CAIRN.INFO : Matières à réflexion

INTRODUCTION

1En mars 2000 à Lisbonne, le Conseil européen définit une stratégie devant permettre à l’Union européenne de devenir, à l’horizon 2010, « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale  [1] ». Un axe d’action central prévoit de réaliser « des réformes économiques pour achever et rendre pleinement opérationnel le marché intérieur ». Constatant que la libéralisation du secteur des services demeure encore très incomplète, le Conseil européen demande officiellement à la Commission, au Conseil et aux États membres, « de définir d’ici à la fin de 2000 une stratégie pour l’élimination des entraves aux services » et « d’accélérer la libéralisation dans les secteurs tels que le gaz, l’électricité, les services postaux et les transports  [2] ».

2Depuis lors, la Commission a utilisé son pouvoir d’initiative en proposant deux directives importantes censées remplir les exigences de la Stratégie de Lisbonne. La première, relative aux services dans le marché intérieur, communément connue sous le nom de directive Bolkestein, a généré un large débat de société et une opposition massive, tant dans le monde syndical qu’au sein de la société civile  [3]. Si la seconde a également fait parler d’elle, elle a suscité un conflit beaucoup plus sectoriel : il s’agit de la proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires, également connue sous le nom de « paquet portuaire ». Méconnu, ce conflit européen lié à la libéralisation des services portuaires présente pourtant de multiples intérêts. Deux fois proposée par la même commissaire, la proposition de directive a été deux fois rejetée par le Parlement européen, ce qui constitue en tant que tel une première dans l’histoire de la construction européenne. Elle a suscité, en outre, une mobilisation des travailleurs portuaires à l’échelle européenne, principalement des dockers, qui par son ampleur peut être qualifiée de première du genre.

3Si le conflit s’est déroulé en deux temps, autour d’un premier, puis d’un second paquet portuaire, ceux-ci ont eu une ampleur inégale. La première proposition a été l’objet d’un parcours institutionnel qui a duré près de trois ans, suivant toutes les étapes de la procédure de co-décision, avant d’être finalement rejetée par le Parlement européen. Pendant ces trois années, les oppositions entre acteurs institutionnels, patronaux et syndicaux se sont dessinées, creusées, puis cristallisées. Pendant ces trois années également, les travailleurs portuaires et leurs organisations syndicales se sont organisés pour développer une mobilisation européenne jusqu’alors inédite. Le second paquet portuaire constitue un cas d’étude moins riche que le premier. Adopté très rapidement après le rejet de la première proposition de directive, il a été rejeté dès la première lecture du Parlement européen. S’il a également suscité de larges mobilisations, celles-ci ont été le fruit de la réactivation de méthodes et de réseaux élaborés lors du premier conflit. Pour toutes ces raisons, ce Courrier hebdomadaire est principalement axé sur la première des deux propositions de directive concernant l’accès au marché des services portuaires.

4Ce Courrier hebdomadaire se présente en cinq parties. Après un exposé des origines et du contenu de la première proposition de directive (première partie) sont présentées les positions des principaux acteurs patronaux et syndicaux (deuxième partie). Suit une explication des différents aspects de la mobilisation syndicale (troisième partie). La partie la plus conséquente s’attache à décortiquer plus longuement les multiples étapes parcourues par la proposition lors de la procédure de co-décision (quatrième partie). Enfin, la dernière partie se concentre sur le rejet de la seconde proposition de directive (cinquième partie).

1. LA PROPOSITION DE DIRECTIVE CONCERNANT L’ACCÈS AU MARCHÉ DES SERVICES PORTUAIRES

5En février 2001, la Commission européenne adopte une proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires. Aboutissement d’un processus institutionnel ayant débuté dans les années 1990, ce document très technique en apparence fait rapidement l’effet d’une bombe dans les milieux syndicaux. L’origine de cette proposition de directive, son objectif et son contenu sont présentés dans cette première partie.

1.1. ORIGINES DU PROJET

6Deux documents officiels sont présentés par la Commission comme ayant suscité son initiative. Il s’agit du Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes, qu’elle a publié en 1997, ainsi que des conclusions élaborées par le Conseil européen à Lisbonne en mars 2000.

7Par ailleurs, d’autres sources laissent penser que l’impulsion ne se limite pas à une dynamique purement institutionnelle. Nous examinerons donc également les communiqués de presse de deux organisations patronales : le Conseil des affréteurs  [4] européens (ou European Shippers’ Council – ESC) et l’Association des armateurs  [5] européens (ou European Community Shipowners’ Association – ECSA).

1.1.1. Le Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes

8L’objectif du document publié en 1997 par la Commission européenne est de lancer une discussion sur un triple sujet : l’efficacité des ports et des infrastructures maritimes, leur intégration dans le réseau transeuropéen multimodal  [6] et l’application des règles de concurrence à ce secteur.

9Comme l’explique la Commission dans ce Livre vert, le secteur maritime est d’une importance stratégique, étant donné que plus de 90 % des échanges commerciaux extra-communautaires, environ 30 % du trafic intra-communautaire et plus de 200 millions de passagers par an transitent par ce secteur. Malgré son importance, il n’a toutefois jamais été intégré au débat de la politique européenne des transports. Le trafic maritime n’a par ailleurs pas augmenté sa part de marché par rapport au transport routier. La Commission regrette doublement cette situation, parce qu’elle considère le transport maritime d’une part comme une solution possible à l’engorgement du réseau routier, d’autre part comme le moyen de transport le plus écologique.

10Pour œuvrer au développement du secteur portuaire, la Commission estime qu’il est nécessaire de définir un cadre communautaire « afin de garantir le principe de concurrence sans entrave ni discrimination  [7] ». En effet, la Commission constate que la concurrence entre les ports s’est accrue, mais ce de manière inégale : les services de manutention ont pris une orientation plus commerciale, tandis que les services relatifs aux navires continuent à présenter des restrictions. Un cadre réglementaire au niveau communautaire permettrait de faire appliquer les règles de concurrence et de libéraliser ce secteur, de manière plus systématique, ce qui permettrait de créer dans un délai raisonnable des conditions de concurrence égales entre et à l’intérieur des ports communautaires.

1.1.2. Les conclusions de Lisbonne

11La proposition de directive constitue également une réponse à la Stratégie de Lisbonne  [8] qui a, entre autres objectifs intermédiaires, celui d’achever et de rendre pleinement opérationnel le marché intérieur. Lancé par l’Acte unique européen en 1986, le grand projet du marché intérieur est alors jugé largement inachevé par le Conseil. Constatant que la situation économique s’est améliorée, celui-ci juge que le temps est venu d’entreprendre des réformes. En effet, malgré les nombreux atouts dont jouit l’Union, le Conseil dénombre un certain nombre de points faibles, au rang desquels figure un secteur des services jugé « sous-développé  [9] ».

12Ainsi, il est expressément demandé à la Commission, aux États membres et au Conseil, « eu égard à leurs compétences respectives, de définir d’ici 2010 une stratégie pour l’élimination de l’entrave aux services et d’accélérer la libéralisation dans des secteurs tels que (…) le transport. (…) Il s’agit de réaliser un marché intérieur pleinement opérationnel dans ces secteurs  [10]. »

1.1.3. Les demandes des utilisateurs des ports

13Si la Commission fonde son initiative sur les deux documents précités, il apparaît bien que l’ESC et l’ECSA, deux organisations patronales européennes sectorielles, ont influencé de manière particulière le processus conduisant à l’élaboration de la proposition de directive.

14Le Conseil des affréteurs européens (ESC) affirme représenter « les intérêts de l’industrie européenne en tant qu’utilisatrice de l’ensemble des services de transport de marchandises que ce soit par voie maritime, fluviale, aérienne, routière ou ferroviaire. Les affréteurs sont essentiellement producteurs de biens et services qu’ils commercialisent, vendent et distribuent aux clients. La prospérité de l’Europe et son bien-être économique dépendent de leur capacité à faire cela bien et de manière compétitive  [11] ».

15L’ESC ne représente donc pas les intérêts du secteur du transport, mais des utilisateurs du transport de marchandises. En tant qu’intermédiaire entre l’industrie et les transporteurs, l’ESC s’affirme comme un acteur de poids parmi les lobbies européens, bénéficiant d’un accès privilégié aux centres de décision.

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« Faire entendre sa voix en Europe n’est pas chose facile. Voir ses propositions
acceptées et suivies l’est encore moins. L’avis de l’ESC est largement respecté en
Europe et est écouté. Il commande le respect d’un grand nombre d’organisations,
politiques, environnementales et industrielles, et peut rassembler différents groupes
autour d’une table afin de trouver des solutions réelles et réalisables aux questions
et aux problèmes  [12]. »

17L’Association des armateurs européens (ECSA) représente quant à elle les associations d’armateurs de 22 pays européens. Son objectif déclaré est de « promouvoir les intérêts du transport maritime européen afin de mieux servir les échanges européens et internationaux dans un environnement compétitif de libre entreprise aux bénéfices des armateurs et des consommateurs  [13] ».

18L’ECSA a publié très peu de communiqués de presse avant le début de 2002. Toutefois, cette organisation est maintes fois citée dans les communiqués de l’ESC pour le rôle qu’elle a joué dans l’inspiration et l’élaboration de la proposition de directive.

19En décembre 1998, soit un an après la parution du Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes, l’ESC et l’ECSA publient en commun un communiqué sous-titré « Principes à utiliser comme base  [14] ». L’accent est mis sur la nécessité d’organiser une concurrence libre dans et entre les ports et d’éliminer autant que possible les positions dominantes et de monopole. Le communiqué évoque également certains aspects liés au travail portuaire.

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« L’accès au marché et l’auto-assistance ne devraient pas être restreints, sauf quand
cela se justifie objectivement pour des raisons de sécurité ou de manque d’espace.
(…) Il ne devrait y avoir aucun service obligatoire, sauf en cas de risques bien
déterminés. […] Il faut abolir les types d’organisation du travail dépassés, ainsi que
les autres restrictions limitant/empêchant la libre et juste concurrence et l’efficacité
des services portuaires  [15]. »

21À notre connaissance, c’est la première fois que le terme self-handling, traduit en français par auto-assistance, apparaît dans le cadre de la politique portuaire. Mis en opposition avec les pratiques de travail alors en vigueur considérées comme dépassées, il n’est pas autrement défini. Non mentionné dans le Livre vert de 1997, on verra qu’il aura une place de choix au sein de la proposition de directive relative à l’accès au marché des services portuaires adoptée par la Commission en 2001. Nous attirons l’attention sur ce point car il sera véritablement au centre du conflit entre les dockers et les institutions européennes.

22Il importe surtout ici de repérer les origines de la proposition de directive. Les positions de l’ESC et de l’ECSA seront développées plus en détail dans la deuxième partie. Mais auparavant, il est nécessaire de se pencher sur le contenu même de la proposition tel qu’elle a été élaborée par la Commission européenne.

1.2. PRÉSENTATION PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE

23La proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires adoptée par la Commission européenne le 13 février 2001 a été préparée par les services de Loyola De Palacio. Ministre espagnole de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Alimentation du premier gouvernement de José Maria Aznar de 1996 à 1999, celle-ci occupe de 1999 à 2004 les fonctions de vice-présidente de la Commission européenne chargée des relations avec le Parlement européen et de commissaire des Transports et de l’Énergie.

24La proposition de directive est présentée dans le cadre plus large d’une communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, intitulée « Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe  [16] ».

1.2.1. La Communication sur la qualité des services dans les ports maritimes

25Cette communication vise à regrouper en trois catégories les thèmes clés qui se sont dégagés du débat suscité par le Livre vert de 1997, à savoir « l’intégration des ports maritimes dans le réseau transeuropéen de transport, l’approche exhaustive qu’il conviendrait d’adopter en vue de réglementer l’accès au marché des services portuaires et le financement public des ports maritimes et des infrastructures portuaires  [17] ».

26Le premier point, relatif au réseau transeuropéen de transport, fait l’objet d’une procédure distincte, déjà en cours. Un débat oppose d’ailleurs les parties prenantes quant aux ports maritimes à intégrer dans les schémas de ce réseau. D’après la Commission, « les institutions cherchent en ce moment [soit en 2001] un accord et semblent s’approcher d’une solution satisfaisante  [18] ».

27Le point relatif au financement public occupe les deux tiers de la communication et se présente en trois parties :

  • la Commission présente tout d’abord un inventaire des pratiques de financement public et de tarification en vigueur dans le secteur des ports maritimes communautaires, ainsi que les principales conclusions qui en ont été tirées  [19]. On apprend ainsi, notamment, que 90 % du trafic maritime communautaire est traité dans des ports où ce sont des organismes publics qui prennent les décisions en matière d’investissement et de tarification et que « les opérations de financement public ne sont pas suffisamment transparentes ». De plus, « les règles destinées à garantir que la procédure de sélection des prestataires de services soit loyale et ouverte lorsque leur nombre est limité » sont jugées « ambiguës et inadéquates » ;
  • concernant la transparence, la Commission considère que sa proposition récente de modifier la directive relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques  [20], ainsi que l’obligation légale de tenir des comptabilités séparées introduite dans la proposition de directive sur l’accès au marché des services portuaires  [21], permettront d’améliorer la situation ;
  • lors des discussions sur le Livre vert de 1997, la Commission avait été priée de présenter ses orientations en matière d’aides d’État en faveur des ports. Se disant « parfaitement consciente qu’il serait utile d’éclaircir et de préciser les règles en vigueur », la Commission estime néanmoins « qu’une telle clarification, outre qu’elle doit reposer sur les règles du traité, doit être réalisée à partir de la jurisprudence. [Or] en ce qui concerne les ports, la jurisprudence est rare. […] La Commission continue d’examiner les dossiers au cas par cas lorsque les données et particularités de chaque situation déterminent seules l’issue de l’affaire  [22]. » En outre, la Commission rappelle et commente les règles du traité qui régissent les aides d’État, ainsi que le critère fondamental permettant de définir celles-ci, à savoir la sélectivité.

28Cette décision de la Commission de ne pas lancer de procédure législative en matière de mode de financement public des ports maritimes et des infrastructures portuaires sera fortement critiquée par nombre de députés européens. Nous y reviendrons par la suite.

1.2.2. Le contenu de la proposition de directive

29La proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires découle du deuxième thème clé cité par la Commission dans sa communication. Cette proposition est présentée comme ayant été enrichie par les débats suscités par le Livre vert de 1997 au sein du Parlement européen, du Comité des régions (CDR) et du Comité économique et social (CESE), ainsi qu’avec les représentants des structures concernées, tels que les armateurs, les fournisseurs de services et les syndicats ouvriers  [23].

30Suite aux différentes consultations menées auprès des différents acteurs concernés par la proposition, la Commission conclut que son initiative bénéficie « d’un soutien considérable (mais pas unanime) parmi les secteurs d’activité intéressés  [24] ». Elle signale qu’elle est l’objet de certaines réticences, pour ne pas dire oppositions. Les pilotes, surtout, mais également les sociétés de remorquage, ont fait savoir qu’ils s’opposaient à tout cadre réglementaire au motif que les structures actuelles « ont permis par le passé de garantir des normes de sécurité élevées  [25] ». Selon la Commission, cet argument n’est en lui-même pas suffisant pour exclure a priori ces services de l’application des règles du traité  [26]. D’autres critiques portent sur le fait que les barrières à l’entrée de la manutention du fret ont déjà largement été supprimées et qu’un nouveau cadre réglementaire n’est donc pas nécessaire en la matière. Mais ces objections sont jugées marginales.

31En ce qui concerne la base juridique, il faut remarquer que la Commission définit les services portuaires comme étant des « services à valeur commerciale qui sont normalement fournis contre paiement dans un port ». Cette caractérisation des services portuaires comme des services de nature économique est importante, puisqu’elle détermine quelles sont les règles du traité applicables en la matière  [27]. Or il découle précisément de cette définition que les services portuaires sont normalement régis par les règles de concurrence du traité. Nous verrons par la suite que cette définition même a été objet de conflit.

1.2.3. Les objectifs

32L’objectif premier de la proposition de directive est « de remplacer l’approche au cas par cas de l’application des règles du traité [les quatre libertés de circulation et les règles de concurrence] par une approche plus systématique  [28] ». La Commission estime en effet que le développement inégal de la concurrence entre les ports ne permet pas « de garantir le principe de concurrence sans entrave ni discrimination  [29] ». Malgré une certaine ouverture de l’accès au marché des services portuaires, la Commission constate que celle-ci varie fortement d’un port à l’autre et d’un secteur de service à l’autre  [30]. À l’exception du secteur de la manutention du fret, où les structures traditionnelles ont souvent été remises en cause avec succès, les barrières à l’entrée et les monopoles de nature privée ou publique sont encore chose courante, et ce spécialement dans le secteur du pilotage. Cela aurait pour conséquence « un facteur de coût anormalement élevé pour les utilisateurs portuaires  [31] », alors que celui-ci est devenu un élément essentiel de la concurrence entre les ports.

33Selon la Commission, un cadre réglementaire au niveau communautaire permettrait de faire appliquer les règles de concurrence, permettant ainsi de ne pas faire perdurer une situation qui restreint « indûment les droits que les libertés fondamentales du traité donnent aux fournisseurs de services  [32] ». La Commission considère qu’il est très improbable d’aboutir à une situation satisfaisante en l’absence de réglementation au niveau communautaire  [33]. La proposition de directive est ainsi présentée comme une nécessité afin de libéraliser le secteur portuaire de manière plus systématique, ce qui permettrait de créer dans un délai raisonnable un environnement favorisant le développement de la concurrence entre les ports, mais également dans les ports, c’est-à-dire entre les différents fournisseurs de services d’un même port.

34Cette libéralisation permettrait d’améliorer l’efficacité des services portuaires et ainsi d’encourager « le recours au transport maritime comme mode de transport de substitution (…), réduisant ainsi la tension sur le réseau de transport de la Communauté  [34] ». En effet, la Commission rappelle que le secteur maritime est d’une importance stratégique, étant donné le pourcentage des échanges commerciaux extra et intra-communautaires qui transitent par ce secteur. La part de marché du trafic maritime n’a pourtant pas augmenté par rapport au transport routier, celui-ci étant plus élastique à l’augmentation de la production industrielle  [35]. La Commission regrette cette situation, considérant le transport maritime comme une solution possible à l’engorgement du réseau routier, ainsi que comme le moyen de transport le plus écologique  [36].

1.2.4. Le champ d’application

35Le champ d’application de la directive est défini sous deux angles : les services et les ports.

36D’une part sont concernés par la proposition de directive trois types de services « fournis à l’intérieur d’une zone portuaire pour les utilisateurs du port ». Il s’agit des services techniques nautiques (pilotage, remorquage, amarrage), de la manutention du fret et des services passagers (art. 2 § 1).

37D’autre part sont concernés par la proposition de directive tous les ports et systèmes portuaires maritimes « situés sur le territoire d’un État membre et ouverts au trafic maritime commercial général, à condition que le trafic annuel moyen au cours des trois dernières années n’y ait pas été inférieur à 3 millions de tonnes de marchandises ou à 500 000 passagers » (art. 2 § 2).

1.2.5. Les mesures

38Voici, dans les grandes lignes, les dispositions conçues par la Commission afin de « concilier des exigences de sécurité maritime et de protection de l’environnement et, le cas échéant, des obligations de service public avec un cadre réglementaire qui soit compatible avec un mode de fonctionnement concurrentiel  [37] ». Afin de faciliter le suivi des modifications apportées au texte, ce qui est l’objet de la dernière partie, nous avons mis en italique les aspects de la directive qui ont suscité la polémique.

39La proposition de directive prévoit qu’un système d’autorisation aux fournisseurs de services portuaires peut être imposé par les États membres, sous des conditions d’octroi transparentes, non discriminatoires, objectives, pertinentes et proportionnées. Certains critères facultatifs peuvent être exigés, notamment des obligations de service public. L’autorité compétente doit fournir une formation adéquate lorsqu’un savoir local est indispensable à un fournisseur de services potentiel. En outre, les fournisseurs de services se voient offrir le droit d’employer le personnel de leur choix (art. 6).

40Si le nombre de fournisseurs présents dans un port doit être limité, il est prévu que le nombre le plus élevé possible doit être autorisé, avec un minimum de deux fournisseurs « totalement indépendants l’un de l’autre pour chaque catégorie de fret » (article 7).

41Une procédure de sélection des fournisseurs de services est établie. Celle-ci doit être transparente, non discriminatoire, objective, recourant à des critères pertinents et proportionnés. Il s’agit par là de réduire autant que possible la fonction de l’autorité portuaire en tant que fournisseur de services, dans le cas où elle conjugue les deux fonctions de gestionnaire du port et de fournisseur de services. Il s’agit aussi d’interdire à l’autorité portuaire de choisir ses concurrents, afin qu’elle ne soit plus « simultanément juge et partie  [38] » (article 8).

42Les autorisations sont délivrées pour une durée limitée dans le temps, qui varie « selon que le fournisseur de services n’a effectué aucun investissement ou des investissements insignifiants ou qu’il a au contraire effectué des investissements substantiels, et selon que les actifs dans lesquels les investissements ont été réalisés ont un caractère mobilier ou non  [39] ». Les durées maximales sont, respectivement, de 5,10 et 25 ans (article 9).

43Il est imposé aux fournisseurs de services de tenir des comptes séparés pour chaque activité de service portuaire (article 10).

44Les États membres doivent prendre toutes les mesures nécessaires pour que l’auto-assistance puisse être mise en œuvre. « L’auto-assistance peut être soumise à une autorisation dont les critères d’octroi ne doivent pas être plus stricts que ceux qui s’appliquent aux fournisseurs du même service portuaire ou d’un service portuaire comparable » (article 11).

45La définition proposée par la Commission, qui sera amplement l’objet de débats, est énoncée à ce stade comme une « situation où un utilisateur d’un port se fournit à lui-même une ou plusieurs catégories de services portuaires et dans laquelle, normalement, aucun contrat ayant pour objet la prestation de tels services n’est passé avec un tiers, sous quelque dénomination que ce soit  [40] ». Concrètement, cela autorise les compagnies maritimes à ne plus devoir faire appel aux dockers pour charger et décharger les cargaisons.

46Le principe du droit à l’auto-assistance établit « qu’il n’existe en fait aucune raison pour interdire en principe l’auto-assistance dans les ports si les exploitants estiment que cette solution leur permet de mieux utiliser leurs ressources et apporte des gains d’efficacité à leurs propres services  [41] ».

47Dans le cas où l’organisme gestionnaire du port exerce également les activités d’un fournisseur de services, il est exigé que les comptes des différentes activités soient séparés afin de faciliter les contrôles quant aux flux financiers entre les différentes activités de l’organisme gestionnaire, dans la perspective d’une plus grande transparence. L’autorité compétente pour délivrer les autorisations peut réserver la fourniture d’un service particulier à l’organisme gestionnaire du port pour une durée de cinq ans si aucun fournisseur n’a été trouvé (article 12).

48Afin de garantir la transparence complète de la procédure de sélection, les États membres doivent mettre en place des procédures de recours, ainsi qu’un contrôle juridictionnel (article 13).

49Il est rappelé que « la directive n’affecte en rien les droits et obligations des États membres en matière d’ordre public, de sûreté et de sécurité dans les ports ainsi qu’en matière de protection de l’environnement » (article 14).

50La directive ne dispense pas les États membres d’assurer l’application de leur législation sociale, et ce « sans préjudice de l’application des dispositions de la présente directive et dans le respect des autres dispositions du droit communautaire » (article 15).

51Enfin, des mesures transitoires sont prévues par l’article 16.

52Si les oppositions entre les différentes institutions européennes se développeront sur de nombreux aspects de cette proposition, l’article relatif à l’auto-assistance est le seul qui engendrera le conflit social avec les dockers. Nous y reviendrons par la suite.

2. LES POSITIONS DES INTERLOCUTEURS SOCIAUX

53Afin de comprendre la manière dont la proposition de directive a été reçue par les acteurs concernés, il importe de se pencher sur leurs réactions. Nous examinerons successivement les positions des acteurs patronaux et des acteurs syndicaux.

2.1. LES ORGANISATIONS PATRONALES

2.1.1. Présentation des acteurs

54Sur le versant patronal, quatre acteurs européens ont pris part au débat. Deux de ces acteurs ont déjà été présentés dans la première partie. Il s’agit de l’ECSA et de l’ESC, qui représentent respectivement l’industrie maritime et ses utilisateurs.

55Les deux autres acteurs représentent les services portuaires au niveau européen. Il s’agit d’une part de l’Organisation des ports maritimes européens (ESPO). À l’heure actuelle, soit depuis l’élargissement de l’Union en 2007, cette organisation représente les autorités portuaires de plus de 1 200 ports maritimes européens, répartis dans vingt États membres. Les autorités portuaires sont pour la plupart des organismes publics, sauf dans les ports complètement privatisés, qui ne sont pas représentés par l’ESPO. Souvent, les autorités portuaires dirigent des compagnies publiques qui fournissent des services dans le port  [42]. Il s’agit majoritairement des services de pilotage, de remorquage et d’amarrage. Dans certains cas, les autorités portuaires s’occupent également des services de manutention, d’entreposage et des services aux passagers. Dans ces pays européens, les autorités portuaires sont donc les employeurs d’un grand nombre de travailleurs portuaires, dont des dockers.

56D’autre part, la Fédération des opérateurs portuaires privés européens (FEPORT) représente les opérateurs  [43] portuaires privés opérant tant dans les ports privés que dans les ports publics. Les quelque 800 opérateurs portuaires membres de la FEPORT pèsent pour près de 90 % des services de manutention en Europe  [44]. L’exploitation des ports récemment privatisés est assurée par des opérateurs de terminaux, dont les plus importants sont devenus des opérateurs multimodaux, qui gèrent la marchandise tout au long de la chaîne logistique, depuis la porte de l’usine jusqu’au point de vente  [45].

57Si ces deux organisations représentent des intérêts différents au sein des services portuaires européens, elles ont un rapport similaire avec les travailleurs, en tant que représentants de leurs employeurs (rapport qui varie cependant fortement d’un pays à l’autre). Leurs positions convergent d’ailleurs régulièrement.

58Ces quatre acteurs patronaux européens renvoient donc à des positions distinctes dans le paysage économique européen et par conséquent à des intérêts potentiellement divergents. De fait, ces différentes organisations n’ont pas eu une réaction unanime vis-à-vis de la proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires. On remarque toutefois une ligne de démarcation entre les positions des deux organisations représentant les services portuaires et les deux autres. Voyons les réactions de chacune d’entre elles.

2.1.2. Réactions face à la proposition de directive

L’ESPO

59En janvier 2001, soit quelques semaines avant l’adoption de la proposition de directive par la Commission, l’ESPO salue l’initiative de la Commission de donner suite au Livre vert de 1997. L’organisation regrette toutefois que cette initiative « soit interprétée par certains comme un signal selon lequel les ports européens et les fournisseurs de services seraient des maillons inefficaces de la chaîne de transport  [46] ». L’ESPO souligne également que la future proposition de directive ne doit pas avoir pour objectif d’harmoniser le secteur selon un modèle unique d’organisation portuaire. Cette harmonisation n’est jugée ni nécessaire, ni désirable  [47].

60En juin 2001, l’assemblée générale de l’ESPO affirme son adhésion aux principes de base de la proposition de directive, et en particulier à l’accès libre et non discriminatoire au marché des services portuaires, aux principes de « bonne gouvernance », tels que la transparence ou l’existence de procédures de recours et à la neutralité des autorités portuaires vis-à-vis des fournisseurs de services  [48]. L’ESPO rejoint également la Commission sur le fait qu’aucun type de service ne devrait être exclu a priori du champ d’application de la proposition  [49].

61L’organisation déclare néanmoins avoir de sérieuses inquiétudes au niveau de l’application pratique de certaines mesures contenues dans la proposition. Selon elle, plusieurs points doivent être amendés  [50] :

  • les règles concernant les durées de validité des autorisations et les périodes de transition risquent de décourager les investissements dans le secteur portuaire. Les amendements doivent aller dans le sens d’une plus grande stabilité afin d’assurer la rentabilité et il faut prévoir des dédommagements pour les fournisseurs qui seraient contraints de sortir du marché suite à l’application de la nouvelle législation ;
  • les autorités portuaires ont une fonction stratégique de première importance. Or cela n’est pas reconnu par la proposition. Celle-ci prévoit que la sélection des fournisseurs soit la compétence d’une nouvelle entité indépendante. L’ESPO conteste cette orientation, avançant que le développement d’une structure parallèle générerait des conflits d’intérêt et qu’une autorité portuaire doit conserver le droit de refuser l’accès aux fournisseurs qui ne cadrent pas avec la politique de développement du port ;
  • la proposition de directive ne tient pas assez compte de la diversité du secteur portuaire. Les différents services existant dans un port ne bénéficient pas de marchés comparables. Le marché des services de manutention est plus large que le port lui-même, ce qui n’est pas le cas des services techniques nautiques. De plus, le degré de libéralisation actuel n’est pas identique selon le type de service, les services de manutention étant bien plus libéralisés que les autres. Enfin, l’obligation d’accepter au moins deux fournisseurs pour chaque type de service est dénoncée comme une manière artificielle de développer la concurrence ;
  • plusieurs mesures vont compliquer la gestion des ports et, par conséquent, augmenter les problèmes de bureaucratie. L’ESPO vise ici la création d’une nouvelle autorité compétente pour les procédures de sélection, ainsi que le système des autorisations devant être accordées aux fournisseurs ;
  • il faut veiller à ce que la qualité des services fournis ne diminue pas. À cet égard, l’ESPO attire l’attention sur la possibilité offerte aux fournisseurs d’employer le personnel de leur choix.

La FEPORT

62Mise au courant de l’initiative de la Commission avant l’adoption de la proposition, la FEPORT déclare fin 2000 « qu’une proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires pourrait avoir une valeur ajoutée pour les services de manutention dans les ports maritimes, à condition que l’accent soit mis sur les problématiques suivantes :

  • des conditions égales pour les fournisseurs publics et privés en évitant les distorsions à la concurrence dues au financement public et aux droits exclusifs ;
  • des mesures évitant qu’une autorité portuaire agisse en tant que juge et partie directement intéressée lorsqu’il s’agit d’allouer les zones du port aux fournisseurs  [51] ».

63Lors de la publication de la proposition de directive, la FEPORT se montre assez déçue du texte proposé par la Commission. Elle critique fortement ce qui lui apparaît comme un déséquilibre entre règles strictes et principe de subsidiarité. Selon la FEPORT, le texte présente de nombreuses zones d’ombre. En augmentant l’incertitude, la proposition risquerait d’augmenter les distorsions à la concurrence et ainsi, de se révéler contre-productive  [52]. La FEPORT précise également sa position sur plusieurs points spécifiques.

Les conditions actuelles de concurrence

64La FEPORT se dit très déçue par le fait que la question de la concurrence entre les ports et celle des aides d’État ne soient pas mieux étudiées. Sur ce dernier point, la FEPORT juge que les arguments utilisés par la Commission pour justifier le fait de ne pas établir de lignes directrices ne sont ni corrects, ni convaincants.

65Selon la Commission, « plusieurs opérateurs potentiels, publics et privés, ont fait face à maints obstacles alors qu’ils souhaitaient entrer sur le marché ». D’après la FEPORT, cette affirmation est largement infondée, dès lors que les évolutions récentes abondent déjà dans le sens d’une plus grande ouverture du marché  [53]. « La nature, la fréquence et l’importance de ces obstacles ne sont pas élucidées, prouvées ou illustrées par la Commission  [54]. » De son point de vue, la FEPORT estime que l’accès au marché des services portuaires génère peu de conflits, spécialement dans le secteur de la manutention.

La question du minimum de deux fournisseurs

66La FEPORT considère que « cette mesure entre en conflit avec l’objectif même de la proposition de directive, qui est de réduire les coûts des services dans les ports maritimes  [55] ». Dans certains ports, le marché ne serait pas assez large pour permettre à deux fournisseurs d’un même service d’être compétitifs et innovants. Dès lors, il devrait revenir à l’autorité portuaire de décider du nombre de fournisseurs nécessaire.

L’auto-assistance

67La FEPORT adhère au principe selon lequel les fournisseurs de services doivent pouvoir employer le personnel de leur choix. Cela permettrait d’adapter l’organisation du travail portuaire aux standards actuels  [56]. Néanmoins, la FEPORT considère, en matière d’auto-assistance, que « les propositions ne sont pas acceptables sous la forme présentée par la Commission et doivent être l’objet de recherches ultérieures  [57] ». L’auto-assistance devrait être possible pour l’équipage régulier à bord uniquement et les critères appliqués aux compagnies pratiquant l’auto-assistance devraient être les mêmes que ceux appliqués aux autres fournisseurs de services  [58].

La durée des autorisations

68Les durées des autorisations indiquées dans la proposition sont considérablement inférieures à celles pratiquées actuellement dans les contrats de bail par les États membres, qui sont de maximum 70 ans en France et 99 ans en Belgique  [59]. La FEPORT affirme que la durée des concessions doit relever des parties contractantes, en accord avec le principe de subsidiarité  [60].

69La FEPORT rappelle également que la main-d’œuvre portuaire est hautement qualifiée et que les formations pour atteindre le niveau de compétence requis sont en partie prises en charge par le fournisseur de service pendant la durée de la concession. Dans le cadre du nouveau système proposé par la Commission, l’organisation estime qu’il est fort à craindre que ces investissements ne seront plus faits en fin de période de concession, ce qui peut avoir un impact sur l’efficacité et la sécurité  [61].

L’ESC

70Sans surprise, l’adoption de la proposition de directive par la Commission en 2001 est accueillie très positivement par l’ESC, qui se dit particulièrement satisfaite de voir ses recommandations générales de 1998 largement incorporées au texte de la Commission  [62]. L’ESC est incontestablement l’acteur patronal qui a montré le plus d’enthousiasme face à l’initiative de la Commission : « Nous pensons que la directive a le potentiel d’améliorer significativement la qualité des services offerts dans les ports européens et que cette amélioration se manifestera par des opportunités croissantes pour l’industrie européenne et une activité croissante pour les ports et les fournisseurs de services portuaires  [63]. » L’importance du secteur du transport est mise en exergue par le président de l’ESC : « Le transport de marchandises est à la fois le corollaire de l’activité économique et son prérequis absolu et fondamental. Aucune activité économique n’aurait de sens ni d’utilité s’il n’y avait pas de transport de marchandises résultant de cette activité  [64]. »

71L’accent est mis sur le rôle crucial et croissant qu’ont et auront à jouer les ports dans un système de transport de plus en plus intégré et sur l’importance de réformer l’organisation de la manutention dans cette optique. Dès la publication de la proposition de directive, l’ESC rappelle l’importance de mettre fin aux pratiques de travail en vigueur : « La première priorité de tous les systèmes logistiques et de toutes les chaînes d’approvisionnement est la précision et la fiabilité. L’industrie manufacturière dépend largement de chaînes d’approvisionnement organisées selon le concept just in time. Une manutention inefficace dans les ports a souvent pour conséquence de laisser les navires et les cargos trop longtemps à l’arrêt dans les ports. Afin d’encourager la compétition et l’efficacité, l’auto-assistance devrait toujours être rendue possible. L’ESC soutient la régulation européenne visant à assurer le droit à l’auto-assistance dans les services portuaires. (…) L’article 11 [relatif à l’auto-assistance] est un prérequis essentiel à l’abolition d’une organisation du travail dépassée  [65]. »

72D’après l’ESC, ce sont les discussions menées avec la Commission depuis la publication du Livre vert de 1997 qui ont permis de parvenir à ce résultat. Un communiqué ultérieur, publié l’année suivante, se fait encore plus précis : « L’ESC considère l’inclusion de la manutention comme un grand succès pour les affréteurs et les organisations représentant l’industrie qui ont travaillé avec l’ESC (l’ECSA, l’UNICE  [66], l’ECASBA  [67], et la CLECAT  [68] ). Ce succès est le résultat de nos efforts déterminés en matière de lobbying afin de sensibiliser et de réunir du soutien autour de ce sujet crucial  [69]. »

73L’ESC formule toutefois quelques réserves sur les aspects du texte proposé par la Commission qu’elle juge trop timides  [70] :

  • la directive devrait selon elle s’appliquer à tous les ports, indépendamment de la taille ;
  • « l’accès au marché ne devrait être fermé à aucun entrant potentiel car la simple menace de la concurrence stimule l’efficacité des entreprises présentes sur le marché. Le marché assurera la prospérité aux entreprises offrant de hauts niveaux de service aux utilisateurs portuaires. Celles n’offrant pas ces hauts niveaux de service seront écartées » ;
  • « le nombre de fournisseurs de services devrait être déterminé par le marché et par conséquent, ne devrait être restreint ou régulé d’aucune manière que ce soit » ;
  • l’ESC considère qu’il est fondamental que « des arguments fallacieux liés à la sécurité ne soient pas utilisés comme prétexte au maintien de monopoles ou de restrictions d’accès ».

74L’ESC soutient donc entièrement l’orientation que prend la proposition de directive, tout en soulignant que celle-ci pourrait aller plus loin sur certains points. Le rôle que l’ESC s’attribue dans l’élaboration du texte est à souligner.

L’ECSA

75L’ECSA a également réagi positivement à la proposition de directive, soulignant surtout, dans un premier temps, l’importance d’une libéralisation des services portuaires, et donc d’un accord sur la proposition de directive, pour accroître l’efficacité de l’ensemble de la chaîne de transport  [71].

76Au vu des positions des quatre organisations patronales précitées, on peut distinguer une ligne de démarcation entre, d’une part, les deux organisations sectorielles portuaires et, d’autre part, celles liées aux services maritimes et à l’industrie en général. Alors que l’ESC et l’ECSA se distinguent par un soutien considérable à la proposition de la Commission, l’ESPO et la FEPORT n’y apportent qu’un soutien partiel. Les réserves émises par ces deux dernières organisations sont toutefois différentes, sauf sur la question de la durée des autorisations.

2.2. LES ORGANISATIONS SYNDICALES

77Les organisations syndicales actives dans le secteur ont réagi tout différemment à la proposition de directive de la Commission européenne. Elles ont progressivement mobilisé leurs membres et mené des actions en vue de modifier, puis d’obtenir le rejet de la directive proposée par la Commission.

78La mobilisation contre le paquet portuaire a impliqué un nombre impressionnant de structures syndicales du secteur du transport à travers l’Europe, réparties sur plusieurs niveaux d’organisation : local, national, européen et mondial.

79Les structures européennes et mondiales, qui sont présentées ci-dessous, ne doivent pas être considérées comme des organisations indépendantes. Leur rôle premier est de rassembler et de coordonner les activités des syndicats nationaux. Fonctionnant avec des effectifs souvent très réduits, elles peuvent également, quand cela leur est possible, contribuer à étudier les dossiers et à définir des stratégies. Toutefois, elles n’ont généralement que peu de contacts directs avec les travailleurs de base, puisque tel n’est pas leur but premier, et sont le plus souvent peu connues de ceux-ci.

80Indépendamment du rôle potentiellement important de ce type de structure dans la construction de la solidarité transnationale, les syndicats locaux et nationaux restent au centre de la mobilisation. Ce sont eux qui représentent les travailleurs de base, ce sont eux qui se coordonnent au niveau européen pour partager leurs expériences et décider des actions, ce sont encore eux qui font redescendre les décisions à la base et qui, éventuellement, permettent de les concrétiser. Une recherche approfondie sur une mobilisation telle que celle qui s’est développée dans les ports européens demande qu’une attention particulière soit accordée aux dynamiques nationales spécifiques, ainsi qu’aux relations que chacune d’entre elle entretient avec les autres.

81Ce Courrier hebdomadaire n’étant pas le cadre approprié pour entreprendre cette démarche, une approche globale est privilégiée  [72]. Autant que possible, des références aux spécificités nationales sont mentionnées, mais seulement telles qu’elles ont été perçues depuis les structures internationales. Cette partie se concentre sur la présentation des acteurs syndicaux internationaux et sur leurs premières réactions face à la proposition de directive. La mobilisation en tant que telle fait l’objet de la partie suivante.

2.2.1. Présentation des acteurs

82Au niveau international, trois organisations syndicales sectorielles ont pris part à la mobilisation.

83L’International Federation of Ship, Dock and Riverside Workers a été fondée en 1896. Cette organisation a intégré les travailleurs du transport terrestre en 1898 et est devenue l’International Transport Workers’ Federation (ITF – Fédération internationale des ouvriers du transport). En 2004, l’ITF comptait plus de 5 millions d’affiliés, répartis dans 621 syndicats de 137 pays. Parmi ces 5 millions d’affiliés, 380 000 exercent la profession de docker et 655 000 celle de marin  [73].

84La Fédération européenne des ouvriers du transport (ETF) est l’antenne européenne de l’ITF. Fondée en 1999, l’ETF constitue l’une des onze fédérations syndicales de la Confédération européenne des syndicats (CES) et emploie actuellement une équipe de douze permanents à Bruxelles, dont deux sont en charge des ports et docks. Son staff était cependant plus réduit au début des années 2000.

85Le Conseil international des dockers (IDC) est une fédération distincte des deux précédentes, issue de l’association de syndicats plus radicaux n’étant affiliés à aucune organisation syndicale dominante et de dissidences de syndicats affiliés à l’ITF, dont une résultant du long conflit qui eut lieu dans le port de Liverpool à la fin des années 1990  [74]. Elle a été fondée en 2000 aux Îles Canaries. D’après les seuls chiffres disponibles, l’IDC représenterait mondialement quelque 50 000 dockers, parmi lesquels il n’est pas possible de distinguer le nombre de ceux actifs sur le continent européen. Il est toutefois clair que l’IDC constitue une organisation moins importante que l’ITF. De plus, elle publie peu d’informations sur ses activités.

2.2.2. Prise de connaissance du projet de la Commission et premières réactions

86L’ETF a été contactée par la Commission en juillet 2000 sous la forme d’un bref questionnaire sur l’accès au marché des services. « L’ETF a été invitée à répondre à ces dix questions très précises dans un délai d’à peine deux semaines. (…) L’ETF a sollicité un report du délai pour avoir le temps de consulter ses affiliés et a renvoyé ses réponses au questionnaire en septembre  [75]. »

87Alors qu’un projet de proposition commence à circuler dès novembre 2000, ce n’est qu’au cours du mois de janvier 2001 que le secrétaire de la section dockers de l’ITF, Kees Marges, prend connaissance du projet de la Commission. La réaction est immédiate : « La Fédération internationale des transports a averti qu’elle déclencherait une guerre dans les ports européens si la Commission européenne ne modifie pas certains éléments clés de sa prochaine et déjà très controversée directive concernant l’accès au marché des services portuaires  [76]. » C’est à dessein que K. Marges parle de guerre dans les ports, soit, en anglais, waterfront war. Ce terme est utilisé en référence à un conflit de taille qui éclata dans les ports australiens quelques années auparavant : « En utilisant ce terme, toute l’industrie comprendrait immédiatement ce que nous voulions vraiment dire par s’opposer à la directive  [77]. »

88La première réunion officielle de l’ETF avec la Commission au sujet de la directive avait eu lieu peu après, soit moins d’un mois avant la publication de celle-ci. Pendant cette réunion, l’ETF insiste pour qu’il ne soit plus fait mention de l’auto-assistance dans la proposition et croit obtenir des garanties en ce sens  [78]. Tel n’a cependant pas été le cas puisque l’auto-assistance figure bel et bien parmi les articles de la proposition adoptée en février. Par conséquent, et selon ces organisations elles-mêmes, « il n’est guère surprenant que l’ITF, l’ETF et les syndicats portuaires aient jugé le processus de consultation totalement inadéquat, voire insultant  [79] ».

89Fin août 2001, K. Marges envoie un communiqué à l’ensemble des groupes politiques présents au Parlement européen. Il y dénonce fortement les dires de la Commission : « Contrairement aux informations diffusées par la Commission, ni l’ETF, ni l’ITF, ni leurs affiliés n’ont été consultés au sujet d’aucune version préliminaire de la proposition. Toutes les communications entre nous et la Commission au sujet de la manutention ont pris fin après la dernière discussion liée au Livre vert sur les ports et les infrastructures maritimes (…) en février 1999. En ce qui concerne le court questionnaire reçu de la Commission, nous ne le reconnaissons pas comme une tentative sérieuse de nous consulter ou de communiquer avec nous  [80]. »

90Pour l’ITF, les conséquences d’une telle proposition de directive sont claires. Si elle est adoptée, elle « causera une dégradation des conditions de travail des travailleurs portuaires, menacera leur emploi, mettra en danger leur santé et leur sécurité, portera un coup à leurs qualifications et réduira leurs compétences  [81] ». Il en résultera nécessairement une transformation des ports européens en des ports sous-normes  [82]. Voici en quels termes le scénario est dépeint : « Les compagnies maritimes sous-normes – qui ne sont déjà que trop nombreuses – feront tout ce qui est en leur pouvoir pour forcer les « autorités compétentes » à accepter des normes inférieures dans les ports (…). Elles attendront le bon moment, le bon endroit, les bonnes personnes et alors elles attaqueront. (…) Dans un environnement de concurrence croissante, quelque part en Europe – au nord, au sud, à l’ouest ou à l’est – l’introduction d’un port sous-norme sera acceptée. De là, la maladie s’étendra  [83]. »

91Les acteurs patronaux et syndicaux ont donc une appréciation fort différente de la proposition de la Commission. Alors que l’ensemble des lobbies patronaux soutient l’objectif d’un renforcement de la concurrence, les organisations syndicales internationales mettent l’accent sur les répercussions sociales d’une telle orientation. Parallèlement, alors que deux des organisations patronales, l’ESC et l’ECSA, peuvent se féliciter de voir leurs propositions intégrées au texte de la Commission, l’ETF et l’ITF se montrent scandalisées d’avoir été tenues à l’écart des discussions préalables à la présentation de la proposition de directive.

92En tant que première tentative européenne de libéraliser un secteur historiquement reconnu comme bastion syndical où il n’existe, de surcroît, aucune forme de dialogue social institutionnalisé au niveau européen  [84], la proposition de directive a rapidement déclenché un conflit de grande ampleur dans l’ensemble des services portuaires européens.

93Voyons comment la mobilisation des dockers s’est développée avant d’examiner les réactions des différents lobbies patronaux face à elle (troisième partie). Nous examinerons ensuite en détail le parcours institutionnel suivi par la proposition de directive ainsi que les rapports de forces qui se sont manifestés dans ce cadre (quatrième partie).

3. LE MOUVEMENT TRANSNATIONAL DE GRÈVE

94Déclencher ce qu’elle qualifie de guerre dans les ports, tel est le projet de l’ITF lorsqu’elle découvre le document de la Commission. Néanmoins, développer une mobilisation à l’échelon européen est un projet ambitieux que peu d’autres secteurs sont parvenus à réaliser  [85]. De fait, la mobilisation européenne des dockers n’a pu se développer qu’en surmontant d’importants obstacles : différences de langue et de culture syndicale, construction d’une solidarité par-delà les frontières, mobilisation à la base pour une campagne « distante ».

3.1. DÉFINITION D’UNE STRATÉGIE COMMUNE

3.1.1. Le désaccord entre l’ETF et l’ITF

95Lors des premiers mois qui suivent le lancement de la procédure institutionnelle entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen (cf. infra), les organisations syndicales internationales tirent la sonnette d’alarme : cette proposition de directive ne peut être acceptée, du moins pas telle quelle. Sur le fond, tant l’ETF que l’ITF sont d’accord. Quant au choix de la méthode et de la stratégie, d’importants désaccords ont toutefois fait surface entre certains dirigeants syndicaux. D’après le secrétaire de l’époque de la section dockers de l’ITF, « il y avait de sérieuses divergences de point de vue, notamment entre le président de la section Dockers de l’ETF, Manfred Rosenberg  [86], et moi-même. Empreint de rigueur, il voulait que l’ETF ait une opinion sur chaque détail de la directive. Comme beaucoup d’autres délégués, il ne comprenait pas que l’organisation des services portuaires est différente dans chaque port. (…) En réalité, chaque délégué considère les mesures européennes de son propre point de vue et avec le savoir-faire tiré de l’expérience acquise dans son pays. Ainsi, depuis le départ, je savais que tenter de développer une proposition complète sur tous les aspects de la directive nous mènerait à une situation que personne ne comprendrait ni n’accepterait  [87]. »

96Dans un premier temps donc, la guerre dans les ports prend la forme d’une guerre des mots, « une lutte pour l’insertion et/ou la formulation de divers articles dans la proposition de directive  [88] ». Ce choix stratégique de l’ETF souleva la consternation parmi les dirigeants de l’ITF « qui craignaient que le biais technocratique des activités syndicales conventionnelles détourne l’attention de la campagne des questions de principe (opposition à une concurrence renforcée et au droit à l’auto-assistance) à des questions de détail (amendements au texte de la directive)  [89] ».

97Si la stratégie de l’ETF est jugée mauvaise, quelle est donc celle des responsables de l’ITF ? K. Marges explique lui-même : « Mon plan était de sélectionner quelques aspects de la proposition de directive qui pourraient nous unir et non nous diviser. Ainsi, j’ai proposé de se concentrer sur le fait 1) que les services de manutention seraient effectués par des marins et des travailleurs inexpérimentés et 2) que nous voulions éviter que les ports européens ne se transforment en ports de complaisance. Et d’oublier le reste  [90]. »

98Ayant d’abord entrepris de développer une approche exhaustive, l’ETF tente également d’appeler au dialogue social, sans succès. Cette revendication d’organiser le dialogue social dans le secteur portuaire n’est d’ailleurs pas neuve, mais n’a jamais pu aboutir à cause, notamment, du refus de la FEPORT d’y participer  [91]. L’ETF décide finalement de se concentrer sur les aspects de la proposition de directive touchant directement les travailleurs portuaires. Les dissensions quant à la marche à suivre s’atténuant progressivement, l’ETF se range à la stratégie évoquée par K. Marges  [92].

3.1.2. La résolution de Londres

99Un premier meeting de la section dockers de l’ITF a lieu à Londres au mois de juillet 2001. Les membres de l’ETF profitent également de cette rencontre pour se réunir. La résolution adoptée à cette occasion définit la stratégie qui sera appliquée par la suite par la majorité des affiliés des deux organisations.

100Ce texte commence par envisager les conséquences d’une telle directive : « a) des ports européens en dessous des normes ; b) un emploi réduit pour les travailleurs portuaires bien formés et instruits, qui seraient remplacés par des travailleurs temporaires non formés ; c) un environnement de travail non sécurisé pour les travailleurs sur les quais et les navires ; d) des conditions dangereuses sur les rives et les canaux comme conséquence de l’introduction d’une concurrence insuffisamment régulée dans le secteur du pilotage ; e) des violations de la Convention 137 de l’OIT dans les pays l’ayant déjà ratifiée et incorporée à leur législation nationale  [93] ».

101La résolution rappelle ensuite le refus persistant des services portuaires européens de mettre en place « un espace propre de dialogue social et de consultation, forçant les syndicats à chercher d’autres moyens de convaincre les autres partie prenantes de l’industrie ».

102La section dockers de l’ITF en conclut « que la commissaire européenne à l’Énergie et aux Transports semble refuser d’accorder le temps nécessaire à de sérieuses consultations et qu’aucun espace ne semble disponible pour amender le texte actuel » de la directive.

103Par conséquent, la section dockers de l’ITF « recommande avec insistance au Parlement européen d’interrompre les discussions sur la proposition et de reporter ces discussions jusqu’à ce qu’une solution consensuelle soit trouvée avec l’industrie ; appelle tous les syndicats des travailleurs portuaires affiliés à l’ITF et à l’ETF en Europe à contacter leur gouvernement national et leurs propres membres du Parlement européen afin de pousser le Parlement européen à interrompre les discussions sur la proposition et de reporter ces discussions jusqu’à ce qu’une solution consensuelle soit trouvée avec l’industrie ; demande que les secrétariats de l’ITF et de l’ETF ainsi que les syndicats portuaires affiliés préparent dans les prochains mois toute action qui puisse être nécessaire et appropriée pour convaincre le Parlement européen et le Conseil des ministres que les discussions sur la directive devraient être reportées jusqu’à ce qu’une solution consensuelle soit trouvée avec l’industrie  [94] ».

104Cette résolution appelle donc au rejet de la proposition de directive. Elle prévoit que le combat s’opère à partir des syndicats nationaux à deux niveaux distincts : par un travail de lobbying aux niveaux national et européen d’une part, par un travail de mobilisation des travailleurs à la base en vue d’actions qu’il reste à définir d’autre part. D’un côté, la résolution de l’ITF vise à adapter la méthode d’action au processus de prise de décision, ce qui implique de faire pression sur les parlementaires, européens principalement, et les gouvernements. D’un autre côté, la résolution prévoit d’organiser des actions pour toucher les acteurs qui soutiennent la proposition, c’est-à-dire les organisations patronales.

3.1.3. Quelques spécificités nationales

105La culture syndicale, mais également la législation du travail et celle régissant l’emploi des travailleurs portuaires varient fortement d’un État membre à l’autre  [95]. Les rapports de forces entre les différents courants politiques sont également propres à chaque contexte national. Partant, si la grande majorité des syndicats affiliés à l’ETF se sont rapidement positionnés contre la proposition de directive, certains ont suivi avec un peu de retard, comme en Allemagne et en Belgique, voire n’ont pas suivi du tout, comme en Italie.

L’Allemagne

106Manfred Rosenberg, le président de la section dockers de l’ETF, est également le représentant de la section allemande au sein de l’ITF. Étant donné les désaccords survenus lors des premiers mois quant à la stratégie à adopter entre M. Rosenberg et K. Marges (ITF), les affiliés allemands ne prennent pas part aux premières actions qui ont lieu en septembre 2001  [96] (cf. infra).

La Belgique

107La Belgique est le pays d’Europe où le statut des dockers est le plus protégé. La loi du 8 juin 1972 organisant le travail portuaire, appelée loi Major, « a doté les ouvriers portuaires d’un statut légal alors qu’auparavant, la manutention portuaire reposait sur des accords collectifs et sur des usages, qui avaient organisé un système d’emploi fermé  [97] ». Le législateur a conservé ce caractère fermé en soulignant clairement le monopole reconnu aux ouvriers portuaires : « Nul ne peut faire effectuer un travail portuaire dans les zones portuaires par des travailleurs autres que les ouvriers portuaires reconnus  [98]. » Garantissant aux dockers des droits très similaires à ceux garantis par la convention n° 137 de l’OIT  [99], la loi Major est reconnue par une majorité des acteurs du secteur comme ayant permis de garantir une certaine paix sociale dans les ports belges.

108Pendant les premiers mois qui suivent l’adoption de la proposition de directive par la Commission, les dockers belges s’investissent relativement peu dans la mobilisation, se pensant protégés par la loi Major. Ce n’est que dans un deuxième temps que les syndicats comprennent que si la directive est adoptée, elle sera transposée dans la législation nationale, ce qui entraînera une modification de la loi. Des contacts sont alors pris avec les députés européens belges, alors que les travaux en commission parlementaire sont déjà bien avancés et qu’on approche lentement du vote en première lecture. « C’est à ce moment-là qu’on a dû expliquer [aux syndicalistes belges] comment fonctionnait la procédure de co-décision. Ils étaient très militants et ont décidé de tout faire pour lutter contre la directive  [100]. » De fait, en juin 2002, les syndicats belges prennent la décision d’appeler à une grève de vingt-quatre heures, non coordonnée au niveau européen, dans les ports d’Anvers, de Gand, d’Ostende et de Zeebrugge, qui touche plus de 8 000 dockers. L’objectif est de donner un signal fort au Conseil des ministres du Transport devant se réunir peu après pour discuter d’un accord politique sur la proposition de directive  [101].

L’Italie

109Des réunions régulières ont lieu à Bruxelles tout au long du conflit pour décider de la stratégie et coordonner les activités. Tous les délégués ne peuvent pas systématiquement y participer et la traduction n’est généralement assurée que dans trois langues (allemand, anglais et français), ce qui implique parfois de prendre des décisions importantes sans l’avis de tous. « Dans ces cas-là, on supposait que les syndicats absents accepteraient les décisions prises. Et si vraiment il y avait un problème, ils devaient en informer les autres délégués. (…) L’un des groupes régulièrement absents était celui des délégués italiens, mais ils n’ont jamais envoyé une lettre pour se distancier d’aucune décision  [102]. » En novembre 2003, alors que l’ETF a envoyé aux députés européens un texte appelé Dix bonnes raisons de voter contre la directive portuaire, « nous nous sommes rendus compte que les syndicats italiens soutenaient la proposition de directive  [103] alors que tous les autres syndicats voulaient la voir rejetée, qu’ils ne nous en avaient jamais fait part et qu’ils avaient demandé à leurs parlementaires de voter en faveur de la directive  [104] ». Cela contribue sans doute à expliquer pourquoi les socialistes italiens sont les seuls de leur groupe politique à avoir soutenu la proposition lors du vote final en novembre 2003.

3.2. LE DÉVELOPPEMENT DE LA MOBILISATION

3.2.1. Septembre 2001 : première journée d’action concertée

110Dès l’été 2001, l’ITF et l’ETF commencent à travailler de concert  [105]. Plusieurs actions de protestation sont planifiées contre la directive dans les mois suivants. L’ETF ne possédant que très peu de permanents, l’ITF se charge d’assister les affiliés en leur fournissant de l’information, des tracts dans toutes les langues nécessaires et en organisant des rencontres internationales pour les délégués. Le premier rendez-vous est donné à Gênes début septembre afin de préparer la semaine d’action contre les pavillons de complaisance, qui aura lieu du 24 au 28 septembre dans de nombreux ports européens. Cette semaine d’action est élargie aux problèmes rencontrés par les travailleurs portuaires avec une insistance particulière sur la manutention et l’application des conventions 137 et 152 de l’OIT. Cette décision est « basée sur la nécessité de renforcer les syndicats des travailleurs portuaires, tant dans l’intérêt des dockers que des marins  [106] ».

111Ainsi, une journée de cette semaine d’action contre les pavillons de complaisance est spécialement consacrée à la proposition de directive. Cette journée a plusieurs objectifs. D’une part, elle doit permettre d’appuyer une lettre envoyée par l’ITF aux institutions européennes, qui souligne le caractère inacceptable de la proposition de directive. Afin de rendre l’action le plus visible possible, il est prévu d’organiser un arrêt de travail simultané dans tous les grands ports européens pendant au moins deux ou trois heures  [107]. Il est demandé aux syndicats affiliés de prendre toutes les dispositions légales nécessaires, en prévenant les autorités et les employeurs le cas échéant. L’ITF s’engage à prévenir les trois organisations patronales liées au secteur portuaire : l’ESPO, l’ECSA et la FEPORT. D’autre part, cette journée d’action est l’occasion d’organiser pendant les arrêts de travail des discussions avec les travailleurs sur les implications de la directive  [108].

112Malgré la volonté de l’ITF de créer la plus grande unité possible, l’IDC ne participe pas à l’organisation de cette journée, voulant lancer une campagne séparée  [109]. L’IDC se rapproche finalement des deux autres organisations quelques mois plus tard, sous la pression de ses affiliés espagnols, dont le statut était remis en question encore plus qu’ailleurs, de par l’intention du gouvernement espagnol de libéraliser sa propre législation portuaire dans l’esprit et dans l’anticipation de la proposition de directive européenne  [110]. Dès lors, les trois organisations syndicales internationales tentent, avec des résultats divers, de planifier les actions aux mêmes dates. Toutefois, il n’y a pas de relations formelles, ni d’actions véritablement communes entre l’IDC d’une part et l’ETF et l’ITF de l’autre  [111].

113Pour l’ITF, cette première journée d’action est une grande réussite. Des grèves de deux heures sont organisées au Danemark, en Espagne, en Finlande, en Grèce, en Norvège, au Portugal et en Suède. Des arrêts de travail débouchant sur des rassemblements ou des discussions dans les cantines et les locaux des syndicats ont lieu en Belgique, aux Pays-Bas (plusieurs jours d’affilée et avec chaque équipe) et au Royaume-Uni. En Italie, des rencontres ont lieu à Rome avec des hommes politiques, dont certains membres du Parlement européen. Une grande manifestation est organisée à Dublin. « Cela signifie que des affiliés représentant plus de 50 000 travailleurs ont unanimement condamné la proposition de directive visant à augmenter la concurrence entre et dans les ports (…). Beaucoup de travailleurs portuaires ont même déclaré se tenir prêts à participer à des actions plus intenses, si nécessaire  [112]. » Selon l’ITF, le nombre réel de participants est même sous-estimé, dès lors que des syndicats français et espagnols, non affiliés à l’ETF, ont également pris part aux actions  [113]. Des courriers électroniques réguliers rendant compte des actions dans les différents ports ont permis de diffuser l’information parmi les différents affiliés.

114Sur la base de cette journée d’action, une nouvelle recommandation est envoyée à la commission parlementaire en charge de l’étude de la proposition, qui doit se réunir les 9 et 10 octobre suivants, exigeant que l’opinion des travailleurs soit prise au sérieux. Le propos est clair : « Le meilleur moyen de le faire est d’obtenir un rejet de la proposition par le Parlement européen et de faire pression sur la Commission pour qu’elle retire complètement sa proposition et qu’elle commence à travailler sur un nouveau projet discuté par toutes les parties intéressées. Idéalement, ce projet devrait être atteint par la voie du Dialogue social. Au cas où il serait impossible d’obtenir un retrait total de la proposition, le minimum que nous attendons est que le texte actuel soit amendé et que toutes les références à la manutention et au pilotage disparaissent  [114]. »

3.2.2. La solidarité entre marins et dockers

115Une part importante de la stratégie syndicale dans la lutte contre le paquet portuaire est de lier cette campagne à la campagne contre les pavillons de complaisance de l’ITF. Alors que la tendance générale du secteur du transport est à l’intégration croissante des différents modes de transport, l’ITF cherche à exploiter l’interdépendance des secteurs maritime et portuaire. Selon l’ITF, cette démarche a permis de dépasser un obstacle de taille, à savoir l’esprit de concurrence qui, depuis l’augmentation de la concurrence entre les ports européens à la fin des années 1980, a gagné un certain nombre de syndicalistes du secteur  [115]. « Ce rattachement de la campagne contre les pavillons de complaisance à des actions contre la proposition de directive a permis de mettre en exergue la solidarité entre les gens de mer et les dockers et les problèmes que rencontreraient les compagnies maritimes si elles essayaient de faire appel aux gens de mer pour des activités d’auto-assistance telles que définies par la Commission  [116]. » Ainsi, en diffusant l’idée d’une future similitude des conditions de travail des marins et des dockers, l’ITF et l’ETF sont parvenues à créer un discours commun minimal auquel toutes les organisations nationales pouvaient s’identifier  [117].

116Il ne faut pas attendre l’adoption de la proposition de directive pour que les syndicats passent des paroles aux actes. En effet, fin 2001, la compagnie maritime P&O North Sea Ferries (P&O NSF) tente de devancer la directive, en annonçant son intention de recourir à l’auto-assistance, sans attendre la mise en œuvre de la directive, « expliquant qu’elle se trouve déjà en situation de désavantage concurrentiel puisque plusieurs opérateurs de ferry affectent déjà des gens de mer à ces tâches  [118] ». La réaction des syndicats belges, britanniques et néerlandais, pays où est présente P&O NSF, est immédiate et une action de grève est prévue pour le mois suivant. « Pour l’ITF, il ne s’agissait pas d’un simple conflit avec P&O, mais de la démonstration, à d’autres compagnies maritimes et à Bruxelles, de la détermination des dockers à tenir en échec les propositions de la Commission sur l’auto-assistance. P&O NSF a fait machine arrière le jour même où l’action de grève a commencé  [119]. »

3.2.3. Multiplication des actions

117Après les premières étapes que constituent la prise de conscience des enjeux et l’activation des réseaux entre les différentes organisations, la dynamique s’enclenche. « Au départ, ça grandit très lentement, sensibiliser les dockers sur ces problématiques demande beaucoup de travail. Mais par la suite, vous arrivez à un point où les travailleurs comprennent très bien et à ce moment-là, ça décolle. Alors, la difficulté peut devenir de contenir cette énergie parce que les dockers demandent de plus en plus d’actions  [120]. » Afin d’influencer au maximum la dynamique institutionnelle, chaque action européenne est fixée à des moments importants de la procédure, tels que les votes au Parlement, que ce soit en commission parlementaire ou en séance plénière.

118La première action co-organisée par les syndicats nationaux membres de l’ETF et de l’IDC se déroule le 17 janvier 2003, soit quelques jours avant une étape importante de la deuxième lecture du Parlement européen (cf. infra), sous la forme d’une grève paneuropéenne des dockers. Celle-ci rassemble plus de 20 000 dockers dans les ports allemands (grève de quatre heures dans chaque équipe), belges, chypriotes, finlandais, français (sauf Calais et Dunkerque), néerlandais et norvégiens  [121]. En Belgique, à Chypre et en Finlande, la grève dure vingt-quatre heures. En Espagne ont lieu des actions illégales de solidarité, alors que plusieurs grèves sont déjà programmées pour la semaine suivante, en protestation contre une nouvelle proposition de loi espagnole inspirée de la proposition de directive européenne  [122].

119Par la suite, les attentes des travailleurs de base permettent l’élargissement des activités non conventionnelles. C’est ainsi que sont organisées plusieurs manifestations européennes. La pression est maintenue lors des discussions finales du Parlement européen en deuxième lecture au début du mois de mars 2003. Les grèves les plus importantes, durant quarante-huit heures, ont lieu dans la plupart des ports de Belgique, d’Espagne, de Finlande et de France. En Allemagne, des arrêts de travail de quelques heures sont effectués dans chaque équipe. Les interruptions ont également lieu à Chypre et au Danemark, quoique de manière beaucoup plus brève. En outre, 3 500 dockers participent à une manifestation à Strasbourg, la plupart étant originaires de Belgique et de France  [123]. De la même manière, deux manifestations ont lieu le 29 septembre 2003, réunissant 9 000 dockers à Rotterdam et 6 000 à Barcelone, en vue de faire pression sur le comité de conciliation pour qu’il rejette la proposition de directive  [124].

120Comme les affiliés dockers l’ont décidé à Londres en juillet 2001, la mobilisation transnationale des dockers se déploie ainsi sur deux plans. D’une part, de nombreux arrêts de travail sont organisés dans la plupart des grands ports européens. Ces arrêts de travail, qui bloquent la circulation des marchandises à toutes les portes du continent, touchent donc premièrement le patronat. D’autre part, des manifestations paneuropéennes ont lieu aux dates clefs du processus de prise de décision institutionnel, notamment devant les sièges du Parlement européen à Bruxelles et à Strasbourg.

121Cette mobilisation transnationale de long terme est-elle donc parvenue à toucher les acteurs patronaux et institutionnels concernés ? Telle est la question qui reste à élucider.

3.3. ATTITUDE PATRONALE FACE AU MOUVEMENT

122Comme nous l’avons souligné dans la deuxième partie, un clivage entre les quatre organisations patronales concernées se dessine dès la publication de la proposition de directive en février 2001. En effet, si les quatre organisations soutiennent unanimement la proposition dans son principe, l’ESPO et la FEPORT, liées au secteur strictement portuaire, se montrent plus réticentes que l’ECSA et l’ESC, qui représentent des intérêts plus larges.

123Qu’en est-il après deux années d’arrêts de travail réguliers dans les plus grands ports européens ? Le soutien à la proposition de directive est-il toujours unanime parmi ces quatre acteurs ? Le léger clivage qui se dessinait en 2001 se maintient-il ? S’est-il creusé ou a-t-il, au contraire, disparu ?

124En réalité, les communiqués de presse de ces quatre organisations font presque complètement l’impasse sur la lutte sociale déclenchée par la proposition de directive. Par contre, des communiqués sont régulièrement publiés à chaque étape de la procédure institutionnelle, commentant les décisions prises successivement par le Parlement européen et le Conseil. Or , comme la partie suivante va le montrer, le texte subit d’importantes modifications au long de la procédure, particulièrement sous l’action du Parlement européen. En effet, des quatre institutions clés de l’Union en matière de prise de décision  [125], le Parlement est celle la plus susceptible d’être réceptive aux pressions politiques des travailleurs, contrairement à la Commission qui en est relativement isolée  [126].

125Par conséquent, et pour plus de clarté, les réactions des organisations patronales seront présentées dans la partie suivante, au fil des étapes de la procédure de co-décision.

4. LE CHEMINEMENT INSTITUTIONNEL DE LA PROPOSITION DE DIRECTIVE

126La proposition de directive relative à l’accès au marché des services portuaires a suivi un parcours institutionnel particulièrement long. Adoptée par la Commission le 13 février 2001, elle est rejetée par le Parlement européen en troisième lecture le 20 novembre 2003  [127].

127Quels acteurs se sont opposés et sur quoi ont porté leurs désaccords ? Au vu du nombre d’acteurs impliqués dans le conflit – dont les principaux sont les syndicats sectoriels nationaux et internationaux, le patronat de l’industrie maritime et de l’industrie au sens large, les autorités portuaires privées et publiques, les parlementaires européens de nationalités et de courants politiques différents, les gouvernements européens rassemblés au sein du Conseil et enfin la Commission européenne –, répondre à cette question ne peut se faire ni de manière brève, ni de manière tranchée. En outre, il faut garder à l’esprit que le travail de lobbying des interlocuteurs sociaux auprès des institutions nationales et européennes est une activité quotidienne, s’établissant le long de réseaux plus ou moins formels qu’il n’est pas toujours possible de mettre à jour.

128L’ensemble des documents de travail publiés permet néanmoins de mettre en lumière le jeu d’influence complexe qui s’est joué entre les principaux acteurs impliqués dans le conflit portuaire. Nous suivrons donc successivement les principales étapes de la procédure de co-décision qui ont eu lieu entre février 2001 et novembre 2003. Les moments forts de la mobilisation transnationale des dockers ainsi que certaines réactions des organisations patronales seront rappelés à propos des différentes étapes. Au terme de cet examen, il sera possible de déterminer dans quelle mesure le rejet du paquet portuaire peut être expliqué par la mobilisation syndicale et, le cas échéant, quels sont les autres éléments qui ont conduit à ce rejet.

4.1. AVIS DU PARLEMENT EUROPÉEN EN PREMIÈRE LECTURE

129La proposition de directive est transmise au Parlement européen en février 2001. C’est d’abord la commission de la Politique régionale, des Transports et du Tourisme qui examine le texte. Le rapporteur de cette commission est l’Allemand Georg Jarzembowski, membre du Parti populaire européen et des démocrates européens (PPE-DE). Une fois que la commission parlementaire s’est mise d’accord sur un rapport, celui-ci a été transmis au Parlement dans son ensemble.

130En outre, des avis ont été demandés à la commission économique et monétaire, ainsi qu’à la commission juridique et du marché intérieur du Parlement. Néanmoins, ces deux commissions ont décidé qu’elles n’émettraient pas d’avis.

4.1.1. Examen préliminaire par le rapporteur

131Après avoir examiné une première fois la proposition de directive, G. Jarzembowski regrette que la Commission n’ait pas tenu compte des principaux éléments de la résolution du Parlement européen de 1999 concernant la politique en matière de ports maritimes. Il y était demandé que soient réalisées une étude sur la transparence des financements publics et une mise en œuvre effective des contrôles sur les aides, et ce avant toute proposition de réglementation supplémentaire de la part de la Commission  [128]. En conséquence, le rapporteur propose « d’inclure dans la directive de nouvelles dispositions en vue de la mise en place de conditions de concurrence loyales  [129] ».

132Dans sa résolution de 1999, le Parlement avait également questionné la pertinence d’intégrer au projet de réglementation les services portuaires au-delà des services techniques nautiques. Dans la même approche, le rapporteur considère qu’il n’est pas « utile de prévoir des dispositions d’accès au marché concernant le transbordement de fret et les services de transport de passagers ». En premier lieu, il estime que la Commission « ne peut faire état d’un nombre non négligeable de cas problématiques dont elle aurait connaissance ». En second lieu, « même en présence de plusieurs cas problématiques, le fait d’assujettir tous les ports européens à un système d’adjudication extrêmement bureaucratique porterait [selon lui] atteinte au principe de la proportionnalité ». En troisième lieu, grâce aux compétences dont elle dispose actuellement, G. Jarzembowski considère que « la Commission est en mesure de remédier juridiquement aux différents cas problématiques en s’appuyant sur le droit communautaire général  [130] ».

133Une fois cette analyse établie débute l’examen de la proposition de directive par la commission parlementaire de la politique régionale, des transports et du tourisme.

4.1.2. Examen en commission parlementaire

134Le 25 septembre 2001, pendant que se déroulent les discussions au sein de la commission parlementaire, a lieu la première journée d’action des dockers contre le paquet portuaire. À cette occasion, des arrêts de travail sont organisés simultanément dans dix États membres et une recommandation écrite est envoyée aux membres de la commission parlementaire.

135Suite à la présentation du rapporteur, 253 amendements ont été ajoutés en commission aux 23 amendements déjà proposés par celui-ci. Sur cette base, la commission de la Politique régionale, des Transports et du Tourisme s’est mise d’accord sur un rapport. Les deux recommandations du rapporteur, citées ci-dessus, n’y ont pas été reprises. Adopté le 10 octobre 2001 par 26 voix contre 21 et 11 abstentions après une vive controverse, ce rapport a fait l’objet d’un vote très partagé bien que, selon ses auteurs, il « ne présente que des modifications marginales par rapport à la proposition de la Commission  [131] ». Nous verrons par la suite que le terme marginal est pourtant inapproprié.

136Finalement, seuls 43 amendements sont adoptés en commission parlementaire. Bien que ceux-ci ne soient pas le reflet d’un consensus large, ils permettent tout de même de mettre en évidence plusieurs points de désaccord entre les parlementaires et la Commission, tant au niveau du champ d’application de la directive que de son contenu.

Le champ d’application

137Le champ d’application de la proposition de directive englobe à la fois les ports et les services au sein de ceux-ci.

138En ce qui concerne les ports, le fait que les ports maritimes soient les seules cibles de la proposition de directive est remis en cause. La commission parlementaire estime qu’il faudrait également intégrer les ports fluviaux et voies navigables « afin de tirer dès que possible profit des avantages d’une concurrence équitable  [132] ».

139Les services font quant à eux l’objet de plusieurs modifications.

140Tout d’abord, deux amendements vont dans le sens d’une limitation de l’accès au marché des services techniques nautiques, en raison de leur caractère de service d’intérêt général  [133]. Les États membres sont libres de définir les services d’intérêt général. Il convient par conséquent d’en tenir compte et « de faire expressément mention des dispositions du traité applicables  [134] ». La liberté doit donc être laissée aux États membres de restreindre l’accès au marché des services techniques nautiques s’ils estiment que ceux-ci entrent dans cette catégorie  [135].

141Ensuite, trois amendements se réfèrent spécialement aux services de pilotage en raison de l’importance particulière de ceux-ci pour la sécurité du trafic maritime  [136]. Outre leur caractère de service d’intérêt général, les services de pilotage se voient imposer des obligations de service public  [137] dans de nombreux États membres. Ainsi, « pour des raisons évidentes de sécurité maritime, le contrôle du pilotage doit continuer à être assuré par les autorités publiques nationales » et être exclu du champ de la libre prestation des services  [138]. Dans cette perspective, le Parlement refuse également de définir les services de pilotage comme étant des services à valeur commerciale  [139]. Néanmoins, le rapport de la commission parlementaire sur la question du pilotage est équivoque, comme l’a souligné le rapporteur, puisque « la demande visant à supprimer lesdits services de l’annexe de la directive – qui seule définit le champ d’application du texte – a été rejetée  [140] ».

142Enfin, les opérations de chargement et de déchargement sont inclues dans la définition par le secteur du groupage du fret  [141]. Cet amendement va ainsi à l’encontre de l’avis du rapporteur, qui avait initialement soutenu le retrait des services de manutention du fret et de transport des passagers du champ d’application de la directive  [142].

Les dispositions prévues

143En dehors de la question du champ d’application, les amendements proposés par la commission parlementaire peuvent être classés en trois grandes catégories. Plusieurs amendements sont liés au travail portuaire : ils concernent tant le droit du travail et la question de la protection sociale que celle du niveau de qualification et de l’auto-assistance. Un autre ensemble d’amendements concerne des aspects plus techniques liés à l’objectif de la proposition de directive, c’est-à-dire l’organisation de la concurrence entre les fournisseurs de services portuaires. Enfin, une grande partie des amendements visent à clarifier et à simplifier le texte. Nous ne les aborderons pas.

Le travail portuaire

144L’ouverture à la concurrence du secteur portuaire implique des changements à plusieurs niveaux. D’une part, la Commission stipule que le nombre le plus élevé possible de fournisseurs doit être autorisé  [143]. D’autre part, la Commission estime que les fournisseurs devraient pouvoir « utiliser le personnel de leur choix  [144] ». À ce niveau surgissent quelques interrogations. En effet, un certain nombre d’ouvriers portuaires, en particulier les dockers, bénéficient d’un statut particulier et protégé  [145].

145Comme le montrent plusieurs amendements, cet article de la proposition a suscité des craintes, laissant penser qu’il permettrait aux employeurs de contourner les conventions collectives et accords-cadres internationaux relatifs au secteur. C’est pourquoi il est stipulé que si les fournisseurs doivent pouvoir utiliser le personnel de leur choix, cela ne peut se faire que « dans le respect (…) des dispositions établies par l’État membre où le prestataire fournit lesdits services  [146] ». Néanmoins, aucune référence n’est faite à une convention ou à un accord particulier.

146De la même manière, il est précisé que le respect du droit du travail en vigueur doit figurer parmi les critères d’octroi des autorisations : « L’autorisation peut comprendre des obligations inhérentes à la protection sociale des travailleurs intéressés. L’État membre réglemente les mesures de protection sociale et de protection de l’emploi ainsi que les conventions collectives, qui sont d’application  [147]. » Cet amendement veut prévenir tout risque de dumping social. On verra que, si le Conseil et la Commission s’accordent sur cet amendement en théorie, la formulation en tant que telle sera largement modifiée.

147En outre, il est stipulé qu’« en raison de l’exigence particulière de sécurité et des normes professionnelles spécifiques existantes pour les activités qui entrent dans le champ d’application de la présente directive, les États membres (…) devront prendre les mesures nécessaires pour garantir l’application de normes adéquates en matière de protection sociale, et dans tous les cas, non inférieures à celles établies par la directive en matière sociale et qui sont d’application  [148] ».

148Parallèlement aux risques liés à la protection sociale, certains amendements laissent transparaître la crainte que la future directive, telle que présentée par la Commission, ne tire vers le bas le niveau de qualification dans les services concernés. Dans plusieurs pays de l’Union, les dockers bénéficient en effet d’un véritable droit de priorité à l’embauche et d’une garantie relative de stabilité une fois embauchés. Or l’obtention du statut de docker est soumise à des contrôles stricts, visant à garantir une sécurité maximale dans un milieu reconnu comme dangereux. Le texte de la commission parlementaire préconise donc qu’il soit exigé des États membres « d’assurer que le professionnalisme et les compétences qui existent dans chaque port ne soient pas dispersés du fait de l’arrivée potentielle de nouveaux venus sur le marché  [149] ».

149À ce stade, l’auto-assistance n’apparaît pas encore comme problématique au vu des travaux de la commission parlementaire (alors que les organisations syndicales en ont déjà fait un objet de mobilisation). Deux restrictions sont néanmoins insérées dans la proposition de la Commission. Premièrement, la définition est remaniée afin de limiter l’auto-assistance à une situation où un utilisateur d’un port se fournit à lui-même, « à l’aide de son propre personnel et de ses propres appareils, une ou plusieurs catégories de services  [150] ». Cette précision a pour objectif d’interdire le recours à la sous-traitance dans le cadre de l’auto-assistance, tout en laissant inchangé le principe général. Ensuite, l’auto-assistance devient interdite aux navires battant pavillon de complaisance. La raison avancée est que ces derniers « ne répondent souvent pas aux exigences requises en matière de sécurité  [151] ».

L’organisation de la concurrence

150Une série d’autres amendements sont également acceptés en commission parlementaire. Il s’agit d’étendre les motifs permettant à un État membre d’introduire une limitation du nombre de fournisseurs – les motifs exposés par la Commission sont jugés trop restrictifs  [152] –, de supprimer l’exigence d’au moins deux fournisseurs de services  [153], de limiter la désignation d’une nouvelle autorité compétente aux cas où il existe un conflit d’intérêt afin de limiter l’introduction d’une nouvelle bureaucratie inutile  [154] et de prolonger de cinq à huit ans la durée des autorisations pour les fournisseurs n’ayant réalisé aucun investissement significatif  [155].

4.1.3. Les séances plénières du Parlement

151Le rapport de la commission parlementaire est déposé au Parlement en octobre 2001. Sur la base de ce rapport, le Parlement européen rend son avis en première lecture le 14 novembre, soit neuf mois après la présentation par la Commission de la proposition de directive. Après avoir débattu lors d’une première séance, ce qui donne la possibilité à chaque groupe politique de faire valoir son opinion, les parlementaires procèdent aux votes.

Interventions des rapporteurs fictifs

152Pour chaque dossier, les groupes politiques au Parlement européen désignent chacun ce qu’on appelle un rapporteur fictif, c’est-à-dire un parlementaire du groupe qui sera responsable pour le dossier en question. En principe, ils appartiennent à la commission parlementaire chargée de l’étude préliminaire de la proposition. Généralement, ces rapporteurs fictifs sont les premiers à prendre la parole lors des séances plénières, après le rapporteur officiel.

153La proposition de directive comporte un grand nombre d’éléments, dont plusieurs ont suscité des discussions, voire des controverses. Pour se faire une meilleure idée du positionnement particulier de chaque groupe politique européen, on peut se pencher sur les interventions des rapporteurs fictifs en séance plénière. Ces positions sont présentées dans l’ordre de leur passage à la tribune du Parlement.

Groupe du Parti populaire européen et des démocrates européens

154Ce premier groupe est celui ayant l’avis le plus positif envers le projet de directive. Son rapporteur fictif indique : « À mes yeux, il s’agit d’une bonne proposition et cette opinion s’est reflétée dans le vote de la commission. (…) Il semble évident qu’il faut introduire un règlement communautaire de ces services dans le même esprit libérateur que celui établi lors du Conseil de Lisbonne. » Concernant les services techniques nautiques et les services de traitement des marchandises, « il n’y a aucune raison de sécurité, de formation ni d’un autre ordre qui puisse justifier leur exclusion du champ d’application de la norme ». L’auto-assistance est reconnue comme un concept fondamental. Par contre, « en ce qui concerne les aides d’État, il paraît évident que cette directive n’est pas l’instrument adéquat pour traiter de cette question  [156] ».

Groupe du Parti socialiste européen

155L’intervention du représentant du PSE fait référence à deux aspects, le financement et le pilotage. Concernant le premier aspect, il estime que l’« ouverture des ports maritimes ne correspond pas du tout au système de financement. Je pense, bien au contraire, que le maître mot est opacité et, très souvent, opacité interinstitutionnelle. (…) Il faut que changent ces structures de financement, qu’on pourrait qualifier d’absconses. (…) Je n’ai rien contre les aides d’État, mais il faut alors que tous en profitent. » À propos du second aspect, il souligne : « Selon nous, ces services sont du ressort du public. (…) La sécurité maritime ne peut être sacrifiée sur l’autel d’une prétendue pression sur les coûts exercée par la concurrence  [157]. »

Groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe

156Ce groupe émet un avis positif, mais un bémol est mis sur la question des aides d’État et de la transparence. Son représentant explique : « Je pense que la proposition de la Commission nous aide à renforcer l’efficacité des ports. Toutefois, à l’instar de certains collègues, je constate un manquement important : j’aimerais davantage de propositions sur les aides d’État et la transparence. Il serait préférable, et j’ai introduit un amendement en ce sens, que ces nouvelles propositions émanent de la Commission et non du texte que nous élaborons actuellement en qualité de membres du Parlement. (…) Pour le reste, je soutiens la proposition de la Commission. Nous devons instaurer une concurrence plus grande dans les ports. Ceci doit englober l’accès maritime, non seulement pour les services techniques nautiques mais aussi pour la manutention du fret et la prise en charge des passagers  [158]. »

Groupe des Verts/Alliance libre européenne

157Le représentant du groupe Verts /ALE souligne qu’il « reste surtout beaucoup à faire parce que les revendications établies dans le Livre vert au nom du Parlement étaient en définitive différentes de ce que l’on nous propose aujourd’hui, à savoir une analyse de la concurrence entre les ports et non dans les ports ». Selon lui, la situation actuelle fausse la concurrence. « Cette situation entraîne également des problèmes de capacité excédentaire qu’il faut financer. (…) En matière de concurrence entre les ports, nous souhaitons donc plus de transparence et une réflexion raisonnable sur les aides d’État. Nous plaidons plutôt en faveur d’une coordination entre les ports. Selon nous, cette coordination, comme la transparence, doivent figurer dans les objectifs de cette étude, qui ne doit pas se limiter au seul élargissement de la concurrence dans les ports, comme spécifié jusqu’à présent. » Se penchant ensuite sur la concurrence dans les ports, il conclut : « Nous aimerions surtout, notamment pour des raisons de sécurité et d’environnement, que les lamaneurs  [159] soient exclus du champ d’application du texte. (…) Nous pensons aussi qu’il serait judicieux d’en exclure la manutention du fret, car celle-ci ne favorise nullement la concurrence  [160]. »

Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique

158La position du groupe GUE/NGL est plus tranchée que les précédentes. Son représentant exprime ainsi sa position : « L’exclusion des services de pilotage, de manutention du fret et des services aux passagers du champ d’application de la directive a mon approbation, tout comme la protection des autorisations accordées jusqu’alors aux fournisseurs de services et l’inscription de normes minimales pour les nouveaux fournisseurs. (…) Le rapport de M. Jarzembowski constitue une modification tout à fait positive du document de la Commission. Pourtant, attendu que je partage tout à fait l’opinion de nombre de mes collègues, à savoir que les services portuaires devraient, de manière générale, demeurer du ressort des États membres, je m’abstiendrai lors du vote  [161]. »

Groupe pour l’Europe des démocraties et des différences

159Enfin, le représentant du groupe EDD met l’accent sur la transparence et la manutention du fret. Il estime que « si les aides financières accordées aux ports par les autorités publiques manquent de transparence, les autres mesures ne peuvent pas avoir beaucoup d’effet. L’analyse de ces aides est donc prioritaire. » Ensuite, le député soutient que le fait de mentionner la manutention du fret dans la proposition est une atteinte au droit souverain des autorités des ports de suivre leur propre stratégie. Ceci conduirait à la rupture des contrats à long terme existants, ce qui aurait des conséquences financières majeures pour les services concernés. D’ailleurs, si les contrats sont maintenus, la présente législation est inutile. Enfin, il affirme lui aussi que « les lamaneurs peuvent également rester hors du champ d’application de cette législation ». Il conclut : « Nous ne pouvons pas souscrire au rapport soumis si un certain nombre de modifications substantielles ne sont pas apportées  [162]. »

Résultante des forces au sein du Parlement

160Des six groupes représentés au Parlement européen, seuls deux apportent explicitement leur soutien à la proposition, à savoir le PPE-DE et l’ADLE. Les quatre autres émettent de sérieuses réserves, faisant référence à divers points jugés plus ou moins problématiques. Les questions de la transparence et du champ d’application sont récurrentes.

161Dans un premier temps, le Parlement procède au vote des amendements. Dans un second temps, il est demandé aux parlementaires de s’exprimer sur le texte ainsi obtenu. En première lecture, une majorité simple des présents est requise pour adopter la directive.

Votes sur les amendements

162Aux 42 amendements votés en commission parlementaire, 37 nouveaux amendements sont ajoutés en séance plénière. La grande majorité du premier groupe d’amendements est acceptée (32 sur les 42), tandis que peu de nouveaux le sont (6 en tout et 4 en partie sur 37). Globalement, ces votes expriment donc un soutien de l’assemblée plénière pour le rapport proposé par la commission parlementaire. Parmi les questions laissées en suspens dans ce même rapport, le Parlement tranche en faveur de l’exclusion des services de pilotage de la proposition.

163Le groupe des Verts/ALE est le seul qui dépose un amendement demandant « que la proposition de la Commission lui soit à nouveau soumise, afin de mieux tenir compte des positions du Parlement européen concernant le Livre vert sur les services portuaires dans l’UE et du point de vue de l’industrie et des travailleurs dans cette branche  [163] ».

164Cet amendement est rejeté par 415 voix contre 118 et 10 abstentions. Vu la répartition des sièges au sein du Parlement pendant la quatrième législature  [164], il semble que cette proposition a reçu peu de soutien, même parmi les partis de gauche. Les votes varient également selon les pays ou les régions dont proviennent les élus, reflétant des situations propres à chaque contexte national ou régional  [165]. Tel qu’amendée, la proposition de directive est acceptée par 292 voix contre 223 et 32 abstentions.

165Seule une organisation patronale, l’ECSA, émet publiquement son avis suite à la décision du Parlement en première lecture. Sa déception est palpable : « Bien que l’application des principes mentionnés ci-dessus va non seulement de soi mais est également d’une importance clé pour les services de transport maritime, les discussions au sein des institutions de l’UE, en particulier au Parlement européen, ont sérieusement affaibli la directive. (…) Le droit à l’auto-assistance a été affaibli et nombre d’amendements non nécessaires et contre-productifs relatifs à la protection sociale ont été introduits pour maintenir des pratiques monopolistiques  [166]. »

4.2. LES AVIS DES COMITÉS CONSULTATIFS

166Parallèlement au processus parlementaire, différents comités ont été consultés.

4.2.1. Avis du Comité des régions

167En septembre 2001, le Comité des régions (CDR) adopte à l’unanimité un avis  [167] soutenant globalement l’initiative de la Commission, ainsi que le champ d’application proposé. Il émet cependant une série de remarques.

168Dans un premier temps, le CDR s’interroge sur la portée du paragraphe stipulant que « le fournisseur de services portuaires a le droit d’employer le personnel de son choix pour fournir le service couvert par l’autorisation ». Le comité estime nécessaire de préciser ces notions, « compte tenu du fait que la directive demande explicitement aux États membres de garantir l’application de leur législation sociale ».

169De la même manière, le CDR demande que soient définies la portée et les limites de l’auto-assistance « en gardant toujours présent à l’esprit le principe de subsidiarité » et précise que « les États membres ne devront pas appliquer, pour la mise en œuvre de l’auto-assistance, de règles moins strictes que celles appliquées aux fournisseurs du même service ».

170Ensuite, le CDR attire l’attention sur les problèmes liés à la sécurité dans le cadre des services techniques nautiques, et tout particulièrement en matière de pilotage. En effet, ce sont « des services généraux quoique présentant des caractéristiques tout à fait spécifiques également en termes de compétences. C’est précisément par souci de garantir la sécurité des ports que le Comité des régions estime opportun d’exclure l’applicabilité de l’auto-assistance ».

171Le CDR estime par ailleurs qu’il sera difficile d’imposer aux autorités portuaires d’autoriser un minimum de deux fournisseurs : « Cela, eu égard au fait qu’une telle disposition se heurte non seulement à des contraintes d’espace ou de capacité disponible – prévues en tant que conditions pour appliquer des limitations à la prestation des services –, mais aussi à des contraintes liées à l’efficacité économique, aux dimensions du marché et à la survie économique des entreprises. »

172Enfin, le CDR recommande d’allonger la durée maximale prévue à l’article 9 pour les autorisations. « Les délais prévus ne semblent pas appropriés en cas d’investissements importants de la part des sujets autorisés. De telles dispositions risquent d’entraîner une baisse de la propension à investir, ce qui réduirait d’autant l’efficacité du système des ports ».

4.2.2. Avis du Comité économique et social européen

173Le Comité économique et social européen (CESE) remet son avis quelques jours après celui du Parlement. Celui-ci récolte 62 voix pour, 8 contre et 10 abstentions. Globalement, le CESE dit noter avec intérêt l’initiative de la Commission, mais juge « que les moyens proposés pour parvenir à ces fins soulèvent nombre de réserves  [168] ». Comme le Parlement, le CESE regrette que son avis relatif au Livre vert n’ait pas été davantage pris en compte. Il rappelle aussi à cette occasion avoir déjà insisté sur la nécessité de prendre en considération la dimension sociale, l’emploi, la cohésion économique et sociale, ainsi que l’environnement « qui n’occupent pas la place correspondant à leur importance dans ce projet de législation  [169] ».

174Les remarques du CESE concernant le projet de directive portent en particulier sur trois axes.

Le rôle des ports

175Le CESE commence par rappeler que la pleine intégration des ports dans le réseau multimodal de transport est essentielle, cela pouvant également contribuer au développement du cabotage maritime. À ce titre, le comité fait remarquer que « le développement du cabotage entre les ports communautaires demanderait notamment un allégement significatif des formalités et contraintes administratives. En effet, ce sont les procédures bureaucratiques exigées lors de l’escale dans un port, plus que le prix, qui constituent les principales entraves au développement du transport maritime de courte distance  [170]. »

176Le comité souligne également la contribution des ports « à l’emploi, par des emplois diversifiés et qualifiés, à la cohésion sociale et territoriale [qui] ne peut être détachée de leurs fonctions, comme le soulignait l’avis  [171] du Comité sur le Livre vert  [172] ». De plus, en tant que lieu de transit entre divers modes de transports, « une approche plus globale (…) eût peut-être été préférable à une approche qui singularise les ports réalisant un certain niveau d’activité, mais qui sont un maillon d’une chaîne qui devrait être considérée dans sa totalité  [173] ».

La question de la manutention

177Sur la base d’une étude des contributions récoltées auprès des professionnels et des usagers des ports, le CESE met en doute les dires de la Commission quant au soutien dont sa proposition est censée bénéficier. La Commission, en effet, ne mentionnait que les pilotes et les sociétés de remorquage comme s’opposant à sa proposition. Selon le CESE, les autorités portuaires seraient elles-mêmes réticentes « à l’imposition de certaines règles rigides au lieu de laisser à l’autorité portuaire compétente une plus grande facilité de gestion  [174] ».

178Mais c’est surtout sur le secteur de la manutention que le CESE marque la plus grande insistance. Il a en effet relevé que « les syndicats ouvriers du secteur de la manutention portuaire estiment que la proposition de directive imposerait un système de concurrence artificiel qui ne prend pas en considération les conventions collectives et accords existants et provoquerait des problèmes sociaux importants ; pour eux la manutention devrait être exclue de la directive  [175] ». S’accordant avec la position des syndicats, le CESE estime qu’« il est indispensable de veiller à ce que les dispositions relatives à la manutention ne viennent pas remettre en cause les conventions collectives et les accords résultant du dialogue social, qui garantissent la continuité du service et le maintien de la paix sociale  [176] ». Et de rappeler que, d’après la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, les conventions collectives peuvent déroger au droit commun de la concurrence « en raison de leur nature et de leur objet  [177] ».

La question de l’auto-assistance

179Enfin, le CESE estime que « l’auto-assistance pose les mêmes problèmes de sécurité, de qualifications que pour les personnels de manutention du port. Les équipements (…) exigent un personnel hautement qualifié dont la formation est longue ; il n’est pas sérieusement envisageable d’autoriser l’armateur du navire ou le propriétaire de la cargaison, à employer du personnel extérieur temporaire ou du personnel de l’entreprise insuffisamment qualifié, car cela pèserait sur les salaires et l’emploi régulier existant dans le port, et comporterait des risques accrus d’accidents de personnes, voire de pollution ou d’accidents matériels graves qui pourraient résulter d’une manipulation incompétente de certaines cargaisons  [178]. » Selon le CESE, les États et les autorités portuaires doivent conserver la faculté de fixer des règles et critères stricts en la matière pour empêcher tout abus et afin de garantir la sécurité des personnes et des biens ainsi que les qualifications et les conditions d’emploi du personnel de manutention, essentielles à la sécurité des opérations  [179].

4.3. PROPOSITION MODIFIÉE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE

180En vertu de l’article 250 § 2 du traité, la Commission est autorisée à modifier sa proposition législative en incorporant les amendements du Parlement européen qui lui semblent améliorer sa proposition et/ou qui sont susceptibles de faciliter un accord entre celui-ci et le Conseil. C’est cette proposition modifiée qui est ensuite transmise au Conseil.

181Voici la manière dont la Commission présente les apports de la première lecture du Parlement européen :

182

« Le Parlement européen adhère aux principaux éléments de la proposition de la
Commission, sauf un. [… Ses] amendements mettent en évidence, notamment,
l’importance de la sécurité maritime, des responsabilités environnementales,
d’éléments sociaux ; elle [la proposition du Parlement] clarifie certains aspects
concernant la procédure de sélection, l’auto-assistance et l’impartialité de
l’organisme chargé de choisir les fournisseurs de services. La Commission reconnaît
que ces modifications, qui visent à renforcer certains aspects de la proposition et, ce
faisant, à garantir la réalisation des objectifs qu’elle fixe, enrichissent la
proposition  [180]. »

183Il est intéressant de constater que la Commission adopte le ton du consensus, faisant valoir les apports du Parlement et minimisant les points de désaccord. Nous verrons lors de la seconde lecture du Parlement que les dissensions sont plus grandes que ce qui apparaît.

184Le 19 février 2002, la Commission adopte une proposition modifiée « intégrant, en tout ou en partie, 25 des amendements adoptés par le Parlement et en rejetant 18 autres  [181] ».

4.3.1. Amendements acceptés par la Commission

185La Commission accepte ainsi certaines rectifications du Parlement. Le champ d’application de la directive est élargi aux voies navigables d’accès aux ports « pour que les mesures proposées remplissent pleinement leur objet  [182] ». L’inclusion du chargement et du déchargement du fret dans la liste des services portuaires concernés par la directive est également acceptée.

186Concernant la liberté des fournisseurs de choisir leur personnel, il est admis que « le droit pour un fournisseur de services de recruter le personnel de son choix peut être soumis aux mêmes critères que ceux fixés en général par l’autorité compétente  [183] », en respectant « les réglementations relatives à la formation, à l’aptitude professionnelle et aux conditions de travail  [184] ». Par ailleurs, les États membres doivent « faire en sorte qu’un niveau adéquat de qualification professionnelle soit maintenu  [185] ». Il est ajouté que « les normes sociales ne doivent pas être moins strictes que celles définies par la législation communautaire applicable  [186] ».

187La nouvelle proposition de la Commission limite l’auto-assistance aux cas où les fournisseurs utilisent leurs personnel et équipements propres  [187]. La demande du Parlement d’interdire le recours à la sous-traitance dans le cadre de l’auto-assistance est donc acceptée.

188La nouvelle proposition de la Commission étend enfin les critères régissant l’octroi des autorisations. On peut toutefois remarquer des différences quant aux termes utilisés. L’amendement du Parlement évoquait le respect des dispositions du droit du travail en vigueur, des obligations inhérentes à la protection sociale des travailleurs, des mesures de protection de l’emploi ainsi que des conventions collectives  [188]. La version acceptée par la Commission fait, elle, référence à la sécurité du personnel, aux projets de développement du port et, « le cas échéant », à l’emploi, aux questions sociales, ainsi qu’aux exigences en matière d’environnement  [189].

4.3.2. Amendements refusés par la Commission

189En revanche, la Commission refuse plusieurs amendements du Parlement. L’exclusion du pilotage du champ d’application de la directive est refusée car celui-ci reste considéré comme « un service à caractère commercial auquel s’appliquent les règles du traité  [190] ». Ce service touche effectivement à des problèmes de sécurité particuliers, mais est, d’après la Commission, traité de manière adéquate dans la proposition  [191].

190L’amendement qui supprime l’obligation de choisir au moins deux fournisseurs de services et d’autoriser « le plus grand nombre de fournisseurs en fonction des circonstances » n’est pas jugé satisfaisant par la Commission. Celle-ci estime que cette clause risque de perpétuer des situations dans lesquelles on invoque, souvent à tort selon elle, les « circonstances » pour limiter l’accès au marché à un seul fournisseur  [192] ».

191La Commission refuse également d’allonger la durée de validité des autorisations pour les fournisseurs n’ayant pas effectué d’investissement significatif  [193].

192Par ailleurs, la Commission affirme ne pas pouvoir accepter « que le droit à l’auto-assistance soit réservé aux navires battant pavillon d’un État membre car cela ne serait pas conforme aux règles et obligations internationales  [194] », sans toutefois préciser à quelles règles et obligations elle se réfère.

193Enfin, la Commission refuse d’aborder dans le cadre de la présente directive la question de la transparence des relations financières entre États membres et ports. Elle « admet qu’un travail plus approfondi doit être effectué sur la question de la concurrence entre les ports, mais souligne qu’un tel travail doit être accompli dans le cadre institutionnel et dans le respect des règles du traité  [195] ».

194La Commission ne fait aucune mention des termes « service d’intérêt général » et « service public obligatoire » utilisés par le Parlement européen.

4.4. POSITION DU CONSEIL

4.4.1. Processus interne de prise de décision

195La Commission n’ayant pas prononcé d’avis négatif sur les modifications apportées par le Parlement, le Conseil doit se prononcer à la majorité qualifiée. Dans le cas contraire, il aurait dû décider à l’unanimité.

196Les discussions au sein du Conseil se font en plusieurs étapes. Le texte est d’abord analysé par un groupe d’experts, en l’occurrence le groupe de travail Transports et Télécommunications. Celui-ci rend ensuite compte au Comité des représentants permanents des États auprès de l’Union, le Coreper. Ce dernier prépare la décision qui sera présentée au Conseil des ministres.

197Les décisions préparées par le Coreper sont adoptées par le Conseil des ministres soit sans débat, lorsqu’un accord a été trouvé au niveau préparatoire (point A de l’ordre du jour), soit avec débat (point B de l’ordre du jour). Les dossiers faisant l’objet de débat représentent 25 à 30 % de l’ensemble des dossiers traités. La proposition de directive relative à l’accès aux services portuaires fait partie de ceux-ci.

198En juin 2002,8 000 dockers belges se mettent en grève dans les ports d’Anvers, de Gand, d’Ostende et de Zeebrugge afin de faire pression sur les ministres européens du transport devant se réunir peu après pour adopter un accord politique sur la proposition de directive.

199Un accord politique est atteint le 17 juin 2002 au sein du groupe de travail Transports et Télécommunications, malgré un vote négatif de la délégation suédoise. Le compromis obtenu porte, entre autres, sur la question de la durée des autorisations accordées aux fournisseurs  [196]. Le Conseil arrête sa position commune en novembre 2002, apportant au texte beaucoup de changements, notamment par l’ajout de plusieurs articles, ce qui entraîne une modification de leur numérotation.

4.4.2. Modifications apportées à la proposition

200De manière générale, le Conseil soutient l’objectif principal de mettre en œuvre les principes généraux énoncés dans le traité, tout en soulignant le besoin de concilier cet objectif avec la complexité caractérisant le secteur portuaire  [197]. Sur certains aspects, le Conseil partage les vues du Parlement, tandis qu’il s’oppose à celui-ci à d’autres égards.

Points où le Conseil rejoint le Parlement

201Le Conseil souligne l’importance de ne porter atteinte ni à la sécurité maritime ni à la protection de l’environnement, ainsi que de ne pas détériorer les normes sociales et les conditions d’emploi. Sa position commune est présentée comme intégrant les principaux éléments des amendements proposés par le Parlement européen concernant ces matières  [198].

202En outre, « le Conseil est d’accord avec le Parlement pour estimer que, dans les ports où il existe des contraintes liées à l’espace ou à la capacité disponibles, il n’est pas nécessaire d’établir l’obligation d’autoriser au moins deux fournisseurs de services pour chaque catégorie de fret  [199] ».

Points où le Conseil s’oppose au Parlement

203À la différence du Parlement, le Conseil estime qu’aucun service ne devrait être exclu du champ d’application de la directive, ne suivant donc pas l’avis du CESE concernant la manutention du fret. Dans cette optique, le Conseil refuse d’exclure le pilotage du champ d’application de la directive, même s’il « partage l’avis du Parlement selon lequel les services de pilotage sont essentiels pour ce qui est de la sécurité maritime  [200] ». Des règles spécifiques sont introduites, prévoyant que l’octroi d’une autorisation puisse dépendre de « critères particulièrement stricts relatifs à la sécurité maritime et aux exigences de service public  [201] ».

204L’amendement du Parlement visant à interdire le recours à l’auto-assistance pour les navires battant pavillon de complaisance, déjà refusé par la Commission, est également refusé par le Conseil, sans réelle explication : « Conformément à l’objectif général de la directive, (…) l’auto-assistance devrait être autorisée, dans la mesure du possible, dans les mêmes conditions que les services portuaires en général, et ne devrait pas être soumise à d’autres limitations que celles prévues pour les services portuaires identiques ou comparables. Toutefois, (…) l’auto-assistance ne doit pas nuire à l’efficacité générale des opérations portuaires ni abaisser les niveaux d’emploi et de santé ou le niveau social  [202]. »

205En outre, le Conseil apporte une double modification à la définition de l’auto-assistance, qui devient « une situation où une entreprise qui pourrait normalement acheter des services portuaires se fournit à elle-même, en utilisant son personnel fixe à terre et/ou son personnel naviguant et ses équipements propres, une ou plusieurs catégories de services portuaires  [203] ». La référence à l’absence de contrat, c’est-à-dire l’interdiction de la sous-traitance, est supprimée par le Conseil.

206En ce qui concerne enfin la transparence, le Conseil soutient le Parlement en affirmant que « l’accroissement de la concurrence entre fournisseurs de services portuaires n’est pas le seul élément propre à augmenter la compétitivité et l’efficacité des ports ». En effet « la création de conditions favorables à une concurrence loyale et équitable entre les ports européens grâce à la transparence des relations financières et du financement public  [204] » en est un autre élément crucial. Néanmoins, le Conseil estime préférable de ne pas traiter de ces questions dans cette directive pour ne pas rendre son champ d’application trop large. À cet effet, il demande à la Commission de faire rapidement des propositions allant dans ce sens.

Nouvelles dispositions élaborées par le Conseil

207Telle que revue par le Conseil, la directive concernant l’accès au marché des services portuaires prend les formes suivantes.

Au niveau du champ d’application

208Certains services, tels que le stockage, le groupage du fret et la mise en dépôt, sont supprimés du champ d’application de la directive car ces services ne sont pas exclusivement fournis dans des ports. Cela évite de devoir appliquer des règles différentes à un service selon le lieu où il est fourni  [205].

209Afin de « préserver la cohérence de la législation communautaire dans le domaine des transports », le Conseil estime également que le champ d’application doit être défini en accord avec les orientations communautaires pour le développement du réseau transeuropéen  [206]. Ainsi, les ports concernés par la proposition de directive sont ceux entrant dans la catégorie des « ports maritimes d’importance internationale », ce qui correspond à un seuil de 1,5 million de tonnes et 200 000 passagers, alors que la proposition de directive le fixait à 3 millions de tonnes et 500 000 passagers  [207]. En outre, les États membres devraient avoir la possibilité « d’exclure du champ d’application de la directive les ports dont les activités sont très saisonnières ».

Au niveau de l’organisation de la concurrence

210Plusieurs modifications apportées par le Conseil visent à laisser une plus grande liberté à l’organisme gestionnaire du port. Le Conseil souligne en effet que « la libre prestation de services portuaires ne doit pas entraver le développement et la mise en œuvre d’une politique de développement à long terme d’un port  [208] ». Il faut que l’autorité compétente puisse « déterminer l’éventail des activités commerciales qui seront réalisées dans le port (…) ainsi que l’attribution d’espace ou de capacité portuaire à ces activités (…) sans qu’il s’agisse d’une limitation du nombre de fournisseurs  [209] ». Un nouvel article est également introduit, spécifiant que si la procédure de sélection n’a pas permis de trouver de fournisseur approprié, l’organisme gestionnaire du port peut « se réserver à lui-même la fourniture de ce service pour une période qui ne peut en tout état de cause dépasser cinq ans  [210] ».

211De plus, le Conseil énonce pour la procédure de sélection « des exigences claires et praticables, qui offrent en même temps des garanties suffisantes aux fournisseurs potentiels ». Ceux-ci devraient « bénéficier d’une sécurité juridique pleine et entière, (…) ce qui répondrait à l’objectif visant à développer le secteur portuaire en favorisant les investissements à long terme dans des conditions de stabilité  [211] ». Cela amène le Conseil à augmenter la durée des autorisations à 10,15 et 36 ans (contre 5,8 et 25 ans auparavant) selon que les investissements sont respectivement non significatifs, significatifs et mobiliers ou significatifs et immobiliers.

212Enfin, deux articles supplémentaires sont introduits. Ils sont relatifs à la transparence des comptes des fournisseurs de services (art. 16) et aux éventuelles créations de nouveaux ports ou de nouvelles parties de port (art. 22).

213L’ESPO considère la position commune du Conseil comme un pas dans la bonne direction. Plusieurs points positifs sont soulignés : l’autorité portuaire jouit d’un plus grand pouvoir discrétionnaire, l’obligation de sélectionner deux fournisseurs au minimum est supprimée, les procédures de sélection sont plus flexibles, les durées des autorisations sont plus réalistes, le régime de transition entre l’ancien et le nouveau système est simplifié  [212]. Par contre, deux éléments sont à surveiller, selon l’ESPO. Il s’agit premièrement de la définition de l’auto-assistance proposée par le Conseil. Celle-ci est jugée trop large et ne devrait inclure que l’équipage. Deuxièmement, les critères permettant à l’autorité portuaire de limiter le nombre de fournisseurs devraient inclure la politique de développement du port  [213].

4.5. DÉCLARATION DE LA COMMISSION SUR LA POSITION COMMUNE

214Le 14 novembre 2002, la Commission remet son avis sur la position commune du Conseil. Elle déclare qu’elle « accepte et soutient la position commune adoptée par le Conseil, car elle respecte les principes, la philosophie et la structure de fond de sa proposition  [214] ». La Commission juge en effet que la position commune ne fait pas dévier la proposition de son objectif principal, à savoir « établir des règles claires et définir une procédure ouverte et transparente dans le domaine de l’accès au marché des services portuaires  [215] ». Par ailleurs, la Commission estime que « la position tient également largement compte de l’avis exprimé par le Parlement européen en première lecture  [216] ». À la lecture de la déclaration de la Commission, on pourrait croire que les trois institutions sont quasiment d’accord. Les choses sont cependant plus complexes.

215Voyons ce que la Commission retient, à ce stade du cheminement de la proposition de directive, des amendements adoptés par le Parlement européen, ceux qu’elle rejette, ainsi que l’attitude qu’elle adopte à l’égard de la position commune du Conseil.

4.5.1. Position adoptée vis-à-vis des amendements du Parlement européen

Amendements acceptés par la Commission dans la proposition modifiée

216Les amendements proposés par le Parlement européen en première lecture et qui avaient été acceptés par la Commission dans sa proposition modifiée, énoncés ci-dessus dans la section 3.1, ne sont ni supprimés ni transformés sur le fond par la position commune du Conseil. Ils font par conséquent l’objet d’un accord entre les trois institutions.

217La Commission souligne par ailleurs que la version du texte présentée par le Conseil fait explicitement référence aux règles relatives à la protection sociale et l’emploi, points sur lesquels le Parlement européen a fortement insisté en première lecture. « La Commission a estimé que sa proposition initiale tenait dûment compte de ce point. Elle s’est néanmoins alignée sur quelques-uns des amendements du Parlement européen dans sa proposition modifiée  [217]. » De l’avis de la Commission, « tout danger de dumping social est ainsi évité  [218] ».

Amendements refusés par la Commission dans la proposition modifiée

218La section 4.3.2. a détaillé ces amendements, relatifs au pilotage, au nombre minimum de fournisseurs autorisés, à la durée des autorisations et à l’interdiction des marins battant pavillon de complaisance dans le cadre de l’auto-assistance.

219En ce qui concerne le pilotage, le Parlement avait demandé son exclusion du champ d’application de la directive, mais le Conseil n’a pas adhéré à cette position. La Commission soutient le Conseil, pensant que « la position commune offre une solution équilibrée en matière de pilotage et qu’il faudrait l’inclure dans la directive, le principe de subsidiarité étant tout à fait respecté  [219] ».

220Concernant le nombre minimum de fournisseurs, le Conseil a rejoint l’avis du Parlement, supprimant la disposition exigeant la présence d’au moins deux fournisseurs pour chaque catégorie de services. Malgré son opposition première à l’amendement du Parlement, « la Commission accepte finalement de supprimer cette partie du texte afin d’adopter un compromis  [220] ».

221En matière de durée des autorisations, le Conseil a apporté de nouveaux éléments en allongeant les durées de manière bien plus large que ne l’avait fait le Parlement  [221]. La Commission accepte les changements apportés, considérant que « ces durées maximales sont destinées à permettre aux États membres de trouver des solutions qui soient conformes, notamment, aux règles nationales d’amortissement applicables aux actifs en question  [222] ».

222En ce qui concerne l’auto-assistance par contre, plus aucune référence n’est faite à une restriction visant les navires battant pavillon de complaisance. « La position commune dispose explicitement qu’il convient d’autoriser autant que possible l’auto-assistance (…). Elle autorise également la limitation de l’auto-assistance, mais uniquement pour des raisons objectives compatibles ou en rapport avec les motifs de limitation concernant les prestataires de services définis à l’article 8  [223] ».

4.5.2. Nouveaux apports du Conseil

223La position commune étant globalement soutenue par la Commission, celle-ci approuve tous les nouveaux apports du Conseil, détaillés supra (4.2.3).

4.6. AVIS DU PARLEMENT EUROPÉEN EN DEUXIÈME LECTURE : LES CLIVAGES SE CREUSENT

224En novembre 2002, un an après avoir arrêté sa position en première lecture, le Parlement reçoit la position commune, qu’il renvoie à la commission de la Politique régionale, des Transports et du Tourisme. Après trois réunions, cette commission adopte le 18 février 2003 un projet de recommandation par 40 voix contre 10 et 2 abstentions, ce qui constitue une majorité plus confortable qu’en première lecture.

225Le 17 janvier 2003, pendant les discussions au sein de la commission parlementaire, plus de 20 000 dockers de huit pays mènent une grève paneuropéenne. En Belgique, à Chypre et en Finlande, la grève dure vingt-quatre heures. Il s’agit de la première action co-organisée par les syndicats nationaux membres de l’ETF et de l’IDC.

4.6.1. Examen en commission parlementaire

226Un très grand nombre d’amendements ont été traités en commission parlementaire. Nous n’abordons ici que ceux ayant obtenu un soutien au sein de celle-ci. Soulignons toutefois que des membres de plusieurs groupes politiques ont proposé, sans succès, de rejeter l’intégralité du texte, ce qui n’était pas arrivé en première lecture  [224]. Si les initiatives de ces parlementaires ne sont pas forcément représentatives de l’ensemble de leur groupe, elles n’en restent pas moins indicatives d’une évolution notable entre la première et la seconde lecture.

Remarques générales

227Dans l’exposé des motifs, la commission parlementaire commence par rappeler que la directive proposée par la Commission « aborde exclusivement les questions de la mise en place de la concurrence dans les ports de l’Union, et ce uniquement au niveau de l’ouverture du marché aux différents services portuaires, en négligeant les questions de la création de la concurrence entre les ports ainsi que de la concurrence équitable au sein de chaque port  [225] ».

228Au cours des mois précédents, la Commission et le Conseil ont pris position par rapport aux amendements proposés par le Parlement en première lecture. Ces deux institutions, et particulièrement la Commission, ont considéré avoir largement pris en compte l’avis exprimé par le Parlement. La commission parlementaire ne partage pas tout à fait cet avis : « Dans sa proposition modifiée, la Commission a certes repris certaines de ces modifications, mais elle n’a pas accepté les approches plus fondamentales contenues dans la position du Parlement, à savoir la suppression des services de pilotage, les nouvelles dispositions concernant la transparence des relations financières, la suppression d’autoriser deux fournisseurs de services ainsi que les qualifications concernant l’auto-assistance  [226]. »

229Après une présentation synthétique de la position commune du Conseil, la commission parlementaire déclare : « À partir de ces considérations fondamentales, la commission, dans la mesure où elle ne juge pas pertinentes les modifications apportées par le Conseil, propose une série d’amendements à la position commune qui, pour l’essentiel, reposent sur les modifications apportées par le Parlement en première lecture le 14 novembre 2001 et non reprises par le Conseil  [227]. »

230Sur un certain nombre de points détaillés ci-après, la commission parlementaire affirme donc son désaccord avec le texte sur lequel se sont accordés le Conseil et la Commission. Qui plus est, elle annonce que, à plusieurs reprises, elle a remodifié le texte sur la base des mêmes amendements et des mêmes justifications qu’en première lecture. Si un an s’est écoulé, les opinions n’ont pas changé.

Les services de pilotage

231La proposition du Conseil de laisser aux États membres la possibilité de traiter l’accès aux services de pilotage d’une manière différente de celle des services portuaires commerciaux est jugée insatisfaisante. « Pour tous les États membres uniformément, il convient de définir que les services de pilotage ne doivent pas être soumis aux réglementations régissant l’accès au marché des services portuaires commerciaux, pour des raisons liées à l’intérêt public concernant la sécurité du trafic maritime  [228]. »

232La commission parlementaire maintient par conséquent que les services de pilotage doivent être globalement exclus du champ d’application de la directive. Le nouvel article 14 proposé par le Conseil pour réglementer le cas particulier du pilotage est supprimé  [229].

Créer des conditions de concurrence équitable

233Alors que la seconde lecture du Parlement est sur le point de débuter, l’ESPO demande au Parlement de soutenir fermement la demande du Conseil à la Commission de s’occuper des questions de concurrence entre les ports, de financement public des infrastructures, des aides d’État et des règles de transparence  [230].

234La Commission s’est engagée à présenter une proposition visant à étendre la directive sur la transparence aux ports maritimes concernés. Le Conseil a également reconnu la nécessité de créer des conditions de concurrence équitables dans et entre les ports. Cependant, leurs déclarations d’intention sont jugées « parfaitement insuffisantes  [231] ». Selon la commission parlementaire, « la Commission n’est jusqu’à présent pas disposée à adopter des lignes directrices contraignantes pour les mesures de financement au profit des ports maritimes  [232] », or il est indispensable de définir « des orientations communautaires, afin de créer la sécurité juridique pour toutes les parties concernées  [233] », et le pouvoir d’initiative en ce domaine appartient à la Commission.

235Cinq amendements sont introduits à ce sujet  [234]. Proposés par le rapporteur lui-même dans son projet de recommandation  [235], trois d’entre eux prennent la forme de nouveaux articles, sur la transparence des relations financières (art. 5), la transparence du financement public (art. 6) et sur l’étude sur le financement (art. 7).

L’auto-assistance

236La position commune du Conseil avait apporté une double modification à la définition de l’auto-assistance. D’une part, il avait été précisé que « le personnel propre » du fournisseur comprenait « son personnel fixe à terre et/ou son personnel navigant ». D’après la commission parlementaire, « l’extension expressément proposée par le Conseil de l’auto-assistance au “personnel fixe à terre” est de nature à mettre en péril l’efficacité des services portuaires et à conduire à un dumping écologique et social dans les ports. Afin d’exclure cette éventualité dès le départ, il convient selon la commission parlementaire de limiter l’auto-assistance au “personnel navigant”  [236] ».

237D’autre part, le Conseil avait supprimé la deuxième partie de la définition de l’auto-assistance, « situation (…) dans laquelle, normalement, aucun contrat ayant pour objet la prestation de tels services n’est passé avec un tiers, sous quelque dénomination que ce soit ». La commission parlementaire revient intégralement sur cette modification et réintroduit exactement ce que le Conseil avait supprimé  [237].

238La commission parlementaire maintient également la position adoptée par le Parlement européen en première lecture concernant les navires battant pavillon de complaisance, malgré l’opposition manifeste du Conseil et de la Commission à cet égard. La possibilité doit être laissée aux États membres de leur interdire le recours à l’auto-assistance. L’argument utilisé est identique, à savoir que « ce sont précisément les navires battant “pavillon bon marché” qui ne satisfont pas aux critères requis en matière de sécurité  [238] ».

La durée de validité des autorisations

239Trois amendements concernent la durée de validité des autorisations  [239]. La commission parlementaire considère en effet que « sans raison pertinente, les durées de validité proposées par le Conseil varient selon les positions juridiques découlant de droits de propriété, d’autorisations issues de contrats de bail ou analogues, d’autorisations pour des services de pilotage, d’autorisations pour de nouveaux ports ». Selon la commission parlementaire, il convient « d’aménager les durées de validité de manière uniforme, d’autant plus que les positions juridiques tirées de la propriété doivent être reconnues au moins autant que les autorisations découlant de contrats de bail  [240] ».

Des garanties supplémentaires

240Par ailleurs, de nombreuses précisions sont proposées par la commission parlementaire, qui tendent systématiquement à augmenter la garantie que la sécurité, la législation sociale et l’environnement seront bien respectés après l’ouverture du marché des services portuaires. Huit amendements font l’objet de telles précisions  [241]. Parmi les plus importants figure d’abord celui stipulant que la protection des employés doit faire partie intégrante de l’autorisation  [242].

241Un deuxième amendement précise à propos du droit du fournisseur d’employer le personnel de son choix, que ce droit est soumis au respect « dans tous les cas, [des] dispositions établies par l’État membre (…) tout en tenant compte de la spécificité du travail dans les ports  [243] », alors que la position commune du Conseil imposait la compatibilité de ces législations nationales en droit communautaire.

242Un troisième amendement apporté par la commission parlementaire ajoute à la possibilité adoptée par le Conseil de modifier ou de retirer une autorisation, lorsque les critères établis ne sont pas respectés, la mention « ou lorsque la législation sociale de l’État membre n’est pas ou plus respectée  [244] ».

243Deux modifications apportées à l’article relatif à l’auto-assistance vont également dans ce sens. Leur objectif est d’augmenter les garanties que l’auto-assistance n’aura pas de conséquences en matière de formation, de qualification et de normes sociales. Les deux modifications principales demandent d’une part que la directive n’affecte en rien les critères de formation et de qualification professionnelle et que les États membres veillent à instaurer une réglementation adéquate en la matière si les dispositions nationales font défaut  [245], et d’autre part, que les exploitants pratiquant l’auto-assistance répondent aux mêmes normes sociales et détiennent les mêmes qualifications professionnelles que les fournisseurs de services portuaires pour le même type de service.

4.6.2. Les séances plénières du Parlement

244Afin de faire pression sur le Parlement avant le vote final de deuxième lecture, les dockers européens se mettent à nouveau en grève le 10 mars 2003. En Belgique, en Espagne, en Finlande et en France, la grève dure quarante-huit heures. Le même jour, 3 500 dockers venus des ports belges, français, hollandais et espagnols manifestent à Strasbourg, à proximité du Parlement européen.

245Comme pour la première lecture, nous passerons d’abord en revue les interventions des rapporteurs fictifs, avant de présenter les résultats des votes.

Interventions des rapporteurs fictifs

246Les interventions orales sont plus longues que lors de la première lecture. Elles expriment également des opinions plus tranchées. Comme le mentionnent la plupart des intervenants, cette séance plénière se déroule alors qu’une imposante manifestation des dockers a lieu aux alentours du siège du Parlement à Strasbourg. Il est intéressant de voir en quels termes les rapporteurs apprécient la situation inhabituelle à laquelle ils sont confrontés.

Groupe du Parti populaire européen et des démocrates européens

247Le représentant du PPE-DE se veut rassurant.

248

« Je voudrais dire à tous, ainsi qu’aux dockers qui manifestent aujourd’hui, que, à
mon avis, ils tireront des avantages de la libéralisation des services portuaires à
moyen ou à long terme, car cela créera de nouveaux emplois. Nous n’avons rien
contre ces personnes. Bien au contraire, nous reconnaissons qu’elles contribuent
par leur travail à la croissance économique. Toutefois, elles ne devraient pas faire
obstacle à cette libéralisation et, par conséquent, à la consolidation de l’économie
européenne.
Nous avons écouté attentivement les commentaires formulés par le secteur et les
parties concernées et c’est justement ce qui justifie notre position concernant le
pilotage, qui doit prendre en considération les particularités, les diverses approches
et les facteurs de sécurité. C’est pourquoi notre point de vue est différent de celui
du Conseil, c’est pourquoi nous avons, en quelque sorte, une vue plus souple des
exigences des dockers et de la question de l’auto-assistance. Nous avons examiné de
près la question de la formation appropriée du personnel et je pense, par
conséquent, que les revendications des dockers au sujet de l’auto-assistance sont
quelque peu démesurées.
Compte tenu de notre position et de celle de la commission de la Politique
régionale, des Transports et du Tourisme lors du vote sur la proposition, je pense
qu’il s’agit de la bonne approche si nous voulons adopter, dans le meilleur délai et
avec le Conseil, une législation qui soit acceptable par tous  [246]. »

Parti socialiste européen

249Le représentant du groupe du PSE entend également répondre aux dockers venus défendre leur position.

250

« Je le dis en mon nom et en celui de mon groupe : nous comprenons que les personnes travaillant dans les ports fassent connaître leurs préoccupations et leurs besoins. Elles sont dans leur bon droit. J’estime cependant qu’elles outrepassent leurs droits en lançant des pierres et en se heurtant aux forces de police. (…) Le point le plus contestable concerne la définition de l’auto-assistance, qui engloberait également les activités à terre. Pour dire les choses clairement : c’est tout à fait inacceptable à nos yeux. Pour nous, l’auto-assistance ne peut regrouper que ce qu’un navire et son équipage peuvent accomplir eux-mêmes. Plus, ce serait inacceptable – c’est en effet ce que recouvre le mot “auto-assistance” ; toute autre activité constituerait en fait de l’allo-assistance. Que cela soit dit à l’adresse de la Commission et du Conseil : pour les sociaux-démocrates, cette définition de l’auto-assistance n’est pas négociable dans le cadre d’une procédure de conciliation. (…)
Mon principal problème concerne encore et toujours la concurrence entre les ports, et la Commission n’est pas cohérente en la matière  [247]. »

Groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe

251Le représentant de l’ADLE réaffirme son attachement à l’élaboration d’une directive.

252

« Nous avons (…) besoin de lignes directrices concernant l’aide publique ainsi que
d’une directive sur la transparence des relations financières entre les entreprises
portuaires et les autorités. (…) Les syndicats nous mettent en garde contre le
danger des ports de complaisance, des ports où toutes les règles sociales sont jetées
par-dessus bord, exactement comme il existe des pavillons de complaisance pour
les navires, des pavillons bon marché. (…) À l’époque de notre première lecture, le
malheureux accident du Prestige ne s’était pas encore produit, un accident qui, une
fois de plus, a attiré notre attention entre autres sur la formation et la qualité des
équipages des navires, un sujet abordé dans le présent texte également.
En appliquant de façon appropriée un système d’autorisations, les autorités
compétentes seront à même de faire en sorte que les ports ne soient pas des lieux où
l’on prend des risques en matière de sécurité et d’environnement, que les ports ne
soient pas des lieux où le dumping social est permis, mais, au contraire, que les
ports deviennent un maillon essentiel d’une politique européenne des transports
efficiente et durable  [248]. »

Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique

253Le ton adopté par la représentante su groupe GUE/NDL est très différent.

254

« Même si le rapporteur, notre collègue M. Jarzembowski, a rencontré beaucoup de
monde, intégré un certain nombre de propositions d’amélioration, le problème de
fond demeure. Il n’y a pas eu de véritable consultation des intéressés et des
organisations syndicales qui, pourtant, connaissent les besoins en termes de sécurité
pour les hommes et pour l’environnement, et possèdent un savoir-faire
irremplaçable. Le fait d’ailleurs que l’on continue à légiférer à l’encontre des
personnels concernés s’est exprimé ici même, cet après-midi, avec l’imposante
manifestation des dockers. À cet égard, je veux m’associer à la protestation de mon
président de groupe, Francis Wurtz, qui a trouvé inacceptable l’attitude policière à
leur égard : leur protestation est légitime, a-t-il dit, et face à la casse de leur métier,
de leur emploi, on ne pouvait quand même pas imaginer qu’ils viennent avec des
fleurs devant les institutions européennes. »

255Sa conclusion est nette.

256

« Enfin, dans le cadre des rencontres que j’ai eues sur le littoral français à propos de la sécurité maritime à la suite des dégâts causés par le Prestige, tous les professionnels de la mer ont insisté sur le fait que la sécurité maritime commençait dans les ports. Et bien je trouve totalement contradictoires les mesures prises ici après le naufrage du Prestige, ainsi que la décision d’imposer aujourd’hui l’auto-assistance. Ce sont toutes les raisons pour lesquelles mon groupe continue à proposer le rejet de la position commune  [249]. »

Groupe des Verts/Alliance libre européenne

257Le représentant du groupe des Verts/ALE évoque d’autres éléments.

258

« Il s’agissait aujourd’hui de discuter d’éléments déterminés, deux pour être précis :
l’autorisation et les licences relatives à ces services et cette nouvelle prestation de
services, et l’auto-assistance. Dans les deux cas, il semble que la position des
travailleurs est mise en péril. (…) J’exprime par conséquent ma préoccupation sur
ce qui se passe actuellement, non seulement en tant que rapporteur fictif de ce
projet au sein de la commission de la Politique régionale, des Transports et du
Tourisme, mais aussi en tant que président de la commission de l’Emploi et des
Affaires sociales. »

259Ce rapporteur fictif poursuit en soulevant une autre question.

260

« Lorsque nous voyons ce que nous disent actuellement les organisations
professionnelles, ainsi que d’autres d’ailleurs – et j’aimerais d’ailleurs que la
commissaire nous en dise plus à ce sujet – à savoir que la directive de l’Union dans
sa forme actuelle est contraire à l’OIT – l’Organisation internationale du travail –,
aux conventions 137, relative au travail portuaire, et 152, relative aux conditions de
ce travail dans les ports, je me demande si nous n’avons pas pris la parole sans y
être invité. Il semble qu’un gros problème se pose et j’aimerais savoir si c’est
véritablement le cas, car il est encore temps de s’engager dans une autre voie. Après
le vote de demain, la concertation se poursuivra, après quoi nous voterons une
nouvelle fois, mais la Cour européenne nous attend au tournant, je puis vous
l’assurer  [250]. »

Groupe pour l’Europe des démocraties et des différences

261Le représentant du groupe EDD rappelle sa position.

262

« Bien que sensiblement modifiée, cette proposition de directive ne m’apparaît pas
plus opportune aujourd’hui qu’elle ne l’était lors de la première lecture. Les raisons
ayant motivé l’exclusion du pilotage du champ de compétence de cette directive
sont, à mon sens, applicables à l’ensemble des services techniques nautiques, dans la
mesure où la qualité du service et la sécurité des opérations sont inhérentes à
chacun de ces services. »

263Il poursuit en indiquant que :

264

« Ce texte n’a qu’un objectif, celui de parvenir à une concurrence équitable,
autrement dit à l’ouverture à la concurrence de ces marchés jugés suffisamment
rentables pour être intéressants, l’efficacité et la fiabilité des services publics,
pourtant reconnues, pesant peu devant l’intérêt, ou plutôt les intérêts, ainsi générés.
L’auto-assistance illustre cette volonté libérale qui, malgré un encadrement mieux
défini, ne se soucie guère des conditions de sécurité optimale actuellement
assurées ».

265Et de conclure :

266

« À qui fera-t-on croire, en effet, que les différentes opérations actuellement
réalisées par des professionnels qualifiés pourront être demain assurées dans les
mêmes conditions par un personnel non spécialisé et de façon totalement
fragmentée ? L’ampleur du mécontentement des manifestants dockers présents
vendredi à Bruxelles et cet après-midi à Strasbourg illustre leur désespoir de voir
des institutions européennes toujours aussi éloignées des réalités et des
préoccupations des citoyens et qui restent arc-boutées sur leurs positions
dogmatiques  [251]. »

Groupe Identité, Tradition, Souveraineté

267Le représentant du groupe ITS exprime également son opposition au texte.

268

« Il va de soi que je m’oppose avec force à la présente directive et plus précisément
contre le dossier de l’auto-assistance. Je souhaite exprimer très explicitement ma
solidarité avec les travailleurs qui sont venus manifester à Strasbourg aujourd’hui.
Grâce à l’expérience mise en pratique dans mon pays (sic), la Flandre, nous savons
en effet que le système de groupes fonctionnant avec des ouvriers portuaires
reconnus nous permet de faire travailler dans nos ports des gens qualifiés et
motivés et comptant parmi les meilleurs professionnels dans le monde. (…)
L’Europe donne l’impression de privilégier les intérêts de certains armateurs – des
armateurs qui osent même user dans de nombreux cas d’une forme d’esclavage
moderne – au détriment de la survie de ses meilleurs ouvriers portuaires.
D’évidence, la seule réponse possible face à cette arrogance aveugle européenne est
non, jamais  [252]. »

Vote des amendements

269En deuxième lecture, les parlementaires ne sont pas invités à se prononcer sur le texte dans son ensemble, mais uniquement sur les amendements. La règle de majorité ici appliquée est plus stricte qu’en première lecture puisque les amendements doivent être votés à la majorité simple du nombre total de parlementaires, qu’ils soient présents ou pas, afin d’être acceptés.

270Le 11 mars 2003, soit deux ans après le début de la procédure, le Parlement européen adopte une résolution comprenant 39 amendements à la position commune du Conseil. Sur ces 39 amendements, 33 proviennent du rapport de la commission parlementaire, qui est donc presque intégralement approuvé par l’assemblée plénière  [253].

271Six nouveaux amendements déposés en plénière sont également adoptés. Si la plupart ne font que reformuler certains articles, l’un d’entre eux aborde une question importante. Alors que le Conseil autorisait les États membres à subordonner le droit à l’auto-assistance à une autorisation préalable, le Parlement oblige les États membres à le faire  [254].

272Enfin, remarquons qu’un grand nombre d’amendements déposés ont été jugés inadmissibles par le président du Parlement. En effet, le règlement interne ne permet, en seconde lecture, que d’adopter des amendements ayant pour but (a) de réaffirmer la position prise par le Parlement en première lecture, (b) d’aboutir à un compromis avec le Conseil, (c) d’amender les nouveaux éléments introduits par le Conseil, ou (d) de prendre en compte de nouveaux faits  [255]. Certains amendements visant à supprimer l’auto-assistance  [256] ou à mentionner les conventions 137 et 152 de l’OIT dans la directive ont ainsi été écartés  [257].

273Une fois encore, l’ESPO a réagi au vote du Parlement européen, considérant le résultat « acceptable dans une large mesure » : « Le plus important est que la flexibilité de l’autorité portuaire en matière de prise de décision, telle que proposée par le Conseil, ait été maintenue et même renforcée  [258]. » L’ESPO se dit également satisfaite du nouvel article sur la transparence, mais regrette cependant l’exclusion complète des services de pilotage.

4.7. POSITION DE LA COMMISSION SUR L’AVIS EN DEUXIÈME LECTURE DU PARLEMENT EUROPÉEN

274Alors que la Commission tendait, dans sa proposition modifiée et ses commentaires sur la position commune, à mettre en avant les points de convergence plutôt que ceux de désaccord, créant l’impression diffuse qu’un consensus existait entre les trois institutions, le ton adopté en réaction à l’avis en deuxième lecture du Parlement est beaucoup plus tranché.

275Des 39 amendements adoptés par le Parlement, la Commission estime qu’elle « peut accepter 10 amendements en totalité, 3 en partie et 4 dans leur principe. Elle doit cependant rejeter 22 amendements en totalité et 2 en partie  [259] ».

276Les amendements acceptés sont principalement liés à la question de la durée des autorisations, ainsi qu’à des clarifications de certains articles  [260]. Certaines des garanties demandées sont acceptées, mais pas toutes  [261]. Nous ne traiterons ici que des amendements où l’opposition entre le Parlement et la Commission s’est cristallisée, en suivant l’ordre présenté par la Commission elle-même.

4.7.1. L’auto-assistance

277Concernant la définition de l’auto-assistance, de laquelle le Parlement a tenu à supprimer la référence au personnel à terre, la Commission indique : « Bien qu’une telle restriction n’empêche évidemment pas les règles du traité de continuer à s’appliquer à l’auto-assistance par le personnel à terre, elle empêcherait que l’auto-assistance assurée par du personnel à terre soit régie par des règles spécifiques et claires. En outre, elle ne contribuerait nullement à permettre aux opérateurs commerciaux de faire une meilleure utilisation des ressources existantes  [262]. »

278Par rapport aux amendements visant à encadrer le recours à l’auto-assistance, la Commission estime qu’ils « remplacent l’objectif de la directive, qui est de permettre l’auto-assistance chaque fois que cela est possible, par son exact opposé, c’est-à-dire de faire obstacle à l’auto-assistance autant que possible  [263] ».

279Enfin, en ce qui concerne la limitation du bénéfice de l’auto-assistance aux navires battant pavillon d’un État membre de l’UE, la Commission rappelle que cet amendement restreint le champ d’application de la directive et que « la compatibilité de cet amendement avec les obligations internationales des États membres et de la Communauté doit être examinée de manière plus approfondie  [264] ».

4.7.2. Le pilotage

280La Commission maintient que « le pilotage en tant que tel est un service commercial et que l’accès à la fourniture de ce service devrait donc suivre les règles de la présente directive  [265] ». De plus, elle juge inacceptable que la possibilité d’autoriser l’auto-assistance en matière de pilotage sous certaines conditions, comme l’avait prévu le Conseil, ne se retrouve plus dans la directive.

4.7.3. Les garanties

281En première lecture, le Parlement a proposé un certain nombre de précisions, ayant pour objectif d’augmenter la garantie que soient respectés la sécurité, l’environnement et la législation sociale. Bien que certaines de ces précisions aient été reprises par le Conseil et la Commission, en tout ou en partie, beaucoup de précisions ont été ajoutées lors de la deuxième lecture du Parlement.

282Selon la Commission, l’ensemble des amendements que nous avons détaillés ci-dessus dans la section 6  [266] restreignent « la libre prestation des services et du droit d’établissement garantis par le traité  [267] » et sont par conséquent « contraires aux principes de base et à la philosophie de sa proposition  [268] ». D’autant plus que plusieurs de ces amendements « visent à changer l’objectif de la directive en substituant à la création de règles relatives à l’accès au marché, la création d’une législation sociale. Or la directive repose sur l’application intégrale de la réglementation sociale existante  [269]. »

4.7.4. Une concurrence équitable et transparente

283La Commission affirme enfin ne pas renier l’objectif de créer des conditions de concurrence équitables et transparentes entre et dans les ports de la Communauté, mais soutient que la version du Parlement « promet davantage que la directive, avec sa base juridique actuelle, ne peut tenir  [270] » tout en compromettant le droit d’initiative de la Commission en la matière  [271].

4.8. CONVOCATION D’UN COMITÉ DE CONCILIATION

284Les amendements en deuxième lecture du Parlement, ainsi que l’avis de la Commission, ont été transmis au Conseil au printemps 2003. Celui-ci ayant fait savoir par lettre en juillet 2003 qu’il n’était pas en mesure d’approuver l’ensemble des modifications apportées à la position commune, un comité de conciliation Parlement-Conseil a été convoqué, comme le prévoit la procédure de co-décision  [272].

285Le comité de conciliation réunit les délégations du Parlement et du Conseil, chacune étant composée de quinze membres. Pour le Conseil, il s’agit généralement de représentants des États membres au Coreper (Comité des représentants permanents). Trois des membres de la délégation du Parlement ont un poste permanent au sein du comité, en tant que vice-présidents du Parlement. Ces trois membres permanents co-président le comité à tour de rôle. Les douze autres sont désignés par leur groupe politique et appartiennent le plus souvent à la commission parlementaire chargée du dossier  [273]. Le commissaire à l’initiative de la proposition co-préside également les négociations, en faisant le nécessaire pour réconcilier les deux parties. La délégation du Conseil vote à la majorité qualifiée et la délégation du Parlement à la majorité simple.

286Après deux ans et demi de procédure, accompagnée de multiples arrêts de travail dans les ports partout en Europe, la tension devient de plus en plus palpable. Alors que les syndicats organisent deux manifestations simultanées à Rotterdam et à Barcelone, le 29 septembre 2003, réunissant respectivement 9 000 et 6 000 dockers, certains communiqués des organisations patronales se font plus pressants. L’ECSA, en particulier, rappelle que « les associations patronales représentant le transport et le commerce (…) sont très inquiètes de l’attitude adoptée par le Parlement européen. L’affaiblissement de la directive est [selon elle] en contradiction avec l’objectif du Parlement européen et des autres institutions européennes de dynamiser le rôle des ports (…) et de promouvoir les services de transport maritime de courte distance. (…) L’industrie appelle par conséquent le Parlement européen et le Conseil à produire une directive forte, dans le cadre de la procédure de conciliation, qui contienne les éléments substantiels de la nécessaire libéralisation de tous les services portuaires. Il serait irresponsable de rater cette opportunité  [274]. » Rédigeant peu de communiqués de presse, l’ESC n’a par contre jamais arrêté de faire pression sur les institutions européennes, soutenant la proposition telle qu’elle était à l’origine. Pour cette dernière organisation, il est totalement hors de question que l’auto-assistance soit supprimée de la directive  [275].

287Réuni en septembre 2003, le comité de conciliation est co-présidé par Renzo Imbeni (PSE, Italie), pour le Parlement, et par Guido Viceconte (PPE-DE), secrétaire d’État italien aux infrastructures et aux transports.

288Au terme des négociations, le Conseil accepte seize amendements du Parlement, lequel consent à en retirer onze. Des compromis sont trouvés pour douze autres amendements  [276]. Ce résultat est approuvé par la délégation du Parlement par 8 voix contre 7  [277]. R. Imbeni, président de la délégation, explique avoir voté en faveur du compromis, et contre la position de son groupe politique, « car il estimait que cette décision importante, le rejet de la proposition, devait être prise par le Parlement en plénière, en toute transparence  [278] ».

289Voici les grandes lignes de l’accord dégagé :

  • auto-assistance : la définition du Parlement est acceptée par le Conseil : l’auto-assistance ne sera autorisée que dans les cas où les entreprises de transport maritime utilisent leur personnel navigant et leurs propres équipements. D’autre part, l’État membre peut exiger que l’auto-assistance soit subordonnée à une autorisation préalable. Celle-ci devra répondre à des critères touchant non seulement à l’emploi et aux questions sociales, mais aussi aux qualifications professionnelles et aux questions d’environnement ;
  • droit exclusif de délivrer des autorisations pour les services portuaires : sur ce point, un compromis est accepté par le Parlement. En vertu du principe de subsidiarité, les États membres peuvent décider de se réserver ou non l’exercice du droit d’autorisation obligatoire ;
  • nature et durée des autorisations et des mesures transitoires : Le Conseil accepte les amendements du Parlement quant aux délais et aux conditions des autorisations et des dispositions transitoires ;
  • paiements compensatoires aux fournisseurs de services précédents : à titre de compromis, il est décidé que « les États membres arrêteront des dispositions pour qu’une compensation appropriée soit versée aux fournisseurs précédents, mais dans le seul cas où la durée de leur autorisation se trouve réduite par la nouvelle directive  [279] » ;
  • services de pilotage : le Parlement accepte que le pilotage demeure dans le champ d’application de la directive. Toutefois, « l’importance spéciale que revêtent les services de pilotage pour la sécurité du trafic maritime et la protection de l’environnement dans les zones particulièrement sensibles est soulignée. Par conséquent, l’on en reste à la disposition en vertu de laquelle les autorités compétentes peuvent limiter l’activité de pilotage à un seul prestataire pour des raisons de sécurité publique. La limitation, prévue par le Conseil, de la durée de l’autorisation accordée pour les services de pilotage a été abandonnée selon le vœu du Parlement. De plus, les États membres devront faire rapport à la Commission, au terme de trois années, sur les mesures prises afin d’améliorer l’efficacité des services de pilotage  [280] » ;
  • concurrence entre ports et transparence des relations financières : le Conseil accepte d’ajouter aux objectifs de la directive celui d’assurer « des conditions loyales de concurrence dans les ports de la Communauté et entre ceux-ci. (…) La Commission a l’obligation de prendre les mesures qui s’imposent en vue de créer des conditions de concurrence équitables et de rendre compte au Parlement et au Conseil dans un délai de trois années. En outre, la Commission devra arrêter, comme le demandait aussi le Parlement, des lignes directrices au sujet des subventions publiques versées aux ports ou aux systèmes portuaires  [281] » ;
  • autres aspects : par ailleurs, le Conseil approuve plusieurs autres amendements du Parlement relatifs « à la politique de développement des ports, à la procédure de sélection des fournisseurs de services et aux investissements en actifs mobiliers  [282] ».

4.9. DÉCISION DU PARLEMENT EUROPÉEN EN TROISIÈME LECTURE

290Lors des derniers débats tenus en séance plénière le 18 novembre 2003, le rapporteur, G. Jarzembowski, souligne que « l’issue de la procédure de conciliation [était] un grand succès pour nous tous, compte tenu de l’attitude extrêmement négative qu’affichait le Conseil dans un premier temps ». La commissaire initiatrice de la proposition, L. De Palacio, exprime également son sentiment d’avoir fait preuve « d’une flexibilité extrême tout au long de ce débat » et juge que ce qui reste de sa proposition constitue « un minimum vital  [283] ».

4.9.1. Dernières interventions des rapporteurs fictifs

291Malgré l’aboutissement d’un compromis, toute opposition à la proposition de directive n’a pas disparu. Sur les sept groupes politiques qui se sont exprimés lors de la séance plénière, cinq appellent explicitement au rejet de la proposition de compromis du comité de conciliation.

Groupe du Parti populaire européen et des démocrates européens

292L’intervention du représentant du PPE-DE soutient la proposition, jugée équilibrée, malgré certains regrets liés à ce qui est perçu comme un recul par rapport à la version originale du texte. K. Hatzidakis déclare en effet qu’il ne parvient « pas à comprendre pourquoi certaines personnes continuent de s’opposer au résultat atteint qui, il faut le souligner, ne réjouit pas particulièrement l’industrie – tout spécialement les armateurs, qui attendaient un texte plus audacieux. Selon moi, le compromis que nous avons sous les yeux sert les intérêts de l’industrie jusqu’à un certain point, dans le sens où il inclut d’autres fournisseurs de services – il met un terme au monopole et offre un plus grand choix –, et les intérêts des travailleurs, dans le sens où de nouvelles entreprises sont créées – et qui dit nouvelles entreprises dit aussi nouveaux emplois. Un pas en avant a donc été franchi, c’est la raison pour laquelle nous devons soutenir l’issue de la conciliation et voter en sa faveur  [284]. »

Groupe du Parti socialiste européen

293Pour le PSE, W. E. Piecyk pose un constat diamétralement opposé. Il rappelle « qu’en deuxième lecture, les membres de cette assemblée ont, à une majorité écrasante, insisté sur trois points essentiels » : l’importance de la transparence, l’exclusion du pilotage et la limitation de l’auto-assistance. Concernant ce dernier point, il cite le texte adopté par le Parlement en première lecture : « Les exploitants qui pratiquent l’auto-assistance sont traités de la même manière que les autres fournisseurs de services portuaires. À cette fin, il est exigé des exploitants qui pratiquent l’auto-assistance qu’ils répondent aux mêmes normes sociales et aux mêmes qualifications professionnelles que les autres fournisseurs d’un service portuaire identique ou similaire.” Tel est le texte rejeté par le Conseil, le texte que nous ne sommes pas parvenus à imposer. Nous ne pouvons dès lors qualifier ce compromis d’équitable ; il équivaut plutôt à s’incliner devant le Conseil. (…) Voilà pourquoi je préconise, à l’instar de mon groupe, de rejeter en bloc le compromis  [285]. »

Groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe

294Telle n’est pas la position de l’ADLE. Bien que la proposition de compromis ne satisfasse pas tout le monde, H. Vermeer, représentant de ce groupe, considère que « le résultat marque pourtant un pas en avant dans le secteur maritime européen. (…) Un résultat a malgré tout pu être atteint – un cadre juridique qui assure des relations claires et transparentes entre les ports, les autorités et les fournisseurs de services. (…) Les services de pilotage ont finalement été inclus, tout comme l’option de l’auto-assistance qui est, à mon sens, trop restrictive. Les entreprises de transport maritime ont acquis une marge de manœuvre plus large, dont elles ont besoin pour s’assurer un bon retour sur investissements. Une marge de manœuvre élargie est aussi synonyme de croissance et d’emploi. La hausse du taux d’emploi est généralement la meilleure politique sociale. (…) Bref, nous allons de l’avant et les libéraux rendront essentiellement un vote positif  [286]. »

Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/ Gauche verte nordique

295Le groupe GUE/NGL ne partage pas cette position. Selon E. Meijer :

296

« La navigation maritime et les ports se prêtent davantage aux abus que nombre
d’autres activités. Ces secteurs traitent en effet des flux de marchandises
transfrontaliers entre différents États, au sein de l’Union européenne mais aussi
dans le monde entier. Ces pays présentent non seulement des différences d’ordre
législatif, mais aussi et surtout, au niveau de la rémunération, des conditions de
travail, de la sécurité et de l’étendue de la protection environnementale. Ceux qui
considèrent le dumping social et la pollution de l’environnement comme des
moyens de remporter une bataille de la concurrence s’emparent avidement de ces
différences. (…) Dans un tel contexte de concurrence, les ports qui desservent un
arrière-pays commun se détruiront les uns les autres. Le vainqueur sera toujours le
plus antisocial, le plus polluant, le moins sûr et, par conséquent, le port de la plus
grande complaisance. »

297Le représentant du groupe GUE/NGL revient ensuite sur le processus suivant.

298

« Le Parlement a rectifié ces projets en première lecture il y a deux ans, comme en
deuxième lecture en mars dernier. Il faut reconnaître que cette rectification n’est
pas allée aussi loin que ce que les syndicats souhaitaient et comportait toujours des
risques d’abus, mais il semble que les parties concernées, animées par des intérêts
divers, ont pu s’en accommoder dans une certaine mesure. Ce n’est plus le cas
depuis que le Conseil des ministres du Transport a refusé systématiquement
d’adopter ces rectifications l’été dernier. Pendant la conciliation, la délégation
parlementaire est apparue déterminée à maintenir le point de vue défendu
précédemment par le Parlement. Cette volonté animait non seulement les groupes
de gauche, mais aussi les chrétiens-démocrates et les libéraux.
Le 29 septembre, la plupart de ces objections avaient subitement disparu. En
échange d’une autre étude relative à la concurrence et d’un texte qui jongle avec les
verbes “pouvoir” et “devoir”, huit des quinze États membres ont renoncé à tout ce
que le Parlement avait réussi à accomplir. »

299Et E. Meijer conclut : « Cette proposition doit être rejetée jeudi  [287]. »

Groupe des Verts/Alliance libre européenne

300Le groupes des Verts/ALE aboutit à la même décision. Pour T. J. J. Bouwman :

301

« Le résultat obtenu n’est pas celui escompté. (…) Il n’inclut pas les autorisations
obligatoires demandées aux nouveaux fournisseurs de services sur les plans social,
environnemental et autres, notamment la sécurité. Il n’y a pas de définition de
l’auto-assistance, car nous faisons référence à nos propres équipages, ce qui permet
des interprétations multiples des contrats de travail actuels dans la plupart des
ports. On en a dit assez sur le pilotage. En ce qui concerne la transparence tant
adulée par M. Jarzembowski, elle représente également un pas en avant à nos yeux,
mais qui ne correspond pas tellement à ce que nous avions demandé. »

302Le représentant du groupe des Verts/ALE conclut :

303

« Tout bien considéré, la proposition est inacceptable, à plus forte raison si l’on
tient compte des traités de l’OIT en ce qui concerne les mauvaises conditions de
travail et la sécurité. Les risques de voir ces ports devenir des ports de complaisance
sont grands. Compte tenu de tous ces éléments, le groupe des Verts/Alliance libre
européenne rejette ce compromis, qu’il juge incapable d’offrir un juste équilibre. La
libéralisation n’est pas la panacée universelle  [288]. »

Groupe pour l’Europe des démocraties et des différences

304Le groupe EDD se range également du côté des opposants au texte discuté. M. Esclopé considère que :

305

« Pas plus que les lectures précédentes, le compromis obtenu en comité de
conciliation au mois de septembre ne nous satisfait. (…) Si le pilotage a été
superficiellement préservé d’une concurrence sauvage, la liberté donnée à chaque
État nous paraît trop grande et contradictoire avec la notion de service public, une
qualité reconnue aux services dont il est ici question (…). De même, en matière
d’auto-assistance, (…) il est peu probable que la protection sociale des employés et
les contraintes de sécurité optimales pèsent lourd face à la recherche d’une
rentabilité économique assurée par une main-d’œuvre bon marché. »

306Et le représentant du groupe EDD précise : « En conclusion, nous disons non à la création de ports de complaisance et à l’auto-assistance au niveau des terminaux  [289]. »

Groupe Identité, Tradition, Souveraineté

307Le groupe ITS souhaite également le rejet du texte proposé. K. Dillen explique que :

308

« Pour des milliers de dockers flamands, la libéralisation dans ce contexte est
synonyme de chômage et de misère sociale. En croyant aveuglément en sa propre
idéologie et en dédaignant toute concertation sérieuse avec les autres parties
impliquées, la Commission prouve une fois de plus qu’elle ne peut respecter le
principe de subsidiarité dont les prophètes de l’“Europe du lait et du miel” nous
rebattent les oreilles depuis Maastricht. Dans le contexte qui entoure cette question,
la Commission porte atteinte à des traditions qui ont assuré la renommée des ports
flamands dans le monde entier pendant des décennies. »

309Et le représentant du groupe ITS conclut : « J’espère dès lors qu’il y aura un vote massif contre ce rapport  [290]. »

4.9.2. Résultat du vote

310Pour que la directive soit adoptée à ce stade, la proposition de compromis doit recueillir la majorité des suffrages exprimés. Le 20 novembre 2003, le Parlement se prononce contre le compromis à une courte majorité, par 229 voix contre 211 et 16 abstentions. Il met ainsi un terme au parcours de la proposition de directive présentée près de trois ans auparavant.

311Comme le laissent penser les recommandations des rapporteurs, la plupart des membres du PPE-DE et des libéraux ont voté pour le compromis, tandis que les groupes socialiste, vert, GUE/NGL ainsi que les petites fractions l’ont rejeté. Néanmoins, certaines spécificités nationales ou régionales ont joué. Ainsi, onze des quatorze parlementaires flamands, incluant un libéral, les sociaux-chrétiens et un membre du Vlaams Belang, se sont prononcés pour le rejet  [291], tandis que, à l’inverse, une grande partie des socialistes italiens ont soutenu la proposition  [292].

312Sans surprise, le résultat du vote du Parlement européen en troisième lecture a été célébré comme une victoire par les dockers, tandis qu’il a été vécu comme un échec pour les organisations patronales. Ainsi, le président de l’ESPO s’est montré d’autant plus déçu que le compromis obtenu en comité de conciliation contenait tout ce qui était important aux yeux de l’ESPO. D’après lui, les raisons du rejet de la proposition par les parlementaires européens étaient diverses, certains pensant que le compromis n’allait pas assez loin, d’autres étant victimes de la pression des syndicats, qui était d’autant plus forte qu’elle jouait [selon lui] dans le registre de l’émotionnel  [293]. À nouveau, les termes utilisés par l’ECSA sont beaucoup plus forts : « Le rejet de la proposition de directive concernant la libéralisation des services portuaires suscite beaucoup d’inquiétude. Cette décision est en contradiction totale avec d’autres mesures prises à la suite du Conseil de Lisbonne  [294]. »

5. LE SECOND PAQUET PORTUAIRE

313En octobre 2004, moins d’un an après le rejet du paquet portuaire, la Commission adopte une seconde proposition de directive sur l’accès au marché des services portuaires  [295].

5.1. PRÉSENTATION DE LA SECONDE PROPOSITION DE DIRECTIVE

314Si la rapidité avec laquelle la Commission réitère sa proposition peut surprendre, sa motivation se comprend plus aisément lorsqu’on se penche sur le calendrier institutionnel européen. En effet, le Parlement et la Commission sont alors en période de renouvellement. Le nouveau Parlement élu entre en fonction pendant l’été 2004 avec un centre de gravité qui se déplace nettement vers la droite, dès lors que le PPE et l’ELDR  [296] gagnent chacun 2,3 % des sièges. Du côté de la Commission, la nouvelle équipe entre en fonction le 1er novembre 2004, ce qui marque également la fin du mandat de Loyola De Palacio en tant que commissaire aux Transports et à l’Énergie. Dans ce cadre, le déplacement vers la droite du Parlement européen constitue un signal positif pour la commissaire afin de faire aboutir un dossier important avant la fin de son mandat.

315En dehors des aspects stratégiques, qu’en est-il du contenu de cette seconde proposition ? Les aspects liés au travail portuaire, tant critiqués au cours de la première procédure, sont clairement abordés dans la présentation générale de la nouvelle proposition. Celle-ci dit vouloir « achever le marché intérieur et créer des conditions de concurrence homogènes entre les ports (…) dans le respect total du droit social et du droit du travail, tout en créant des emplois dans le secteur  [297] ». La Commission fait d’ailleurs clairement référence aux critiques des années précédentes, dans les termes suivants : « Au cours du précédent débat législatif, l’argument selon lequel l’ouverture du marché des services portuaires aurait des effets néfastes sur l’emploi et les conditions sociales et compromettrait la sûreté et la sécurité dans les ports a souvent été avancé. Cet argument n’est pas fondé. La Commission a toujours mis en avant le caractère neutre  [298] de sa proposition eu égard aux règles communautaires et nationales en matière d’emploi et de conditions sociales, notamment les exigences de formation et de qualification professionnelle, ainsi que dans les domaines de l’environnement, de la sûreté et de la sécurité  [299]. » Par ailleurs, le texte comporte une évolution notable en matière d’emploi puisqu’il « invite les États membres à ratifier les conventions adoptées sous l’égide d’organisations internationales, en particulier les conventions pertinentes de l’OIT  [300]. »

316La nouvelle version du texte est présentée comme s’inspirant de la proposition initiale de 2001, de la proposition modifiée de 2002 et comme prenant en compte bon nombre d’amendements du Parlement européen, la position commune du Conseil et le compromis obtenu en procédure de conciliation.

317Quatre nouveaux éléments sont mis en évidence dans la présentation. Allant à l’opposé de la position défendue par le Parlement européen dans le cadre du premier paquet portuaire, l’auto-assistance est autorisée en recourant au personnel à terre, ce qui est présenté comme devant entraîner une création d’emplois. « Il va sans dire que ce personnel devra (…) bénéficier du même régime général que les autres personnels employés pour la manutention des marchandises  [301]. » Le recours au personnel navigant est également autorisé, mais uniquement dans le cadre des services de transport maritime à courte distance ou d’utilisation des autoroutes de la mer.

318Tous les fournisseurs de services portuaires devront obtenir une autorisation pour exercer leur activité au plus tard 30 mois après l’entrée en vigueur de la directive. Cette autorisation peut être octroyée sans conditions, à moins que l’autorité portuaire ne décide d’organiser une procédure de sélection. Cette procédure doit également être mise en place à la demande d’un fournisseur, qu’il soit déjà présent sur le marché ou qu’il veuille y entrer  [302]. Dans l’hypothèse où le nombre de prestataires de services doit être limité, les autorisations octroyées sans sélection préalable sont annulées.

319Comme dans la première proposition, les durées de validité des autorisations octroyées aux fournisseurs dépendent de l’investissement réalisé. Les durées sont respectivement de 8,12 et 30 ans selon qu’il n’y ait pas d’investissement significatif, qu’il y ait des investissements mobiliers ou immobiliers. Ces durées sont légèrement supérieures à ce que la Commission avait proposé en 2001, mais restent éloignées de ce que le Parlement européen avait obtenu lors des négociations au sein du comité de conciliation  [303].

320Suite à ce qui a été convenu lors de la procédure de conciliation, deux nouveaux articles sont insérés. Ils concernent l’application de la directive sur la transparence financière, ainsi que les orientations en matière d’aides d’État  [304]. Ces deux aspects n’étaient pas inclus dans la première proposition de directive, ce qui avait fait l’objet de nombreuses critiques.

5.2. RÉACTIONS DES INTERLOCUTEURS SOCIAUX

321Lors de la première proposition de directive, c’est exclusivement en réponse à l’auto-assistance que s’est développée la mobilisation syndicale. L’auto-assistance est également l’un des principaux points qui ont motivé le rejet de la première proposition par une majorité de parlementaires européens. Partant, il est aussi interpellant qu’intéressant de constater que la Commission a maintenu cette disposition dans sa seconde proposition de directive et l’a même étendue  [305]. En effet, l’auto-assistance figure désormais à l’article premier, ce qui en fait un objectif central de cette deuxième proposition. En outre, son champ d’application a été élargi, puisqu’il concerne également le personnel à terre.

5.2.1. Les organisations syndicales

322Sans surprise, l’ETF se prononce très nettement en faveur du rejet intégral de cette seconde proposition de directive. Tant la forme que le contenu sont dénoncés. La rapidité avec laquelle survient cette seconde proposition implique nécessairement une absence totale de consultation des organisations syndicales : « L’ETF ne peut y voir qu’une attitude provocatrice de la part de la Commission européenne à l’égard du Parlement européen et des travailleurs portuaires européens. Elle reflète le déficit démocratique de l’institution elle-même qui, par ailleurs, a choisi l’affrontement au lieu du dialogue et du compromis  [306]. » L’ETF accuse ensuite la Commission de ne pas préciser la finalité de son projet : « La seule explication donnée est que tous les autres modes de transport ont été libéralisés et que, dès lors, les services portuaires doivent être traités de la même manière. C’est une approche marquée du sceau du dogmatisme  [307]. »

323L’ETF conteste fortement la nécessité même d’accroître la concurrence dans et entre les ports européens, rappelant que ceux-ci sont de loin les plus productifs au monde, selon un rapport de un à deux par comparaison aux ports nord-américains et un rapport de un à trois vis-à-vis des ports asiatiques.

324En ce qui concerne l’invitation faite par la Commission aux États membres de ratifier les conventions de l’OIT, l’ETF considère qu’elle n’est crédible ni sur le fond, ni sur la forme  [308]. Quant à la forme, l’invitation est faite dans l’introduction de la communication de la Commission et n’est pas intégrée au corps de la proposition en tant que tel. Quant au fond, la convention 137 de l’OIT garantit aux dockers un véritable droit de priorité à l’embauche et une garantie relative de stabilité une fois embauchés. En mentionnant cette convention dans sa proposition, l’ETF considère que « la Commission reconnaît dès lors de fait le caractère illégitime de l’imposition de l’auto-assistance  [309] ».

325L’ETF accuse enfin la Commission de créer un flou juridique autour de points cruciaux tels que la procédure de sélection (qui n’est plus obligatoire) et les critères permettant de limiter le nombre d’autorisations. Soulevant nombre de questions sans y apporter de réponse, « la proposition de directive est un paradis pour les juristes  [310] ». Finalement, l’ETF considère qu’il n’est pas anodin que la Commission se concentre uniquement sur le pilotage et l’auto-assistance : « Nous croyons que le projet de directive n’a d’autre finalité que celle de saper les dockers et les employeurs portuaires, ainsi que toutes les structures et tous les organismes du dialogue social  [311]. »

5.2.2. Les organisations patronales

L’ESPO

326Avant même son adoption par la Commission, l’ESPO se déclare très réticente à la nouvelle proposition de la Commission, quel que soit son contenu : « La directive précédente a créé des divisions importantes au sein du secteur portuaire et des tensions locales dans beaucoup de ports. Soumettre une nouvelle proposition à l’heure actuelle, sans avoir procédé à une véritable consultation du secteur, ne ferait qu’aggraver ces tensions, d’autant plus que nous voyons que la Commission se cantonne dans son approche dogmatique  [312]. » L’ESPO soulève également le fait que le secteur portuaire européen a évolué depuis le début de la première procédure et s’est agrandi suite à l’élargissement de l’Union européenne. La Commission n’est donc pas apte à cerner ces mutations en quelques mois. Enfin, tout comme le fait l’ETF, l’ESPO rappelle que les ports européens sont parmi les plus compétitifs au monde et que l’argumentaire de la Commission concernant la nécessité d’accroître cette compétitivité semble manquer de fondement.

327Une fois le texte publié, l’ESPO décide de procéder à un exercice interne d’évaluation d’impact. La conclusion en est que « dans sa forme présente, la directive n’aurait pratiquement aucun impact positif sur les ports maritimes européens mais, au contraire, provoquerait un climat négatif pour l’investissement dans les ports, plus de bureaucratie, de l’insécurité juridique, et engendrerait même des obstacles additionnels pour l’accès au marché  [313] ». L’organisation souligne qu’elle continue à soutenir le projet d’un cadre réglementaire communautaire dans le secteur portuaire, mais plaide pour un débat approfondi sur les vraies priorités d’une telle politique.

328Concernant l’auto-assistance, l’ESPO demande son retrait intégral de la proposition, estimant que la valeur ajoutée qui peut découler de cette mesure n’est aucunement proportionnelle aux troubles sociaux qu’elle génère dans les ports. L’ESPO demande en outre que l’auto-assistance soit négociée au niveau local afin de respecter le principe de subsidiarité  [314].

La FEPORT

329Bien qu’elle s’exprime en des termes plus feutrés que l’ESPO, la FEPORT se positionne de manière similaire  [315]. La FEPORT considère que la proposition de directive ne peut pas permettre de parvenir aux objectifs de Lisbonne. L’accent est mis sur la nécessité de développer l’investissement dans le secteur portuaire. Or les mesures proposées (autorisations obligatoires, durées d’autorisation trop courtes, incertitude quant à la période de transition et aux compensations accordées aux fournisseurs qui seront exclus du marché) sont jugées contre-productives.

330L’objectif général affiché par la Commission, qui est d’augmenter la concurrence dans et entre les ports, est également critiqué. La FEPORT juge en effet que la Commission n’apporte aucune justification à l’affirmation selon laquelle le niveau de concurrence actuel n’est pas suffisant. Partant, les moyens proposés sont considérés comme non proportionnels par rapport à l’objectif visé.

331La FEPORT rappelle par ailleurs qu’elle a toujours été réticente à l’auto-assistance pour des raisons de sécurité et de risques environnementaux. À ces inquiétudes de base s’ajoute le risque de nouveaux troubles sociaux dans les ports. « Il est difficile de comprendre pourquoi l’auto-assistance est considérée comme un élément clé de la proposition. Les syndicats sont particulièrement sensibles à cette mesure et c’est bien normal. En pratique pourtant, l’effet de l’auto-assistance semble être relativement limité, dès lors que cette disposition ne renforce ni l’efficacité opérationnelle ni la compétitivité  [316]. » La FEPORT désapprouve donc doublement le maintien de l’auto-assistance dans la proposition de directive.

L’ECSA

332Suite à la publication de la seconde proposition de directive, l’ECSA rappelle que « l’essentiel est que des mesures soient prises, d’une manière ou d’une autre, afin d’assurer le nécessaire processus de libéralisation et d’appliquer les principes de libre marché aux services portuaires  [317] ». Pourtant, l’ECSA se déclare insatisfaite du texte proposé par la Commission : « Alors que le compromis obtenu en conciliation en 2003 était soutenu par l’industrie maritime, l’ECSA a le sentiment que la seconde proposition de directive nécessite des changements substantiels sous cinq aspects critiques : les autorisations et leurs périodes de validité, les périodes de transition, les compensations et l’auto-assistance. Sans ces modifications, la directive ne débouchera pas sur les changements demandés par l’industrie  [318]. »

333Lorsque sont rendus publics les amendements proposés par les parlementaires européens pendant l’été 2005, l’ECSA se montre encore plus critique, considérant que « la plupart des amendements proposés reviendraient, s’ils étaient acceptés par le Parlement, à annuler les intentions de libéralisation contenues dans la proposition. Dans ces circonstances, il vaudrait mieux ne pas avoir de directive du tout et appliquer les règles du traité  [319] ».

L’ESC

334Comme c’était déjà le cas dans le cadre des dernières étapes institutionnelles suivies par la première proposition de directive, l’ESC se montre particulièrement peu communicatif au sujet de la seconde proposition  [320]. Un seul communiqué de presse est publié, soutenant vivement l’initiative de la Commission, tout comme en 2001. Le seul commentaire formulé quant au fond concerne l’auto-assistance et consiste à rappeler que cette disposition est absolument cruciale aux yeux de l’ESC. À ce titre, le fait que le recours à l’auto-assistance au moyen du personnel navigant soit limité au cadre du transport maritime à courte distance est perçu comme une restriction injustifiée  [321]. Aucune déclaration n’est publiée au cours des mois suivants.

Conclusion

335Ce panorama des positions des principales organisations patronales impliquées dans le conflit montre que leurs points de désaccord avec le texte proposé par la Commission convergent, à l’exception notable de l’ESC. Contrairement à la première proposition de directive qui bénéficiait d’un large soutien des organisations patronales, même après deux ans et demi de conflit dans les ports, la seconde proposition suscite une désapprobation relativement uniforme.

336L’évolution des discussions au sein du Parlement européen va accroître l’insatisfaction des organisations patronales, qui réalisent qu’il n’est pas possible de faire valoir leurs intérêts dans le cadre de cette seconde tentative de libéralisation des services portuaires. Comme le fait remarquer la commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs, appelée à conseiller le Parlement en première lecture, « une situation relativement unique est (…) apparue autour de l’opposition à la directive : l’opposition/le scepticisme se rencontre à la fois parmi les partis politiques et les autres parties concernées par les services portuaires, allant de l’Organisation européenne des ports maritimes communautaires [ESPO] au Conseil international des dockers [IDC] et à la Fédération des opérateurs de ports privés en Europe [FEPORT]  [322] ». Ainsi, quelques mois après le début de la seconde procédure, il apparaît que l’ensemble des acteurs non institutionnels se prononcent pour le retrait du second paquet portuaire, à l’exception probable de l’ESC, qui ne se prononce pas publiquement.

5.3. AVIS CONSULTATIFS

337À l’instar du premier projet, la nouvelle proposition de directive est soumise à l’avis, consultatif, du Comité des régions et du Conseil économique et social européen.

5.3.1. Le Comité des régions

338Le CDR regrette « que la Commission présente déjà, peu de temps après une première tentative soldée par un échec, dans un domaine de réglementation important et sans avoir procédé aux analyses nécessaires, un projet renforcé comportant certes de nombreux changements mais qui repose pour l’essentiel sur le premier projet que le Conseil et le Parlement européen avaient rejeté, et qui constitue parfois clairement un recul par rapport aux résultats de la procédure de conciliation  [323] ».

339De nombreux manquements sont soulignés. Ainsi, selon le CDR, l’analyse des déficits de la situation actuelle n’a pas été menée. Ensuite, les incertitudes au sujet de la durée des contrats et des indemnisations risquent d’entraîner une baisse des investissements. En troisième lieu, « la directive ne tient pas suffisamment compte du fait qu’une concurrence libéralisée entre les ports européens existe déjà à l’échelon des États membres ». Enfin, le CDR estime que l’obligation d’autorisation va générer une surcharge administrative énorme pour les administrations portuaires.

340La possibilité d’embaucher son propre personnel à terre dans le cadre de l’auto-assistance est vue comme une porte ouverte au dumping social, à une baisse de la qualité et de la productivité. Selon le CDR, il est donc indispensable de limiter l’auto-assistance au personnel de bord propre, et ce, sans condition. Le droit à l’auto-assistance devrait également être réservé aux utilisateurs du port dont les navires battent pavillon d’un État membre.

341Par conséquent, le CDR considère que « la directive ne doit pas être approuvée dans sa forme actuelle dans la mesure où elle ne favorise pas la concurrence dans le secteur portuaire, mais crée des réglementations supplémentaires partiellement inutiles ou inappropriées qui nuisent notamment aux intérêts des petits et moyens prestataires de services portuaires et encouragent le dumping social, et réduisent de ce fait l’efficacité des ports et leurs chances de participer à une concurrence loyale  [324] ».

5.3.2. Le Conseil économique et social européen

342Le CESE critique vivement le fait que ce second projet suive « de très près le premier, sans travaux préparatoires suffisants  [325] ». Le principal défaut souligné par le CESE est le manque de consultation des interlocuteurs sociaux, particulièrement dans un secteur où il n’existe pas de comité de dialogue social, comme le secteur portuaire. Ainsi, le CESE regrette « le défaut d’évaluation d’impact du projet de directive, en contradiction avec l’engagement de mieux légiférer affirmé par la Commission depuis le livre blanc sur la gouvernance ; tout projet de législation relevant de la co-décision devrait comporter une telle évaluation, ainsi qu’une information sur les consultations menées notamment avec les partenaires sociaux  [326] ».

343Le CESE fait enfin remarquer que les conventions collectives dans la plupart des pays peuvent « parfois être considérées comme contraires au droit communautaire de la concurrence dans le cadre du projet de directive, tout en étant valides en droit social et du travail aux plans national et international  [327] ». À ce titre, le CESE rappelle que « la Cour de justice reconnaît que le respect des conventions collectives peut limiter l’application du droit de la concurrence  [328] ». Or « les dispositions prévues par la Commission ne prennent pas en considération ces dispositions négociées dans un cadre tripartite  [329] ».

5.4. REJET DE LA PROPOSITION PAR LE PARLEMENT

344Au cours de l’année 2004, soit pendant les quelques mois séparant le rejet du premier paquet portuaire et la présentation du second, plusieurs questions parlementaires sont posées à la commissaire De Palacio. Ces échanges entre la commissaire et certains parlementaires sont emblématiques de la tension régnant autour du dossier. En effet, l’intention de la Commission de soumettre un nouveau projet de libéralisation est claire, ce qui s’accompagne d’inquiétudes étant donné qu’il n’y a aucun signe de consultation des parties prenantes. À nouveau, la question de la consultation est mise à l’avant-plan, de la même manière que le font les organisations syndicales.

345Lors de l’examen du nouveau projet de directive par le Parlement européen, la commission des Transports et du Tourisme estime que la seconde proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires « est identique au projet de compromis issu de la procédure de conciliation antérieure pour l’essentiel de sa structure et de ses règles  [330] ». La première initiative prise par la commission parlementaire est d’organiser une audition des organisations concernées, dont notamment l’ESPO, la FEPORT, l’ESC, l’ECSA et l’ETF. Mais suite à cette audition, le rapporteur Jarzembowski conclut que « bien des règles établies dans le projet commun approuvé par le comité de conciliation dans le contexte de la procédure législative précédente étaient en fait des solutions meilleures pour toutes les parties  [331] ». Il propose par conséquent de reprendre ces règles en ce qui concerne notamment la durée de validité des autorisations, la procédure de sélection et les mesures transitoires. Le rapporteur recommande de maintenir les services de pilotage dans le champ d’application de la directive, malgré les demandes des pilotes. Toutefois, sa position évolue sensiblement concernant l’auto-assistance, ayant « acquis la conviction, compte tenu en particulier des avis concordants de l’Association des ports européens [l’ESPO] et de l’Association des armateurs européens [l’ECSA], que celle-ci n’est pas vraiment nécessaire  [332] ».

346Ces recommandations du rapporteur font l’objet d’une séance de vote particulièrement confuse lors de la réunion de commission du 22 novembre 2005. Les amendements demandant le rejet de la proposition de la Commission sont rejetés, n’obtenant que 22 voix contre 26. Le vote final sur le rapport modifié ne permet pas non plus de dégager de majorité (23 voix contre 24). Par contre, la résolution législative devant être proposée en séance plénière du Parlement obtient 26 voix contre 24. C’est donc sous sa forme initiale que le second projet de directive est soumis au vote en séance plénière le 18 janvier 2006  [333]. Subissant le même sort que le premier projet, la nouvelle proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires est rejetée par 532 voix contre 120 et 25 abstentions. Le rejet est donc voté à une majorité beaucoup plus large que dans le cas de la première proposition de directive. Si le rejet de 2003 était resté cantonné à certaines forces politiques, principalement aux groupes de gauche (PSE, Verts/ALE, GUE/NGL), celui de 2006 touche l’ensemble de l’échiquier politique européen. Cela s’explique amplement par le fait que plus aucune partie prenante ne soutient la proposition, pas même les acteurs patronaux.

CONCLUSION

347L’objectif de ce Courrier hebdomadaire était d’analyser les deux tentatives de la Commission européenne de libéraliser les services portuaires au sein de l’Union et d’expliquer les raisons pour lesquelles ces deux tentatives ont échoué. Pour ce faire, nous avons consacré la plus grande partie de cette étude à l’examen du contenu des deux propositions de directive concernant l’accès au marché des services portuaires. La première proposition a particulièrement retenu notre attention, dès lors que le texte a subi de nombreuses modifications tout au long de son cheminement institutionnel, impliquant trois grandes institutions de l’Union européenne, la Commission, le Parlement et le Conseil.

348Ces institutions n’étant aucunement isolées des rapports sociaux dans lesquels elles s’inscrivent, une partie importante de ce Courrier hebdomadaire a également été consacrée à l’analyse des positions des interlocuteurs sociaux concernés par le secteur portuaire : l’ETF, l’IDC et l’ITF du côté syndical ; l’ECSA, l’ESC, l’ESPO et la FEPORT du côté patronal. Nous avons présenté les positions de ces différents acteurs, ainsi que leurs actions et leurs rapports entre eux et avec les institutions de l’Union européenne. Ainsi, nous avons tenté de comprendre comment ces différents acteurs se sont mutuellement influencés pour créer une dynamique dont l’issue a été l’échec des deux propositions de directive concernant l’accès au marché des services portuaires.

349Si la longueur et l’ampleur du conflit suscité par les deux tentatives de libéralisation des services portuaires empêchent de mettre en lumière l’ensemble du jeu d’influence complexe entre ces multiples acteurs institutionnels, syndicaux et patronaux, le développement qui précède nous permet de tirer certaines conclusions.

350Premièrement, nous pouvons conclure que, sous ses aspects très techniques, la proposition de directive avait des enjeux importants. Si le conflit portuaire peut être qualifié de sectoriel, les enjeux de la libéralisation avaient une portée bien plus large, en raison du rôle des ports comme portes d’entrée et de sortie d’une grande proportion des biens circulant au sein de l’Union européenne (30 % des échanges intra-communautaires transitent par les ports maritimes) et de l’immense majorité de ceux qui y entrent et en sortent (90 % des échanges extra-communautaires). Le développement et le bas coût relatif du transport de marchandises étant des conditions sine qua non à l’augmentation des échanges commerciaux, il constitue un secteur stratégique, dont les veines irriguent l’ensemble du système économique européen. Secteur en pleine croissance, il est destiné à croître sans cesse, si l’on en croit les orientations européennes.

351Deuxièmement, alors que le monde patronal et la Commission européenne voient dans la libéralisation des services portuaires une opportunité de stimuler la compétitivité de l’industrie européenne dans son ensemble, les dockers ont accueilli le paquet portuaire comme une attaque frontale contre leur profession. Autoriser l’auto-assistance revenait, de fait, à faire voler en éclat un statut qui, dans plusieurs pays dont la Belgique, est encore protégé par la loi. Quant à savoir si les conditions de travail dans les ports allaient effectivement en pâtir, une analogie est peut-être à faire avec la pression à la baisse, sur les salaires et les conditions de travail, exercée dans certains secteurs économiques par la présence d’une main-d’œuvre immigrée bon marché. Dans cette optique, autoriser des marins sous-payés, en particulier quand ils sont originaires de pays du Sud, à effectuer le travail d’ouvriers qualifiés aux portes du continent peut être appréhendé comme une « délocalisation sur place  [334] ».

352De fait, l’inquiétude face à un possible dumping social dans les ports a été récurrente chez les parlementaires européens, de gauche principalement, comme l’indiquent les nombreux amendements censés jouer un rôle de garde-fou. Ces inquiétudes étant restées sans réponse de la part de la Commission, il est difficile de qualifier de débat les échanges d’arguments entre celle-ci et le Parlement, et ce malgré plusieurs années de procédure institutionnelle.

353Comment expliquer dès lors les deux échecs de libéralisation des services portuaires ? En ce qui concerne la première proposition de directive, deux éléments apparaissent clairement. D’une part, la volonté d’imposer la libéralisation comme une nécessité, dans un dossier où ses effets négatifs sur les travailleurs étaient particulièrement visibles, a mis au jour une division entre les élites européennes sur la question de la compatibilité entre intérêts économiques et sociaux. D’autre part, l’ampleur de la mobilisation syndicale a contribué à influencer une majorité de parlementaires dans le sens d’une perception négative des effets de l’auto-assistance sur les travailleurs. Touchant principalement les parlementaires de gauche et les fractions anti-européennes, cette pression sociale a également contribué à accentuer les divisions entre le Parlement et la Commission. Enfin, en ce qui concerne la seconde proposition de directive, survenue dans un délai trop court pour permettre aux tensions de s’apaiser, le rejet s’explique par une convergence d’oppositions entre le patronat, les syndicats et le Parlement contre la Commission, qui soutenait seule sa proposition.

Annexe : Procédure de co-décision

figure im1

Notes

  • [1]
    Conseil européen de Lisbonne, Conclusions de la présidence, 23 et 24 mars 2000.
  • [2]
    Ibidem.
  • [3]
    R.-M. JENNAR, « La proposition de directive Bolkestein », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1890-1891,2005 et O. DERRUINE, « De la proposition Bolkestein à la directive services », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1962-1963,2007.
  • [4]
    L’affréteur est celui qui prend un bâtiment, un bateau ou un avion en location pour transporter des marchandises.
  • [5]
    L’armateur est celui qui, propriétaire ou non, équipe ou fait équiper un ou plusieurs navires, soit pour le transport des marchandises ou des passagers, soit pour la pêche maritime.
  • [6]
    Le réseau transeuropéen de transport (RTE-T) est un programme de développement des infrastructures de transport européennes. L’objectif majeur de ce programme est de développer les échanges, en favorisant l’interopérabilité des réseaux des différents États membres.
  • [7]
    Commission européenne, Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes, Bruxelles, 10 décembre 1997, COM (1997) 678 final.
  • [8]
    Cf. notamment Commission européenne, Current International Shipping Market Trends – Community Maritime Policy Priorities and Legislative Initiatives, OECD Workshop On Maritime Transport, Paris, 4-5 novembre 2004, p. 5.
  • [9]
    Conseil européen de Lisbonne, 23 et 24 mars 2000, Conclusions de la présidence, § 4.
  • [10]
    Conseil européen de Lisbonne, 23 et 24 mars 2000, Conclusions de la présidence, § 17.
  • [11]
    ESC, The European Shippers’ Council Response on the Communication from the Commission to the European Parliament and the Council, Bruxelles, 25 mai 2001 (notre traduction).
  • [12]
    ESC, Benefits of Membership, <http :// www. europeanshippers. com>,dernière consultation le 12 septembre 2007 (notre traduction).
  • [13]
    ECSA, Page d’accueil, <http :// www. ecsa. be>,dernière consultation le 12 septembre 2007 (notre traduction).
  • [14]
    ECSA et ESC, Regulatory Framework on Port Services. Principles to be used as a basis, Communiqué de presse, Bruxelles, décembre 1998 (répertorié sur le <site hhttp :// www. europeanshippers. com>,25 mai 2001).
  • [15]
    ECSA et ESC, op. cit. (notre traduction).
  • [16]
    Ibidem, 39 pp.
  • [17]
    Ibidem, p. 2.
  • [18]
    Ibidem, p. 3.
  • [19]
    Ibidem, p. 6.
  • [20]
    Directive 2000/52/CE de la Commission du 26 juillet 2000 modifiant la directive 80/723/CEE relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques.
  • [21]
    Article 12.
  • [22]
    Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires (présentée par la Commission), op. cit., p. 11.
  • [23]
    Ibidem, pp. 20-21.
  • [24]
    Ibidem, p. 21.
  • [25]
    Ibidem, p. 5.
  • [26]
    Ibidem, p. 21.
  • [27]
    Commission européenne, Livre vert sur les services d’intérêt général, 2003, COM (2003) 270 final, p. 15.
  • [28]
    Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires (présentée par la Commission), 13 février 2001, COM (2001), 35 final, p. 16.
  • [29]
    Idem, Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes, op. cit.
  • [30]
    Idem, Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires (présentée par la Commission), op. cit., p. 17.
  • [31]
    Ibidem, p. 4.
  • [32]
    Ibidem, p. 17.
  • [33]
    Ibidem, annexe 1,4.5.
  • [34]
    Ibidem, p. 23.
  • [35]
    H. MEERSMAN, E. VAN DE HOORDE, « La croissance des transports de marchandises est-elle évitable ? », in CEMT, Quels changements pour les transports au siècle prochain ? Rapports introductifs et synthèses des discussions. 14e symposium international sur la théorie et la pratique dans l’économie des transports. Innsbruck, 21-23 octobre 1997, Paris, CEMT, 1999, p. 32.
  • [36]
    Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires (présentée par la Commission), op. cit., p. 16.
  • [37]
    Ibidem, p. 5.
  • [38]
    Idem, La Commission européenne propose d’améliorer la qualité des services dans les ports, Communiqué de presse, Bruxelles, 14 février 2001, IP/01/203.
  • [39]
    Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe. Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires (présentée par la Commission), op. cit., p. 22.
  • [40]
    Ibidem, article 4, § 7, p. 31.
  • [41]
    Ibidem, p. 19.
  • [42]
    ESPO, Proposal for a Directive of the European Parliament and the Council on Market Access to Port Services : Impact Assessment, 1er novembre 2005, p. 7.
  • [43]
    Ces opérateurs sont aussi parfois désignés sous le vocable fournisseurs de services.
  • [44]
    P. TURNBULL, « The War on Europe’s Waterfront – Repertoires of Power in the Port Transport Industry », British Journal of Industrial Relations, vol. 44, n° 2, juin 2006, p. 24. En ligne
  • [45]
    ITF, Améliorer les réponses syndicales à la réforme portuaire, Londres, ITF Publications, 2004, p. 2. L’ITF est la Fédération internationale des ouvriers du transport. Cette organisation est présentée ci-dessous au point 2.1.
  • [46]
    ESPO, Initial statement on the forthcoming « port package » of the European Commission, 23 janvier 2001.
  • [47]
    Ibidem.
  • [48]
    ESPO, Position on the European Commission’s Communication, « Reinforcing Quality Service in Sea Ports : A Key for European Transport » : Position adopted by the General Assembly, Oslo, 8 juin 2001, p. 1.
  • [49]
    Idem, Position on the European Commission’s Communication, « Reinforcing Quality Service in Sea Ports : A Key for European Transport : Briefing for the European Parliament », 24 octobre 2001, p. 1.
  • [50]
    Idem, Position on the European Commission’s Communication, « Reinforcing Quality Service in Sea Ports : A Key for European Transport » : Position adopted by the General Assembly, op. cit., 8 juin 2001, p. 1.
  • [51]
    P. VALKENIERS (président de la FEPORT), « Is the cargo handling market in Europe competitive ? », intervention du 7 décembre 2000, in E. VAN HOOYDONCK (ed.), European Seaports Law : EU Law of Ports and Port Services and the Ports Package, Antwerp Maritime Law Seminars, Maklu, Anvers-Apeldoorn, 2003, pp. 312-313.
  • [52]
    « La FEPORT est d’avis que la proposition de directive accroît l’incertitude, ne dit pas clairement si les installations privées actuelles peuvent être expropriées, ignore le rôle régulateur du marché, décourage l’investissement dans les infrastructures et les superstructures en période de fin de bail (parce qu’il n’y a pas de certitude de prolongation) (…). En d’autres termes, la proposition de directive ne peut accroître l’efficacité des ports, ce qui est son principal objectif » (notre traduction). FEPORT, Feport position on proposed port services directive, 13 juin 2001, Bruxelles, p. 7.
  • [53]
    « Dans la plupart des ports maritimes européens, les restrictions ont graduellement été supprimées du marché des services de manutention, marché qui est devenu plus commercial avec une participation croissante du secteur privé » (notre traduction). FEPORT, Communiqué de presse, Bruxelles, 16 février 2001.
  • [54]
    FEPORT, Feport position on proposed port services directive, op. cit., p. 4.
  • [55]
    Ibidem, pp. 9-10.
  • [56]
    Ibidem, p. 5.
  • [57]
    Ibidem, p. 1.
  • [58]
    Ibidem.
  • [59]
    Ibidem, p. 10.
  • [60]
    Ibidem, p. 1.
  • [61]
    Ibidem, p. 10.
  • [62]
    ESC, Reinforcing Quality Service in Sea Ports : A key for European Transport. The European Shippers’ Council Response on the Communication from the Commission to the European Parliament and the Council, Bruxelles, 25 mai 2001. Les recommandations de 1998 sont exposées dans ECSA et ESC, Regulatory Framework on Port Services. Principles to be used as a basis, Communiqué de presse, Bruxelles, décembre 1998. Bien que daté de 1998, ce document est répertorié sur le site de l’ESC à la date du 25 mai 2001.
  • [63]
    ESC, EU Proposed Directive on Market Access to Port Services – Proposed Amendments to the Directive, Communiqué de presse, Bruxelles, 24 août 2001.
  • [64]
    D. van den Broek-Humphreij, président de l’ESC, cité par ESC, ESC Transport Memorandum, non daté, p. 2.
  • [65]
    ESC, Reinforcing Quality Service in Sea Ports : A key for European Transport. The European Shippers’ Council Response on the Communication from the Commission to the European Parliament and the Council, op. cit. (notre traduction).
  • [66]
    Devenue l’Union des industries de la Communauté européenne, cette organisation a changé de nom en 2007 pour devenir BusinessEurope. Elle représente 39 membres de 33 pays. La Fédération des entreprises de Belgique (FEB) en est par exemple membre.
  • [67]
    Association européenne des courtiers et des agents maritimes (notre traduction).
  • [68]
    Association européenne des services d’expédition, de transport, de logistique et de livraison. « Les enquêtes internes les plus récentes ont montré que la CLECAT représente environ 19 000 compagnies, qui emploient plus d’un million de personnes », cf. <http :// www. clecat. org/ >(notre traduction).
  • [69]
    ESC, ESC Welcomes Council Common Position On Port Service Directive, Communiqué de presse, Bruxelles, 20 juin 2002 (notre traduction).
  • [70]
    Idem, Reinforcing Quality Service in Sea Ports : A key for European Transport. The European Shippers’ Council Response on the Communication from the Commission to the European Parliament and the Council, op. cit. (notre traduction).
  • [71]
    ECSA, Rapport annuel 2001-2002, Bruxelles, 2002.
  • [72]
    Les informations utilisées dans cette partie sont majoritairement issues de la presse syndicale internationale et des entretiens avec des représentants syndicaux nationaux et internationaux. Ces informations ont pu être complétées par les recherches de Peter Turnbull, professeur de gestion des ressources humaines et de relations du travail à l’Université de Cardiff, également engagé comme expert indépendant auprès de la Fédération européenne des ouvriers du transport (ETF).
  • [73]
    H. BENDT, Worldwide Solidarity. The Activities of the Global Unions in the Era of Globalisation, Bonn, Friedrich Ebert Stiftung, 2005, p. 83.
  • [74]
    Interview de K. Marges, alors secrétaire de la section dockers de l’ITF, 11 mai 2007.
  • [75]
    P. TURNBULL, « Guerre dans les ports », Transport international, n° 17, octobre-décembre 2004, p. 14.
  • [76]
    « Europe faces Waterfront War », Lloyd’s List, 15 janvier 2001, p. 1 (notre traduction).
  • [77]
    Interview de K. Marges, alors secrétaire de la section dockers de l’ITF, 11 mai 2007.
  • [78]
    P. TURNBULL, « Guerre dans les ports », op. cit., p. 14.
  • [79]
    Ibidem.
  • [80]
    K. MARGES, Substandard ports ? No !, KM/al/28-8europarl, 28 août 2001, p. 1 (notre traduction).
  • [81]
    Ibidem, p. 2.
  • [82]
    Un navire sous-normes est un « navire qui, du fait de son état matériel, de son mode d’exploitation ou de la composition de son équipage, ne répond pas aux normes fondamentales de navigabilité et représente donc une menace pour la vie et/ou l’environnement ». Ministère français de l’équipement, Centre de documentation de l’aménagement et des transports (CDAT). Par extension, un port sous-normes est un port ne faisant pas respecter les normes internationales par les navires battant leur pavillon.
  • [83]
    K. MARGES, Substandard ports ? No !, loc. cit., p. 2.
  • [84]
    Alors qu’il y en a dans 26 secteurs au niveau européen, il est notable qu’il n’existe aucun comité de dialogue social sectoriel (CDSS) dans le secteur portuaire. Cela fait de ce secteur l’unique secteur lié au transport qui ne fasse pas l’objet d’un dialogue social. A. DUFRESNE, « La branche, niveau stratégique dans la coordination des négociations collectives ? », Chronique internationale de l’IRES, 2002, n° 74, p. 64.
  • [85]
    Les seuls autres exemples de mobilisation transnationale en Europe se retrouvent également dans le secteur du transport, chez les cheminots et les routiers. Cf. N. HILAL, L’eurosyndicalisme par l’action. Cheminots et routiers en Europe, Paris, L’Harmattan, 2007.
  • [86]
    Issu du syndicat allemand des employés, Ver.di.
  • [87]
    Interview de K. Marges, alors secrétaire de la section dockers de l’ITF, 11 mai 2007.
  • [88]
    P. TURNBULL, « Guerre dans les ports », op. cit., p. 14.
  • [89]
    Idem, « The War on Europe’s Waterfront… », op. cit., p. 313.
  • [90]
    Interview de K. Marges, alors secrétaire de la section dockers de l’ITF, 11 mai 2007.
  • [91]
    ITF, Letter to affiliates, 1er octobre 2001, KL/al/1-10eu-dofa, p. 3.
  • [92]
    ETF, Position de l’ETF sur la nouvelle proposition de directive relative à l’accès au marché des services portuaires, Bruxelles, 13 juin 2005.
  • [93]
    ITF Dockers’ Section Meeting, Resolution on the EC proposal for a directive on market access to port services, Londres, 16-17 juillet 2001 (notre traduction).
  • [94]
    Ibidem (notre traduction).
  • [95]
    Le Royaume-Uni est devenu, en 1989, lorsque le système des ouvriers enregistrés et des entreprises enregistrées a été aboli, le seul pays où la manutention portuaire fonctionne selon le régime de droit commun. En Allemagne et aux Pays-Bas, les relations entre les travailleurs portuaires et leurs employeurs sont négociées dans chaque port. En Espagne et en Italie, le secteur est régi par un texte à valeur législative (Sénat français, La manutention portuaire, Services des affaires européennes, janvier 1998).
  • [96]
    Interview de K. Marges, alors secrétaire de la section dockers de l’ITF, 11 mai 2007.
  • [97]
    Ibidem.
  • [98]
    Article 1er de la loi organisant le travail portuaire, 8 juin 1972, Moniteur belge, 10 août 1972.
  • [99]
    La convention 137 de l’OIT (1973) sur le travail dans les ports stipule notamment qu’« il incombe à la politique nationale d’encourager tous les milieux intéressés à assurer aux dockers, dans la mesure du possible, un emploi permanent ou régulier » (art. 2 § 1) et que « les dockers immatriculés auront priorité pour l’obtention d’un travail dans les ports » (art. 3 § 2).
  • [100]
    Interview de Bart Staes, député Groen ! au Parlement européen, 10 mai 2007.
  • [101]
    ESPO News Plus, volume 8.8,3 juin 2002.
  • [102]
    Interview de K. Marges, alors secrétaire de la section dockers de l’ITF, 11 mai 2007.
  • [103]
    Ce soutien est apparemment lié à la position adoptée au niveau national italien en commun avec les organisations patronales du secteur portuaire. Le consensus dégagé à ce niveau mettait les syndicats italiens en porte-à-faux avec l’attitude syndicale déterminée au sein de l’ITF et de l’ETF.
  • [104]
    Ibidem.
  • [105]
    ITF Dockers’ Section Meeting, Resolution on the EC proposal for a directive on market access to port services, op. cit., p. 1.
  • [106]
    K. MARGES, Substandard ports ? No !, Confidential, KM/al/16-8eu-action, 16 août 2001, p. 1 (notre traduction).
  • [107]
    Ibidem, p. 2 (notre traduction).
  • [108]
    P P. TURNBULL, « The War on Europe’s Waterfront – Repertoires of Power in the Port Transport Industry », op. cit., p. 315.
  • [109]
    Ibidem, p. 314.
  • [110]
    Ibidem.
  • [111]
    Interview de K. Marges, alors secrétaire de la section dockers de l’ITF, 11 mai 2007.
  • [112]
    ITF, European Ports Action Day, News Update, 27 septembre 2001 (notre traduction).
  • [113]
    ITF, Letter to affiliates, op. cit., p. 1.
  • [114]
    Ibidem, p. 2.
  • [115]
    Dès 1987, certains ports n’hésitent pas à mettre en avant les possibilités de conquête de nouveaux trafics pour obtenir l’adhésion des dockers à des révisions des pratiques de travail (L. HISLAIRE, Dockers, corporatisme et changement, Paris, Transports Actualités, 1993, p. 70).
  • [116]
    P. TURNBULL, « Guerre dans les ports », op. cit., pp. 14-15. Les dockers affiliés à l’ITF participent ponctuellement à des opérations de boycott vis-à-vis des navires battant pavillon de complaisance, refusant de décharger ceux-ci si l’armateur n’a pas signé de convention collective. Cette pratique est particulièrement répandue en Finlande (N. LILLIE, « Union Networks and Global Unionism in Maritime Shipping », Relations industrielles, vol. 60, n° 1, hiver 2005, p. 99). En ligne
  • [117]
    Pour une analyse plus poussée de la stratégie de l’ITF, cf. N. HILAL, op. cit., pp. 163-177 et 257-260.
  • [118]
    P. TURNBULL, « Guerre dans les ports », op. cit., p. 15.
  • [119]
    Ibidem, p. 16.
  • [120]
    K. Marges (notes d’entretien) cité par P. TURNBULL, « The War on Europe’s Waterfront – Repertoires of Power in the Port Transport Industry », British Journal of Industrial Relations, vol. 44, n° 2, juin 2006, p. 318 (note traduction). En ligne
  • [121]
    P. TURNBULL, « Guerre dans les ports », op. cit., p. 16. On notera que l’action s’étend donc à des États qui ne sont pas, ou pas encore membres de l’Union européenne (qui ne compte alors encore que 15 pays membres). Mais des syndicats chypriote et norvégiens sont membres de l’ETF et de l’ITF.
  • [122]
    ESPO News Plus, volume 9.02,17 janvier 2003.
  • [123]
    ESPO News Plus, volume 9.05,11 mars 2003, p. 2.
  • [124]
    P. TURNBULL, « Guerre dans les ports », op. cit., p. 14. Cf. quatrième partie pour le détail du parcours institutionnel de la proposition de directive.
  • [125]
    Le Conseil, la Commission, la Cour de justice et le Parlement.
  • [126]
    G. MARKS, D. MC ADAM, « On the relationship of political opportunities to the form of collective action : the case of the European Union », in D. DELLA PORTA, H. KRIESI (éd.), Social movements in a globalizing world, Houndmills, Macmillan, 1999, pp. 104-105.
  • [127]
    Afin de mieux visualiser le cheminement de la proposition de directive, on pourra se reporter au schéma présenté en annexe. Le texte de la première proposition de directive est passé par les étapes n° 1,1bis, 2,3,4,9,10,11,16,17,18,21,22,23,24,27 et 28 du diagramme.
  • [128]
    Parlement européen, Commission de la politique régionale, des transports et du tourisme, « Projet de rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché de services portuaires », 6 juin 2001, PR434125FR, Doc. 301.807, p. 25.
  • [129]
    Ibidem.
  • [130]
    Ibidem, p. 26.
  • [131]
    Parlement européen, Commission de la politique régionale, des transports et du tourisme, Rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, 17 octobre 2001, RR452002FR, Doc. 301.807, p. 30.
  • [132]
    Ibidem, amendement 15, pp. 14-15.
  • [133]
    Services marchands et non marchands que les autorités publiques considèrent comme étant d’intérêt général et soumettent à des obligations spécifiques de service public.
  • [134]
    Ibidem, amendement 5, p. 8.
  • [135]
    Ibidem, amendement 2, p. 6.
  • [136]
    Ibidem, amendement 3, p. 7.
  • [137]
    Dans le secteur des transports, les États membres ont la possibilité d’instaurer des obligations de service public aux entreprises fournissant certains services. Ce sont des obligations que l’entreprise « n’assumerait pas, ou pas dans la même mesure ni dans les mêmes conditions », si elle considérait son propre intérêt commercial. En retour, les États octroient des compensations aux entreprises concernées.
  • [138]
    Ibidem, amendement 14, p. 14.
  • [139]
    Ibidem, amendement 19, p. 17.
  • [140]
    G. JARZEMBOWSKI, Séance plénière du Parlement européen du 13 novembre 2001.
  • [141]
    Parlement européen, Commission de la politique régionale, des transports et du tourisme, Rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, op. cit., amendement 37, p. 26.
  • [142]
    Ibidem, p. 29.
  • [143]
    Commission européenne, Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, JO 2001/C 154 E/ 293, art. 7 § 1b, 13 février 2001.
  • [144]
    Ibidem, considérant 13.
  • [145]
    Deux conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT) encadrent le travail dans les ports (conventions 137 et 152). La convention 137 a déjà été évoquée ci-dessus dans la troisième partie. En 2001, cette convention était ratifiée par sept États membres (Espagne, Finlande, France, Italie, Pays-Bas, Portugal et Suède). Les Pays-Bas ont dénoncé cette convention le 17 février 2006. La convention 152 de l’OIT (1979) sur la sécurité et l’hygiène dans les manutentions portuaires a été ratifiée par neuf États membres (Allemagne, Danemark, Espagne, Finlande, France, Italie, Pays-Bas, Portugal et Suède).
  • [146]
    Parlement européen, Commission de la politique régionale, des transports et du tourisme, Rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, op. cit., amendement 8, p. 10.
  • [147]
    Ibidem, amendement 21, p. 18.
  • [148]
    Ibidem, amendement 36, pp. 25-26.
  • [149]
    Ibidem, amendement 13, p. 13.
  • [150]
    La définition complète de l’auto-assistance devient (les ajouts sont ici soulignés en gras) : « Situation où un utilisateur d’un port se fournit à lui-même, à l’aide de son propre personnel et de ses propres appareils, une ou plusieurs catégories de services portuaires conformément aux critères établis dans la présente directive, et dans laquelle, normalement, aucun contrat ayant pour objet la prestation de tels services n’est passé avec un tiers, sous quelque dénomination que ce soit. » Ibidem, amendement 20, p. 17.
  • [151]
    Ibidem, amendement 33, p. 24.
  • [152]
    Ibidem, amendement 6, p. 9.
  • [153]
    Ibidem, amendement 26, p. 20.
  • [154]
    Ibidem, amendement 30, pp. 22-23.
  • [155]
    Ibidem, amendement 31, pp. 23-24.
  • [156]
    C. RIPOLL Y MARTINEZ DE BEDOYA (Espagne), Débat en séance plénière du Parlement européen, 13 novembre 2001, Strasbourg.
  • [157]
    W. E. PIECYK (Allemagne), ibidem.
  • [158]
    D. STERCKX (Belgique), ibidem.
  • [159]
    Les lamaneurs sont chargés de piloter les navires à l’entrée et à la sortie des ports, dans les passes et dans les chenaux.
  • [160]
    T. J. J. BOUWMAN (Pays-Bas), Débat en séance plénière du Parlement européen, 13 novembre 2001, Strasbourg.
  • [161]
    H. MARKOV (Allemagne), ibidem.
  • [162]
    R. VAN DAM (Pays-Bas), ibidem.
  • [163]
    Amendement 78 déposé le 8 novembre 2001 par Theodorus Bouwman au nom du groupe Verts/ALE.
  • [164]
    Sous la quatrième législature du Parlement européen, le PPE-DE disposait de 224 sièges (35,8 %), le PSE de 180 (28,7 %), l’ADLE de 43 (6,9 %), les Verts/ALE de 38 (6 %), la GUE/NGL de 35 (5,6 %) et l’EDD en avait 18 (2,9 %). Outre ces députés, le Parlement européen compte 88 autres membres.
  • [165]
    B. STAES (député Groen ! (Agalev à cette époque) au Parlement européen), Het verhaal van de Havenrichtlijn, <http :// www. bartstaes. be>.
  • [166]
    ECSA, Rapport annuel 2002-2003, Bruxelles, 2003 (notre traduction).
  • [167]
    Comité des régions, Avis du Comité des régions sur la Communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil, Améliorer la qualité des services dans les ports maritimes : un élément déterminant du système de transport en Europe et Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, 20 septembre 2001, CDR/2001/161.
  • [168]
    Comité économique et social européen, Avis du Comité économique et social sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, 29 novembre 2001, CES/2001/1495/, p. 11.
  • [169]
    Ibidem, § 3.14, p. 8.
  • [170]
    Ibidem, § 3.14, p. 6.
  • [171]
    Comité économique et social européen, « Avis d’initiative du Comité économique et social sur le Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes », 9 septembre 1998, CES/1998/1132.
  • [172]
    Idem, Avis du Comité économique et social sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, op. cit., § 3.14, p. 7.
  • [173]
    Ibidem, § 3.14, p. 7.
  • [174]
    Ibidem, § 3.12, p. 8.
  • [175]
    Ibidem.
  • [176]
    Ibidem, § 3.17, p. 8.
  • [177]
    Ibidem, p. 13.
  • [178]
    Ibidem, § 4.4.1, p. 10. Cette phrase a fait l’objet d’un vote au sein du CESE car elle a été jugée trop négative et contraire à l’avis du CESE sur le Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes. De plus, elle ne prenait pas en compte l’avis des représentants des armateurs et des acheteurs de services de transport, qui ont insisté, lors d’une audition le 18 juillet 2002, sur le fait de pouvoir mettre en place l’automanutention. Le résultat du vote visant à supprimer cette phrase a été de 34 pour, 43 contre et 5 abstentions. La phrase a donc été conservée. Ibidem, p. 13.
  • [179]
    Ibidem, § 4.4.1, p. 10.
  • [180]
    Commission européenne, Proposition modifiée de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, Bruxelles, 19 février 2002, COM (2002) 101 final, p. 2.
  • [181]
    Idem, Avis de la Commission sur les amendements du Parlement européen à la position commune du Conseil concernant la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires portant modification à la proposition de la Commission, Bruxelles, 15 avril 2003, COM (2003) 208 final, p. 2.
  • [182]
    Idem, Avis du Comité économique et social sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, op. cit., p. 2.
  • [183]
    Ibidem, p. 2.
  • [184]
    Ibidem, considérant 13, p. 7.
  • [185]
    Ibidem, considérant 27, p. 9.
  • [186]
    Ibidem, art. 15, p. 16.
  • [187]
    Ibidem, p. 3.
  • [188]
    Parlement européen, Commission de la politique régionale, des transports et du tourisme, Rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires,op. cit., amendement 21, pp. 17-18.
  • [189]
    Commission européenne, Avis du Comité économique et social sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, op. cit., art. 6, § 2, pp. 11-12.
  • [190]
    Ibidem, p. 4.
  • [191]
    Ibidem.
  • [192]
    Ibidem, p. 3.
  • [193]
    Ibidem.
  • [194]
    Ibidem, p. 4.
  • [195]
    Ibidem, p. 3. La Commission fait notamment référence à la directive sur la transparence : directive 80/723/CEE de la Commission du 25 juin 1980, relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques, JO L 195,29 juillet 1980, p. 35, modifiée en dernier lieu par la directive 2000/52/CE, JO L 193,24 juillet 2000, p. 75.
  • [196]
    Conseil européen, Groupe de travail Transports et Télécommunications, Services portuaires, 2 438e session du Conseil, Luxembourg, 17-18 juin 2002.
  • [197]
    Conseil européen, Position commune en vue de l’adoption de la directive concernant l’accès au marché des services portuaires, 5 novembre 2002, C5-0533/2002, p. 38.
  • [198]
    Des références à ces aspects ont été intégrées et soulignées dans les articles premier (objectif de la directive), 6 (autorisations), 8 (limitations), 13 (auto-assistance), 14 (pilotage) et 19 (protection sociale). Ibidem, p. 42.
  • [199]
    « L’obligation qui incombe à l’autorité compétente d’autoriser le nombre de fournisseurs de service le plus élevé possible, adapté aux circonstances, devrait suffire à cet égard (article 8). » Ibidem.
  • [200]
    Ibidem, p. 43.
  • [201]
    Ibidem.
  • [202]
    Ibidem, p. 40.
  • [203]
    Ibidem, p. 19.
  • [204]
    Ibidem, p. 44.
  • [205]
    Ibidem, p. 50.
  • [206]
    Ibidem, p. 39.
  • [207]
    Ibidem.
  • [208]
    Ibidem, p. 13.
  • [209]
    Ibidem, p. 15.
  • [210]
    Ibidem, p. 25.
  • [211]
    Ibidem, p. 41.
  • [212]
    ESPO, « Briefing for the second reading procedure in the European Parliament », 5 novembre 2002, in E. VAN HOOYDONK (ed.), European Seaports Law : EU Law of Ports and Port Services and the Ports Package, Antwerp Maritime Law Seminars, Maklu, Anvers-Apeldoorn, 2003, p. 478.
  • [213]
    Ibidem.
  • [214]
    Commission européenne, Communication de la Commission au Parlement européen conformément à l’article 251, paragraphe 2, deuxième alinéa, du traité CE concernant la position commune arrêtée par le Conseil en vue de l’adoption d’une directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, 14 novembre 2002 SEC/2002/1225 final, p. 6.
  • [215]
    Ibidem, p. 2.
  • [216]
    Ibidem.
  • [217]
    Ibidem, p. 6.
  • [218]
    Ibidem.
  • [219]
    Ibidem, p. 3.
  • [220]
    Ibidem.
  • [221]
    De la proposition initiale qui était de 5,10 et 25 ans selon le type d’investissement, le Parlement avait fait passer la première catégorie à 8 ans. Le Conseil modifie les trois, en proposant 10,15 et 36 ans.
  • [222]
    Ibidem, p. 4.
  • [223]
    Ibidem, p. 5. L’article 8 de la position commune fait mention, comme critères permettant de limiter l’auto-assistance, des contraintes liées à l’espace, à des considérations de sécurité et à des exigences découlant de réglementations en matière d’environnement.
  • [224]
    Amendement 26 déposé par un groupe de cinq parlementaires de la GUE/NGL composé de Sylviane H. Ainardi (France), Helmuth Markov (Allemagne), Erik Meijer (Pays-Bas), Joaquim Miranda (Portugal) et Roseline Vachetta (France). Amendement 27 déposé par un groupe plus mélangé, composé de membres des Verts/ALE (Theodorus J.J. Bouwman, Pays-Bas, et Bart Staes, Belgique), du PSE (Jan Dhaene, Belgique, et Stephen Hughes, Grande-Bretagne) et de l’ADLE (Josu Ortuondo Larrea, Espagne).
  • [225]
    Parlement européen, Commission de la politique régionale, des transports et du tourisme, Projet de recommandation pour la deuxième lecture relative à la position commune du Conseil en vue de l’adoption de la directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, 20 février 2003, RR490571FR., Doc. 314.744, p. 26.
  • [226]
    Ibidem.
  • [227]
    Ibidem, p. 29.
  • [228]
    Ibidem.
  • [229]
    Ibidem, amendement 30, p. 22.
  • [230]
    ESPO, « Briefing for the second reading procedure in the European Parliament », op. cit., p. 484.
  • [231]
    Ibidem, p. 29.
  • [232]
    Ibidem.
  • [233]
    Ibidem.
  • [234]
    Ibidem, amendements 2,10,14,15 et 16.
  • [235]
    Parlement européen, Commission de la Politique régionale, des Transports et du Tourisme, Projet de recommandation pour la deuxième lecture relative à la position commune du Conseil en vue de l’adoption de la directive, 8 janvier 2003, PR478623FR., Doc. 314.744,29 p.
  • [236]
    Ibidem, p. 30.
  • [237]
    Ibidem, amendement 13, p. 12.
  • [238]
    Ibidem, amendement 29, p. 21.
  • [239]
    Ibidem, amendements 31,32 et 33, pp. 23-24.
  • [240]
    Ibidem, p. 30.
  • [241]
    Ibidem, amendements 1,7,9,19,20,21,22 et 28.
  • [242]
    Ibidem, amendement 19, p. 15.
  • [243]
    Ibidem, amendement 21, p. 16.
  • [244]
    Ibidem, amendement 22, pp. 16-17.
  • [245]
    Ibidem, amendement 28, p. 21.
  • [246]
    K. HATZIDAKIS (Grèce), Débat en séance plénière du Parlement européen, 10 mars 2003, Strasbourg.
  • [247]
    W. E. PIECYK (Allemagne), ibidem.
  • [248]
    D. STERCKX (Belgique), ibidem.
  • [249]
    S. H. AINARDI (France), ibidem.
  • [250]
    T. J. J. BOUWMAN (Pays-Bas), ibidem.
  • [251]
    A. ESCLOPÉ (France), ibidem.
  • [252]
    F. VANHECKE (Belgique), ibidem.
  • [253]
    Sur 34 amendements contenus dans le rapport, 32 amendements ont été acceptés en tout et 1 en partie.
  • [254]
    Amendement 51 déposé par Dirk Sterckx, au nom du groupe ADLE.
  • [255]
    ESPO News Plus, volume 9.04,18 février 2003 (notre traduction).
  • [256]
    Amendement 42 déposé par Theodorus J. J. Bouwman, Jan Dhaerne, Nelly Maes, Josu Ortuondo Larrea et Bart Staes au nom du groupe Verts/ALE.
  • [257]
    Amendements 64 et 69 (modification en italique), déposés respectivement par Wilhelm Ernst Piecyk, Jean-Maurice Dehousse et Brian Simpson au nom du groupe du PSE, et par Erik Meijer au nom du groupe GUE/NGL.
  • [258]
    ESPO News Plus, volume 9.04,18 février 2003 (notre traduction).
  • [259]
    Commission européenne, Avis de la Commission sur les amendements du Parlement européen à la position commune du Conseil concernant la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires portant modification à la proposition de la Commission, op. cit., p. 3.
  • [260]
    Principalement les amendements 11,12,17 et 27.
  • [261]
    Les garanties acceptées sont celles des amendements 1,7,9 et 28 (pour moitié). Les garanties refusées sont celles des amendements 19,20,21,22 et 28 (pour moitié).
  • [262]
    Ibidem, p. 5.
  • [263]
    Ibidem.
  • [264]
    Ibidem.
  • [265]
    Ibidem, p. 6.
  • [266]
    La Commission cite les amendements 19,20,22 et 28 (2e partie) émis par le Parlement européen en deuxième lecture, concernant les articles 6 (relatif aux autorisations) et 13 (relatif à l’auto-assistance) de la position commune. Ibidem.
  • [267]
    Ibidem.
  • [268]
    Ibidem, p. 5.
  • [269]
    Ibidem, p. 6.
  • [270]
    Ibidem.
  • [271]
    Ibidem, p. 7.
  • [272]
    Cf. le schéma en annexe, étapes 21 et 22.
  • [273]
    Dans ce cas-ci, la répartition entre les groupes politiques était la suivante : six pour le PPE-DE et cinq pour le PSE. Les autres groupes (ADLE, Verts/ALE, GUE/NGL, EDD) ont eu droit à un représentant chacun.
  • [274]
    ECSA, Rapport annuel 2002-2003, Bruxelles, 2003 (notre traduction).
  • [275]
    Interview de Nicolette Van der Jagt, secrétaire générale de l’ESC, 9 mai 2007. À la question « Avez-vous publié des communiqués de presse entre 2002 et 2003 ? », N. Van der Jagt a répondu négativement, estimant qu’il ne sert à rien de toujours répéter la même chose. Il n’a pas été possible d’avoir accès à des informations plus précises sur le travail de lobbying effectué par l’ESC dans le cadre du paquet portuaire.
  • [276]
    Parlement européen, Délégation du Parlement européen au comité de conciliation, Rapport sur le projet commun, approuvé par le comité de conciliation, de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, 4 novembre 2003, RR512126FR, Doc. 287.630, p. 8.
  • [277]
    Ibidem, p. 6.
  • [278]
    DG III, Direction de l’Information, Service de presse.
  • [279]
    Parlement européen, Délégation du Parlement européen au comité de conciliation, Rapport sur le projet commun, approuvé par le comité de conciliation, op. cit., p. 7.
  • [280]
    Ibidem.
  • [281]
    Ibidem.
  • [282]
    Ibidem.
  • [283]
    L. DE PALACIO (vice-présidente de la Commission européenne et commissaire des Transports et de l’Énergie de 1999 à 2004), Débat en plénière du Parlement européen, 18 novembre 2003, Strasbourg.
  • [284]
    K. HATZIDAKIS (Grèce), ibidem.
  • [285]
    W. E. PIECYK (Allemagne), ibidem.
  • [286]
    H. VERMEER (Pays-Bas), ibidem.
  • [287]
    E. MEIJER (Pays-Bas), ibidem.
  • [288]
    T. J. J. BOUWMAN (Pays-Bas), ibidem.
  • [289]
    A. ESCLOPÉ (France), ibidem.
  • [290]
    K. DILLEN (Belgique), ibidem.
  • [291]
    B. STAES, op. cit. Des quatre députés libéraux flamands, deux ont soutenu la proposition de directive, un a voté contre et le quatrième était absent.
  • [292]
    ESPO News Plus, volume 9.25,19 novembre 2003.
  • [293]
    D. WHITEHEAD (président de l’ESPO), ESPO News Plus, volume 9.26,20 novembre 2003.
  • [294]
    G. DUNLOP (président de l’ECSA), « The President’s Statement », Rapport annuel 2002-2003, Bruxelles, 2003, p. 6.
  • [295]
    Commission européenne, Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires (présentée par la Commission), Bruxelles, 13 octobre 2004, COM (2004) 654 final, 31 p. Procédure de codécision 2004/0240/COD.
  • [296]
    Les parlementaires du Parti européen des libéraux, démocrates et réformateurs (ELDR) font partie du groupe politique Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE), qui regroupe également les députés centristes du Parti démocrate européen ainsi que des députés indépendants qui adhèrent aux valeurs libérales, démocratiques et réformatrices.
  • [297]
    Ibidem, p. 4.
  • [298]
    Souligné dans le texte.
  • [299]
    Ibidem, p. 4.
  • [300]
    Ibidem, p. 5.
  • [301]
    Ibidem, p. 6.
  • [302]
    Ibidem, p. 7.
  • [303]
    Cf. l’avis du Parlement européen en deuxième lecture.
  • [304]
    Ibidem, p. 8.
  • [305]
    Commission européenne, Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires (présentée par la Commission), op. cit., article 13, p. 27.
  • [306]
    ETF, Position de l’ETF sur la nouvelle Proposition de Directive relative à l’accès au marché des services portuaires, Bruxelles, 13 juin 2005, p. 1.
  • [307]
    Ibidem, p. 2.
  • [308]
    ETF, Position de l’ETF sur la nouvelle Proposition de Directive relative à l’accès au marché des services portuaires, op. cit., p. 3.
  • [309]
    Ibidem.
  • [310]
    Ibidem, p. 3.
  • [311]
    Ibidem, p. 4.
  • [312]
    ESPO News Plus, vol. 10.26,7 octobre 2004 (notre traduction).
  • [313]
    ESPO, Accès au marché des services portuaires, Document approuvé par l’assemblée générale de l’ESPO, La Valette (Malte), 28 avril 2005.
  • [314]
    ESPO, Amendment proposals of ESPO for the first reading in the European Parliament, 1er septembre 2005, p. 37.
  • [315]
    FEPORT, Initial position on the proposal for a directive on market access to port services : Detrimental to an efficient and liberal working of the European ports, janvier 2005.
  • [316]
    FEPORT, New Port Services Proposal Threatens Europe’s Port Performance : 7 good reasons to draw 1 conclusion, 30 mai 2005, p. 9 (notre traduction).
  • [317]
    ECSA, Rapport annuel 2004-2005, p. 12.
  • [318]
    Ibidem.
  • [319]
    ECSA, « Proposed Directive II on Market Access to Port Services », Newsletter, Bruxelles, n° 4,2005.
  • [320]
    Il n’est pas exclu que l’ESC ait diffusé sa position au moyen de canaux informels, mais l’accès à cette information nous a été refusé.
  • [321]
    ESC, ESC welcomes new chance for port service liberalisation, 15 octobre 2004.
  • [322]
    Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs, Avis de la Commission du marché intérieur et de la protection des consommateurs, in Parlement européen, Commission des Transports et du Tourisme, Rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, Procédure de codécision (première lecture), Bruxelles, 15 décembre 2005, A6-0410/2005, p. 21.
  • [323]
    Comité des régions, Avis du Comité des régions sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaire, Bruxelles, 27 avril 2005, CDR (2004) 485.
  • [324]
    Ibidem.
  • [325]
    Comité économique et social européen, Avis du Comité économique et social européen sur la Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, Bruxelles, 13 juillet 2005, CESE (2005) 848, p. 4.
  • [326]
    Ibidem, p. 8.
  • [327]
    Ibidem, p. 5.
  • [328]
    Ibidem.
  • [329]
    Ibidem.
  • [330]
    Parlement européen, commission des Transports et du Tourisme, Rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant l’accès au marché des services portuaires, Procédure de codécision (première lecture), Bruxelles, 15 décembre 2005, A6-0410/2005, p. 7.
  • [331]
    Ibidem, p. 9.
  • [332]
    Ibidem, p. 10.
  • [333]
    ECSA, « Proposed Directive II on Market Access to Port Services », op. cit.
  • [334]
    E. TERRAY, « Le travail des étrangers en situation irrégulière ou la délocalisation sur place », in É. BALIBAR, M. CHEMILLIER-GENDREAU, J. COSTA-LASCOUX, E. TERRAY, Sans-papiers : l’archaïsme fatal, Paris, La Découverte, 1999, pp. 9-34.
Français

La libéralisation des services portuaires fait partie du programme de la Stratégie de Lisbonne qui vise à éliminer les entraves aux marchés des services. La proposition de directive Bolkestein avait suscité un large débat de société et une opposition massive, tant dans le monde syndical qu’au sein de la société civile. La proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires a suscité un conflit plus sectoriel. Elle a par deux fois été rejetée par le Parlement européen, ce qui constitue en tant que tel une première dans l’histoire de la construction européenne. Elle a suscité, en outre, une mobilisation des travailleurs portuaires à l’échelle européenne, principalement des dockers, qui par son ampleur peut être qualifiée de première du genre.
Le parcours institutionnel de la première tentative de la Commission a duré près de trois ans, suivant toutes les étapes de la procédure de co-décision, avant d’être finalement rejetée par le Parlement européen. Pendant ces trois années, les oppositions entre acteurs institutionnels, patronaux et syndicaux se sont dessinées, creusées, puis cristallisées. Les travailleurs portuaires et leurs organisations syndicales ont développé une mobilisation européenne jusqu’alors inédite. Adopté très rapidement après le rejet de la première proposition de directive, la seconde proposition de directive a été rejetée dès la première lecture du Parlement européen. S’il a également suscité de larges mobilisations, celles-ci ont été le fruit de la réactivation de méthodes et de réseaux élaborés lors du premier conflit.
Aurélie Decoene expose les origines et le contenu de la première proposition de directive et les premières réactions des principaux acteurs patronaux et syndicaux. Elle poursuit avec une explication des différents aspects de la mobilisation syndicale. La partie la plus conséquente de son étude s’attache à décortiquer les multiples étapes parcourues par la proposition lors de la procédure de co-décision. Enfin, dans la dernière partie, elle se concentre sur le rejet de la seconde proposition de directive.

  1. INTRODUCTION
  2. 1. LA PROPOSITION DE DIRECTIVE CONCERNANT L’ACCÈS AU MARCHÉ DES SERVICES PORTUAIRES
    1. 1.1. ORIGINES DU PROJET
      1. 1.1.1. Le Livre vert relatif aux ports et aux infrastructures maritimes
      2. 1.1.2. Les conclusions de Lisbonne
      3. 1.1.3. Les demandes des utilisateurs des ports
    2. 1.2. PRÉSENTATION PAR LA COMMISSION EUROPÉENNE
      1. 1.2.1. La Communication sur la qualité des services dans les ports maritimes
      2. 1.2.2. Le contenu de la proposition de directive
      3. 1.2.3. Les objectifs
      4. 1.2.4. Le champ d’application
      5. 1.2.5. Les mesures
  3. 2. LES POSITIONS DES INTERLOCUTEURS SOCIAUX
    1. 2.1. LES ORGANISATIONS PATRONALES
      1. 2.1.1. Présentation des acteurs
      2. 2.1.2. Réactions face à la proposition de directive
        1. L’ESPO
        2. La FEPORT
          1. Les conditions actuelles de concurrence
          2. La question du minimum de deux fournisseurs
          3. L’auto-assistance
          4. La durée des autorisations
        3. L’ESC
        4. L’ECSA
    2. 2.2. LES ORGANISATIONS SYNDICALES
      1. 2.2.1. Présentation des acteurs
      2. 2.2.2. Prise de connaissance du projet de la Commission et premières réactions
  4. 3. LE MOUVEMENT TRANSNATIONAL DE GRÈVE
    1. 3.1. DÉFINITION D’UNE STRATÉGIE COMMUNE
      1. 3.1.1. Le désaccord entre l’ETF et l’ITF
      2. 3.1.2. La résolution de Londres
      3. 3.1.3. Quelques spécificités nationales
        1. L’Allemagne
        2. La Belgique
        3. L’Italie
    2. 3.2. LE DÉVELOPPEMENT DE LA MOBILISATION
      1. 3.2.1. Septembre 2001 : première journée d’action concertée
      2. 3.2.2. La solidarité entre marins et dockers
      3. 3.2.3. Multiplication des actions
    3. 3.3. ATTITUDE PATRONALE FACE AU MOUVEMENT
  5. 4. LE CHEMINEMENT INSTITUTIONNEL DE LA PROPOSITION DE DIRECTIVE
    1. 4.1. AVIS DU PARLEMENT EUROPÉEN EN PREMIÈRE LECTURE
      1. 4.1.1. Examen préliminaire par le rapporteur
      2. 4.1.2. Examen en commission parlementaire
        1. Le champ d’application
        2. Les dispositions prévues
        3. Le travail portuaire
        4. L’organisation de la concurrence
      3. 4.1.3. Les séances plénières du Parlement
        1. Interventions des rapporteurs fictifs
          1. Groupe du Parti populaire européen et des démocrates européens
          2. Groupe du Parti socialiste européen
          3. Groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe
          4. Groupe des Verts/Alliance libre européenne
          5. Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique
          6. Groupe pour l’Europe des démocraties et des différences
        2. Résultante des forces au sein du Parlement
          1. Votes sur les amendements
    2. 4.2. LES AVIS DES COMITÉS CONSULTATIFS
      1. 4.2.1. Avis du Comité des régions
      2. 4.2.2. Avis du Comité économique et social européen
        1. Le rôle des ports
        2. La question de la manutention
        3. La question de l’auto-assistance
    3. 4.3. PROPOSITION MODIFIÉE DE LA COMMISSION EUROPÉENNE
      1. 4.3.1. Amendements acceptés par la Commission
      2. 4.3.2. Amendements refusés par la Commission
    4. 4.4. POSITION DU CONSEIL
      1. 4.4.1. Processus interne de prise de décision
      2. 4.4.2. Modifications apportées à la proposition
        1. Points où le Conseil rejoint le Parlement
        2. Points où le Conseil s’oppose au Parlement
        3. Nouvelles dispositions élaborées par le Conseil
          1. Au niveau du champ d’application
          2. Au niveau de l’organisation de la concurrence
    5. 4.5. DÉCLARATION DE LA COMMISSION SUR LA POSITION COMMUNE
      1. 4.5.1. Position adoptée vis-à-vis des amendements du Parlement européen
        1. Amendements acceptés par la Commission dans la proposition modifiée
        2. Amendements refusés par la Commission dans la proposition modifiée
      2. 4.5.2. Nouveaux apports du Conseil
    6. 4.6. AVIS DU PARLEMENT EUROPÉEN EN DEUXIÈME LECTURE : LES CLIVAGES SE CREUSENT
      1. 4.6.1. Examen en commission parlementaire
        1. Remarques générales
        2. Les services de pilotage
        3. Créer des conditions de concurrence équitable
        4. L’auto-assistance
        5. La durée de validité des autorisations
        6. Des garanties supplémentaires
      2. 4.6.2. Les séances plénières du Parlement
        1. Interventions des rapporteurs fictifs
          1. Groupe du Parti populaire européen et des démocrates européens
          2. Parti socialiste européen
          3. Groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe
          4. Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche verte nordique
          5. Groupe des Verts/Alliance libre européenne
          6. Groupe pour l’Europe des démocraties et des différences
          7. Groupe Identité, Tradition, Souveraineté
        2. Vote des amendements
    7. 4.7. POSITION DE LA COMMISSION SUR L’AVIS EN DEUXIÈME LECTURE DU PARLEMENT EUROPÉEN
      1. 4.7.1. L’auto-assistance
      2. 4.7.2. Le pilotage
      3. 4.7.3. Les garanties
      4. 4.7.4. Une concurrence équitable et transparente
    8. 4.8. CONVOCATION D’UN COMITÉ DE CONCILIATION
    9. 4.9. DÉCISION DU PARLEMENT EUROPÉEN EN TROISIÈME LECTURE
      1. 4.9.1. Dernières interventions des rapporteurs fictifs
        1. Groupe du Parti populaire européen et des démocrates européens
        2. Groupe du Parti socialiste européen
        3. Groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe
        4. Groupe confédéral de la Gauche unitaire européenne/ Gauche verte nordique
        5. Groupe des Verts/Alliance libre européenne
        6. Groupe pour l’Europe des démocraties et des différences
        7. Groupe Identité, Tradition, Souveraineté
      2. 4.9.2. Résultat du vote
  6. 5. LE SECOND PAQUET PORTUAIRE
    1. 5.1. PRÉSENTATION DE LA SECONDE PROPOSITION DE DIRECTIVE
    2. 5.2. RÉACTIONS DES INTERLOCUTEURS SOCIAUX
      1. 5.2.1. Les organisations syndicales
      2. 5.2.2. Les organisations patronales
        1. L’ESPO
        2. La FEPORT
        3. L’ECSA
        4. L’ESC
        5. Conclusion
    3. 5.3. AVIS CONSULTATIFS
      1. 5.3.1. Le Comité des régions
      2. 5.3.2. Le Conseil économique et social européen
    4. 5.4. REJET DE LA PROPOSITION PAR LE PARLEMENT
  7. CONCLUSION
Aurélie Decoene
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La libéralisation des services portuaires fait partie du programme de la Stratégie de Lisbonne qui vise à éliminer les entraves aux marchés des services. La proposition de directive Bolkestein avait suscité un large débat de société et une opposition massive, tant dans le monde syndical qu’au sein de la société civile. La proposition de directive concernant l’accès au marché des services portuaires a suscité un conflit plus sectoriel. Elle a par deux fois été rejetée par le Parlement européen, ce qui constitue en tant que tel une première dans l’histoire de la construction européenne. Elle a suscité, en outre, une mobilisation des travailleurs portuaires à l’échelle européenne, principalement des dockers, qui par son ampleur peut être qualifiée de première du genre. Le parcours institutionnel de la première tentative de la Commission a duré près de trois ans, suivant toutes les étapes de la procédure de co-décision, avant d’être finalement rejetée par le Parlement européen. Pendant ces trois années, les oppositions entre acteurs institutionnels, patronaux et syndicaux se sont dessinées, creusées, puis cristallisées. Les travailleurs portuaires et leurs organisations syndicales ont développé une mobilisation européenne jusqu’alors inédite. Adopté très rapidement après le rejet de la première proposition de directive, la seconde proposition de directive a été rejetée dès la première lecture du Parlement européen. S’il a également suscité de larges mobilisations, celles-ci ont été le fruit de la réactivation de méthodes et de réseaux élaborés lors du premier conflit. Aurélie Decoene expose les origines et le contenu de la première proposition de directive et les premières réactions des principaux acteurs patronaux et syndicaux. Elle poursuit avec une explication des différents aspects de la mobilisation syndicale. La partie la plus conséquente de son étude s’attache à décortiquer les multiples étapes parcourues par la proposition lors de la procédure de co-décision. Enfin, dans la dernière partie, elle se concentre sur le rejet de la seconde proposition de directive.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/11/2007
https://doi.org/10.3917/cris.1966.0005
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