
  • [40]
    Date requise pour que les Britanniques approuvent l’accord, et qui aurait conduit à une sortie effective le 22 mai 2019.
  • [41]
    Seulement à égalité avec la CDU-CSU en Allemagne, si on additionne les sièges des deux formations, la CDU ayant décroché 23 sièges et la CSU 6.
  • [42]
    Le SDKÚ-DS a été dissous en 2018 suite aux élections législatives de 2016, qui l’ont vu perdre toute représentation parlementaire.
  • [43]
    Cf. notamment B. Biard, « L’extrême droite en Europe occidentale (2004-2019) », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 2420-2421, 2019.
  • [44]
    K. Reif, H. Schmitt, « Nine second-order national elections », op. cit. ; K. Reif, « National electoral cycles and European elections 1979 and 1984 », Electoral Studies, volume 3, n° 3, 1984, p. 244-255 ; C. van der Eijk, M. Franklin, « Choosing Europe? The European electorate and national politics in the face of Union », Ann Arbor, University of Michigan Press, 1996 ; M. Marsh, « Testing the second-order election model after four European elections », British Journal of Political Science, volume 28, n° 4, 1998, p. 591-607 ; H. Schmitt, « The European Parliament elections of june 2004: still second-order? », West European Politics, volume 28, n° 3, 2005, p. 650-679.
  • [45]
    Sur les élections européennes de 2019, cf. N. Bolin, K. Falasca, M. Grusell, L. Nord (dir.), Euroflection. Leading academics on the European elections 2019, DEMICOM, Report n° 40, 2019, https://euroflections.se.
  • [46]
    Le taux de participation est ici entendu comme la proportion des électeurs inscrits qui se sont rendus aux urnes, qu’ils aient émis un vote valable ou non.
  • [47]
    Tel a également été le cas en Italie jusqu’en 1993.
  • [48]
    Un tel exercice présente inévitablement un certain nombre de limites. La première concerne les changements d’alliance et les formations et désagrégations de coalitions électorales, qui rendent quasiment impossible l’exercice de retracer les scores exacts de certaines des formations politiques. Dans nombre de pays, le scrutin européen a en outre coïncidé, ou était proche, d’un scrutin national, avec parfois comme conséquence de ne pas avoir de gouvernement ou d’avoir un gouvernement en affaires courantes au moment du scrutin, comme cela a été le cas en Belgique, en Espagne et en Finlande.
  • [49]
    Les partis croates sont exclus de l’analyse, du fait de leur appartenance à de larges coalitions lors des scrutins précédents. De même, en Belgique, le Mouvement réformateur (MR), le Christen-Democratisch en Vlaams (CD&V) et l’Open Vlaamse Liberalen en Democraten (Open VLD) ne sont pas pris en compte dans le calcul des sanctions et/ou confirmations, puisque les élections fédérales ont eu lieu le même jour que le scrutin européen. À titre de comparaison, en mai 2014, le MR avait obtenu 9,6 % à l’échelle nationale, le CD&V 11,6 % et l’Open VLD 9,8 %.
  • [50]
    Distinction introduite par P. Taggart, A. Szczerbiak, « Europeanisation, euroscepticism and party systems: Party-based euroscepticism in the candidate states of Central and Eastern Europe », European Journal of Political Research, volume 43, n° 1, 2004, p. 1-27.
  • [51]
    Cf. Fondation Robert Schuman, « La 9e législature européenne, une nouvelle donne politique », Question d’Europe, n° 525, juillet 2019.
  • [52]
    Constituée en particulier de La République en marche (LREM), du Mouvement démocrate (MoDem) et d’Agir, la droite constructive (Agir).
  • [53]
    Constituée de l’Uniunea Salvați România (USR) et du Partidul Libertății, Unității și Solidarității (PLUS).
  • [54]
    Chiffres officiels du Parlement européen : www.europarl.europa.eu.
  1. Introduction
  2. 1. Résultats des élections européennes par État membre
    1. 1.1. Allemagne
      1. 1.1.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.1.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    2. 1.2. Autriche
      1. 1.2.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.2.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    3. 1.3. Belgique
      1. 1.3.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.3.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    4. 1.4. Bulgarie
      1. 1.4.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.4.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    5. 1.5. Chypre
      1. 1.5.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.5.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    6. 1.6. Croatie
      1. 1.6.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.6.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    7. 1.7. Danemark
      1. 1.7.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.7.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    8. 1.8. Espagne
      1. 1.8.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.8.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    9. 1.9. Estonie
      1. 1.9.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.9.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    10. 1.10. Finlande
      1. 1.10.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.10.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    11. 1.11. France
      1. 1.11.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.11.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    12. 1.12. Grèce
      1. 1.12.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.12.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    13. 1.13. Hongrie
      1. 1.13.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.13.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    14. 1.14. Irlande
      1. 1.14.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.14.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    15. 1.15. Italie
      1. 1.15.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.15.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    16. 1.16. Lettonie
      1. 1.16.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.16.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    17. 1.17. Lituanie
      1. 1.17.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.17.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    18. 1.18. Luxembourg
      1. 1.18.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.18.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    19. 1.19. Malte
      1. 1.19.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.19.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    20. 1.20. Pays-Bas
      1. 1.20.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.20.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    21. 1.21. Pologne
      1. 1.21.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.21.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    22. 1.22. Portugal
      1. 1.22.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.22.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    23. 1.23. République tchèque
      1. 1.23.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.23.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    24. 1.24. Roumanie
      1. 1.24.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.24.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    25. 1.25. Royaume-Uni
      1. 1.25.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.25.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    26. 1.26. Slovaquie
      1. 1.26.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.26.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    27. 1.27. Slovénie
      1. 1.27.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.27.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
    28. 1.28. Suède
      1. 1.28.1. Élections européennes de 2014 et évolution politique
      2. 1.28.2. Résultats des élections européennes de mai 2019
  3. 2. Principaux enseignements du scrutin
    1. 2.1. La participation électorale
    2. 2.2. Les comportements de vote 
    3. 2.3. Les rapports de force au Parlement européen

Du 23 au 26 mai 2019 s’est déroulée, dans les 28 États membres de l’Union européenne, l’élection des députés destinés à composer le Parlement européen pour la nouvelle législature 2019-2024. Dans un premier temps, les eurodéputés seront au nombre de 751. Ensuite, en cas de Brexit, une partie des 73 sièges britanniques seront réattribués à une série d’États membres (à commencer par l’Espagne, la France, l’Italie et les Pays-Bas), tandis que les autres seront purement et simplement supprimés ; au total, l’assemblée européenne ne sera plus constituée que de 705 membres.

Quelque 247 millions d’électeurs étaient appelés aux urnes, dont 50,7 % ont effectivement pris part au vote. Le taux de participation a ainsi connu un fort essor, au point d’être le plus élevé des deux dernières décennies. Pour autant, sa faiblesse montre que les élections européennes demeurent un scrutin auquel les citoyens n’accordent qu’un intérêt secondaire. Une « campagne européenne » avait pourtant été organisée par les partis politiques européens autour de leurs candidats au poste de président de la Commission européenne. Mais il est vrai qu’elle s’était déroulée dans une certaine confusion, le Conseil européen ayant refusé d’adhérer au principe des Spitzenkandidaten ; surtout, elle n’avait guère eu d’écho dans l’opinion publique.

Dans chacun des États membres, ces élections européennes ont malgré tout constitué un moment fort de la vie politique, les enjeux et les résultats du scrutin étant partout analysés en fonction de la conjoncture politique nationale. Camille Kelbel reprend, pour chacun des 28 pays, l’évolution de la situation politique depuis l’élection européenne de mai 2014 et, plus particulièrement, les résultats des scrutins nationaux intervenus depuis lors. Elle compare ensuite les résultats de l’élection de mai 2019 à ceux de 2014.

Mis en ligne sur Cairn.info le 16/01/2020
https://doi.org/10.3917/cris.2431.0005
ISBN 9782870752241
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour CRISP © CRISP. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...