CAIRN.INFO : Matières à réflexion

On pourra effectivement débattre sans fin des responsabilités en 1914, mais aussi des causes, qui ne sont pas seule ment un contexte, car une structure ne débouche pas forcément sur un événement. Et les causes sont en fait les objectifs poursuivis par les acteurs, au sens de Zweck, qui eux-mêmes de ne se comprennent pleinement que dans le cadre des buts à long terme (Ziele). Certes, il y a des faits, mais un fait historique n’est pas de même nature qu’un fait physique ou naturel.
Or, sur la question des objectifs à court terme et des buts à long terme des belligérants de 1914, l’historiographie internationale a fait depuis les années 1960 de considérables découvertes (liées à l’ouverture progressive des archives) qui vont au-delà de la construction intellectuelle d’un déterminisme, en sélectionnant les faits qui conviennent aux historiens. En particulier on a mis au jour les objectifs et buts de deux acteurs supposés avoir été essentiellement réactifs en 1914 : la France et la Russie. Cela a eu lieu tardivement, car leurs archives n’ont été accessibles que plus tard (à partir de 1968 pour la France, tout récemment pour la Russie) alors que les archives allemandes essentielles étaient ouvertes aux chercheurs dès la fin des années 1950. Tout cela confirme l’essentiel des vues d’Alfred Fabre-Luce.
Une parenthèse : le traité de Versailles lui-même est plus prudent en matière de responsabilité allemande que mon ami Serge Sur. Son dictum est de portée limitée. Sur l’impulsion du wilsonisme, les Alliés avaient renoncé à la traditionnelle « indemnité de guerre » qui incombait au vaincu…

Georges-Henri Soutou
Membre de l’Institut, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université de Paris-IV-Sorbonne. A publié, entre autres, L’Or et le Sang. Les buts de guerre économiques de la Première Guerre mondiale (Fayard, 1989) ; L’Alliance incertaine. Les rapports politico-stratégiques franco-allemands, 1954-1996 (Fayard, 1996) ; La Guerre de Cinquante Ans. Les relations Est-Ouest 1943-1990 (Fayard, 2001, réédité avec une postface inédite, sous le titre La Guerre froide, Pluriel, 2011) ; L’Europe de 1815 à nos jours (PUF, 2007) ; les souvenirs de son père : Jean-Marie Soutou, Un diplomate engagé. Mémoires 1939-1979 (Éditions de Fallois, 2011) et La Grande Illusion. Quand la France perdait la paix (1914-1920) (Tallandier, 2015).
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Mis en ligne sur Cairn.info le 28/11/2018
https://doi.org/10.3917/comm.164.0874
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