CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1Le financement et l’organisation de l’enseignement supérieur et plus particulièrement universitaire font actuellement l’objet de réflexions, de débats et de décisions dans de nombreux pays occidentaux. Ces pays poursuivent, depuis plusieurs années, une politique de réduction des dépenses publiques. Sabrer dans les dépenses allouées à l’enseignement universitaire peut, dans le court terme, contribuer à soulager les problèmes budgétaires, mais hypothèque avec certitude notre avenir technologique et l’avenir des générations futures. La logique budgétaire s’oppose à la logique sociale et économique.

2Les universités de la Communauté française de Belgique se trouvent aujourd’hui dans une situation de blocage financier structurel qui compromet tant leur compétitivité que leur intégration internationales et les empêche de répondre pleinement aux besoins de développements régionaux. Des facteurs externes et les héritages du passé ont compliqué sensiblement leur tâche. Depuis la crise économique des années 1970, les pouvoirs publics s’inquiètent du coût croissant des dépenses d’enseignement et ont mis en place une contrainte budgétaire sévère.

3Le graphique 1 présente l’évolution en indice des moyens accordés aux universités francophones et du nombre d’étudiants qu’elles accueillent (inscriptions principales). L’évolution du montant total des allocations de fonctionnement à charge du Ministère de l’Enseignement accordé aux universités est donnée en francs courants et en francs constants de 1972. Les données en francs constants permettent d’éliminer l’impact de l’inflation dans l’évolution des moyens accordés aux universités. L’évolution en indice montre clairement la décroissance des moyens accordés aux universités alors que la population universitaire augmentait.

Graphique 1

Évolution du nombre d’étudiants et des moyens accordés aux universités francophones en francs courants et constants de 1972 à 1996

Graphique 1

Évolution du nombre d’étudiants et des moyens accordés aux universités francophones en francs courants et constants de 1972 à 1996

Sources : Fondation universitaire, CREF et calculs personnels.

4Dans le tableau 1, est présentée l’évolution du montant de l’allocation totale à prix courants et à prix constants par étudiant et par étudiant subsidiable. Le nombre d’étudiants repris dans le tableau correspond aux inscriptions principales et le nombre d’étudiants subsidiables au nombre d’étudiants pris en compte pour le calcul de l’allocation de fonctionnement à charge du Ministère de l’Enseignement. Les nombres d’étudiants et d’étudiants subsidiables utilisés correspondent à l’année précédant l’année budgétaire. En effet, jusqu’en 1998, l’allocation de fonctionnement pour l’année t est calculée en fonction du nombre d’étudiants au 1er février de l’année t-1. Après avoir connu un taux de croissance très important pendant les années 1960, la population universitaire francophone a continué à croître pendant les années 1970. Pendant les années 1980, le taux de croissance de la population universitaire s’est ralenti. La première moitié des années nonante est marquée par une nouvelle augmentation de la population universitaire mais depuis 1996, le nombre d’étudiants fréquentant les universités francophones diminue légèrement. L’évolution du nombre d’étudiants subsidiables est influencée d’une part, par l’évolution de la population universitaire et d’autre part, par les nombreuses mesures prises pour limiter le coût de l’enseignement universitaire (voir supra).

Tableau 1

Financement des universités francophones 1972-1990

Tableau 1
1972 1975 1980 1985 1990 1995 1998 En millions FB 5.143,5 6.985,7 9.595,1 12.172,6 12.763,4 15.957,9 16.461,0 En millions FB de 1972 5.143,5 5226,7 5.180,2 4.652,3 4.398,5 4.821,9 4.752,2 Étudiants au 01/02 t-1 36.976 41.350 45.097 48.259 51.966 62.466 61.054 Étudiants subsidiables au 01/02 t-1 36.976 37955 36.516 39.739 42.531 49.703 48.382 En milliers de FB Montant par étudiant 139 169 213 252 246 255 270 Montant par étudiant subsidiable 139 184 263 306 300 321 340 En milliers de FB de 1972 Montant par étudiant 139 126 115 96 85 77 78 Montant par étudiant subsidiable 139 138 142 117 103 97 98

Financement des universités francophones 1972-1990

Sources : CREF, Fondation universitaire et calculs personnels.

5En francs courants, on constate que, après une augmentation des moyens par étudiant et par étudiant subsidiable jusqu’au milieu des années 1980, les moyens par étudiant et par étudiant subsidiable ont diminué. Par contre, en francs constants, les allocations de fonctionnement accordées de 1972 à 1990 aux universités ont diminué de plus de 14 % alors que la population étudiante augmentait de 41 %. Cela s’est évidemment traduit par une baisse importante des moyens accordés à prix constants par étudiant et étudiant subsidiable.

6Le montant par étudiant est passé de 139.000 francs en 1975 à 246.000 francs en 1990 et le montant par étudiant subsidiable de 139.000 francs à 300.000 francs. Mais, en francs de 1972, les montants par étudiant et étudiant subsidiable s’élèvent respectivement en 1990 à 85.000 et 103.000 francs.

7Depuis la communautarisation de l’enseignement, comparés à l’évolution des années 1980, les moyens accordés aux universités ont légèrement augmenté. En francs courants, on constate une légère augmentation des moyens par étudiant et par étudiant subsidiable entre 1990 et 1998. Le montant par étudiant est passé de 246.000 francs en 1990 à 270.000 francs en 1998, et le montant par étudiant subsidiable de 300.000 francs à 340.000 francs. Mais, en francs de 1972, les montants par étudiant et étudiant subsidiable s’élèvent respectivement en 1998 à 78.000 et 98.000 francs.

8L’érosion des moyens alloués à l’enseignement universitaire s’était manifestée davantage que dans les autres niveaux d’enseignement, dont certains avaient vu, au contraire, leurs moyens augmenter [1]. L’évolution de la dépense moyenne par niveau d’enseignement au détriment des universités s’explique en partie par le fait que l’allocation versée aux universités n’est pas liée de manière automatique à l’évolution du coût du personnel (comme dans le cas des subventions traitements des autres niveaux d’enseignement) [2]. De plus, comme, contrairement aux autres niveaux d’enseignement, le personnel des universités est payé par chaque institution par prélèvement sur son enveloppe globale et non directement par la Communauté, chaque fois que se produit une indexation ou que les pouvoirs publics décident de revaloriser les barèmes de la fonction publique ou enseignante sans augmenter l’enveloppe, les universités sont tenues d’adapter les rétributions de leur personnel qui absorbent plus ou moins 80 % de leur allocation de fonctionnement [3].

9Alors que le monde universitaire francophone attendait une réforme en profondeur qui lui aurait permis de remplir ses missions, le décret du 1er octobre 1998 de la Communauté française ne modifia pas fondamentalement les principes de financement et d’organisation des universités définis dans la loi du 27 juillet 1971. En 1997, le ministre de l’Enseignement supérieur, William Ancion, avait annoncé sa volonté de réformer les mécanismes de financement des universités francophones mais, étant donnés les problèmes budgétaires de la Communauté française de Belgique, semblait écarter, du moins dans le court terme, un refinancement majeur de l’enseignement universitaire et privilégiait une enveloppe de financement stabilisée.

10Le Parlement de la Communauté française de Belgique a adopté le 23 septembre 1998 le décret modifiant le financement des universités. Initialement, le ministre se proposait de remplacer la loi de financement des universités de 1971 mais il a été amené à minimiser le projet initial de réforme. Une des mesures essentielles est l’engagement de la Communauté française de figer l’enveloppe globale accordée aux universités au montant de l’ordre de 16,5 milliards. Selon le ministre, cette réforme constitue un réinvestissement de 600 millions pour les universités dont 300 millions pour les aider dans la réalisation de leurs travaux de ‘gros entretien’ et un montant minimum garanti supplémentaire de 34 millions [4] pour la recherche (FNRS). Le financement reste basé sur le nombre d’étudiants dits subsidiables mais le calcul de l’allocation des universités tient compte désormais des étudiants européens, des étudiants poursuivant une agrégation et des étudiants de troisièmes cycles. Mais, même si le décret apporte de nouveaux moyens aux universités, on est loin d’une réforme en profondeur de l’enseignement universitaire et de son financement en Communauté française alors que la société leur demande d’assumer de plus en plus de responsabilités dans la formation des citoyens, le développement de la recherche et plus récemment comme acteur de développement économique.

11Pour comprendre les enjeux du débat actuel, il nous est apparu nécessaire de retracer brièvement l’historique du financement des moyens accordés aux universités de leur origine à nos jours et d’étudier plus spécifiquement les mécanismes d’attribution des allocations de fonctionnement. Nous distinguons deux grands types de ressources pour l’enseignement universitaire : les unes proviennent principalement des budgets publics, les autres, mais plus faiblement, des étudiants ou de leur famille (droits d’inscription) et du secteur privé (mécènes, dons, héritages). Les pouvoirs publics assurent la responsabilité du financement des activités universitaires, indépendamment du réseau auquel elles appartiennent, étant donné que les droits d’inscription, dans un souci de démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur, ne sont pas liés au coût réel de la fourniture de l’enseignement universitaire.

12Au niveau des dépenses publiques directes pour l’enseignement universitaire, différentes sources de financement peuvent être identifiées. Premièrement, par l’intermédiaire des Ministères de l’Enseignement (national puis communautaire) et de la Coopération au développement, les pouvoirs publics accordent des subventions aux universités pour financer leurs dépenses d’enseignement et de recherche ainsi que les dépenses sociales et d’investissement. Deuxièmement, le ministère de la Santé publique finance une part importante des dépenses de fonctionnement et d’investissement des hôpitaux universitaires. Troisièmement, les pouvoirs publics subventionnent une partie des programmes de recherche menés par les institutions universitaires via les dotations annuelles versées aux fonds nationaux de recherche et plus largement dans le cadre des budgets de la politique scientifique alloués aux départements ministériels des différents niveaux de pouvoir fédéraux, communautaires ou régionaux. Remarquons qu’une partie de la recherche est également financée par le secteur privé. Les différentes subventions accordées aux universités diffèrent selon les types de dépenses. Il existe une législation particulière pour le financement des dépenses ordinaires ainsi que pour les dépenses d’investissement immobilier et pour les dépenses sociales.

13Les pouvoirs publics financent aussi indirectement l’enseignement universitaire via les interventions publiques dans les frais d’études ou d’entretien de l’étudiant. Celles-ci comprennent les bourses ou allocations d’études, les allocations familiales, les dépenses fiscales liées aux réductions d’impôts pour les enfants à charge, etc.

14Dans ce Courrier hebdomadaire, nous nous concentrons sur l’analyse du financement des dépenses ordinaires à charge du Ministère de l’Enseignement (national puis communautaire), soit les allocations de fonctionnement [5]. Cette analyse se subdivise en quatre parties. La première décrit les mécanismes de financement des universités mis en place par la loi du 27 juillet 1971 et les nombreuses modifications introduites au cours des années 1970, 1980 et 1990. La deuxième partie est consacrée à l’examen des différents plans de réforme du financement des universités envisagés par les différents gouvernements au pouvoir pendant les années 1990. La troisième partie décrit les dernières modifications introduites dans les mécanismes de financement par le décret du 1er octobre 1998 et les mesures prises par le gouvernement de la Communauté française issu des élections du 13 juin 1999. Enfin, la quatrième partie traite du rapport des recteurs honoraires A. Bodson et J. Berleur (Quelles urgences pour une politique universitaire en Communauté française) réalisé à l’initiative du ministre W. Ancion.

Le financement des universités de la Communauté française

15Pour comprendre et analyser les problèmes actuels de financement des universités francophones, il est indispensable de les replacer dans leur contexte historique. Bien que ce Courrier hebdomadaire analyse plus particulièrement les universités de la Communauté française de Belgique, il n’est pas possible dans l’approche historique d’ignorer les universités de la Communauté flamande étant donné qu’elles étaient toutes soumises aux mêmes lois. Cependant, depuis la communautarisation de l’enseignement, chaque communauté a développé sa propre politique en matière d’enseignement universitaire.

16Nous distinguons trois grandes périodes dans le financement des universités. La première période couvre le XIXème siècle jusqu’à la fin des années 1960. Cette période correspond au développement des universités libres au lendemain de la révolution belge de 1830 et à l’instauration progressive d’un système de subventions à ces universités dès le début des années 1920. Pendant les années 1960, suite à la croissance de la population étudiante et dans la foulée de la signature du Pacte scolaire de 1959, les pouvoirs publics mirent en place un premier plan de financement global des universités. En effet, suite au vote de la loi Janne de 1965 sur l’expansion universitaire, on multiplia les institutions universitaires et on étendit la compétence des centres incomplets.

17La volonté de réorganiser tout l’enseignement supérieur par la mise en œuvre de la loi du 27 juillet 1971 sur le financement de l’enseignement universitaire marqua le début des années 1970. Le système mis en place en 1971 était fondé sur le principe d’un financement lié directement aux coûts de la formation et supposait que les moyens nécessaires soient disponibles. Mais les difficultés financières des pouvoirs publics et l’accroissement considérable du nombre d’étudiants devaient conduire à des amendements successifs du mécanisme de financement des universités avec pour unique objectif d’en limiter la charge financière.

18En 1989, suite aux réformes institutionnelles de 1988-1989, l’enseignement universitaire est communautarisé. Cependant, les mécanismes prévus dans la loi du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et régions gèlent toute perspective budgétaire pour dix ans (1989-1999) et placent les universités devant la perspective de la reconversion sans garantie de financement supplémentaire. Ainsi, deux phénomènes importants marquent la décennie 1990 : d’une part, la communautarisation des compétences en matière d’enseignement universitaire et notamment le maintien de la loi de 1971 pour les universités francophones et l’élaboration d’un nouveau système pour les universités flamandes [6] et d’autre part, les restrictions budgétaires de la Communauté française qui réduit les moyens accordés aux universités francophones (moratoire et coefficient réducteur).

Les prémices du financement des universités

19Après la création de l’État belge, les pouvoirs publics financèrent entièrement les universités d’État (de Liège et de Gand) alors que le mécénat assurait le financement des universités libres (de Bruxelles et de Louvain). À partir de 1850, on assista à la création de nombreuses institutions d’enseignement supérieur publics et libres qui obtinrent par la suite la reconnaissance de leur niveau universitaire et leur assimilation aux universités dans le cadre des lois de financement.

20Jusque dans les années 1960, les universités de l’État élaboraient leurs propositions budgétaires et les soumettaient aux autorités gouvernementales. Celles-ci arrêtaient le montant des subventions qui leur étaient accordées sur la base de ces propositions. Ces crédits accordés aux universités de l’État étaient inscrits au budget de l’Éducation nationale et leur permettaient de couvrir leurs dépenses ordinaires.

21Jusqu’en 1914, les universités libres de Bruxelles et de Louvain vécurent en parfaite indépendance budgétaire. Mais deux facteurs importants intervinrent après l’armistice. « D’une part, le renchérissement de la vie et le développement de l’enseignement avaient considérablement augmenté leurs frais d’installation et de fonctionnement. D’autre part, les générosités américaines de la Commission For Relief in Belgium responsables, entre autres, de la reconstruction de l’Université libre de Bruxelles et de la bibliothèque de l’Université de Louvain, avaient désormais mis à la mode le recours aux subsides de l’État. En vérité, l’époque s’y prêtait. J. Destrée[7] avait multiplié les gestes de sollicitude envers les universités, leur accordant notamment la personnalité civile. (…) Cédant à ce courant, le ministre en fonction, le professeur E. Hubert[8], ex-recteur de l’Université de Liège, lança les premiers subsides aux universités libres, mais cette fois selon un système de forfait imposé par les circonstances. » [9] Ainsi, les universités libres de Bruxelles et de Louvain reçurent respectivement annuellement 1 million de francs belges de 1922 à 1924 ; 2 millions en 1925 et 1926 ; 2,5 millions en 1927 et 5 millions en 1928 et 1929. En 1927 et 1928, l’École des mines et de la métallurgie de Mons reçut également 500.000 francs [10].

22La loi du 23 juin 1930 inaugura le système d’une subvention pour les universités libres dont le montant était fixé annuellement dans la loi budgétaire. L’article 2 fixait ces subventions aux 3/5 des crédits prévus au budget ordinaire (tant pour le paiement des traitements et indemnités du personnel que pour les dépenses de matériel) des deux universités de l’État et de leurs dépendances à l’exclusion toutefois des dépenses exceptionnelles. Ces 3/5 étaient répartis de la manière suivante : 3/11 pour l’Université libre de Bruxelles, 3/11 pour l’Université catholique de Louvain et 3/55 pour l’École des mines et la métallurgie de Mons.

23La loi du 23 avril 1949 modifia ce régime de subventions en portant l’allocation en faveur des institutions de Bruxelles, Louvain et Mons aux 2/3 des crédits prévus au budget ordinaire des deux universités de l’État. Les crédits furent alors répartis entre les universités de la manière suivante : 5/12 pour l’Université libre de Bruxelles, 5/12 pour l’Université catholique de Louvain et 1/12 pour la Faculté polytechnique de Mons (ancienne École des mines et de la métallurgie). Cette loi étendit aussi les subventions au Fonds national de la recherche scientifique (créé le 27 avril 1928) en lui accordant 1/12 des crédits accordés aux universités de l’État. Enfin, elle prévoyait une subvention pour couvrir les pensions du personnel des universités libres, subvention dont le montant s’élevait à 3/4 des pensions payées pour le personnel des universités de l’État. Pour bénéficier de ces subventions publiques, les établissements libres devaient remplir deux conditions : soumettre annuellement leurs budgets et leurs comptes au gouvernement et limiter les traitements, indemnités et pensions à ceux en vigueur dans les universités de l’État. Suite au développement des sciences et technologies et à la démocratisation de l’enseignement pendant les années 1950, les universités reçurent des moyens complémentaires, notamment des subventions pour le service social, pour les services d’orientation professionnelle et pour les restaurants universitaires.

24La différence de traitement entre les universités libres et de l’État se justifiait de moins en moins par suite de la disparition presque totale des ressources provenant du mécénat et parce que les universités libres remplissaient de plus en plus des missions de service public. De plus, la croissance continue du nombre d’étudiants, la demande accrue en diplômés universitaires et la prise de conscience de la nécessité de promouvoir la recherche scientifique, obligèrent les pouvoirs publics à se pencher plus attentivement sur le problème du financement de l’enseignement universitaire. Ainsi, en 1957, fut créée la Commission nationale des sciences ou Commission Léopold dont les travaux furent à l’origine de la création du Conseil national de la politique scientifique en 1959 et de diverses lois en 1960 dont la loi du 2 août relative à l’intervention de l’État dans le financement des universités libres et de diverses institutions d’enseignement supérieur et de recherche scientifique. Les autres lois sont la loi du 1er août visant les constructions et bâtiments des universités de l’État et la loi du 3 août accordant des avantages sociaux aux universités et établissements assimilés.

25Aux termes de la loi du 2 août, chacune des deux universités libres percevait une subvention constituée à concurrence de 44 % des crédits inscrits au titre des dépenses ordinaires du budget du Ministère de l’Éducation nationale en faveur des deux universités de l’État et de 2,2 % de ces mêmes crédits par tranche de 1.500 étudiants au-delà de 5.000 (prime d’effectifs) [11]. L’État prenait également à sa charge, pour chacune des deux universités, les pensions de retraite et d’éméritat du personnel enseignant, scientifique et administratif, jusqu’à concurrence de 45 % du montant correspondant pour les universités de l’État. La loi du 2 août 1960 accordait également des subventions à l’Institut agronomique de Louvain (3,8 % des crédits accordés aux deux universités de l’État), à la Faculté polytechnique de Mons (8,8 %), aux Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix à Namur (4,6 %), à la Faculté universitaire Saint- Louis à Bruxelles (1,6 %) et au FNRS (10 %).

26Suite à la forte croissance de la population universitaire pendant les années 1960, les lois votées au début de la décennie se montrèrent rapidement inefficaces pour résoudre les problèmes de l’expansion universitaire. Selon la commission spéciale du Conseil national de la politique scientifique (CNPS) en 1968, le nombre d’étudiants entre 1955 et 1965 passa de 22.462 à 40.307 [12]. Face à l’explosion des effectifs étudiants, ni les bâtiments et équipements ni le personnel ne suffirent. De plus, ce mouvement de massification alla de pair, en 1968, avec des phénomènes de contestation et de revendication de la part des étudiants et des membres de la communauté universitaire. De profondes transformations sociales et un souci d’équité dans l’accès aux richesses et au pouvoir caractérisèrent ces années de prospérité économique. Le souci de démocratisation se marqua aussi en matière universitaire [13].

27Dès l’année académique 1964-1965, les partis au pouvoir préparèrent la première loi d’expansion universitaire mais les problèmes à résoudre étaient ardus. Des remous politiques accompagnèrent cette opération qui divisa la majorité PSC-PSB de l’époque : les socialistes exigeaient notamment deux nouvelles universités à Anvers et à Mons tandis que le PSC entendait assurer l’expansion normale de l’Université de Louvain et un essaimage des candidatures (proposition de loi Houben).

28À cette époque, deux conceptions différentes en matière d’expansion universitaire étaient défendues en Belgique : certains préconisaient un développement exclusif des centres universitaires existants (concentration et aménagement des structures existantes) alors que d’autres étaient partisans d’un essaimage géographique, surtout au profit des régions ou provinces encore dépourvues d’université. Deux thèses s’affrontaient également en matière de financement : la première tendait à maintenir une certaine pondération dans la répartition entre les établissements appartenant à des réseaux (officiel, libre catholique et libre non confessionnel) et à des régimes linguistiques différents, et la deuxième désirait établir des normes de financement en fonction des besoins objectifs des divers établissements [14].

29Après de nombreuses tractations politiques, la loi Janne [15] du 9 avril 1965 ou loi d’expansion universitaire, octroya une aide assez importante aux universités libres tout en accordant de larges compensations aux universités de l’État, en créant deux nouveaux centres universitaires de l’État (l’un à Mons et l’autre à Anvers) et en étendant la liste des institutions pouvant bénéficier d’un financement.

30À partir de 1966, la subvention forfaitaire globale de Louvain et de Bruxelles passa respectivement à 91 % et 61 % des crédits alloués aux deux universités de l’État. Mais, contrairement à la loi du 2 août 1960, les pourcentages inscrits dans la loi du 9 avril 1965 étaient invariables pendant la période couverte par la loi et aucun complément ne s’ajoutait aux subventions. Le pourcentage accordé aux autres institutions était de 3,8 % pour l’Institut agronomique de Louvain ; 8,8 % pour la Faculté polytechnique de Mons ; 5,5 % pour les Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix à Namur ; 1,6 % pour la Faculté universitaire Saint-Louis à Bruxelles ; 2,2 % pour les Facultés universitaires Saint-Ignace à Anvers ; 0,7 % pour la Faculté universitaire catholique de Mons ; 2,2 % pour l’Institut de médecine tropicale Prince Léopold à Anvers et 10 % au FNRS.

31Dans l’euphorie économique du moment, une large majorité se rallia à cette politique mais ses conséquences financières, sous-évaluées à l’époque, furent durement ressenties par la suite [16]. Le budget global de l’enseignement supérieur passa de 3,1 à 5,9 milliards au terme de la première phase d’expansion universitaire de 1965 à 1968. Ainsi, alors que l’article 73 de la loi du 9 avril 1965 stipulait que le total des crédits inscrits au titre de dépenses ordinaires au budget du Ministère de l’Éducation nationale et de la Culture en faveur des deux universités de l’État pour les exercices 1966, 1967 et 1968 était majoré respectivement chaque année d’au moins 25, 18 et 18 % par rapport au total des crédits octroyés pour l’exercice précédent, le gouvernement [17] y dérogea par l’arrêté royal du 23 mai 1967 dans le cadre des pouvoirs spéciaux. Cet arrêté ramena respectivement à 13 et 8 % l’accroissement des crédits pour 1967 et 1968 [18].

32Cette première loi d’expansion universitaire ne résolut pas les problèmes financiers des universités qui réclamaient toujours les moyens nécessaires au développement de leurs activités. En dépit de l’accord gouvernemental négocié entre le PSC et PSB le 12 juin 1968 sur l’établissement d’un premier programme d’investissements universitaires de 35 milliards à répartir sur dix ans, les projets et les besoins évoqués dépassèrent rapidement cette prévision [19]. La publication en 1968 de ce programme d’expansion universitaire qui prévoyait, entre autres, le maintien d’une section française complète à Louvain provoqua une crise politique importante. Le partage par le gouvernement des 35 milliards prévus vit s’affronter les partis de la majorité, notamment sur les montants à accorder aux universités de Louvain et de Bruxelles pour leur établissement respectivement à Louvain-la-Neuve [20] et au Campus de la Plaine [21].

La loi du 27 juillet 1971

33La loi du 27 juillet 1971 revit fondamentalement le régime de financement des universités dans un double objectif de rationalisation et d’uniformisation. Il s’agissait d’assurer à toutes les institutions libres ou publiques un financement des dépenses ordinaires quasi identique, fondé sur des critères objectifs et assorti de contrôles et de contraintes comparables [22].

34Dans son avis de 1968, le Conseil de la politique scientifique [23] définissait les grands principes de la nouvelle législation : « Il devait être admis qu’à la condition que les établissements officiels et libres se soumettent à des normes égales de qualité ainsi qu’aux mêmes contrôles et contraintes budgétaires et qu’ils appliquent à leur personnel un statut comparable, l’État couvre à l’avenir leurs besoins réels, pour autant que ces besoins soient évalués de manière uniforme selon des normes communes. »

35Le financement des institutions universitaires défini dans la loi du 27 juillet 1971 s’articule autour de trois axes principaux : le régime normatif, l’égalité de traitement et le régime garanti. Bien qu’elle ait été amendée à de nombreuses reprises, cette loi constitue toujours le cadre légal du financement des universités francophones.

Le régime normatif (articles 25 à 33)

36La loi du 27 juillet 1971 attribue aux institutions énumérées dans la loi le droit à des allocations annuelles de fonctionnement destinées à financer les dépenses ordinaires d’administration, d’enseignement et de recherche, y compris les dépenses salariales [24].

37Les institutions universitaires peuvent être des institutions complètes, autrement dit des institutions habilitées à délivrer l’ensemble des grades et qui comportent au moins les cinq facultés (philosophie et lettres, droit, sciences, médecine, sciences appliquées) ou des institutions assimilées aux universités et autorisées par la loi à ne délivrer qu’un nombre limité de grades.

38Les institutions complètes de la Communauté française de Belgique sont l’Université libre de Bruxelles (ULB), l’Université catholique de Louvain (UCL) et l’Université de l’État à Liège (ULG). Les universités incomplètes sont l’Université de l’État à Mons (UMH), les Facultés universitaires Saint-Louis à Bruxelles (FUSL), la Faculté des sciences agronomiques de l’État à Gembloux (FUSAGx), la Faculté polytechnique de Mons (FPMs), la Faculté universitaire catholique de Mons (FUCAM) et les Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix à Namur (FUNDP).

39Selon la loi de 1971, le calcul de l’allocation de fonctionnement est directement lié :

  • au nombre d’étudiants reconnus comme subsidiables au 1er février de l’année précédant l’année budgétaire et répartis en orientations d’études ;
  • à un coût forfaitaire par étudiant variant selon les orientations d’études.
La loi répartit les étudiants en quatre orientations d’études[25] :
  • le groupe A regroupe les sciences humaines et sociales (philosophie, histoire, langues et lettres, arts et archéologie, psychologie, sciences de l’éducation, sciences sociales, politiques et économiques, sciences économiques appliquées et sciences commerciales, sciences religieuses criminologie et droit) ;
  • le groupe B est composé des premiers, deuxièmes et troisièmes cycles en sciences et en éducation physique ainsi que les premiers cycles en sciences appliquées, sciences agronomiques et ingénierie biologique, sciences médicales et science dentaire, sciences vétérinaires, sciences de la santé publique et sciences pharmaceutiques ;
  • le groupe C est composé des deuxièmes et troisièmes cycles en sciences appliquées et médecine (sciences médicales et science dentaire, sciences pharmaceutiques, sciences de la santé publique et sciences vétérinaires).
  • le groupe D regroupe les deuxièmes et troisièmes cycles en sciences agronomiques et ingénierie biologique.
Selon la loi, les coûts forfaitaires sont fixés par arrêté royal chaque année, pour chaque orientation d’études et pour chaque rubrique de dépenses en tenant compte du taux d’encadrement et de l’évolution du coût moyen des membres du personnel académique et scientifique et de l’évolution du coût moyen des membres du personnel auxiliaire (administratif et technique) et des autres frais de fonctionnement. Il s’agit d’un chiffre fixé uniformément pour tous les étudiants d’une orientation d’études déterminée indépendamment de l’institution. Le coût forfaitaire pour le groupe A est plus faible que celui du groupe B, lui-même inférieur à celui du groupe D. Le plus élevé est celui du groupe C.

40Le nombre d’étudiants est une variable déterminante pour le financement des universités, mais la loi limite le nombre d’étudiants qui peuvent être pris en considération pour calculer l’allocation de fonctionnement des institutions. Ce nombre d’étudiants pris en compte pour déterminer l’allocation de fonctionnement des universités est dénommé le nombre d’étudiants subsidiables. Le législateur de 1971 laissa également au Roi le soin d’arrêter la liste des grades académiques pris en considération pour fixer le nombre d’étudiants donnant lieu à une subvention ainsi que les conditions supplémentaires à respecter pour établir ce nombre d’étudiants. La loi stipule qu’une seule inscription par étudiant peut être prise en compte pour une institution universitaire au cours de l’année académique précédant l’exercice budgétaire.

41Jusqu’en 1976, il n’existait pas de distinction selon l’origine des étudiants pour calculer les allocations de fonctionnement des universités. Depuis lors, on distingue différentes catégories d’étudiants subsidiables selon le budget qui les finance [26] : le budget du Ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération au développement pour les étudiants des pays en voie de développement [27], le budget des Affaires culturelles pour les accords culturels conclus entre certains pays et la Belgique et le budget de l’Enseignement pour les étudiants belges et assimilés. Les étudiants subsidiables à charge du budget du Ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et la Coopération au développement sont des ressortissants des pays en voie de développement reconnus par la Belgique et qui ont été admis par le ministre qui a l’Administration générale de la Coopération au développement dans ses attributions pour recevoir une formation universitaire en Belgique. Les étudiants subsidiables à charge du budget des Affaires culturelles étaient des ressortissants de pays ayant conclu un accord culturel avec la Belgique ou une de ses communautés et qui sont admis à bénéficier d’une bourse d’études octroyée dans le cadre de ces accords culturels par les ministres qui ont l’Administration des relations culturelles internationales dans leurs compétences. Depuis le décret du 14 juillet 1997, il n’existe plus d’étudiants financés par le budget des Affaires culturelles en Communauté française.

42Dans ce Courrier hebdomadaire, nous nous concentrons sur les conditions d’admission et de comptabilisation des étudiants à charge du budget du Ministère de l’Enseignement. Ces étudiants sont les étudiants belges et luxembourgeois, les étudiants étrangers dont les parents ou le tuteur légal résident ou sont domiciliés en Belgique et y exercent ou y ont exercé une activité professionnelle principale, les étudiants résidant en Belgique dont les parents sont ou ont été occupés en Belgique et sont ressortissants de l’Union européenne et les réfugiés politiques.

43Initialement, les conditions d’admission et de comptabilisation concernaient principalement les étudiants de nationalité étrangère à l’exception de certaines mesures prévues dans les arrêtés royaux du 7 avril 1977 et du 31 août 1978 qui limitaient la subvention des étudiants ne disposant pas des titres exigés par la loi (essentiellement le certificat de maturité). Les étudiants de nationalité étrangère qui n’ont pas été reconnus par le ministre de la Coopération au développement ou le ministre compétent pour les relations culturelles internationales sont pris en considération pour déterminer l’allocation de fonctionnement des universités accordée par le Ministère de l’Enseignement mais sous certaines conditions. L’arrêté royal du 4 août 1972 limitait ces étudiants étrangers subsidiables à 5 % des étudiants belges inscrits dans la même orientation d’études l’année précédente. Ce pourcentage d’étudiants étrangers pris en considération pour le calcul de l’allocation est dénommé « tranche de rayonnement ». La loi-programme du 5 janvier 1976 a réduit cette tranche de rayonnement à 2 % du nombre d’étudiants belges subsidiables (arrêté royal du 7 avril 1977) [28].

44La loi garantit aux institutions le droit d’obtenir, pour une orientation d’études ou pour une subdivision d’orientation d’études, une allocation de fonctionnement supérieure au nombre d’étudiants quand celui-ci est inférieur à un minimum garanti (nombre-plancher) et accorde une allocation inférieure quand ce nombre dépasse un maximum (nombre-plafond). Ces nombres sont fixés par orientation d’études ou subdivision d’orientation, selon l’orientation (complète ou incomplète). Ces notions de nombres-planchers et plafonds avaient été introduites pour tenir compte des phénomènes d’économies d’échelle dans les grandes institutions et pour soutenir les petites institutions car, en dessous d’un certain nombre d’étudiants, le coût ne diminue plus tandis qu’inversement, au-delà d’une certaine population, l’accroissement des frais n’est plus proportionnel. En effet, le nombre-plancher correspond à un nombre fictif d’étudiants qui garantit aux institutions une borne inférieure pour l’allocation de fonctionnement même si le nombre d’étudiants inscrits est inférieur au nombre-plancher. Autrement dit, indépendamment des institutions, lorsque le nombre d’étudiants subsidiables dans une orientation d’études est inférieur au nombre-plancher, le nombre d’étudiants pris en considération pour le calcul de l’allocation est ce nombre-plancher. Ces nombres-planchers avaient été conçus comme une mesure transitoire et il ne faisait aucun doute, à l’époque, que l’accroissement du nombre d’étudiants rendrait rapidement ces nombres-planchers inopérants. Mais, cet accroissement ne s’est pas produit et dans certains cas le nombre d’étudiants fut même en régression. Inversement, le nombre-plafond a été imposé pour tenir compte des économies d’échelle dont peuvent bénéficier les grandes institutions universitaires : elles peuvent mieux répartir leurs charges sur un grand nombre d’étudiants.

45Pour calculer l’allocation de fonctionnement de chaque orientation d’études, on multiplie le coût forfaitaire par le nombre d’étudiants subsidiables correspondant. Si le nombre d’étudiants subsidiables est inférieur au nombre-plancher, alors le nombre d’étudiants pris en considération est le nombre-plancher que l’on multiplie par le coût forfaitaire dénommé coût forfaitaire ‘tranche 1’. Si le nombre d’étudiants est supérieur au nombre-plancher mais inférieur ou égal au nombre-plafond, on applique le coût forfaitaire ‘tranche 1’ à ce nombre d’étudiants. Lorsque le nombre d’étudiants dans une orientation d’études est supérieur au nombre-plafond, le coût forfaitaire est réduit de moitié pour déterminer le montant de l’allocation correspondant aux étudiants qui dépassent ce plafond en ce qui concerne les dépenses relatives au personnel administratif et technique et les autres dépenses de fonctionnement. La réduction ne porte donc pas sur la part de la subvention destinée à l’encadrement qui doit être assuré en fonction du nombre réel d’étudiants. On applique, dès lors, un coût forfaitaire réduit dénommé coût forfaitaire ‘tranche 2’. L’allocation totale annuelle de chaque institution universitaire est égale à la somme des montants calculés pour chaque orientation.

46Remarquons que pour les institutions incomplètes, le calcul se fait par sous-orientation d’études [29]. De plus, celles qui organisent dans la subdivision d’orientation d’études ‘Sciences économiques-Sciences économiques appliquées et commerciales’ un programme d’études en sciences économiques appliquées et commerciales bénéficient d’un supplément d’allocation [30].

47Un exemple de calcul d’une allocation de fonctionnement pour une université complète est donné au tableau 2. À chaque orientation d’études correspondent les données sur le nombre d’étudiants subsidiables ainsi que les nombres-planchers et plafonds. Ainsi par exemple, pour l’orientation A, le nombre d’étudiants subsidiables (7.766) est supérieur au nombre-plafond (4.346). On détermine, dès lors, le nombre d’étudiants en tranche 1 (le nombre-plafond) auquel on applique le coût forfaitaire de la tranche 1 et le nombre d’étudiants tranche 2 (nombre d’étudiants subsidiables moins le nombre-plafond) auquel on applique le coût forfaitaire de la tranche 2. On obtient ainsi un montant de 1,658 milliard de francs. Pour l’orientation B, on prend en considération le nombre d’étudiants subsidiables car il est inférieur au nombre-plafond et supérieur au nombre-plancher. Tous les étudiants sont donc en tranche 1. Pour l’orientation C, comme le nombre d’étudiants subsidiables (900) est inférieur au nombre-plancher (1.003), on utilise le nombre-plancher et le coût forfaitaire en tranche 1 pour déterminer l’allocation.

Tableau 2

Exemple de calcul de l’allocation de fonctionnement d’une université complète1, 2, 3

Tableau 2
Groupe d’études Nbres-planchers1 Nbres-plafonds 1 Étudiants subsid.3 Tranche 1 Tranche 2 Coûts forfait. Tranche 12 Coûts forfait. Tranche 22 Total (en milliers) A 2.173 4.346 7.766 4.346 3.420 228.881 193.955 1.658.043 B 1.574 3.148 2.704 2.704 0 429.749 338.187 1.162.041 C 1.003 2.006 900 1.003 0 694.439 531.850 696.522 D 68 576.313 472.787 39.189 Total 11.438 8.053 3.420 3.555.795

Exemple de calcul de l’allocation de fonctionnement d’une université complète1, 2, 3

1 Ces nombres correspondent aux nombres-planchers et plafonds introduits par l’arrêté royal du 21 octobre 1980 et appliqués jusqu’en 1998. En 1971, les nombres-planchers étaient respectivement 2.330 pour le groupe A, 1.880 pour le groupe B et 790 pour le groupe C. Ces nombres sont uniquement appliqués aux universités complètes.
2 Coûts forfaitaires appliqués en 1997.
3 Bien que les étudiants à charge du budget de l’AGCD et accords culturels n’interviennent pas dans le calcul de l’allocation de fonctionnement à charge du Ministère de l’Enseignement, ils influencent dans certains cas le montant accordé aux universités car ils sont systématiquement repris parmi les étudiants en tranche 1. Autrement dit, pour chaque orientation d’études, lorsque le nombre d’étudiants subsidiables pour calculer l’allocation accordée par le Ministère de l’Éducation est supérieur au nombre-plafond, le nombre d’étudiants considéré en tranche 1 doit être diminué du nombre éventuel d’étudiants AGCD et accords culturels.

48Cette université complète qui compte 11.438 étudiants subsidiables devrait obtenir une allocation de fonctionnement de 3,556 milliards de francs. Elle est néanmoins financée sur la base de 11.473 (8.053 + 3.420) étudiants dont 35 (11.473 – 11.438) sont des étudiants fictifs. Il est évident que le montant obtenu dépend aussi très fort de la répartition des étudiants entre les quatre orientations d’études, l’orientation C ayant le coût forfaitaire le plus élevé.

L’égalité de traitement

49Dans le cadre de l’égalité promise entre les institutions des différents réseaux, les universités libres réclamèrent la prise en charge par l’État des dépenses qu’elles avaient à assumer et qui n’incombaient pas au budget des universités de l’État. Ainsi, l’article 34 de la loi de 1971 a introduit des mécanismes destinés à compenser les avantages et inconvénients respectifs des statuts public et libre en tenant compte des ressources propres (patrimoniales) des institutions.

50Les recettes et les dépenses du patrimoine devaient être publiées de manière à pouvoir soustraire de l’allocation légale les revenus d’origine privée dépassant un certain niveau (soit le revenu net du patrimoine). Dans le cas contraire, l’existence de certaines charges légales ou conventionnelles devait conduire à l’octroi d’un supplément d’allocation. De cette manière, les universités d’État ne seraient pas défavorisées par rapport aux institutions libres disposant en général d’un patrimoine plus important et réciproquement, ces dernières ne seraient plus défavorisées par le paiement, par exemple, de cotisations légales liées à leur qualité d’employeur privé. La clarté des dépenses et des recettes des patrimoines des universités constituait donc une condition nécessaire à l’égalité de traitement entre les institutions. Néanmoins, l’application de la loi de 1971 entraîna rapidement d’importantes difficultés. En l’absence d’arrêté fixant les éléments constitutifs des dépenses et recettes des patrimoines et faute d’accord sur une définition des charges, le Conseil des ministres décida, le 21 décembre 1974, de fixer forfaitairement les montants visés à l’article 34. En 1976, l’article 34 fut fondamentalement modifié par la loi-programme de 1976 qui définissait de manière limitative les charges légales déductibles du revenu net du patrimoine. Ces charges légales ne comprenaient que les charges financières relatives aux investissements immobiliers pour l’administration, l’enseignement et la recherche et les cotisations patronales légales des universités libres que ne supportaient pas les universités d’État. Ainsi, chaque année, un supplément d’allocation calculé sur cette base était ajouté à l’allocation forfaitaire. Jusqu’en 1982, l’État n’intervenait que si le revenu net du patrimoine ne suffisait pas à couvrir ces charges légales. Dans le cas contraire, il en récupérait le solde.

51L’arrêté royal du 31 juillet 1982 modifia fondamentalement l’article 34 et remit en cause l’esprit même de la loi de 1971. Il prévoyait que les charges légales seraient supportées par l’État, quel que soit le revenu net du patrimoine des institutions. Remarquons que même si les pouvoirs publics remboursent aux universités libres les charges légales de sécurité sociale qui ne sont pas supportées par les universités de l’État ou de la Communauté, ce remboursement ne correspond pas aux charges réelles mais est calculé selon un pourcentage du coût forfaitaire par étudiant et selon un mécanisme proche du calcul de l’allocation de fonctionnement. La différence doit être complétée par le budget des établissements libres.

52Enfin, une subvention pension est accordée par l’État aux institutions libres en vue d’assurer le service des pensions de leur personnel académique admis à la retraite avant le 1er juillet 1971 (article 38). Les pensions des membres du corps académique admis à la retraite après cette date sont prises en charge par le budget des pensions dans les mêmes conditions que pour les institutions de l’État, comme d’ailleurs les pensions en faveur des autres catégories de personnel à l’exception du personnel autre que le personnel enseignant et scientifique des universités libres. Remarquons que depuis la communautarisation de l’enseignement, suite à une polémique entre le pouvoir fédéral et la Communauté française sur la prise en charge des pensions, l’article 38 n’a pas encore été appliqué.

Le régime garanti

53Bien que la loi du 27 juillet 1971 reprit et appliqua le principe de normes de financement défini par le CNPS en 1968, les normes retenues étaient inférieures à celles proposées. L’application de ces normes était considérée comme un objectif à atteindre au terme d’une première période de dix ans. Les normes (le nombre d’étudiants que la loi autorisait à prendre en considération, les taux d’encadrement, le coût moyen du personnel scientifique et académique et le coût moyen du personnel administratif, technique et de gestion ainsi que les frais de fonctionnement) avaient été définies sur la base de moyennes nationales (moyenne de taux d’encadrement effectivement pratiqués dans les six universités, coûts moyens de fonctionnement, …). Cependant, ces moyennes ne pouvaient satisfaire les institutions qui bénéficiaient auparavant d’une situation plus favorable. Cet état de fait était bien connu en 1971 et la loi dérogeait pour cette raison au principe de l’égalité de traitement entre toutes les institutions [31]. Des mécanismes protecteurs des situations acquises (droits garantis) furent, dès lors, mis en place pour garantir la situation de certaines institutions en attendant que l’accroissement de leur nombre d’étudiants régularise leur situation en les réintégrant dans le système normatif défini par la loi. En effet, les taux d’encadrement fixés par la loi étaient dépassés dans les universités d’État et il ne pouvait être question de faire subir à ces institutions un régime de régression [32]. Ainsi, l’article 35 de la loi du 27 juillet 1971 prévoyait un système de droits garantis afin de garantir aux institutions universitaires qui obtenaient sur la base de la législation antérieure une subvention plus importante que celle calculée au moyen de la nouvelle réglementation, qu’elles continueraient à bénéficier des subventions antérieures ajustées annuellement en fonction de l’indice des prix jusqu’à ce que l’application des nouveaux critères leur assurât un montant supérieur. Ce fut le cas pour la FUCAM, la FUSAGx, les FPMs, l’UMH et l’ULG.

Les modifications de la loi du 27 juillet 1971 pendant les années 1970 et 1980

54Les crises économiques successives depuis le milieu des années 1970 ont suscité de nombreuses restrictions budgétaires mais n’ont pas fondamentalement modifié les principes définis dans la loi de financement. Les principales mesures pour freiner l’accroissement du coût des institutions universitaires à charge du Ministère de l’Enseignement ont consisté principalement à [33] :

  • supprimer progressivement les droits garantis accordés à certaines institutions ;
  • réduire le nombre d’étudiants pris en considération pour calculer l’allocation de fonctionnement (nouvelles restrictions, modifications des nombres-planchers et plafonds). Le graphique 2 permet de comparer l’évolution de la population étudiante en nombre d’inscriptions principales et en nombre d’étudiants subsidiables entre 1970 et 1990 pour les institutions universitaires francophones. Nous distinguons le nombre total d’étudiants subsidiables du nombre total d’étudiants subsidiables à charge du budget du Ministère de l’Éducation. La différence entre ces deux nombres résulte de l’exclusion des étudiants à charge du Ministère de la Coopération au développement et des Affaires culturelles. L’évolution du nombre d’étudiants et l’évolution du nombre d’étudiants subsidiables en Communauté française ont un profil similaire. Néanmoins, la différence entre les deux courbes s’accentue au cours du temps. En 1975, la différence entre les deux courbes était approximativement de 3.000 étudiants, en 1980 de 4.800 étudiants, en 1985 de 6.800 étudiants et en 1990 de 8.200 étudiants. Ce constat permet d’expliquer, en partie, la baisse des moyens par étudiant qui sont accordés aux universités, étant donné que le calcul de l’allocation de fonctionnement est basé sur le nombre d’étudiants subsidiables et non sur le nombre total d’étudiants. Le profil différent de l’évolution des étudiants subsidiables et des étudiants subsidiables à charge du budget de l’Éducation, du milieu des années 1970 au milieu des années 1980, résulte des nombreuses mesures pour limiter les étudiants AGCD ;
  • limiter, voire geler certaines années, l’évolution du cout forfaitaire par orientation d’études. Le graphique 3 retrace, d’une part, l’évolution du coût forfaitaire publié au Moniteur belge selon les différents groupes d’études et, d’autre part, l’évolution du coût forfaitaire déflaté aux prix de 1972. Ce dernier permet de mesurer l’évolution à prix constants des coûts forfaitaires. Suite aux conséquences de nombreuses mesures d’assainissement des finances publiques prises depuis la fin des années 1970, de nombreuses modifications de la loi de 1971 limitèrent l’évolution des coûts forfaitaires. À partir de 1979, la croissance du coût forfaitaire demeura systématiquement inférieure à l’évolution de l’indice des prix, alors que pendant les années 1970, elle avait toujours été supérieure à celle des prix [34]. Les pouvoirs spéciaux de 1982 permirent d’abandonner le principe de la liaison des coûts forfaitaires à l’évolution du coût moyen réel du personnel et donnèrent au gouvernement la possibilité d’adapter le coût forfaitaire à ses disponibilités budgétaires. En fonction de ses disponibilités budgétaires, le gouvernement put déterminer annuellement un coût adapté dans le but d’aboutir à une réglementation uniforme du point de vue de l’indexation des allocations scolaires pour tout niveau d’enseignement.

Graphique 2

Évolution du nombre d’étudiants et d’étudiants subsidiables dans les universités francophones entre 1970 et 1990

Graphique 2

Évolution du nombre d’étudiants et d’étudiants subsidiables dans les universités francophones entre 1970 et 1990

Source : Fondation universitaire et calculs personnels
Graphique 3

Évolution des coûts forfaitaires à prix courants et constants 1973-1990

Graphique 3

Évolution des coûts forfaitaires à prix courants et constants 1973-1990

Sources : Moniteur belge et calculs personnels.

Les modifications de la loi du 27 juillet 1971 pendant les années 1990

55Après 1987, sans avoir amorcé la résolution des problèmes budgétaires des finances publiques, la Belgique se prépara à la troisième réforme de l’État qui allait notamment communautariser les compétences en matière d’enseignement. Comme les mesures prises dans les années 1980 par le gouvernement fédéral n’étaient pas parvenues à réaliser les économies prévues dans les différents plans budgétaires successifs, les communautés et régions ont dû gérer partiellement ces problèmes budgétaires devenus rapidement préoccupants, surtout pour la Communauté française [35].

56Dans ce contexte, en février 1992, les partis de la coalition gouvernementale (PS et PSC), en rédigeant l’accord politique pour la constitution du nouveau gouvernement francophone, décidaient de geler les effets de la loi du 27 juillet 1971 sur le financement des universités car elle était jugée trop généreuse. L’accord politique envisageait le blocage du financement des universités pour une période de trois ans. Le décret de la Communauté française du 21 décembre 1992 prévoyait en effet que les allocations pour l’année 1993 seraient calculées (hors indexation) sur la base du nombre d’étudiants ayant servi à fixer l’allocation de 1992 (soit le nombre d’étudiants au 1er février 1991). C’était la procédure dite du moratoire. Devant l’accroissement du nombre d’étudiants et l’évidente insuffisance des moyens, le décret du 27 décembre 1993 reprit la même disposition pour l’année budgétaire 1994 mais assouplit l’impact des mesures. Les réactions des universités varièrent en fonction de l’évolution de leur population universitaire. Les universités où le nombre d’étudiants n’avaient pas augmenté ou seulement faiblement n’étaient pas touchées par la mesure. Néanmoins, le moratoire aurait provoqué en deux ans un manque à gagner global de plus de 400 millions.

57Le 10 mai 1994, la Cour d’arbitrage jugea que le moratoire imposé aux universités était discriminatoire et violait la Constitution, notamment l’article 11 dispose que « la jouissance des droits et libertés reconnus aux Belges doit être assurée sans discrimination » et l’article 24 sur le libre choix des parents en matière d’enseignement. L’Université de Liège gagnait ainsi le recours qu’elle avait introduit contre la Communauté française. En effet, l’ULG qui avait connu une augmentation sensible de ses étudiants s’était insurgée contre le moratoire : elle évoquait une perte supérieure à 100 millions pour la seule année 1993 [36]. Selon la Cour d’arbitrage, le moratoire aboutissait à avantager les universités dont le nombre d’étudiants avait diminué et pénalisait celles dont le nombre d’étudiants avait augmenté au cours de l’année académique 1992-1993, sans que les objectifs du décret puissent justifier ce traitement inégal.

58L’arrêt de la Cour posa trois problèmes [37]. Premièrement, il annulait les effets du moratoire pour 1993 mais les subsides avaient déjà été distribués et dépensés. Deuxièmement, la Cour annulait le moratoire pour la seule année 1993. Si la Communauté maintenait le moratoire pour 1994, il serait à nouveau cassé par la Cour d’arbitrage. Troisièmement, le moratoire devait être appliqué jusqu’en 1995. L’arrêt de la Cour devait donc accélérer la réflexion sur un nouveau mode de financement des universités dont la préparation avait justifié la mise en place du moratoire.

59Le décret du 14 mars 1995 détermina les montants supplémentaires qui auraient dû être accordés aux universités sur la base du nombre d’étudiants au 1er février 1992, soit 369,7 millions. Néanmoins, pour 1994, compte tenu des montants dus pour 1993, de la prise en compte du nombre d’étudiants au 1er février 1993 et de la volonté du gouvernement de maintenir constant le montant total consacré en 1993 et 1994 aux universités, les allocations prévues pour 1994 furent affectées d’un coefficient réducteur de 0,94185. Il en résulta un montant total de dépenses inchangé pour la Communauté française en 1993 et 1994 mais une redistribution entre les diverses institutions fut effectuée pour tenir compte de l’évolution de la répartition de la population étudiante aux 1er février des années 1992 et 1993. Ainsi, 246,5 millions devaient changer de destination. Pour alléger l’effort de redistribution entre les institutions universitaires, le gouvernement de la Communauté française décida de l’étaler sur trois exercices budgétaires à raison de 20 % en 1994 et 40 % en 1995 et 1996.

60Pour 1994, les montants furent incorporés aux montants prévus au budget alors que pour 1995 et 1996, les montants indiqués furent ajoutés en plus ou en moins aux allocations (tableau 3) [38]. L’Université de Liège, les Facultés catholiques de Mons et la Faculté polytechnique de Mons se sont ainsi vu octroyer des moyens supplémentaires alors que les autres universités perdaient des moyens.

Tableau 3

Impact de l’annulation du moratoire en millions de BEF

Tableau 3
Montant Correction 1994-1996 1993 1994 1995 1996 Total ULG 3.467,0 47,0 94,2 94,2 235,4 UMH 677,9 -6,4 -13,0 -13,0 -32,4 FUSAGx 423,1 -7,6 -15,0 -15,0 -37,6 UCL 4.670,5 -9,2 -18,3 -18,3 -45,8 ULB 3.774,2 -15,8 -31,6 -31,6 -79,0 FUNDP 1.083,9 -6,9 -13,7 -13,7 -34,3 FUCAM 343,0 1,6 3,2 3,2 8,0 FPMs 527,4 0,7 1,2 1,2 3,1 FUSL 225,4 -3,4 -7,0 -7,0 -17,4 Total 15.192,4 0,0 0,0 0,0 0,0

Impact de l’annulation du moratoire en millions de BEF

Source : Décret du 14 mars 1995.

61L’annulation du moratoire et la fin de sa période d’application n’ont cependant pas été synonymes de nouveaux moyens financiers pour les universités francophones. Pour 1995, 1996 et 1997, l’allocation annuelle de fonctionnement attribuée à chaque institution était égale à 97,57 % des montants résultant de l’application de la loi de financement [39]. L’introduction de ce coefficient réducteur, à première vue anodine et dictée par la conjoncture budgétaire de la Communauté française, dénatura en fait tant l’esprit que les principes de la loi de financement. Bien que les éléments à prendre en compte dans le calcul de l’allocation étaient précisés dans la loi de 1971 et ses nombreuses modifications, les principes de base n’étaient plus appliqués. Le calcul consistait à répartir les moyens entre les universités en fonction du nombre d’étudiants à partir d’une enveloppe limitée qui résultait de l’adaptation du budget communautaire. De nouvelles restrictions ont également été imposées en matière de comptabilisation des étudiants subsidiables [40].

62Par ailleurs, les institutions universitaires francophones ne peuvent plus réclamer de droits d’inscription complémentaires aux étudiants originaires des États de l’Union européenne en vertu des articles 5 et 7 du traité sur l’Union européenne même s’ils ne sont pas pris en compte pour le calcul de l’allocation de fonctionnement. Aux étudiants non membres de l’Union européenne, les institutions universitaires sont autorisées à réclamer un droit d’inscription complémentaire dont le montant maximum est la moitié du coût forfaitaire par étudiant [41]. Ces étudiants ne sont pas pris en considération pour fixer le cadre du personnel des institutions universitaires. Le montant des droits d’inscription est donc destiné à supporter les dépenses de fonctionnement.

63Afin que le financement des universités dépende moins directement des fluctuations du nombre d’étudiants, le gouvernement de la Communauté française a instauré un mécanisme de lissage : les allocations de fonctionnement dépendent désormais du nombre d’étudiants globalisé sur les quatre années académiques précédentes. Ce système est progressivement mis en œuvre à partir de 1998 [42]. De plus, le gouvernement de la Communauté française a modifié la date à laquelle sont comptabilisés les étudiants inscrits. Jusqu’en 1996, cette date était fixée au 1er février de l’année académique, elle est désormais fixée au 1er décembre.

64Pour tenir compte des conséquences de l’introduction d’un numerus clausus en médecine, le décret du 14 juillet 1997 a introduit un cinquième groupe de financement en Communauté française.

65Le groupe S est composé des deux premières années d’études conduisant au grade de diplômé d’études spécialisées en médecine générale ou à un des grades de diplômé d’études spécialisées en médecine spécialisée. En effet, le nombre de médecins et de dentistes à agréer en 2004 a été fixé par le gouvernement fédéral à 700. Pour 2003, 2004 et 2005, le nombre de médecins diplômés sera approximativement réduit de 50 %. Ce nombre sera de 700 pour la première année, 650 pour la deuxième et 600 les années suivantes. Autrement dit, une moyenne de 650 diplômés contre actuellement 1.150 à 1.200 chaque année [43]. Ce quota sera réparti entre les Communautés flamande et française suivant la clé 60/40. La fixation du coût forfaitaire du groupe S obéit à des règles spécifiques [44] et n’entrera en vigueur qu’en 2000 avec la limitation du nombre d’étudiants en troisième année de médecine.

66Dans le tableau 4, nous synthétisons les moyens accordés à prix courants et à prix constants aux institutions francophones ainsi que l’évolution du nombre d’étudiants (inscriptions principales) et du nombre d’étudiants subsidiables l’année précédant l’année budgétaire depuis la communautarisation de l’enseignement. Sur la base de ces informations, nous calculons le montant de l’allocation à prix courants et à prix constants (prix de 1972) par étudiant et par étudiant subsidiable.

Tableau 4

Synthèse des moyens accordés aux universités francophones depuis la communautarisation

Tableau 4
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 En millions de BEF 12.763,4 13.554,0 14.243,4 14.917,6 15.311,0 15.957,9 16.065,9 16.291,0 16.461,0 En millions de BEF de 1972 4.398,5 4.492,3 4.616,2 4.704,1 4.710,6 4.821,9 4.765,1 4.737,9 4.752,2 Étudiants au 01/02 t-1 51.966 54.241 56.274 58.232 61.716 62.466 62.300 62.420 61.054 Étudiants subsidiables au 01/02 t-1 42.531 44.268 46.120 48.054 49.419 49.703 49.417 49.095 48.382 En milliers de BEF Montant par étudiant 246 250 253 256 248 255 258 261 270 Montant par étudiant subsidiable 300 306 309 310 310 321 325 332 340 En milliers de BEF de 1972 Montant par étudiant 85 83 82 81 76 77 76 76 78 Montant par étudiant subsidiable 103 101 100 98 95 97 96 97 98

Synthèse des moyens accordés aux universités francophones depuis la communautarisation

Sources : CREF, Fondation universitaire et calculs personnels.

67La première moitié des armées 1990 est marquée par une nouvelle augmentation de la population universitaire mais, depuis 1996, on semble assister à une baisse du nombre d’étudiants fréquentant l’enseignement universitaire. L’évolution des étudiants subsidiables est relativement similaire à celle des étudiants bien qu’elle soit influencée également par les mesures prises pour exclure de nouveaux étudiants du financement. L’autre variable importante dans le calcul des allocations de fonctionnement des universités est le coût forfaitaire (graphique 4). Depuis la communautarisation de l’enseignement, le gouvernement de la Communauté française fixe les coûts forfaitaires des différents groupes d’études. Par rapport à l’évolution du coût forfaitaire pendant les années 1980 (graphique 3), les coûts forfaitaires en francs constants semblent se stabiliser mais on n’a certainement pas assisté à une réévaluation du coût par orientation d’études (hors inflation).

Graphique 4

Évolution du coût forfaitaire (tranche 1) par groupe d’études à prix courants et prix constants (prix de 1972) pendant les années 1990

Graphique 4

Évolution du coût forfaitaire (tranche 1) par groupe d’études à prix courants et prix constants (prix de 1972) pendant les années 1990

Source : Moniteur belge et calculs personnels.

68Ainsi, en francs courants, on constate une légère augmentation des moyens par étudiant et par étudiant subsidiable entre 1990 et 1998 (tableau 4). Le montant par étudiant est passé de 246.000 francs en 1990 à 270.000 francs en 1998, et le montant par étudiant subsidiable de 300.000 francs à 340.000 francs. Mais, en francs de 1972, les montants par étudiant et étudiant subsidiable s’élèvent respectivement en 1998 à 78.000 et 98.000 francs.

Les projets de révision de la loi de financement des universités

69L’annulation du moratoire par la Cour d’arbitrage aurait dû donner un coup d’accélérateur aux réformes de l’enseignement universitaire, d’autant plus que la déclaration gouvernementale de 1992 précisait que « l’Exécutif entend préparer un aménagement de la loi de financement des universités ». Le système mis en place en 1971 était fondé sur le principe d’un financement lié directement aux coûts de la formation et supposait que les moyens nécessaires soient disponibles. En réalité, les difficultés financières des pouvoirs publics et l’accroissement considérable du nombre d’étudiants devaient conduire à des amendements successifs du mécanisme de financement des universités, avec pour unique objectif d’en limiter la charge financière. Après un quart de siècle d’application, le mécanisme initial, certes imparfait mais cohérent, avait été totalement dénaturé. De plus, les universités qui avaient été contraintes, pour rester compétitives et répondre à la demande et aux nécessités économiques, d’augmenter leur offre d’enseignement et d’accueillir de plus en plus d’étudiants étrangers, ne cessaient de réclamer des moyens supplémentaires. De toute évidence, une révision en profondeur du mécanisme et du financement s’imposait.

Le plan Lebrun

70Fin 1991, dès son entrée en fonction, le gouvernement PS-PSC de la Communauté française annonça deux projets majeurs en matière de politique universitaire : d’une part, la révision de la loi sur la collation des grades académiques et le programme des examens universitaires et d’autre part, une nouvelle loi de financement pour les universités. Au printemps 1994, alors que le premier projet (auquel les autorités universitaires avaient été largement associées) était en bonne voie [45], en matière de financement, seul le moratoire fut instauré pour bloquer l’enveloppe budgétaire au niveau des moyens alloués en 1992 (cf. p. 25).

71Pour sortir de cette période transitoire, le 30 mai 1994, le ministre PSC chargé des universités, M. Lebrun, rendait public un avant-projet de décret relatif au financement et une note technique sur le calcul futur de l’allocation de chaque institution. On peut résumer le principe du mécanisme projeté comme suit : chaque institution devait se voir attribuer, à partir de 1996, une allocation annuelle de départ (allocation de base) correspondant à son poids en nombre d’étudiants en 1994 (et déterminée selon le mécanisme de la loi de 1971) et une allocation dite variable. Le projet prévoyait que l’allocation variable de chaque institution serait liée d’une part, au montant budgétaire global (pour l’ensemble des institutions) que le gouvernement déciderait annuellement d’y consacrer et, d’autre part, aux variations respectives du nombre d’étudiants. Ce projet fut très mal accueilli tant par les autorités universitaires que par les étudiants, qui avancèrent de multiples raisons de mécontentement dont principalement :

  • l’indexation de l’allocation de base n’était ni définie ni garantie ;
  • l’expression « allocation de base » était trompeuse car elle ne désignait pas une part intangible de l’allocation globale. En effet, le mécanisme de calcul de l’allocation variable de chaque institution, lié aux variations respectives du nombre d’étudiants, pouvait conduire à l’attribution d’une allocation négative réduisant l’allocation de base ;
  • aucune garantie d’amélioration du financement n’était donnée ;
  • la complexité technique du mécanisme décrit dans le projet était telle qu’elle rendait ce dernier difficilement utilisable et qu’il était pratiquement impossible d’en simuler de façon fiable les incidences financières ;
  • le principe de la liaison des allocations de chaque institution à la variation, non plus de son nombre propre d’étudiants, mais de celui de toutes les institutions, ne pouvait qu’engendrer une chasse à l’étudiant au lieu d’instaurer un climat propice à la recherche de collaborations et de synergies ;
  • par un jeu de définitions nouvelles, le projet prétendait financer à l’avenir des programmes nouveaux (agrégation, doctorat, lutte contre l’échec,…) et des étudiants qui ne l’étaient pas auparavant (étudiants européens), alors que l’enveloppe financière globale n’était pas augmentée.
Face à ces nombreuses critiques, le projet fut retiré et remplacé quelques mois plus tard par une note d’initiative ministérielle portant sur les principes généraux de la réforme du financement des institutions universitaires (4 octobre 1994). Cette note reprenait, en fait, les principes du projet de décret mais prévoyait certaines garanties relatives à une augmentation des allocations de base et à l’existence d’une allocation variable minimum (à répartir). Les améliorations financières à atteindre progressivement au bout de six ans ne représentaient cependant que 3 % (466 millions) de l’enveloppe globale allouée au financement des universités. Le principe même d’une enveloppe limitée et le mécanisme de répartition entre les institutions restaient inchangés. Malgré les améliorations financières en regard du maintien du moratoire, le projet continua à susciter critiques et réprobations d’une part importante des acteurs de la communauté universitaire.

La contre-proposition des recteurs francophones

72Dès la mise en place du moratoire, le Conseil des recteurs francophones avait entamé une large réflexion sur les problèmes du financement des universités francophones qui aboutit à un premier mémorandum en février 1993. Celui-ci visait à trouver des solutions pour sortir du moratoire, obtenir le financement d’étudiants non subsidiables et mettre certaines mesures d’économies en œuvre. Après avoir rappelé qu’au cours de la décennie l’érosion des moyens alloués à l’enseignement universitaire se manifestait davantage que dans les autres niveaux d’enseignement, dont certains avaient vu, au contraire, leurs moyens augmenter, il constatait également que les moyens accordés aux universités pour ses autres missions (notamment la recherche), étaient soit inexistants soit tout aussi insuffisants. À ce titre, les recteurs francophones avaient déjà alerté les présidents de parti dans une lettre ouverte du 5 novembre 1991 dans laquelle ils exprimaient leur inquiétude sur l’avenir de la recherche en Communauté française et la nécessité de mettre à sa disposition les moyens dont disposaient à l’époque presque tous les pays européens. Ainsi, les recteurs proposèrent au ministre de l’Enseignement supérieur une liste de mesures immédiates dont notamment la suppression du moratoire, la prise en compte de certaines catégories d’étudiants non financés, etc.

73De plus, le Conseil des recteurs francophones demandait un rattrapage des moyens financiers des universités : il demandait que, entre 1995 et 2004, les coûts forfaitaires soient annuellement augmentés de manière forfaitaire de 2,7 % (cet accroissement s’ajoutant à toute autre révision du coût forfaitaire liée à l’évolution de l’indexation et des revalorisations barémiques). Cette demande ne visait pas à revenir au niveau du financement prévu initialement par les mécanismes de la loi de 1971, ce qui aurait exigé un accroissement budgétaire beaucoup plus important (l’effort demandé était de l’ordre de 1,2 milliard du budget global des universités alors arrêté à près de 15,5 milliards). En effet, l’impact des principales modifications de la loi de financement des universités votée en 1971 a été mesuré, notamment en termes de modification des nombres-planchers et plafonds et par le calcul, pour l’ensemble de la période 1971-1995, d’un coût forfaitaire par orientation d’études sur la base des données budgétaires de l’université libre de Bruxelles et selon les principes définis dans la loi de 1971 [46]. Ainsi, selon ces hypothèses, pour 1995 par exemple, si les nombres-planchers et plafonds définis dans la loi de 1971 avaient été maintenus, les universités auraient reçu 1,3 milliard supplémentaire. De même, l’application des nombres-planchers et plafonds de 1976 aboutit à un gain de 0,6 milliard. L’estimation des coûts forfaitaires telle qu’elle était définie dans la loi de financement et l’application des nombres-planchers et plafonds de 1971 accordent aux universités un montant supplémentaire de 6,3 milliards. La même estimation mais en tenant compte des nombres-planchers et plafonds de 1976 aboutit à un gain de 4,3 milliards.

74Les contacts avec le cabinet du ministre de l’Enseignement supérieur firent apparaître que l’idée d’un rattrapage tel que présenté par le Conseil des recteurs devait être abandonnée. Étant données les propositions du ministre dans les mois qui suivirent, le Conseil des recteurs francophones, confirmant son mémorandum de février 1993, déposait le 13 décembre 1994 une contre-proposition au projet de réforme de la loi de financement.

75Le Conseil se fixait deux objectifs : un rattrapage financier substantiel et une plus grande stabilité du financement. Pour atteindre ces objectifs, il proposait de procéder en deux étapes. De 1995 à 1998, une première phase de stabilisation et de rattrapage des moyens financiers serait intervenue. Ensuite, le nombre moyen d’étudiants lissé sur ces quatre années devait servir de base au calcul de l’allocation variable de 1999.

76Par rapport au montant de base atteint par chaque institution, la différence aurait pu être positive ou négative et les moyens supplémentaires disponibles répartis en conséquence, avec une application éventuelle d’un coefficient réducteur pour les accroissements ou les diminutions du nombre d’étudiants. La phase de croisière aurait ainsi commencé en 1999 : l’allocation de 1999 aurait été calculée sur la base des années 1995 à 1998, et l’allocation de chaque année suivante sur la base des quatre années qui la précédaient. De la sorte, le prescrit constitutionnel de l’égalité de traitement des institutions en fonction de leur nombre d’étudiants aurait été respecté, mais l’impact de l’évolution de la population étudiante aurait été annuellement limité.

77L’allocation de base à construire en quatre ans aurait été le résultat de la superposition de trois éléments. L’allocation 1995, premier élément constitutif de la base (B1), aurait été répartie entre les institutions selon les critères de la loi de 1971, mais en tenant compte d’une moyenne pondérée sur cinq ans du nombre d’étudiants de chacune d’entre elles (tableau 6). Cette part de l’allocation, indexée aurait été intangible. Le deuxième élément constitutif de la base (B2, 400 millions) aurait dû couvrir le financement de nouvelles catégories d’étudiants et aurait été réparti entre les institutions par tranches additionnelles de 100 millions par an réparties au prorata de leur nombre d’étudiants de l’Union européenne, d’étudiants en agrégation de l’enseignement secondaire supérieur et de doctorats. Le troisième élément constitutif de la base (B3, 600 millions), couvrant à la fois le financement à un taux correct des nouvelles catégories d’étudiants et le rattrapage du moratoire, aurait été réparti entre les institutions par tranches additionnelles de 150 millions par an selon la même clé que la part B1.

Tableau 6

Évaluation du financement des universités sur base de la contre-proposition des recteurs

Tableau 6
Allocation de base (Bl + B2 + B3) – 1995 à 1998 (Indexation non comprise) En millions deBEF B1 B2 B3 B1+B2+B3 B1+B2+B3 B1+B2+B3 B1+B2+B3 1995-1998 1ère tranche 1ère tranche 1995 1996 1997 1998 ULB 3.840,7 37,3 36,9 3.914,9 3.989,1 4.063,3 4.137,5 ULG 3.626,2 24,0 34,8 3.685,0 3.743,9 3.802,7 3.861,5 UMH. 687,3 0,5 6,6 694,4 701,5 708,6 715,7 FAGEM 427,9 1,6 4,1 433,5 439,2 444,9 450,6 UCL 4.829,5 31,0 46,4 4.906,9 4.984,2 5.061,6 5.138,9 FUNDP 1.149,9 4,5 11,0 1.165,5 1.181,1 1.196,7 1.212,3 FUCAM 310,8 0,0 3,0 313,8 316,8 319,8 322,7 FAPOM 511,4 1,1 4,9 517,4 523,4 529,4 535,3 FUSL 232,9 0,1 2,2 235,2 237,5 239,8 242,1 Total 15.616,6 100,0 150,0 15.866,6 16.116,6 16.366,6 16.616,6

Évaluation du financement des universités sur base de la contre-proposition des recteurs

Source : CREF.

78Le montant de l’enveloppe globale (B1 + B2 + B3) ainsi calculé pour les années 1995 à 1998 aurait progressé de 15.616 millions en 1994 à 16.617 millions en 1998. L’allocation de chaque institution ainsi restaurée aurait varié, à la hausse ou à la baisse à partir de 1999, en fonction de la variation propre du nombre d’étudiants, lissées sur une période de quatre ans. Bien que relancée à plusieurs reprises par le Conseil des recteurs durant les années 1995 à 1997, et même actualisée et précisée, cette contre-proposition ne fut pas acceptée et le débat fut provisoirement clôturé. La loi de 1971, modifiée par le blocage de l’enveloppe globale allouée aux universités (blocage connu sous le nom de coefficient réducteur) et par des dispositions relatives au financement des études de médecine consécutives à l’instauration d’une limitation du nombre des candidats acceptés pour ces études, continuait d’être appliquée dans les grandes lignes. Ce débat ne fut rouvert que par la note d’intentions politiques du 30 juin 1997 adressée par le ministre W. Ancion au Conseil des recteurs et qui ouvrait de nouvelles perspectives en termes de financement, de lutte contre l’échec, d’offre de formations, de rationalisation, de polyvalences, de spécialisation et d’adéquation des formations avec le marché.

Le plan Ancion

79Le 30 juin 1997, le ministre W. Ancion (PSC) exprimait sa volonté d’entamer une réflexion globale sur les universités incluant notamment la lutte contre l’échec, l’apprentissage des langues et la promotion des études en sciences exactes. Il souhaitait supprimer les restrictions imposées en 1982 sur le financement des troisièmes cycles, prévoyait un financement des études spécialisées et approfondies en fonction du nombre de diplômés et le financement des étudiants européens. Le ministre proposait également de trouver de l’encadrement supplémentaire et de le répartir plus adéquatement dans les deuxième et troisième cycles. Mais, étant donnée la situation budgétaire de la Communauté française, il ne fallait pas espérer à court terme de refinancement des universités et le ministre proposait le concept d’une enveloppe stabilisée. Lors d’une rencontre avec le ministre le 30 octobre 1997, les recteurs refusaient de substituer un financement basé sur une logique des besoins à un financement basé sur une logique des moyens de la Communauté. Ils s’opposaient également à la mise en place d’une enveloppe stabilisée au niveau de 1998 et réclamaient la suppression du coefficient réducteur.

80Après bien des polémiques sur sa déclaration d’intention, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche communiquait aux recteurs le texte, daté du 4 février 1998, d’un avant-projet de décret relatif au financement des institutions universitaires organisées ou subventionnées par la Communauté française. Cet avant-projet était destiné à remplacer la loi de 1971 telle qu’elle avait été de nombreuses fois amendée. Cependant, tout en restant inspiré des critères de la loi de 1971, le décret visait à garantir un accroissement progressif mais limité des moyens globaux alloués aux universités et à forcer les institutions à procéder à des regroupements d’activités et des réorientations de l’offre d’enseignement. Sans entrer dans le détail, et en passant sous silence les mesures transitoires, par rapport à la loi de 1971 le projet se caractérisait par les éléments suivants.

81Au niveau du financement, le projet fixait définitivement la somme globale des moyens alloués aux universités et institutions universitaires au niveau des moyens alloués en 1998 annuellement indexés. La variation globale du nombre d’étudiants (en baisse ou en hausse) n’intervenait plus pour la fixation de ces moyens. Cette fixation de l’enveloppe aurait, selon le ministre, pu permettre de freiner la concurrence entre les universités dans la chasse aux étudiants. L’enveloppe globale initiale aurait été ensuite répartie en deux sous-enveloppes : une partie dite ‘recherche’ correspondant à 40 % de l’enveloppe et une partie dite ‘enseignement’ correspondant à 60 % de l’enveloppe. À partir de l’an 2000, l’enveloppe recherche aurait dû être ajustée chaque année en fonction de l’évolution du PIB tandis que l’enveloppe enseignement aurait été indexée en fonction de l’évolution de l’indice-santé des prix à la consommation.

82Le projet répartissait chacune des deux sous-enveloppes entre les institutions au prorata des nombres respectifs d’étudiants de chacune des institutions. Pour ce faire, le nombre d’étudiants comptabilisés était transformé en nombre pondéré d’étudiants en tenant compte des orientations d’études (la pondération est proche de celle qui découlait des coûts forfaitaires) et de certains coefficients correcteurs. Le financement de chaque institution était lié non seulement à son nombre d’étudiants mais aussi à celui de toutes les autres institutions. La sous-enveloppe recherche devait être répartie entre les institutions au prorata de la moyenne du nombre pondéré d’étudiants financés de chacune d’entre elles calculée sur les dix dernières années. La sous-enveloppe enseignement devait être répartie entre les institutions au prorata de la moyenne du nombre d’étudiants de chacune d’entre elles calculée sur les quatre dernières années.

83Au niveau des critères de détermination du nombre d’étudiants subsidiables et de leur prise en considération, le projet reprenait les critères de la loi de 1971 et ses arrêtés d’application tels que modifiés à de nombreuses reprises mais procédait à certains aménagements. Ces aménagements étaient répartis en quatre catégories : critères structurels du calcul, critères liés à la ‘spécificité des étudiants’, critères liés aux programmes d’études et ‘critères de rationalisation’.

  1. Au niveau des critères structurels, la notion de ‘coût forfaitaire’ par orientation d’études était remplacée par la notion du nombre d’étudiants pondérés. Les orientations d’études restaient inchangées. Une nouvelle orientation d’études était créée, l’orientation E qui reprenait l’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur. Les facteurs de pondération qui remplaçaient les coûts forfaitaires étaient les suivants : 1 pour l’orientation A, 2 pour l’orientation B, 3 pour l’orientation C, 2,5 pour l’orientation D et 0,5 pour l’orientation E. Pour les orientations A, C, D, cette pondération n’était qu’une traduction des rapports existant entre les coûts forfaitaires par rapport au coût forfaitaire de l’orientation A. Pour l’orientation B, ‘l’ancienne pondération’ était de 1,88. L’orientation S (première et deuxième années de spécialisation INAMI médecine) devait voir le jour durant l’année académique 2000-2001, avoir un taux inférieur à l’orientation B jusqu’en 2005 et était ensuite directement incorporée dans l’orientation B. Les nombres-planchers qui garantissaient un financement minimum par orientation d’études ou sous-orientation quel que soit le nombre d’étudiants ainsi que les nombres-plafonds au-delà desquels le financement par étudiant était réduit, étaient supprimés. Le financement supplémentaire de certaines sous-orientations d’études et qui ne concernait que certaines institutions incomplètes était également supprimé. Cependant, entre 1999 et 2005, les universités auxquelles ces mesures auraient fait perdre de l’argent, auraient reçu un complément afin d’atteindre une allocation égale à celle de 1998. À partir de 2006, ce complément aurait diminué pour disparaître en 2010
  2. Au niveau des critères liés à la ‘spécificité’ des étudiants, les étudiants de l’Union européenne étaient désormais pris en compte, la tranche ‘de rayonnement’ (étudiants étrangers pris en considération) était réduite de 2 à 1 % du nombre d’étudiants belges et le financement des doctorats (qui n’étaient financés que pour l’année de défense de thèse) était affecté d’un coefficient 2 (comptabilisation également du diplôme obtenu). Par ailleurs, les doctorants, assistants ou chercheurs FNRS, étaient à l’avenir pris en compte pour le financement. Les diplômes d’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur étaient pris en considération (avec un financement égal à 50 % de l’orientation A (voir orientation E)) et les étudiants de 1ère génération (1ère année du 1er cycle) bénéficiaient d’un financement particulier (coefficient multiplicateur 1,2). Enfin, les étudiants doubleurs de dernière année de 2ème cycle n’étaient plus pris en considération.
  3. Au niveau des critères liés aux programmes d’études de troisième cycle, les études de DES (diplôme d’études spécialisées), DEA (diplôme d’études approfondies) et DEC (diplôme d’études complémentaires) étaient prises en compte pour un financement au ‘diplôme obtenu’ (qui ne tient pas compte de la durée des études) et non plus à l’étudiant inscrit’. Les programmes DEC, DES et DEA créés après le 30 septembre 1982 et non financés en raison de l’article 48 quater de la loi de 1971 étaient pris en considération.
  4. Au niveau des critères de rationalisation, des seuils de fréquentation étaient imposés pour que les étudiants soient pris en compte pour le financement. Pour être financés, les premiers cycles de base devaient compter une moyenne, sur les trois années précédentes, de 24 étudiants financés (36 étudiants si le cycle comprenait trois ans) et, pour les deuxièmes cycles de base de 16 étudiants financés (24 étudiants si le cycle durait plus que deux ans) en moyenne sur les trois aimées précédentes. Néanmoins, si les programmes d’études concernés étaient organisés en collaboration interuniversitaire ou par une seule institution de la Communauté française, il n’y avait pas de seuil. Pour être financés, les DES (non INAMI) et les DEA auraient dû compter, en moyenne, 10 diplômés financés durant les trois dernières années. Néanmoins, s’il s’agissait d’un programme interuniversitaire, il était pris en compte s’il y avait eu 10 diplômés l’année où il avait été déclaré (pas de moyenne calculée sur plusieurs années). Par contre, s’il était organisé par une seule institution de la Communauté française, il n’y avait pas de seuil.
Bien que constatant les avancées budgétaires proposées par le ministre, le Conseil des recteurs ne pouvait soutenir cet avant-projet de décret. Compte tenu de la disparité des habilitations des diverses institutions, qu’il s’agisse des programmes d’études ou des cycles autorisés, de telles modifications des critères n’étaient pas neutres. Diverses études du Conseil des recteurs se sont efforcées de simuler sur la période 1998-2010 l’évolution des allocations des différentes institutions en tenant compte des dispositions transitoires. Ces simulations ont nécessité les hypothèses techniques suivantes : lissage du nombre d’étudiants pour le passé, chroniques étudiantes clichées à partir du 1er février 1997 [47], taux de croissance du PIB de 2 % par an et calcul à francs constants.

84Sous l’hypothèse de l’indexation de 40 % de l’enveloppe destinée à la recherche par rapport à l’évolution du PIB (tableau 7), les simulations indiquent que malgré l’accroissement, en francs constants de l’enveloppe financière globale consacrée aux universités de près de 10 % au terme des onze ans, certaines institutions auraient vu leurs moyens se réduire significativement. Les grandes institutions ainsi que les FUNDP, les FUSL et la FUCAM auraient été les bénéficiaires de cette réforme alors que la FUSAGx, l’UMH et la FPMs subissaient une érosion de leurs moyens financiers. Pour ces dernières, la situation se révélait encore plus dramatique si l’accroissement de l’enveloppe financière n’était pas retenu (tableau 8).

Tableau 7

Évaluation du financement des universités sur base du plan Ancion (avec indexation)

Tableau 7
Allocations 1998 à 2010 (avec indexation) En millions 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 ULB 4.084,4 4.109,7 4.195,5 4.281,3 4.365,4 4.445,5 4.525,8 UCL 5.149,1 5.203,7 5.336,7 5.469,0 5.576,2 5.685,4 5.792,8 ULG 3.877,4 3.880,8 3.951,6 4.018,1 4.083,2 4.152,5 4.227,3 FUNDP 1.142,2 1.179,0 1.220,5 1.271,3 1.296,3 1.327,1 1.354,9 FUSAGx 4.4,3 446,5 430,2 415,7 417,9 419,2 423,9 UMH 749,4 736,9 717,8 703,8 708,4 712,7 721,8 FPMs 505,7 508,3 480,9 453,2 452,2 452,2 456,2 FUCAM 261,6 285,5 284,5 280,7 282,9 288,4 293,2 FUSL 237,4 243,1 246,9 253,8 257,9 263,0 268,2 Total 16.461,5 16.593,5 16.864,5 17.146,9 17.440,4 17.746,0 18.064,1 En pourcentage du total ULB 24,8 24,8 24,9 25,0 25,0 25,1 25,0 UCL 31,3 31,4 31,6 31,9 32,0 32,0 32,1 UlG 23,5 23,4 23,4 23,4 23,4 23,4 23,4 FUNDP 6,9 7,1 7,2 7,4 7,4 7,5 7,5 FUSAGx 2,8 2,7 2,5 2,4 2,4 2,4 2,3 UMH 4,5 4,4 4,3 4,1 4,1 4,0 4,0 FPMs 3,1 3,1 2,8 2,6 2,6 2,5 2,5 FUCAM 1,6 1,7 1,7 1,6 1,6 1,6 1,6 FUSL 1,4 1,5 1,5 1,5 1,5 1,5 1,5 Total 100 100 100 100 100 100 100

Évaluation du financement des universités sur base du plan Ancion (avec indexation)

Source : CREF
Tableau 8

Évaluation du financement des universités sur base du plan Ancion (sans indexation)

Tableau 8
Allocations 1998 à 2010 (sans indexation) En millions 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 ULB 4.084,4 4.077,0 4.095,7 4.110,9 4.120,7 4.123,7 4.124,3 UCL 5.149,1 5.162,6 5.210,1 5.252,0 5.264,4 5.274,3 5.278,9 ULG 3.877,4 3.850,3 3.857,3 3.857,2 3.853,9 3.852,0 3.852,3 FUNDP 1.142,2 1.169,5 1.191,3 1.221,3 1.224,4 1.231,4 1.234,7 FUSAGx 454,3 442,9 419,6 398,4 393,8 388,6 386,3 UMH 749,4 731,0 700,4 674,7 667,8 660,8 657,8 FPMs 505,7 504,1 468,8 434,0 426,0 419,1 415,7 FUCAM 261,6 283,0 277,4 269,4 267,1 267,5 267,2 FUSL 237,4 241,1 240,9 243,7 243,5 244,0 244,4 Total 16.461,5 16.461,5 16.461,5 16.461,6 16.461,6 16.461,4 16.461,6 En pourcentage du total ULB 24,8 24,8 24,9 25,01 25,0 25,0 25,0 UCL 31,3 31,4 31,6 31,9 32,0 32,0 32,1 Ulg 23,5 23,4 23,4 23,4 23,4 23,4 23,4 FUNDP 6,9 7,1 7,2 7,4 7,4 7,5 7,5 FUSAGx 2,8 2,7 2,5 2,4 2,4 2,4 2,3 UMH 4,5 4,4 4,2 4,1 4,1 4,0 4,0 FPMs 3,1 3,1 2,8 2,6 2,6 2,5 2,5 FUCAM 1,6 1,7 1,7 1,6 1,6 1,6 1,6 FUSL 1,4 1,5 1,5 1,5 1,5 1,5 1,5 Total 100 100 100 100 100 100 100

Évaluation du financement des universités sur base du plan Ancion (sans indexation)

Source : CREF

85Dès lors, les recteurs proposèrent une modification du texte soumis à la consultation qui, tout en gardant ses aspects positifs, ne plaçait plus certaines institutions dans des difficultés budgétaires. Sans modifier la constitution de l’enveloppe financière globale des universités telle qu’elle était décrite dans l’avant-projet de décret, les recteurs proposèrent de la répartir selon d’autres règles. L’enveloppe globale était partagée en deux parties. La première partie était égale au montant de l’année budgétaire 1998 indexée. Elle était répartie entre les universités selon les critères de la loi de 1971 et le décret du 14 juillet 1997. La deuxième partie était constituée du montant de l’augmentation de l’enveloppe globale tel qu’il résultait de l’adaptation de 40 % de cette enveloppe à la croissance nominale du PIB et de son indexation. Cette partie était répartie entre les universités en fonction des nouveaux critères définis dans l’avant-projet de décret (nouveaux étudiants pondérés subsidiables, moyenne sur quatre ans dès la quatrième année).

86Le 3 mars 1998, lors d’une rencontre avec les recteurs, le ministre estima que leur proposition ne répondait pas à ses objectifs initiaux. Il estimait qu’il fallait acter la diminution du nombre d’étudiants et que l’accroissement proposé ne pouvait être acquis que dans un système de rationalisation. De plus, il soulignait l’obligation de financer les étudiants européens. Néanmoins, le ministre accepta qu’un groupe de travail regroupant des représentants du Conseil des recteurs et du cabinet du ministre réfléchisse à des réformes dans le cadre d’une enveloppe stabilisée.

87Conscients que la liaison au PIB allait se révéler particulièrement aléatoire, les recteurs demandèrent qu’à partir de l’enveloppe de 1998 stabilisée, une croissance des moyens soit garantie (pour au moins les cinq années à venir) d’environ 0,8 % par an. Celle-ci devait être obtenue par l’utilisation d’un coefficient adapté ainsi que l’organisation d’un système de compensation visant à maintenir l’enveloppe de chacune des institutions au niveau de 1998 pendant au moins cinq ans avec cinq années supplémentaires sous certaines conditions de réorganisation. Les recteurs proposaient les amendements suivants : suppression des pénalités pour les ‘bisseurs’ de première candidature, y compris en médecine et dentisterie, financement de l’agrégation indépendamment du principe d’une seule inscription finançable, déverrouillage de l’article 48 quater pour les troisièmes cycles et dans les limites des habilitations actuelles.

88À la fin du mois de mars 1998, le cabinet du ministre décida de revoir certaines pondérations alors que d’autres institutions avançaient d’autres modifications. Ainsi, malgré un élan de solidarité des recteurs visant à assurer une autre distribution des moyens et face à un manque de garantie quant à l’accroissement des moyens prévus par le décret, l’avant-projet ne put recueillir ni consensus politique, ni consensus au sein des universités. Par souci de pacification, le Conseil des recteurs avança une nouvelle proposition en mai 1998 dans laquelle il demandait une augmentation des moyens sur cinq ans de 1 % des 16,461 milliards accordés aux universités. Ainsi, toutes les universités, à l’exception de l’UMH, auraient connu une progression de leurs moyens financiers en francs constants à l’horizon 2003. Cette mesure aurait permis d’éviter les effets pervers de l’enveloppe fermée et réduit les pertes liées à l’application stricte des dispositions prévues dans le décret. De plus, elle donnait la possibilité aux universités de développer les synergies souhaitées par le ministre ainsi que de rencontrer les besoins nouveaux (meilleur encadrement pédagogique des étudiants de première génération). Enfin, elle évitait de recourir à tout régime transitoire dont la mise en œuvre s’avérait difficile. Cette proposition des recteurs ne fut pas retenue par le ministre. Depuis juin 1998, l’avant-projet de décret se substituant à la loi de 1971 a été abandonné. Seul subsista un projet de modification de diverses dispositions de la loi de 1971 visant, selon son exposé des motifs, à répondre aux besoins d’urgence, qui deviendra le décret du premier octobre 1998.

Le décret du 1er octobre 1998

89Après de nombreuses discussions au Parlement de la Communauté française, le projet de décret fut voté le 23 septembre 1998 [48]. Les principales modifications introduites dans la loi de financement du 27 juillet 1971 sont présentées ci-dessous. Le décret prévoit la suppression des coefficients réducteurs, la stabilisation des moyens mis à la disposition des institutions universitaires au niveau de 1998 (16,461 milliards) [49] et l’indexation de ces moyens en fonction de l’évolution de l’indice-santé des prix à la consommation durant l’année budgétaire concernée. Le décret prévoit également la possibilité d’indexation, à partir de l’année budgétaire 2000, de l’enveloppe stabilisée en fonction de l’évolution du taux de croissance nominale du PIB de l’année précédente dans les limites des disponibilités budgétaires si l’évolution de ce dernier est supérieure à la variation de l’indice-santé des prix à la consommation. Cette différence éventuelle sera affectée exclusivement à la recherche. La notion de cout forfaitaire, élément de base du calcul de l’allocation de fonctionnement, est remplacée par l’adoption d’une pondération adéquate pour chaque orientation d’études étalonnée en fonction des coûts forfaitaires actuels.

90À partir de l’année budgétaire 1999, la répartition des moyens entre les institutions se fera en fonction du rapport entre le nombre d’étudiants pondérés de chaque institution et du nombre d’étudiants pondérés pris en considération pour le financement de l’ensemble des institutions universitaires. Ce rapport est exprimé en pourcentage et quatre décimales. Les coefficients de pondération applicables aux étudiants subsidiables par orientation d’études [50] correspondent au rapport actuel des coûts forfaitaires de la tranche 1 des différentes orientations d’études au coût forfaitaire de l’orientation A dont la valeur est fixée à 1. Les coefficients des autres groupes sont : 1,8776 pour B, 3,0341 pour C et 2,5180 pour D. Le coefficient de pondération fixé pour le groupe E (financé à partir de l’année académique 1998-1999) est d’application à partir de cette même année académique et est égal à 0,5. Ce groupe E correspond à l’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur. La fixation du coefficient de pondération du groupe S est relativement complexe et est définie dans l’article 29bis § 3 de la loi du 27 juillet 1971 modifiée par le décret du 1er octobre 1998 [51].

91À partir de l’année budgétaire 1999, le nombre d’étudiants pondérés de chaque institution est égal au nombre d’étudiants subsidiables des quatre années académiques précédentes divisé par quatre, dans chaque orientation d’études (maintien du principe de lissage sur quatre ans), multiplié par le coefficient de pondération par étudiant correspondant. Pour l’année budgétaire 1998, il est tenu compte du nombre d’étudiants subsidiables pour les années académiques 1995-1996 et 1996-1997 divisé par deux. Pour l’année budgétaire 1999, on tient compte du nombre d’étudiants subsidiables pour les années académiques 1995-1996, 1996-1997 et 1997-1998 divisé par trois.

92Dans le tableau 9 sont présentés le nombre d’étudiants pondérés de chaque institution universitaire pour les années académiques 1995 à 1999 ainsi que le nombre d’étudiants pondérés pris en compte pour calculer l’allocation de fonctionnement à charge du budget du Ministère de l’Enseignement (autrement dit après application du principe de lissage). Comme on peut le constater, l’application du lissage permet d’atténuer la réduction du nombre d’étudiants subsidiables pris en compte pour le calcul de l’allocation de fonctionnement.

Tableau 9

Nombre d’étudiants pondérés par année académique et à charge du budget de l’Enseignement

Tableau 9
Nombre d’étudiants pondérés par année académique 1er février 1995 1er février 1996 1er février 1997 1er janvier 1998 ULB 17.672 17.986 17.873 17.786 UCL 22.817 22.789 22.421 22.311 ULG 17.541 17.338 16.710 16.390 FUNDP 5.285 5.056 4.975 4.787 FUSAGx 1.937 2.039 1.952 2.075 UMH 3.388 3.365 3.217 3.162 FPMs 2.236 2.225 2.214 2.249 FUCAM 1.247 1.094 1.200 1.210 FUSL 1.119 1.060 1.023 1.133 Total 73.241 72.951 71.585 71.102 Nombre d’étudiants pondérés à charge du budget de l’Enseignement Année budgétaire 1996 1997 1998 1999 ULB 17.672 17.986 17.929 17.882 UCL 22.817 22.789 22.605 22.507 ULG 17.541 17.338 17.024 16.813 FUNDP 5.285 5.056 5.015 4.939 FUSAGx 1.937 2.039 1.996 2.022 UMH 3.388 3.365 3.291 3.248 FPMs 2.236 2.225 2.219 2.229 FUCAM 1.247 1.094 1.147 1.168 FUSL 1.119 1.060 1.041 1.072 Total 73.241 72.951 72.268 71.879

Nombre d’étudiants pondérés par année académique et à charge du budget de l’Enseignement

Source : Conseil des recteurs francophones

93Selon l’exposé des motifs, le taux d’échec a atteint des proportions alarmantes en candidatures et même en licences :

  • 38 % seulement des étudiants réussissent leur première année d’études sans redoubler ;
  • 17 % des étudiants échouent lors de leur dernière année de deuxième cycle ;
  • il y a chaque année 12.000 étudiants entrants pour seulement 7.000 étudiants sortants ;
  • le coût de l’échec en première année du premier cycle peut être évalué à environ 2,3 milliards de francs [52].
Afin de lutter contre l’échec, le décret accorde plus de moyens en faveur des étudiants de première génération. Les institutions universitaires sont incitées à mettre en place des systèmes de remédiation et de réorientation. Tout étudiant inscrit pour la première fois en première candidature bénéficie d’une pondération supplémentaire de 10 % (application à partir de l’année académique 1998-1999) [53]. Le supplément d’allocation ainsi obtenu doit être investi dans des programmes d’accueil, d’évaluation, de réorientation et de remédiation des étudiants. Chaque institution doit établir un rapport sur les mesures prises en la matière permettant de démontrer que les moyens dégagés par l’application du coefficient de pondération préférentiel sont utilisés en faveur des étudiants de première génération. Remarquons que ce financement supplémentaire des étudiants de 1er cycle s’inscrit dans le cadre d’une enveloppe fermée. Il s’agit donc d’un transfert de moyens et non d’un refinancement.

94Le décret étend les catégories d’étudiants pris en considération pour le financement. Une seule inscription par étudiant peut toujours être prise en compte pour une institution universitaire au cours de l’année académique précédant l’exercice budgétaire [54]. Désormais, les étudiants de l’Union européenne sont pris en compte pour déterminer l’allocation de fonctionnement des universités. Les étudiants ressortissants d’un État non membre de l’Union européenne ne correspondant pas aux catégories d’étudiants hors Union européenne finançables et ne payant pas des droits complémentaires sont désormais pris en considération pour le financement à raison de 1 % du nombre total d’étudiants belges pris en compte pour le financement de l’année académique précédente par orientation d’études. Autrement dit, la ‘tranche de rayonnement’ est réduite de 2 % à 1 %. Malgré cette réduction, la Communauté française exprimait sa volonté de continuer à financer à concurrence de 1 % les étudiants étrangers ressortissants d’un État non membre de l’Union européenne : « Il s’agit d’un statu quo dès l’instant où il est constaté que, dans l’actuel quota de 2 % au moins, la moitié des étudiants provient d’un État membre de l’Union européenne. Par ailleurs, les étudiants apatrides sont assimilés aux étudiants étrangers ressortissants d’un pays non membre de l’Union européenne. » [55]

95Enfin, le décret supprime, à partir de l’année académique 1998-1999, l’article 6 § 3, 2° de l’arrêté royal du 4 août 1972 qui prévoyait que les étudiants inscrits pour la deuxième fois dans une première année d’études d’une candidature qui donne accès au doctorat en médecine, chirurgie et accouchements ou à la licence en science dentaire n’étaient pris en considération pour le financement qu’à concurrence de 80 % du coût forfaitaire auquel ils étaient normalement financés.

96Cependant, le décret introduit de nouveaux critères d’exclusion des étudiants subsidiables. Outre les dispositions prévues initialement, il prévoit que les étudiants qui redoublent une dernière année d’études de deuxième cycle de base ne sont plus pris en considération pour le financement.

97Remarquons qu’une des premières mesures du nouveau gouvernement (PS-PRL-Écolo) de la Communauté française issu des élections du 13 juin 1999 a été de supprimer la règle dite des ‘bisseurs-trisseurs’. Le décret du 28 octobre 1999 [56] supprime deux (les plus importantes) des mesures prises à l’initiative du ministre J.-P. Grafé (PSC) en 1996 [57] visant à responsabiliser les étudiants. Ces mesures consistaient à supprimer le financement des étudiants qui échouaient trop souvent en candidatures et devaient permettre d’endiguer le taux d’échec. La nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur, Fr. Dupuis (PS), désirait supprimer certaines aberrations liées à l’application de ces mesures. En effet, dans les faits, plusieurs institutions d’enseignement supérieur ont continué à inscrire les étudiants exclus du financement. De plus, une exception au non-financement des études des ‘trisseurs’ autorisait leur financement à condition qu’ils changent ou aient changé de type d’enseignement au cours des trois années en passant par exemple de l’enseignement universitaire vers les hautes écoles et vice versa. Cela autorisait par exemple un étudiant en kinésithérapie à poursuivre les mêmes études en changeant de type d’établissement mais cela interdisait à un étudiant en sciences économiques dans un établissement d’opter pour une orientation artistique dans la même haute école [58]. Désormais, deux catégories d’étudiants sont à nouveau prises en considération pour le financement : d’une part, les étudiants échouant en deuxième candidature après avoir précédemment échoué en première candidature (les doubles bisseurs) et d’autre part, les étudiants triplant une même année d’études pour autant qu’ils changent d’orientation (qu’ils restent ou non dans le même type d’enseignement). Remarquons cependant que la suppression de la règle du ‘double bisseur’ est valable pour tous les étudiants à l’exception de ceux de médecine et de science dentaire à propos desquels le décret précise « qu’il convient, en cas d’échec en première candidature, de réorienter le plus tôt possible, compte tenu des limitations à l’accès de ces filières d’études prises pour se conformer aux dispositions imposées par le gouvernement fédéral » [59]. Ainsi, ne sont pas pris en considération pour le calcul de l’allocation de fonctionnement [60] :

  • les étudiants qui, après avoir été régulièrement inscrits deux fois dans la même année d’études d’un cursus universitaire conduisant à un grade académique qualifié déterminé tel que visé à l’article 7, § 1er du décret du 5 septembre 1994, sans l’avoir réussie, s’y inscrivent dans les cinq ans qui suivent leur dernier échec ;
  • les étudiants qui, après avoir été régulièrement inscrits trois fois dans une même année d’études dans l’enseignement supérieur de la Communauté française (quel que soit le domaine ou la catégorie) sans l’avoir réussie, s’y inscrivent dans les cinq ans qui suivent leur dernier échec ;
  • à partir de l’année académique 1998-1999, les étudiants qui, après avoir été régulièrement inscrits deux fois dans une même année d’études d’une même qualification ou tout autre subdivision d’études dans la même discipline, dans un système d’enseignement supérieur belge ou étranger à l’exception de l’enseignement supérieur non universitaire, sans l’avoir réussie, s’inscrivent dans l’enseignement universitaire dans cette même discipline dans les cinq ans qui suivent leur dernier échec ;
  • à partir de l’année académique 1998-1999, les étudiants qui, après avoir été régulièrement inscrits trois fois dans une même année d’études ou tout autre subdivision d’études, quelle que soit la discipline étudiée, dans un système d’enseignement supérieur belge ou étranger, y compris l’enseignement supérieur non universitaire, sans l’avoir réussie, s’inscrivent dans l’enseignement universitaire dans les cinq ans qui suivent leur dernier échec ;
  • les étudiants qui s’inscrivent à des études conduisant à un grade de premier ou de deuxième cycle alors qu’ils ont déjà obtenu, dans les cinq années qui précèdent la demande d’inscription, deux grades académiques dans l’enseignement supérieur universitaire ou non universitaire [61] ;
  • les étudiants qui s’inscrivent à des études conduisant à un grade de troisième cycle visé à l’article 6, § 5 du décret du 5 septembre 1994 relatif au régime des études universitaires et des grades académiques alors qu’ils ont déjà obtenu dans les cinq ans qui précèdent la demande d’inscription un grade visé au même article 6, § 5 [62] ;
  • les étudiants qui s’inscrivent, dans les cinq ans qui suivent leur dernier échec, à la deuxième année des études conduisant au grade de candidat en médecine ou de candidat en science dentaire, alors qu’ils ont déjà été pris trois fois en compte pour le financement des deux premières années de ces mêmes études ;
  • les étudiants qui s’inscrivent à une année d’études du deuxième cycle conduisant au grade de docteur en médecine qui ne disposent pas de l’attestation prévue pour l’accès au troisième cycle [63].
Le nouveau décret adapte le montant des droits d’inscription complémentaires que les universités peuvent réclamer aux étudiants apatrides ou ressortissants d’un État tiers à l’Union européenne qui ne remplissent pas les conditions pour être assimilés aux étudiants subsidiables. Le montant de ces droits d’inscription s’élève, au maximum, à cinq fois le montant des droits d’inscription ordinaires multiplié par le coefficient de pondération de l’orientation correspondante. Cette dernière mesure se justifie par le remplacement du principe du coût forfaitaire par un coefficient de pondération dans le mécanisme de calcul de l’allocation de fonctionnement des universités, mais elle ne change rien dans les faits.

98Afin de marquer l’importance de la formation initiale des maîtres, le décret organise le financement, moyennant un volume horaire minimum [64], des diplômés de l’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur. La pondération retenue est identique quelle que soit l’orientation d’études à laquelle l’agrégation est associée et est égale à la moitié de la pondération appliquée aux études classées dans l’orientation A. Par ce décret, le ministre entend encourager la coopération interuniversitaire et la mobilité étudiante en finançant davantage certains étudiants qui suivent certains cours et travaux dans d’autres institutions universitaires ou d’enseignement supérieur belges ou étrangères et en finançant préférentiellement des programmes organisés de manière interuniversitaire (coefficient de pondération multiplié par 1,5 pour les études de troisième cycle à l’exception des doctorats et les études complémentaires de deuxième cycle organisées de manière interuniversitaire). Le ministre espère ainsi forcer les universités à mettre en commun l’organisation de certains cours et à rationaliser leur offre (on compte environ 330 filières de troisième cycle). En contrepartie, le ministre lève le blocage imposé par l’article 48 quater au financement des programmes d’études spécialisées ou approfondies et des doctorats avec thèse créés après le 30 septembre 1982 et ce, dans le respect, dans un délai de trois ans, de seuils minimaux de nombres de diplômés d’études spécialisées et approfondies.

99Le ministre insiste sur la promotion des doctorats qui, en fonction de l’accélération des connaissances, sont indispensables au maintien du potentiel scientifique et technique de la Communauté. Les doctorats sont donc pris en compte pour le financement en multipliant la pondération retenue pour l’orientation d’études dans laquelle le doctorat est classé par un coefficient égal à 2 pour l’année de présentation de la thèse (application à partir de l’année académique 1998-1999) [65].

100Enfin, le décret instaure le financement des études complémentaires (DEC), spécialisées (DES) et approfondies (DEA) sur la base du nombre de diplômés de ces programmes [66]. Pour rappel, jusqu’aujourd’hui, les étudiants suivant des études approfondies, spécialisées ou complémentaires qui n’étaient pas financées au moment de l’entrée en vigueur de l’article 48 quater de la loi du 27 juillet 1971 (soit avant le 30 septembre 1982) n’étaient pas comptabilisés dans les étudiants subsidiables. À partir de l’année académique 1998-1999, ces diplômes d’études sont financés selon la pondération des études de base auxquelles ces DEC, DES et DEA sont associés. À partir de l’année académique 2001-2002, ces programmes (à l’exception des DEC) ne seront pris en compte pour le financement que s’ils remplissent une des trois conditions suivantes :

  1. s’ils sont organisés par une institution universitaire, ils devront avoir compté un nombre minimum de diplômes fixé par le gouvernement (entre 7 et 15) en moyenne durant les trois dernières années au cours desquelles ils auront été organisés ;
  2. s’ils sont organisés dans le cadre d’une collaboration interuniversitaire [67], ils devront avoir compté un nombre minimum de diplômés fixé par le gouvernement (entre 7 et 15) ;
  3. s’ils sont organisés par une seule institution universitaire, quel que soit le nombre de diplômés, ils devront avoir été repris sur une liste fixée par le gouvernement après avis collégial unanime des recteurs.
Il convient de remarquer que la prise en compte de catégories d’étudiants qui étaient auparavant exclues du calcul de l’allocation de financement se fait dans le cadre d’une enveloppe budgétaire fermée.

101Contrairement au premier projet du décret, l’application des nombres-planchers et plafonds est maintenue. Ainsi, étant donné que la notion de coût forfaitaire a disparu, le décret du 1er octobre 1998 définit des coefficients de pondération de la tranche 2 pour les étudiants subsidiables qui dépassent le nombre-plafond : 0,8474 pour le groupe A, 1,4776 pour le groupe B, 2,3237 pour le groupe C et 2,0656 pour le groupe D.

102Le tableau 10 présente un exemple du nouveau calcul de l’allocation de fonctionnement pour une université complète. Comme initialement, à chaque orientation d’études correspondent les données sur le nombre d’étudiants subsidiables ainsi que les nombres-planchers et plafonds. Désormais, les mécanismes de financement ne servent plus à déterminer l’allocation correspondant à chaque institution mais sa part respective dans le montant total des moyens fixés par le gouvernement. Pour rappel, les notions de coûts forfaitaires ont été remplacées par des pondérations par orientation d’études. De plus, une nouvelle orientation d’études a été créée pour tenir compte des agrégations de l’enseignement secondaire supérieur (groupe E) [68].

Tableau 10

Exemple de calcul de l’allocation de fonctionnement d’une université complète selon les dernières mesures prises dans le décret du 1er octobre 1998

Tableau 10
Grouped’études Nombres-planchers Nombres-plafonds Étudiants subsidiables Tranche 1 Tranche 2 Pondération Tranche 1 Pondération Tranche 2 Nombre d’étudiants pondérés A 2.173 4.346 7.766 4.346 3.420 1 0,8474 7.244,1 B 1.574 3.148 2.704 2.704 0 1,8776 1,4776 5.077,0 C 1.003 2.006 900 1.003 0 3,0341 2,3237 3.043,2 D 68 2,5180 2,0656 171,2 E 20 0,5 10 Total 11.438 8.053 3.420 15.545,5

Exemple de calcul de l’allocation de fonctionnement d’une université complète selon les dernières mesures prises dans le décret du 1er octobre 1998

Source : Calculs personnels.

103Ainsi, pour déterminer la part d’une institution dans le montant total des moyens accordés par le gouvernement, on multiplie le nombre d’étudiants subsidiables par orientation d’études par la pondération correspondante en tranche 1. Mais, si le nombre d’étudiants subsidiables est inférieur au nombre-plancher, le nombre d’étudiants pris en considération est le nombre-plancher que l’on multiplie par la pondération en tranche 1. De même, si le nombre d’étudiants subsidiables est supérieur au nombre-plafond, on multiplie ce nombre-plafond par la pondération en tranche 1 et on applique la pondération de la tranche 2 au nombre d’étudiants subsidiables qui dépasse ce nombre-plafond. Rappelons que les conditions pour qu’un étudiant soit financé ont été élargies : prise en compte des étudiants européens, financement des troisièmes cycles et des agrégations au nombre de diplômés, etc. L’allocation d’une institution est égale à sa part dans le montant total des moyens accordés par le gouvernement au prorata de son nombre d’étudiants pondérés. Ce nombre d’étudiants pondérés est calculé pour chaque orientation d’études.

104Ainsi, pour l’orientation A, le nombre d’étudiants subsidiables (7.766) est supérieur au nombre-plafond (4.346). On détermine, dès lors, le nombre d’étudiants en tranche 1 (le nombre-plafond) auquel on applique la pondération de la tranche 1, et le nombre d’étudiants tranche 2 (nombre d’étudiants subsidiables moins le nombre-plafond) auquel on applique la pondération de la tranche 2. On obtient ainsi un nombre d’étudiants pondérés de 7.244,1. Pour l’orientation B, on prend en considération le nombre d’étudiants subsidiables car il est inférieur au nombre-plafond et supérieur au nombre-plancher. Tous les étudiants sont donc en tranche 1. Pour l’orientation C, comme le nombre d’étudiants subsidiables (900) est inférieur au nombre-plancher (1.003), on utilise le nombre-plancher et la pondération en tranche 1 pour déterminer le nombre d’étudiants pondérés. Dans notre exemple, cette université complète qui compte 11.438 étudiants subsidiables obtient donc un nombre d’étudiants pondérés de 15.545,5. La répartition des moyens (fixée par le gouvernement) entre les institutions se fait en fonction du rapport entre le nombre d’étudiants pondérés de chaque institution et du nombre total d’étudiants pondérés dans les institutions de la Communauté française. Il est évident que le montant obtenu dépend toujours très fort de la répartition des étudiants entre les orientations d’études (l’orientation C ayant la pondération la plus élevée) mais, aussi de la répartition des étudiants entre les institutions puisqu’il s’agit désormais de répartir un montant déterminé par le gouvernement en fonction du nombre d’étudiants subsidiables pondérés respectifs de chacune d’entre elles. Enfin, remarquons que la prise en compte de nouveaux étudiants subsidiables à l’inscription (étudiants européens par exemple) ou au diplôme (troisièmes cycles, agrégations, etc.) n’a pas augmenté les moyens mis à la disposition des universités mais influence uniquement la répartition des moyens existants entre celles-ci.

105La philosophie du système per capita garantissait une judicieuse affectation du financement public de l’enseignement universitaire : ce système imposait aux différentes institutions d’avoir pour objectif stratégique non seulement la qualité de leur enseignement mais aussi l’accès largement ouvert aux élèves de l’enseignement secondaire. Dissocier le financement du nombre d’étudiants pourrait inciter certaines institutions à sacrifier ce dernier objectif sur l’autel du premier. De plus, le financement forfaitaire ne permet pas aux universités de faire face à une fluctuation importante (y compris entre les facultés) du nombre d’étudiants qu’elles accueillent. Faute d’ajustement du financement au nombre d’étudiants, l’institution doit adapter son nombre d’étudiants à son financement (stable). En conséquence, une des ‘grosses’ universités pourrait limiter le nombre d’étudiants qu’elle accueille et forcer ainsi les autres institutions à faire de même. On voit mal, en effet, comment ces dernières (quelle que soit leur volonté propre de préserver l’accès à leur enseignement) pourraient accueillir le surplus d’étudiants (non financés) rejetés par cette université  !

106Le Conseil des recteurs a réalisé différentes simulations pour mesurer l’impact du décret du 1er octobre 1998. Ces simulations comparent, à l’horizon 2003, la répartition des moyens (hors indexation et à population universitaire clichée au 1er janvier 1998) selon les principes de la loi de financement de 1971 et ses modifications et les nouveaux principes définis dans le décret du 1er octobre 1998. Les simulations effectuées sur la base des modifications de la loi de 1971 par le décret du 1er octobre 1998 n’indiquent pas de variations significatives des allocations actuelles de fonctionnement compte tenu des incertitudes relatives aux nombres d’étudiants respectifs des institutions. Cependant, une série de transferts entre institutions profiteront in fine davantage aux petites institutions puisque ces accroissements de moyens sont effectués dans une enveloppe fermée (tableau 11) : tout accroissement de l’une s’opère au détriment d’une autre. Une révision fondamentale de la loi de 1971 est donc reportée à plus tard.

Tableau 11

Conséquences du décret du 1er octobre 19981

Tableau 11
Montants à charge du budget en 1998 Montants à charge du budget 2003 de la Communauté française (hors indexation) Répartition des moyens selon la loi de 1971 Répartition des moyens selon la loi de 1971 Répartition des moyens selon la loi de 1971 modifiée par le décret du 1er octobre 1998 Allocation en millions NPES1 Allocation en millions NPES1 Allocation en millions ULB 4.083,9 17.786 4.117,7 17.864 4.072,3 UCL 5.148,9 22.311 5.165,3 22.400 5.106,4 ULG 3.877,7 16.390 3.794,5 16.862 3.844,0 FUNDP 1.142,4 4.787 1.108,2 5.052 1.151,7 FUSAGx 454,6 2.075 480,4 2.124 484,3 UMH 749,6 3.162 732,0 3.199 729,3 FPMs 505,5 2.249 520,6 2.282 520,2 FUCAM 261,3 1.210 280,1 1.226 279,5 FUSL 237,2 1.133 262,3 1.199 273,3 Total 16.461,1 71.102 16.461,1 72.209 16.461,0

Conséquences du décret du 1er octobre 19981

1 NPES correspond au nombre pondéré d’étudiants subsidiables. La population universitaire est clichée au 1er janvier 1998.
Source : CREF, Financement des universités, août 1998.

Le rapport des recteurs honoraires A. Bodson et J. Berleur

107À l’exception de déclarations du monde académique, scientifique et parfois industriel, les débats sur l’enseignement universitaire semblent volontairement écarter toute réflexion sur ses missions et fonctions. Ainsi, lorsque l’on aborde le problème du financement de l’Université (et c’est encore plus vrai aujourd’hui qu’hier) c’est principalement la rationalisation de l’offre de formation des institutions qui est au cœur des débats. Selon les intervenants, l’accent est mis soit sur une rationalisation des troisièmes cycles, soit sur une rationalisation plus large de la carte géographique des institutions universitaires.

108Le problème de la rationalisation de la ‘carte géographique’ n’avait certainement pas fait l’objet d’une réflexion approfondie en Communauté française. Le rapport d’août 1998 de la Commission de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique du Parlement de la Communauté française élaboré à l’occasion de l’examen du projet de décret de financement modifiant la loi de 1971 témoigne largement de cette absence de vision. On n’y trouve pas trace d’analyses scientifiques qui ont pu amener certains responsables à parler de fusions d’institutions, d’autres de confédérations et certains de regroupements par pôles philosophiques ou encore en fonction des spécificités ou spécialisations. Il était question d’accords entre la Faculté agronomique de Gembloux et l’UCL pour la biotechnologie animale ou végétale et entre les Facultés universitaires de la Paix de Namur et l’ULG pour les formations juridiques. Le ministre évoquait la constitution de cinq pôles (Bruxelles, Liège, Mons, Namur et Louvain-la-Neuve) tout en laissant l’entière liberté aux institutions de les réaliser. D’autres avançaient l’idée de trois grands pôles : un laïc, un catholique et un officiel regroupant les neuf universités de la Communauté française. Le pôle officiel serait formé de l’ULG et des FUSAGx, le pôle laïc de l’ULB, de l’UMH et des FPMs et le pôle catholique de l’UCL, de la FUCAM, des FUNDP et des FUSL.

109À l’autonome 1997, le ministre chargea les deux recteurs honoraires A. Bodson (ULG) et J. Berleur (FUNDP) de la mission de lui rédiger un rapport sur les enjeux importants pour notre système universitaire à l’aube du 21ème siècle. Le 13 octobre 1998, les recteurs honoraires remettaient au ministre de l’enseignement supérieur et de la Recherche scientifique un rapport intitulé « Quelles urgences pour une politique universitaire en Communauté française de Belgique ». Ce rapport traite de nombreuses questions telles que les missions de l’université, l’organisation des cours, l’offre d’enseignement, les relations entre l’université et l’enseignement supérieur non universitaire, l’université virtuelle, les rapports entre le monde universitaire et le monde politique, les problèmes de l’évaluation, etc.

110Parmi les propositions des deux recteurs honoraires, celles relatives à la restructuration de l’offre universitaire ont été des plus controversées. Selon les recteurs honoraires, « l’examen de la situation actuelle attire toujours l’attention sur les mêmes institutions », à savoir l’UMH, la FPMS, les FUCAM, la FUSAGx et les FUSL. « Ce qui inquiète dans ces institutions ‘points de mire’, ce sont les privilèges budgétaires, sans cesse rappelés (nombres-planchers, coûts forfaitaires plus favorables pour certains étudiants), l’étroite diversité disciplinaire et le risque de non-compétitivité surtout au plan international, faute d’atteindre une taille critique satisfaisante. Ces inquiétudes risquent de s’accroître, de nuire a l’attractivité des institutions et de les réduire davantage encore. » [69] Parmi plusieurs opportunités décrites dans le rapport, les deux recteurs honoraires privilégient « la constitution, dans cinq villes, de cinq pôles universitaires (Bruxelles, Liège, Louvain-la-Neuve, Mons et Namur) de taille suffisante, pluridisciplinaire, physiquement intégrés, qui répondent aux caractéristiques essentielles : santé budgétaire, diversité, taille critique ». Ainsi, ils en concluent que « les trois institutions montoises, sous peine de colonisation du Hainaut, doivent construire un ensemble fort et performant sur le modèle anversois par exemple, que la FUSAGx doit s’associer, sous une forme ou une autre, à plus grand qu’elle, sous la responsabilité de son pouvoir organisateur, la Communauté française et que les FUSL doivent renforcer et valoriser leurs collaborations ». Les deux recteurs admettent que, comme les implantations existantes ne peuvent être déracinées, leur proposition de réorganisation ne peut se faire qu’en développant des collaborations. Ces propositions ont suscité de nombreuses réactions du milieu universitaire.

111Selon J.-P. Lambert [70], vice-recteur des Facultés universitaires Saint-Louis, l’analyse des deux recteurs révèle, pour ce qui concerne le traitement de tous les concepts centraux de la problématique (qu’il s’agisse des concepts de ‘taille critique’, de ‘spécialisation’ des universités, des ‘regroupements, rapprochements’, etc.), des insuffisances fondamentales qui procèdent de l’une ou de plusieurs des tares suivantes : absence de définition préalable rigoureuse des concepts utilisés ensuite de façon ‘floue’ et parfois contradictoire au sein d’un même texte, incohérences logiques internes à l’analyse, postulats assénés sans argumentation, etc. On se peut se défaire de l’idée qu’il s’agissait ‘d’emballer’ une rapide démonstration menant à des conclusions prédéterminées. Tout observateur lucide perçoit qu’elles déboucheraient sur un renforcement des deux institutions dont les auteurs sont issus, qui finissent par avouer, avec quelque candeur, que « si le paysage proposé est retenu, il ne garantit pas nécessairement une plus grande efficacité de l’ensemble ». Enfin, J.-P. Lambert s’interroge sur le choix de privilégier le modèle des pôles universitaires. Ce modèle, fondé sur la constitution d’entités appelées à se faire contrepoids, procède d’un mode d’organisation fondamentalement différent du modèle de réseau qui s’impose de plus en plus au niveau européen et mondial (programmes Erasmus et Socrates au niveau des échanges d’étudiants, développement des programmes européens de recherche, constitution de réseaux thématiques de recherche, …). Ce dernier modèle « constitue à la fois le modèle de l’avenir et la voie de l’apaisement nécessaire » [71].

112Du côté de l’Université de Mons-Hainaut, même s’il est d’accord sur un pôle universitaire montois, le recteur A. Landercy ne veut pas d’un rapprochement de façade avec la Faculté polytechnique et la Faculté universitaire catholique. « Il faut donc une fusion, même si des phases transitoires sont organisées et non pas une confédération d’institutions comme à Anvers » [72]. « Il faut absolument que nous passions outre nos petites vues sous-régionalistes. Ensuite, il sera question de négocier un rapprochement avec Valenciennes par exemple sur le plan européen » [73].

113Le Conseil des recteurs francophones se donna un délai de réflexion avant de commenter les différentes recommandations des deux recteurs honoraires de Namur et de Liège. En mars 1999, il commenta le rapport et se dit déçu d’une part, de l’image négative des universités présentée et, d’autre part, du peu de cas fait du financement des universités. Pour les recteurs francophones, « les institutions universitaires de la Communauté française ne sont pas dans une situation qui requiert la réanimation d’urgence » [74]. En effet, pour un coût financier identique par habitant, la Belgique produirait 100 diplômés universitaires actifs (pour 40 en Suède, 64 en Allemagne, 68 au Royaume-Uni, 93 en France et 96 aux États-Unis, seuls les Pays-Bas feraient mieux avec 113). Notre pays produirait également 100 publications scientifiques (pour 41 en Suède, 44 aux États-Unis, 51 en Allemagne, 60 en France, le Royaume-Uni faisant mieux avec 104). De plus, il constate que les universités francophones, avec des ressources correspondant à 78 % de celles des universités flamandes accueillent un nombre relativement équivalent d’étudiants et produisent 23 % de publications en plus (si on tient compte du nombre d’habitants) [75]. De plus, si on fixe à 100 le nombre de diplômés universitaires lors de l’instauration de la loi de financement en 1971, il est aujourd’hui à 200. Dans le même temps, les ressources financières des universités sont restées, en francs constants, au même niveau qu’en 1971. « Les universités ne sombrent donc pas dans la médiocrité mais demandent en revanche un juste financement de leurs activités. » [76]

114Au niveau de la restructuration de l’offre universitaire, le Conseil des recteurs souligne qu’aucune étude sérieuse n’a démontré à ce jour que les performances des institutions sont proportionnelles à leur taille et que la Communauté française, contrairement à l’idée répandue, n’a pas un nombre plus important d’institutions universitaires par habitant que d’autres pays européens. Selon une étude du recteur de la VUB, E. Witte [77], aucune étude sérieuse n’a démontré à ce jour que d’un point de vue économique, du point de vue de la qualité de l’enseignement et de la recherche ou d’un point de vue pédagogique ou culturel, les institutions de faible ou de grande taille étaient plus performantes les unes que les autres. Récemment, dans un rapport plus circonstancié, le comité de l’éducation de l’OCDE [78] s’attachait à défendre les institutions de grande comme de petite taille et n’hésitait pas à affirmer que « les universités répandes au Danemark et en Suède démontrent de façon convaincante que la réussite des études et l’influence économique et culturelle peuvent être l’apanage des petits établissements ».

115Cette préoccupation assez récente de restructuration de l’architecture de notre système d’enseignement supérieur devrait aussi nous amener à réfléchir sur la ‘carte géographique’ des universités de la Communauté française. Mais, ne nous trompons- nous pas de carte ? Il est peut-être impératif de substituer à la carte de la Communauté française, espace géographique limité, la carte de l’Europe voire celle du monde. Néanmoins, sur la question de la nécessité de rapprochements entre les universités francophones, le recteur de l’ULB, J.-L. Vanherweghem, déclarait récemment : « Il y en a déjà (des rapprochements), même s’il est vrai que les universités francophones collaborent plus avec les consœurs étrangères qu’entre elles. Cela s’explique peut-être parce qu’elles sont déjà complémentaires. Ne dramatisons pas. ». Et d’ajouter : « plutôt que de susciter des collaborations par des contraintes budgétaires, le ministre devrait songer à des incitants » [79]. La question est alors posée : les synergies, les rapprochements, les collaborations doivent-ils continuer à s’envisager au sein de la Communauté française comme ses représentants politiques (toutes tendances confondues) semblent le penser ou doivent-ils intégrer une autre dimension ? Est-il vraiment absurde d’avoir deux facultés des sciences économiques dans une même ville, si elles peuvent démontrer leurs pertinences régionales et internationales ? De plus, on ne peut oublier que si la qualité est un objectif, il est difficile de la garantir en l’absence de concurrence et de points de comparaison. Il ne doit pas exister beaucoup d’activités performantes en plein désert et on peut craindre que la seule comparaison entre institutions de la Communauté française ne puisse constituer un élément de référence international.

116Pour le Conseil des recteurs, « si néanmoins, pour des motifs qui seraient étrangers à tout souci de qualité et d’efficience, une volonté politique devait émerger pour encourager des rapprochements d’institutions universitaires, cela ne pourrait se faire qu’avec le plein consensus des institutions concernées ». Les universités de la Communauté française souhaitent l’apaisement qui n’est possible que « si le pouvoir politique reconnaît la spécificité des universités et leur rôle primordial pour le développement culturel, économique et social, leur accorde le financement légitime que méritent leurs efforts, abroge les effets pervers des lois de financement qui incitent à la concurrence sauvage et met en place les incitants à la coopération interuniversitaire dans le respect du libre choix de chacune des institutions » [80].

117Le Conseil des recteurs est conscient qu’il n’est pas possible pour la Communauté française d’octroyer aux universités un montant supplémentaire correspondant aux nombreuses restrictions qu’elles ont subies. Cependant, il estime qu’un montant de 1 milliard de plus, soit 18 milliards au total, devrait être alloué aux universités pour couvrir leurs besoins les plus urgents et répondre aux défis de demain [81]. Pour y faire face, les recteurs ont défini sept priorités : le développement dans l’enseignement universitaire des nouvelles technologies de la communication et de l’information (particulièrement dans les bibliothèques), le maintien et la promotion du multilinguisme des diplômés quelle que soit leur discipline, le rétablissement de l’équilibre entre recherche fondamentale et recherche appliquée, la mise en place d’écoles doctorales compétitives au niveau international, le recrutement d’enseignants et de chercheurs de haut niveau en offrant des carrières académiques et scientifiques attractives. Une réponse adéquate à ces priorités ne peut consister à faire mieux avec les moyens existants. Pour les recteurs, « la survie des universités et, a fortiori, le développement d’objectifs ambitieux passent par un nécessaire refinancement ».

Conclusion

118Pour permettre aux universités de remplir au mieux leurs missions permanentes dans le contexte social et économique d’aujourd’hui et pour garantir à chacun de recevoir l’éducation la plus élevée possible compatible avec ses aptitudes, il y a lieu de revoir l’organisation et le financement des universités, mais sans les détourner de leurs fonctions spécifiques ou diminuer la qualité de leurs activités et de leurs diplômés. Cependant, toute réflexion sur l’avenir des universités et leur financement doit rester cohérente avec les limites des moyens publics disponibles. L’enseignement universitaire doit être resitué dans l’ensemble des appareils éducatifs francophone, flamand et fédéral, lesquels s’intègrent dans un contexte économique, social et culturel dont les manifestations diffèrent au niveau international, national, communautaire, régional et local. Il faut se garder de régler séparément les problèmes sans penser à leurs interrelations, ou encore de régler partiellement certaines questions en fonction d’un souci conjoncturel en compromettant toute solution ultérieure de questions plus fondamentales. Réglementer les moindres détails, lutter contre les abus éventuels, réels ou imaginaires ou adopter des normes de financement entravant toute initiative indispensable à l’adaptation aux évolutions futures, voire à la mise en place d’une réflexion stratégique, seraient autant de réponses inadéquates au problème posé.

119Toute réflexion sur une nouvelle réforme du système de répartition des crédits de fonctionnement entre les divers établissements universitaires devrait répondre aux conditions suivantes [82] :

  • se fonder sur des critères objectifs de répartition qui reflètent les besoins réels spécifiques de chaque institution en matière d’enseignement et de recherche ;
  • s’appliquer aussi bien aux universités complètes qu’aux institutions incomplètes et permettre le calcul, pour chaque institution, d’une enveloppe budgétaire globale que chaque institution serait libre d’utiliser en toute liberté et conformément à ses objectifs et à sa politique propre [83] ;
  • prévoir un réajustement annuel de cette enveloppe budgétaire en fonction de la fluctuation des éléments constitutifs de la base du calcul et des besoins nouveaux.
Aucun système ne satisfera le monde universitaire et les citoyens s’il se limite à répartir des moyens nettement insuffisants par rapport aux besoins. Le pire des systèmes est celui qui associe le partage entre les institutions d’un forfait global (une enveloppe fermée) à une répartition par étudiant, car il cumule les effets négatifs des deux mécanismes. Ce système est cependant actuellement en vigueur en Communauté française de Belgique et a été confirmé par le décret d’octobre 1998.

120Des systèmes de répartition des moyens entre les institutions trop élaborés peuvent induire des effets pervers que même des simulations mathématiques ne peuvent révéler. Si le financement est assuré sur une base per capita, celle-ci ne peut servir qu’à déterminer la dotation financière globale attribuée à une institution pour couvrir ses dépenses, l’institution devant être libre de son affectation en fonction de ses objectifs : l’autonomie est indispensable à la qualité, l’adaptation et la rationalisation de sa gestion propre. Aucune transformation d’un système existant et fonctionnant en état de pénurie ne peut être acceptée si elle a pour effet d’abîmer davantage encore certains des acteurs. De façon générale, le changement devra être accompagné de moyens supplémentaires. Dans la recherche de financements nouveaux, il ne faut pas perdre de vue que même si les droits d’inscription sont très modiques par rapport aux coûts des études, les étudiants participent déjà de façon significative aux frais de leur formation du fait du coût d’opportunité et des nombreux frais accessoires que les études entraînent. Il est presque inconcevable de vouloir former des diplômés à la fois généralistes, prêts à apprendre, et des produits finis, prêts à l’emploi, immédiatement rentables dans l’entreprise. Ne conviendrait-il pas de trouver des cofinancements pour la formation ultra spécialisée que certains souhaitent ? Des formules de financement positives dépassant les bases traditionnelles et incitant les institutions à investir dans l’innovation et le changement s’imposent.

121Enfin, la compétitivité de la Communauté française ainsi que celle des Régions wallonne et de Bruxelles-capitale de même que leur survie intellectuelle et industrielle sont déterminées par la façon dont elles transmettront leur savoir, mobiliseront et accroîtront leurs ressources scientifiques et intellectuelles et assureront leur mise en application. L’impact de la recherche s’exerce entre autres par son rôle formateur sur le personnel enseignant, par son soutien à la formation continue, par les services rendus aux citoyens au niveau de la santé, de l’éducation, de l’environnement, etc., par son action stimulante pour l’activité économique dont la liaison obligée avec la recherche fondamentale assure le développement à long terme, et par le maintien et l’amélioration de la compétitivité des entreprises grâce à la qualification de la main-d’œuvre et aux transferts technologiques. Il n’est pas nécessaire de rappeler que le financement public de la recherche en Belgique se situe à un niveau déplorable. Avec 53 milliards de francs en 1996, soit 0,65 % du PIB, la Belgique se situe nettement en dessous de la moyenne européenne [84]. Un autre indicateur de la pauvreté de la recherche dans notre pays est celui du faible nombre de doctorats par rapport à nos voisins européens, alors qu’il s’agit d’un passage quasi obligé vers la carrière de chercheur. Les fonds publics sont la source principale de financement de la recherche fondamentale, et principalement la part attribuée à celle-ci dans l’allocation de fonctionnement des universités. En effet, le système de financement des universités instauré en 1971 fut conçu pour lier le financement de l’enseignement et celui de la recherche et contribuer ainsi à préserver leur interpénétration. Ce système devait être complété par une législation spécifique pour la recherche. Dans l’attente de celle-ci, les universités ont consacré une partie de leur allocation de fonctionnement à la recherche fondamentale. Dépendant de la même enveloppe budgétaire, ces moyens ont évidemment subi les mêmes restrictions que les moyens accordés au financement de l’enseignement. C’est donc la recherche fondamentale qui est particulièrement affectée par le retard de la Belgique, alors qu’une recherche fondamentale dynamique est indispensable au maintien du climat d’innovation nécessaire pour assurer une recherche appliquée et un développement industriel de qualité et qu’elle est également la base d’une bonne formation [85].

122Lors de la présentation d’une étude sur les problèmes actuels de l’enseignement et de la recherche universitaire réalisée par le Bacas (Belgian Royal Council of Applied Sciences) en 1994, A. Jaumotte, ancien recteur et ancien président du conseil d’administration de l’ULB, dressa un constat amer sur les moyens de la recherche fondamentale en Belgique mais ajouta : « Le miracle belge, c’est que nous parvenons, avec des moyens dérisoires, a faire une recherche de qualité. » [86] En effet, comme le confirme notamment une étude menée par l’ULB et la RUCA [87] en 1998, en ce qui concerne la position scientifique de la Belgique, les indicateurs révèlent un nombre de publications et co-publications supérieur à la moyenne européenne et une augmentation de l’internationalisation des équipes de recherche. De même, une étude bibliométrique récente, réalisée par le FNRS, établit qu’en Belgique francophone, entre 1992 et 1996, 93,5 % des publications scientifiques sont issues des universités et que le nombre moyen annuel de ces publications (en sciences exactes et biomédicales) est de 0,80/millier d’habitants, ce qui témoigne d’une production scientifique plus importante que celle de nos voisins français (0,65), allemands (0,58) et flamands (0,65) [88].

123Mais si l’on souhaite amener notre communauté scientifique à un niveau décent de financement de la recherche dans l’Union européenne, une augmentation sensible des moyens est indispensable notamment pour remplacer le matériel de base devenu obsolète et il est nécessaire d’élaborer un plan de redressement de la recherche scientifique (engagement de chercheurs définitifs au FNRS et dans les universités, accueil de chercheurs post-doctoraux venant en particulier de pays étrangers, engagement de personnel technique, …). Enfin, il est primordial de préserver l’organisation et le financement suffisant du Fonds national de la recherche scientifique dont la mission de promotion de la recherche est essentielle pour notre société. Au niveau financier, il faut bien reconnaître que le nouveau décret du 1er octobre 1998 ne résout que très partiellement le problème du financement de la recherche fondamentale en augmentant légèrement la dotation au FNRS.

124Ainsi, dans les réflexions et débats futurs et l’élaboration de nouvelles politiques en matière universitaire, les pouvoirs publics ne doivent jamais perdre de vue que les moyens alloués à l’enseignement et en particulier à l’enseignement universitaire ainsi qu’à la recherche, constituent un investissement dans la formation de capital humain collectif et non privé dont les externalités bénéficient à la société tout entière.

Notes

  • [1]
    Pour une comparaison des dépenses accordées aux différents niveaux d’enseignement, cf. F. Thys-Clement, « Le financement de l’enseignement supérieur », Revue française de Finances publiques, Paris, 1989 ; T. Van Den Poel, « Evolutie van de financierbare studenten en van de werkingstoelagen aan de Belgische Fronstalige Universitaire Instellingen in de periode 1971-1987 », Universiteit en Beleid, n° 4, juillet 1988 ; OCDE, Les systèmes éducatifs en Belgique : similitudes et divergences, Ministerie van de Vlaamse Gemeenschap, Departement Onderwijs, Ministère de l’Éducation, de la Recherche et de la Formation et Verwaltung der Deutschsprachigen Gemeinschaft, Abteilung Unterricht, Bruxelles-Eupen, 1991 ; B. Bayenet et O. Bosteels, Le financement des universités en Belgique, sous la direction de S. Bodson et F. Thys-Clément, Éditions de l’Université de Bruxelles, Bruxelles, 1998.
  • [2]
    Institut d’études du droit de l’école, Le financement des Universités en Communauté française de Belgique, Bruxelles, 1992.
  • [3]
    Conseil des recteurs, Mémorandum relatif au financement des institutions universitaires, Bruxelles, février 1993.
  • [4]
    Ce montant minimum garanti pourrait être porté à 73 millions (article 47 de la loi de financement des universités du 27 juillet 1971 modifié par le décret du 1er octobre 1998).
  • [5]
    Pour une analyse des dépenses sociales et d’investissement des universités ainsi que des moyens attribués par le Ministère de la Coopération au développement, cf. B. Bayenet et O. Bosteels, op. cit. ; E. Bragard-Desoroux, « Le financement du système universitaire belge », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1261-1262, 1991.
  • [6]
    Pour une analyse de l’enseignement universitaire flamand, cf. B. Bayenet et O. Bosteels, 1998, op. cit.
  • [7]
    Ministre des Sciences et des Arts du gouvernement H. Carton de Wiart (catholique-libéral-socialiste, 20 novembre 1920 – 20 novembre 1921).
  • [8]
    Ministre des Sciences et des Arts du gouvernement G. Theunis (catholique-libéral, 16 décembre 1921-5 avril 1925).
  • [9]
    M. Coulon, Les subsides scolaires en Belgique : des origines jusqu’au pacte de 1958, Doc. n° 153, Ligue de l’Enseignement, Bruxelles, 1959.
  • [10]
    Dans le cas de l’École des mines et de la métallurgie de Mons, ces subsides étaient payés jusqu’en 1928 sur le budget du Ministère de l’Industrie et du Travail. À partir de la loi de 1930, ces subsides étaient payés sur le budget de l’Instruction publique. M. Coulon, 1959, op. cit.
  • [11]
    Pour une analyse détaillée de la période 1960-1971, cf. G Dejean et C.-J. Binnemans, L’université belge. Du pari au défi. Études des problèmes de l’enseignement supérieur, Éditions de l’Institut de sociologie, ULB, Bruxelles, 1971.
  • [12]
    CNPS, Avis et conclusions sur l’application des mesures contenues dans la loi du 9 avril 1965 ainsi que sur les problèmes posés par l’expansion universitaire, Commission spéciale de l’expansion universitaire, Doc. CS/44 fd, 5 avril 1968.
  • [13]
    J.-L. Demeulemeester, « Les réformes de l’enseignement supérieur en Belgique », Mimeo, ULB, 1994.
  • [14]
    « Le problème de l’expansion universitaire en Belgique » I, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 266-267, 1964.
  • [15]
    H. Janne était le ministre de l’Éducation nationale et de la Culture dans le gouvernement Lefèvre-Spaak (social-chrétien – socialiste, 25 avril 1961 – 24 mai 1965).
  • [16]
    R Troisfontaines et M. Welsch, Les problèmes universitaires, Rapport au ministre de l’Éducation nationale, Ministère de l’Éducation nationale, novembre 1976.
  • [17]
    P. Vanden Boeynants – W. De Clercq (social-chrétien – libéral, 15 mars 1966 – 7 février 1968).
  • [18]
    « Les derniers développements de l’affaire de Louvain » I, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 394, 1968.
  • [19]
    C Dejean et C.-J. Binnemans, 1971, op. cit.
  • [20]
    Cf. « L’Université de Louvain et la question linguistique » I, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 173, 1962 ; « L’Université de Louvain et la question linguistique » II, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 178, 1962 ; « L’affaire de Louvain », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 333-334, 1966 ; « Évolution et implications de l’affaire de Louvain » I, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 358, 1967 ; « Évolution et implications de l’affaire de Louvain » II, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 358, 1967 ; « Les derniers développements de l’affaire de Louvain » I, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 394, 1968 ; « Les derniers développements de l’affaire de Louvain » II, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 394, 1968.
  • [21]
    Cf. « Le dédoublement linguistique de l’université libre de Bruxelles » I, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 458, 1969 ; « Le dédoublement linguistique de l’université libre de Bruxelles » II, Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 463, 1969 ; A. Despy-Meyer et A. Uyttenbrouck, Les 150 ans de l’ULB, Éditions de l’Université de Bruxelles, Bruxelles, 1984.
  • [22]
    D. Deom, Paradoxes du régime juridique des universités, Institut belge des sciences administratives, Administration publique, Bruxelles, 1982.
  • [23]
    CNPS, 1968, op. cit.
  • [24]
    Les dépenses liées aux charges de pension et d’éméritat, les dépenses sociales en faveur des étudiants, les investissements et les charges financières qui en résultent, les dépenses liées à l’exploitation des cliniques et hôpitaux (autres que celles liées à l’enseignement et la recherche) qui relèvent de la législation sur les hôpitaux sont exclues des dépenses de fonctionnement et financées par d’autres dispositions. Pour une analyse du financement de ces autres dépenses, cf. B. Bayenet et O. Bosteels, 1998, op. cit.
  • [25]
    Entre 1972 et 1976, il existait cinq groupes d’études. Les changements les plus importants concernaient les groupes B, C, D et E. Les licences et doctorat en éducation physique faisaient partie du groupe C. Le groupe D qui concernait les licences et doctorat en sciences vétérinaires disparut et fut englobé dans le groupe C. Le groupe E regroupant les licences et doctorat en sciences agronomiques devint le groupe D.
  • [26]
    Loi programme du 5 janvier.
  • [27]
    Pour une analyse de l’évolution des étudiants AGCD et des moyens accordés par l’Administration de la Coopération au développement, cf. B. Bayenet et O. Bosteels, 1998, op. cit.
  • [28]
    Cette dernière mesure (2 %) a été appliquée progressivement année d’études après année d’études et pour la première fois pour le calcul de l’allocation de fonctionnement de l’année budgétaire de 1977 sur la base du nombre d’étudiants belges subsidiables des premières et deuxièmes candidatures de 1976. Les étudiants étrangers considérés mais inscrits dans une autre année d’études sont pris en considération dans la limite de 5 %.
  • [29]
    Pour une analyse des institutions incomplètes, cf. B. Bayenet et O. Bosteels, 1998, op. cit.
  • [30]
    Loi du 5 janvier 1976.
  • [31]
    C. Truffin, « La dérive universitaire », Gordes, Institut de sociologie de l’université libre de Bruxelles, 1982.
  • [32]
    R. Troisfontaines et M. Welsch, 1976, op. cit.
  • [33]
    Pour une analyse de ces différentes modifications de la loi, cf. B. Bayenet et O. Bosteels, 1998, op. cit.
  • [34]
    C Truffin, 1982, op. cit.
  • [35]
    Pour une analyse plus détaillée cf. B. Bayenet, M. Feron, V. Gilbert et F. Thys-Clément, Le fédéralisme budgétaire : mode d’emploi, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2000.
  • [36]
    P. Bouillon, « La Cour d’arbitrage casse le moratoire des universités », Le Soir, 13 mai 1994.
  • [37]
    P. Bouillon, « Quelle parade au moratoire défunt ? », Le Soir, 14 mai 1994.
  • [38]
    Exposé des motifs du décret du 14 mars 1995.
  • [39]
    Décrets des 22 décembre 1994, 5 août 1995 et 27 juillet 1996.
  • [40]
    Article 27, § 7 de la loi du 27 juillet 1971 inséré par la loi du 21 juin 1985 (article 16), remplacé par le décret-programme de la Communauté française du 25 juillet 1996 (article 50, § 1er) et le décret du 17 juillet 1978 portant des mesures urgentes en matière d’enseignement (article 53).
  • [41]
    Décret du 25 juillet 1996.
  • [42]
    Décret-programme de la Communauté française du 25 juillet 1996.
  • [43]
    J.-P. Dercq, « Réguler à marche forcée », Le Matin, 24 juin 1999.
  • [44]
    Article 29 de la loi du 27 juillet 1971 modifiée par le décret du 14 juillet 1997.
  • [45]
    Il fut d’ailleurs voté par le Parlement de la Communauté le 5 septembre 1994.
  • [46]
    B. Bayenet et O. Bosteels, 1998, op. cit.
  • [47]
    Autrement dit à population étudiante et répartition par discipline et cycle inchangées au 1er février 1997.
  • [48]
    Décret de la Communauté française du 1er octobre 1998 modifiant la loi du 27 juillet 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires.
  • [49]
    Le montant de base pour les compléments d’allocations visés à l’article 34 (égalité de traitement) est fixé à 202,4 millions (article 4 du décret du 1er octobre 1998).
  • [50]
    Les programmes d’études sont désormais regroupés en six orientations d’études : les groupes A, B, C et D comme définis précédemment, le groupe E (l’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur) et le groupe S (les deux premières années d’études conduisant au grade de diplômé d’études spécialisées en médecine générale ou à un des grades de diplômé d’études spécialisées en médecine spécialisée).
  • [51]
    De plus, les étudiants subsidiables inscrits à des études dans des institutions incomplètes conduisant à l’obtention des grades de premier, deuxième et troisième cycles en sciences de gestion sont multipliés par 1,1657 (à partir de l’année académique 1995-1996). Cette mesure correspond au supplément d’allocation de fonctionnement dont bénéficiaient ces mêmes institutions en tenant compte d’un coût forfaitaire spécifique pour cette orientation d’études.
  • [52]
    Exposé des motifs de l’avant-projet de décret modifiant la loi du 27 janvier 1971 sur le financement et le contrôle des institutions universitaires.
  • [53]
    Pour les étudiants inscrits pour la première fois en première année qui sont autorisés à répartir leur première année sur deux ans, le décret du 31 mai 1999 prévoit que ces étudiants sont multipliés par 1,1 la première année académique au cours de laquelle ils répartissent leur première année d’études et multipliés par 0,9 la deuxième année académique au cours de laquelle ils répartissent leur première année d’études. Les étudiants qui échouent à l’issue de la deuxième année académique au cours de laquelle ils ont réparti leur première année d’études sont multipliés par 0,5.
  • [54]
    Est également régulièrement inscrit l’étudiant qui suit certains cours et travaux dans d’autres institutions universitaires ou d’autres établissements d’enseignement supérieur en vertu d’accords visés aux alinéas 2 à 4 de l’article 20 du décret du 5 septembre 1994 relatif au régime des études universitaires et des grades académiques (article 2 du décret du 1er octobre 1998 modifiant l’article 27 de la loi du 27 juillet 1971).
  • [55]
    Exposé des motifs et commentaires des articles du projet de décret modifiant la loi du 27 juillet 1971, 23 juin 1998.
  • [56]
    Décret de la Communauté française du 28 octobre 1999 relatif à l’inscription, au financement et à la réorientation des étudiants de l’enseignement supérieur.
  • [57]
    Décret-programme de la Communauté française du 25 juillet 1996 portant diverses mesures concernant les fonds budgétaires, les bâtiments scolaires, l’enseignement et l’audiovisuel.
  • [58]
    « Le décret bisseurs-trisseurs voté », Le Matin, 20 octobre 1999.
  • [59]
    Exposé des motifs du décret du 28 octobre 1999.
  • [60]
    Article 27, § 7 de la loi du 27 juillet 1971 inséré par la loi du 21 juin 1985 (article 16), remplacé par le décret-programme de la Communauté française du 25 juillet 1996 (article 50, § 1er), le décret du 17 juillet 1978 portant des mesures urgentes en matière d’enseignement (article 53), le décret du 31 mai 1999 portant certaines réformes en matière d’enseignement supérieur, le décret du 31 mai 1999 portant certaines réformes en matière d’enseignement supérieur et le décret du 28 octobre 1999 relatif à l’inscription, au financement et à la réorientation des étudiants de l’enseignement supérieur.
  • [61]
    Soit deux grades académiques visés à l’article 6 §§ 2 et 4 du décret du 5 septembre 1994 relatif au régime des études universitaires et des grades académiques, soit deux grades visés aux articles 15 et 18, § 2 du décret du 5 août 1995 fixant l’organisation générale de l’enseignement supérieur en hautes écoles, soit un grade académique visé à l’article 6, §§ 2 et 4 du décret du 5 septembre 1994 précité et un grade visé aux articles 15 ou 18, § 2 du décret du 5 août 1995 précité. Les étudiant(e)s détenteurs (trices) à la fois du grade d’accoucheur (euse) et du grade d’infirmier (ère) gradué(e) sont réputé(e)s n’avoir obtenu qu’un seul grade visé à l’article 15 du décret du 5 août 1995.
  • [62]
    Toutefois, il n’est pas tenu compte de grade de licencié en notariat, de licencié en magistrature ou de licencié en entrepreneuriat, que ces grades soient obtenus ou à obtenir.
  • [63]
    Cette mesure entre en application au 1er septembre 2000.
  • [64]
    L’article 28 du décret prévoit un minimum de 150 heures de formation dont 60 heures de stages pour le financement de l’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur.
  • [65]
    Auparavant les doctorants n’étaient pris en compte que pour une seule année.
  • [66]
    L’article 21 du décret insère un nouveau paragraphe dans l’article 48 quater pour permettre le financement de ces diplômes. De plus, l’article 28 adapte l’article 5 de l’arrêté royal du 4 août 1972 fixant les règles pour la détermination du nombre d’étudiants subsidiables aux dispositions du décret du 5 septembre 1994 relatif au régime des études universitaires et des grades académiques. Il consacre également le financement au diplôme des DEC, DES et DEA et de l’agrégation de l’enseignement secondaire supérieur et maintient le financement des doctorats au diplôme.
  • [67]
    Sont organisés dans le cadre d’une collaboration interuniversitaire, les programmes d’études organisés par au moins deux institutions universitaires dans le cadre d’une convention approuvée par arrêté du gouvernement, après avis du Conseil interuniversitaire de la Communauté française.
  • [68]
    La prise en compte des étudiants du groupe S suite à l’application du numerus clausus en médecine entre en vigueur le 1er septembre 2000.
  • [69]
    « Quelles urgences pour une politique universitaire en Communauté française de Belgique », Rapport à Monsieur W. Ancion, Ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, A. Bodson et J. Berleur, octobre 1998.
  • [70]
    « Le paysage universitaire », Le Vif, 4-10 décembre 1998.
  • [71]
    « Le paysage universitaire », Le Vif, 4-10 décembre 1998. Cf. également J.-P. Lambert, « Universités : plaidoyer pour l’efficacité », La Revue Nouvelle, n° 11, tome 108, novembre 1998.
  • [72]
    « Landercy : « servir sa région, c’est s’unir », Le Soir, 11 décembre 1998.
  • [73]
    V. Saintghislain, « L’avenir du pôle universitaire montois se joue ici et maintenant », La Dernière Heure, 11 décembre 1998.
  • [74]
    Conseil des recteurs francophones, Commentaires du CREF sur le rapport des recteurs honoraires A. Bodson et J. Berleur, op. cit.
  • [75]
    Conseil des recteurs francophones, Le financement des universités, 11 mai 1999.
  • [76]
    Conseil des recteurs francophones, Commentaires du CREF sur le rapport des recteurs honoraires A. Bodson et J. Berleur, op. cit.
  • [77]
    E. Witte, Tussen pluralisme en optimalisatie, VUB, 1997.
  • [78]
    OCDE, Redéfinir l’enseignement tertiaire, OCDE, Paris, 1998.
  • [79]
    O. MOUTON, « Manœuvres universitaires : le courroux de l’ULB », La Libre Belgique, 8 mai 1998.
  • [80]
    Conseil des recteurs francophones, Commentaires du CREF sur le rapport des recteurs honoraires A. Bodson et J. Berleur, op. cit.
  • [81]
    Conseil des recteurs francophones, Le financement des universités, op. cit.
  • [82]
    Ces principes étaient déjà définis dans les documents du CNPS de 1970 et 1971.
  • [83]
    Cette liberté doit être cependant limitée d’une part, par l’obligation d’une concertation de l’institution dans certains domaines avec les autres institutions et la Communauté et d’autre part, par l’instauration d’un contrôle organisé selon une procédure uniforme.
  • [84]
    R. Crivellaro, « Einstein en mal de mécénat », Le Soir, 25 janvier 1997.
  • [85]
    Objectif Recherche, 1995, op. cit.
  • [86]
    P. Bouillon, « Les golden sixties, c’est fini ! », Universités, 4 mai 1994.
  • [87]
    H. Capron, et. Al, The National Innovation System of Belgium, 190 pages, Heidelberg, Springer-Verlag, 1999.
  • [88]
    Conseil des recteurs francophones, Commentaires du CREF sur le rapport des recteurs honoraires A Bodson et J. Berleur, op. cit.
Les universités de la Communauté française de Belgique se trouvent aujourd’hui dans une situation de blocage financier structurel qui compromet tant leur compétitivité que leur intégration internationales et les empêche de répondre pleinement aux besoins de développements régionaux. Des facteurs externes et les héritages du passé ont compliqué sensiblement leur tâche. Depuis la crise économique des années 1970, les pouvoirs publics s’inquiètent du coût croissant des dépenses d’enseignement et ont mis en place une contrainte budgétaire sévère. Pourtant le financement et l’organisation de l’enseignement supérieur et plus particulièrement universitaire font actuellement l’objet de réflexions, de débats et de décisions dans de nombreux pays occidentaux. Ces pays poursuivent, depuis plusieurs années, une politique de réduction des dépenses publiques. Sabrer dans les dépenses allouées à l’enseignement universitaire peut, dans le court terme, contribuer à soulager les problèmes budgétaires, mais hypothèque avec certitude notre avenir technologique et l’avenir des générations futures. La logique budgétaire s’oppose à la logique sociale et économique. Benoît Bayenet concentre son étude sur l’analyse du financement des dépenses ordinaires à charge du Ministère de l’Enseignement (national puis communautaire), soit les allocations de fonctionnement. La première partie décrit les mécanismes de financement des universités mis en place par la loi du 27 juillet 1971 et les nombreuses modifications introduites au cours des années 1970, 1980 et 1990. La deuxième partie est consacrée à l’examen des différents plans de réforme du financement des universités envisagés par les différents gouvernements au pouvoir pendant les années 1990. La troisième partie décrit les dernières modifications introduites dans les mécanismes de financement par le décret du 1er octobre 1998 et les mesures prises par le gouvernement de la Communauté française issu des élections du 13 juin 1999. Enfin, la quatrième partie traite du rapport des recteurs honoraires A. Bodson et J. Berleur (Quelles urgences pour une politique universitaire en Communauté française) réalisé à l’initiative du ministre W. Ancion et des réactions qu’il a suscitées dans le monde universitaire.
Mis en ligne sur Cairn.info le 08/06/2014
https://doi.org/10.3917/cris.1668.0001
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