Article
Françoise Thom. — Vous affectionnez la boutade « La France est une petite Union soviétique ». Qu’entendez-vous par là ?Georges-Henri Soutou. — Les deux pays sont apparentés moins par la centralisation que par une conception similaire de l’administration, fondée sur une approche idéologique. Tout comme un apparatchik du PCUS, un énarque ne doute pas d’être à même de prendre une situation en main sans être un spécialiste du dossier. De part et d’autre, on croit pouvoir gouverner les hommes comme on administre les choses. En cela, la France est proche du système de la défunte URSS. On y trouve aussi une bureaucratie dirigeante qui n’est pas formée pour des tâches spécifiques, comme c’est le cas dans les autres pays. C’est pourquoi les fonctionnaires français qui se rendaient en URSS dans les années 1970 ne s’entendaient pas si mal avec leurs homologues soviétiques, ils se sentaient en terrain familier.F. T. — Cette similarité en quelque sorte structurelle explique-t-elle les illusions françaises sur l’URSS ou faut-il prendre en compte d’autres facteurs ?G.-H. S. — Il y a d’abord une mauvaise compréhension du fonctionnement de l’URSS, de la hiérarchie réelle existant dans le régime communiste. Les responsables français avaient affaire à des organismes d’État, des diplomates du MID (ministère des Affaires étrangères) par exemple, et ils ne se rendaient pas compte que la politique, dans ses moindres détails, était en fait déterminée par le Parti communiste, le PCUS, que les fonctionnaires de l’appareil d’État, y compris les ministres, étaient uniquement des exécutants chargés de mettre en œuvre les directives du Comité central et de sa gigantesque administration…
Titres recensés
Auteurs
- Mis en ligne sur Cairn.info le 06/09/2019
- https://doi.org/10.3917/comm.167.0680
![Chargement](./static/images/loading.gif)
Veuillez patienter...