CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Quatrième Partie : La récente législation linguistique et le fait bruxellois

1En ce qui concerne Bruxelles, la déclaration gouvernementale du 2 mai 1961 du Gouvernement Lefèvre-Spaak s’exprime de la manière suivante :

2

"Il (le Gouvernement) s’efforcera de trouver une solution au problème des communes de la périphérie de l’agglomération bruxelloise où se pose un problème délicat en raison de l’installation de nombreuses familles dont les membres exercent leur activité professionnelle dans la capitale.
"Dans la capitale elle-même, tous les moyens seront mis en œuvre afin qu’elle soit vraiment le lieu de rencontre, sur la base d’une complète égalité, entre les citoyens d’expression française et les citoyens d’expression néerlandaise".

3Au cours de la décennie précédant la dernière guerre mondiale, quatre lois concernant l’emploi des langues avaient été votées au Parlement :

  • la loi du 28 juin 1932 sur l’emploi des langues en matière administrative,
  • la loi du 14 juillet 1932 sur l’emploi des langues en matière d’enseignement,
  • la loi du 15 juin 1935 sur l’emploi des langues en matière judiciaire,
  • la loi du 30 juillet 1938 sur l’emploi des langues à l’armée.

4A plusieurs reprises, des voix, principalement flamandes, s’étaient élevées en faveur de l’adaptation de cette législation, à qui ses adversaires reprochaient à titre principal sa non-application et l’absence de sanctions réelles, à l’exception de la loi sur l’emploi des langues en matière judiciaire.

5Dans un discours prononcé à la Chambre des Représentants le 9 juillet 1963, le Ministre de l’Intérieur et de la Fonction Publique exposa une fois de plus les raisons qui, selon lui, militaient en faveur de cette adaptation.

6La loi de 1932 présentait des lacunes : Elle laissait subsister des doutes concernant son champ d’application (était-elle d’application dans les parastataux ?). Le manque de sanctions en rendait l’application très théorique en plus d’un cas.

7Un nouveau texte paraissait indispensable pour combler ces lacunes (d’où la longueur inusitée de la nouvelle loi) et pour mettre au point toute une série de sanctions, gages (aux yeux des Flamands) de l’application de la loi.

8D’autre part, certaines dispositions de la loi avaient été vivement contestées. Ce fut notamment le cas pour le recensement linguistique qui fut supprimé par le gouvernement sous la pression des flamands, quasi unanimes en la matière.

9Mais il fallait, dès lors, qu’on entérinait la suppression du recensement linguistique, viser à l’établissement de nouvelles formules, notamment pour les administrations-centrales, la capitale (au sens large du mot), les communes dotées d’un régime particulier (les six communes périphériques).

10Enfin, certains principes instaurés par la législation de 1932 ont fortement influencé notre vie nationale et il convenait d’en tirer toutes les conclusions (unilinguisme régional).

11La nouvelle législation implique, d’après les déclarations gouvernementales, trois options principales :

  • l’intégrité culturelle des régions par un enseignement ad hoc ;
  • l’adaptation de l’Administration Centrale ;
  • la restructuration des communes de la capitale, afin qu’elles soient en mesure de remplir complètement leur rôle national et international.

12L’arsenal des lois linguistiques en vigueur vient donc d’être partiellement remplacé par quatre nouvelles lois qui sont entrées en vigueur le 1er septembre 1963.

13Il s’agit de la loi du 8 novembre 1962, modifiant les limites des provinces, arrondissements et communes et modifiant les lois du 28 juin 1932 sur l’emploi des langues en matière administrative et la loi du 14 juillet 1932 concernant le régime linguistique de l’enseignement primaire et de l’enseignement moyen (Moniteur Belge du 22 novembre 1962).

14L’entrée en vigueur de cette loi avait été retardée jusqu’à ce que la loi modifiant complètement la loi du 28 juin 1932 sur l’emploi des langues en matière administrative et établissant notamment le statut de Bruxelles-Capitale soit votée. Mais il avait été prévu (article 12 de la loi du 8 novembre 1962) que cette loi entrerait en vigueur le 1er septembre 1963.

15Cette date limite du 1er septembre 1963 a en fait dominé toute l’activité du Parlement Belge en matière linguistique pendant les derniers mois et, avant son départ en vacance, le Parlement belge adopta trois autres lois :

  • la loi du 30 juillet 1963 concernant le régime linguistique dans l’enseignement (Moniteur Belge du 22 août 1963) [2],
  • la loi du 2 août 1963 sur l’emploi des langues en matière administrative (Moniteur Belge du 22 août 1963) ;
  • la loi du 9 août 1963 modifiant le ressort territorial de certaines juridictions et la loi du 15 juin 1935 concernant l’emploi des langues en matière judiciaire (Moniteur Belge du 13 août 1963).

16De la législation linguistique d’avant-guerre subsiste seule dans son intégralité la loi du 30 juillet 1938 sur l’emploi des langues à l’armée. Les trois autres lois (administration, enseignement, justice) ont donc été soit totalement, soit partiellement renouvelées.

17Il n’est évidemment pas question dans les limites de cette étude de donner une analyse exhaustive de cette législation à la fois importante et par sa matière propre et par les implications d’ordre politique qu’elle comporte.

18Disons simplement pour donner une idée de l’ampleur du problème que la loi du 2 août 1963, la plus importante il est vrai, comporte 58 articles, (alors que la loi de 1932 n’en comportait que 14), et qu’un de ces articles, l’article 57, prévoit expressément une coordination des textes notamment avec la loi du 8 novembre 1962.

19D’ores et déjà, ces textes ont donné lieu à des commentaires [3] mais il n’est que trop évident qu’il faudra attendre-la publication de plusieurs dizaines d’arrêtés d’application avant d’avoir une vue complète du problème [4].

20* * *

21Ainsi que nous venons de le faire remarquer, c’est la loi du 2 août 1963 sur l’emploi des langues en matière administrative, qui apparaît comme la plus importante. Les autres textes s’y refirent d’ailleurs à plusieurs reprises [5].

22Ce texte met surtout l’accent sur la restructuration de l’agglomération bruxelloise et dans une certaine mesure de sa périphérie, sur les mesures de contrôle et sur les sanctions.

23Le texte légal rappelle que le pays comprend 4 régions linguistiques :

  1. la région de langue néerlandaise,
  2. la région de langue française,
  3. la région de langue allemande,
  4. Bruxelles-Capitale.

24L’arrondissement de Bruxelles qui continue à former un seul et unique arrondissement electoral (art. 3, § 2) est réparti en plusieurs arrondissements administratifs :

  1. arrondissement de Bruxelles-Capitale (les 19 communes),
  2. arrondissement de Hal-Vilvorde,
  3. arrondissement ad hoc groupant 6 communes à régime spécial ou à facilités : Drogenbos, Kraainem, Linkebeek, Rhode-St-Genèse, Wemmel, Wezembeek-Oppem.

25Une des dispositions de la loi du 2 août 1963 qui a le plus frappé l’imagination des observateurs bruxellois est celle créant un commissaire du gouvernement pour la capitale qui portera le titre de vice-gouverneur de la province de Brabant. Si cette nouvelle fonction trouve incontestablement son origine dans un souci d’ordre linguistique, il ne faudrait pourtant pas s’imaginer que les préoccupations de ce haut fonctionnaire se limiteront aux : seules questions linguistiques.

26En effet, selon le § 3 de l’art. 6, le vice-gouverneur de la province de Brabant, commissaire du gouvernement pour la capitale du Royaume, est spécialement chargé :

  1. de coordonner les efforts tendant au développement du rôle international et européen de Bruxelles-Capitale, notamment en tant que siège d’institutions internationales et européennes ;
  2. d’y favoriser l’épanouissement harmonieux des cultures française et néerlandaise, en proposant notamment au gouvernement les mesures utiles au développement des établissements d’enseignement des deux régimes linguistiques, à l’extension de la connaissance des deux langues et à l’encouragement des activités culturelles dans les divers domaines ;
  3. d’y veiller à l’application des lors et règlements relatifs à l’emploi des langues en matière administrative et en matière scolaire. A cette fin, les instances chargées de la surveillance de l’exécution de ces lois le tiennent au courant de leurs constatations relatives à Bruxelles-Capitale ;
  4. de proposer au gouvernement et de coordonner la politique de l’aménagement et de l’équipement du territoire de Bruxelles-Capitale.

27Le statut et le rôle de la Commission Permanente de Contrôle linguistique sont notoirement amplifiés par rapport à la situation qui existait sous le régime de la loi de 1932.

28* * *

29La loi du 30 juillet 1963 concernant le régime linguistique dans l’enseignement contient également des dispositions très importantes, susceptibles d’influencer l’avenir de l’agglomération bruxelloise et des communes périphériques.

30Dans l’arrondissement de Bruxelles-Capitale, la langue maternelle ou usuelle de l’enfant devra déterminer la langue de l’enseignement.

31Contrairement à ce qui se passait sous la loi de 1932, les directions d’écoles flamandes seront autonomes et ici, comme en matière administrative, le contrôle sera sérieusement renforcé et des sanctions sont prévues.

32La loi stipule également que l’Etat organise et subventionne tout enseignement gardien et primaire nécessaire pour les parents qui souhaitent un enseignement en langue néerlandaise.

33L’article 21 de la loi du 30 juillet 1963 s’exprime très clairement à ce propos :

34

"Aussi longtemps que les chefs de famille de l’arrondissement de Bruxelles-Capitale n’ont pas la possibilité d’envoyer leurs enfants, à une distance raisonnable, dans une école officielle de langue néerlandaise, l’Etat crée annuellement dix écoles primaires avec section gardienne, dont l’emplacement est décidé sur avis de l’inspection linguistique".

35L’application de ces textes légaux risque d’avoir des implications financières assez lourdes similaires à celles qui suivirent l’application du Pacte Scolaire. Mais aussi longtemps que tous les arrêtés d’application et que toutes les circulaires interprétatives ne seront pas publiées, il n’est pas possible de mesurer exactement la hauteur des dépenses nouvelles.

36L’enseignement de la seconde langue est obligatoire dans les écoles primaires de l’arrondissement de Bruxelles-Capitale à raison de 3 heures par semaine an deuxième degré et de cinq heures par semaine aux troisième et quatrième degrés.

37Dans les établissements d’enseignement secondaire de l’arrondissement de Bruxelles-Capitale où une seconde langue figure au programme, cette seconde langue sera le français ou le néerlandais et non l’anglais ou l’allemand.

38Notons que c’est dans la loi du 2 août sur l’emploi des langues en matière administrative et non comme on pouvait s’y attendre dans la loi du 30 juillet 1963, que l’on trouvera les stipulations relatives au régime spécial pour les six communes à "facilités" : Drogenbos, Kraainem, Linkebeek, Rhode-St-Genèse, Wemmel et Wezembeek-Oppem.

39* * *

40Par contre, les deux autres lois faisant partie de l’actuel train de lois linguistiques contiennent des dispositions qui, sauf pour les initiés, frappent moins les imaginations des Bruxellois que les deux lois que nous venons de citer.

41La loi du 8 novembre 1962 consacrée principalement à la fixation de la province linguistique n’apporte en effet que des changements peu importants à la situation de l’arrondissement de Bruxelles [6].

42De même, la loi du 9 août 1963 modifiant la loi du 15 juin 1935 concernant l’emploi des langues en matière judiciaire contient quelques aménagements concernant l’arrondissement de Bruxelles [7].

43* * *

44Ces textes légaux sont le résultat de compromis et à ce titre, il est bien évident qu’ils ne peuvent donner entièrement satisfaction à toutes les parties en cause. Certains (flamands pour la plupart) estiment que leurs dispositions ne sont pas assez radicales. D’autres au contraire (wallons et bruxellois francophones pour la plupart) estiment qu’il s’agit là de lois de contrainte.

45Comme toujours on pareil cas, il convient d’attendre l’application de ces textes avant de pouvoir porter un jugement objectif à leur sujet. Il est trop tôt pour le faire mais déjà certaines opinions sont émises.

46Les quatre fonctionnaires principaux chargés de l’application de la plus importante de ces lois, celle du 2 août 1963, concernant l’emploi des langues en matière administrative, sont :

  • le vice-gouverneur du Brabant,
  • le président de la Commission Permanente de Contrôle linguistique,
  • le secrétaire permanent au Recrutement,
  • le haut fonctionnaire au Ministère de l’Intérieur ayant les affaires linguistiques dans ses attributions.

47Ces quatre fonctions sont soit occupées par des flamands, soit revendiquées par les flamands.

48C’est ce que certains observateurs ont appelé le "carré magique".

49Alors que cette constatation fait l’objet de commentaires plus ou moins amers et désabusés du côté wallon et francophone, des flamands, même parmi les plus modérés, ne manquent pas de faire observer qu’en cette matière, les Flamands sont toujours demandeurs et que le seul moyen de leur faire obtenir satisfaction est de leur mettre en mains tous les leviers de commande. Certains ajoutent que le déséquilibre en défaveur des Flamands constaté dans d’autres secteurs de l’administration compense largement l’avantage acquis dans ce domaine spécifique.

50M. Cappuyns, magistrat à Liège, d’origine flamande, vient d’être nommé en qualité de vice-gouverneur et c’est dans les termes suivants qu’un important journal bruxellois accueille cette importante désignation [8] :

51

"En raison des sacro-saints dosages politico-linguistiques, il était entendu que le vice-gouverneur du Brabant serait un socialiste flamand".

52Depuis le vote de la loi, dans le courant du mois de juillet, la presse avait cité plusieurs candidats possibles au poste de vice-gouverneur. A une ou doux exceptions près, tous étaient flamands, et il semble bien en effet que l’intention du Bureau du Parti Socialiste était, des l’origine, de désigner un flamand, nonobstant le fait que le gouverneur du Brabant, M. de Néeff, et le commissaire d’arrondissement de Bruxelles, M. Sacré, étaient également flamands.

53Il convient de reconnaître également que la presse bruxelloise, si prompte à s’enflammer pour toutes les questions, d’ordre linguistique (que l’on se souvienne de son attitude à propos de la question du recensement) se montra d’une rare discrétion en l’occurrence. A l’exception de l’article de fond publié le 10 novembre 1963, par Dimanche-Presse [9], il n’y eut pratiquement que de brèves communications, plus ou moins ironisantes, sur les difficultés de la désignation du vice-gouverneur.

54D’ores et déjà, on peut affirmer que le vice-gouverneur, dont le rôle s’avère particulièrement difficile et délicat, ne jouit pas de la sympathie déclarée de la population bruxelloise d’expression française et La Gauche dans un important article consacré à la situation bruxelloise, le 6 décembre 1963, faisait allusion à cotte situation [10].

55Cependant que le Standaard, organe des milieux radicaux flamands estimait que M. Cappuyns, quoique d’origine flamande, parviendrait très rapidement à se faire adopter par l’élite bruxelloise, ayant fait ses études en français et ayant vécu en milieu francophone jusqu’à présent [11].

56Quant à la Commission permanente de Contrôle linguistique, composée d’un président et de 11 membres (5 flamands, 5 francophones, 1 de langue allemande), dont la mission de surveiller l’application de la loi du 2 août 1963 est tellement importante, elle ne fonctionne pas encore alors que la loi est entrée en vigueur le 1er septembre dernier, ce qui a déjà soulevé de nombreuses critiques dans les milieux flamands.

57Ce n’est qu’à la rentrée parlementaire, vers la mi-janvier, que la Chambre des Représentants fera vraisemblablement les présentations prescrites par l’article 53 de la loi du 2 août 1963.

58Comme nous l’avons vu plus haut, la fonction de président de cette Commission est revendiquée par les Flamands [12].

Cinquième Partie : Les principaux cadres d’application de la législation linguistique à Bruxelles

59Avoir donné une vue forcément synthétique de la complexité du fait bruxellois et après avoir tracé à grands traits la récente législation linguistique et ses implications concernant la région bruxelloise, le moment est venu d’examiner, sans davantage approfondir, quelques grands cadres dans les limites desquels l’application (ou la non-application selon certains milieux flamands) de ces textes légaux va se dérouler.

60Nous avons retenu pour les besoins de cette analyse les partis politiques, la presse et les groupes de pression.

A – Les partis politiques et le Fait bruxellois

61Le P.S.C. et le ?.S.?. qui participent conjointement au pouvoir et qui, à ce titre, ont pris la responsabilité du vote des lois linguistiques ont donc, en principe, exprimé leur point de vue en matière du statut linguistique de Bruxelles. Nous disons bien, en principe, car il paraît incontestable que, pour un certain nombre de mandataires bruxellois de ces deux partis, le vote des textes en question a revêtu l’aspect d’un vote de discipline sur des textes globaux, dont l’une ou l’autre disposition particulière, notamment relative au statut de Bruxelles, n’entraînait pas leur adhésion profonde. C’est d’ailleurs la constatation de ce peu d’enthousiasme (et dans certains cas, cette expression est faible), qui fut notamment invoquée à plusieurs reprises par les Flamands et plus particulièrement par les P.S.C. flamands, pour justifier le renforcement de tout l’appareil de contrôle et de sanctions (vice-gouverneur, Commission permanente de contrôle linguistique, procédure de nullité des actes, etc…) de l’actuel train de lois linguistiques.

62Lorsque l’on compare le texte adopté au Congrès d’Ostende du P.S.C. les 1, 2 et 3 décembre 1961 sur l’emploi des langues [13] et le texte des lois du 30 juillet 1963 et du 2 août 1963 sur l’emploi des langues en matière administrative et en matière d’enseignement, on constate en plus d’un point une similitude qui ne peut manquer de retenir l’attention.

63Le P.S.B. ne s’est pas prononcé de manière expresse sur les questions purement linguistiques, le "Compromis des Socialistes" étant essentiellement relatif aux questions constitutionnelles et ayant d’ailleurs été adopté après le vote des lois linguistiques.

64Quant au P.L.P., il avait publié au mois de juin 1963 son programme linguistique [14] qui préconisait notamment la création d’une agglomération bruxelloise élargie (comptant les 19 communes plus celles des 6 communes périphériques à facilités qui émettraient le souhait de se joindre à l’agglomération actuelle) et d’une zone de rencontre établissant un large bilinguisme dans les communes de Strombeek, Vilvorde, Machelen, Diegem, Woluwe-St-Etienne, Overijse, Hœilaart, Vlezenbeek, Herbeek, Grand-Bigard, Zellick, Dilbeek, Leeuw-St-Pierre, pour autant que ces communes en manifestent expressément le souhait.

65Il y a quelques années, le député-bourgmestre de Schaerbeek, M. Fernand Blum, avait, avec quelques collègues libéraux, déposé une proposition de loi qui allait encore plus loin dans cette voie et qui permettait d’étendre le régime bilingue de l’agglomération bruxelloise à toutes les communes de l’arrondissement de Bruxelles qui le désireraient.

66Ces propositions ont toujours rencontré la plus vive hostilité de milieux flamands, même modérés, qui affirmaient que la soi-disante bilinguisation de la capitale n’était qu’une hypocrisie et que dès lors, étendre cette situation à l’ensemble de l’arrondissement de Bruxelles consisterait à franciser une partie importante du Brabant flamand.

67Or un slogan quasi permanent du mouvement flamand de l’après-guerre vise précisément à empêcher l’extension de la fameuse tache d’huile de la francisation (olievlek).

68Ainsi que nous l’avons vu précédemment, le Parti Libéral (P.L.P.) possède à Bruxelles et dans l’agglomération bruxelloise des forces proportionnellement plus importantes que dans le reste du pays, forces qu’il est du reste parvenu à valoriser au maximum par une très habile tactique de représentation dans tous les collèges échevinaux où la présence des libéraux n’était pas pratiquement exclue par l’existence de majorités absolues de partis adverses [15].

69Traditionnellement, le Parti libéral a mené à Bruxelles une politique très favorable à la francisation et les milieux favorables au mouvement flamand ne manquent jamais de mettre en lumière ce qu’ils considèrent comme la responsabilité majeure des milieux libéraux bruxellois dans le processus de dénationalisation des flamands qui se sont fixés dans l’agglomération depuis plusieurs décennies.

70Traditionnellement également, le Parti libéral tire avantage, du moins dans l’agglomération bruxelloise, des positions plus ou moins radicales qu’il adopte en faveur d’une politique francophone à Bruxelles. Ayant voté contre les récentes lois linguistiques au Parlement, les mandataires libéraux bruxellois ne manqueront pas d’en faire état en temps opportun.

71Tous les observateurs s’accordent à reconnaître qu’il en sera de même au cours des prochaines élections communales (second dimanche d’octobre 1964) et des prochaines élections législatives (printemps 1965 au plus tard). Les avis à cet égard divergent uniquement quant à l’ampleur du succès électoral du P.L.P.

72La menace libérale, quasi permanente sur le plan linguistique, conditionne, dans une certaine mesure, l’attitude des éléments francophones des deux autres partis traditionnels.

73Le P.S.C., qui doit faire face sur son aile francophone à la concurrence P.L.P., doit également faire face sur son aile néerlandophone à la surenchère de la Volksunie, qui a adopté en matière de Bruxelles une politique très radicale, considérant notamment le compromis de Val Duchesse comme une trahison à l’égard du peuple flamand. Cette double constatation avait amené certains observateurs à émettre l’hypothèse qu’au cours des prochaines confrontations électorales, le P.S.C. présenterait à Bruxelles deux listes distinctes, tant sur le plan local que sur le plan législatif. Une telle tactique permettrait d’adopter des positions radicales dans les deux sens et de récupérer ainsi des voix sur les deux plans. Ces bruits s’étaient affirmés avant le récent Congrès du P.S.C. dont les notions votées à l’unanimité des congressistes semblent devoir apporter un démenti formel à toute hypothèse de scission du P.S.C. dans l’agglomération bruxelloise.

74Le Parti communiste également manifeste une certaine hésitation en ce qui concerne la situation bruxelloise.

75Bien sûr, en ce qui concerne le problème des relations entre Flamands et Wallons, il a adopté le point de vue du fédéralisme et ses positions sont, à ce propos, parallèles à celles du M.P.W. Mais on chercherait en vain dans les colonnes du Drapeau Rouge une prise de position nette en ce qui concerne le statut linguistique de Bruxelles, l’opposition aux projets de lois gouvernementaux en la matière ne pouvant se confondre avec celle des libéraux que dans le décompte des voix et non sur le fond du problème [16].

76Il est difficile de déceler dès à présent quelle pourrait être l’influence à cet égard de la récente évolution au sein même du mouvement communiste, par l’opposition d’un groupe fractionnaire, favorable à la position chinoise.

77Certains bruits circulent également au sujet de la création de listes spéciales coiffant les deux fractions communistes et certains éléments de gauche du M.P.W. qui se désolidariseraient du P.S.B. ou qui en seraient exclus.

78D’une manière générale, nous l’avons vu précédemment en analysant les résultats des élections communales en 1952 et en 1958, la confrontation électorale se faisait entre les quatre partis traditionnels (P.S.C., P.S.B., P.L.P. et P.C.) et surtout entre les trois premiers de ces partis, appelés parfois également partis nationaux. Et à quelques rarissimes exceptions près, les petites listes (celle de M. Evrard à Woluwe-St-Pierre en est une) ne recueillaient aucun succès notable.

79Tout laisse prévoir que les prochaines élections communales, fixées au second dimanche d’octobre 1964, se dérouleront à Bruxelles dans d’autres conditions.

80Tout d’abord, il est quasi certain que du côté flamand, la Volksunie, qui dispose à Bruxelles de plusieurs leaders très dynamiques (Daniel De Coninck, Jorissen, etc…) présentera des listes, si pas dans toutes les communes de l’agglomération bruxelloise, du moins dans un bon nombre de celles-ci. La Volksunie, qui ne se présentait pas aux élections communales de 1958, dans l’agglomération bruxelloise, pourrait constituer un danger dans certains cas pour les listes P.S.C. principalement et peut-être, quoique dans une moindre mesure, pour les socialistes. On cite en effet le cas de certains leaders locaux de la Volksunie qui sont des transfuges du Parti Socialiste. Mais il s’agit de personnalités peu connues, ce qui constitue un handicap sur le plan local.

81Du côté francophone, la situation semble plus floue. En dehors de l’hypothèse de la présentation de listes séparées pour les P.S.C. francophones et pour les P.S.C. néerlandophones, dont nous avons touché un mot plus haut, il nous faut rappeler que l’origine de la dissidence P.S.C., qui s’est cristallisée dans le "Rassemblement" de M. Evrard, député-bourgmestre de Woluwe-St-Pierre, est d’ordre linguistique. M. de St-Rémy, député de Bruxelles et ancien bourgmestre de St-Josse-ten-Noode, avait effectivement quitté le P.S.C. en opposition au projet de loi Moyersoen sur l’emploi des langues en matière administrative, mais il ne tarda pas à rejoindre l’orthodoxie du P.S.C. Il n’en reste pas moins que, potentiellement, la dissidence s’est poursuivie sous la présidence de M. Evrard et il est probable qu’elle se maintienne en 1964, voire même qu’elle serve de support à la fraction francophone en cas de scission du P.S.C.

82Mais d’autres possibilités existent du côté francophone. A plusieurs reprises par la voie de la presse spécialisée, dont nous toucherons un mot plus loin, ou par voie de tracts, il a été fait allusion à la formation de partis francophones ou wallons. Contrairement à ce qui se passe du côté flamand où la présence de la Volksunie, sur l’aile radicale, ne semble contestée par aucun groupe rival, du côté wallon et francophone, nous assistons à un manque évident de coordination en cette matière. La seule ligne directrice semble être de se désolidariser d’avec la politique des partis traditionnels. Témoin ce passage significatif d’un article de L’Alliance Wallonne.

83

"Qu’on ne se fasse aucune illusion, aucun parti dit "traditionnel" n’osera défendre les droits des francophones de Bruxelles.
"Tous les hommes politiques bruxellois sont à la remorque de la direction "unitaire" de leur parti.
"Francophones bruxellois, vous êtes 800.000.
"Ne plus voter comme papa est la seule consigne à suivre et elle sera rentable".

84Mais à l’heure actuelle, du côté francophone et wallon, dans l’agglomération bruxelloise, "ne plus voter comme papa" peut se traduire dans les faits par plusieurs prises de position différentes et toutes des prises de position trouvent actuellement des défenseurs.

85C’est ainsi que le bruit a été lancé dernièrement que le député namurois Fernand Massart, qui vient de démissionner du P.S.B. auprès le dernier Congrès de Wallonie-Libre, se présenterait à Bruxelles aux prochaines élections, à la tête d’une liste wallonne sans que des précisions soient apportées à ce sujet. Dans la mesure où cette affirmation aurait un certain fondement, il s’agirait sans aucun doute des prochaines élections législatives et non des élections communales.

86Par contre, on affirme que le "Rassemblement" de M. Evrard présenterait effectivement des listes de candidats dans les différentes communes de l’agglomération bruxelloise, lors des prochaines élections communales.

87Et l’on dit également, dans certains milieux wallingants, que le Parti d’Unité Wallonne P.U.W. se présenterait effectivement à Bruxelles non seulement sur le plan législatif mais également sur le plan local.

88"Ne plus voter comme papa" peut également se traduire chez les militants des partis traditionnels qui ne veulent pas quitter le parti auquel ils adhèrent mais qui souhaitent un changement d’orientation, par une politique "activiste", lors des poils qui en établissent le classement des candidats, constituent dans bien des cas des élections au premier degré auxquelles ne participent que les membres des partis en règle de cotisation, dont le nombre ne dépasse que très rarement 10 % du corps électoral de chaque parti.

89Les deux prises de position à l’intérieur ou à l’extérieur du parti, s’excluent évidemment. La prise de position à l’intérieur du parti ne touche que les militants et ne préjuge en rien de l’attitude ultérieure du gros des troupes électorales.

90En résumé donc, nous pouvons dire avec certitude que les différents partis traditionnels qui s’opposeront dans l’agglomération bruxelloise le second dimanche d’octobre 1964, devront tous tenir compte des positions présumées de leurs adversaires en matière linguistique.

91En outre, ils devront faire face à une concurrence certaine et vraisemblablement unique de la Volksunie sur le plan flamand ainsi qu’à une opposition probable, sur le plan wallon et franco-phone, dont la forme n’a cependant pas encore été arrêtée avec certitude dès à présent et qui pourrait se présenter de manière moins monolithique que sur le plan flamand.

B – La Presse bruxelloise [17]

92On ne saurait assez insister sur le rôle déterminant joué par la presse dans les relations entre Flamands et Wallons en général et concernant le problème de Bruxelles en particulier.

93Un nouveau témoignage de cette importance vient de nous être donné par un passage du récent message de Noël du Roi Baudouin, diffusé par la R.T.B., la veille de Noël :

94

"Qui que nous soyons, simples citoyens, mandataires publics, responsables de ces puissants moyens d’action que sont la presse, la radio, la télévision, nous devons veiller à ne rien dire, à ne rien faire qui puisse provoquer une tension ou rendre un dialogue difficile".

95Certains commentateurs flamands estiment qu’avec l’école, la presse locale, tant quotidienne que périodique, a constitué et continue à constituer un des moyens les plus efficaces de francisation dans l’agglomération bruxelloise.

96Tout en reconnaissant le caractère arbitraire d’une telle classification, nous passerons successivement, et très rapidement en revue, la presse quotidienne, la presse hebdomadaire, la presse périodique non hebdomadaire et la presse dite spécialisée, essentiellement ou uniquement orientée vers le phénomène linguistique.

97Il existe certes des journaux d’expression néerlandaise, édités et diffusés dans l’agglomération bruxelloise et certains d’entre eux atteignent même des tirages importants, tel le Laatste Nieuws (d’opinion libérale), ou exercent une influence incontestable sur certains secteurs de l’opinion publique, tel le Standaard (d’opinion catholique), qui constitue un point de passage obligé pour tous ceux qui veulent approcher le mouvement flamand d’une manière non superficielle. Mais la plupart des autres journaux flamands importants ont leur port d’attache soit à Anvers, soit à Gand, môme s’ils sont officiellement représentés à Bruxelles.

98Par contre, les journaux d’expression française les plus importants ont leur siège à Bruxelles, que ce soit Le Soir, La Dernière Heure, ou La Libre Belgique. Ont également leur siège à Bruxelles : La Cité, Le Peuple et son édition du week-end Germinal, Le Drapeau Rouge, La Lanterne.

99Il est donc bien évident que la représentation de la presse d’expression française est toujours prédominante à Bruxelles.

100Il convient d’ajouter que, sur le plan linguistique, trois parmi les principaux organes de presse que nous venons de citer se montrent particulièrement actifs : Le Soir (neutre), La Dernière Heure (tendance libérale) et La Libre Belgique (tendance catholique). Leur influence conjointe sur le public de l’agglomération bruxelloise représente un potentiel non négligeable. Les autres journaux bruxellois d’expression française, tout en ne négligeant nullement l’esprit linguistique, ne lui accordent cependant pas une importance aussi grande que les trois grands journaux précités.

101D’une manière générale, les Flamands reprochent à la presse bruxelloise d’expression française de ne pas éclairer suffisamment ses lecteurs sur les réalités flamandes et néerlandaises alors que la presse bruxelloise d’expression néerlandaise, au contraire, fait une part très large à l’information de ses lecteurs concernant les réalités wallonnes et françaises.

102La presse hebdomadaire, dont l’influence semble grandissante dans l’opinion publique, présente in globo un visage identique à celui que nous venons de tenter de définir en ce qui concerne la presse quotidienne. Si du côté flamand, nous trouvons certes des revues de combat comme De Linie, hebdomadaire animé par les jésuites flamands et Volksunie, organe du parti portant le même nom, nous retenons du côté francophone toute une série de publications dont notamment : Pourquoi-Pas ?, Pan, La Relève, le Phare-Dimanche, Europe-Magazine, La Gauche, Temps Nouveaux, Demain, etc…, qui représentent pratiquement tout l’éventail de l’opinion politique bruxelloise. L’importance d’un tirage et la virulence de ces périodiques vis-à-vis du problème linguistique varient bien entendu d’intensité. C’est ainsi que le Pourquoi-Pas ?, qui s’est toujours trouvé en première ligne de combat francophone lors du recensement ou de la discussion parlementaire des lois linguistiques a la réputation, dans certains milieux flamands, d’être le bastion du monde bruxellois qui pousse la défense de la langue française jusqu’à l’opposition et au mépris de la langue néerlandaise, ce que contestent naturellement les responsables de cet important hebdomadaire bruxellois.

103Par contre, au cours de ces derniers mois, on a fréquemment observé dans Pan des prises de position plus favorables aux thèses flamandes, sans cependant qu’il faille parler d’une adhésion inconditionnelle à ces thèses.

104Plusieurs de ces hebdomadaires, et notamment La Relève et La Gauche ont consacré aux problèmes dont il est question dans la présente étude, des publications évitant de verser dans le manichéisme qui se retrouve généralement, mais pas uniquement, dans la presse spécialisée dont nous parlerons plus loin.

105Dans le secteur flamand, De Linie et le Volksunie défendent régulièrement les thèses fédéralistes et tout comme le Standaard, leur lecture constitue une obligation quasi fonctionnelle pour tous les observateurs de la vie politique flamande.

106* * *

107De par sa conception même, la presse périodique à publication non hebdomadaire s’écarte des tumultes de la vie quotidienne et contient des études de caractère plus général pour autant qu’elle ne soit précisément pas axée sur le problème linguistique ainsi que nous le verrons au paragraphe suivant. Dans cette catégorie de publications, il convient tout d’abord de citer la revue Présence de Bruxelles dont le n° 62 vient de paraître et qui, sous la direction de MM. Chantren et Jean Tordeur, constitue certainement un des meilleurs guides de la vie bruxelloise contemporaine.

108On rencontre de temps à autre des études dont le caractère de sérénité varie avec la personnalité et le tempérament de leurs auteurs dans des revues comme La Revue Générale et la Revue Nouvelle (d’opinion catholique), Points de Vue et Flambeau (d’opinion libérale), Socialisme, Synthèses[18], etc..,

109Toutefois, traditionnellement, Le Flambeau, animé principalement par des milieux professoraux de l’U.L.B., ou issus de cette dernière, présente souvent une image plus combattive de la défense de la culture française.

110A cet égard, nous voudrions citer ici un passage significatif d’un article publié par M. R. Bourgeois, préfet d’un athénée de l’agglomération bruxelloise et président du Secteur Enseignement de l’A.W.S.P. (Association Wallonne du Personnel des Services Publics). L’article intitulé "Enjeu de la bataille linguistique" donne une image assez fidèle des idées maîtresses régnant dans les milieux précitées

111

"La plupart des instituteurs communaux bruxellois sont des bilingues d’origine flamande, incapables de s’exprimer correctement dans la langue qu’ils sont chargés d’enseigner. Quand nous nous adressons à un guichet des services publics où trône un agent reconnu bilingue, nous avons affaire à un agent flamand qui écorche notre langue, qui en massacre le vocabulaire et la syntaxe.
"Que les flamands défendent leur langue et leur culture en Flandre et à Bruxelles, c’est un droit que nous ne songeons pas à leur contester.
"Mais qu’ils imposent la suppression du recensement ; qu’ils protestent avec véhémence – et avec succès – contre la création de classes françaises à l’Ecole moyenne d’Alsemberg ; que leurs troupes de choc barbouillent les inscriptions françaises dans les communes de la périphérie ; qu’elles déferlent, on masses compactes, dans les rues de la capitale, pour y clamer leur haine de tout ce qui est français ; qu’elles provoquent de scandaleux incidents à Wemmel ou à Wezembeek-Oppem ; voilà qui prouve que, trompés par leurs dirigeants, ils sont restés imperméables à la culture et à la pensée universelles.
"Ils ont beau prétendre qu’ils ne se sentent pas chez eux à Bruxelles : ils ont leurs théâtres, leur presse, leur radio ; ils ont des écoles qui correspondent largement à leur importance réelle et qui sont même peuplées d’élèves recrutés dans les communes rurales.
"Le seul bilinguisme qui se justifie à Bruxelles, c’est celui des services ; ce n’est pas celui des individus.
"Le climat de Bruxelles doit rester français, car les Bruxellois, dans leur immense majorité, ont choisi librement le français comme langue véhiculaire, comme langue de culture et d’enseignement.
"La violence appelle la violence. Rappelez-vous la menace prophétique de Van Cauwelaert : "Bruxelles sera le théâtre du dernier combat de la cause flamande". Pour les Wallons et les francophones, l’heure de la résistance a sonné. L’heure est venue de vous donner la main.
"Quand deux civilisations se heurtent, a dit Eisenhower, il n’y a plus de place pour la neutralité". [19]

112Du côté flamand, on retrouve plusieurs revues parmi lesquelles il convient de citer Socialistische Standpunten (d’opinion socialiste), De Vlaamse Gids et Standpunten (d’opinion libérale), De Maand (d’opinion catholique). La Revue De Maand, animée par des universitaires flamands de l’Université de Louvain, a publié au cours de ces derniers mois plusieurs études qui figurent parmi les plus pénétrantes et à notre avis parmi les plus valables sur la question qui nous intéresse. [20]

113* * *

114Nous toucherons enfin un mot de la presse spécialisée ou de combat, laquelle étant principalement sinon exclusivement axée sur la question linguistique présente inévitablement un caractère de polémique plus accentué que dans les organes de presse que nous venons de passer brièvement en revue.

115Le tirage de ces différentes publications n’est généralement pas connu mais on peut légitimement estimer qu’il n’est pas élevé. Quant à la périodicité, môme si elle est annoncée, on peut estimer, selon une citation estudiantine bien connue, qu’elle est "régulièrement irrégulière".

116Il serait toutefois erroné de ramener l’importance de ces publications à la hauteur de leurs tirages respectifs. Il arrive – assez fréquemment en période de tension linguistique – que des informations figurant dans ces publications de combat soient reprises, telles quelles ou sous une forme plus ou moins édulcorée, par l’un ou l’autre journal ou hebdomadaire sans que la source en soit toujours donnée.

117Du côté francophone, il convient de citer dans cet ordre d’idées :

  • Le Pays de Bruxelles, organe mensuel du Bloc de la Liberté Linguistique et du Rassemblement bruxellois contre la tyrannie linguistique, dont le directeur est M. Fernand Rigot, ancien fonctionnaire du département de l’Education Nationale et dont un dos animateurs fut M. Braun de ter Meeren, ancien bourgmestre de Sterrebeek ;
  • Bruxelles français ("pour défendre et pour ouvrir la longue française"), ce mensuel également est animé par M. Pauly, un des militants les plus actifs de Wallonie Libre de Bruxelles ;
  • L’Alliance Wallonne, périodique de la ligue wallonne de l’agglomération bruxelloise (A.W.A.B.).

118Nous citerons ci-après quelques passages caractéristiques d’un récent exemplaire [21] du Pays de Bruxelles :

119

"– Un recensement spécial.
"Nous recensons les commerçants, industriels, fabricants de toute espèce qui, par des subventions ou par des moyens indirects, soutiennent les flamingants, obéissent à leurs mots d’ordre, ou subissent passivement leur influence.
"Nous en connaissons déjà un certain nombre, mais nous demandons à tous nos lecteurs de nous communiquer les faits dont ils ont ou auraient connaissance dans ce domaine.
"Il est toujours bon de connaître ses amis.
"…..
"Debout les mous !
"Bruxellois de l’agglomération comme de la périphérie, que vous faudra-t-il encore pour que vous réagissiez enfin avec vigueur ? Voulez-vous voir transformer votre ville, deuxième au monde de langue française, en un succédané d’Anvers ou d’Amsterdam ?
"Vous attendez des chefs qui prennent vos affaires mieux en mains qu’elles ne l’ont été jusqu’ici ? Ces chefs doivent sortir de vos rangs. Qu’ils s’affirment. Le temps des parlottes, des discussions byzantines entre cénacles confidentiels doit être clôturé.
"Ce temps là a coûté suffisamment cher.
"….
"Trahis et bafoués dans une mesure largement atteinte, les francophones doivent employer ces moyens qui ont si bien servi la cause de ceux que nous ne craignons pas d’appeler nos ennemis. Contre les flamingants oppresseurs, nous prenons la position radicale, avec les plus fermes opposants, jusqu’aux dernières conséquences. La modération reviendra avec la victoire.
"….
"Quant à la 3ème marche des élamingants sur Bruxelles, nous ignorons encore si cette bonne provocation sera autorisée une fois de plus. Si ces hordes de primaires, égorgeurs de jeunes coqs, viennent encore souiller notre ville et menacer ce que nous avons de plus cher, vous avez l’impérieux devoir d’être présents. A moins que vous ne couchiez les oreilles, que vous rampiez à quatre pattes, en acceptant humblement votre nouvelle condition de Belge de second rang."

120Du côté flamand, il convient de citer dans le même ordre d’idées :

  • De Brusselse Post, organe mensuel pour la promotion de la vie flamande à Bruxelles, dont la publication, elle, est très régulière depuis 13 ans et qui donne effectivement une vue synthétique remarquable de la vie flamande à Bruxelles, à côté d’articles de polémique concernant notamment l’application – à son sens – erronée, voire même inexistante, des différentes dispositions légales d’ordre linguistique ;
  • Het Pennoen, mensuel de combat publié dans la banlieue de Bruxelles (Schepdaal) et qui vise à un rapprochement travailliste des chrétiens et des socialistes flamands sous la bannière du fédéralisme ;
  • Het Nieuw Klimaat, organe de l’Association des fonctionnaires flamands (V.V.O. Verbond van het Vlaams Overheidspersoneel), groupement particulièrement dynamique des fonctionnaires flamands de l’Administration Centrale, lesquels adoptent presque toujours un point de vue très radical en matière linguistique ;
  • Van Daag en Morgen, mensuel d’information flamande à Bruxelles, édité par la maison flamande de la Rue Van Praet et envoyé en plusieurs milliers d’exemplaires, gratuitement, dans l’agglomération bruxelloise ;
  • Kijk Zelf, périodique animé par le député bruxellois Daniel De Coninck, de la Volksunie et diffusé dans le Brabant flamand et à Bruxelles.

121Au cours de ces dernières années, la plupart des nombreuses revues flamandes éditées en Province, ont consacré au fait bruxellois des articles plus ou moins importants mais dont la tendance générale est assez similaire à celle que nous venons de déceler pour les revues flamandes publiées à Bruxelles.

122* * *

123Ce rapide tour d’horizon de la presse imprimée bruxelloise, quotidienne ou périodique, confirme à suffisance, la justesse de l’appréciation du message royal rappelée au début de ce chapitre, étant entendu que la radiodiffusion et la Télévision s’inspirent l’une et l’autre très largement des textes publiés dans leurs différentes (et nombreuses) émissions consacrées aux aspects multiples de la vie bruxelloise.

124L’observateur étranger se trouve, non pas en face d’une documentation insuffisante, comme on le prétend parfois, mais bien confronté avec une surabondance de textes, de valeur inégale, dont la nécessaire synthèse, pour une compréhension globale du problème, reste difficile à effectuer.

C – Les groupes de pression [22]

125Avec les partis politiques proprement dits et la presse, les groupes de pression constituent une des principales composantes du cadre dans lequel va se dérouler l’application (du côté flamand on parle fort souvent pour la critiquer, de la non-application) des lois linguistiques.

126Il est probable que tous les groupements cités dans cette partie de l’étude n’accepteront pas de gaîté de cœur d’être classés dans la catégorie des groupes de pression. Et cependant tous revendiquent, avec plus ou moins d’énergie et de constance, l’infléchissement de mesures législatives jugées dans un cas contraignantes, vexatoires et dangereuses (c’est l’optique prédominante dans les milieux francophones et wallons), jugées dans l’autre cas troc libérales insuffisantes, pour porter remède au mal qu’elles prétendaient combattre (c’est le point de vue pratiquement unanime des milieux flamands).

127Dans un cas, les textes sont considérés comme constituant un maximurum et il est fait appel à l’opinion publique pour les remplacer ou tout au moins les rendre inopérantes (on demande l’application souple des lois linguistiques). Dans l’autre cas, au contraire, les mêmes textes constituent un minimum minimorum et il est également fait appel à l’opinion publique pour exiger, au contraire, une application très stricte des nouveaux textes de lois principalement en ce qui concerne les sanctions prévues. On continue, de ce côté, à exiger un renforcement de la législation.

a – Les groupes de pression à vocation flamande

128Le Comité d’Action flamande pour Bruxelles et la frontière linguistique ("Vlaams Aktie Komitee voor Brussel en de taalgrens") a été constitué le 14 février 1959 par une quarantaine d’associations flamandes [23] dont les plus actives, sur le plan des revendications flamandes, figurent dans le Comité directeur du V.?.K., c’est-à-dire :

  • Het Vlaams Comité voor Brussel ;
  • Het Verbond van het Vlaams Overheidspersoneel ;
  • De Vlaamse Volksbeweging ;
  • Her Verbond der Vlaamse Academic ;
  • De Katolieke Werkliedenbonden arrondissement Brussel ;
  • De Vereniging der Vlaamse Studenten ;
  • Het Davidsfonds ;
  • De Vlaamse Toeristenbond.

129Par contre, quelques associations ont cessé d’être représentées ou ont démissionné du V.A.K. C’est notamment le cas des associations suivantes :

  • Het Verbond van het Vlaams Verzet ;
  • Het Vermeylenfonds ;
  • Het Willemsfonds.

130Le fait que la fondation socialiste (Vermeylenfonds) et la Fondation libérale (Willemsfonds) ont quitté l’organisation, alors que la fondation catholique (Davidsfonds) non seulement y demeurait, mais y jouait même un rôle prépondérant au Comité Directeur, a incontestablement donné à l’association une coloration catholique, que certains de ses dirigeants ont d’ailleurs regrettée en souhaitant la solidarité globale des flamands à Bruxelles.

131C’est le V.A.K. qui a organisé et orchestré les deux marches flamandes sur Bruxelles de 1961 et de 1962 et la récente marche sur Anvers.

132Dans certains milieux fédéralistes wallons, notamment le M.P.W., qui, surtout depuis la marche sur Anvers, ont des relations assez suivies avec les dirigeants du V.A.K., on considère que le "Vlaams Aktie-Komitee voor Brussel en de taalgrens" est en voie de prendre la place occupée jusqu’à présent par la "Volksunie" et que l’action de cette dernière va s’en trouver sérieusement atteinte.

133D’autres observateurs, au contraire, estiment que, malgré certaines affirmations en sens opposé, le V.A.K. est sous la coupe de la Volksunie, dont les représentants au sein de l’organisme jouent un rôle prépondérant.

134Toujours est-il que, dans un memorandum daté du 7 juin 1963, le "Vlaams AktieKomitee voor Brussel en de taalgrens" s’est formellement opposé au programme linguistique du gouvernement Lefèvre et que, depuis le vote des lois linguistiques, il n’a pas caché son sentiment en la matière qui se traduit d’ailleurs sur le plan pratique par deux attitudes apparemment contradictoires.

135D’une part, il continue à réclamer l’abrogation de la récente législation linguistique, jugée absolument insuffisante du point de vue flamand (l’accord de Val Duchesse a été jugé par lui comme une trahison des P.S.C. flamands). D’autre part, et concomittamment, il réclame une application drastique des dispositions de ces mêmes lois et principalement des sanctions que sa non-application postulerait.

136Le Mouvement Populaire Flamand (Vlaams Volksbeweging) étend son action sur la totalité du territoire flamand mais Bruxelles constitue un secteur très important, certains n’hésitent pas à affirmer le plus important, de ses activités.

137La chose est apparue avec évidence au Congrès de Louvain du Mouvement populaire flamand, les 9 et 10 mars 1963 [24]. Nous reproduisons, en annexe, la partie des résolutions de ce Congrès intéressant Bruxelles.

138La lecture de ce texte prouve de manière évidente que la législation de juillet 1963 est restée bien en-deça de ce que le C.V.B. estimait devoir constituer le programme minimum flamand.

139Le professeur Derine, de l’Université de Louvain, qui, depuis lors et notamment depuis la manifestation fédéraliste d’Anvers, a adopté une position en retrait, avait au cours du Congrès de Louvain énuméré les 8 points qui, selon lui, constituaient des préalables à tout octroi de garanties à la communauté wallonne. Un de ces points était relatif à Bruxelles et était rédigé de la manière suivante :

140

"Bruxelles devrait être doté d’un nouveau statut, avec une administration paritaire et un remodelage de l’arrondissement de Bruxelles.
"Les questions de langues, d’enseignement et de culture devraient être soustraites de la compétence des administrations communales et prises en charge par un Secrétaire d’état flamand et un Secrétaire d’Etat wallon".

141Nous avons, au début de cette étude [25], évoqué l’activité de l’association culturelle "Stichting Lodewijk De Raet, en ce qui concerne le problème de Bruxelles. Encore que cette association se défende avec vigueur d’interférer dans le domaine politique et qu’effectivement ses activités scientifiques sont généralement reconnues et appréciées, il n’en reste pas moins que l’influence réelle de cette association sur le mouvement flamand contemporain est telle que nous n’hésitons pas à la ranger parmi les groupes de pression.

142Il en est d’ailleurs de même du Conseil Economique flamand (Vlaams Economisch Raad) dont l’action dans la bilinguisation (Certains Bruxellois disent la flamandisation) des grands magasins bruxellois a été prépondérante. Il en est de même de quelques autres associations encore mais nous devons nous limiter.

b – Les groupes de pression à vocation wallonne et francophone

143Le premier juillet 1963 a été fondé le "Front des francophones de Bruxelles".

144Sa naissance notamment a été annoncée par l’"Alliance Wallonne" de septembre 1963.

145Le Front est né de l’union des forces de tous les mouvements relevant de la culture française, établis à Bruxelles en vue de susciter parmi les habitants de la capitale une prise de conscience de leurs intérêts communs.

146Le programme du Front est d’exiger à Bruxelles l’établissement d’un régime organisant la liberté la plus complète possible. Dans ce but, réclamer avant toute chose une refonte de la Constitution et des institutions, conforme à l’évolution politique qui a vu naître, au sein d’une Belgique unitaire, une conscience wallonne et une conscience flamande.

147Cette refonte des institutions doit tenir compte de la volonté des populations. C’est pourquoi le Front exige leur consultation préalable.

148Les objectifs immédiats du Front des Francophones est de réunir tous les francophones dans la lutte :

  1. contre le vote des lois linguistiques et, s’il le faut, contre leur application ;
  2. pour une révision constitutionnelle préalable à l’adaptation des sièges parlementaires au chiffre de la population.

149Les moyens d’action du Front sont :

  1. l’appui de mouvements constituants (au moins 50.000 familles) ;
  2. l’adhésion individuelle des francophones qui désirent voir s’instaurer la liberté linguistique.

150Parmi les groupements ayant adhéré à ce Front figure notamment Le Bloc de la liberté linguistique et du Rassemblement bruxellois contre la tyrannie linguistique dont nous avons déjà parlé.

151Jusqu’à présent, la principale manifestation publique de ce Front des Francophones de Bruxelles (F.F.B.) semble avoir été l’organisation le 29 octobre 1963 à la Madeleine d’une conférence réunissant trois professeurs d’université : MM. Génicot (Louvain), Perin (Liège) et Ruelle (Bruxelles).

152Dans une lettre type adressée à des personnalités bruxelloises susceptibles d’adhérer au mouvement, le F.F.B. s’exprime de la manière suivante qui dénote une volonté évidente de faire pression sur les autorités.

153

"Le premier et le plus menacé de ces intérêts est certainement la liberté de s’exprimer dans la langue de son choix. Déjà des lois qui méprisent cette liberté ont été votées. Des arrêtés d’exécution qui les interpréteront sont en cours d’élaboration.
"Si nous nous laissons faire, si nous n’avons pas plus de réaction qu’au moment du vote des lois linguistiques, il est évident que notre droit de nous exprimer en notre langue sera définitivement compromis.
"…
"Vous devez dès lors vous joindre à ceux qui luttent :
  • "pour que leurs enfants puissent, avant d’aborder l’étude d’une seconde langue, avoir acquis une parfaite connaissance de leur langue maternelle ;
  • "pour que Bruxelles, grâce au libre usage de la langue française, puisse devenir une capitale européenne ;
  • "pour que disparaissent les conséquences ridicules de lois linguistiques qui font de la Belgique un objet de risée pour l’étranger."

154Il est probable, encore que la chose n’ait pas été dite de manière explicite, que le nouveau "Front des Francophones de Bruxelles" dont la devise est "Bruxelles libre", remplace le "Front commun des groupements francophones ou wallons de Bruxelles", constitué en 1955 et qui groupait à l’époque 19 sociétés [26].

155* * *

156Tout comme le Mouvement populaire flamand en s’occupant globalement de la Flandre ne néglige cependant pas Bruxelles, le Mouvement Populaire Wallon dont les préoccupations essentiells sont évidemment la Wallonie, n’est cependant pas pour autant indifférent à l’égard du sort de Bruxelles. A côté de multiples autres preuves de cet intérêt, nous voulons citer le tract abondamment diffusé lors de la discussion parlementaire des projets linguistiques [27]. Même un observateur très superficiel constaterait l’opposition totale entre cette prise de position du M.P.W. et les prises de position des différents groupes de pression flamands. Et certains observateurs affirment dès lors que ce sont les questions comme celle de Bruxelles, et plus subsidiairement celle des Fourons, qui constituent un obstacle quasi infranchissable entre fédéralistes wallons et flamands. A quoi fédéralistes flamands et wallons répliquent que toutes ces questions insolubles en régime unitaire seraient effectivement résolues en régime fédéraliste.

157Quoi qu’il en soit, les milieux wallingants de Bruxelles groupés au sein du Comité l’Action Wallonne de Bruxelles [28] ont manifesté leurs sentiments vis-à-vis du problème de Bruxelles en des termes qui ne peuvent laisser place à aucun doute quant à leurs sentiments profonds en la matière.

158Les Flamands, et plus particulièrement les Flamands fédéralistes, n’ont pas manqué de reprocher aux Wallingants bruxellois leur action en faveur du pétitionnement organisé par le Collège exécutif de Wallonie. 112.764 signatures furent recueillies à cette occasion dans l’arrondissement de Bruxelles, ce qui représente environ 17,08 % du chiffre électoral, pourcentage moins élevé en général que celui recueilli en Wallonie (sauf à Tournai-Ath), mais néanmoins assez important si l’on tient compte du nombre de Flamands habitant l’arrondissement de Bruxelles.

159Il semble bien qu’effectivement, le problème de Bruxelles présente quelques difficultés dialectiques pour les représentants du mouvement wallon, qui sont obligés de reconnaître la non parfaite identification entre francophones bruxellois et wallons, mais qui néanmoins, souvent, agissent comme si cette identification existait.

160Parallèlement à l’action menée par le "Stichting Lodewijk De Raet", sur le plan flamand, il convient de citer l’action menée par la "Fondation Ch. Plisnier" sur le plan wallon.

161Malgré l’affirmation, maintes fois répétée, d’une action exclusivement culturelle, le Bulletin d’information et de presse de la Fondation Charles Plisnier, Section de l’Association Européenne de l’Ethnie Française, nous donne de temps à autre des textes dans le genre de l’éditorial intitulé "Caveant Consules" de Maurice V. Wiliam [29], dont nous reproduisons ci-après quelques passages significatifs :

162

"Il n’est pas dans les habitudes de la Fondation – et moins encore dans les miennes – de se hasarder dans la jungle politique ou de lancer des avertissements solennels "aux princes qui nous gouvernent".
"Mais il est des circonstances où se taire devient non seulement une lâcheté, mais une véritable trahison vis-à-vis de soi-même, des autres hommes, un manquement à son devoir de citoyen et de démocrate.
"Ainsi nous apparaissent aujourd’hui certains actes du législatif et de l’exécutif de l’Etat belge….
"…
"Croyez-vous juste d’imposer un régime bilingue à Ixelles et Saint-Gilles – pour prendre un autre exemple – qui ne comptent que 10 % de néerlandophones et de n’accorder, avec combien de réticences, que quelques facilités linguistiques à Crainhem et Wezembeek où vivent plus de 50 % de francophones ?
"…

163De même, dans le numéro récent de la Revue des Amitiés Françaises [30] se retrouve l’appel suivant :

164

"A l’heure où le rayonnement de la langue française est menacé à Bruxelles, le moment est venu de faire bloc et de faire inscrire vos parents et amis aux "Amitiés Françaises et ligue nationale pour la défense de la langue française."

c – Les groupes de pression à vocation bruxelloise autonome

165Nous venons d’évoquer la non parfaite concordance entre les wallons et les francophones de Bruxelles et la confusion qui pouvait en résulter dans bon nombre de cas.

166Cette situation trouve des échos dans la presse et l’observateur attentif de la réalité bruxelloise constatera l’existence de groupes ou de groupements à vocation bruxelloise autonome qui ne se confondent pas nécessairement ni toujours avec les groupements wallons et francophones examinés dans le paragraphe précédent, encore qu’il ne soit pas exclu d’assister à des ententes passagères, généralement contre ce qui est considéré comme étant l’ennemi commun : le flamingantisme.

167Ces groupes se retrouvent surtout dans le domaine des affaires et dans les milieux de l’Université de Bruxelles, dans l’un et dans l’autre cas, pour des motivations assez aisées à comprendre.

168Dans un précédent numéro du C.H.[31], nous avons étudié en détail l’action du Conseil Economique de l’Arrondissement de Bruxelles (C.E.A.B.).

169Cet organisme est présidé par M. René Dewael, ancien président de la Chambre de Commerce de Bruxelles et animateur du Syndicat d’initiative de la Ville de Bruxelles.

170Quelques extraits de son allocution finale à l’occasion de l’Assemblée générale de 1961 du C.E.A.B. sont caractéristiques :

171

"Il est certain que des voix s’élèvent pour un isolement économique de Bruxelles en ce qui concerne les mesures qui sont prises dans le cadre du développement économique régional. Ouvertement, on veut freiner son essor alors que nous ne nous sommes jamais opposés à celui des autres régions du pays, quo ce soit en Flandre ou en Wallonie.
"…
"Car, permettez-moi de croire que, malgré toutes les manifestations, tous les cortèges, tous les marchandages politiques, Bruxelles restera Bruxelles".

172C’est à une réaction assez similaire que nous assistons dans certains milieux de l’Université Libre de Bruxelles. Outre le déplaisir aisément compréhensible, de se voir concurrencer par de nouvelles universités réclamées tant par le mouvement wallon en Wallonie que par le mouvement flamand en Flandre, il convient de reconnaître également l’existence d’un courant ou plus exactement la naissance d’un courant autonomiste bruxellois, se confondant avec le régime unitaire belge et prenant ses distances par le fait môme des mouvements wallons et flamands, éléments moteurs de la plupart des groupes linguistiques de pression sur l’agglomération bruxelloise.

173C’est de tels milieux qu’émane le "Manifeste bruxellois" dont nous publions le texte en annexe [32] et qui a sans doute inspiré les rédacteurs du manifeste des 300 professeurs, bon nombre de signataires étant les mêmes dans les deux cas, prônant un "Rassemblement pour le droit et la liberté" et dont l’annonce vient d’être faite dans le courant du mois de décembre 1963 sur les bases suivantes :

  1. Droit et liberté pour chacun de vivre dans la culture de son choix, d’avoir accès à toutes les cultures et de s’exprimer dans les langues de son choix. Affirmation de la vocation européenne de la Belgique ;
  2. Refus des solutions ou compromis fondés sur les prétendus droits du sol, du sang ou de la langue ;
  3. Devoir de combattre, quels qu’en soient l’origine, l’intolérance et le fanatisme ;
  4. Information de l’opinion, délibérément trompée par des politiciens qui méprisent tant l’individu que la nation ;
  5. Toute procédure de révision de la Constitution doit donner la parole au peuple souverain. La conclusion nécessaire d’un nouveau "pacte entre les Belges" exige l’adhésion profonde des deux communautés. En conséquence : recherche, sans préjugé, des moyens d’assurer l’expression de leurs volontés, recherche à laquelle ne peut se substituer un accord préalable entre représentants des partis.

174* * *

175En dehors des réactions d’ordre purement politique, il convient de noter également une série de réactions d’ordre professionnel, encore qu’une analyse plus approfondie du problème permettrait sans doute de déceler certaines liaisons entre les deux ordres de choses, apparemment indépendants.

176Dimanche-Presse[33] vient de donner une excellente description de ce nouveau phénomène qui est appelé à avoir certaines répercussions, d’autant plus que l’année 1964 sera une année d’élections communales :

177

"Le front de Défense des Agents communaux de Bruxelles-Capitale.
"La presse a fait état, ces derniers temps des complications et du surcroît de travail qui résultent de l’application de la loi du 2 août 1963, relative à l’emploi des langues en matière administrative.
"Pour les agents communaux de Bruxelles-Capitale, celle loi crée en outre une injustice flagrante. En effet, l’article 20, par. 7, prévoit que dans dix ans au plus tard, les emplois de chef de division et supérieurs devront être occupés en nombre égal par des fonctionnaires de l’un et de l’autre groupe linguistique.
"Cette disposition, anodine pour le profane, ne pourra être appliquée qu’en bloquant dans chaque commune l’avancement du personnel d’un groupe linguistique pour de longues années, alors que les agents de l’autre groupe bénéficieront d’un avancement accéléré.
"En effet, selon la législation de 1932, le personnel communal était recruté et participait à l’avancement sans aucune distinction d’ordre linguistique. Une parité de cette espèce ne peut donc être obtenue qu’au mépris absolu de l’expérience, de la qualification professionnelle, de l’ancienneté et des conditions de promotion fixées par l’autorité communale.
"Cette parité imposée par la loi ne correspond à aucune nécessité organique, d’autant plus que l’obligation de bilinguisme des agents est en même temps renforcée.
"C’est pour tenter de remédier à cette injustice criante que les agents intéressés se sont groupés en un Front de Défense. Des sections de ce Front se constituent dans les diverses communes de l’agglomérati?n bruxelloise."

Sixième Partie : Conclusions

178Dans un récent opuscule présentant les 30 premiers mois de l’action du Gouvernement Lefèvre, le Cabinet du Premier Ministre s’exprime de la manière suivante au sujet des lois linguistiques dont nous venons de parler :

179

"Les dispositions législatives finalement soumises par le Gouvernement au Parlement et approuvées par celui-ci à d’imposantes majorités représentatives des deux communautés nationales sont, pourtant, mieux qu’un compromis ; elles répondent aux aspirations fondamentales des Wallons, des Flamands et des Bruxellois :
  • "une capitale réellement bilingue et accueillante aux deux communautés ;
  • "des régions dont l’intégrité culturelle et linguistique soit respectée ;
  • "une organisation de la haute administration qui renforce l’union des Belges." [34]

180Ainsi que nous venons de le voir, un certain nombre de personnes ne partagent pas cet optimisme gouvernemental.

181Et il est fort probable que les prochaines élections communales dans l’agglomération bruxelloise (et vraisemblablement également les élections législatives) seront influencées, du moins en partie, par les réactions du corps électoral bruxellois vis-à-vis de cette nouvelle législation linguistique.

182Les résultats de ces élections ne manqueront pas d’être interprétés en fonction de ce critère. Nous avons vu quelle était notamment la tradition libérale en la matière.

183Mais ainsi que nous l’avons vu également tout au long de cette étude, il est pour le moins abusif de ramener le problème bruxellois à son seul aspect linguistique.

184Comme nous l’avons fait remarquer, plus particulièrement dans la troisième partie de cette étude, de manière peut-être trop sommaire, le problème bruxellois présente de nombreux aspects autres que l’aspect purement linguistique.

185Autant ceux qui négligent volontairement cet aspect en le traitant de faux problème ont tort, autant ceux, qui, obnubilés par ce seul aspect ignorent tous les autres aspects risquent de se faire une image étriquée et fausse du véritable problème bruxellois.

186Illustration vivante du pluralisme sociologique, l’existence et le développement de Bruxelles postule toute une série de problèmes différents et tous ceux qui s’y intéressent à un titre quelconque devraient avoir l’élémentaire honnêteté intellectuelle de voir l’ensemble des problèmes et non d’isoler artificiellement tel ou tel aspect qui leur tient particulièrement à cœur.

187Nous avons déjà eu l’occasion, en examinant les importants travaux du Centre Harmel [35] d’attirer l’attention de nos lecteurs, sur le fait que ce dialogue entre Flamands et Wallons s’étant pratiquement déroulé en l’absence des Bruxellois, certaines affirmations doivent être interprétées dans cette optique particulière :

188

"L’agglomération bruxelloise ne forme pas une communauté culturelle. En réalité, Bruxelles et ses faubourgs appartiennent à la fois à la communauté wallonne et à la communauté flamande, dont ils constituent le lieu commun". [36]

189De cette affirmation fréquemment évoquée dans les milieux tant flamingants que wallingants, il convient cependant de rapprocher deux textes récents qui reconnaissent implicitement le caractère sui-generis et non réductible du fait bruxellois, dont nous venons par ailleurs de rappeler la diversité.

190Il s’agit d’une part de l’article, déjà cité, du fondateur du M.P.W., André Renard, "A propos d’une synthèse applicable à deux peuples et à trois communautés", publié en novembre 1961 dans la Revue Synthèses.

191Tout aussi évocateur l’article, également précité, de Telemachus dans la revue flamande De Maand, dans lequel l’auteur reconnaît de manière fort explicite l’existence d’une troisième communauté en Belgique : la communauté bruxelloise.

192La fixation – provisoire il est vrai – du siège des communautés européennes (Euratom, Marché Commun, Banque Européenne d’investissement) à Bruxelles a fait naître l’espoir que Bruxelles pourrait devenir effectivement la capitale de l’Europe.

193D’aucuns voient même dans cette promotion européenne la seule solution valable aux difficultés posées par le devenir de Bruxelles sur le plan purement national.

194Sous le titre : "Bruxelles l’Impossible Capitale Européenne", la Revue d’Information du Comité International de l’Organisation Mondiale de Presse périodique [37] a récemment publié l’article suivant :

195

"On connaît les efforts déployés par certaines autorités – communales, provinciales ou nationales – belges pour tenter de faire admettre Bruxelles comme capitale européenne.
"En regard des avantages que peut offrir la capitale belge, les adversaires de cette désignation opposent des arguments difficilement réfutables.
"Parmi ceux-ci, on reproche à Bruxelles, son absence de vie nocturne, la difficulté de parking, la suppression du trafic des tramways le soir, l’indigence des programmes des théâtres et notamment l’absence de spectacles d’opérettes, les vexations linguistiques et les "marches révolutionnaires" dont la capitale est périodiquement le siège.
"Mais ces premiers griefs sont mineurs comparés aux révoltants excès dont se rendent coupables les extrémistes flamands.
"Les rapports des sections étrangères de l’Organisation Mondiale de la Presse Périodique dénoncent, tous, les sérieuses inquiétudes qu’éprouvent leurs compatriotes à la lecture des journaux relatant – à grand renfort de titres sensationnels – les troubles que connaissent la Belgique et sa capitale.
"Car – ce n’est un secret pour personne – la presse mondiale, écrite ou filmée, n’a pas manqué de s’emparer des machinations flamingantes pour mettre ses lecteurs en garde contre les vexations, voire les dangers auxquels ils s’exposent en choisissant la Belgique comme lieu de villégiature ou de rencontre.
"Les récentes manifestations anti-françaises qui se sont déroulées au Littoral ont eu comme immédiate répercussion de faire déserter les stations de la Côte par les touristes francophones et par les ressortissants français qui retournaient chez eux, la voiture barbouillée par les "champions de la culture flamande".
"Les Pays-Bas – d’expression néerlandaise – ont immédiatement profité de cette situation pour lancer aux Français ce slogan : Chez nous votre langue sera respectée, passez-y vos vacances.
"Enfin, un "Comité d’action" en formation conseille aux francophones de ne plus dépenser un centime en pays flamand et notamment aux automobilistes de ne plus s’approvisionner en essence qu’aux stations situées dans les régions où leur langue n’est pas bafouée et où Mons n’est pas indiqué Bergen et Lille remplacé par Rijssel !
"Voilà où en est cette nation qui a si souvent lutté pour son indépendance et dont la devise nationale est "L’Union fait la Force".
"Nous nous sommes toujours interdit toute ingérence dans le domaine politique mais nous ne nous sommes pas cru autorisés de taire les appréhensions et les avertissements exprimés par nos délégués étrangers.
"Si la Belgique se veut de rester le centre international de tourisme qu’il doit à ses beautés naturelles incomparables ; si Bruxelles se veut de devenir capitale européenne, il est grand temps – s’il n’est pas trop tard – que le gouvernement, modifiant son actuel comportement, mette énergiquement et définitivement un terme aux dangereuses outrances des agitateurs flamands."

196Tous les Bruxellois, il s’en faut de beaucoup, ne partagent pas un tel pessimisme et beaucoup d’entre eux restent fermement convaincus que Bruxelles deviendra effectivement la Capitale Européenne.

197Mais sous quelle forme ?

198Nous l’avons vu au seuil de cette étude, Bruxelles-ville, incontestablement d’origine flamande, est actuellement largement francisée. Les avis ne divergent que sur l’ampleur et la profondeur de ce processus de francisation reconnu par tous quoique accepté et interprêté de manière assez différente. Avec enthousiasme par ceux qui estiment qu’il s’agit là d’une promotion enviable par l’accession généralisée de la population à une langue de rayonnement international. Acceptée, au contraire, avec amertume, voire même avec colère par ceux qui estiment qu’un tel phénomène d’acculturation correspond à un génocide intellectuel, hautement répréhensible et auquel il convient de porter remède sans tarder.

199Dans un cas, le processus de francisation devrait être poursuivi, voire même accéléré. Dans l’autre cas au contraire, il conveindrait de mettre dès à présent un terme absolu à ce processus de manière à revenir, dans un délai plus ou moins bref, à la situation originelle.

200A côté de ces deux positions, jugées extrémistes, se présente une troisième solution, qui est actuellement prônée par le Gouvernement et qui consiste à vouloir faire de Bruxelles une ville authentiquement et quasi fonctionnellement bilingue, où les deux langues, français et néerlandais, et les trois communautés, wallonne, flamande et bruxelloise, se trouveront sur un pied strictement et définitivement égalitaire.

201Une telle évolution est-elle possible ? Tous les textes officiels affirment que oui et toute la philosophie des récentes lois linguistiques tend à une telle réalisation.

202Dans un récent article intitulé "Bruxelles, la Flandre et la Fédéralisme" [38], Robert Sixte, analysant au départ l’article de Telemachus dans la revue flamande De Maand, article auquel nous avons déjà fait allusion à plusieurs reprises dans cette étude, considère qu’une telle évolution est purement théorique et qu’il est fort probable qu’elle ne se réalisera jamais. Certains passages de l’article précité donnent l’image d’une situation qui ne rencontrera certainement pas l’adhésion des milieux flamands sensibilisés par le mouvement flamand :

203

"On dit que Bruxelles doit être accueillante. On dit aussi que les Flamands doivent s’y sentir chez eux.
"Ce sont là deux choses très différentes.
"Accueillante, elle doit l’être certes, et pas seulement aux Flamands de Flandre. Elle a le même devoir à l’égard de tous les citoyens des six pays associés dont elle entend devenir la capitale.
"De la même façon, Berne doit être accueillante-aux Suisses romands ou Tessinois, et Ottawa aux Canadiens français. Faut-il pour autant espérer qu’ils s’y sentent "chez eux" ?
"La Bruxelles accueillante, c’est colle qui aurait des écoles flamandes en suffisance, des commerçants et des administrations aimables avec l’étranger, qui comprend mal la langue locale.
"Mais Bruxelles "où les Flamands se sentent chez eux", c’est tout autre chose. C’est une ville où deux peuples s’affrontent, se heurtent, se jalousent, se disputent l’influence et le pouvoir. Où les deux milieux intellectuels seraient, un jour hypothétique, égaux en nombre en "n’ayant aucun arrière plan culturel commun". Cette ville imaginaire où les Flamands se sentiraient autant chez eux que les francophones", c’est une Bruxelles à demi-reconquise.
"…
"Quo Bruxelles remplisse donc désormais son devoir de courtoisie envers les fonctionnaires flamands, comme elle le fait envers les fonctionnaires des Six. Mais là s’arrêtent ses obligations. Bruxelles doit attendra de ses hôtes flamands qu’ils reconnaissent qu’en abandonnant le schéma culturel commun sur lequel s’est fondée la Belgique de 1830, ils ont cessé d’avoir dos droits sur les deux autres parties du pays."

204* * *

205Problème existent, qu’il ne suffit pas de nier pour le résoudre, problème difficile à résoudre en raison à la fois de sa complexité et des conditions affectives parmi lesquelles il évolue, le fait bruxellois sera domain et après-demain encore, un sujet de soucis pour les dirigeants belges.

Annexe 4

Partie du Programme Linguistique du P.L.P. relative à Bruxelles [39]

Agglomération bruxelloise et zone de rencontre

206Il sera créé une agglomération bruxelloise élargie et une zone de rencontre.

207A) Dans l’agglomération bruxelloise sera réalisé dans un délai de cinq ans le bilinguisme interne et externe dans l’administration des communes avec création de deux cadres.

208Bilinguisme obligatoire des hauts fonctionnaires, avec respect des droits acquis. Création d’un réseau complet d’enseignement dans les communes avec intervention financière de l’Etat pour les charges supplémentaires entraînées par l’application de ces mesures, tant administratives que scolaires, ceci dans le total respect de l’autonomie communale.

209B) Zone de rencontre : les communes faisant partie de la zone de rencontre continueront à être administrées dans la langue du régime linguistique auquel elles appartiennent.

210Elles devront cependant organiser leur administration de manière à pouvoir répondre à toutes les demandes qui leur seront adressées dans l’autre langue, c’est-à-dire et notamment qu’elles devront prévoir un ou plusieurs fonctionnaires susceptibles de répondre au citoyen dans la langue du choix de celui-ci.

L’agglomération bruxelloise

2111) L’agglomération bruxelloise se compose de :

212Anderlecht, Auderghem, Berchem-Sainte-Agathe, Bruxelles, Etterbeek, Evere, Forest, Ganshoren, Ixelles, Jette, Koekelberg, Molenbeek-Saint-Jean, Saint-Gilles, Saint-Josse, Schaerbeek, Uccle, Watermael-Boitsfort, Woluwe-St-Pierre (les dix-neuf communes actuelles).

2132) Dans un délai de six mois après la mise en application de la nouvelle réglementation, après avoir recueilli l’avis du Conseil provincial de la province du Brabant et des conseils communaux intéressés, un arrêté royal pourra inclure dans l’agglomération bruxelloise les communes suivantes :

214Drogenbos, Kraainem, Linkebeek, Rhode-Saint-Genèse, Wesembeek-Oppem, Wemmel.

215Celles de ces six communes qui ne seraient pas inclues dans l’agglomération bruxelloise bénéficieraient du régime prévu au paragraphe 3.

La "zone de rencontre"

2163) Dans un délai de six mois après la aise en application de la nouvelle réglementation, à la demande des conseils communaux intéressés, un arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres, pourra permettre d’appliquer dans les communes suivantes le régime défini ci-dessous en vue de favoriser les relations humaines : Strombeek, Vilvorde, Machelen, Diegem, Woluve-Saint-Etienne, Overijse, Hœilaart, Wezembeek, Itterbeek, Grand-Bigard, Zeelick, Dilbeek, Leeuw-St-Pierre.

217Dans cette hypothèse, ces communes continueront d’être administrées dans la langue du régime linguistique auquel elles appartiennent.

218Elles devront, cependant, organiser leur administration de manière à pouvoir répondre à toutes les demandes qui leur seront adressées dans l’autre langue.

219En ce qui concerne l’enseignement, les pouvoirs publics seraient habilités à créer une école de l’autre régime linguistique pour autant qu’un nombre suffisant de parents – à déterminer par la loi – en fasse la demande et si la nécessité s’en fait sentir.

220Si ce nombre de demandes n’est pas réuni dans une seule commune, une école pourra se créer aux fins de servir plusieurs communes dont l’addition de demandes révélerait le nombre requis par la loi.

221Cette mesure serait réservée à la création d’écoles au niveau froebélien et primaire et comporterait un renforcement de l’enseignement de la deuxième langue afin de faciliter les relations humaines.

222La stricte application de ces règles sera garantie sous l’autorité et la responsabilité :

  1. pour ce qui concerne l’agglomération bruxelloise, du commissaire d’arrondissement ;
  2. pour ce qui concerne les communes faisant partie de la zone de rencontre, d’un commissaire d’arrondissement adjoint ;

223Ces deux fonctionnaires seront nommés par le Roi.

224La loi devra prévoir les sanctions à appliquer en cas de non-observation de ces règles.

Annexe 5

Parties des Résolutions du Congrès du V.V.B. (Mouvement Populaire Flamand) à Louvain, les 9 et 10 mars 1963

225….

2263) Un nouveau statut doit être élaboré pour Bruxelles, afin que cette ville devienne une véritable capitale et que les Flamands s’y sentent également chez eux. La meilleure solution pour faire réellement de Bruxelles un centre national consisterait à établir une gestion paritaire entre les habitants wallons et flamands de Bruxelles [40].

227Que les Flamands y soient respectés dans les domaines culturel, administratif et scolaire constitue un minimum.

228Pour atteindre ce but, il convient de soustraire à la compétence des autorités communales bruxelloises la réglementation linguistique, l’enseignement et les manifestations culturelles et de les transférer au gouvernement qui les confiera à un secrétaire d’Etat flamand et à un secrétaire d’état wallon.

229Ces mesures doivent s’accompagner d’une restructuration de l’arrondissement de Bruxelles, notamment par la création de nouveaux arrondissements administratifs.

230…..

2316) Le nombre de fonctionnaires flamands dans l’administration centrale et dans les administrations qui seraient éventuellement scindées doit être porté en concordance avec la population, soit actuellement 58 %.

232Cette adaptation devra surtout intervenir ou département des Affaires Etrangères et à l’Armée où le nombre d’officiers flamands doit être proportionnel au nombre de miliciens flamands.

233……

Le V.V.B. et l’actualité politique

234….

3 – Les communes périphériques

235La revendication impérative des deux marches sur Bruxelles demeure "aucune facilité" sous quelque forme et de quelque durée que ce soit.

236Le soi-disant problème des communes périphériques trouve son origine dans les situations illégales à Bruxelles même. C’est là que des rapports sains doivent être établis.

237Au surplus, la scission de l’actuel arrondissement de Bruxelles, qui entraînera la création de nouveaux arrondissements flamands, doit être le point de départ d’un développement harmonieux des environs de la capitale et d’une préservation efficace des intérêts des habitants du Brabant Occidental.

4 – L’enseignement à Bruxelles

238Le V.V.B. se range à l’avis du "Vlaams Komitee voor Brussel" (Comité flamand pour Bruxelles) qui peut être résumé comme suit :

  • Les écoles flamandes de Bruxelles doivent être dirigées par des Directeurs flamands.
  • L’enseignement communal en langue néerlandaise doit être repris en charge par l’enseignement de l’Etat.
  • Les enfants venant du pays flamand ne peuvent pas s’inscrire dans des écoles de langue française.
  • En ce qui concerne la langue de l’enseignement des enfants nés à Bruxelles, il convient d’adopter un critère applicable de manière automatique, basé sur le certificat scolaire ou le diplôme du père.
  • Le V.V.B., inquiet du fait que les écoles européennes en territoire néerlandais deviennent des foyers de francisation, se montrera très vigilant en ce qui concerne le développement futur de ces écoles et exigera que seuls les enfants des fonctionnaires y aient accès. En territoire néerlandais, la langue néerlandaise devra être reconnue comme langue principale.

Annexe 6

TRACT PUBLIE PAR LE M.P.W.

LE M.P.W. DIT "NON" AUX PROJETS LINGUISTIQUES DU GOUVERNEMENT

239PETITE SATISFACTION

240Waterloo, La Hulpe et Braine-le-Château restent au Brabant Wallon.

241C’est très bien, pour autant que l’on ne revienne pas sur cette décision.

242L’action déterminée de notre Mouvement a fait reculer le Gouvernement.

243Enregistrons ce succès qui prouve que l’action wallonne est payante et qu’il faut persévérer dans cette voie.

244A BRUXELLES

245Le gouvernement a imaginé un découpage fantaisiste et arbitraire [41].

246Après avoir violé la volonté de la population des Fouron, le gouvernement s’apprête à en faire autant pour celle de l’agglomération bruxelloise.

247Le M.P.W. stigmatise cette procédure.

248Il n’y a pas d’autres solution démocratique que

249LA CONSULTATION POPULAIRE

250des populations concernées.

251DESIGNATION D’UN VICE-GOUVERNEUR

252Un vice-gouverneur bilingue est prévu.

253Il sera sous la coupe des Flamands.

254Ce gauleiter nouveau genre ne nous dit rien qui vaille.

255BILINGUISME DANS L’ADMINISTRATION

256Cela signifiera une main-mise encore plus grande des Flamands sur toute l’administration.

257Ce bilinguisme des services publics obligera les jeunes Wallons à apprendre le néerlandais, au détriment de l’allemand et de l’anglais.

258Etrange vocation à l’heure de l’Europe !

259Le M.P.W. n’accepte pas cette flamandisation systématique.

260Il rappelle sa position en la matière :

261OUI AU BILINGUISME DES SERVICES

262OUI A L’UNILINGUISME DES INDIVIDUS.

263ENSEIGNEMENT DES LANGUES

264Ce sera un désastre du point de vue pédagogique ! Une atteinte à la liberté du père de famille et une nouvelle mise en place de la suprématie flamande.

265A Bruxelles, cours de flamand obligatoire dès la troisième année primaire.

266En Wallonie, organisation facultative d’un cours dès la cinquième année, mais avec possibilité de le rendre obligatoire.

267Ce projet (Larock-Van Elslande) prépare la bilinguisation des générations futures, c’est-à-dire la domination flamande.

268NON A LA POLITIQUE LES PETITS PAQUETS !

269Après la nouvelle frontière linguistique, après la flamandisation de l’administration et de l’enseignement, il y aura la réadaptation du nombre de sièges parlementaires.

270CE SERA LIVRER LE PAYS A LA FLAMANDISA??ON !

271CE SERA CONSACRER LA MINORISATION DEFINITIVE DE LA WALLONIE.

272IL N’Y A PAS DE SOLUTION EN DEHORS DU FEDERALISME !

273C’est le seul moyen de résoudre raisonnablement l’ensemble du contentieux wallon-flamand.

274C’est le seul moyen de stopper le processus de minorisation de la Wallonie !

275ADHEREZ AU MOUVEMENT POPULAIRE WALLON !

276SOUTENEZ SON ACTION ! REPONDEZ A SES MOTS D’ORDRE !

277Editeur responsable : André GENOT, 19, rue Pépin, Namur.

Annexe 7

ORDRE DU JOUR publié par le Comité d’Action Wallonne de Bruxelles le 21 juillet 1963

278Le Comité d’Action Wallonne de Bruxelles constate :

  • Que les doux projets linguistiques Gilson – Larock-Van Elslande, que le Sénat va entériner comme la Chambre, gardent tous les vices originels du prétendu "apaisement linguistique" par petits paquets disjoints du contentieux général wallon-flamand.
  • Qu’en dépit des criailleries persistances de la "Volksunie", ces projets numéros 2 et 3, comme le projet numéro 1, satisfont à 80 % aux dernières exigences flamingantes – dernières en date – tant en matière administrative qu’en matière d’enseignement.
  • Que cet ensemble législatif – dans sa lettre, ses lacunes à combler selon une interprétation calculée, son appareil d’exécution, l’appoint qu’il trouvera dans la flamandisation de toute entreprise privée en Flandre – ne peut que motiver à brève échéance un nouveau "compromis" plus flamingant encore.

279Il réitère ces protestations contre telle politique effrontément dite "modérée" et "nationale" :

  • qui constitue une nouvelle étape de la flamandisation méthodique de Bruxelles, par la contrainte avec relents du "Gross Brussel", de l’éviction systématique des Wallons et francophones assimilés de dizaines de milliers de places et postes de direction auxquels ils ont droit dans la capitale ; de la bilinguisation forcée et de l’abâtardissement de plus en plus généralisé des tendants de la culture française ; tout cela sous prétexte de rendre ainsi la capitale simplement accueillante aux Flamands,
  • qui ne craint même pas, à quelques mois d’intervalle, de traiter les majorités francophones des communes ou hameaux ici en cause aujourd’hui, infiniment moins bien que les modestes minorités flamandes de Flandre wallonne outrageusement favorisée au moment où nulle grâce n’était faite à 90 % des Fouronnais,
  • qui sépare administrativement de la capitale son hinterland flamand traditionnel pour restaurer son homogénéité flamande ; mais veille, par contre, à maintenir politiquement l’intrusion des Flamands du dit hinterland dans cette capitale, agglomération mixte à 80 % francophone et dont, à ce titre, on veut leur épargner par ailleurs les dangereuses promiscuités (intrusion qui assure une part flamande démesurée des mandats et délégations de toutes espèces, le chantage au poil et, dès lors, la plus large "compréhension" des concurrents francophones…),
  • qui amenuise encore ce qu’il reste d’autonomie légitime aux Conseils communaux, derniers corps politiques élus soumis au contrôle de l’opinion publique et gardant quelque respect à son égard.

280Note dès lors sans étonnement que, selon l’enquête toute récente de l’Institut Universitaire d’information Sociale, huit Wallons ou Bruxellois sur dix réprouvent telle politique comme dénuée de tout sens démocratique.

281Il souligne à nouveau :

282L’entêtement des bureaux politiques réduisant en fait le régime parlementaire aux maquignonnages de Comités de contacts majoritaires et autres conclaves savamment conditionnés, bâclant ensuite un invraisemblable "débat" public de pure forme (festival flamand et discipline du silence pour les rebelles wallons) disposant ainsi du sort des populations sans les consulter, au mépris de leurs désirs légitimes et d’ailleurs notoirement connus ;

283La manœuvre de gouvernants, par ailleurs bien fallots, tablant en cette entreprise flamingante sur les seuls soucis partisans des mandataires à leur dévotion et de ceux d’une opposition du P.L.P., elle aussi soumise aux impératifs flamands, mandataires accrochés tous ensemble au système unitaire qu’ils estiment le plus confortable.

284Il rappelle une fois de plus :

  • aux Wallons, éventuellement inattentifs, l’importance des intérêts qui, en l’occurrence, sont en jeu pour la Wallonie, mais aussi bien à Bruxelles qu’à Mouland, Welkenraedt ou Mouscron,
  • aux Francophones bruxellois, la gravité des atteintes complémentaires portées à leurs droits et à leurs libertés,
  • aux uns et aux autres, les conséquences funestes que le nouveau coup de force flamingant entraînera pour un Etat belge déséquilibré s’il n’est sauvé d’urgence par une refonte fédéraliste de ses institutions.

285Il s’indigne de voir, au contraire, les maîtres du P.S.B. – à pareille heure et en contre-partie de l’adaptation des sièges qui donnera demain à la Flandre la majorité parlementaire absolue – proposer comme réforme susceptible de mettre fin à la minorisation de la Wallonie… la simple exigence d’une majorité de sénateurs "francophone" pour quelques matières législatives dites "réservées".

286Il observe déjà que – en dehors de celles qui auraient trait à une problématique et fallacieuse décentralisation économique – ces matières réservées sont précisément celles que les trois lois linguistiques scélérates auront réglé probablement au goût flamingant ; de sorte que, pour les amender un jour, il faudrait compter sur le consentement d’une majorité des sénateurs de Flandre)

287Il témoigne sa particulière gratitude à tant d’éminentes personnalités dont les prises de position de plus en plus nettes sur ces divers sujets justifient implicitement la révolte des honnêtes gens : notamment MM. Hanse et le chanoine Leclercq, de Louvain ; Marcel Grégoire, de Bruxelles ; François Perin et Marcel Thiry, de Liège. Il appelle tous les citoyens wallons et bruxellois, victimes de tant d’inconscience et de forfaitures politiciennes, à rejoindre les rangs des mouvements résolus à mener sans délai toute action appropriée.

Annexe 8

Manifeste Bruxellois [42]

288Profondément attachés à l’union des Belges et à la coexistence harmonieuse des deux communautés nationales, les signataires du présent manifeste ne peuvent cacher leur inquiétude devant la soumission du gouvernement aux exigences démesurées d’extrémistes acharnés à multiplier les mesures de contrainte linguistique.

289Mêmes s’ils admettent une fixation de la frontière linguistique destinée à supprimer dans l’avenir tout sujet de discorde et à assurer l’adaptation des circonscriptions administratives à la situation linguistique, comment les citoyens de ce pays pourraient-ils assister sans réagir à ce spectacle inouï d’une réorganisation du territoire national opérée en fonction d’impératifs partisans, sans la moindre considération des vœux légitimes d’importantes minorités, voire d’incontestables majorités des populations visées ?

290Comment admettre – dans un régime qui se veut démocratique – que ces populations n’aient pas au moins été préalablement consultées ?

291Quant à l’agglomération bruxelloise, s’il est indispensable qu’elle soit accueillante aux membres des deux communautés, s’il est nécessaire dès lors que le régime linguistique de son administration et de son enseignement garantisse ce bon accueil, encore convient-il en bon sens de subordonner tout bouleversement du régime existant à la preuve que cette garantie n’est pas donnée et plutôt que de prêter une oreille docile à des manifestations, savamment orchestrées, de personnes étrangères à la vie quotidienne de la capitale, de consulter préalablement les habitants de celle-ci, puisqu’ils sont, eux, les principaux intéressés.

292Enfin, comment demeurer insensible au sort des populations de la périphérie ?

293Ne faut-il pas voir un relent de théories racistes dans l’argument, si souvent avancé, que le sol déterminerait la langue ? L’individu compterait-il pour si peu aux yeux de gouvernants qui aiment se réclamer des principes démocratiques ?

294Comment justifier par la loi du nombre sur le plan national l’étouffement sur le plan local d’importantes minorités – devenus peut– être des majorités ?

295Comment expliquer, sinon par la peur de la vérité, le refus officiel d’interroger les populations intéressées ?

296Comment surtout oser présenter au Parlement des propositions nécessairement fondées sur une situation de fait vieille de quinze ans et dont nul n’ignore qu’elle ne correspond plus à la réalité ?

297Aussi les signataires du présent manifeste, conscients de la gravité et de l’iniquité des mesures annoncées,

298Adjurent le Parlement d’assurer dans la discussion des projets de loi en cause le respect de la volonté des populations intéressées,

299Adressent un pressant appel aux habitants des localités menacées et de l’agglomération bruxelloise pour qu’ils adhèrent au présent manifeste et affirment ainsi, en même temps que leur volonté de résister à l’arbitraire, leur droit à être consultés.

300Armand ABEL, Professeur à l’Université de Bruxelles.

301Pierre ANSIAUX, Avocat à la Cour de Cassation.

302Albert BAIWIR, Professeur à l’Université de Bruxelles.

303J. BARTIER, Professeur à l’Université de Bruxelles.

304Marcel BARZIN, Recteur honoraire de l’Université de Bruxelles.

305Docteur Edouard-Jean BIGWOOD, Membre de l’Académie de Médecine.

306Paul BONENFANT, Membre de l’Académie Royale de Belgique.

307Docteur Paul BORDET, Professeur à l’Université de Bruxelles.

308André BOUTEMY, Professeur de l’Académie Royale de Belgique et de l’Académie des Sciences d’Outre-mer.

309Carlo BRONNE, Membre de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique.

310Constant BURNIAUX, Membre de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique.

311Emilie CARNER-NOULET, Membre de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique.

312Lucien CHRISTOPHE, Homme de Lettres, Directeur Général honoraire des Beaux-Arts et des Lettres.

313Lucien COOREMANS, Professeur à l’Université de Bruxelles.

314Docteur Albert DALCQ, Secrétaire perpétuel de l’Académie de Médecine et Membre de l’Académie Royale de Belgique.

315René DE BOECK, Directeur des Postes.

316Sylvain DE COSTER, Professeur à l’Université de Bruxelles.

317Baron Prosper de HAULEVILLE, Directeur de la Société Pétrofina.

318A. DEJASSE, Bourgmestre honoraire de Schaerbeek.

319Robert DE KEYSER, Bourgmestre d’Uccle.

320André DELVAUX, Avocat à la Cour.

321Pierre de VAUCLEROY, Artiste-Peintre.

322Fernand DE VISSCHER, Professeur honoraire des Universités de Louvain et de Gand, Membre de l’Académie Royale de Belgique.

323René DREZE, Avocat et Député.

324Docteur Robert DUBOIS, Professeur à l’Université de Bruxelles.

325Jean DUVIEUSART, Sénateur, ancien Ministre.

326Maurice-André FLAMME, Professeur à l’Université de Bruxelles.

327Paul FORIERS, Avocat à la Cour d’Appel.

328André GEVREY, Comédien-Metteur en scène T.V.

329Robert GOFFIN, Avocat, Membre de l’Académie de Langue et de Littérature Françaises de Belgique, Président du Pen Club.

330Henri GREGOIRE, Membre de l’Académie Royale de Belgique.

331Marcel GREGOIRE, Avocat, ancien Ministre,

332Albert GHISLAIN, Membre de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique.

333Joseph HANSE, Professeur à l’Université de Louvain.

334Maurice HESPEL, Professeur honoraire de l’Université de Bruxelles.

335Pierre HOLOFFE, Vice-Président de la Fédération des Industriels Belges.

336Marcel HONBERT, Professeur à l’Université de Bruxelles.

337Marcel HOMES, Membre de l’Académie Royale de Belgique.

338Norbert HOUGARDY, Sénateur.

339Charles JANSSENS, Député et Bourgmestre d’Ixelles.

340Jean LAMEERE, Professeur à l’Université de Bruxelles.

341Henri LAVACHERY, Professeur honoraire de l’Université de Bruxelles.

342Maurice LEROY, Professeur à l’Université de Bruxelles.

343Edmond LIENARD, Professeur à l’Université de Bruxelles.

344Robert MECHELYNCK, Ingénieur.

345Jules MEUNIER, Professeur à l’Université de Louvain et à la Faculté Universitaire Saint-Louis.

346Charles MOUREAUX, Sénateur, Ancien Ministre.

347Albert NYSSENS, Avocat à la Cour.

348Paul PARENT, Avocat à la Cour.

349Comte Jacques PIRENNE, Membre de l’Académie Royale de Belgique.

350René PIRET, Bourgmestre d’Etterbeek.

351Claire PREAUX, Membre de l’Académie Royale de Belgique.

352Basile RISOPOULOS, Avocat à la Cour.

353Henri SAINT JEAN, Architecte.

354Général-Major honoraire Henri SALEZ.

355Max SERVAIS, fondé de pouvoir principal du Crédit Communal de Belgique.

356Vicomte Charles TERLINDEN, Professeur honoraire de l’Université de Louvain, Président de la Commission Royale d’Histoire.

357Jean THEVENET, Avocat à la Cour.

358Victor TOURNEUR, Secrétaire perpétuel honoraire de l’Académie Royale de Belgique,

359Edmond VANDERCAMMEN, Membre de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Françaises de Belgique.

360Robert VANDERVEIKEN, Inspecteur général de l’Enseignement moyen et normal.

361Edgard VAN PE, Avocat à la Cour.

362Armand VERSE, Sénateur.

363Jean WERY, Avocat, Conseiller communal à Etterbeek.

364A. BESSEMANS, ancien Recteur de l’Université de Gand.

365Dr J. GOVAERTS, Professeur à l’Université de Bruxelles.

366Léo VERRIES, Agrégé à la Faculté de Philosophie et Lettres de l’Université de Bruxelles.

367Joseph DE GRAUW, Sénateur.

368Dr Marcel V STESAEGER, Chargé de Conférences à l’Université de Bruxelles.

Notes

  • [1]
    Suite C.H. n° 224 du 24 décembre 1963.
  • [2]
    A cet égard, on prendra connaissance avec intérêt de la brochure que vient de publier CEPESS sous le titre "La nouvelle législation linguistique", 1963, n° 2, 40 p., et "Taalwetten 63" édité par le Mouvement Populaire flamand qui donne les textes officiels des lois et les commentaires de presse.
  • [3]
    A cet égard, on prendra connaissance avec intérêt de la brochure que vient de publier CEPESS sous le titre "La nouvelle législation linguistique", 1963, n° 2, 40 p. et "Taalwetten 63" édité par le Mouvement Populaire flamand, qui donne les textes officiels des lois et les commentaires de presse.
  • [4]
    A ce moment, nous ne manquerons pas d’y consacrer un ou plusieurs Courriers Hebdomadaires.
  • [5]
    A cet égard, on remarquera, avec une certaine curiosité, que la loi concernant le régime linguistique dans l’enseignement est datée du 30 juillet, alors que la loi à laquelle elle se réfère à plusieurs reprises et dont le vote est d’ailleurs chronologiquement antérieur, porte la date du 2 août. Les deux textes ont cependant été publiés ensemble dans le Moniteur du 22.8.63.
  • [6]
    Loi du 8 novembre 1962 :
    Art. 1.

    3. Les communes de Biévène et de Saint-Pierre-Capelle (arrondissement de Soignies) sont distraites de la province de Hainaut et rattachées à l’arrondissement de Bruxelles, dans la province de Brabant.
    4. Les communes de Bierghes et Saintes sont distraites de l’arrondissement de Bruxelles et rattachées à l’arrondissement de Nivelles.
    L’Article 2 prévoit plusieurs changements aux limites de certaines communes marginales de Bruxelles.
    Parmi d’autres, citons :
    • le transfert réciproque de hameaux entre Rhode-St-Genèse et Braine-l’Alleud (de l’arrondissement de Nivelles),
    • le transfert de deux hameaux de La Hulpe, de l’arrondissement de Nivelles à la commune de Hœilaert et le transfert du hameau "La Corniche" (gare de la Hulpe) de la commune d’Overijse à la commune de la Hulpe.
  • [7]
    Loi du 9 août 1963.
    Art. 3. Il est créé une justice de paix à Zaventem.
    Art. 4. Il est créé une justice de paix à Overijse. Cette justice de paix est desservie par le juge de paix, le greffier chef de greffe et le personnel du greffe de Zaventem.
    Art. 5. Il est créé à Hal un second canton de Justice de paix.
    Art. 6. Il est créé une justice de paix à Kraainem. Cette justice de paix est desservie par le juge de paix, le greffier chef de greffe et le personnel du greffe du second canton de Hal.
    Art. 7. Il est créé une justice de paix à Rhode-St-Genèse. Cette Justice de paix est desservie par le juge de paix, le greffier-chef de greffe et le personnel de greffe du second canton de Hal. Les articles suivants et notamment les articles 11 à 13 organisent la procédure.
    Cette loi introduit une nouvelle répartition territoriale en matière judiciaire, de façon à ce que le pays ne compte plus aucun canton bilingue, à l’exception de l’agglomération bruxelloise et des cantons comportant des populations de langue allemande.
  • [8]
    Libre-Belgique, 14-15 décembre 1963.
  • [9]
    "Un Flamand Vice-Gouverneur de Bruxelles-Capitale ?
    On en parle depuis très longtemps, mais il semble bien que la nomination du vice-gouverneur de Bruxelles-Capitale interviendra au début de cette semaine.
    Comme une personnalité socialiste sera désignée à cette fonction, on attend en effet une dernière réunion du Bureau du P.S.B. qui discutera notamment de cette question demain, lundi après-midi.
    On sait également que plusieurs noms de candidats ont été cités. Il semble toutefois que le nom qui serait le plus retenu est celui de M. Cappuyns, avocat général à Liège, mais flamand d’origine et appartenant d’ailleurs au rôle flamand.
    Le sort en est d’ailleurs déjà jeté à son sujet, disent certains qui sont bien informés.
    Si tel était le cas, l’opinion publique bruxelloise s’étonnerait cependant à triple titre :
    1. Pourquoi nommer un "non-Bruxellois" à cette fonction déjà tant discutée ?
    2. Pourquoi nommer, par surplus, un Flamand, alors que le gouverneur du Brabant, M. de Néeff (dont la compétence n’est pas en cause, bien entendu) est lui-même flamand et, certainement, ni wallon, ni Bruxellois ?
    3. Enfin, on se demande si un magistrat – aussi compétent soit-il – peut avoir la "souplesse" nécessaire pour remplir la délicate mission qui sera celle qui attend le vice-gouverneur, surtout s’il est étranger aux problèmes bruxellois ?
    D’autres candidats ne manquent pas. Nous ne rappellerons pas leurs noms, car nous ne voulons pas – dans la ligne de ce journal neutre – entrer dans la polémique.
    Nous nous étonnerons toutefois d’avoir appris à toute bonne source qu’il a été décidé que le vice-gouverneur de Bruxelles-Capitale devait obligatoirement être un Flamand, alors … que le gouverneur l’est déjà !
    Nous pensons, dès lors, qu’il serait regrettable, non pas qu’une personnalité flamande soit désignée à la fonction de vice-gouverneur, mais que, dès le départ de la procédure, il aurait été décidé qu’aucune personnalité wallonne ou francophone n’entrerait en ligne de compte !
    Une telle option initiale serait non seulement inopportune, mais elle ne faciliterait certainement pas la délicate mission de celui qui sera choisi demain…
    En écrivant ces lignes, nous osons espérer qu’elles ne paraîtront pas trop tard !
    D.P.".
  • [10]
    "Les lois de contrainte en matière scolaire sont donc ressenties comme une agression de l’étranger-flamand contre le petit peuple de Bruxelles. Le sobriquet de "gauleiter", qu’a déjà reçu le vice-gouverneur, avant même d’être nommé, témoigne de l’esprit de résistance qui anime à présent la communauté bruxelloise."
    La Gauche, n° 47, 6 décembre 1963.
  • [11]
    16 décembre 1963.
  • [12]
    "Pour la présidence de la Commission, le seul candidat jusqu’ici est M. R. Renard, chef de cabinet-adjoint de M. Gilson, Ministre de l’Intérieur. Né à Rolleghem, près de la frontière linguistique d’une famille originaire de Mouscron, M. R. Renard est généralement consacré comme Flamand modéré et très attaché à l’unité nationale. C’est sans doute l’un des fonctionnaires connaissant le mieux la loi Gilson, ayant participé activement aux négociations linguistiques depuis deux ans."
    La Libre Belgique, 7-8 décembre 1963.
  • [13]
    publié dans le C.H. 214, P. 22, Annexe 2.
  • [14]
    la partie de ce programme relative à la région bruxelloise est publiée en annexe à la présente étude.
  • [15]
    A cet égard, citons en passant le cas assez rare en politique communale belge où un parti détenteur de la majorité absolue fait néanmoins une place au collège échevinal à un ou plusieurs délégués d’un autre parti. C’est le cas de la commune de St-Josse où le Parti socialiste qui détient actuellement la majorité absolue a conservé l’alliance avec le Parti libéral qui était son allié avant 1958.
  • [16]
    Très typique de cette position "sage" nous apparaît le texte suivant, publié dans le Drapeau Rouge du 5 juillet 1963 au moment même où le Parlement discutait des lois linguistiques :
    "Le groupe communiste en appelé à la sagesse, a publié un communiqué dans lequel il rappelle au gouvernement qu’une solution des problèmes nationaux ne sera valable sans qu’un accord entre les communautés n’ait été préalablement discuté entre elles.
    "Le groupe propose en conséquence de suspendre la discussion des projets linguistiques et de préparer des réunions des parlementaires flamands, wallons, bruxellois, en leur donnant le temps de consulter les organisations représentatives de Flandre, de Wallonie et de Bruxelles, sans omettre la communauté culturelle allemande."
  • [17]
    Il ne s’agit évidemment pas d’établir ici une étude exhaustive de la presse bruxelloise, au sens large du mot, plusieurs fascicules comme celui-ci y suffiraient à peine. Dans ce tour d’horizon, certaines publications ont été délibérément éliminées lorsque leurs préoccupations essentielles ne rejoignaient en rien le thème même de cette étude. D’autres, qui eussent dû y figurer, ont peut-être fait l’objet d’omissions involontaires. L’intention était de donner une vue panoramique de cette importante branche de l’activité bruxelloise.
    Certains bulletins de presse et plus particulièrement le Bulletin de Bresse du Service d’information et de Documentation du Premier Ministre donnent quotidiennement un tableau fort suggestif de la multiplicité des interventions de la presse dans les problèmes qui sont à la base de la présente étude.
  • [18]
    C’est ainsi que cette revue à vocation internationale a néanmoins publié en novembre 1961 dans son n° 186, un important article du leader syndicaliste liégeois André Renard "A propos d’une synthèse applicable à deux peuples et à trois communautés".
  • [19]
    Flambeau, mai-juin 1963, n° 5 et 6, pp. 267-268.
  • [20]
    notamment Telemachus De Spanning tussen de Taalgroepen : een sociologische benadering. De Maand, n° 6, 1963.
  • [21]
    Le Pays de Bruxelles, septembre 1963.
  • [22]
    Le lecteur soucieux d’en apprendre davantage sur cette partie de l’étude est prié de s’en référer à deux numéros antérieurs du Courrier Hebdomadaire consacrés l’un et l’autre à l’étude des groupes de pression linguistiques à Bruxelles :
    • le n° 52 du 12 février 1960 (groupes flamands) ;
    • le n° 56 du 31 mars 1960 (groupes wallons).
  • [23]
    La liste complète a été publiée dans le C.H. N° 212.
  • [24]
    voir Annexe 5.
  • [25]
    voir C.H. N° 224, page 2.
  • [26]
    voir C.H. N° 56 du 11 mars 1960, p. 3.
  • [27]
    voir le texte d’un tract en annexe 6.
  • [28]
    voir le texte de l’ordre du jour, publié le 21 juillet 1963 par le Comité d’Action Wallonne de Bruxelles, en annexe 7.
  • [29]
    voir le n° 12 du 15 octobre 1962.
  • [30]
    voir le n° 7 du 15 décembre 1963.
  • [31]
    C.H. n° 172 du 2 novembre 1962.
  • [32]
    voir Annexe 8.
  • [33]
    22 décembre 1963.
  • [34]
    A vous de juger, publié en décembre 1963, pp. 24 et 25.
  • [35]
    C.H. 131 du 1er décembre 1961.
  • [36]
    Rapport final du Centre Harmel, p. 344.
  • [37]
    W.P.P.N., septembre 1963.
  • [38]
    La Gauche, 6 décembre 1963.
  • [39]
    publié par l’hebdomadaire Demain n° 26 du 28 juin 1963.39
  • [40]
    Le texte ne fait évidemment pas mention des Bruxellois qui ne seraient ni flamands, ni wallons.
  • [41]
    Le tract publie la carte de la présence francophone dans Bruxelles et sa périphérie, émanant du Bloc de la Liberté Linguistique, que nous publions également.
  • [42]
    publié par la Revue de tendance libérale Le Flambeau.
  • [43]
    voir également le chapitre consacré à la presse bruxelloise.

BIBLIOGRAPHIE

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  • CLAES Lode, Brussel Metropolis (in Streven, n° 9, 1957).
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  • GUISLAIN A., Découverte de Bruxelles 1931.
  • GUISLAIN A., Bruxelles atmosphère 10-32. 1932.
  • HERREMANS M.P., La Question flamande. 1948.
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  • X., Les belles heures de Bruxelles. 1952.
  • X., Couleurs de Bruxelles. 1957.
  • X., Bruxelles, ville en forme de cœur. 1958.
  • X., Bruxelles, carrefour du monde. 1958.
  • Revues [43]

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    • Bulletin de la Société Belge d’Etudes géographiques.
    • Bulletin de la Société Royale Belge de Géographie.
    • Bijdragen tot de Geschiedenis, bijzonderlijk van het Oud Hertogdom Brabant.
    • Brusselse Post.
    • Cahiers Bruxellois.
    • Cahiers d’Urbanisme.
    • Eigen Schoon en de Brabander.
    • Forum.
    • Présence de Bruxelles.
    • Revue Belge de philologie et d’histoire.
      etc… etc…
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/12/2014
https://doi.org/10.3917/cris.226.0001
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