CAIRN.INFO : Matières à réflexion

INTRODUCTION

1Le 23 janvier 2007, le Parlement de la Communauté française a adopté un décret relatif au statut des directeurs des établissements de l’enseignement fondamental, secondaire et de promotion sociale. Celui-ci a été promulgué par le gouvernement le 2 février 2007 et publié au Moniteur belge le 15 mai 2007.

2Dès la fin de la Première Guerre mondiale une première réglementation du rôle des « chefs d’école » est définie dans un arrêté royal ; quelques années plus tard, un autre arrêté aborde la mission de contrôle du personnel qui incombe aux chefs d’école. Un premier statut, défini par un arrêté royal également, est rédigé pour l’enseignement de l’État ; il est toujours d’application à ce jour, bien que modifié à divers moments, pour le personnel relevant du réseau de la Communauté française. L’enseignement catholique définit ses propres règles en 1976 via son Règlement général.

3En 1991, l’appellation « chef d’école » est transformée en « directeur ». Au-delà du changement sémantique, c’est la fonction qui évolue, désormais très voisine du management. Les « statuts » des personnels de l’enseignement libre subventionné en 1993 et de l’enseignement officiel subventionné en 1994, établis par décrets, règlent les conditions d’accès à la fonction de directeur. Il faut cependant attendre d’autres décrets-cadres organisant l’enseignement obligatoire pour trouver traces de missions particulières incombant aux directeurs. Entre 2000 et 2002, le ministre Jean-Marc Nollet (Écolo) tente de répondre à cette problématique pour l’enseignement fondamental via des circulaires. Les législations sont donc éparses et partielles, et touchent seulement certains niveaux d’enseignement.

4Le processus qui a mené à l’adoption du décret relatif au statut du directeur est enclenché en 2002 par le ministre Rudy Demotte (PS), bientôt remplacé par Christian Dupont. Des consultations informelles ont lieu jusqu’en décembre 2003. Les différents acteurs de l’enseignement expriment leurs attentes et leurs revendications face à une première mouture de texte disponible dès mai 2002. Une bonne année de discussions ne permet pas de dégager un consensus, bien que le texte officiellement déposé auprès des partenaires sociaux en février 2004 soit très différent du texte de départ compte tenu des interventions des fédérations de pouvoirs organisateurs et des associations de directeurs, surtout du côté de l’enseignement catholique. Les principaux reproches des fédérations de pouvoirs organisateurs du subventionné concernent la limitation de la liberté des réseaux de choisir leurs cadres. Les associations de directeurs, elles, voient dans le projet ministériel une mainmise renforcée des organisations syndicales. Mais ce dossier éminemment sensible est mis au frigo en attendant les élections régionales et communautaires du 13 juin 2004.

5L’accord de gouvernement qui lie PS et CDH au lendemain des élections, puis le Contrat pour l’école, remettent le texte en débat. En mai 2006, le gouvernement adopte un avant-projet en première lecture et le propose à la négociation officielle aux organisations syndicales et à la concertation officielle avec les fédérations de pouvoirs organisateurs. Les associations de directeurs et les fédérations de pouvoirs organisateurs manifestent à nouveau leur opposition bien que le gouvernement ait tenu compte d’une partie de leurs remarques. Le Parlement tranche finalement en leur faveur en adoptant une série d’amendements relayant leurs préoccupations.

1. LES PREMIÈRES FORMES D’ENCADREMENT DE LA FONCTION DE DIRECTEUR

6Les premières dispositions légales touchant les directions d’établissement (appelées alors chefs d’école dans l’enseignement primaire) datent de 1919. Elles ne concernent que les normes de subventionnement de cette fonction relatives au nombre d’élèves. Les premières dispositions à caractère pédagogique et de gestion d’équipe éducative datent de 1928. Elles imposent aux chefs d’école de tenir un journal de classe dans lequel ils exposent succinctement le programme de leurs occupations journalières :

  • visites de classe : avancement des élèves, constatations, composition et niveau de la classe, travail du maître, méthodes, observations, améliorations nécessaires, conseils donnés ;
  • réunions des membres du personnel enseignant (objet, questions posées, interprétation du programme, réunion des familles, œuvres diverses de l’école).

7On ne trouve plus de réglementation concernant les directions d’école avant 1969. Un arrêté royal du 22 mars 1969 aborde la problématique des directions du réseau d’enseignement de l’État et sera maintenu par de la Communauté française lors du transfert de l’enseignement aux communautés en 1988. Il concerne la procédure d’appel à candidature et les conditions de titre et d’ancienneté pour prétendre à une fonction de direction.

8Par ailleurs, en 1976, l’enseignement catholique, dans le Règlement général du personnel de l’enseignement catholique, dresse un tableau des missions incombant aux directions tant au niveau fondamental que secondaire du réseau. Ce sont essentiellement des tâches administratives et de gestion relationnelle qui sont visées :

9

« Le directeur est chargé de la gestion journalière de l’établissement et plus précisément :
- de la direction et du contrôle des études ;
- du maintien de l’ordre et de la discipline ;
- de l’administration interne de l’école ;
- des devoirs imposés par les relations de l’établissement avec les diverses autorités et avec les parents des élèves. »

10Le 29 mai 1991, un arrêté de l’exécutif de la Communauté française modifie l’appellation « chef d’école » pour l’enseignement fondamental en « directeur d’école », appellation déjà usitée dans l’enseignement secondaire.

11Il faut mentionner que les directeurs d’école sont concernés par les décrets définissant le statut du personnel enseignant  [1]. Il s’agit, pour l’enseignement libre subventionné, du décret du 1er février 1993  [2] en ses articles 55 à 61 ; et pour l’enseignement officiel subventionné, du décret du 6 juin 1994  [3] en ses articles 45 à 52.

12Dans ces deux décrets, sont définies les conditions générales de nationalité, de volume de charge, de titre de capacité, d’ancienneté. Elles sont sensiblement les mêmes que celles prévues, pour le réseau de la Communauté française, par le décret du 6 juin 1994, à l’exception de l’obligation suivante qui n’y figure pas : avoir suivi au préalable une formation spécifique sanctionnée par un certificat de fréquentation (pour tout engagement d’au moins 15 semaines). Dans le même ordre d’idée, un décret relatif aux fonctions de promotion et de sélection, promulgué en janvier 1999  [4] dresse la liste des conditions de titre, d’ancienneté, de formation pour les candidats directeurs notamment. Mais n’est applicable qu’au seul réseau de la Communauté française.

13Un pas important est franchi avec le décret Missions  [5] de 1997, qui confie explicitement des missions pédagogiques au directeur d’établissement en en faisant un membre de droit du conseil de participation dans l’enseignement subventionné et même le président dans l’enseignement du réseau Communauté française. Ce conseil de participation, regroupant l’ensemble des partenaires de la communauté éducative locale, assume essentiellement des missions pédagogiques dont l’élaboration du projet d’établissement. En outre, c’est le directeur qui rédige le rapport d’activités en matière d’initiatives pédagogiques, d’inscription des élèves, de gestion des dossiers disciplinaires des élèves.

2. SOUS LA LÉGISLATURE ARC-EN-CIEL

14Des circulaires à destination de l’enseignement fondamental ont commencé à encadrer les aspects pédagogiques, de gestion de ressources humaines, puis de gestion administrative de la fonction de directeur ; ensuite c’est une volonté de légiférer pour donner un statut complet à la fonction qui est apparue à l’initiative du ministre Rudy Demotte. L’initiative, reprise par son successeur Christian Dupont, n’aboutira cependant pas sous cette législature.

2.1. DES CIRCULAIRES POUR L’ENSEIGNEMENT FONDAMENTAL

15Plusieurs circulaires diffusées entre mai 2000 et mai 2002  [6] témoignent du souci du gouvernement arc-en-ciel de la Communauté française de trouver des réponses aux demandes des organisations syndicales et, notamment, de la Fédération des instituteurs chrétiens (FIC) qui affilie un grand nombre de directeurs dans les trois réseaux. La FIC souhaite d’une part protéger les directeurs des dérives dans le chef de certains pouvoirs organisateurs et, d’autre part, protéger les membres du personnel face à l’incompétence de certaines directions. Ces circulaires sont l’œuvre du ministre Jean-Marc Nollet, ministre de l’Enfance chargé de l’Enseignement fondamental, de l’Accueil et des Missions confiées à l’ONE (Écolo) et ne concernent donc que le seul enseignement fondamental. Y sont abordées et développées l’animation pédagogique et la gestion des ressources humaines, de même que l’administration et la gestion de l’établissement. Mais les enjeux sont immédiatement perçus par les acteurs du monde de l’enseignement qui se mobilisent pour faire pression sur l’élaboration du texte.

16En matière pédagogique et de gestion des ressources humaines, les circulaires prévoient que :

17

« La direction de l’école favorise l’émergence et la construction des projets, élaborés en commun, vécus, évalués et réajustés par l’ensemble des acteurs ; elle participe à la rénovation des pratiques pédagogiques au service de tous et ce, sur base des socles de compétences. Elle met en place l’harmonisation et la cohérence des contenus et de leurs modes d’approche. L’évolution de la recherche dans le domaine pédagogique conduit la direction à s’informer et à favoriser l’information de ses collaborateurs. Elle organise la concertation et s’assure que celle-ci soit menée en fonction d’objectifs fixés. Elle favorise la formation continuée de tous les membres du personnel ; elle réserve une particulière attention à la construction de la démocratie, tant au niveau des adultes que des enfants. Elle amène les membres d’une communauté éducative à échanger et à confronter leurs idées en vue de dégager une synthèse d’action commune, demande à la directrice, au directeur, des compétences où prime la ualité des relations humaines. »

18 Au niveau des missions en matière administrative et de gestion de l’établissement, on relève que :

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« Lire, synthétiser et appliquer à son établissement une législation complexe sur la base de la délégation reçue de son pouvoir organisateur constitue également une mission particulière de la directrice, du directeur, mission qui s’exercera dans un contexte de participation. La gestion de l’établissement implique de traiter les questions administratives (notamment le contrôle des registres de fréquentation) et sociales, la circulation de l’information sous toutes ses formes (comme les circulaires, la documentation pédagogique…), l’organisation matérielle, l’intendance (…) La direction de l’école peut se faire produire les documents attestant de la préparation des cours et activités éducatives des institutrices et instituteurs de l’enseignement maternel, primaire, des maîtres d’adaptation, des maîtres d’éducation physique et de seconde langue (décret-cadre du 13 juillet 1998, articles 18,19,20). La gestion de l’établissement implique aussi de développer un climat de confiance, d’écoute et de collaboration avec les parents, et ce, notamment, au moment de l’inscription de nouveaux élèves. »

20 Ces circulaires, outre le fait qu’elles ne concernent que l’enseignement fondamental, s’adressent à tous les réseaux mais ne sont en rien contraignantes.

2.2. UNE PROPOSITION DE STATUT

21Le 30 avril 2002, Rudy Demotte, ministre de la Communauté française chargé de la Culture, du Budget, de la Fonction publique, de la Jeunesse et des Sports  [7] fait part aux médias de son intention d’élaborer un « statut des directeurs » s’articulant autour de trois axes (administratif, pédagogique et relationnel) ; ce statut prévoirait un mandat limité dans le temps (cinq ans, à l’issue desquelles, le directeur serait muté dans un autre établissement) et une formation spécifique préalable à l’engagement mais aussi une lettre de mission.

22Il ne s’agit encore que d’une note d’intention, mais l’architecture générale du futur décret est en place et ne variera plus dans le temps au-delà même de la majorité arc-en-ciel. Le ministre en avertit par courrier toutes les directions, présentant son projet comme « visant à doter les membres de votre profession d’un statut propre » et déclarant que les directeurs sont « la véritable cheville ouvrière de l’école ». Il souhaite, ajoute-t-il, « intégrer vos contributions avant d’entamer, en septembre, les rencontres officielles avec les organisations syndicales et les représentants des pouvoirs organisateurs ».

23De mai à septembre 2002, le ministre procède à diverses consultations et nourrit un espoir de voir le dossier aboutir rapidement. Il modifie sa note d’intention en intégrant les divers avis récoltés auprès des partenaires concernés : syndicats, associations de directeurs et pouvoirs organisateurs.

24Une première version d’un avant-projet de statut du directeur est officiellement communiquée aux partenaires sociaux le 14 janvier 2003. Elle aborde les grands enjeux du futur statut, à savoir : la formation préalable et sa certification, en rapport avec les missions et les compétences attendues, le stage et l’évaluation des candidats en rapport avec leurs missions, la lettre de mission, l’autonomie des réseaux et la liberté d’engagement des pouvoirs organisateurs et le contrôle syndical.

25Le ministre Christian Dupont va succéder à Rudy Demotte, ce dernier quittant le gouvernement de la Communauté française pour occuper au niveau fédéral la fonction de ministre des Affaires sociales et de la Santé dans le gouvernement Verhofstadt II mis sur pied le 12 juillet 2003.

2.3. L’AVANT - PROJET DEMOTTE

2.3.1. Missions et compétences attendues

26Les missions se déclinent selon trois axes : l’axe relationnel, l’axe administratif, matériel et financier, et l’axe pédagogique et éducatif.

27Le premier axe est l’axe relationnel (articles 7 à 9). Il concerne la gestion et la coordination de l’équipe pédagogique, la gestion prévisionnelle des personnels, l’organisation des services de l’ensemble des personnels, la coordination de leur travail en leur fixant des objectifs. Dans cette optique, « le directeur suscite l’esprit d’équipe, veille au développement de la communication et du dialogue avec l’ensemble des acteurs de l’établissement scolaire et gère les conflits. Il doit également veiller à l’accueil et à l’intégration des nouveaux personnels ainsi qu’à l’accompagnement des personnels en difficulté ». Cet axe relationnel s’étend aussi aux élèves, aux parents, aux tiers : intégration des élèves, orientation, encouragement de leur « expression citoyenne », respect du règlement d’ordre intérieur. Le directeur représente l’établissement vis-à-vis de l’extérieur, coordonne les relations avec les PMS, établit des partenariats avec le monde socio-économique et socioculturel local (organismes de protection de la jeunesse et de l’aide à l’enfance).

28L’axe administratif est développé dans l’article 10. Il s’agit pour le directeur de faire appliquer et respecter les textes légaux, décrétaux et réglementaires ; il transmet les documents requis à l’Autorité publique ; il organise les horaires et les attributions des membres du personnel, gère les dossiers des élèves ; il veille au bon fonctionnement des organes de démocratie sociale et de participation ; il gère les ressources matérielles et financières de l’établissement, veille à l’application des consignes de sécurité et d’hygiène.

29L’axe pédagogique est couvert par l’article 11. C’est au directeur que revient d’animer la politique pédagogique et éducative de l’établissement ; il « met en œuvre et pilote le projet d’établissement » et veille à le faire en concertation avec l’équipe éducative ; il « s’assure de l’adéquation entre les apprentissages, les socles de compétence, les compétences terminales, les profils de formation et les programmes » ; il travaille en collaboration avec l’inspection « dans le respect de la liberté pédagogique du pouvoir organisateur dans l’enseignement subventionné ».

30L’article 13 dresse la liste des compétences attendues d’un directeur :

31

« Pour l’accomplissement des missions relevant de l’axe relationnel, la formation du directeur vise à développer chez ce dernier des aptitudes relationnelles, en particulier la gestion des ressources humaines.
Dans ce cadre, le directeur doit notamment acquérir les compétences suivantes :
- savoir évaluer son action et celle des personnels ;
- savoir repérer les forces et les difficultés chez les personnels ;
- savoir prendre des décisions et assumer ses responsabilités, en faisant accepter celles-ci dans la transparence ;
- être capable d’agir avec tact, discrétion et équité ;
- être capable de se maîtriser et de gérer le stress face à des situations imprévues ou complexes ;
- savoir valoriser et accompagner les personnels ;
- savoir se montrer disponible pour les membres du personnel et être à leur écoute ;
- savoir travailler en équipe et créer les conditions de ce mode d’action ;
- être capable de déléguer ;
- savoir créer un climat de confiance et de convivialité ;
- savoir faire preuve d’écoute et de créativité ;
- savoir fixer des objectifs à son équipe, élaborer et mettre en œuvre des stratégies et réguler l’action ;
- savoir communiquer avec clarté, rigueur et précision tant oralement que par écrit ;
- savoir diriger une réunion et prendre la parole en public ;
- savoir dialoguer avec les « élèves, les parents, être disponible et à l’écoute de leurs préoccupations. Les impliquer dans la vie de l’école ;
- savoir appliquer avec discernement et équité le règlement d’ordre intérieur ;
- savoir motiver l’équipe éducative en vue d’intégrer des actions sociales, culturelles, sportives de la vie locale ou régionale. »

32L’article 14 a trait à l’axe administratif.

33

« Dans ce cadre, le directeur doit notamment acquérir les compétences suivantes :
- connaître l’organisation générale de la Communauté française, les structures d’organisation de l’enseignement des différents réseaux ;
- savoir identifier et reconnaître la hiérarchie des normes ;
- être capable de rechercher, analyser et synthétiser les documents officiels ;
- connaître les dispositions légales, décrétales et réglementaires applicables à l’organisation de l’enseignement ;
- connaître les champs de compétences du directeur et de chacun de ses interlocuteurs habituels ;
- savoir identifier les besoins matériels et établir des priorités ;
- maîtriser l’aspect comptable et la matière des marchés publics ;
- savoir utiliser les nouvelles technologies de l’information et de la communication ;
- apprécier les conditions de mise en jeu de sa responsabilité, de celle de l’école ou de l’établissement et du gouvernement ou du pouvoir organisateur ;
- connaître les dispositions statutaires applicables aux membres du personnel dont le directeur assure la coordination ;
- savoir identifier les ressources extérieures et établir des synergies dans le cadre des relations extérieures à l’établissement. »

34

« Pour l’accomplissement des missions relevant de l’axe pédagogique et éducatif, la formation du directeur vise à développer chez ce dernier des aptitudes pédagogiques et porte notamment sur les objectifs généraux de l’enseignement, leur mise en œuvre, les socles de compétences, les compétences terminales, les profils de formation, les compétences transversales, la pédagogie différentiée, l’évaluation formative et certificative, la sanction des études ainsi que sur les courants actuels de la pédagogie, l’enseignement spécial et l’enseignement à horaire réduit, les discriminations positives, la prévention de la violence, la problématique des élèves majeurs, l’évaluation d’une séquence pédagogique et de l’efficacité des membres du personnel. »

35Dans ce cadre, le directeur doit notamment acquérir les compétences suivantes :

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  • savoir promouvoir les choix pédagogiques et les actions concrètes reprises dans le projet d’établissement ;
  • savoir mobiliser et animer l’équipe éducative ;
  • savoir évaluer la portée de l’action pédagogique de l’équipe éducative et la conseiller pour mener une politique éducative cohérente ;
  • s’informer des innovations pédagogiques et méthodologiques ;
  • savoir écouter l’équipe éducative pour réactualiser le projet d’établissement en concertation avec elle (article 15).

2.3.2. Organisation et certification de la formation des directeurs

37L’acquisition de ces compétences passe par une formation ad hoc. Celle-ci est calquée sur les exigences définies dans le réseau de la Communauté française :

  • la formation comporte deux volets : un volet commun à l’ensemble des réseaux et un volet propre à chaque réseau ou pouvoir organisateur (article 16) ;
  • la formation commune à l’ensemble des réseaux comptera entre 100 et 150 heures et visera essentiellement à l’acquisition des compétences liées à l’axe relationnel et à l’axe administratif (article 17) ;
  • la formation propre à chaque réseau comptera entre 100 et 150 heures et visera à l’acquisition des compétences liées à l’axe éducatif et pédagogique et à l’axe administratif, matériel et financier propre au réseau (article 18) ;
  • cette formation est gratuite et se déroule en principe en dehors des périodes de fonctionnement normal des établissements (article 19) ;
  • chaque volet de formation est clôturé par une « épreuve sanctionnée par une attestation de réussite » (article 20) ; il est à noter que pour s’inscrire à ces formations, des conditions d’ancienneté minimales sont requises : six années dans le réseau de la Communauté et deux dans les autres réseaux. Pour s’inscrire au volet propre à chaque réseau, il faut avoir satisfait à l’épreuve sanctionnant la formation commune à l’ensemble des réseaux (article 20) ;
  • pour chaque épreuve, les candidats sont admis ou refusés, sans classement (article 21) ;
  • la certification des formations se fait sur le modèle des jurys existant pour le réseau de la Communauté française  [8], en ce qui concerne à tout le moins le volet commun à l’ensemble des réseaux.

2.3.3. La lettre de mission

38La lettre de mission constitue l’ensemble des priorités qui sont assignées au directeur en fonction des besoins de l’établissement ; un projet de lettre de mission doit être soumis à la concertation avec l’organe de démocratie sociale propre à chaque réseau  [9]. La lettre de mission, pour ce qui concerne l’enseignement subventionné, comporte un volet de délégation de pouvoir. Elle s’applique sur une durée de trois ans minimum à dix ans maximum. Son contenu peut être modifié en raison des nécessités de terrain à l’initiative du directeur, du pouvoir organisateur ou de l’organe de démocratie locale.

2.3.4. Le stage et l’évaluation

39Un stage de deux années est prévu. À l’issue de la première année, le pouvoir organisateur évalue le stagiaire, en fondant cette évaluation « sur l’exécution de la lettre de mission » ; les mentions favorable, réservée ou défavorable sont attribuées au stagiaire qui en est avisé ; en cas de mention réservée ou défavorable, le stagiaire, à l’issue de la seconde année, devra avoir obtenu la mention favorable s’il veut être nommé ou engagé à titre définitif. Si à l’issue de cette seconde année, un stagiaire qui avait obtenu la mention favorable antérieurement obtient la mention réservée ou défavorable, le stage est prolongé de six mois. À l’issue de celui-ci, le stagiaire doit avoir obtenu la mention favorable. À défaut, il est mis fin d’office au stage et le stagiaire réintègre le poste qui était le sien avant le début du stage. Les décisions prises par les pouvoirs organisateurs doivent être motivées.

2.3.5. L’autonomie des réseaux et la liberté d’engagement des pouvoirs organisateurs

40Cette autonomie est un sujet sensible pour les fédérations de pouvoirs organisateurs et pour les associations de directeurs. En principe, elle est garantie via la lettre de mission (les mandats donnés au directeur entre autres), l’organisation des formations spécifiques au réseau. En outre, des dispositions spécifiques aux réseaux en matière d’accès et de dévolutions des emplois de directeurs sont prévues (titre II). Ces dispositions ne sont pas nouvelles mais reprennent en fait celles déjà présentes dans les différents statuts existants.

41Dans les réseaux officiels et subventionnés, la liberté d’engagement est partiellement garantie dans la mesure où si un seul candidat est dans les conditions prévues, le pouvoir organisateur peut mettre en concurrence ce candidat avec d’autres candidats ne répondant que partiellement aux conditions (n’ayant pas, par exemple, les attestations de réussite des modules de formation).

42Il est à noter que, dans l’enseignement libre subventionné, les anciennetés donnant accès à candidature doivent avoir été acquises, est-il rappelé dans la version proposée aux partenaires sociaux, « au sein de l’enseignement libre du caractère concerné », c’est-à-dire confessionnel ou non, ainsi que le prévoit le décret du 1er février 1993 portant statut du personnel de l’enseignement libre subventionné. Le cloisonnement entre réseaux et entre caractères est donc pérennisé.

43C’est dans le titre II traitant de dispositions spécifiques à chaque réseau qu’est introduit un chapitre sur l’évaluation des directeurs nommés ou engagés à titre définitifs. Le projet du ministre est de généraliser ce qui se pratique dans le réseau de la Communauté française. Cette évaluation se déroulera tous les trois ans, sur la base des compétences développées ci-dessus (axe administratif, relationnel et pédagogique) et débouchera sur les mentions favorable, réservée ou défavorable. Si la mention réservée est celle retenue, le pouvoir organisateur, soit modifie sa lettre de mission, soit enjoint au directeur de suivre un module de formation en cours de carrière en relation avec le ou les manquements relevés. Dans tous les cas, une nouvelle évaluation a lieu au bout d’un an. En cas de mention défavorable, le pouvoir organisateur enjoint au directeur de suivre un module de formation en cours de carrière en rapport avec le ou les manquements relevés et l’évalue à nouveau six mois plus tard. Si l’évaluation est toujours défavorable, le directeur réintègre la fonction qu’il occupait avant celle de directeur « à l’échelle barémique de la fonction qu’il réintègre ». La chambre de recours peut être saisie par le directeur de manière à émettre un avis sur cette évaluation.

44Enfin, les pouvoirs organisateurs motivent leurs décisions.

2.3.6. Le contrôle par les organisations syndicales

45Ce « contrôle » ou plutôt les lieux ou étapes du processus d’engagement d’un directeur où ils peuvent peser sur les décisions sont bien présents :

  • lors de l’élaboration et/ou la modification de la lettre de mission ;
  • lors de la certification par le « jury d’État », si les organisations syndicales proposent trois des membres du jury (parmi leurs affiliés très certainement et avec un certain mandat, dont celui de contrôler le bon déroulement des opérations), elles ne siègent pas vraiment en tant que telles et n’interviennent pas directement dans l’évaluation de la prestation du candidat directeur ;
  • en cas de recours introduit en chambre de recours contre un avis défavorable à la suite d’une évaluation par le pouvoir organisateur (pour rappel ces chambres sont composées paritairement de représentants des pouvoirs organisateurs et des organisations syndicales).

2.4. LES RÉACTIONS DES ACTEURS CONCERNÉS

46Les premières réactions qui apparaissent concernent d’abord la note d’intention du ministre, qui comprend déjà les grands chapitres du futur statut et les grandes lignes constituant ceux-ci, ensuite de la première version disponible. Une véritable plate-forme regroupant le Secrétariat général de l’enseignement catholique (SeGEC) et les associations de directeurs de ce réseau – le Collège des directeurs, pour l’enseignement fondamental et la Fédération des associations des directeurs de l’enseignement secondaire catholique (FEADI), pour le niveau secondaire – va se constituer et occuper dans les médias une place centrale. D’autres associations et fédérations s’exprimeront également.

2.4.1. Les associations de directeurs

Dans l’enseignement catholique

47Les divers intervenants abordent la question selon leurs angles propres, mais tous marquent leur accord sur le principe d’un statut pour les directeurs.

48Le 23 mai 2002,500 des 650 directeurs du fondamental du réseau libre catholique se réunissent afin de déterminer un cahier de revendications. Leur revendication essentielle concerne l’aide administrative à accorder aux directeurs. Cette aide administrative leur apparaît comme une condition sine qua non de l’adoption d’un tel statut du directeur. C’est également la position de l’Association interrégionale des directeurs d’école (AIDE), une association qui affilie des directeurs de tous les réseaux d’enseignement.

49Sur invitation du ministre le 16 octobre 2002 des directeurs, tous réseaux et tous niveaux confondus, le rencontrent à Charleroi. Ils étaient quelque 400 sur les 3 200 directeurs que compte la Communauté française. Si « le décret semble globalement passer la rampe  [10] », en tout cas sur l’intitulé des grands chapitres du projet (lettre de mission, formation, etc.), une fois qu’on les détaille, il en est tout autrement. Cette rencontre est la première manifestation publique d’opposition au projet du ministre.

50Quelques semaines plus tard, le 15 décembre 2002, soit un mois avant que le ministre ne communique officiellement sa proposition de texte, se tient à Louvain-la-Neuve une assemblée générale plénière des directeurs de l’enseignement catholique. Plus d’un millier de personnes y assistent : directeurs mais aussi représentants des pouvoirs organisateurs. Jean-Pierre Merveille, pour le Collège des directeurs, insiste sur deux préalables à toute discussion sur un statut :

  • l’aide administrative aux directeurs du fondamental ; en effet, déclare-t-il, une direction d’école « c’est devenu un guichet avec un seule personne derrière et 300 familles devant ». Leurs exigences : une aide par 500 élèves ; dans un communiqué de presse daté du 25 novembre 2003, il rappellera que, au niveau fondamental, on est plutôt favorable à un statut des directeurs à condition que les moyens soient à disposition : « à quoi sert-il de définir un statut distinctif, définissant une fonction, sa formation, les modalités de son accès et son évaluation si, en parallèle, les moyens de l’exercer ne sont pas assurés ? » Il n’en vilipendera pas moins le texte proposé : « Les ingrédients de la pire dépression sont réunis. Si le statut lui impose en plus une formation inabordable, la possible mise en cause de sa désignation et une évaluation menaçante… où trouvera-t-on le candidat assez fou pour embrasser la carrière ? » ;
  • il faut recentrer les missions du directeur sur ses missions prioritaires plutôt qu’administratives, sans quoi, dit-il, la désobéissance civile guette : « Nous prendrons le risque du non-droit ; ce que nous ne pourrons plus faire, nous ne le ferons plus. »

51André Cobbaert, pour la FEADI, vilipende un projet de statut qui « ne résout rien mais rigidifie tout ». Il s’en prend alors vertement à la FIC, qu’il accuse d’avoir « courtisé le ministre pour augmenter son pouvoir  [11] ». Il décline ses exigences :

  • une formation avant engagement à titre définitif et non préalable à la désignation, ce qui, selon lui, restreint le choix du pouvoir organisateur ;
  • la certification ne peut passer par un jury composé comme le ministre le propose et qui est assimilé à un jury d’État ;
  • la lettre de mission ne peut pas être révisée sur demande de l’organe de démocratie sociale ; il y voit un contrôle intolérable exercé par les organisations syndicales ;
  • telle que prévue, l’évaluation des directeurs nommés organise « le harcèlement des directeurs » et risque d’être assimilée à une sanction ;
  • la motivation formelle des décisions doit être abandonnée, les risques étant grands de la multiplication des actions en justice ; pour lui, « le succès de l’école catholique tient à sa liberté de choisir ses cadres ».

52On le voit, la première et la dernière exigence concernent plutôt les pouvoirs organisateurs que les directeurs. Mais ils font cause commune au sein de la plate-forme. Le chanoine Armand Bauduin, alors directeur général du SeGEC, critique la volonté du gouvernement de calquer le fonctionnement du réseau libre sur celui du réseau de la Communauté française.

53Baudouin Joachim, directeur du collège du Sacré-Cœur de Charleroi, récapitule bien la position des directeurs de son réseau à la fin de l’année 2003 dans un article publié dans la rubrique « Opinions » de La Libre Belgique et cosigné par une série de directeurs d’établissement : « Disons-le d’emblée, le ministre de la Fonction publique a voulu, sous la poussée des syndicats, mettre à l’ordre du jour un statut pour les directeurs d’école. » Les signataires de l’article présentent le souci de protéger les directeurs par un statut comme « objectif honorable ». Ce statut, selon eux, existe déjà dans les deux autres réseaux  [12] et la tentation du ministre fut d’étendre celui-ci au réseau libre. »

54Le premier reproche est donc celui de vouloir en quelque sorte appliquer les recettes de l’enseignement officiel à l’enseignement libre. On verra que cette critique est largement partagée par le SeGEC. Le second reproche est en rapport avec ce qui est perçu comme une ingérence des organisations syndicales dans le processus de choix des directions :
« L’ensemble des associations de directeurs de l’enseignement libre s’oppose farouchement à la mouture actuelle  [13] parce qu’elle consacre, non une valorisation de la fonction, mais un verrouillage scandaleux qui, à terme, paralysera l’action des directeurs sous contrôle exclusivement syndical, restreindra le choix des pouvoirs organisateurs par des mesures administratives et imposera une formation initiale préalable à toute désignation, là où la formation se faisait avant et après la nomination. Devoir choisir dans une réserve de recrutement réduit le choix et ne garantit au mieux que des qualités administratives ».

55Les signataires de l’article s’en prennent à ce propos explicitement à Régis Dohogne, qui présente « ce statut comme un progrès pour la démocratie sociale », alors qu’il « réduit la société de nos écoles aux seules voies syndicales et imagine une démocratie qui repose en fait, comme celle dont se prévalent certains régimes, sur la non-reconnaissance et la mise au silence de nombreux acteurs importants  [14]. » Les signataires de l’article refusent aux organisations syndicales le droit de parler au nom des directeurs.

56Trois qualités caractérisent selon eux le réseau catholique  [15] : souplesse, proximité et disponibilité. « À la souplesse on substitue la bureaucratisation (…) À la proximité de notre réseau succède insidieusement la centralisation, contraire au discours politique ambiant (autonomie qu’ils disaient !) mais conforme à ses pratiques. (…) À la disponibilité, tout contribue à substituer un fonctionnariat de plus en plus paralysant et dont certains se délectent. »

57Et de conclure en ces termes :

58

« La responsabilité des syndicats est grande aujourd’hui  [16]. Dans la négociation sur le statut des directeurs, accepteront-ils de faire du directeur une simple courroie de transmission de circulaires ministérielles pour recevoir en échange un contrôle syndical large (évaluer les directeurs, obligés de plaire ? ) (…) À qui profite le crime ? À personne. Aucun réseau ne sortira grandi de telles mesures. Et le malaise du monde enseignant fera l’objet de longues, coûteuses et passionnantes études…  [17] »

59L’UFAPEC qui regroupe les Associations de parents de l’enseignement catholique s’est jointe aux directeurs et au SeGEC, en déclarant soutenir les directeurs « dans leur volonté de sauvegarder la gestion souple et de proximité qui caractérise les écoles du réseau libre  [18] ».

Dans l’enseignement officiel

60 L’Association des chefs d’établissement de l’enseignement officiel subventionné a été moins en vue que ses homologues de l’enseignement catholique. Roger Cuvelier, son président, a déclaré que « si les pouvoirs organisateurs sont différents, les problèmes sont les mêmes  [19] ». Il vise essentiellement la problématique des tâches administratives incombant aux directeurs du fondamental, qui pousse de plus en plus de communes à octroyer une aide administrative sur leurs propres deniers, se voyant dès lors contraintes de faire de même pour les écoles libres situées sur leur territoire. Ces aides, en effet, sont considérées comme des avantages sociaux. Le seul problème subsistant, à son sens, réside dans le chapitre consacré à l’évaluation. Mais il souligne « le souci du cabinet de concertation, ce qui tranche, selon lui, avec l’absence de dialogue pour la mise en place de la formation continue des enseignants  [20] ».

2.4.2. Les fédérations de pouvoirs organisateurs

Le SeGEC

61Le SeGEC participe aux consultations avec la ligne de conduite qu’il adopte également dans d’autres dossiers : la sauvegarde de la liberté des réseaux. La liberté d’engagement des directeurs par le pouvoir organisateur doit rester entière : c’est lui, et lui seul, qui choisit parmi les candidats potentiels sans avoir à justifier aucunement ses choix.

62À l’issue des premières consultations, Godefroid Cartuyvels, secrétaire général de la Fédération de l’enseignement fondamental (FEDEFOC), l’une des fédérations constituantes du SeGEC, rappelle le soutien que son organisation apporte aux associations de directeur qui rejettent « un projet de statut qui va fragiliser plutôt que valoriser les directeurs, soumettant leur nomination à un véritable parcours du combattant et les désignant comme boucs émissaires potentiels de tous les dysfonctionnements de l’école ». Ces associations « ont souligné combien le projet de décret porte atteinte à la liberté des pouvoirs organisateurs d’organiser l’école et de choisir ses cadres ». G. Cartuyvels regrette que les directeurs ne soient pas « associés en bonne et due forme aux négociations ». Selon lui, l’évaluation est le seul domaine où « des évolutions positives ont été enregistrées ». Et de conclure : « Dans ces conditions, le SEGEC et la FEDEFOC, en accord avec les fédérations de directeurs, réitèrent leur demande de voir retirer ce texte qui est loin de recueillir l’assentiment général. Ils demandent avec la plus grande insistance d’être formellement associés aux discussions futures  [21]. »

63Quelques mois plus tard, à la veille des élections régionales et européennes du 13 juin 2004, l’enseignement catholique rend public son mémorandum  [22], présenté comme « le produit commun des partenaires du bureau du Conseil général de l’enseignement catholique (CGEC) dont font partie entre autres les trois centrales de la CSC-E : FIC, CCPET, CEMNL. On peut y lire ceci :

64

« Il est indiqué de donner aux directeurs une reconnaissance sociale et statutaire de leur métier. À cette fin sera reconnu aux directeurs :
- un droit à une lettre de mission, donné par le pouvoir organisateur après consultation du personnel et de ses représentants ;
- un droit et un devoir de formation sous la responsabilité du pouvoir organisateur ou de ses organes de représentation ; la formation qui n’a pas été acquise au préalable devra être dispensée avant l’engagement à titre définitif dans la fonction ;
- un droit et un devoir pour le pouvoir organisateur d’énoncer les raisons de choix du directeur après détermination du profil de fonction précédée d’une consultation du personnel et d’un appel à candidature ;
- un droit d’évaluation formative par le pouvoir organisateur ou par son délégué. »

Les pouvoirs organisateurs des réseaux officiels subventionnés

65Le Conseil de l’enseignement des communes et provinces (CECP) et le Conseil des pouvoirs organisateurs de l’enseignement neutre officiel subventionné (CEPEONS) ont été moins prolixes dans les médias ; le CEPEONS trouve inacceptable le texte proposé et estime qu’il « risque de produire des effets contraires à ceux que nous escomptions puisqu’il ne contribuera en rien à la revalorisation qualitative de la fonction de direction  [23] ».

66Dans son éditorial de janvier 2004, Godefroid Cartuyvels, de la FEDEFOC, rappelle que « les fédérations de Pouvoirs organisateurs de tous les réseaux ont ensemble, en leur temps, écrit au ministre Christian Dupont pour exprimer leur rejet du projet et lui demander d’être associés en bonne et due forme aux négociations ». On peut donc en conclure qu’il existe également une opposition de l’ensemble des réseaux, qui entreprennent des démarches communes, même s’il semble que le leadership médiatique ait été surtout l’œuvre de l’enseignement catholique.

2.4.3. Positionnement des organisations syndicales

67Les organisations syndicales affiliant dans l’enseignement sont structurées comme suit :

68

  • pour la CSC : la Fédérations des instituteurs chrétiens (FIC), la Centrale de l’enseignement technique et professionnel (CCPET), la Centrale de l’enseignement moyen et normal libre (CEMNL) ; ces centrales ont fusionné pour former la CSC-Enseignement ;
  • pour la FGTB : la Centrale générale du secteur public (CGSP enseignement), le SETCA enseignement libre (SEL) ;
  • pour la CGSLB : le Syndicat libéral de la fonction publique (SLFP) et l’Association professionnelle du personnel de l’enseignement libre (APPEL).

69Les plus impliquées en cette affaire ont été la CSC-Enseignement, en particulier la FIC, et, dans une moindre mesure, le SEL-SETCA. Rappelons que c’est la FIC qui semble la première à porter la problématique du statut auprès du gouvernement, comme en témoignent les démarches entamées entre 2000 et 2002 (cf. supra). Le 30 avril 2002, quelque 200 directeurs affiliés à la FIC sont réunis à Liège. L’accent est essentiellement mis sur la revalorisation salariale et l’octroi d’une aide administrative par école. Dès ce moment, les directeurs se disent opposés à la mobilité tous les cinq ans que projette d’imposer le ministre. Régis Dohogne se borne à dénoncer l’attitude des P.O qui « provoque un surcroît de travail des directeurs ».

70En décembre 2003, la CSC-E motive sa défense du statut du directeur dans une lettre auprès des affiliés, perçue par les directions comme « arrogante ». Les directeurs ont le sentiment que le syndicat veut contrôler les désignations de directeurs. Estimant que les premiers à souffrir d’une direction incompétente ou nuisible sont les membres du personnel, le syndicat revendique en effet que ceux-ci soient consultés et, surtout, que les pouvoirs organisateurs motivent leur choix.

71La CGSP, quant à elle, se montre peu concernée par la problématique du statut des directeurs, dans la mesure où dans l’enseignement de la Communauté française et dans l’officiel subventionné, de nombreuses dispositions prévues au futur statut existent partiellement : formation préalable, certification, etc. Elle ne publie d’ailleurs rien de significatif sur le sujet.

72Le SEL-SETCA, à de multiples occasions, soutient l’action de la CSC-E. Dès le 10 avril 2002, d’ailleurs, il s’exprime en ces termes dans un communiqué de presse : « Le choix des pouvoirs organisateurs devra s’orienter vers des candidats dont la compétence dépasse la simple bonne volonté ou le copinage. » Il espère dès lors que « ces mesures limiteront l’émergence de petits chefs locaux totalement imperméables à la concertation sociale ». Lui aussi veut exercer un certain contrôle au travers des organes de démocratie sociale.

73Quant aux syndicats libéraux (SLFP et APPEL), ils se montrent peu prolixes sur le sujet.

2.5. LA CONSULTATION DES ACTEURS

74Entre janvier 2003 et février 2004, le texte va sensiblement évoluer grâce aux consultations qui se déroulent au cours de réunions organisées au cabinet du ministre. Elles sont présidées par le chef de cabinet du ministre, Renaud Witmeur. À ce stade, le texte proposé n’a pas encore fait l’objet d’un accord au sein du gouvernement. Cela sera d’ailleurs reproché au ministre Christian Dupont par son partenaire Écolo. Ainsi, Marcel Cheron, chef de file Écolo au Parlement de la Communauté française, déclare-t-il : « Il serait temps que le travail en intercabinet commence. Le dossier est mené par le seul Christian Dupont, qui n’y associe aucun partenaire de la majorité. Cela ne va pas  [24]. »

75Plus on se rapprochera de l’échéance électorale de 2004, plus le rythme des réunions va s’accélérer et plus le texte va être amendé y compris hors réunion  [25], comme si le ministre avait hâte de boucler un dossier électoralement délicat. Dès novembre d’ailleurs, Christian Dupont annonce, dans la convocation à une « nouvelle rencontre qui réunira les organes de représentation et de coordination de pouvoirs organisateurs, les organisations syndicales et l’Administration », que « la rédaction de l’avant-projet relatif au statut des directeurs entre dans sa phase finale  [26] ».

76On abordera ici les dossiers sujets à controverse que sont la formation initiale des directeurs, la certification de ces formations, la lettre de mission, le stage et l’évaluation des candidats directeurs, l’évaluation des directeurs nommés et la dévolution des emplois. La base de l’analyse est la version du 10 février 2004.

2.5.1. La formation initiale des directeurs

77Dans la version remise en janvier 2003 aux partenaires et dont il a été question ci-dessus, pour ce qui concerne l’axe relationnel pas moins de 17 compétences étaient évoquées. Dans la version de février 2004, l’article 13 est réduit à la formulation suivante :

78

« Pour l’accomplissement des missions relevant de l’axe relationnel, la formation
du directeur vise à développer chez ce dernier des aptitudes relationnelles, en
particulier la gestion des ressources humaines. »

79En ce qui a trait à l’axe administratif, la version de départ déclinait dix compétences à acquérir. Dans celle de février 2004, la formulation est simplifiée comme suit :

80

« Pour l’accomplissement des missions relevant de l’axe administratif, matériel et
financier, la formation du directeur vise à développer chez ce dernier l’aptitude à la
maîtrise des matières législatives et réglementaires et des capacités de gestion
administrative, logistique et financière de l’école ou de l’établissement. »

81L’axe pédagogique est celui qui a le moins évolué dans le temps. Il s’agit d’un sujet délicat – la liberté pédagogique des réseaux étant garantie dans le Pacte scolaire – et il importe donc d’en rester à des considérations générales.

82Dans la première version, il est ainsi écrit :

83

« (…) Le directeur doit notamment acquérir les compétences suivantes :
- savoir promouvoir les choix pédagogiques et les actions concrètes reprises dans le projet d’établissement ;
- savoir mobiliser et animer l’équipe éducative ;
- savoir évaluer la portée de l’action pédagogique de l’équipe éducative et la conseiller pour mener une politique éducative cohérente ;
- s’informer des innovations pédagogiques et méthodologiques ;
- savoir écouter l’équipe éducative pour réactualiser le projet d’établissement en concertation avec elle. »

84Les compétences énumérées 1° à 5° sont supprimées et un alinéa est ajouté à cet article :

85

« Le contenu de la formation est adapté, quant aux diverses matières notamment énumérées à l’alinéa premier, selon le niveau d’enseignement de la fonction de directeur concernée. »

86Ces modifications ont été essentiellement voulues par les fédérations de pouvoirs organisateurs ; selon elles, en effet, une déclinaison aussi détaillée de compétences que celle initialement prévue risquait d’effrayer les candidats potentiels. Enfin, comme le réclamaient les associations de directeurs, la formation devait coller au plus près à la réalité de terrain et donc la formation ne devait porter que sur le niveau d’enseignement auquel le candidat postulait.

2.5.2. La certification des formations

87Si le passage obligé par un jury a mécontenté les associations de directeurs, ce point n’a guère varié dans le temps et a été maintenu jusqu’au dépôt du texte au Parlement de la Communauté française. Par contre, le nombre d’heures consacrées aux différents axes a varié dans le temps : entre 36 heures et 100 heures, selon les axes et les moments. La version de février 2004 mentionne 60 heures.

88Ces formations étant organisées hors temps de travail, les fédérations de pouvoirs organisateurs ont estimé que mettre la barre trop haut, c’était courir le risque d’une pénurie de candidats.

2.5.3. La lettre de mission

89Celle-ci intéressait au plus haut point aussi bien les fédérations de pouvoirs organisateurs que les organisations syndicales et les associations de directeurs. Les premières parce que cette lettre de mission devait consister essentiellement en une délégation de pouvoir, souhait qui fut rencontré par un ajout allant en ce sens. Tout comme elles demandèrent et obtinrent un délai de validité de cette lettre. Ces délais varièrent dans le temps entre deux et dix ans, un consensus se dégageant finalement sur 6 années.

90Les secondes parce qu’elles voulaient être partie prenante dans l’élaboration de cette lettre. La proposition initiale prévoyait que la lettre de mission fût préalablement soumise à la concertation au sein des organes de démocratie sociale propres à chaque réseau. Le terme « concertation » a paru trop contraignant aux fédérations de pouvoirs organisateurs en ce sens qu’il incluait la nécessité d’aboutir à un consensus ; il fut remplacé très rapidement par le mot « consultation ». Les associations de directeurs firent pression sur les fédérations de pouvoirs organisateurs pour qu’elles réclament la suppression de cette consultation, mais n’obtinrent pas satisfaction.

91Les organisations syndicales avaient souhaité que la demande d’une modification de la lettre de mission puisse aussi se faire à l’initiative de l’organe de démocratie sociale. Dans le texte en sa version de juillet 2003, c’était acquis. Dès décembre 2003, le texte est adouci et seuls le pouvoir organisateur et le directeur peuvent en demander formellement la modification. Alors que les versions antérieures préconisaient une modification à la demande de l’organe de démocratie sociale, le texte est devenu : le contenu de la lettre de mission peut être modifié avant son échéance par le pouvoir organisateur « en raison de l’évolution du fonctionnement ou des besoins de l’établissement constatée » par l’organe de démocratie sociale. Les associations de directeurs estimaient que laisser aux organisations syndicales l’initiative d’une demande de modification de la lettre de mission, c’était une manière camouflée d’évaluer la direction.

2.5.4. Le stage et l’évaluation des candidats directeurs

92Le texte de départ n’a guère évolué au fil des négociations, si ce n’est sur un point voulu par les associations de directeurs : au fait que « l’évaluation se fonde sur l’exécution de la lettre de mission », il est ajouté que l’évaluation « tient compte du contexte global dans lequel est amené à évoluer le directeur stagiaire et des moyens qui sont mis à sa disposition ». Les directeurs visaient ainsi à se prémunir de pouvoirs organisateurs qui ne satisferaient pas à leurs obligations de mettre à disposition des moyens suffisants que pour permettre de rencontrer les objectifs qui étaient assignés dans la lettre de mission au candidat directeur.

2.5.5. L’évaluation

93L’évaluation des directeurs nommés (ou engagés à titre temporaire pour une durée égale ou supérieure à un an) est un chapitre qui subit de notables modifications au fil des négociations, les associations de directeurs estimant que, tel que rédigé au départ, le texte constituait pour les directions une épée de Damoclès.

94Le texte de départ prévoyait une évaluation tous les trois ans ; en cas de mention défavorable, le directeur se voyait enjoint de suivre les formations en cours de carrières aptes à corriger ses carences ; six mois plus tard, une nouvelle évaluation avait lieu. Si à l’issue de cette période, l’évaluation était toujours défavorable, le directeur réintégrait sa fonction antérieure.

95In fine, cette évaluation est devenue formative, comme en atteste l’intitulé de la section 3 « De l’évaluation formative des directeurs nommés ou désignés à titre temporaire pour une durée égale ou supérieure à un an ».

96Il sera précisé qu’« en fonction de cette évaluation, le pouvoir organisateur convient avec le directeur des améliorations à apporter ». Plus question donc d’une sanction qui consisterait à réintégrer la fonction antérieure en cas d’évaluation négative. Cette évaluation désormais n’aura lieu que tous les cinq ans, sauf si le pouvoir organisateur estime devoir la faire plus tôt. Mais en tout état de cause, il ne pourra y en avoir plus de deux sur une durée de dix ans.

2.5.6. La dévolution des emplois

97Ce chapitre est très sensible pour les fédérations de pouvoirs organisateurs car il touche à leur liberté d’engagement et limite leur choix.

98Rappelons que l’obligation impartie initialement de posséder la certification des cinq modules de formation initiale couvrant les trois axes au moment de l’entrée en stage a été ramenée à trois, la certification couvrant les cinq modules n’étant plus exigée qu’au moment de la nomination. C’était une demande conjointe des fédérations de pouvoirs organisateurs et des associations de directeurs. Cela étant acquis, les premières ont revendiqué et obtenu, lorsqu’un pouvoir organisateur n’a qu’un candidat dans les conditions de formation requises, d’avoir la possibilité de le mettre en concurrence avec des membres de leur personnel qui ne sont pas dans les conditions.

99Les organisations syndicales réclamaient que les pouvoirs organisateurs motivent leur choix auprès de l’organe de démocratie sociale. Cette obligation de motivation au sens strict ne s’applique que dans l’enseignement officiel dans la mesure où il s’agit d’un acte administratif. L’enseignement libre la réfuta comme telle, s’en remettant à la définition donnée de ce concept dans le décret du 1er février 1993, en son article 3 § 11 : « La motivation consiste en l'indication, dans l'acte, des considérations de droit et de fait servant de fondement à la décision. Elle doit être adéquate. » Étienne Michel, directeur général du SeGEC, s’exprimera à ce propos en ces termes : « Les écoles relevant de l'enseignement catholique ont un statut d'asbl. Elles appartiennent au monde associatif, avec toutefois certaines particularités ; le politique doit en tenir compte  [27]. »

2.5.7. Les passerelles

100Il s’agit de mesures permettant, notamment, le passage ou le retour d’une fonction de directeur définitif vers une autre fonction ; ce chapitre n’évoluera guère dans le temps. Il permet un retour en douceur : le traitement dû comme directeur va diminuer progressivement pour atteindre le niveau de la fonction antérieure.

3. SOUS L’ACTUELLE LÉGISLATURE

101Dans l’accord de gouvernement PS-CDH pour la Communauté française  [28], un passage est consacré à la problématique des directions : « Parce que les directeurs doivent être les moteurs de leur établissement et qu’ils sont un maillon essentiel de notre système éducatif, le gouvernement proposera au Parlement un décret dotant les directeurs des établissements d’enseignement d’un statut spécifique. Dans ce cadre, notamment, les missions du directeur seront répertoriées et clarifiées, l’objectivation des recrutements sera assurée, les conditions d’accès à la fonction seront uniformisées entre les réseaux et une formation initiale sera mise sur pied. Les directeurs d’établissement devront posséder les aptitudes de gestion de ressources humaines. Une attention particulière sera accordée à leur aptitude à bien organiser le fonctionnement global de l’école et à animer le projet éducatif et pédagogique de l’établissement, à leur capacité de gérer les conflits, à leur connaissance suffisante de la législation scolaire et des principes comptables. »

102À ce passage qui concerne le statut du directeur succède un autre qui concerne l’aide administrative aux directions : « Afin de soulager les directeurs d’école des charges administratives qui leur sont imposées, dans le cadre des engagements réciproques qui seront pris dans le Contrat stratégique pour l’éducation, le gouvernement renforcera progressivement l’assistance administrative dans les écoles fondamentales ordinaires et spéciales de tous les réseaux pour atteindre l’équivalent d’un emploi par 500 élèves sur base d’un plan pluriannuel. Par ailleurs, les normes de création d’emploi des fonctions de directeur dans l’enseignement fondamental seront revues, afin de permettre une gestion plus optimale des écoles. »

3.1. LE PROJET DE DÉCRET ARENA

103Le 21 janvier 2005, le Contrat stratégique pour l’éducation, puis, le 13 avril 2005 le Contrat pour l’école, reprendront ces idées  [29].

104Durant cette période, aucun contact officiel ne se tient à propos du statut des directeurs à l’initiative du gouvernement. De contacts officieux il ressort cependant que la ministre-présidente, Marie Arena (PS), compte bien s’inspirer du texte de la précédente législature et que des contacts informels se poursuivent. Dans un document commun, la FEADI et le Collège des directeurs formulent « des propositions d’articles destinés à remplacer ceux qui, dans les textes successifs déposés au cours de la précédente législature, [leur] posaient problème… [Ces propositions] essaient de traduire les objections que les deux associations de directeurs avaient formulées à l’époque  [30] ».

105Le document fait trois remarques importantes avant d’aborder les grands thèmes du statut :

  • la fonction de directeur est une fonction à promouvoir plutôt qu’à cadenasser ; l’objectif du statut doit être un meilleur pilotage du système éducatif, non une « fonctionnarisation bureaucratique (qui) n’améliorera en rien la qualité de l’école » ; il souligne les « lourdeurs administratives du texte » et réclame des « procédures claires, univoques et facilement applicables » ;
  • dans le fondamental, il y a un préalable avant toute poursuite des discussions : si des moyens « substantiels mais encore insuffisants » sont prévus dans le Contrat pour l’école  [31], il est « clair pour nos deux associations que l’entrée en vigueur d’un décret sur le statut des directeurs ne peut précéder la concrétisation d’un décret sur l’aide administrative » ;
  • une revalorisation salariale promise aux directeurs du fondamental est nécessaire.

106À propos des missions spécifiques du directeur, les deux associations estiment qu’« il n’est pas judicieux de détailler ces tâches à l’envi, car ce serait à la fois réduire les spécificités de la lettre de mission, dont il est question plus loin dans le décret, et constituer une répétition inutile des obligations des chefs d’établissement qui apparaissent déjà dans de nombreux textes légaux ». On se trouve ici en contradiction avec l’un des objectifs annoncés du statut des directeurs, à savoir regrouper en un texte des missions reprises dans des textes épars.

107Concernant la formation des directeurs, les associations reconnaissent que « ce chapitre a été profondément revu sur base de la position que nous avons toujours défendue », à savoir une formation préalable à la nomination, non à l’engagement, des formations assumées et certifiées par les opérateurs de formation.

108La lettre de mission est « une affaire entre pouvoir organisateur et directeur ! L’immixtion de tiers, membres du personnel ou parents par exemple, dans ce rapport contractuel n’a pas de sens et pourrait relever très vite d’intérêts particuliers. »

109Au sujet des conditions générales d’accès au stage et de la dévolution des emplois de directeurs, pour ces associations, le texte de février 2004 « développait l’accès à la fonction de directeurs et la dévolution des emplois de manière tellement alambiquée qu’on pouvait raisonnablement s’interroger sur les motivations des auteurs ». Elles proposent comme seule exigence préalable un engagement à titre définitif dans une autre fonction « depuis un certain temps ». La condition d’être engagé à titre définitif dans l’enseignement pour prétendre à une fonction de directeur pourrait même tomber en cas de pénurie.

110Le SeGEC continue de considérer que le dossier tel qu’il a évolué reste trop restrictif sur la question de la liberté des pouvoirs organisateurs. Le CPEONS, lors de son conseil d’administration du 22 mars 2006 rappelle son exigence fondamentale : « Il exige le droit pour les pouvoirs organisateurs de choisir librement les directions d’école qui sont les relais des pouvoirs organisateurs dans les établissements. Il refuse toute certification ou classement des candidats au terme d’une formation inter-réseaux organisée par l’Institut de formation continuée inter-réseaux  [32]. »

111Le 12 mai 2006, un communiqué de presse annonce qu’un texte a été adopté par le gouvernement de la Communauté française : « Sur proposition de Marie Arena, ministre-présidente en charge de l’Enseignement, le gouvernement a approuvé l’avant-projet de décret fixant le statut des directeurs. Le texte présenté aujourd’hui concrétise un objectif essentiel du Contrat pour l’école : la valorisation du métier de directeur et directrice d’école. »

112L’avant-projet de décret s’articule autour de dispositions communes aux directeurs de tous les réseaux et de dispositions propres à chaque réseau. Il comporte également un chapitre qui octroie une aide administrative aux directeurs d’école fondamentale.

113Par rapport à la dernière version connue (février 2004), le texte n’a guère évolué sur le fond. Ici et là, la forme en a été améliorée et quelques corrections techniques ont été apportées.

114Ainsi, lorsqu’il est traité de l’axe relationnel dans les missions du directeur, la version de février 2004 indiquait : « Il suscite et gère la participation des membres du personnel aux formations en cours de carrière, obligatoires ou volontaires. » La version 2006, quant à elle, précise : « Il organise par ailleurs la participation aux formations en cours de carrière ou suscite leur suivi, selon qu’elles sont obligatoires ou volontaires. »

115À propos de la formation initiale des directeurs, la version 2004 stipulait : « Elle est organisée en dehors des périodes normales de fonctionnement des établissements scolaires. » La version 2006, reprend la même formulation en la faisant précéder de « Sauf nécessité liée à son contenu… » Par rapport à la lettre de mission, le texte dans sa version de 2004 exigeait que cette lettre fût remise au directeur « dès son entrée en fonction » ; cette obligation fut jugée impraticable sur le terrain par les pouvoirs organisateurs et la motion « dès son entrée en fonction » est devenue « au plus tard dans les trois mois de son entrée en fonction ».

116Enfin, l’article 28 traitant du jury de certification de la formation des directeurs fut maintenu en l’état. Or, les associations de directeurs en voulaient la suppression pure et simple.

3.2. NOUVEAU POSITIONNEMENT DES ACTEURS

117Le décret est censé entrer en vigueur le 1er septembre 2006. L’opposition des associations de directeurs et des fédérations de pouvoirs organisateurs retarde cependant le processus.

118Dans un courrier daté du 2 juin 2006  [33], le CECP, le CPEONS, le SeGEC et la FELSI se montrent plus que critiques à l’égard du texte. Ils parlent « d’amendements ». Il faut « tenir compte de l’existence d’une situation de pénurie pour le recrutement de directeurs, l’attractivité de cette fonction exigeante et à haute responsabilité étant fréquemment jugée insuffisante. Il importe dès lors de prévoir des procédures de recrutement suffisamment souples, qui étendent le champ de recrutement plutôt que de le rétrécir par des mesures réglementaires. À cet égard, la liberté d’appréciation du pouvoir organisateur dans le choix du directeur est le meilleur garant d’un recrutement de qualité. » C’est la formation préalable et l’évaluation qui sont en cause ici. Ce sont manifestement des demandes émanant du SeGEC et de la FELSI. Plus avant, le courrier marque le désaccord des organisations concernant la certification : « La mise en place d’un jury unique ne se justifie pas (…) Comme il est de règle dans notre système scolaire, les opérateurs de formation (…) devraient être habilités à certifier eux-mêmes les formations sur base d’un cahier des charges, dans la mesure où ils auraient été agréés préalablement par le gouvernement. » Cette demande nous paraît intéresser les quatre signataires. La motivation du choix du directeur, cheval de bataille du SeGEC et de la FELSI, qui se considèrent comme des employeurs strictement privés et n’ont donc pas à motiver leur choix dans la mesure où ce n’est nullement un acte administratif, cette motivation est mise explicitement en exergue : il faut « lever une ambiguïté légistique en vue d’assurer la sécurité juridique des modalités de motivation des choix des directeurs ».

119Le CPEONS déclare : « En ce qui concerne le statut des directeurs, si des corrections considérables ont été apportées aux versions précédentes, des amendements indispensables doivent encore être introduits sur les procédures de recrutement, la formation et la certification  [34]. »

120À notre connaissance, le seul communiqué de presse émanant des organisations syndicales est celui du SEL-SETCa, qui « rappelle, d’autre part, que ce statut des directeurs que les réseaux vilipendent date au bas mot de 2003. Prétendre que le gouvernement a fait la sourde oreille à leurs demandes relève d’un autre sophisme : si l’on compare la version 2003 à celle de 2006 on peut se rendre vite compte combien le texte a été édulcoré au fil du temps et que ce fut le fait quasi exclusivement des pressions exercées par ces mêmes fédérations et par les associations de directeurs. » Et de conclure : « Le projet de statut des directeurs leur déplaît. Curieux, ce dernier nous plaît  [35]. »

3.3. LA NÉGOCIATION OFFICIELLE AVEC LES ORGANISATIONS SYNDICALES

121Cette négociation se tient dans le cadre du Comité de secteur IX Enseignement Communauté française, du Comité des services publics provinciaux et locaux, section II, et du Comité de négociation pour les statuts des personnels de l’enseignement libre subventionné. Elle va s’étaler sur trois journées : les 22 et 29 mai et le 6 juin 2006.

122L’Autorité  [36] y présente le texte, tel qu’adopté par le gouvernement quelques jours auparavant, dans ses grands principes. Son exposé a consisté pour l’essentiel à répondre aux critiques formulées par les associations de directeurs, alors qu’elle a, en face d’elle, les organisations syndicales, favorables à la philosophie générale du projet et qui n’ont jamais adhéré aux critiques adressées par les associations de directeurs, voire, pour certaines, s’y sont fermement opposées.

123Au cours des discussions, les organisations syndicales reviennent sur le rôle des organes de démocratie sociale. La CSC-E demande que le contenu de la lettre de mission puisse être aussi débattu dans l’organe de démocratie sociale. Elle fait remarquer qu’au « niveau d’un établissement qui ne se porte pas bien, l’intervention de l’organe de démocratie sociale doit permettre, sur base d’un constat, de faire le point sur l’évolution de la situation et des besoins et de dire, à un moment donné, qu’il faut changer la lettre de mission en conséquence ». L’Autorité se dira opposée à cela dans la mesure où « le directeur ne doit pas, en quelque sorte, être évalué par son corps enseignant, ni par ses représentants ». On se souviendra que dans sa toute première version, en 2002, une telle évaluation était prévue.

124Sur ce point, la CGSP s’est montrée plus dubitative quant aux capacités réelles d’action de membres du personnel qui se retrouvent face à leur pouvoir organisateur, voire leur direction. Le SLFP, quant à lui, souhaite l’intervention de l’organe de démocratie sociale. Pour le SEL-SETCa, « rien n’empêchera un conseil d’entreprise de demander que cette lettre de mission soit revue ».

125L’Autorité clôture la discussion en répondant qu’il n’est nullement question de « museler les organisations syndicales » et que « ce qui est prévu ne ferme pas la porte à une certaine intervention des organes de démocratie sociale » mais que « la possibilité de participer à l’organisation des établissements s’arrête là où commence la responsabilité du pouvoir organisateur ».

126Le débat reprend toutefois lorsqu’est abordée la possibilité pour le pouvoir organisateur d’ajouter des critères supplémentaires aux conditions d’admission au stage. La CGSP demande que « certaines balises soient prévues », la délibération dans l’organe de démocratie sociale en étant une. L’examen de ces conditions au sein de l’organe de démocratie sociale vise à éviter ces dérives potentielles. Les autres organisations syndicales vont abonder dans le même sens. Mais l’Autorité laissera les choses en l’état.

127La CSC-E demande qu’il soit prévu que le pouvoir organisateur communique non seulement les motifs de son choix d’un candidat parmi d’autres à ces deniers mais également à l’organe de démocratie sociale, ce qui lui semble logique dans la mesure où cet organe a été consulté sur un profil et qu’il s’impose qu’il le soit aussi sur la manière dont le pouvoir organisateur a tenu compte, dans son choix, de ce profil. Le SEL-SETCa soutient vivement cette proposition. L’Autorité s’y oppose, estimant que, ce faisant, il risquerait d’y avoir atteinte à la vie privée.

128Lors de la dernière réunion de négociation, le 6 juin 2006, il se confirmera que le gouvernement entend laisser le texte en l’état, notamment en ce qui concerne le rôle de l’organe de démocratie sociale. À ce moment, la négociation avec les organisations syndicales étant officiellement clôturée, l’avis de ces dernières est sollicité.

129Le SEL-SETCa se dit « relativement satisfait du contenu de ce texte et des réponses apportées par l’autorité, bien [qu’il] eût préféré la version de 2003, qui était plus contraignante pour les pouvoirs organisateurs et pour les candidats directeurs. En tout cas, la mouture qui est aujourd’hui sur la table de négociation constitue l’exemple d’une bonne idée qui s’est compromise au fil du temps  [37]. » L’avis est cependant positif.

130La CGSP dit « prendre acte de toute une série de choses qui sont ici à enregistrer, à savoir que l’on va baliser les droits et les devoirs des uns et des autres parmi la communauté éducative, que le système devrait être plus performant… Elle aurait souhaité une formation préalable compète (et non sur trois modules seulement), les titres seuls devant primer dans le choix, ainsi que cela se fait dans le réseau de la Communauté française. Le volet “aide administrative” ne la satisfait pas. La CSGP se dit « partagée entre une position qui consisterait à formuler un acquiescement mitigé ou à adopter une abstention très positive ». Cette formulation a débouché sur une abstention.

131Le SLFP regrette que l’évaluation des directeurs se fera par le seul pouvoir organisateur et dit émettre des doutes quant à la faisabilité du système prévu pour l’aide administrative. Il remet cependant un avis favorable.

132L’APPEL fait le constat d’une « amélioration notable par rapport à ce qui prévaut, en l’occurrence, à l’heure actuelle ». Elle espère « une formation plus importante en volume et à tout le moins une formation continuée efficace ». Elle regrette la non-implication de l’organe de démocratie sociale dans la révision de la lettre de mission, mais remet un avis positif.

133La CSC-E dit s’interroger « quant à l’avenir, soit au devenir de cet avant-projet de décret, par rapport à la version que l’on connaît maintenant et ce, suite aux oukases du front commun patronal avec qui la négociation doit se poursuivre » et déclare que ce qui fait pencher son organisation en faveur d’un avis positif, c’est le volet de l’aide administrative. Elle stigmatise aussi une « retraite de Russie » par rapport au texte initial et espère que « cette retraite ne débouchera pas sur une déroute, soit un Waterloo en la matière » et « aurait souhaité, dans ce contexte, voir accorder une importance plus grande aux organisations syndicales ». Elle émet un avis positif.

3.4. L’AVIS DU CONSEIL D’ÉTAT

134Le 17 août 2006, le gouvernement soumet l’avant-projet de décret au Conseil d’État sans aucune modification consécutive aux négociations officielles. Celui-ci rendit son avis le 9 octobre suivant.

135L’avis du Conseil se limite à vérifier si les formalités préalables ont bien été remplies et à examiner si les mesures envisagées dans le texte et qui limitent la liberté d’enseignement  [38] (en imposant par exemple des missions communes aux directeurs de tous les réseaux) sont adéquates et proportionnelles aux objectifs poursuivis, et si le fait de prévoir des mesures spécifiques par réseau n’entame pas le principe d’égalité  [39].

136Par rapport aux formalités préalables, le Conseil rappelle que « les textes normatifs relatifs aux règles statutaires du personnel subventionné ayant une incidence sur l’action des pouvoirs organisateurs ne peuvent être pris qu’après concertation du comité de concertation entre le gouvernement de la Communauté française et les organes de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs de l’enseignement et des centres PMS subventionnés reconnus par le gouvernement  [40] » et fait remarquer que, « en fixant le statut des directeurs et en définissant notamment les missions de ceux-ci, l’avant-projet de décret entre manifestement dans le champ d’application » dans le cadre d’une telle formalité préalable.

137Cette concertation n’avait pas eu lieu formellement. Cela était connu du gouvernement, mais soit il pensait que « les nombreuses réunions informelles » suffisaient, soit il espérait que ce texte ne tombait pas juridiquement parlant sous le coup du décret du 20 juillet 2006  [41] qui n’entrerait en vigueur que le 5 septembre 2006, c’est-à-dire postérieurement à la demande d’avis au Conseil d’État. Cette concertation s’est finalement tenue le 27 novembre 2006  [42]. Le 21 décembre 2006, déclare José Soblet, secrétaire général de la Fédération de l’enseignement secondaire catholique (FeSEC) « avec l’aide des directeurs qu’on ne peut soupçonner de manier la langue de bois, [nous avons] tenté de faire entendre nos arguments à la ministre-présidente et il semble qu’elle ait été sensible à l’expression de la réalité vécue dans les écoles  [43] ». Les pressions semblent donc s’être poursuivies au-delà de la concertation officielle.

138En ce qui concerne la liberté d’enseignement, le Conseil estime qu’elle est respectée dans la mesure où le texte « laisse une marge de manœuvre suffisamment grande aux pouvoirs organisateurs ».

139Quant au principe d’égalité de traitement, le Conseil invite l’auteur du texte à démontrer « dans l’exposé des motifs que les différences de traitement relevées sont compatibles avec l’article 24 § 4 de la Constitution, selon lequel les membres du personnel sont égaux devant le décret mais également que le décret prend en compte les différences objectives, notamment les caractéristiques propres à chaque pouvoir organisateur, qui justifient un traitement approprié ». La remarque porte, notamment, sur le fait que des différences existent dans le texte entre les conditions d’accès et de dévolution des emplois de directeur selon les réseaux. Dans le réseau de la Communauté, les candidats détenteurs d’au moins trois attestations de réussite sont classés selon leur nombre d’attestations puis d’ancienneté de service, ceux qui en possèdent moins uniquement selon leur ancienneté de service. Dans l’enseignement libre, aucun classement n’est prévu et donc seuls les détenteurs d’au moins trois attestations peuvent être admis au stage.

140Le gouvernement répond à cette remarque dans l’exposé des motifs : « Pour répondre à la remarque du Conseil d’État à ce sujet, le texte tient par ailleurs compte du fait que la Communauté française est en soi un pouvoir organisateur unique. La dévolution des emplois s’en trouve dès lors extrêmement simplifiée : accède au stage un membre du personnel qui est en possession d’au moins trois attestations de réussite délivrées à l’issue des modules de formation sur les cinq modules qui composent globalement cette dernière, et qui a choisi l’établissement où un emploi de directeur est disponible. Si plusieurs candidats doivent être départagés, c’est d’abord le nombre d’attestations qui les départage, ensuite l’ancienneté de service. » En fait, le texte s’inspire ici très largement des dispositions du décret du 4 janvier 1999 relatif aux fonctions de promotion et de sélection.

141Le Conseil d’État formule encore d’autres remarques, plus ciblées. Comme on a pu s’en rendre compte dans les chapitres précédents, les associations de directeurs et les fédérations de pouvoirs organisateurs, essentiellement dans le réseau libre subventionné, étaient réticentes sur l’obligation impartie aux candidats d’une formation inter-réseaux. Le Conseil d’État semble prévenir toute objection en ce domaine en invoquant l’arrêt de la Cour d’arbitrage du 5 mai 2004  [44] qui avait été sollicitée par le SeGEC quant à l’obligation d’un volet en inter-réseaux de la formation en cours de carrière  [45]. Cet arrêt conclut que l’on « ne saurait raisonnablement déduire de la durée limitée de la formation que celle-ci entraverait l’exercice de certaines méthodes pédagogiques dans l’établissement d’enseignement concerné » et donc que « les dispositions attaquées ne limitent pas de manière disproportionnée la liberté d’enseignement et en particulier la liberté pédagogique ». Comme le souligne le Conseil d’État, il y a entre le décret relatif au statut des directeurs et les décrets relatifs à la formation en cours de carrière de « grandes similitudes ».

142Le Conseil d’État estime qu’il y a discrimination entre les membres du personnel de l’enseignement organisé par la Communauté et ceux relevant de l’enseignement subventionné au niveau des titres exigés pour accéder à une fonction de sélection ou de promotion. Il réclame l’égalité de traitement : en fait aligner les titres exigés en Communauté sur ceux exigés dans l’enseignement subventionné. La place manquant ici pour détailler cette problématique l’on se bornera à faire remarquer qu’il existe beaucoup plus de souplesse au niveau de ces titres dans le réseau subventionné.

143Le gouvernement maintient cette inégalité en rappelant « les différences actuelles existant entre les réseaux d’enseignement, notamment en matière de titres  [46]. En effet, les titres jugés suffisants ne sont pas d’application dans l’enseignement organisé par la Communauté française. La remarque du Conseil d’État ne pourra dès lors être réabordée que dans le cadre de la prochaine réforme des titres et fonctions. »

144On se rappellera les objections des fédérations de pouvoirs organisateurs de l’enseignement libre à devoir « motiver » leur choix parmi plusieurs candidats. Les organisations syndicales y étaient favorables. Le Conseil d’État, citant le procès verbal de la négociation syndicale dont il a été question ci-dessus et remarquant l’imprécision de la réponse apportée par le gouvernement, déclare : « Il convient dès lors de définir les contours précis de cette obligation imposée au pouvoir organisateur de l’enseignement libre subventionné. » Il n’en a pas été tenu compte dans la version déposée au Parlement.

3.5. LE PARCOURS PARLEMENTAIRE

145Le projet de décret fixant le statut des directeurs est déposé au Parlement de la Communauté française le 28 décembre 2006  [47]. Le texte est inchangé par rapport à la version envoyée au Conseil d’État. Le gouvernement s’est borné à aménager l’exposé des motifs pour répondre à certaines demandes formulées par le Conseil d’État.

3.5.1. Les amendements en commission de l’Éducation

146Le projet de décret est examiné le 10 janvier 2007 par la commission de l’Éducation  [48]. Des membres de la majorité, auxquels se joint un membre du groupe MR  [49] déposent une série d’amendements concernant la suppression des jurys, l’évaluation, l’ancienneté et la dévolution  [50].

147L’amendement n° 5 prévoit la suppression pure et simple du jury de certification, renvoyant cette certification aux opérateurs de formation des réseaux. Cette suppression constitue l’une des modifications essentielles apportées au projet de décret par la commission. Il est justifié par des raisons pratiques : « Il est apparu par différentes discussions et différents courriels reçus que dans la mesure où il s’agit de formations pour tous les réseaux et qu’il est prévu d’organiser les modules une fois tous les deux ans, que la procédure prévue rendait le travail d’organisation et de certification particulièrement lourd et difficile à organiser, ce qui risquait de retarder l’organisations des formations. Pour ces raisons, l’amendement n° 5 propose que ces formations communes à l’ensemble des réseaux soient organisées par les universités, les hautes écoles et les établissements d’enseignement de promotion sociale. Dans la mesure où ces institutions ont l’expertise et s’occupent de ce genre de formations, elles sont habilitées aussi à les certifier  [51]. » Selon une dépêche de l’agence Belga  [52], « cet abandon de l’idée de jurys réunissant [des représentants] de l’administration et des pouvoirs organisateurs, au profit d’opérateurs reconnus de formation (universités, hautes écoles et institutions de promotion sociale) était une exigence des pouvoirs organisateurs, soucieux de préserver leur liberté ». Pour les associations de directeurs, il ne pouvait être question de passer devant un jury où siègeraient des « représentants » des organisations syndicales  [53].

148S’il est vrai que ces jurys, en ce qui concerne le réseau de la Communauté française, fonctionnent mal à ce jour, par manque de moyens que cette dernière est disposée à leur consentir, il n’en est pas moins vrai qu’imposer une certification commune constituait une avancée significative vers une pratique d’inter-réseaux. À l’interpellation d’Yves Reinkin (Écolo) qui regrette que l’on supprime ce qui « dans le projet était véritablement de l’ordre de l’inter-réseaux au niveau de la formation (…) pour donner la certification à des opérateurs qui sont eux-mêmes des réseaux », » la ministre-présidente répond que les contenus de formation étant les mêmes pour tous les opérateurs reconnus, le caractère inter-réseaux est préservé. En réalité, cette façon de voir consacre le statu quo.

149À propos de ces formations, le nouveau texte prévoit la possibilité d’allonger le stage d’une année pour permettre aux stagiaires des petites écoles (moins de 51 élèves) qui n’auraient pas acquis les cinq modules à l’issue du stage de satisfaire à cette obligation ; en effet, dans ces écoles, les directions doivent assumer des cours, ce qui rend plus ardue la formation.

150Par ailleurs, la validité des attestations de réussite aura une durée uniforme de 10 ans alors que le projet de décret prévoyait que la certification de réussite du module « administratif » était limitée à cinq ans.

151Enfin est garantie la mise en concurrence d’un candidat unique.

152Un autre amendement important concerne l’évaluation du directeur stagiaire. On se rappellera qu’à l’issue de la première année de stage se déroule une évaluation de ce dernier. Si la mention « défavorable » sanctionne cette évaluation, le projet de décret prévoyait la possibilité de poursuivre le stage avec une évaluation au bout de six mois qui devait être absolument sanctionnée par la mention « favorable ». La commission a estimé que la mention « défavorable » entraînait de facto la fin du stage et le retour du stagiaire dans sa fonction antérieure : « Les dispositions du projet prévoient un mécanisme d’évaluation du directeur en cours ou à la fin de son stage. Si l’on peut comprendre que l’attribution de la mention “réservée” laisse une place à un délai donné au directeur en stage pour améliorer son mode de fonctionnement, cela semble plus difficile à appréhender en cas d’évaluation “défavorable”… D’autant que les diverses voies de recours existent contre l’attribution de ces mentions. Ainsi, afin de donner une portée concrète à l’évaluation du directeur stagiaire, le pouvoir organisateur doit pouvoir mettre fin au stage en cas d’évaluation “défavorable”, que ce soit en cours de stage ou à l’issue de celui-ci. » C’était la position exprimée par le Collège des directeurs et la FEADI dans leur document de propositions en date du 10 janvier 2006.

153Comment se positionnèrent les composantes de cette commission de l’Éducation, face au texte proposé et amendements déposés par la majorité et un membre MR ?

154Par la voix de Marcel Neven  [54], le MR dit rejoindre la ministre-présidente « dans son exposé concernant l’importance du rôle du directeur et la nécessité d’un texte qui amène la clarté dans l’exercice de ses missions » mais se pose la question de l’efficacité du « système des brevets » et « déplore la réduction de l’autonomie des réseaux puisque chaque réseau devra se soumettre aux dispositions de l’évaluation ». Il dit ne pas apprécier « le contrôle effectué tous les cinq ans qui pourrait être interprété comme un manque de confiance à l’égard des directeurs ». Plus avant dans le débat, il se félicitera de la suppression du jury inter-réseaux jugé impraticable. Le MR a déposé six amendements visant à ouvrir plus de possibilités de recrutement pour les directeurs de promotion sociale. Tous ont été rejetés.

155Yves Reinkin (Écolo) estime qu’il « est temps de mettre en place les directeurs du XXIe siècle » et se dit favorable à la philosophie générale du texte. Il se dit toutefois « interpellé par les nombreux amendements déposés par la majorité qui modifient sérieusement le décret » et de pointer l’amendement qui « raboterait le caractère inter-réseaux de la formation ».

156Pour Anne-Marie Corbisier-Hagon (CDH), les amendements sont pleinement justifiés, car il « a fallu prendre en compte les remarques sur cinq grands thèmes : lourdeur des jurys ainsi conçus, problème de l’évaluation défavorable pouvant laisser en place quelqu’un d’incompétent, variété du calcul d’ancienneté, crainte de la pénurie et problématique des mesures transitoires ». Concernant la crainte de la pénurie, pour le CDH, il s’imposait de mettre en place un système de dévolution « à tiroirs », permettant de passer au tiroir suivant lorsque le premier est vide. Ce système permet, si le pouvoir organisateur peut justifier de l’absence de candidat répondant à toutes les conditions de titre, d’ancienneté, de nomination, de formation, de déroger à la règle et, par exemple, d’engager un temporaire ou, dans l’enseignement fondamental un régent issu de l’enseignement secondaire.

157La commission adopte le texte amendé par neuf voix. Il y a quatre abstentions.

3.5.2. L’adoption en séance plénière

158Au cours du débat en séance plénière, le 23 janvier 2007, Marcel Neven estime que certains des aspects du texte amendé sont positifs. Parmi ces modifications, la suppression du jury inter-réseaux est soutenue sans réserve par le député MR. De même que l’impossibilité pour un directeur stagiaire de poursuivre s’il a obtenu une mention « défavorable » au bout d’un an. Le MR s’oppose aux amendements relatifs à la dévolution (le principe des tiroirs) estimant que le texte ne va pas assez loin dans son souci de se prémunir d’une pénurie. L’objection principale porte sur l’instauration d’une formation identique à tous les réseaux. Non pas que le MR soit opposé au principe même mais parce qu’il se dit convaincu « que la volonté sous-jacente du gouvernement est de réduire l’autonomie des réseaux et pouvoirs organisateurs » et se déclare très inquiet face à ce qu’il estime être une volonté centralisatrice du gouvernement. Et d’indiquer que le MR s’abstiendra.

159Le PS salue « la philosophie du décret qui réalise un juste équilibre, une harmonie difficile entre ce qui doit être commun à tous les réseaux et ce qui ressort de leur spécificité et doit aussi être maintenu », tout en reconnaissant qu’un « texte est toujours améliorable, toujours critiquable » et que « la réflexion n’est pas tarie ». En l’état, cependant, il considère que le texte constitue un atout important pour l’école de demain.

160Le CDH embraie en demandant d’attendre « de voir s’il y a lieu de le corriger » et de s’engager à le faire si à l’expérience cela s’avère nécessaire. Ce parti va encore déposer trois amendements techniques.

161La ministre-présidente prend alors la parole pour souligner le fait que « de sa conception à son adoption aujourd’hui, l’importance des enjeux de ce texte a passionné les différents acteurs de l’enseignement » mais que « le point commun (entre tous ces acteurs) est l’adhésion aux éléments fondateurs du texte ». Et de rappeler les raisons qui ont poussé la majorité à supprimer le jury inter-réseaux : « éviter que ce dernier ne soit submergé par cette tâche et qu’il ne puisse plus remplir sa mission », pour conclure que « ce texte respecte l’équilibre entre la liberté d’organisation des pouvoirs organisateurs, les droits et les devoirs des membres du personnel et le principe d’égalité », « philosophie qui guidera l’élaboration des mesures d’application du décret ».

162L’après-midi du 23 janvier 2007, de nouveaux amendements surtout techniques sont déposés, tant par la majorité que par l’opposition. Les amendements proposés par la majorité sont adoptés, ceux de l’opposition rejetés. Quant au vote nominatif sur l’ensemble du texte, il a donné les résultats suivants, 77 membres ayant pris part a vote : 51 ont voté oui, 26 se sont abstenus. Les abstentions sont celles du MR, d’Écolo et du FN.

3.6. RÉACTIONS SUITE À L’ADOPTION DU DÉCRET

163Les réactions des acteurs suite à l’adoption de ce statut ont été très limitées. Dans un courrier adressé le 15 janvier 2007 aux directions d’école secondaire  [55], quelques jours avant l’adoption du décret, mais après son amendement par la commission de l’Éducation, et alors que très probablement le décret devait être voté en l’état, José Soblet, le secrétaire général pour l’enseignement secondaire au SeGEC, fait allusion à une rencontre avec la ministre-présidente où cette dernière aurait été « sensible à l’expression de la réalité vécue dans les écoles ». Bien que réaffirmant que « l’autorité est incapable de distinguer son rôle de régulateur de son rôle d’opérateur » et stigmatisant le fait que « la ministre-présidente est la responsable de l’organisation d’un réseau qui scolarise 15 % des jeunes en obligation scolaire, (et) s’estime donc être la responsable de l’organisation des 85 autres pourcents », José Soblet se limite à relever le côté positif de la lettre de mission qui lui semble être « une opportunité majeure à ne pas manquer ». C’est bien peu pour résumer ce qu’en mai encore, il appelait « la saga » de quatre années de conflit. Bien peu aussi ce que, dans une lettre d’introduction à une « communication sous forme de fichier » à destination des pouvoirs organisateurs, et datée du 7 février 2007, Bénédicte Beauduin, directrice du service juridique du SeGEC se contentera d’écrire : « La complexité de ce décret ne manquera pas de susciter de nombreuses questions. »

164L’AIDE déclare rester « vigilante au regard des lectures préoccupantes des uns et des autres de ce texte à l’encre non encore sèche  [56] ». En fait, l’AIDE semble particulièrement méfiante par rapport aux pouvoirs organisateurs : il ne peut être question, pour elle, que le regroupement  [57] de l’aide administrative aux directions ne devienne indirectement une aide aux pouvoirs organisateurs, ni que la lettre de mission soit l’occasion de charger inconsidérément les directions de missions qui incomberaient en fait auxdits pouvoirs organisateurs.

3.7. D’AUTRES ENJEUX DÉSORMAIS PRÉSENTS

165Pourquoi cette relative discrétion des uns et des autres, alors que ce dossier s’était révélé particulièrement sensible ? Du côté des fédérations de pouvoirs organisateurs, tout d’abord, d’autres enjeux qui touchent à leur autonomie d’organisateurs se sont présentés entre-temps. Les organisations syndicales ont signé le 20 décembre 2006 un accord sectoriel qui ne satisfait pas les pouvoirs organisateurs car il porte sur des mesures d’organisation de l’enseignement jugées inutiles. La veille, l’ensemble des fédérations de pouvoirs organisateurs – CECP, CPEONS, FELSI et SeGEC – dénonce  [58] la tendance du gouvernement « à se substituer à l’ensemble des pouvoirs organisateurs subventionnés, déséquilibrant les rapports entre les acteurs (autorité publique régulatrice et subventionnante, pouvoirs organisateurs, organisations syndicales) » et l’invite fermement à distinguer son rôle de régulateur de l’ensemble du système éducatif et celui d’opérateur d’un réseau d’enseignement » et de menacer en filigrane d’un recours à la Cour d’arbitrage.

166Les organisations syndicales, elles aussi, se sont montrées discrètes par rapport à l’adoption du statut des directeurs, elles avaient également d’autres préoccupations et, le jour de la signature de l’accord sectoriel, invitaient le gouvernement à poursuivre, déclarant qu’elles « veilleront à l’exécution intégrale de cet accord en dépit des stratégies prévisibles des pouvoirs organisateurs de l’enseignement subventionné qui, systématiquement, s’opposent aux mesures

  • qui tendent à rendre le système plus régulé et plus cohérent de manière à mieux combattre l’échec scolaire ;
  • qui visent à protéger les conditions de travail des enseignants en luttant contre le bénévolat forcé et les classes surchargées ;
  • qui tendent d’instaurer plus de transparence dans l’organisation du système éducatif  [59] ».

167Dans la première partie d’une rubrique sans doute destinée en priorité aux directeurs affiliés à la CSC-E, Marc Payen écrit : « Nous ne ferons pas ici l’histoire de cet important chantier bien que la comparaison minutieuse des intentions initiales avec leur réalisation finale vaille sans aucun doute le détour… Entre les intentions gouvernementales, l’approche syndicale, la vision des organes de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs, sans oublier les attentes des premiers concernés – les directeurs – la recherche du dénominateur commun eut, à bien des égards, des allures de mission impossible  [60]. »

168Le SEL-SETCa s’est montré moins tendre, mais il n’affilie guère de directeurs : « La nouvelle gouvernance avait joué au point de faire de ce statut un texte nettement en retrait par rapport aux objectifs initiaux : protéger les directeurs contre des pouvoirs organisateurs facilement enclins à se décharger de leurs responsabilités sur les épaules de ces derniers et à les mettre en cause lorsque les choses ne se passent pas bien, mais aussi protéger les membres du personnel contre des directions incompétentes ou se comportant comme de petits chef locaux au mépris des règles de concertation sociale et de respect des personnes. Cette même nouvelle gouvernance avait privilégié certains lobbies  [61]. »

169La CGSP, quant à elle, stigmatise le fait que « les conséquences de l’évolution du texte vont se traduire par un peu moins de transparence, un peu moins de service public mais en revanche un peu plus d’autonomie reconquise par les fédérations de pouvoirs organisateurs » et que « pendant les cinq ans de négociations formelles et informelles, les pouvoirs organisateurs n’ont cessé de combattre ce qu’ils considèrent comme des dérives centralisatrices et des atteintes à leur sacro-sainte autonomie. La CGSP – et les autres organisations syndicales – ont, quant à elles, toujours défendu la plus grande transparence et tendu vers la plus grande uniformisation du dispositif, en un mot vers une plus grande implication du service public dans l’élaboration d’un statut pour les directeurs. Avons-nous été entendus ? Aux affiliés de juger…  [62] » Le statut des directeurs ne fut donc qu’un épisode parmi d’autres entre des conceptions différentes de l’enseignement, de ses structures et du degré de centralisation dont il peut faire l’objet.

3.8. MODIFICATIONS DU DÉCRET ET RÈGLES COMPLÉMENTAIRES

170À la suite de son adoption le décret a été modifié et des règles complémentaires ont été élaborées par les commissions paritaires compétentes. Ces modifications ont vu réapparaître les divergences habituelles entre les acteurs concernés.

171Une première modification a été introduite par décret du 19 juillet 2007  [63] visant à permettre aux éducateurs-économes et aux secrétaires de direction engagés aux anciennes conditions de pouvoir le rester et d’être nommés entre le 1er septembre 2007 et le 31 août 2008.

172Plus essentiel nous semble être l’arrêt de la Cour constitutionnelle  [64] qui suspend l’article 124 dudit décret. Cet article 124 stipulait que pour pouvoir être subventionnée une école doit voir la direction assumée par un membre du personnel « subsidié et rémunéré par une subvention traitement  [65] ».

173Une directrice engagée sur fonds propres et l’asbl qui l’a engagée ont introduit, dès le 29 mai 2007, et « par requête séparée  [66] », un recours contre cet article au motif que celui-ci les lésait gravement. L’un des arguments invoqués par les requérants est précisément la liberté constitutionnellement garantie d’enseignement. En effet, déclarent les parties requérantes « en subordonnant le bénéfice de l’intégralité des subventions octroyées au pouvoir organisateur d’une école libre subventionnée à la condition que le poste de direction soit assumé par un membre du personnel subsidié et rémunéré par une subvention-traitement, [cela] implique une limitation à la liberté d’enseignement ». Elles invoquent, par ailleurs, que le licenciement de la direction actuelle serait dépourvu « de toute justification et aux conséquences disproportionnées » et porterait « atteinte au principe constitutionnel de la sécurité juridique qui s’attache à des situations contractuelles en cours et légalement nouées  [67] ». C’est la liberté d’engagement qui est visée ici.

174Le gouvernement de la Communauté française a, quant à lui, insisté sur le fait que « le droit aux subventions n’est pas absolu et qu’il peut être soumis au respect de conditions fixées par l’autorité » et, en ce qui concerne la liberté contractuelle invoquée par les parties requérantes, que ce sont « les parties requérantes elles-mêmes qui se sont inscrites dans une situation qu’elles savaient particulière, en dehors des textes légaux, et qu’elles ne peuvent se prévaloir d’un droit acquis au maintien indéfini de cette situation  [68] ».

175Dans son arrêt la Cour suspend l’article 124 du décret « à défaut de dispositions transitoires en faveur de la catégorie de directeur à laquelle appartient la partie requérante ». Elle confirme donc bien que le subventionnement est soumis aux règles fixées par l’Autorité mais aussi le droit à la situation acquise pour les personnes requérantes. Elle reconnaît par ailleurs à l’Autorité le droit de sanctionner un pouvoir organisateur qui ne satisferait pas aux conditions imposées, mais de manière « proportionnée », le retrait de toutes les subventions étant en l’espèce, à ses yeux, tout à fait disproportionné.

176Actant cette suspension, un avant-projet de décret devait être élaboré en vue d’introduire un article 140bis formulé comme suit : « Par dérogation à l’article 124 est admise aux subventions l’école dont la direction est assurée, depuis au moins six années à la date de l’entrée en vigueur du présent décret, par un membre du personnel qui n’est ni subsidié ni rémunéré par une subvention traitement. »

177La réunion était prévue pour le 22 octobre 2007. Entretemps, soit le 18 octobre, la Cour constitutionnelle annulait par un nouvel arrêt purement et simplement l’article 124. En effet, elle n’avait que suspendu cet article dans son arrêt antérieur, de manière à protéger les requérants du préjudice qu’ils encourraient à dater de l’entrée en vigueur du décret, soit le 1er septembre 2007. L’Autorité a donc été contrainte de réécrire entièrement ledit article, qui devient :

178

« Dans l’enseignement subventionné, si la direction d’une école au sens de l’article 2 du présent décret n’est pas assurée par un membre du personnel subsidié et rémunéré par une subvention-traitement, la procédure prévue à l’article 24, § 2ter de la loi du 29 mai 1959 modifiant certaines dispositions de la législation de l’enseignement, est entamée, avec perte, le cas échéant, du bénéfice de 20% des subventions accordées conformément au § 2 du même article.
L’alinéa premier ne trouve pas à s’appliquer à l’école dont la direction est assurée, depuis au moins six années à la date d’entrée en vigueur du présent décret, par une personne qui n’est ni subsidiée ni rémunérée par une subvention-traitement. »

179L’Autorité a donc tenu compte des deux objections émises par la Cour constitutionnelle : les droits acquis par la personne en question et la proportionnalité de la sanction, cette dernière valant surtout pour l’avenir.

180Il y eut également d’autres suites au statut des directeurs, ainsi dans les commissions paritaires.

181L’article 74 § 2 du décret prévoit que le pouvoir organisateur « lance un appel à candidature selon les formes déterminées par le gouvernement, sur proposition de la commission paritaire centrale ». La ministre- présidente Marie Arena a adressé au président des commissions paritaires de l’enseignement libre, J.-L. Richard un courrier qui charge les commissions paritaires de lui faire des propositions quant à cet appel à candidatures. Il est à noter que les commissions paritaires, tant dans le libre que dans l’officiel subventionné, vont s’atteler à rédiger une décision pour laquelle elles souhaitent la force obligatoire, plutôt que de s’en tenir strictement à la demande de Marie Arena. Elles estiment, en effet, dans leurs compétences de pouvoir prendre des règles complémentaires au décret.

182Les débats, qui se tiennent les 17 avril et 14 mai 2007 sont plus ardus dans les commissions paritaires de l’enseignement libre subventionné que dans celles de l’officiel subventionné. Le SeGEC et la FELSI ont élaboré, chacun de leur côté, un modèle d’appel, en suivant l’un et l’autre une logique différente. Le SeGEC envisage qu’on fasse appel d’office au tiroir 1 (c’est-à-dire aux personnes qui rencontrent toutes les conditions  [69] ) et qu’on inclue dans l’appel la possibilité qu’a le pouvoir organisateur de faire appel par défaut à d’autres tiroirs et d’inviter ces personnes à poser aussi leur candidature ; la FELSI prône plutôt que le pouvoir organisateur détermine sur l’appel jusqu’à quel tiroir il compte descendre pour engager et de n’inviter à poser leur candidature que les personnes comprises dans ces tiroirs.

183Finalement, une solution intermédiaire est trouvée. Mais avant de clôturer ce point, les organisations syndicales demandent que figure à la rubrique « profil exigé » la mention suivante : « profil arrêté par le pouvoir organisateur après consultation de l’organe de démocratie sociale et, s’il échet, les membres du personnel ». Cette disposition est explicitement prévue dans le décret à l’article 74 §§ 1 et 2. Elles estiment, en effet, qu’il y a, par rapport à une direction, une double attente : celle du pouvoir organisateur, employeur qui engage, mais aussi celle des membres du personnel appelés à collaborer et parfois à subir  [70]. Par ailleurs, elles insistent sur le fait que c’est par rapport à ce profil que le pouvoir organisateur devra justifier son choix auprès des candidats  [71]. Le SeGEC marque sa réticence en arguant du fait que le décret prévoit les formes de l’appel et non un rappel de la procédure ; il estime qu’il lui revient de rappeler aux pouvoirs organisateurs ladite procédure. Sans doute veut-il donner par là des gages aux associations de directeurs qui réfutent toute immixtion syndicale dans le processus d’engagement. Finalement, constatant que le décret précise bien que c’est le pouvoir organisateur qui arrête ledit profil et qu’il peut même y ajouter des conditions supplémentaires, le SeGEC cède sur ce point.

184Un autre point de friction apparaît : celui de la publicité de cet appel ; ce point est mis sur la table par les organisations syndicales qui entendent que la commission paritaire traite également de ce problème. Le SeGEC argue du fait que cela ne correspond pas à la demande de la ministre-présidente. La FELSI s’en tient à l’article 34bis § 3 du décret du 1er février 1993 relatif à la communication de la liste des prioritaires. On peut y lire, pour rappel, que ladite liste est affichée le cas échéant dans chacune des implantations, transmise par voie recommandée aux membres du personnel absents pour une période d’au moins 15 jours et à l’organe de démocratie sociale contre accusé de réception. Le SeGEC veut bien transiger pour autant que l’obligation de communiquer à l’organe de démocratie sociale soit retirée. Argument avancé : avec la liste des prioritaires, il s’agit de contrôler, voire de contester les classements établis par le pouvoir organisateur. Dans le cas d’un appel à candidature pour une direction, il n’y a aucun contrôle de priorités à effectuer. Non, disent les organisations syndicales, mais ce serait la garantie que le pouvoir organisateur a bien respecté les accords pris en commission paritaire. Le SEGEC argumente alors d’une formalité supplémentaire pour les pouvoirs organisateurs, déjà noyés sous la masse des dispositions administratives. Raisonnement que réfutent les organisations syndicales, car l’engagement d’une direction n’est pas fréquent. La situation est bloquée.

185Le président des commissions paritaires va dès lors interpeller Marie Arena quant à savoir ce que recouvre exactement l’appel à candidatures. Cette dernière répond que cet appel recouvre non seulement la forme de l’appel mais aussi la manière dont il sera diffusé. Les discussions reprennent en ce sens-là. La condition la plus débattue au niveau de la diffusion de l’appel sera la remise contre accusé de réception à l’organe de démocratie sociale perçue, semble-t-il, par le SeGEC comme un aval donné par la délégation syndicale, ce que cette démarche n’est pas. Le SeGEC se laissera finalement convaincre. La ministre-présidente avait insisté dans son courrier sur l’absolue nécessité d’arriver à un accord en commission paritaire ; sans doute, le SeGEC craignait-il que, à défaut d’un tel accord, le gouvernement ne prenne lui-même les dispositions qui s’imposent et que lui échappe dès lors la possibilité de régler la procédure d’engagement selon des vues compatibles avec sa perception de la liberté d’engagement.

186Dans la commission paritaire de l’enseignement officiel subventionné, les débats semblent avoir été moins ardus. Essentiellement pour deux raisons. La première est que la commission était, au moment, d’entamer ses travaux, en possession de la réponse de Marie Arena quant à ce que recouvrait sa demande initiale. Ensuite parce que la pratique du recours à l’organe de démocratie sociale locale dans l’élaboration de l’appel à candidature était déjà bien présente. Les représentants des pouvoirs organisateurs ont en l’espèce déclaré qu’ils n’étaient pas demandeurs d’une modification de cette procédure locale, mais que, le décret les y contraignant, ils n’avaient guère le choix.

187Finalement, tant du côté des commissions paritaires de l’enseignement libre subventionné que de celle de l’officiel subventionné l’unanimité sera rencontrée sur des modèles distincts.

188Les décisions prises en commissions paritaires ont été avalisées par le gouvernement de la Communauté française par arrêtés du gouvernement en date du 26 septembre 2007  [72]. Deux circulaires explicatives ont été rédigées, l’une pour le libre subventionné et l’autre pour l’officiel subventionné  [73].

CONCLUSION

189Présentant le projet de décret au Parlement de la Communauté française en vue de son adoption, Marie Arena, ministre-présidente en charge de l’Enseignement obligatoire et de promotion sociale, s’exprime en ces termes : « De sa conception à son adoption aujourd’hui, l’importance des enjeux de ce texte a passionné les différents acteurs de l’enseignement. » Effectivement, puisque les débats se sont étendus sur deux législatures et que l’on a assisté à des prises de position énergiques dans le chef de ces différents acteurs.

190Le texte du décret a fait l’objet de multiples concertations et consultations. Les associations de directeurs, significativement celles présentes dans l’enseignement catholique, relayées par le SeGEC, mais aussi par les fédérations des pouvoirs organisateurs de l’enseignement officiel – le CECP et le CPEONS – ont fait pression tout au long du processus pour stigmatiser la perte d’autonomie que constituait à leurs yeux la volonté de gouvernement d’imposer non seulement des contenus aux formations initiales préalables destinées aux candidats directeurs, mais encore de voir leur certification passer par un jury inter-réseaux. Ces mêmes associations considéraient également l’intrusion des organisations syndicales dans le processus d’élaboration du profil de direction comme étant une évaluation déguisée de cette direction. Les organisations syndicales, par contre, toutes tendances confondues, estimaient que le rôle du pouvoir politique ne se limitait pas à une simple régulation mais qu’il avait aussi à impulser des politiques éducatives. Elles indiquaient également que les premières victimes concernées par une direction incompétente sont les membres du personnel. Dès lors, elles trouvaient légitime d’avoir leur mot à dire dans le processus de recrutement, voire d’évaluation.

191La manière dont a été mené le processus de consultation a permis à l’ensemble des acteurs d’intervenir. Les pouvoirs organisateurs et les associations de directeurs ont obtenu des modifications au texte de départ dès la précédente législature. Mais à la veille des élections régionales et communautaires de 2004, le texte ne les satisfaisait toujours pas. Contrairement à ce que l’on aurait pu croire, le changement de majorité en 2004 n’a pas conduit à une refonte importante du texte élaboré sous la précédente législature. Les nouveaux changements, peut-être les plus significatifs, n’ont été introduits qu’en fin de processus, avec l’aval du gouvernement PS-CDH, en commission de l’Éducation du Parlement de la Communauté française.

192Les arbitrages réalisés par le gouvernement et les derniers aménagements apportés au Parlement de la Communauté française ne laisseront les uns et les autres qu’en partie satisfaits. Les fédérations de pouvoirs organisateurs estiment que le texte a été fortement atténué dans ce qu’ils considèrent comme des dérives centralisatrices, mais qu’il n’en rogne pas moins et un peu plus leur autonomie.

193Les associations de directeurs ont obtenu d’échapper à la formation initiale préalable à l’engagement (elle n’est prévue finalement que préalablement à la nomination), à une évaluation formelle tous les cinq ans (celle-ci n’est plus que formative), à la certification devant un jury inter-réseaux. Elles ont engrangé des passerelles entre les fonctions de sélection et de promotion leur garantissant notamment un retour en douceur à leur ancienne fonction si besoin. Aussi sans doute sont-elles en droit d’être les plus satisfaites par ce décret.

194Les organisations syndicales regrettent que les points communs à tous les réseaux, qu’elles souhaitaient toutes, soient ramenés à la portion congrue. Elles trouvent insuffisant le rapprochement qui a été fait avec ce qui se fait dans le réseau de la Communauté française. Elles considèrent que les membres du personnel qu’elles affilient sont un peu mieux protégés contre l’éventuelle incompétence d’une direction même si leur rôle se limite à une consultation lors de l’élaboration du profil de direction souhaité pour l’établissement. Mais les directeurs, qu’elles affilient en tant que travailleurs salariés, risquent bien de n’être pas souvent en phase avec elles. On touche ici aux limites de l’action syndicale en faveur de travailleurs qui se définissent comme des cadres car devant assumer des mandats qui leur sont confiés par les pouvoirs organisateurs.

195L’application de ce décret dans les écoles montrera si le statut répond, comme l’a exprimé la ministre-présidente Marie Arena devant le Parlement, « aux attentes du monde de l’enseignement ». Mais quoi qu’il en soit, ces attentes restent divergentes, voire contradictoires, selon les acteurs concernés. L’adoption du statut des directeurs n’a été qu’un épisode parmi d’autres de ce constat.

Notes

  • [1]
    B. DE COMMER, « Le statut du personnel de l’enseignement libre subventionné », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1927-1928,2006.
  • [2]
    Décret du 1er février 1993 fixant le statut des membres du personnel subsidiés de l’enseignement libre subventionné.
  • [3]
    Décret du 6 juin 1994 fixant le statut des membres du personnel subsidié de l’enseignement officiel subventionné.
  • [4]
    Décret du 4 janvier 1999 relatif aux fonctions de promotion et de sélection.
  • [5]
    Décret du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre.
  • [6]
    Circulaire n° 12,26 mai 2000 (Les missions du directeur d’école), n° 45,6 avril 2001 (Les missions de la direction d’école) et n° 107 (Les missions de la direction d’école), 13 mai 2002.
  • [7]
    Celui-ci a dans ses attributions les statuts des personnels et c’est donc à ce titre-là qu’il prend cette initiative.
  • [8]
    La composition du jury est déterminée par l’arrêté du gouvernement de la Communauté française du 11 juin 1999 en application de l’article 24 du décret du 4 janvier 1999 relatif aux fonctions de promotion et de sélection. Le jury comprend un directeur général, trois fonctionnaires généraux, trois membres du personnel titulaires de la fonction à conférer désignés par le gouvernement, trois membres du personnel titulaires de la fonction proposés par les organisations syndicales ; les décisions sont prises à la majorité simple des voix.
  • [9]
    À savoir le comité de concertation de base (COCOBA) pour le réseau Communauté française, la commission paritaire locale (COPALOC) pour le réseau officiel subventionné, le conseil d’entreprise, ou à défaut l’instance de concertation locale (ICL) ou défaut avec la délégation syndicale en ce qui concerne le réseau libre subventionné.
  • [10]
    Altereduc, n° 47,29 octobre 2002.
  • [11]
    Ibidem.
  • [12]
    En fait, il n’existe pas à ce moment de statut complet des directeurs dans les autres réseaux. Il existe des conditions d’ancienneté, des procédures d’appel à candidatures et des conditions de titres et, pour le seul le réseau de la Communauté française, de formation.
  • [13]
    En fait, celle qui, depuis janvier 2003, est en débat auprès des organisations syndicales.
  • [14]
    Est ici visé le fait que les associations de directeurs et de pouvoir organisateur ne sont pas formellement concertées lors de l’élaboration de décrets. Les pouvoirs organisateurs le seront ultérieurement.
  • [15]
    On soulignera au passage la confusion, dans le chef de l’auteur de la lettre, entre réseau libre et enseignement catholique. Même si l’enseignement catholique est largement majoritaire dans ce réseau, ce dernier n’en compte pas moins des écoles confessionnelles autres que catholiques (judaïques, islamiques) mais aussi non confessionnelles.
  • [16]
    Dans une conférence de presse en date du 19 janvier 2004, la CSC-Enseignement a réfuté les accusations portées à son encontre. Statut des Directeurs : ce qu’on ne vous a pas dit. Document cosigné par W. Miller (président), M. Desmedt (vice-président), Régis Dohogne (secrétaire général) et P. Boulangé (secrétaire général adjoint).
  • [17]
    Ce qui est visé ici, ce sont les consultations menées peu auparavant auprès des enseignants du fondamental et du secondaire et dont les rapports élaborés par les Facultés St-Louis ont été publiés. Ces rapports mettent en avant les difficultés rencontrées par pas mal d’enseignants avec leur direction.
  • [18]
    UFAPEC. Communiqué de presse du 15 décembre 2003.
  • [19]
    Altereduc, 11 janvier 2003.
  • [20]
    Ibidem.
  • [21]
    Bulletin d’information de la FEDEFOC, n° 1, janvier 2004. Cette demande réitérée à de multiples occasions peut sembler formaliste dans le chef du SeGEC, pourtant très largement consulté sur ce projet de décret. Rappelons qu’à l’époque, le Comité de négociation pour le personnel de l’enseignement libre n’inclut pas les pouvoirs organisateurs. Seules les organisations syndicales négocient formellement avec le gouvernement. Or, à l’issue de ces négociations, le procès-verbal et le protocole de négociation sont transmis au Conseil d’État, qui peut dès lors prendre officiellement connaissance des positions des uns et des autres par rapport au texte. Le SeGEC estime donc à juste titre que son avis n’a pas le même poids que celui des acteurs syndicaux consultés.
  • [22]
    Mémorandum de l’Enseignement catholique, 11 mai 2004.
  • [23]
    Les mots de 2004, <http :// www. cpeons. be>,janvier 2004.
  • [24]
    La Libre Belgique, 12 décembre 2003.
  • [25]
    En moyenne, une par mois. Mais en décembre 2003, il y en aura deux à quelques jours d’intervalle : le 8 et le 10 ; par contre, les partenaires verront pas moins de quatre versions se succéder par courrier électronique ou remises en séance : le 1, le 2, le 5, le 10 décembre 2003..
  • [26]
    Courrier adressé aux divers partenaires en date du 10 novembre 2003.
  • [27]
    Pensée plurielle, n° 7,2004/1.
  • [28]
    Le 9 juillet 2004.
  • [29]
    Cf. B. DE COMMER, « De Pisa 2000 au Contrat pour l’école », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1878-1879,2005.
  • [30]
    Un statut pour les directeurs de l’enseignement… la reprise des discussions, c’est pour bientôt, paraît-il, 10 janvier 2006.
  • [31]
    Cf. B. DE COMMER, « De Pisa 2000 au Contrat pour l’école », op. cit.
  • [32]
    Les mots de 2006, <http :// www. cpeons. be>,mars-avril 2006.
  • [33]
    Ce courrier est adressé aux présidents des partis démocratiques francophones, aux ministres du gouvernement de la Communauté française, aux parlementaires de la Communauté française. Il est cosigné par Reine-Marie Braeken (CECP), Jacques Lefere (CPEONS), Étienne Michel (SeGEC) et Raymond Vandeuren (FELSI).
  • [34]
    Les Mots de 2006, <http :// www. cpeons. be>,mai 2006.
  • [35]
    Communiqué de presse, mai 2006.
  • [36]
    Appellation officielle désignant les personnes mandatées par le gouvernement.
  • [37]
    Procès-verbal de réunion, 6 juin 2006.
  • [38]
    Article 24 § 1er de la Constitution.
  • [39]
    Article 24 § 4 de la Constitution.
  • [40]
    Décret du 20 juillet 2006 relatif à la concertation des organes de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs de l’enseignement et des centres PMS subventionnés, article 4.
  • [41]
    Décret relatif à la concertation des organes de représentation et de coordination des pouvoirs organisateurs de l’enseignement et des centres PMS subventionnés.
  • [42]
    Peu de choses filtreront de cette concertation, si ce n’est ce que rapporte Altereduc dans son n° 139 (27 janvier-9 février 2007) : « Les négociations du gouvernement avec les pouvoirs organisateurs subventionnés n’ont pas abouti à un accord : ils estiment que ce texte restreint leur liberté de choix des directions et risque d’aggraver la pénurie de candidats. »
  • [43]
    Il répondait par là à certaines critiques émanant des directions et des pouvoirs organisateurs qui reprochaient au SeGEC de s’obstiner à négocier de mauvais textes plutôt que de les rejeter en bloc. Courrier aux directions des écoles secondaires catholiques du 15 janvier 2007.
  • [44]
    Arrêt n° 67/2004.
  • [45]
    Décrets du 11 juillet 2002.
  • [46]
    Le titre est en quelque sorte le « diplôme » dont on doit se prévaloir pour exercer une fonction déterminée. Il existe trois sortes de titres : les titres requis, les titres suffisants A et B. Les titres A sont assimilés aux titres requis dans l’enseignement subventionné. Les titres suffisants B sont dérogatoires et doivent être justifiés par une pénurie de titres requis ou suffisants A. Ces titres sont déterminés dans un arrêté.
  • [47]
    Parlement de la Communauté française, Doc. parl. 339-1,28 décembre 2006.
  • [48]
    Celle-ci est composée de 8 PS, 3 CDH, 5 MR, 1 Écolo.
  • [49]
    Ces amendements sont signés par Caroline Cassart-Mailleux (MR), Anne-Marie Corbisier-Hagon (CDH), Véronique Jamoulle (PS), Léon Walry (PS). Deux de ces commissaires sont membres de pouvoirs organisateurs d’école communale : Léon Walry est bourgmestre et Caroline Cassart-Mailleux, conseillère communale. Ils ont donc plus que probablement relayé la position du CECP et du CPEONS en matière de jury, tout comme on peut constater qu’Anne-Marie Corbisier a relayé celle du SeGEC et des associations de directeurs de l’enseignement catholique.
  • [50]
    Pas moins de 66 amendements, pour la plupart techniques.
  • [51]
    Parlement de la Communauté française, Doc. parl. 339-3,10 janvier 2007, p. 16.
  • [52]
    Agence Belga, 10 janvier 2007.
  • [53]
    En fait, des pairs dont les noms sont proposés au gouvernement et qui sont assimilés par ces associations à des personnes mandatées par les organisations syndicales.
  • [54]
    Marcel Neven est président du Conseil de l’enseignement des communes et des provinces.
  • [55]
    Cf. Bulletin d’Information de la FeSEC, 15 janvier 2007.
  • [56]
    Altereduc, n° 139,27 janvier-9 février 2007.
  • [57]
    L’aide administrative octroyée à chaque établissement individuellement, rappelons-le, pourra faire l’objet d’une mise en commun des moyens disponibles par plusieurs d’entre eux regroupés en centres (un centre devra compter au moins 1000 élèves). L’AIDE semble craindre que l’aide administrative ne soit d’une manière ou d’une autre récupérée par les pouvoirs organisateurs pour leur propre fonctionnement plutôt que pour celui des directions.
  • [58]
    Communiqué de presse du 19 décembre 2006 : « Les employeurs de l’enseignement subventionné dénoncent le projet d’accord sectoriel. » R.-M. Braeken, J. Lefere, R. Vandeuren, É. Michel.
  • [59]
    Accord sectoriel du 20 décembre 2006. Communiqué de presse du front commun syndical, en réponse au communiqué de presse du 19 décembre 2006 émanant des fédérations de pouvoirs organisateurs.
  • [60]
    M. PAYEN, Mise en application du nouveau statut des directeurs, CSC-E, mars 2007, p. 32.
  • [61]
    B. DE COMMER, « Ces décrets qui ont beaucoup fâché », Le Sel, n° 1,2007.
  • [62]
    J.-P. VANROYE, « Statut des directeurs », Tribune, n° 12, mai 2007.
  • [63]
    Moniteur belge, 4 septembre 2007.
  • [64]
    Arrêt 106/2007.
  • [65]
    Arrêt de la Cour Constitutionnelle n° 106/2007,19 juillet 2007.
  • [66]
    Ibidem.
  • [67]
    Ibidem.
  • [68]
    Ibidem.
  • [69]
    Cf. articles 80 et suivants du décret.
  • [70]
    Rappelons qu’au cours des négociations informelles et formelles entre 2003 et 2006, les organisations syndicales, mais plus spécialement la CSC-E et le SEL, ont soutenu la pertinence d’une consultation du personnel via leurs organisations représentatives à ce propos. Le projet initial prévoyait même un vote des membres du personnel sur le candidat choisi.
  • [71]
    Article 74 § 3. Le pouvoir organisateur communique aux candidats les motifs de son choix du directeur stagiaire eu égard aux critères fixés dans le profil de la fonction déterminé conformément au présent décret.
  • [72]
    On rappellera que les commissions paritaires de l’enseignement sont communautaires et ne ressortissent pas du niveau fédéral. Elles ne sont donc pas rendues obligatoires par arrêté royal mais par arrêté du gouvernement de ladite Communauté.
  • [73]
    Circulaires 2096 (libre) et 2098 (officiel), 5 novembre 2007.
Français

Le statut professionnel des directeurs d’école a été défini par un décret de la Communauté française du 2 février 2007. Bernard De Commer examine attentivement la genèse de ce décret. Il rappelle les premières réglementations déjà anciennes et éclaire l’accélération subite de l’intervention des pouvoirs publics en la matière, au début des années 2000, après que les statuts des personnels de l’enseignement soient entrés en vigueur et après que le décret « Missions » ait contribué à définir la mission pédagogique du directeur d’école.
Le processus d’adoption du décret est enclenché en 2002 par le ministre Rudy Demotte, bientôt remplacé par Christian Dupont. Les acteurs de l’enseignement expriment vigoureusement leurs revendications dès mai 2002. Des consultations informelles ont lieu jusqu’en décembre 2003. Une bonne année de discussions ne permet pas de dégager un consensus entre organisations syndicales, fédérations de pouvoirs organisateurs et associations de directeurs. Les principaux reproches des pouvoirs organisateurs du subventionné concernent la limitation de la liberté des réseaux de choisir leurs cadres. Les directeurs, eux, voient dans le projet ministériel une mainmise renforcée des organisations syndicales. Mais le dossier, éminemment sensible, est mis au frigo en attendant les élections régionales et communautaires du 13 juin 2004.
L’accord de gouvernement qui lie PS et CDH après les élections, puis le Contrat pour l’école, remettent le texte en débat. En mai 2006, le gouvernement adopte un avant-projet. Directeurs et pouvoirs organisateurs manifestent à nouveau leur opposition bien que le gouvernement ait tenu compte d’une partie de leurs remarques. Le Parlement tranche finalement en leur faveur en adoptant en commission de l’Éducation une série d’amendements relayant leurs préoccupations.

  1. INTRODUCTION
  2. 1. LES PREMIÈRES FORMES D’ENCADREMENT DE LA FONCTION DE DIRECTEUR
  3. 2. SOUS LA LÉGISLATURE ARC-EN-CIEL
    1. 2.1. DES CIRCULAIRES POUR L’ENSEIGNEMENT FONDAMENTAL
    2. 2.2. UNE PROPOSITION DE STATUT
    3. 2.3. L’AVANT - PROJET DEMOTTE
      1. 2.3.1. Missions et compétences attendues
      2. 2.3.2. Organisation et certification de la formation des directeurs
      3. 2.3.3. La lettre de mission
      4. 2.3.4. Le stage et l’évaluation
      5. 2.3.5. L’autonomie des réseaux et la liberté d’engagement des pouvoirs organisateurs
      6. 2.3.6. Le contrôle par les organisations syndicales
    4. 2.4. LES RÉACTIONS DES ACTEURS CONCERNÉS
      1. 2.4.1. Les associations de directeurs
        1. Dans l’enseignement catholique
        2. Dans l’enseignement officiel
      2. 2.4.2. Les fédérations de pouvoirs organisateurs
        1. Le SeGEC
        2. Les pouvoirs organisateurs des réseaux officiels subventionnés
      3. 2.4.3. Positionnement des organisations syndicales
    5. 2.5. LA CONSULTATION DES ACTEURS
      1. 2.5.1. La formation initiale des directeurs
      2. 2.5.2. La certification des formations
      3. 2.5.3. La lettre de mission
      4. 2.5.4. Le stage et l’évaluation des candidats directeurs
      5. 2.5.5. L’évaluation
      6. 2.5.6. La dévolution des emplois
      7. 2.5.7. Les passerelles
  4. 3. SOUS L’ACTUELLE LÉGISLATURE
    1. 3.1. LE PROJET DE DÉCRET ARENA
    2. 3.2. NOUVEAU POSITIONNEMENT DES ACTEURS
    3. 3.3. LA NÉGOCIATION OFFICIELLE AVEC LES ORGANISATIONS SYNDICALES
    4. 3.4. L’AVIS DU CONSEIL D’ÉTAT
    5. 3.5. LE PARCOURS PARLEMENTAIRE
      1. 3.5.1. Les amendements en commission de l’Éducation
      2. 3.5.2. L’adoption en séance plénière
    6. 3.6. RÉACTIONS SUITE À L’ADOPTION DU DÉCRET
    7. 3.7. D’AUTRES ENJEUX DÉSORMAIS PRÉSENTS
    8. 3.8. MODIFICATIONS DU DÉCRET ET RÈGLES COMPLÉMENTAIRES
  5. CONCLUSION
B. De Commer
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Le statut professionnel des directeurs d’école a été défini par un décret de la Communauté française du 2 février 2007. Bernard De Commer examine attentivement la genèse de ce décret. Il rappelle les premières réglementations déjà anciennes et éclaire l’accélération subite de l’intervention des pouvoirs publics en la matière, au début des années 2000, après que les statuts des personnels de l’enseignement soient entrés en vigueur et après que le décret « Missions » ait contribué à définir la mission pédagogique du directeur d’école. Le processus d’adoption du décret est enclenché en 2002 par le ministre Rudy Demotte, bientôt remplacé par Christian Dupont. Les acteurs de l’enseignement expriment vigoureusement leurs revendications dès mai 2002. Des consultations informelles ont lieu jusqu’en décembre 2003. Une bonne année de discussions ne permet pas de dégager un consensus entre organisations syndicales, fédérations de pouvoirs organisateurs et associations de directeurs. Les principaux reproches des pouvoirs organisateurs du subventionné concernent la limitation de la liberté des réseaux de choisir leurs cadres. Les directeurs, eux, voient dans le projet ministériel une mainmise renforcée des organisations syndicales. Mais le dossier, éminemment sensible, est mis au frigo en attendant les élections régionales et communautaires du 13 juin 2004. L’accord de gouvernement qui lie PS et CDH après les élections, puis le Contrat pour l’école, remettent le texte en débat. En mai 2006, le gouvernement adopte un avant-projet. Directeurs et pouvoirs organisateurs manifestent à nouveau leur opposition bien que le gouvernement ait tenu compte d’une partie de leurs remarques. Le Parlement tranche finalement en leur faveur en adoptant en commission de l’Éducation une série d’amendements relayant leurs préoccupations.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/05/2008
https://doi.org/10.3917/cris.1975.0005
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