CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Introduction

1A l’issue du scrutin du 21 mai 1995 pour le renouvellement de la Chambre des représentants, les résultats dans les cantons flamands ne laissaient pas apparaître de changements de grande ampleur par rapport au scrutin précédent. Aucun des partis qui présentaient des listes aux élections de 1995 et de 1991 n’a vu son résultat électoral profondément bouleversé, même si les rapports de force entre les formations politiques s’en sont trouvés modifiés, le VLD devenant la deuxième force politique dans les cantons flamands, devançant de peu le SP mais restant néanmoins loin derrière le premier parti, le CVP. L’écart maximal des voix entre les deux scrutins est de 2 %, 2 % en plus pour le VLD et le Vlaams Blok, 2 % en moins pour la VU. La seule modification significative provient de la non-présentation en 1995 de la liste Rossem, qui avait recueilli 5,2 % en 1991 [1].

2Pourtant, le contexte particulier dans lequel se sont déroulées les élections du 21 mai 1995 avait laissé présager des bouleversements : le SP se trouvait au centre d’enquêtes judiciaires portant sur son financement passé par des fonds privés, dont la presse relayait quotidiennement les étapes ou en rappelait l’existence ; le VLD, dirigé alors par Guy Verhofstadt, faisait de ces élections "l’heure de la vérité" et ambitionnait de devenir la première force politique en Flandre ; la VU, touchée directement par l’opération d’élargissement du VLD se trouvait fragilisée, son président, B. Anciaux, allant jusqu’à menacer de dissoudre le parti si ce dernier ne recueillait pas 300.000 voix au moins ; le VB disposait de moyens publics sans précédent pour mener une campagne électorale professionnelle.

3La campagne électorale ne se cristallisa toutefois pas sur ces enjeux, mais sur celui de l’avenir de la sécurité sociale, thème mis en avant par le SP et le CVP mais sur lequel le VLD et Agalev ont infléchi leur campagne.

4Ces stratégies ont-elles eu une influence réelle sur le comportement des électeurs ? Leur vote a-t-il été, ou non, influencé par le fait que la sécurité sociale soit portée au rang de "véritable enjeu" de ces élections ? Ou les électeurs ont-ils exprimé une préférence partisane pour tout autres motifs ?

5C’est à ces questions auxquelles un sondage post-électoral a cherché des réponses. Ce sondage a été réalisé le jour même des élections, le 21 mai 1995, à la demande du service d’information de la BRTN (télévision et radio) auprès de 3.748 personnes participant au vote dans un des cantons flamands. Ces personnes ont été interrogées à leur sortir de l’isoloir sur la base d’interviews "face to face" d’une durée de cinq minutes environ [2]. Les conditions de cette enquête sont présentées dans le premier chapitre.

6Les motivations des électeurs sont ensuite recensées en les rassemblant autour de quelques thèmes. Des "profils" de motivations électorales caractérisant les électeurs des différents partis sont enfin esquissés.

Approche des motivations des électeurs par sondage

7Les électeurs peuvent avoir des raisons très différentes de voter pour un parti plutôt que pour un autre.

8Dans l’enquête "The American Voter" [3], devenue un classique du genre, A. Campbell et consorts décrivent comme suit l’importance que revêtent les perceptions subjectives qu’a l’électeur de ses choix électoraux : "If we are to understand what leads the voter to his decision at the polls we must know how he sees the things to which this decision relate. In casting a vote the individual acts toward a world of politics in which he perceives the personalities, issues, and the parties and other groupings of a (…) contest. His image of these matters may seem at times exceedingly ill-formed, but his behavior makes sense subjectively in terms of way these political objects appear to him (…) Indeed, it would be difficult to overstate the importance of perceptions formed by a mass electorate for the decisions it must periodically render (…) It is the cognitive map of national politics held by the (…) electorate that is our concern here. The elements of politics that are visible to the electorate are not simply seen ; they are evaluated as well (…) This mixture of cognition and evaluation, of belief and attitude, of percepts and affect is so complete that we will speak of the individual’s cognitive and affective map of politics". (p.15)" Taken together, the cognitive and affective themes recorded in our interviews suggest the «sense» the electorate made of the objects it acted toward in (the) elections" (p.27) "(…) It might be argued that although the man in the street may have only loose idea of what is going on in terms of specifie policy, he has a firm sense of the global policy differences between the parties and relates them with equal firmness to highly generalized valves of his own" (p.109).

9Cette conception part du principe que l’électeur, même mal informé de la réalité politique, dispose d’une "grille d’évaluation" concrète qui lui permet de juger les acteurs politiques. Celle-ci, dans de nombreux cas, n’est pas semblable au cadre de référence utilisé par ces acteurs politiques. L’idée que les cadres de référence de ces derniers - qui sont le plus souvent d’ordre rationnel - s’appliquent aussi à l’ensemble de la population électorale, y compris à ceux qui ne s’intéressent guère à la politique, est un présupposé qui ne peut que fausser l’analyse des résultats électoraux.

10Dans la perception de l’électeur interviennent des éléments et des événements proches et lointains, politiques et non politiques, généraux et personnels, mais aussi la tradition (familiale ou collective), l’habitude, la sympathie ou l’antipathie, …

11Pour essayer d’appréhender ces motivations diverses, des sondages sont organisés. Les questions posées dans ces sondages sont soit fermées (la personne interrogée a le choix entre plusieurs réponses pré-déterminées), soit ouvertes (la personne interrogée a la possibilité d’indiquer, dans son cadre de référence propre, les éléments qui déterminent, selon elle, son choix). L’une et l’autre de ces procédures ont des limites et induisent des résultats parfois fort différents.

12Les "avantages" généralement avancés [4] en faveur de l’utilisation de questions ouvertes sont les suivants : puisqu’il n’y a pas de restrictions aux possibilités de réponses, la question ouverte convient pour détecter certaines dimensions (nouvelles) dans la manière de répondre. Les réponses peuvent être données par la personne interrogée à partir de ses idées propres, de ses définitions et de son contexte personnel. Outre la présence ou l’absence de certaines catégories de réponses, on peut également voir l’impact qu’elles ont pour la personne interrogée. De plus, alors que la question fermée peut orienter la réponse, tel n’est pas ou est moins le cas pour la question ouverte. Les principaux inconvénients sont les suivants : la question ouverte exige de la personne interrogée une certaine capacité d’expression et de formulation qui n’est pas toujours présente chez les personnes (très) peu qualifiées. Elle fournit dans certains cas des informations non pertinentes. Les personnes interrogées donnent pour réponse ce qui leur est le plus rapidement accessible et plausible (c’est ce qu’on appelle dans le jargon du marketing l’information "top-of-mind") [5] ou ne formulent pas certaines informations parce qu’elles leur paraissent évidentes. Les exigences plus élevées imposées à l’intervieweur accroissent le risque de le voir influencer les résultats de l’enquête, faute de prise de notes adéquate. Les personnes interrogées peuvent ne pas être conscientes d’une partie importante de leurs processus mentaux. Ce mode de questionnement ne dit pas comment se constituent les motifs et les perceptions subjectifs des électeurs. Il ne décrit que la variable dépendante d’un processus de causalité. La question ouverte est une procédure qui prend beaucoup de temps ; l’encodage et l’analyse des réponses aux questions ouvertes sont nettement plus coûteux qu’en cas de questions fermées.

13Il y a eu relativement peu de recherches expérimentales permettant de comparer les deux types de question. Il est par ailleurs impossible de prouver la supériorité de l’une ou de l’autre procédure [6]. La question ouverte semble s’indiquer, dans le cadre des sondages d’opinions, dans les cas qui suivent : pour des "questions menaçantes", lorsqu’il y a un risque de réponses socialement souhaitables, lorsque surviennent des événements changeants qui peuvent influencer les réponses et lorsqu’on peut s’attendre à l’apparition de nouvelles catégories de réponses.

14Pour l’analyse des motivations des électeurs flamands lors du dernier scrutin fédéral, choix a été fait de recourir aux questions ouvertes. Reprenant les arguments ci-dessus, beaucoup de Flamands ressentent encore toujours la question du comment et du pourquoi de leur vote comme une question "menaçante" (contrairement, par exemple, à ce qui est le cas aux Pays-Bas) ; le risque de réponses socialement souhaitables est réel comme le montre, dans de nombreuses recherches, la sous-estimation du vote en faveur du Vlaams Blok ; on peut supposer que la campagne électorale et les événements qui s’y rapportent tendent à générer, auprès des électeurs, des modifications rapides à court terme ; enfin, les mutations de l’environnement socio-politique justifient l’hypothèse de nouvelles catégories de réponses en formation. L’utilisation, pour la présente recherche, de la procédure de la question ouverte nous a donc paru la plus évidente.

15Les réponses à une question ouverte doivent être transformées pour devenir un matériel utilisable, c’est-à-dire analysable. A cet effet, on répartit les réponses individuelles des personnes interrogées dans des catégories codées. La qualité du schéma d’encodage et le mode de répartition des réponses dans ces catégories détermineront, dans une large mesure, le résultat de l’enquête. Tout comme pour les catégories de réponses à une question fermée, les catégories du schéma d’encodage d’une question ouverte doivent répondre à deux exigences : elles doivent être complètes et mutuellement exclusives. Si tel n’est pas le cas, on voit apparaître des catégories ambiguës (mélangeant différents objets d’attitude), des catégories résiduelles beaucoup trop importantes (par exemple : la catégorie "autres motifs") ou des catégories plutôt vagues qui deviennent des catégories "catch-all what doesn’t fit in other" (par exemple : "l’image du parti").

16Aussi avons-nous essayé de mettre au point un schéma d’encodage permettant de répartir des réponses substantielles dans des catégories significatives. Nous nous sommes imposé les conditions suivantes : exclusivité mutuelle, absence de catégories résiduelles (ou réduction de cette catégorie à son niveau le plus bas), absence de catégories rassemblant un nombre excessif de réponses pour des raisons impossibles à identifier sur une base substantiellement univoque, se référant à des théories importantes en science politique en matière de comportement électoral. Comme point de départ, nous avons utilisé les schémas d’encodage du sondage post-électoral ISPO de 1991 [7] et le modèle élaboré aux Pays-Bas par J. Van Holsteyn, fondé sur les travaux de C. Van der Eijk, M. Koopman et B. Niemöller [8]. Nous les avons ensuite adaptés à la réalité flamande de 1995. Au cours de phases préparatoires successives de la recherche, le schéma et/ou la définition des catégories de contenu ont été affinés ou modifiés et le cas échéant complétés.

17La validité d’une mesure n’est jamais supérieure à sa fiabilité. Aussi faut-il tendre à une fiabilité maximale. Pour ce faire, il n’y a qu’un seul critère : il faut vérifier si deux encodeurs travaillant séparément répartissent de la même façon, dans les différentes catégories, les réponses des personnes interrogées. Pour obtenir une fiabilité optimale nous avons donc assigné à l’encodage deux objectifs : les réponses à la question devaient se retrouver dans la catégorie dont elles relèvent théoriquement ; chaque encodeur devait le faire de la même façon, indépendamment des autres. L’unité choisie pour mesurer la fiabilité entre encodeurs est Kappa [9]. Le Kappa pour l’encodage définitif est de 0.82, soit un degré de fiabilité très élevé.

Motivations du vote des électeurs flamands le 21 mai 1995

18Le sondage post-électoral réalisé le jour même des élections, le 21 mai 1995, a concerné 3.748 personnes habitant dans un canton flamand et ayant pris part au vote pour le renouvellement de la Chambre des représentants. Ces personnes ont été interrogées au sortir des bureaux de vote.

19Ces données présentent un avantage important : comme elles ont été rassemblées à un moment suivant immédiatement l’acte de voter lui-même, la distorsion due au souvenir est mince, sinon nulle. Mais ce qui nous paraît encore plus important - c’est là le côté unique de nos données - c’est que l’électeur ne connaissait pas encore, au moment de l’interview, le résultat des élections et qu’il n’avait pas encore été influencé par les commentaires et les explications des hommes politiques, des journalistes, des scientifiques, etc. à la radio, à la télévision et dans la presse écrite. Il ne pouvait pas y avoir non plus de réinterprétation des motifs de vote selon que le parti qui en a bénéficié ait progressé, reculé ou se soit maintenu.

20L’élimination des non-réponses laisse subsister un échantillon de 3.547 unités. Une unité d’échantillonnage correspond donc à quelque 1.150 unités de population ; une tranche de 1 % correspond à une population de 40.000 électeurs. Le taux de réponse, c’est-à-dire la disponibilité des gens à participer à l’enquête lorsqu’ils sortent de l’isoloir, s’élève à 60 % environ. Le taux de réponse a tendance à être plus élevé à la campagne que dans les grandes villes. Après pondération des disproportions de l’échantillonnage originel en tenant compte des caractéristiques pertinentes des groupes, il s’avère que le VB, les "autres (petits) partis" et l’option blanc/nul sont sous-représentés tandis que le CVP est manifestement surreprésenté. Il faut évaluer avec quelque prudence les résultats qui concernent le VB. Ce n’est pas la taille absolue du groupe de l’échantillonnage qui pose problème ; on peut néanmoins se demander si ce groupe constitue un échantillon représentatif des électeurs du VB. Nous supposons en effet que ceux-ci ont été moins nombreux à participer à l’enquête. Nous pouvons avancer l’hypothèse suivante : vraisemblablement, ce sont les électeurs qui s’intéressent peu à la politique ou ceux qui ont des sentiments anti-politiques qui sont les moins enclins à participer à l’enquête. En raison de la taille réduite de ce groupe, les résultats des "autres (petits) partis" ne sont pas mentionnés séparément. Mais nous y faisons référence dans le texte, lorsqu’ils sont pertinents. Dans les paragraphes qui suivent, nous analysons les motifs des électeurs. Les données ont été pondérées sur la base de coefficients obtenus par une adaptation proportionnelle itérative aux données de population : âge/sexe/vote en 1995 [10].

Idéologies et valeurs

21Dans beaucoup d’enquêtes électorales, l’analyse part du comportement électoral en tant qu’attachement à des idéologies et à des valeurs. C. Van der Eijk et K Niemöller expliquent le comportement électoral à partir de l’opposition idéologique entre la gauche et la droite. R. Inglehart a montré qu’apparaissent, à l’époque post-industrielle, des valeurs en mutation auxquelles il associe le concept de post-matérialisme. L. Milbrath a étendu cette analyse à ce qu’il a appelé le "New Environmental Paradigm". Ce paradigme se compose d’un conglomérat de valeurs étroitement liées à des conceptions qui sont en rapport direct, mais large, avec l’environnement. Les valeurs mises en avant dans ce cadre sont par exemple la participation, la qualité de la vie, la solidarité et la justice sociale. Les études théoriques classiques sur la Belgique font plutôt ressortir le clivage philosophique, le clivage ethnico-nationaliste et le clivage entre la gauche et la droite. M. Swyngedouw, M. Elchardus, J. Billiet et H. De Witte enfin ont élaboré différents modèles explicatifs sur la base de valeurs [11].

22Dans le sondage sur les motivations du vote des électeurs flamands le 21 mai 1995, 12,2 % des personnes interrogées se réfèrent à l’une ou l’autre forme d’idéologie ou de valeurs.

Tableau 1

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à une valeur

Tableau 1
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Général 9,61 5,93 3,98 8,65 4,58 6,78 0,00 5,55 Cathol./Laïc 0,77 (0,15) (0,00) (0,00) (0,15) 9,03 1,98 2,54 Nation. 0,00 (0,00) 3,23 17,60 (0,00) (0,00) 0,00 1,57 Ecolog. 20,25 (0,00) 0,00 0,25 (0,00) (0,00) 0,00 1,33 Gauche-centre-droite 0,93 1,97 0,44 2,18 1,87 1,67 0,00 1,47

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à une valeur

23Chaque rangée du tableau indique, pour les différents partis, la présence ou l’absence d’un motif de vote déterminé. Sur la base d’un test du type x2, nous avons vérifié s’il existait un lien entre les partis et le motif de vote. Si tel était le cas (p<0,001), nous avons vérifié lesquels des partis étaient surreprésentés ou sous-représentés en décomposant le x2 et en le reportant entre les différentes cellules. Les chiffres indiqués en caractères gras font apparaître des surreprésentations significatives (p<0,05). Les chiffres entre parenthèses indiquent des sous-représentations significatives. Notons que les personnes interrogées peuvent indiquer plusieurs motifs de vote et que l’addition de tous les pourcentages pour tous les motifs et pour tous les partis peut être supérieure à 100. L’abréviation POP se rapporte au pourcentage estimé des électeurs qui, dans l’ensemble de la population, citent un motif de vote déterminé. La même observation vaut pour tous les tableaux qui suivent.

24Un peu plus de 5 % des électeurs font référence à des valeurs, des principes, des idées générales ou à l’idéologie d’un parti déterminé pour expliquer pourquoi ils votent pour tel ou tel parti. Agalev et la VU sont ici surreprésentés avec respectivement 9,6 % et 8,65 %. Le VB est sous-représenté.

25Les électeurs sont 2,5 % seulement à mentionner explicitement des valeurs philosophiques. Ils n’ont d’importance que pour le CVP ; cette référence sert de motif de vote à 9 % de son électorat. Le fait d’être catholique constitue donc toujours un motif de voter pour un parti déterminé. Par contre, les laïcs ou les anti-cléricaux ne votent pas (ou ne votent plus) pour un parti en raison de leurs convictions philosophiques. Le SP et le VLD n’obtiennent pratiquement aucune voix sur cette base. Il semble bien que la question philosophique ne doive plus être considérée comme une "opposition existant dans la société", mais plutôt comme un "élément d’identification d’un groupe restreint de catholiques avec le CVP".

26L’attachement aux valeurs nationalistes ou à une idéologie nationaliste (il faut distinguer ce motif de l’enjeu communautaire proprement dit) est cité par 1,6 % seulement des électeurs comme motif de vote. La VU est et reste, dans ce groupe restreint, le parti nationaliste par excellence. Pour 17,6 % de ses électeurs, c’est la raison explicite de choisir la VU. L’électeur du Vlaams Blok n’utilise guère ce motif : ils sont 3,2 % seulement à choisir ce parti pour cette raison. Le nationalisme démocratique prédomine donc, chez les électeurs d’inspiration nationaliste, sur le nationalisme autoritaire : 76,7 % d’entre eux votent pour la VU, 23,3 % en faveur du Vlaams Blok.

27L’idéologie écologiste et l’écologie sociale sont le monopole d’Agalev. Même si 1,3 % seulement de l’ensemble des électeurs font référence, pour motiver leur vote, à des conceptions écologistes, il s’agit là, pour 20 % des électeurs d’Agalev, du principal argument électoral.

28Enfin, 1,5 % seulement de l’ensemble des électeurs renvoient, pour justifier leur vote, à l’opposition idéologique gauche-droite (ou à l’option en faveur du centre). Ces électeurs se répartissent entre tous les partis.

Programme et questions politiques

29Le modèle traditionnel des positions politiques remonte à Downs [12], qui part du principe que l’électeur votera pour le parti dont les positions politiques, sur les questions qu’il juge les plus importantes, sont les plus proches de ses propres conceptions. Comme l’électeur ne veut ou ne peut pas toujours être complètement informé, il se limitera, dans de nombreux cas, à quelques questions qui le frappent et qu’il associera de manière continue à certains partis politiques. C’est de ce constat que naît ce qu’on appelle la "propriété des enjeux" [13]. Au cours des années, ce modèle a fait l’objet de nombreuses variantes et affinements. Pour la Flandre, B. Maddens a analysé les élections de 1991 à partir de cette perspective paradigmatique [14].

Tableau 2

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence au programme du parti ou à une question déterminée

Tableau 2
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Général 7,31 5,01 9,75 8,28 11,17 (4,25) (0,00) 6,52 Séc. soc. (1,33) 8,98 3,17 (1,14) 6,76 (1,20) 0,46 4,24 Immigr. 1,82 (0,38) 32,96 (0,71) (0,79) (0,09) (0,00) 4,21 Environ. 21,90 1,57 (0,00) (0,00) (035) (0,15) (0,00) 1,90 "Affaires" 0,29 5,06 0,45 0,60 (0,36) 0,63 1,11 1,35 Econom. 0,68 0,54 0,40 0,39 3,40 0,60 0,00 0,60 Commun. 0,25 0,18 2,17 5,32 (0,00) (0,00) 0,00 0,66 Criminalité 0,00 0,19 4,78 0,00 0,15 (0,00) 0,00 0,60

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence au programme du parti ou à une question déterminée

30Au total, 12,8 % des électeurs font référence, pour motiver leur vote, à des questions politiques spécifiques. Un peu plus de 6 % des électeurs renvoient dans leur argumentation au programme général du parti politique de leur choix. Il est frappant que le VLD et le VB sont ici surreprésentés et le CVP sous-représenté. Pour expliquer la surreprésentation du VLD et du VB, on pourrait avancer l’hypothèse que les "enjeux" dont le VLD et le VB sont porteurs (VLD : impôts, restriction des dépenses publiques, libre entreprise ; VB : immigrés) n’ont guère été mis en avant lors de la campagne électorale. L’électeur est alors plutôt contraint de se fonder sur l’image générale qu’il se fait des programmes des partis.

31La sécurité sociale a motivé 4,2 % des électeurs ayant voté pour un parti déterminé. La sous-représentation du CVP est à souligner. Les électeurs de ce parti sont 1 % seulement à faire référence, pour justifier leur vote, à la sécurité sociale. Dès avant la campagne, une polarisation était apparue sur le thème de la sécurité sociale, surtout entre le SP et le VLD. Cette polarisation se reflète dans le sondage : 9 % et 6,8 % de leurs électeurs motivent leur comportement électoral par référence à la sécurité sociale.

32Le thème des immigrés a inspiré un peu plus de 4 % des électeurs. Seul le Vlaams Blok en fait son cheval de bataille : 33 % des électeurs qui votent pour ce parti font explicitement référence à ce motif de vote. Agalev, qui s’est manifesté en marge de la campagne comme partisan de l’intégration, ne gagne pratiquement pas d’électeurs sur ce thème.

33L’environnement (1,9 % des électeurs) est, par contre, le thème par excellence d’Agalev. Les électeurs de ce parti sont 21,9 % à y avoir recours pour motiver leur vote. Les autres partis sont ici inexistants. L’image "plus verte" du SP (à propos du plan lisier) n’a, du moins pour les élections à la Chambre, pas encore vraiment porté. Si l’on additionne l’idéologie écologique et le thème politique "environnement", 41,8 % des électeurs d’Agalev votent en faveur de ce parti pour des raisons écologiques au sens large du mot.

34Le thème communautaire met face à face la VU et le Vlaams Blok. L’électorat qui avance ce motif de vote est cependant limité (0,66 %). La VU obtient un petit peu plus de la moitié (55,3 %) des électeurs qui mentionnent ce thème, le VB 37,3 %. Si l’on prend en compte les valeurs "nationalistes", la VU reste le parti communautaire par excellence. Elle rassemblait sur son nom quelque 71 % des électeurs d’inspiration ouvertement communautaire-nationaliste. Le Vlaams Blok ne gagnerait que 26,7 % de ces électeurs. L’ampleur totale de cet électorat peut être estimée à 2,21 % [15].

35On a beaucoup spéculé sur l’influence des "affaires politiques" sur les résultats électoraux. Or, notre enquête montre que 1,3 % seulement des suffrages sont directement influencés par celles-ci. De plus, il s’avère que plus de 70 % de ces électeurs ont voté pour le SP, jugeant ce parti "victime" des affaires. Les électeurs socialistes du 21 mai 1995 sont 5,06 % à motiver leur vote de la sorte. Sans "Agusta", le SP aurait légèrement reculé lors de ces élections par rapport à 1991. Le Vlaams Blok n’a pas réussi à tirer, de ce thème, un gain électoral effectif.

36Les considérations économiques restent un motif de vote pour l’électeur du VLD. Ce groupe est restreint : 1,1 % de l’ensemble de l’électorat. Mais il représente 3,4 % des électeurs du VLD.

37Enfin, quelques mots sur la criminalité, la police, l’ordre et la loi en tant que motifs justifiant le vote en faveur d’un parti. Ces thèmes sont présents de façon appuyée dans le programme du Vlaams Blok, mais on en trouve des échos dans les programmes de quasi tous les partis traditionnels. Notre enquête indique que 0,6 % seulement des électeurs se laissent guider par ce thème, qui occupe pourtant dans les médias une place fort sensible. Normalement, une analyse sur 21 unités devrait être peu fiable. Or, 19 d’entre eux votent pour le Vlaams Blok. En d’autres termes, le thème de la criminalité est, d’un point de vue électoral, le terrain exclusif de l’extrême droite et fournit au Vlaams Blok 4,8 % de son électorat.

Socialisation et identification

38Traditionnellement, les ouvrages de référence en matière d’analyse électorale affirment que l’éducation, la famille, les amis et les connaissances sont autant de facteurs qui influencent le vote. Dans une société largement pilarisée, les acteurs politiques ont longtemps tenu pour acquis que c’était là pratiquement le seul facteur qui détermine le comportement électoral.

39L’influence directe de ce qu’on appelle le "peer-group" (et de l’élite politique qui y est associée) serait cependant en voie de disparition dans notre société, remplacée par une sorte de modèle à deux étages. Selon ce modèle, les messages diffusés par les médias de masse seraient filtrés par des "leaders d’opinion", comme par exemple des syndicalistes ou des prêtres. Ces opinions ont vu leur rôle s’affaiblir, affirme-t-on, depuis quelque années. Aujourd’hui, l’influence de la socialisation politique sur le comportement électoral serait déclinante. A mesure que les réseaux sociaux perdent de leur puissance et qu’augmente l’individualisme (il s’y ajoute un fort taux de scolarité, l’émancipation des femmes et la large diffusion des médias), cette socialisation passerait à l’arrière-plan en tant que facteur de motivation du vote en faveur d’un parti [16].

40Des enquêtes électorales américaines utilisent, comme facteur déterminant le vote, la notion d’"identification au parti". La Michigan School en particulier en fait un élément central de ses modèles d’explication. Les électeurs, affirment ces observateurs, se sentent très proches des courants politiques dominants, comme par exemple le libéralisme ou le socialisme. Ces courants trouvent à s’exprimer et à se concrétiser dans l’un des partis politiques établis. Mais l’applicabilité du modèle du Michigan est fortement contestée dans le contexte du système pluripartite européen [17]. Pourtant, les explications comme "je vote par tradition, par habitude pour tel ou tel parti", "je trouve que c’est le meilleur parti", ou encore "je suis membre de ce parti ou je suis démocrate-chrétien, ou socialiste, ou libéral" peuvent s’inscrire dans cette tradition d’identification à un parti.

Tableau 3

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à la socialisation ou l’identification

Tableau 3
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Socialisation (4,09) 11,55 (2,13) 8,20 9,85 14,28 (0,00) 9,11 Habitude (2,02) 21,14 (0,45) 9,24 (8,82) 23,31 (0,00) 12,58 Meilleur 8,89 7,45 (4,23) 8,62 7,91 10,08 (0,00) 7,31 Identification 2,42 2,33 0,64 0,93 3,26 3,42 (0,00) 2,28

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à la socialisation ou l’identification

41Selon le sondage, les électeurs sont 9,1 % à indiquer, comme facteur influençant directement leur vote en faveur d’un parti, des éléments comme l’éducation, la famille, le partenaire, des amis et/ou le milieu de travail. Comme on peut s’y attendre, ce sont surtout les partis "pilarisés" qui gagnent des électeurs par le biais de la socialisation. La part du CVP dans ce segment est plus forte que prévue (le parti est significativement surreprésenté). Environ 10 % des électeurs du VLD et du SP motivent leur vote par référence à la socialisation ; pour le CVP, cette part dépasse 14 %. Sur la base d’enquêtes antérieures concernant le lien entre le vote et l’âge de l’électeur [18], on pourrait supposer que n’intervient pas, au sein de ce groupe d’électeurs, de remplacement entre générations. Mais c’est une hypothèse incorrecte. Il n’existe pas de lien entre l’âge et le fait d’invoquer, ou non, des motifs de socialisation pour expliquer le vote en faveur d’un parti. Ce constat vaut pour les trois partis principaux comme pour la Volksunie. Notre enquête fait donc apparaître que chaque génération invoque de manière égale, comme motif de vote en faveur de tel ou tel parti, des éléments de "socialisation par la famille".

42Il se trouve 21,4 % d’électeurs pour invoquer des motifs d’identification au sens large. Si l’on examine ensemble les trois catégories (habitude, meilleur parti et identification au sens strict), c’est la surreprésentation du CVP qui frappe. Pas moins de 35,2 % des électeurs de ce parti justifient leur vote par référence à l’une de ces trois catégories. Le SP se rapproche, sur ce point, du CVP avec 29,9 %. Suivent ensuite, le VLD (19,4 %) et la VU (18,4 %).

43La combinaison de l’identification au sens large à un parti et du facteur "génération" (par tranches d’âge) fait voir que le remplacement intergénérationnel fait défaut pour les trois principaux partis. En ce qui concerne l’identification à un parti par exemple, le CVP est fortement surreprésenté auprès des électeurs de 55 ans ou plus ; par contre, ce parti est largement sous-représenté dans la tranche d’âge de 18 à 44 ans. Le SP n’est surreprésenté qu’auprès des électeurs de plus de 65 ans, fortement sous-représenté dans la tranche de 18 à 35 ans. Le VLD, n’est significativement surreprésenté que chez les électeurs de plus de 65 ans mais il n’est confronté à aucune sous-représentation significative. Apparemment avec l’émiettement de la pilarisation, l’identification spontanée à des partis "pilarisés" s’achève.

Les partis

44La catégorie "partis" réunit quatre motifs de vote. Tous se rapportent aux partis politiques en tant qu’institutions, mais ils n’ont aucun rapport avec les programmes des partis en tant que tels.

45Un premier motif de vote tient à l’"image du parti". Il s’agit de références au style, à la manière dont le parti "fait" de la politique (du moins selon l’électeur). Il peut s’agir aussi de références à l’image "alternative" d’un parti. Dans ce cadre, l’électeur dira que son parti est "en marge", ou qu’il est "différent des autres". Nous classons également dans cette catégorie les (rares) allusions aux campagnes électorales dépourvues de références à des éléments de programme ou à des valeurs.

46Nous rangeons dans cette catégorie un deuxième motif de vote que nous appelons "vote stratégique". Il s’agit d’un comportement bien réfléchi de l’électeur qui souhaite que certains objectifs se réalisent, ou encore ne se réalisent pas - par exemple pour éviter des effets secondaires non désirés ou des options qu’il juge pires. Nous pouvons distinguer deux types de "comportement électoral stratégique". En premier lieu, certains électeurs ne votent pas pour le parti qu’ils préfèrent mais pour un autre, dans le but de réduire le risque de voir un troisième parti, un parti dont ils ont horreur, gagner les élections [19]. En deuxième lieu nous distinguons tous les cas où un individu ne vote pas pour le parti qu’il préfère parce qu’il veut envoyer un message ou un signal à ce parti ou à d’autres partis [20]. Ce comportement électoral ne répond donc pas à des considérations de fond ; il dépend de la position des partis dans la constellation politique. Les arguments utilisés sont : "le parti le moins mauvais", "je ne vote pas pour un petit parti", "c’est un petit parti", "pour garantir la survie du parti", "parce que c’est un parti d’opposition, un parti-aiguillon", "le parti doit aller au gouvernement", "en raison du fonctionnement du système politique", …

47Un troisième motif de vote que nous rangerons dans la catégorie "partis" trouve son origine dans le système de "clientélisme", le lien avec le parti se nouant au travers de services rendus à l’électeur (via, par exemple, les permanences sociales) dans le cadre ou non de la stratégie individuelle d’un candidat.

48Soulignons enfin l’existence dans cette catégorie d’un "vote négatif". L’électeur ne vote pas pour un parti, mais contre un parti déterminé. Il faut distinguer clairement ce motif du comportement apolitique ou antipolitique. L’électeur n’est pas d’accord avec un parti, ou est déçu par un parti particulier.

Tableau 4

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à des caractéristiques de parti

Tableau 4
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Image 8,29 5,02 7,07 4,81 5,54 9,19 (0,00) 6,34 Stratégie 12,32 4,54 3,35 9,95 (0,90) 4,12 (0,00) 4,14 Perm. soc. (0,00) 3,64 (0,25) 0,22 2,86 2,35 (0,00) 1,84 Négatif 0,81 1,69 0,73 3,62 2,76 1,63 1,00 1,71

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à des caractéristiques de parti

49L’image du parti est une catégorie plutôt vague qui renvoie à des formulations comme "un parti qui a le sens des responsabilités", "un parti qui dit clairement les choses", "un parti différent des autres partis". Les électeurs sont 6,3 % à motiver leur vote par référence à l’une ou l’autre de ces définitions. Pour le CVP, l’image du parti est importante. Avec près de 10 % d’électeurs qui avancent ce motif, il est le seul parti qui soit surreprésenté.

50Un vote de type stratégique ("je ne suis pas vraiment favorable à ce parti, mais il serait bon qu’il renforce son pouvoir à la lumière de"…) intervient chez 4,1 % des électeurs. Agalev et la VU gagnent ici, avec respectivement 12,3 % et 10 %, une part substantielle de leur électorat. Parmi les électeurs de la VU qui votent pour des raisons stratégiques, pas moins des deux tiers disent leur refus de voir la VU disparaître. Le président du parti, Bert Anciaux, avait menacé du dissoudre le parti si celui-ci n’obtenait pas 300.000 voix ; la menace a donc porté ses fruits.

51Les permanences sociales sont loin d’être en déclin. Les estimations quant à l’usage qui en est fait varient entre 18 et 30 % [21]. Cela étant, la gratitude n’incite plus nécessairement l’électeur à voter pour le parti en question. Les études quantitatives, au demeurant fort rares, consacrées aux motifs de vote permettent de déduire qu’en 1988,10 % environ des électeurs justifiaient leur vote par le recours aux permanences sociales [22]. En 1995, les électeurs ne sont plus que 1,6 % à être dans ce cas. C’est surtout le SP qui obtient des voix par ce biais. Il continue à gagner ainsi 3,6 % de ses électeurs.

52Les électeurs sont 1,7 % à voter pour des raisons négatives. Ces électeurs apportent leurs suffrages à un parti déterminé parce qu’ils sont opposés à un autre parti. Pour la VU et le VLD, leur nombre est loin d’être négligeable puisqu’ils sont respectivement 3,6 % et 2,8 % à voter pour l’un ou l’autre parti du fait de leurs objections envers d’autres partis. On vote pour la VU contre le Vlaams Blok, et pour le VLD contre le SP et le CVP.

Les effets qu’induisent les candidats

53Dans les campagnes électorales actuelles, la personnalité des candidats joue un rôle central. L’analyse du comportement électoral montre, depuis quelque temps déjà, que les électeurs sont de plus en plus nombreux à pencher pour le vote de préférence plutôt que pour le vote de liste. En Belgique, la part du vote de préférence dans l’ensemble des suffrages est passée de 16,4 % en 1979 à 48,3 % en 1991. Traditionnellement, on vote un peu moins par préférence en Flandre qu’en Wallonie. En 1991, les pourcentages étaient de 46,5 % et de 51,9 % (à l’exclusion de l’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde) [23]. La personnalisation des campagnes électorales ne se fait plus seulement par le biais d’affiches de 20 m2, et les têtes de liste ne sont pas les seules concernées. Les candidats de pratiquement tous les partis émaillent leur publicité électorale de photos et/ou de textes relatifs non seulement à leur personne, mais aussi à leurs partenaires et/ou à leurs enfants. La frontière entre la vie privée et la vie publique s’estompe. L’utilisation des techniques professionnelles de marketing dans les campagnes électorales n’est sans doute pas étrangère à cette évolution.

Tableau 5

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à des candidats

Tableau 5
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Candidats (2,46) 7,62 (0,88) 15,24 7,60 13,38 1,27 7,87

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à des candidats

54Les électeurs sont 8 % à se laisser guider, dans leur vote, par la connaissance personnelle qu’ils ont de certains candidats ou par la sympathie qu’ils ressentent vis-à-vis de candidats plus connus. Pas moins de 15,2 % des électeurs de la VU et de 13,4 % des électeurs du CVP citent les candidats comme étant leur principal motif de vote. En ce qui concerne la VU, il y a manifestement un effet Bert Anciaux. Il attire 45,5 % des électeurs de la VU qui motivent leur vote par référence à un candidat. Par comparaison, J.-L. Dehaene vient loin derrière, toujours pour la Chambre des représentants. Sa part parmi les électeurs du CVP, dans cette catégorie, s’élève à 22,3 %. Peut-être la popularité dont jouit B. Anciaux auprès des femmes (69,1 % de son électorat) explique-t-il cet écart [24].

La politique

55La politique est le motif central qui explique le vote de l’électeur dit "rationnel". Cet électeur est censé être complètement ou suffisamment informé. Il comparerait le travail politique accompli par les différents partis (rétrospective) et les espoirs que peuvent susciter leurs prestations dans l’avenir (prospective) ; cette pondération lui permettrait d’étayer son choix électoral. L’appel à la rénovation politique et l’évaluation positive ou négative du travail gouvernemental écoulé sont d’autres justifications de ce modèle d’évaluation.

Tableau 6

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence au travail politique

Tableau 6
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Rénovation 4,01 (0,42) 8,87 3,88 15,77 (0,22) (0,00) 5,33 Bon 0,89 1,83 (0,45) (0,00) 1,48 4,11 0,00 1,77 Gouvernement (0,00) 0,75 1,45 0,30 1,49 3,56 0,00 1,54

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence au travail politique

56La catégorie "bon" comprend l’évaluation générale du travail des différentes formations politiques. Il s’agit en l’occurrence de formulations très générales ("ils le font bien"), de type rétrospectif et prospectif. La catégorie "gouvernement" inclut des formulations positives et négatives qui renvoient explicitement au travail du gouvernement et/ou à la coalition gouvernementale (par exemple : "le gouvernement doit rester en place", "mauvais gouvernement").

57Au total, les électeurs sont 8,6 % à justifier leur choix par un motif politique. La volonté de rénover l’action politique (du gouvernement) est citée par 5,3 % des électeurs. Le VLD et le VB sont ici surreprésentés : 8,9 % des électeurs du VB et 15,8 % des électeurs du VLD motivent leur vote de cette façon. Il en va de même pour 12 % d’électeurs de petits partis.

58Les électeurs ne sont, au total, que 1,77 % à motiver leur choix à partir d’une (vague) "évaluation générale". Une telle "évaluation générale" n’a d’importance que pour le CVP : ce parti gagne, sur cette base 4,1 % de ses électeurs. Le VB et la VU sont ici sous-représentés - phénomène qui reflète vraisemblablement leur place marginale dans la sphère de l’influence politique.

59Parmi les électeurs du CVP, 3,6 % votent par référence à une "évaluation positive" du travail gouvernemental. Ce chiffre permet au CVP d’être surreprésenté, puisque 1,5 % seulement des électeurs font référence à une "évaluation positive" du travail du gouvernement L’électeur du SP n’emploie pas cet argument plus souvent qu’escompté, ce qui pourrait indiquer que le CVP était malgré tout ressenti, dans la coalition précédente, comme le parti dominant.

60L’"évaluation négative" de la politique gouvernementale ne semble pas être pour l’électeur un motif de voter en faveur d’Agalev. Les autres partis d’opposition obtiennent, dans ce domaine, les résultats escomptés. De façon générale, les partis d’opposition attirent donc l’électeur par leurs promesses électorales (ce qu’ils feraient s’ils arrivaient au pouvoir) beaucoup plus qu’en fonction des critiques qu’ils adressent à l’action du gouvernement.

La défense d’intérêts (de groupe)

61M. Lipset et S. Rokkan [25] font explicitement le lien entre leur modèle de clivage - en tant que grille expliquant la naissance et l’existence de différents partis politiques - et la défense des intérêts de différents acteurs sociaux.

62L’intérêt de groupe n’est pas le seul motif invoqué pour justifier un vote : on retrouve ici également la défense du "bien-être général" (le vote dit altruiste) et l’intérêt "personnel" (parfois appelé, sur le mode de l’euphémisme, le "pocket book voting").

63Les électeurs sont 8,44 % à recourir à l’un de ces motifs pour justifier leur vote.

Tableau 7

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à la défense d’intérêts (de groupe)

Tableau 7
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Indépendants (0,00) (0,00) (0,00) (0,39) 13,19 (1,14) (0,00) 2,87 Ouvriers (0,22) 13,51 (0,44) (0,38) (0,00) (0,18) (0,00) 2,80 Bien-être 2,48 1,07 0,34 1,13 0,51 1,05 0,00 1,48 Intérêt. personnel 0,25 1,29 4,44 0,39 2,01 0,83 0,00 1,43

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à la défense d’intérêts (de groupe)

64Dans la défense des intérêts des "indépendants" [26] et des "ouvriers", la surprise ne vient pas de la surreprésentation du VLD et du SP (13 % environ de leurs électeurs motivent ainsi leur vote), mais de ce que, dans les deux catégories, le CVP soit structurellement sous-représenté malgré l’importance de son aile ouvrière et de ses organisations de défense des classes moyennes.

65Le tableau 7 ne permet pas d’apprendre grand-chose de neuf sur les électeurs qui font référence au "bien-être" pour justifier leur vote ; tous les partis mentionnés obtiennent ici la valeur attendue. Notre analyse montre néanmoins que les "autres petits partis" sont ici surreprésentés. Leurs électeurs sont 12,6 % à invoquer un motif relevant de cette catégorie. Notons que la défense des "personnes âgées" obtient de loin le résultat le plus élevé (47 %).

66Tous les partis comptent parmi leurs électeurs des personnes qui justifient leur vote par référence à l’intérêt personnel. Mais c’est surtout l’électeur du VB qui est ici surreprésenté. Les électeurs du VB sont 4,4 % à utiliser cet argument, contre 1,4 % seulement pour l’ensemble de l’électorat.

La référence explicite à la pilarisation

67Le lien avec un des "piliers" a eu en Flandre un effet stabilisant pendant plusieurs années [27]. Lorsque la pilarisation est encore invoquée explicitement comme motif de vote, c’est pratiquement dans tous les cas pour des raisons d’emploi. L’électeur lui-même ou l’un de ses proches est employé dans une des nombreuses organisations que comptent les différents piliers. Pour les autres partis, il s’agit de l’emploi dans le parti ou de l’emploi dans des organisations étroitement liées au parti.

Tableau 8

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à la pilarisation

Tableau 8
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Pilarisation 0,00 1,95 0,34 0,38 0,58 2,30 0,00 1,12

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à la pilarisation

68Seul un petit groupe d’électeurs invoque ce motif (1,12 %). Comme on pouvait s’y attendre, le CVP et le SP - les partis des deux grands "piliers" - sont surreprésentés. Mais les pourcentages sont si bas qu’ils n’influencent pas réellement les rapports de force entre les différents partis.

L’impuissance politique et la revanche (l’anti-politique)

69Il y a lieu de distinguer la pensée apolitique, le sentiment d’impuissance ou l’inefficacité politique, de l’attitude anti-politique en tant que telle. L’attitude anti-politique fait référence à une forme de résistance, d’opposition aux courants politiques dominants de la société. Au niveau des élites, ce courant s’inscrit dans la tradition de la pensée contre-révolutionnaire, du nationalisme et du fascisme [28]. Au niveau individuel, il s’agit d’attitudes hostiles vis-à-vis du rôle, du fonctionnement ou de l’intervention de partis politiques. L’attitude anti-politique se traduit par un sentiment négatif non différencié et général vis-à-vis de tous les partis. On est déçu par toutes les formations politiques et par la politique en général. Le vote antipolitique exprime le sentiment qu’aujourd’hui, aucun homme politique n’est plus digne de confiance. Il est l’expression d’un vote de protestation. Pour certains, il signifie qu’on se venge d’un système politique où l’on se sent complètement marginalisé. L’électeur "antipolitique" est convaincu que les partis "conventionnels" ne sont pas à même de mettre fin à cette marginalisation. Certains de ces électeurs cherchent à trouver une solution à leurs aspirations auprès de partis "anti-système", qui rejettent l’essence même du régime démocratique. Les partis politiques d’extrême droite se sont presque toujours présentés eux-mêmes, en Europe occidentale, comme des "anti-partis" [29]. Pourtant, l’électeur protestataire ne fait pas explicitement le choix d’un système non démocratique. Il n’y a souvent pas d’autre projet politico-social à la base de sa protestation. Celle-ci fait référence à un dégoût plus émotionnel que rationnel, à des formes de déception, de revanche et de protestation contre le système dominant et ses formations politiques. La rapidité des mutations sociales (et l’essor de valeurs post-matérielles qui en résulte), la multiplication des sources d’information, l’extension des canaux de participation et l’individualisme font que les partis politiques ne réussissent plus à intégrer des pans significatifs de la société [30].

70En revanche, l’attitude apolitique ne fait pas référence à un sentiment de dégoût. Elle renvoie à un manque d’intérêt politique. L’individu ne parvient plus à s’orienter face aux événements politiques parce que ceux-ci sont devenus beaucoup trop complexes. La question, estime-t-il, ne vaut d’ailleurs pas la peine qu’on s’y intéresse. Plus simplement, il ne prend pas la politique au sérieux. Il s’en moque. Ce sentiment peut aller du "je ne m’en soucie pas" à "il faut bien voter pour quelque chose quand on y est obligé".

Tableau 9

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à l’impuissance ou à l’anti-politique

Tableau 9
AGA SP VB VU VLD CVP BL/N POP Impuissance-inefficacité politique (2,79) (2,76) 6,72 (4,85) (3,84) (4,24) 62,71 8,70 Anti-politique 6,82 (1,36) 13,70 (2,36) (2,64) (0,64) 32,05 5,75

Le pourcentage d’électeurs, par parti, qui motivent leur vote par référence à l’impuissance ou à l’anti-politique

71Environ 13,9 % de l’ensemble des électeurs motivent leur vote en invoquant des arguments qui relèvent des catégories "impuissance-inefficacité politique" et "anti-politique". Pour différentes raisons, une importante minorité d’électeurs mettent donc en cause la légitimité du système politique. Quelque 8,7 % d’entre eux le font parce qu’ils "ne comprennent plus" ou qu’ils "ne s’intéressent pas à la politique". Ils sont 6 % à avoir une attitude franchement anti-politique.

7289,3 % des personnes qui votent blanc ou nul relèvent de ces deux catégories. Les deux tiers environ de ces électeurs peuvent être considérés comme relevant de l’"impuissance-inefficacité politique", un tiers comme des électeurs "anti-politiques". Le VB est le seul parti qui ne soit pas sous-représenté dans l’une ou l’autre catégorie. Il est même fortement surreprésenté parmi les électeurs d’inspiration "anti-politique". Selon notre enquête, l’électorat du VB se compose à concurrence de 13,7 % d’électeurs "protestataires". Agalev compte dans son électorat 6,8 % d’électeurs protestataires. Parmi les électeurs de la catégorie "impuissance politique", seuls les "autres partis politiques" et le Vlaams Blok sont surreprésentés ou obtiennent la représentation attendue.

73Selon toute vraisemblance, les estimations relatives à ces groupes d’électeurs doivent être considérées comme des chiffres-planchers. Nous supposons en effet que, dans ces groupes, la non-réponse des électeurs est beaucoup plus élevée qu’auprès du reste de l’électorat Pourtant, l’effet du nombre d’électeurs d’inspiration "anti-politique" ou "apolitique" sur les rapports de force entre les partis est relativement limité. Des enquêtes effectuées à propos de l’absentéisme potentiel en cas de suppression de l’obligation de vote permettent d’avancer l’hypothèse qu’une partie importante des électeurs s’abstiendraient de voter [31]. Un simple calcul montre qu’il n’y aurait qu’une légère modification des rapports entre les partis. Il nous semble donc que la suggestion d’abroger l’obligation de vote pour éviter le vote extrémiste n’est pas fondée. Elle ne conduirait qu’à faire disparaître des informations sur les électeurs qui se trouvent à la marge ou à l’extérieur du système politique.

Les profils de motivation du vote

La méthode : HICLASS

74Les données de notre enquête peuvent également être présentées sous la forme d’une matrice. Cette matrice se compose d’objets (les partis) auxquels sont associés certains attributs (des motifs justifiant que l’on vote pour eux). L’objectif du présent chapitre est d’aboutir à une description prototypique de propriétés attribuées, sur la base des motifs indiqués, à chacun des partis pris séparément ou à un groupe de partis. Nous donnons simultanément une description de la structure du parti et de la structure des propriétés afin d’éclairer la relation entre l’une et l’autre. L’approche par classes hiérarchiques [32] HICLASS permet une description de cet ordre.

75Ce modèle a été mis au point dans le domaine de la perception sociale. Nous utilisons la variante disjonctive déterministe de ce modèle. Le modèle HICLASS est un modèle dit "set-theoretical" pour objet binaire (0/1) fondé sur l’analyse de propriétés. Il recherche la meilleure structure théorique de compilation possible pour des objets et leurs propriétés. Il représente simultanément les classes des objets et les classes des propriétés, les relations hiérarchiques entre les objets d’une part et les propriétés d’autre part, et la structure d’association qui relie la structure des classes d’objets à celle des classes de propriété [33]. Le but de l’analyse est de développer un modèle aussi simple que possible pour décrire les données binaires qui soit, en même temps, substantiellement pertinent Des critères de type "goodness-of-fit" sont disponibles pour décrire la représentation des différents objets et propriétés et pour évaluer le modèle dans sa globalité.

Graphique 1

Aperçu des motifs de vote significatifs pour les différents partis politiques (solution HICLASS)

Graphique 1

Aperçu des motifs de vote significatifs pour les différents partis politiques (solution HICLASS)

*Goodness-of-fît : 0,95
© ispo 1996

Les profils de motivation des partis

76La matrice de données "input" de notre analyse se compose d’une matrice dans laquelle les partis politiques (en ce compris le vote blanc et nul et les "autres petits partis") constituent les objets et les catégories de motifs décrites ci-dessus les propriétés. Lorsqu’un parti déterminé était significativement surreprésenté dans une catégorie déterminée, l’entrée de matrice est représentée par le chiffre 1. Dans tous les autres cas, l’entrée est le chiffre 0. De cette façon, nous obtenons une matrice qui donne un aperçu des propriétés associées aux différents partis politiques, à un degré supérieur à l’aléatoire. Pour le dire dans le jargon du management : une matrice reprenant les "sellingpoints" de chaque parti. Le graphique 1 est le résultat de cette analyse de données.

77Comment faut-il lire ce graphique ? Les partis politiques (les objets) sont tous reliés au moyen d’une "ligne brisée" aux classes dites de la "ligne de base". Ces classes contiennent les propriétés qui différencient le plus, entre eux, les partis ; il s’agit des propriétés uniques de chaque parti (les "sellingpoints" exclusifs de chacun d’entre eux, ou encore les "motifs uniques pour voter pour tel ou tel parti").

78Le VLD est ainsi relié par une ligne brisée à la classe où se retrouvent ses "sellingpoints" occlusifs, à savoir le vote économique et la défense des intérêts des indépendants. Mais le VLD a encore d’autres caractéristiques. Ces autres caractéristiques ne sont néanmoins plus exclusives. Il les partage avec d’autres partis politiques. Il partage par exemple le "vote négatif" avec la VU. On peut le constater en observant le lien entre les classes de base et la classe au niveau 1 où se retrouve la propriété "vote négatif". De cet endroit partent deux liaisons ; l’une conduit à la classe de base VLD, l’autre à la classe de base VU. La classe de base de cette dernière est vide, et coloriée en gris.

79Si on regarde, pour prendre un autre exemple, le niveau 2 de la classe indiquant comme propriété "rénovation", on voit que cette propriété est directement liée à la classe de base "autres petits partis" (AUTR). Il s’agit donc d’un "sellingpoint" propre à ces "autres petits partis". Mais la "rénovation" est également reliée (au niveau 1) à la propriété "programme général des partis" (programme). A son tour, cette propriété est reliée aux classes de base VLD et VB. En d’autres termes, la propriété "rénovation" est une propriété des "autres petits partis", mais les "autres petits partis" doivent partager ce "sellingpoint" avec le VLD et le VB, qui possèdent de plus en commun le "sellingpoint" "programme".

80Notre modèle ainsi construit présente un "overall goodness-of-fit" de 0,95. Un modèle à 100 % n’aboutirait qu’à ajouter dans les classes de niveau 1 la "revanche" et l’"impuissance" et à les relier respectivement aux classes de base BL/N (blanc et nul) et VB et aux classes de base BL/N et AUTR. Puisque la classe BL/N ne fait pas référence à un parti politique, le modèle que nous présentons nous paraît plus pertinent. Nous avons néanmoins indiqué, au moyen de parenthèses (), que le VB et les autres petits partis partageaient cette propriété avec la classe BL/N.

81Chaque propriété illustrée représente un public déterminé, c’est-à-dire que les électeurs citent cette propriété comme motif justifiant leur vote. Ces publics peuvent être classés selon la direction qu’indique leur motif de vote (par exemple le maintien maximal ou la modification de la sécurité sociale). Les partis qui sont reliés par une même propriété doivent également partager ce public. Voyons à présent quels sont les rapports entre les différents publics et les partis.

82Le résultat le plus frappant de notre analyse est que la VU n’a pas (plus) de "sellingpoint" unique. C’est ce qu’indique la case vide représentant la classe de base de ce parti. Elle doit partager ses "arguments de vente" avec quatre autres partis. La VU doit partager le "vote négatif" (c’est-à-dire le fait de voter pour un parti déterminé parce qu’on est opposé à un autre parti : 3,6 % de l’électorat de la VU) avec le VLD. Lorsque des gens votent pour la VU en raison des "valeurs générales (vagues)" qu’elle représente (8,7 %), elle partage cette caractéristique avec Agalev. De même, lorsque l’électeur choisit la VU pour des "motifs stratégiques" (10 % de son électorat), elle partage ce motif avec Agalev. Dans le cas de la VU, c’est pour "permettre la survie du parti". Les motifs d’ordre communautaire (5,3 %) et nationaliste (17,6 %) se trouvent partagés avec le VB. Enfin, la VU partage avec le CVP la motivation "candidats" (15,3 %). Le recul électoral de la VU se trouve ainsi éclairé de manière originale. Politiquement, le parti ne se construit plus que sur deux fondements : le nationalisme/l’argument communautaire, qu’elle doit partager de plus en plus avec le VB et les valeurs culturelles/progressistes qu’elle doit partager avec Agalev. Le vote stratégique et le vote négatif semblent avoir freiné quelque peu, lors des élections de 1995, les pertes encourues mais ne constituent, selon toute vraisemblance, pas un élément de stabilité future.

83Le SP a pour "sellingpoint" unique les permanences sociales (3,6 % de l’électorat du SP), le "rôle de victime dans l’affaire Agusta" (5,1 %) et "la défense des intérêts des ouvriers" (13,5 %). Politiquement, seul ce dernier élément est réellement important. L’effet du rôle de victime dans l’affaire Agusta est ponctuel, l’effet des permanences sociales est en recul (peut-être même est-il contreproductif), ce qui laisse supposer que ce motif va se marginaliser. Pour le reste, le SP est caractérisé par un vote découlant de l’"habitude" (21,1 %), de la "socialisation" (11,6 %) et de l’"emploi au sein du pilier" (pilarisation : 2 %). Il partage ces caractéristiques avec le CVP. A la lumière des résultats d’enquêtes précédentes, on peut s’attendre à ce que le renouvellement de l’électorat fasse s’estomper, au fil des années, l’effet du facteur "habitude". Il joue en effet surtout pour les électeurs âgés et les électeurs peu scolarisés. La "socialisation" par contre s’avère être un facteur de stabilité, mais pas de croissance. Enfin, le SP est associé aux différents thèmes que nous avons rassemblés sous l’appellation "sécurité sociale" (8,9 %). Il partage ce public avec le VLD, et dans une mesure moindre, avec les "autres petits partis". Il est manifeste qu’en l’occurrence, le SP et le VLD s’opposent l’un à l’autre. La défense des intérêts des ouvriers, les thèmes liés à la sécurité sociale et à la socialisation semblent être les propriétés des plus stables du SP.

84Les "sellingpoints" uniques du CVP sont d’une nature différente. Il y a d’abord l’"identification" avec le parti (3,4 % de l’électorat du CVP). Ensuite, il y a la motivation vague de "meilleur parti" (10,8 %) et l’"image du parti" (sens des responsabilités, langage clair, confiance dans le parti, etc. : 9,2 %). Par ailleurs, le fait d’être "chrétien ou catholique" joue également un rôle important en tant que propriété unique du CVP (9 %). Le CVP a comme point commun avec la VU ses candidats (13,4 %). Enfin, il a une "bonne évaluation générale" (4,1 %) et une "évaluation positive de son travail au gouvernement" (3,6 %) qui sont autant de motivations uniques. Politiquement, c’est la reconnaissance du CVP en tant que parti de pouvoir qui fait le poids. L’"identification avec le parti", qui est un fort prédicateur du vote, semble également être un facteur important, mais son poids est en baisse auprès des jeunes générations. Les autres propriétés uniques paraissent moins déterminantes pour l’avenir. On peut s’attendre, avec le progrès de la sécularisation, à ce que l’élément chrétien perde encore de son impact en tant que motif de vote. L’"image du parti" et l’argument "meilleur parti" qui lui est étroitement lié, sont vraisemblablement des propriétés peu enracinées et donc plutôt fragiles. Comme nous l’avons déjà dit, le CVP partage avec le SP les propriétés "socialisation" (14,3 %), "habitude" (23,3 %) et "pilarisation" (2,3 %). Les observations que nous avons faites à ce propos s’appliquent également, mutatis mutandis, au CVP. Enfin, il est frappant que la sécurité sociale ne soit pas reprise dans le profil électoral du CVP. Ceci résulte vraisemblablement du profil bas et centriste que s’est donné le CVP, sur ce thème, pendant la campagne pour répondre à la polarisation entre le SP et le VLD.

85Le motif économique (impôts, budget, dépenses publiques, …) (3,4 % de l’électorat du VLD) et la défense des intérêts des indépendants (entrepreneurs, professions libérales, …) (13,2 %) sont les éléments traditionnels qui caractérisent le profil du VLD. Le VLD partage avec la VU le "vote négatif’ (2,8 %) et avec le VB l’argument "ensemble du programme" (11,2 %). Pour le reste, on choisit le VLD parce que ce parti est considéré comme une force de rénovation (15,8 %) politique. Mais on vote également, pour le même motif, en faveur des "autres petits partis" et du VB. Enfin, le VLD porte haut la bannière de la "sécurité sociale", tout comme le SP (6,7 %). L’électeur qui vote en faveur du VLD est plutôt mû par des considérations de type "programme" (enjeux, défense d’intérêts, référence à des programmes généraux) et favorable au "renouveau" (dans le domaine politique et dans le domaine socio-économique). Le "vote négatif constitue l’exception à cette perspective mais cette propriété n’a qu’une importance marginale pour le VLD.

86Les "sellingpoints" uniques du VB sont de nature négative. On est "contre", et lorsqu’on est pour, il s’agit de l’intérêt personnel de l’électeur. Contre les "immigrés" (33 % de l’électorat du VB), contre la "criminalité" (en hausse) (4,8 %), pour l’"intérêt personnel" (4,4 %) et par "revanche" envers le système politique en général (13,7 %) : tel est le contenu de la classe de base VB. Vu l’ampleur marginale du nombre d’électeurs motivés par la criminalité et l’intérêt personnel, les principaux ressorts du vote en faveur du VB sont le thème des immigrés et de l’anti-politique (revanche). Le VB partage l’électorat d’inspiration anti-politique avec l’option blanc/nul, mais en tant que parti anti-système, il est le seul à s’efforcer explicitement de mobiliser ces électeurs. Le VB partage avec le VLD les (vagues) références à son "programme" (9,75 %) et à la "rénovation" (8,9 %). Il doit aussi partager ce dernier point avec les "autres petits partis" (12 %). Sans que nous puissions le vérifier sur la base des données du sondage post-électoral, nous pouvons avancer l’hypothèse suivante : l’élément programmatique doit être interprété comme une référence à un programme "anti-immigrés" et l’argument du renouveau doit être lu à la lumière des "sentiments anti-politiques".

87Le VB partage avec la VU le "marché" des électeurs d’inspiration communautaire (2,17 %) et nationaliste (3,23 %). Ce dernier groupe constitue vraisemblablement le noyau dur des partisans idéologiques du VB. Nous avons déjà indiqué qu’il s’agit d’une motivation peu répandue (2,21 % de tous les électeurs). La VU reste le parti qui a la préférence de cet électorat. On a cependant l’impression que la VU a dû céder en 1995 une partie du terrain de 1991.

88Agalev reste le parti dominant en matière d’environnement (21,9 %) et d’"écologie" (20,3 %). Agalev doit partager avec la VU des références à des "valeurs générales (vagues)" (9,6 %) et au "vote stratégique" (12,3 %). Politiquement, Agalev se bâtit donc sur un enjeu unique (environnement) et sur une orientation de valeurs culturelles-progressistes (post-matérielle, écologique). Outre que cet électorat est limité, l’importance du "vote stratégique" s’avère être pour ce parti un facteur d’instabilité potentielle.

89Passons enfin aux "autres petits partis" et à l’option blanc/nul. Les références au "bien-être de divers groupes (minoritaires)" (enfants, femmes, personnes âgées) et au "bien-être général" se traduisent par un vote en faveur des "petits partis" (13,5 %). C’est la défense des intérêts des personnes âgées qui se trouve ici à l’avant-plan. Vraisemblablement, il s’agit du vote en faveur du WOW. Aux yeux de certains électeurs, les "autres petits partis" sont également synonymes de rénovation (12 %). Les petits partis partagent avec l’option blanc/nul (62,7 %) un motif de vote : l’"impuissance politique" (13,2 %). Celui qui choisit l’option blanc/nul peut être défini comme un électeur "politiquement impuissant" ou d’inspiration anti-politique (32,1 %).

Conclusions

90Les profils et les motivations qu’indique l’électeur lui-même dans son propre cadre subjectif confirment un certain nombre de tendances bien connues, mais jettent une nouvelle lumière sur des éléments jusqu’ici sous-évalués. De plus, ils révèlent des tendances au changement L’un des résultats marquants de l’enquête est l’absence de lien entre le CVP et la sécurité sociale, et l’antagonisme fort qui oppose sur ce point le SP et le VLD.

91Les élections du 21 mai 1995 ont confirmé les modifications intervenues dans les rapports de force établis en 1991. Cette apparente stabilité dissimule en fait des glissements de voix plus importants entre partis politiques mais aussi la fragilité de plusieurs d’entre eux. L’analyse des motivations exprimées par les électeurs - nonobstant d’autres éléments d’ordre social, démographique et économique susceptibles de structurer l’adhésion à un parti - indique qu’une fidélité partisane s’appuie parfois sur des bases peu solides et que, dans certains cas, des perspectives à court terme ont une importance décisive.

92Il n’est pas resté grand-chose, chez les électeurs, de la volonté de rénovation qui a concerné pratiquement tous les partis après les élections de 1991. Quelque 215.000 électeurs ont été sensibles à l’idée du renouveau. De plus, l’un des deux partis qui est ressenti comme crédible dans ce domaine, à savoir le VB, est - quant à ces objectifs - un parti ouvertement anti-système et anti-démocratique.

93Les motivations principales d’un vote en faveur du VLD montrent qu’il est possible d’édifier une crédibilité sur le terrain de la rénovation tout en conservant un ancrage traditionnel (défense des intérêts des indépendants, des entrepreneurs, des professions libérales, …, vote économique) lié à des éléments de profil de type général (programme général et la sécurité sociale). Ni le reprofilage auquel a dû se plier la VU après l’accord de la Saint-Michel, ni l’opération de renouveau du président du CVP J. Van Hecke, ni la rénovation plutôt interne du SP (consultation des membres, réforme des statuts, appel à un front progressiste) n’ont été de nature à convaincre l’électeur sur ce terrain. L’idée même du renouveau n’est plus associée que de façon limitée à une formation politique comme Agalev qui était, dans les années quatre-vingts, le parti rénovateur par excellence avec le VB. Apparemment, ce parti est considéré comme du type "single issue" (environnement), "single value" (culturel-progressiste).

94La faiblesse structurelle de la VU est patente. Ce parti ne possède plus aucun trait caractéristique unique. Il doit partager avec d’autres partis chacun de ses publics.

95Près de 15 % de l’électorat, soit quelque 550.000 électeurs, expriment un sentiment d’impuissance ou d’inefficacité politique ou sont animés par des sentiments anti-politiques. Comme nous l’avons indiqué, c’est là une estimation plancher. Parmi les premiers, 51 % se mettent eux-mêmes hors-jeu en votant blanc ou nul. A l’exception du VB et des "autres petits partis", toutes les autres formations politiques sont structurellement sous-représentées dans cette catégorie d’électeurs. Les électeurs d’inspiration anti-politique sont 39 % à ne pas jouer le jeu en choisissant l’option blanc/nul. Dans ce groupe d’électeurs, le VB est le seul parti à être significativement surreprésenté avec 13,7 % de son électorat, soit 27 % des électeurs "anti-politiques". Dans cette catégorie d’électeurs, Agalev attire proportionnellement autant de votes que dans l’ensemble de l’électorat. Les autres partis qui siègent au Parlement sont ici fortement sous-représentés.

96Alors que le motif "law and order" et le motif de l’intérêt personnel sont plutôt marginaux pour le VB et que, dans la population, le thème de l’immigration n’est plus aussi prioritaire [34], alors que le public d’inspiration nationaliste et communautaire semble être d’une ampleur très limitée au sein du corps électoral, il semble bien que l’électeur d’inspiration anti-politique constitue pour le VB un réservoir électoral potentiel. Il est pour l’essentiel le seul parti qui recrute véritablement des électeurs dans ce vivier.

97Notre étude donne du paysage électoral flamand une image hybride. Rien ne garantit la stabilité dans les rapports entre partis politiques. Une part importante des électeurs continue à s’identifier positivement à l’un ou l’autre parti politique. Mais on trouve, au sein du corps électoral, un nombre appréciable de gens qui expriment des motivations apolitiques ou antipolitiques. C’est là un signal sans ambiguïté qui s’adresse à tous les partis politiques démocratiques.

Notes

  • [1]
    Voir E. Lentzen et P. Blaise, "Les élections du 21 mai 1995.1. La Chambre et le Sénat", Courrier hebdomadaire, CRISP, n°1481-1482,1995.
  • [2]
    Le travail sur le terrain a été réalise par le bureau Field Quality Control et la formation des intervieweurs par Ann Carton sous la direction de Marc Swyngedouw. Les analyses ont été réalisées par Marc Swyngedouw et Roeland Beerten. Marc Swyngedouw, Roeland Beerten et Jaak Billiet ont réalisé cette étude dans le cadre de l’Interuniversitair Steunpunt Politiek Opinieonderzoek-ISPO, Département de sociologie, KULeuven.
  • [3]
    A. Campbell, P. Converse, W. Miller et D. Stokes, The American Voter, an Abridgement, Wiley, New York, 1964, pp.15, 27 et 109.
  • [4]
    Nous nous basons sur les ouvrages suivants : J. Billiet, G. Loosveldt, L. Waterplas, Het Survey-Intewiew onderzocht, Leuven, SOI, 1984 ; S. Sudman, N. Bradburn, Response effects in Surveys. A Review and Synthesis, Chicago, Aldine, 1974 ; H. Schuman, S. Presser, Questions and Answers in Attitude Surveys : Experiments on Question Form, Wording and Context, New York, Academic Press, 1981 ; J. Van Holsteyn, Het woord is aan de Kiezer, thèse de doctorat Rijksuniversiteit Leiden, DSWO Press, 1994 ; T. Wilson, S. Lafleur, D. Anderson, "The Validity and Consequences of Verbal Reports about Attitudes", in N. Schwarz, S. Sudman (eds), Answering Questions : Methodology for Determining Cognitiue and Communicative Processes in Survey Research, Jossey Bass, San Francisco, 1996, pp.91-114.
  • [5]
    La même remarque est formulée pour critiquer les réponses à des questions fermées sur des attitudes, J.R. Zaller, The Nature and Origins of Mass Opinion, Cambridge University Press, 1992, p.49.En ligne
  • [6]
    Bradburn (1983) cité dans J. Van Holsteyn, op. cit., 1994, p.39.
  • [7]
    A. Carton, M. Swyngedouw, J. Billiet, R. Beerten, Source Book of the Voters’ Study in Connection with the 1991 General Election, ISPO/SOI, Louvain, 1993, pp.222-224.
  • [8]
    J. Van Holsteyn, op. cit., pp.268-270 ; C. Van Der Eijk, M. Koopman, B. Niemöller, Dutch Parliamentary Election Study 1982, Amsterdam, CT Press, 1983, pp.390-397.
  • [9]
    A. Agresti, Categorical Data Analysis, Wiley, New York, 1990, pp.366-370 ; R. Popping, User’s Manuel AGREE 6.0, Computing Agreement on Nominal Data, Groningen, ProGAMMA, 1995, pp.8-9. Dans la phase du test, il a été fait usage du logiciel AGREE 6.0. Parce qu’il était limité quant au nombre de catégories admises (maximum 60), le test de fiabilité définitif de l’encodage s’est fait au moyen du logiciel SPSS 6.12.
  • [10]
    La méthode de pondération utilisée est identique à celle dont il a été fait usage pour les enquêtes post-électorales de ISPO en 1991 et 1995. Voir ISPO/PIOP, 1991 General Election Study Belgium Codebook and Questionnaire, Louvain - Louvain-la-Neuve, 1995, pp.21-23.
  • [11]
    C. Van Der Eijk, K Niemöller, "Electoral Alignments in the Netherlands", Electoral Studies, 1987, 6, pp.17-30, R. Inglehart, The Silent Revolution, Princeton, Princeton University Press, 1977 ; L.W. Milbrath, "Environmental Beliefs and Values, in M.G. Hermann, Political Psychology, Jossey-Bass, London, 1986 ; M. Swyngedouw, Waar voor je Waarden, Louvain, ISPO/SOI, 1992 ; M. Swyngedouw, "Nieuwe Breuklijnen in de Vlaamse Politiek ?", in M. Swyngedouw, e.a. (eds), Kiezen is Verliezen. Onderzoek naar de Politieke Opvattingen van Vlamingen, Louvain-Amersfoort, Acco, 1993 ; M. Elchardus, Gekaapte Deugden, VUB, Centrum voor Sociologie, TOR, 1994 ; J. Billiet, H. De Witte, "Attitudinal Dispositions to Vote for a «New» Extreme Right-Wing Party. The case of «Vlaams Blok»", European Journal of Political Research, 1995, 27, (2), pp.181-202.
  • [12]
    I. Budge, D. Farlie, Explaining and predicting elections : issue-effects and party strategies in twenty-three democraties, Londres, Allen and Unwin, 1983.
  • [13]
    Downs, An economic theory of democracy, 1957.
  • [14]
    B. Maddens, op. cit. ; 1994, B. Maddens, "Directional Theory of Issue Voting : the case of the 1991 Parliamentary Elections in Flanders", Electoral Studies, Vol. 15, 1, 1996, pp.53-70.
  • [15]
    A première vue, ce chiffre peut paraître très peu élevé. Néanmoins, il n’est guère éloigné des proportions auxquelles aboutissent B. Maddens, R. Beerten et J. Billiet sur la base de l’enquête électorale de 1991 si l’on sélectionne, parmi les "autonomistes flamands", ceux qui jugent le thème communautaire important (soit 3,12 %). B. Maddens, R. Beerten et J. Billiet, O dierbaar België ? Het Natiebewustzijn van Vlamingen en Welen, ISPO/SOI, Louvain, 1994, p.60. Notre calcul est basé sur le tableau 4.1.
  • [16]
    G. Almond, "The Study of Political Culture", in D. Berg-Schlosser, R. Rytlewski, Political Culture in Germany, 1993, p.23.
  • [17]
    J. Thomassen, "Party Identification as a Cross-National Concept : its Meaning in the Netherlands", in I. Budge, I. Crewe, D. Farlie (eds), Party Identification and Beyond. Representations of Voting and Party Competition, John Wiley, 1976.
  • [18]
    R. Beerten et J. Billiet, "Een Grijze Stem ? Politieke Houdingen en Gedragingen van de Ouderen in Vlaanderen", Louvain, ISPO-bulletin, 1993/10.
  • [19]
    A. Heath, G. Evans, "Tactical Voting : Concepts, Measurement and Findings", British Journal of Political Science, Vol. 24 (4), 1994, pp.557-561.
  • [20]
    M. Franklin, R. Niemi, G. Whitten, "The Two Faces of Tactical Voting", British Journal of Political Science, vol. 24 (4), 1994, pp.549-557.
  • [21]
    S. Depauw, "Rational Choice, Sociaal Dienstbetoon en de Mythe van de Collectieve Probleemoplossing", Res Publica, 1996 (1), pp.135-157.
  • [22]
    L. De Winter, P. Janssens, De Stemmotivatie van de Belgische Kiezer, Dimarso-Gallup, 1988, p.45.
  • [23]
    E. Das, "De Personale Keuze bij de Parlementsverkiezingen van 24 november 1991", Res Publica, 1992, (2), pp.155-173.
  • [24]
    L. Tobback attire 31,3 % des 7,6 % d’électeurs du SP qui motivent leur vote par référence à un candidat. G. Verhofstadt attire quant à lui 25,3 % des 7,6 % d’électeurs du VLD qui justifient leur vote de la même façon. Sauf pour B. Anciaux, il n’y a pas d’effet lié au sexe.
  • [25]
    M. Lipset, S. Rokkan, "Cleavage Structures, Party Systems and Voter Alignment", in M. Lipset, S. Rokkan (eds), Party Systems and Voter Alignments, Free Press, New York, 1967.
  • [26]
    Cette catégorie comprend les indépendants, les classes moyennes, les professions libérales, les entreprises, les entrepreneurs, le monde des affaires et les agriculteurs.
  • [27]
    L. Huyse, De Gewapende Vrede, Louvain, Kritak, 1980 ; J. Billiet, "Verzuiling en Politiek ; Theoretische Beschouwing over Belgïe na 1945", Belgisch Tijdschrift voor Nieuwste Geschiedenis, 13 (1) 1982 ;
  • [28]
    P. Ignazi, "The Intellectual Basis of Right-Wing Anti-Partyism", European Journal of Political Research, Vol. 29 (3), 1996, pp.279-296.
  • [29]
    G. Betz, Radical Right-Wing Populism in Western Europe, New York, St Martin’s Press, 1994.
  • [30]
    T. Poguntke, S. Scarrow, "The Politics of Anti-Party Sentiment : Introduction", European Journal of Politkal Research, Vol. 29 (3), 1996, pp.257-262.
  • [31]
    J. Ackaert, L. De Winter, "De Afwezigen hebben Andermaal Ongelijk : De Stemverzaking in VIaanderen op 24 november 1991", in M. Swyngedouw, e.a. (red), Kiezen is Verliezen. Onderzoek naar de Politieke Opvatting van Vlamingen, Acco, Louvain-Amersfoort, 1993, pp.67-82.
  • [32]
    Voir entre autres P. De Boeck, S. Rosenberg, "Hierarchical Classes : Model and Data analysis", Psychometrika, 53, 1988, pp.361-381 ; G. Storms, I. Van Mechelen, P. De Boeck, "Structural Analysis of Intention and Extension of Semantic Concepts", European Journal of Cognitive Psychology, 1994, 6 (1), pp.43-75 ; P. De Boeck, S. Rosenberg, I. Van Mechelen, "The Hierarchical Classes Approach : a Review", in I. Van Mechelen et al. (eds), Categories and Concepts. Theoretical Views and Inductive Data Analysis, Academic Press, 1993, New York, pp.265-286. Nos remerciements à Gert Storms (KULeuven/KUBrussel) pour son aide dans l’étude de HICLASS.
  • [33]
    G. Storms, et al., op. cit., p.45.
  • [34]
    Les comparaisons avec 1991 ne sont que provisoires, en raison des différences quant aux codes utilisés. Toutefois il semble que dans l’électorat global comme dans celui du VB, le thème de l’immigration (le vote anti-immigré) ait perdu de son importance. Ensemble de l’électorat : 1991 : 5,5 %, 1995 : 4,2 % ; électorat du VB : 1991 : 52 % (explicitement anti-immigré), 1995 : 33 %. Voir J. Billiet, M. Swyngedouw, A. Carton, Stemmen voor VB of Rossem : de Kiezer zelf aan het Woord, ISPO-Bulletin, 1992/2. Dans la mesure où les données de 1991 ont été recueillies dans une étude post-électorale au cours de laquelle les opinions manifestées dans les médias ont pu avoir une influence sur les motifs rapportés par les électeurs, ces données doivent être considérées avec une certaine prudence.
Marc Swyngedouw
Roeland Beerten
Jaak Billiet
traduction de
Serge Govaert
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A l'issue du scrutin du 21 mai 1995 pour le renouvellement de la Chambre des représentants, les résultats dans les cantons flamands ne laissaient pas apparaître de changements de grande ampleur par rapport au scrutin précédent. Aucun des partis qui présentaient des listes aux élections de 1995 et de 1991 n'a vu son résultat électoral profondément bouleversé, même si les rapports de force entre les formations politiques s'en sont trouvés modifiés, le VLD devenant la deuxième force politique dans les cantons flamands, devançant de peu le SP mais restant néanmoins loin derrière le premier parti, le CVP. L'écart maximal des voix entre les deux scrutins est de 2%, 2% en plus pour le VLD et le Vlaams Blok, 2% en moins pour la VU. La seule modification significative provient de la non-présentation en 1995 de la liste Rossem, gui avait recueilli 5,2% en 1991 (1). Pourtant, le contexte particulier dans lequel se sont déroulées les élections du 21 mai 1995 avait laissé présager des bouleversements: le SP se trouvait au centre d'enquêtes judiciaires portant sur son financement passé par des fonds privés, dont la presse relayait quotidiennement les étapes ou en rappelait l'existence ; le VLD, dirigé alors par Guy Verhofstadt, faisait de ces élections 'l'heure de la vérité' et ambitionnait de devenir la première force politique en Flandre
Mis en ligne sur Cairn.info le 05/06/2014
https://doi.org/10.3917/cris.1557.0001
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