CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Les relations entre les populations pastorales et les aires protégées en Afrique sahélo-soudanienne sont marquées par des contentieux et des conflits : entrées illégales de bétail, mises à feu et coupes d’arbres d’un côté, expulsions brutales de troupeaux, amendes et arrestations de bergers, voire abattages expéditifs de bétail de l’autre. Alors qu’autrefois, les services forestiers sévissaient surtout contre les incursions de cultivateurs et de braconniers, la principale menace envers les forêts classées, réserves et parcs nationaux provient actuellement des pasteurs. Leur montée en puissance comme acteurs les plus redoutés envers les aires protégées est étonnante. En effet, ils sont réputés, parmi les ruraux, comme les meilleurs connaisseurs de la nature et comme ceux qui y vivent de la façon la plus proche. Leur rapport très fort à la nature s’inscrit dans un usage mobile et temporaire de ressources naturelles. Ainsi, à propos de pasteurs au sud du Sénégal, M. Benoit [1988] a-t-il valorisé leur comportement responsable envers la nature. Ces pasteurs évitent d’appauvrir les pâturages et, a fortiori, de les détruire. Pour l’auteur, le respect de la nature fait partie de fondamentaux qui définissent une « idéologie » pastorale. Il repère de tels « états pastoraux » à travers toute l’Afrique de l’Ouest et du Centre, du Sénégal à la Centrafrique. Comment ces pratriciens d’une écologie pastorale se retrouvent-ils, aujourd’hui, en position de principaux accusés d’atteinte à la conservation de la nature dans les aires protégées ? Nous nous proposons d’analyser ce paradoxe à propos du parc du W qui s’étend à cheval sur trois pays : le Niger, le Burkina Faso et le Bénin.

L’émergence de transhumances vers le Parc du W

2Contrairement aux aires protégées en zone sahélienne, le Parc du W ne s’insère pas au cœur de grandes aires pastorales proprement dites. Les pasteurs le considèrent comme un espace potentiel de transhumance en saison sèche, c’est-à-dire pendant une durée relativement brève. Cependant, un usage pastoral seulement saisonnier n’amoindrit pas l’importance de ce type d’espaces pour les systèmes pastoraux. En effet, ceux-ci constituent des ensembles cohérents, si bien que la remise en cause d’un de ses éléments retentit sur la viabilité de tout un système pastoral.

Un débat entre historiens

3Un débat d’histoire porte sur l’antériorité soit de la mise en protection du Parc du W, soit des transhumances dans ce secteur. M. Benoit [1999] a reconstitué l’histoire du peuplement de ces contrées, en remontant sur plusieurs siècles. Pendant un temps très long, ce fut « l’espace sauvage » d’un no man’s land [Benoit, 1998]. La domination coloniale atténua d’abord la violence humaine. Elle favorisa un essor du peuplement et des activités, aussi bien agricoles que d’élevage, si bien qu’émergea, au nord du W, un espace pastoral [Benoit, 1999, p. 58]. Cependant, ce pastoralisme ne recourait pas encore à une mobilité saisonnière. Ainsi, d’après M. Benoit, il n’y avait pas de bovins au sud de Torodi en 1926, date de la création du Parc du W. Dès lors, les éleveurs ne pourraient se prévaloir, aujourd’hui, d’aucune légitimité d’usage des savanes du Parc.

4Toutefois, le raisonnement est assez spécieux. En effet, l’existence du Parc est restée longtemps toute théorique, les populations locales n’ayant pas conscience de l’interdiction d’accès et d’usage d’espaces qui avaient toujours été considérés comme ouverts. La mise en place effective du Parc par le déguerpissement de plusieurs villages date seulement des années cinquante. Quant aux transhumants, il est probable que leur prise de conscience d’un espace à part ait été encore plus tardive que celle des villageois. De plus, la revendication historique d’un droit d’usage et d’occupation n’entre pas dans la logique pastorale. Contrairement aux sociétés centralisées et agricoles, les pasteurs ne pensent pas l’espace en terme d’appropriation ou de contrôle foncier.

5Les changements politiques et sociaux pendant la fin de la période coloniale se sont traduits par une densification du bétail au nord du Parc du W. Les savanes devenaient plus salubres pour le bétail. Des informateurs à Torodi expliquent que leurs grands-parents ont « guéri » la brousse, en ayant recours à des moyens surnaturels. Le service vétérinaire était très engagé contre la trypanosomose bovine, grâce à des produits plus efficaces qu’auparavant. Cependant, l’ouverture des savanes du W à l’élevage restait freinée dans les années cinquante par une phase climatique humide qui s’est prolongée au cours des premières années soixante.

6Du côté du Burkina Faso, une histoire des Peuls du Gourma [Santoir, 1998] insiste sur leur diffusion inégale dans les savanes, durant la période coloniale, sous forme d’îlots de peuplement. Au cours des années cinquante, les troupeaux de l’est du Gourma burkinabé transhumaient jusqu’à la rivière Tapoa qui marque aussi la limite nord du Parc du W. La mise en place effective du Parc et les premières incursions de transhumants seraient donc intervenues de façon pratiquement simultanée.

Un refuge pastoral

7Un premier choc pastoral survient lors de la grande sécheresse de 1973. Les éleveurs proches du fleuve Niger sont déstabilisés par cette sécheresse mais surtout par l’afflux de troupeaux venus du nord et cherchant refuge dans la vallée du fleuve. Concurrencés sur leurs pâturages habituels de transhumance, les Peuls de la région poussent alors leurs troupeaux plus loin. Ils entrent dans la partie béninoise du Parc, la traversent et débouchent dans le secteur d’Orba. Ces migrations-fuites ne se passent pas bien pour tous. Certes, les « fuyards » découvrent des pâturages abondants et échappent à la sécheresse mais les troupeaux tombent bientôt malades dans les savanes infestées de mouches tsé-tsé. Dès lors, ces transhumances-fuites dans le Parc ne sont pas renouvelées pendant les dernières années 1970. Ils s’y sont aventurés dans des circonstances exceptionnelles [1] [Boutrais, 2007]. Au Burkina Faso, la sécheresse de 1973 provoque des fuites comparables de pasteurs sahéliens vers les savanes [Santoir, 1999].

8En 1984, une nouvelle grande sécheresse affecte les éleveurs dans l’Ouest-Niger. Dans beaucoup de secteurs, elle est plus durement ressentie que celle de 1973, à la fois par les gens et le bétail. Les fuites pastorales vers le sud sont alors générales. Les Peuls de la région entrent à nouveau dans le Parc au Bénin. Ceux de la vallée du fleuve entrent également dans le Parc au Niger. Les éleveurs de Torodi passent par le Burkina Faso, pénètrent dans le Parc ou le contournent jusqu’à la frontière du Bénin. Toutes ces savanes, dans le Parc mais aussi sur ses périphéries, jouent alors un rôle de refuge pastoral. Bien que des pertes de bétail surviennent encore au sud, elles sont moins graves qu’en 1973, les transhumants commençant à pratiquer des injections de produits trypanocides. Des témoignages attestent le caractère pionnier de ces déplacements décidés dans l’urgence. Continuant d’avancer vers le sud jusqu’à ce qu’ils trouvent de l’herbe, les « fuyards » pénètrent dans des savanes inhabitées où ils rencontrent une grande faune. Les affrontements des bergers aux lions, les regroupements de troupeaux au centre d’un cercle de feux entretenus toute la nuit, sont encore rappelés sous la forme d’épopées pastorales. Au Burkina Faso, Santoir [1999] parle d’exode à propos des déplacements pastoraux provoqués par la seconde crise climatique. Il s’agit de transhumances allongées mais aussi de migrations car, cette fois, les pasteurs sahéliens ne retournent pas tous au nord après la crise.

Des transhumances « ordinaires »

9Après 1985, la perception des pâturages du Parc change. D’un recours exceptionnel en année de crise, les éleveurs évoluent vers un usage régulier en année « normale ». Aux fuites de survie succèdent, après 1985, des transhumances qui deviennent annuelles pour plusieurs raisons. Les anciennes bourgoutières du fleuve sont converties en rizières, ce qui prive les troupeaux de bons pâturages et de lieux d’abreuvement en saison sèche. Les pâturages de plateau s’appauvrissent,

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Parc du W, zones de transit et d’accueil de transhumances

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Parc du W, zones de transit et d’accueil de transhumances

10avec la disparition de bonnes graminées pérennes qui émettaient des regains en saison sèche (Andropogon gayanus). L’extension des cultures aux dépens des pâturages devient irrésistible. Les éleveurs prennent alors l’habitude de traverser le fleuve et de se diriger vers le Parc. Celui-ci et ses périphéries font désormais partie de leur espace habituel.

11Au Burkina Faso, des Peuls s’installent désormais à faible distance du Parc, aussi bien dans la vallée de la Tapoa [Santoir, 1999, p. 22] qu’au sud de Diapaga [Sawadogo, 2011]. Le Parc du W et les zones villageoises de chasse qui le prolongent dans ce pays représentent un attrait pour les éleveurs. À partir des pâturages d’hivernage, il leur est relativement aisé d’opérer des incursions dans les savanes du Parc, malgré les problèmes que cela risque de susciter avec les gardes forestiers [2]. Une pâture saisonnière des savanes arbustives du Parc s’exprime déjà dans la nature du couvert herbacé, avec des graminées annuelles se substituant à des pérennes [Fournier, Toutain, 2007].

12Cependant, les entrées dans le Parc ne sont pas massives car le renforcement des pénalités rebute de nombreux éleveurs. Même ceux qui ne font que le traverser sont punis. D’autre part, tous les secteurs du Parc n’offrent pas les mêmes ressources pastorales. Les pâturages les plus recherchés au Niger sont ceux de la rive droite du fleuve à la limite du Parc. Il suffit de stationner sur l’autre rive et de traverser le fleuve en opérant seulement de courtes incursions [Amadou, 2004].

13Les mesures de surveillance et de répression prises contre les transhumants au cours des années 1990 (et parfois renforcées dans les premières années 2000) provoquent une véritable consternation dans la société pastorale. Certains qui avaient pris l’habitude d’entrer chaque année dans le Parc au Niger ou de le traverser au Bénin cessent brutalement de se déplacer en saison sèche. D’autres éleveurs s’efforcent malgré tout de transhumer encore dans le Parc. Ils entrent périodiquement dans l’illégalité.

Le Parc du W, aire d’accueil de mobilités soudaniennes

14Au cours des années récentes, plusieurs études ont été lancées par le projet ECOPAS (Écosystèmes protégés en Afrique Sahélo-soudanienne) afin de mieux connaître les transhumances pastorales vers le Parc du W [Amadou, 2003 ; Turco, Camara, Convers, 2004]. L’objectif de ces prospections visait la recherche d’alternatives au Parc. Cependant, en étant ciblées seulement sur les transhumances dirigées vers le Parc, ces enquêtes posaient a priori qu’il s’agissait d’un pôle unique d’accueil de transhumants. En fait, les transhumances vers le Parc du W s’inscrivent dans une zone d’accueil bien plus large qui est parcourue et exploitée dans le cadre d’une mobilité soudanienne.

Mobilités sahélienne et soudanienne

15Les pasteurs de l’Ouest-Niger, comme ceux de nombreuses régions pastorales, pratiquent une mobilité saisonnière, soit sahélienne, soit soudanienne. Les premiers transhument en hivernage (ndunngu) vers le nord, en suivant l’avancée du front des pluies. En cette saison, les pâturages nord-sahéliens deviennent verdoyants et les mares sont nombreuses, tandis que les champs restent rares. Après l’arrêt des pluies et le tarissement des mares, ces transhumants se replient vers le sud. La mobilité soudanienne est inverse, à la fois en saisonnalité et en orientation : départ en transhumance en saison sèche vers le sud et retour en début d’hivernage vers le nord. Les Peuls opposent ainsi le campement temporaire en hivernage (ruumirde) des premiers à celui en saison sèche chaude (seedirde) des seconds. Certes, chaque mobilité comporte des avantages mais aussi des contraintes dont S. Manceron [2011, p. 153] a dressé une liste. Cependant, en conditions climatiques et sociales favorables, la mobilité sahélienne vers la zone pastorale au nord a les préférences de la plupart des pasteurs. Les transhumances soudaniennes ne sont alors pratiquées que par quelques éleveurs. Ainsi, ceux du Gourma se dirigent régulièrement vers le sud en saison sèche car leur race bovine (les gurmaaji) est réputée supporter une légère infestation des pâturages en mouches tsé-tsé.

16Or, depuis quelques décennies, des pasteurs nigériens basculent, d’une mobilité sahélienne à des transhumances soudaniennes. Ce renversement est opéré sous la contrainte conjointe des sécheresses et de l’insécurité en zone pastorale. Il n’est pas effectué aisément car il implique un véritable apprentissage de nouvelles destinations, d’autres pâturages, d’une autre organisation du travail. Comme l’on ne part pas seul en transhumance, le changement de mobilité suppose de s’intégrer au sein d’autres réseaux sociaux. À l’apprentissage difficile par les bergers s’ajoute une accoutumance nécessaire des animaux à des pâturages fort différents [Boutrais, 2007].

17D’après S. Manceron [2011, p. 151], une limite nette sépare les lieux de départ en transhumance vers le nord et ceux vers le sud. Le clivage spatial ne ménagerait pas de transition, les doubles transhumances étant rares. Dans le contexte actuel, même si un changement de mobilité est difficile, lorsqu’il intervient, c’est en faveur du schéma de mobilité soudanienne. Même avec une faible diffusion de l’information au sein de la société pastorale [op. cit., p. 160], la limite entre les deux mobilités tend à être repoussée vers le nord. Ainsi, dans les années 1980, seuls les éleveurs au sud du Dallol Bosso gagnaient le Parc en traversant le fleuve. Une décennie plus tard, ceux du centre du Dallol (environs de Birni N’Gaouré) s’y rendent à leur tour. Les transhumances vers le Parc du W relèvent de processus qui ne sont pas circonscrits à ses périphéries mais qui englobent une aire beaucoup plus vaste.

18Depuis une dizaine d’années, l’opposition saisonnière entre les deux mobilités n’est plus aussi nette. En effet, les transhumants vers le sud tendent à prolonger leur séjour dans les savanes d’accueil en début de saison des pluies (korsol). Plusieurs raisons expliquent cet allongement en durée de la transhumance. La plus décisive renvoie à l’emprise croissante des cultures dans les secteurs d’attache des transhumants, ce qui se traduit, en saison des pluies, par des risques élevés de dégâts du bétail aux champs et des pâturages restreints. Une autre raison tient à la bonne valeur fourragère des graminées de savanes en début de croissance végétale. Les transhumants apprennent à connaître les savanes du sud et à repérer les sites à glossines. Enfin, dans le Parc du W, l’installation de la saison des pluies freine les déplacements des forestiers et facilite le camouflage des troupeaux.

19La poursuite de la transhumance en début d’hivernage (korsinowol) tend à devenir décisive pour de nombreux éleveurs confrontés à une forte pression agricole chez eux. Dans ce contexte, l’absence de concurrence avec les cultivateurs dans le Parc du W est vraiment appréciée par ceux qui y entrent. Certains transhumants ne s’aventurent plus dans le Parc en pleine saison sèche mais seulement en début de saison des pluies. Cette évolution aboutira peut-être à des séjours dans le Parc durant toute la saison des pluies mais il ne semble pas que ce soit encore le cas. Quand l’infestation en glossines devient vraiment insoutenable, les transhumants sont contraints de sortir du Parc.

20À partir d’un schéma relativement simple de mobilité soudanienne, les transhumances vers le sud, en particulier le Parc du W, ont donc évolué, en changeant de nature. À mesure que leur durée s’allonge, elles deviennent un recours pratiquement indispensable.

Des itinéraires balisés ou diffus ?

21Plusieurs études de la transhumance en périphérie du Parc du W, effectuées au cours des années 2000, ont visé à en établir « un état des lieux spatialisé » [Convers, 2002 ; Paris, 2002 ; Kagoné, 2004]. Cela a conduit surtout à dresser des cartes d’itinéraires de transhumance. Ces itinéraires étaient considérés comme une composante essentielle de la transhumance, susceptible de faire l’objet d’aménagement sous forme de couloirs. À la limite, c’est l’absence de tels couloirs balisés et reconnus qui amènerait les transhumants à errer et à entrer dans le Parc. S. Manceron [2011, p. 456] a vivement critiqué cette conception et l’efficacité d’aménagement d’itinéraires pour écarter les transhumants du Parc. Selon lui, il n’existe pas de trajet précis de transhumance, tout au plus une direction générale de déplacement, surtout à l’aller en saison sèche. La destination de transhumance serait imprévisible et l’itinéraire, la résultante d’une série d’adaptations aux situations rencontrées en cours de route. C’est seulement en retour, au cours ou en fin de saison des pluies, que les bergers seraient incités à emprunter des couloirs de passage. Et encore, ces couloirs, même alors utiles, ne seraient pas vraiment déterminants dans le choix des trajets. Finalement, l’idée d’aménager des couloirs de transhumance ne serait pas pertinente, les trajets des transhumants étant avant tout opportunistes.

22Face à deux conceptions divergentes des déplacements, il semble que la réalité relève pourtant de l’une puis de l’autre, de l’aller au retour. Dans le choix de l’itinéraire à l’aller, les facteurs pastoraux s’avèrent déterminants. Cela tient au faible état physique des animaux une fois la saison sèche installée. Le maillage des points d’eau subsistants assure l’abreuvement des troupeaux en déplacement alors que les aires de pâturage et les lieux de cure salée permettent de maintenir les animaux en état. À côté de ces facteurs fondamentaux viennent s’en greffer d’autres : présence de gros villages et/ou marchés hebdomadaires. Les itinéraires peuvent changer dans le temps et dans l’espace, en fonction des circonstances et des intérêts qu’ils suscitent, même si par ailleurs les lieux d’accueil restent assez longtemps les mêmes.

23Des plateaux et vallées (le Boboye) à l’est du fleuve partent de nombreux transhumants vers le sud [Amadou, Banoin, 1996 ; 2003]. Leurs axes de transhumance sont jalonnés d’aires de pâture, de « brousses » et de points d’eau. Ces axes peuvent se fractionner à n’importe quel endroit suivant l’emplacement des ressources pastorales ou des secteurs d’attache des éleveurs [Kabirou, 2004]. La traversée du fleuve représente un maillon important des itinéraires de ces transhumants. D’un côté, ils sont attirés par des passages qui mènent directement au Parc, de l’autre ils évitent des lieux qui sont désormais trop surveillés par les forestiers (par exemple, Boumba).

24À l’ouest du fleuve, des transhumants se dirigent vers le Parc en le longeant au Burkina Faso et en stationnant près des villages de la périphérie. Un axe peut être privilégié par des bergers de troupeaux déjà affaiblis quand il est réputé sans tracasseries de la part des forestiers. À partir des villages riverains, des transhumants finissent par faire des incursions dans le Parc. Tous ces déplacements donnent lieu à des déplacements assez diffus en saison sèche.

25Au retour, au contraire, les transhumants empruntent, une fois entrés dans l’espace agricole, des couloirs de passage. Ces corridors à travers les champs et les espaces habités suivent des tracés souvent anciens résultant de compromis entre acteurs locaux. Ils sont souvent balisés par les pouvoirs publics avec l’accord des autorités traditionnelles. Ils sont également utilisés lors des mouvements quotidiens des troupeaux au sein de leur secteur d’attache pour rejoindre des points d’eau ou des aires de pâturage pendant la saison des pluies. Contestés, ces couloirs donnent lieu à l’implantation de champs-pièges qui risquent de provoquer des rixes entre les transhumants et les cultivateurs. Leur respect, de part et d’autre, est le gage d’une bonne cohabitation entre les groupes d’acteurs. Ils sont en général fixes et évoluent très peu, si ce n’est par rétrécissement dans leur largeur.

Les transhumants dans le Parc, de vrais pasteurs ou des « malgré eux » ?

26À partir de témoignages, le séjour et le passage des transhumants dans le Parc peuvent être restitués. Il ressort de leurs récits deux impressions complémentaires d’abondance pastorale mais aussi de vie extrêmement dure.

L’abondance pastorale

27Si les transhumants sont attirés par le Parc, c’est pour ses pâturages et, de ce point de vue, ils ne sont jamais déçus. Ils insistent tous sur l’abondance de l’herbe [3]. Ils disent qu’ils « entrent dans l’herbe » [4] et que les vaches passent toute la journée à paître [5]. Dès lors, les vaches se rassasient d’herbe [6]. Pour des pasteurs, ce sont vraiment des conditions idéales.

28Déjà, lors des grandes sécheresses de 1973 et 1984, ceux qui s’étaient enfuis dans le Parc avaient sauvé leurs animaux de la faim. Même en année normale, les vaches sont maintenant affamées en saison sèche dans les pâturages habituels ; en dernier recours, des bergers recourent au Parc. Pour les éleveurs de l’Ouest-Niger, le Parc représente aujourd’hui le seul bon pâturage qui subsiste [7]. Ce sont surtout les regains après les feux de brousse qui sont recherchés pour leur abondance et leur qualité fourragère dans le Parc. Les feux allumés par les forestiers (feux dits contrôlés) pour entretenir les savanes ont comme effet d’attirer les transhumants. Eux-mêmes allument également des feux pour provoquer d’autres regains souvent plus tardifs. Ces feux pastoraux non contrôlés sont, de ce fait, condamnés par les responsables du Parc. Les transhumants nigériens proviennent de secteurs situés au nord où les pluies arrivent plus tardivement. En se dirigeant vers le Parc, ils vont au-devant des pluies pendant une période toujours difficile qui englobe la fin de la saison sèche et le début des pluies (setto ou korsol). Ils disent qu’ils sont « chassés de chez eux par la saison sèche » [8].

29En plus de l’abondance de la végétation herbeuse, les transhumants insistent sur la présence dans le Parc de graminées très appétées par les vaches [9]. Plusieurs graminées pérennes sont estimées, surtout à l’état jeune, comme bénéfiques pour les vaches [10]. Les jeunes découvrent dans le Parc des herbes dont ils ont entendu leurs parents parler mais qu’ils ne connaissaient pas. Ils retrouvent alors des pâturages qui contribuaient à la prospérité de l’élevage dans l’Ouest-Niger au milieu du siècle dernier. Ils manifestent un enthousiasme à découvrir que ces plantes n’ont pas complètement disparu, en particulier Andropogon gayanus. Les regains de cette graminée pérenne sont tellement appréciés en tout début des pluies que, pour des éleveurs, c’est la raison principale qui pousse les transhumants à partir vers le sud, notamment au Bénin. Ces regains sont accentués par les feux tardifs allumés par les transhumants.

30Les pâturages perçus comme plantureux remettent en état des vaches qui étaient affaiblies et augmentent nettement les lactations. Des transhumants affirment avec humour que dans le Parc, « le lait est aussi abondant que l’eau » ! Comme il n’existe aucune possibilité de vente, les excédents de lait sont simplement jetés. Cela rappelle une pratique courante, en hivernage, lors des périodes passées de grande prospérité pastorale dans les pâturages nord-sahéliens.

Une vie rude et dangereuse

31À l’envers de cette plénitude pastorale, les informateurs insistent sur la dureté de la vie dans le Parc. D’abord à cause de l’immensité de cette brousse. Pour les Peuls, c’est ladde ‘baleere : « la brousse noire », parce qu’elle est vide d’habitants. Or, les pasteurs peuls sont habitués à vivre en symbiose avec des cultivateurs, notamment pour se ravitailler. En entrant dans le Parc, les transhumants portent sur l’épaule un petit sac de farine de manioc qu’ils mélangent au lait, ce qui leur confère une autonomie de quelques jours. Ainsi, s’ils ne font que traverser le Parc pour transhumer plus loin au Bénin, ils parcourent une centaine de kilomètres en seulement quatre jours, par une marche forcée. Ceux qui séjournent plus longtemps dans le Parc se nourrissent seulement de lait et des fruits de quelques arbres : néré, karité, baobab… Ainsi, la farine des fruits de baobab est-elle mélangée au lait en un succédané de bouillie. Des tubercules sauvages sont également déterrés (igname sauvage, manioc sauvage). Les transhumants cachés au centre du Parc n’ont accès à aucun produit agricole. Les transhumants dans le Parc ne sont pas n’importe qui. Ce sont des jeunes (sukaa’be) mais surtout des costauds (jokol’be) et des courageux (cuusuu’be). Les femmes ne les accompagnent pas alors que les fuyards des grandes sécheresses de 1973 et 1984 étaient entrés dans le Parc avec leurs femmes. Celles-ci jouaient un rôle important en se rendant aux rares marchés périphériques du Parc (Founogo, Tobaga) pour se ravitailler. Ces va-et-vient ne sont plus possibles. La transhumance illégale multiplie les changements de sites et les déplacements rapides. Interdit, le Parc est devenu trop dangereux ; on dit que les femmes n’y survivraient pas, elles risqueraient de se perdre. D’ailleurs, chaque année, des gens s’égarent et perdent la vie dans le Parc.

32Les transhumants reconnaissent que les difficultés y sont nombreuses [11]. Ce n’est pas un élevage de tout repos, d’abord pour des raisons sanitaires. Des secteurs sont infestés de mouches tsé-tsé, en particulier la vallée de la Mékrou en début de saison des pluies. De plus, les pâturages du Parc sont infestés de tiques, alors que les animaux en sont indemnes au nord. Des produits insecticides contre les tiques n’étant pas encore disponibles, le détiquage reste manuel et représente une lourde tâche, vis-à-vis d’animaux non habitués à être détiqués et qu’il faut souvent terrasser.

33Le danger des grands fauves est bien réel à l’égard des troupeaux de bovins. Pourtant, les transhumants ne craignent pas d’affronter les lions, armés de leur seul bâton (et d’amulettes). Si la vache attaquée est encore vivante, des bergers réussissent à forcer le lion à lâcher prise. Autrement, ils l’abandonnent. Dans leurs rapports avec la grande faune, les transhumants recourent à des produits magiques contenus dans un petit sac (jikaaru) ou une gourde (bobooru) tenus sous l’épaule. Ils éloignent également les fauves trop menaçants en mettant le feu à la brousse.

34Les Gourmantchés redoutent les espaces sauvages du Parc pour les génies et les êtres surnaturels qui s’y trouvent. Aux grands espaces naturels est associé un monde surnaturel où les humains n’ont pas leur place [Benoit, 1999, p. 73]. Quant aux Peuls, même s’ils connaissent l’existence de génies (ginaaji) en brousse, ils ne les craignent pas. Ils disent que des génies sont partout en brousse, pas seulement dans le Parc.

35Depuis quelques années, la hantise des transhumants, c’est de rencontrer des gardes forestiers. Avec le durcissement de la surveillance du Parc et l’aggravation des punitions infligées aux contrevenants, la transhumance est devenue cachée. Les transhumants se cachent (suu’da) tant qu’ils sont dans le Parc et recourent à toutes les formes d’évitement. Dès qu’un Peul est surpris dans le Parc, même sans bétail, il est soumis à une amende. Ceux qui stationnent dans le secteur où le fleuve marque la limite du Parc (de Karey Kopto à Brigambou) traversent le fleuve et font des incursions seulement de nuit. Ils reconnaissent qu’ils « volent » de l’herbe [12]. Les entrées dans le Parc sont à la fois rapides et brèves. S’ils sont surpris dans le Parc, les transhumants recourent spontanément à la fuite [13]. Certains se vantent d’être de bons coureurs, impossibles à rattraper, si ce n’est par des véhicules tout terrain.

36Dans cette stratégie de fuite, les transhumants sont plus ou moins efficaces selon leur race bovine. Les éleveurs de la région du fleuve qui détiennent des petites vaches jalliiji se trouvent plus exposés que les autres. En effet, ces vaches sont réputées de mauvaises marcheuses. Quand elles entrent dans de bons pâturages, elles paissent en y stationnant longtemps. Si elles sont repérées par des gardes forestiers, elles n’en ont pas peur et se laissent facilement confisquer, voire abattre sur place. Pour les transhumants illégaux, ce sont des vaches à grands risques.

37Les grandes vaches rouges bo’deeji ont un comportement opposé. Ce sont des vaches très craintives qui s’enfuient dès qu’elles rencontrent une personne inconnue. De plus, ces vaches comprennent leur berger, notamment en situation de danger. Dès que celui-ci s’enfuit de façon furtive (molmolta), elles-mêmes partent. Enfin, ce sont des vaches grandes coureuses, capables de parcourir de longues distances. Les éleveurs citent l’exemple d’un troupeau qui, effrayé dans le Parc, a regagné de lui-même et d’une seule traite son village d’attache dans le Dallol Bosso. Pour les éleveurs qui ont d’autres races bovines, les bo’deeji sont les mieux adaptées à cette nouvelle forme d’insécurité pastorale. Elles sont réputées impossibles à capturer. De plus, les éleveurs recourent à des « remèdes », notamment des fumigations de leurs animaux avec certaines feuilles d’arbres pour les rendre encore plus farouches dans le Parc. D’une certaine façon, ce sont des vaches un peu sauvages. Par contre, elles supportent mal les piqûres des mouches tsé-tsé et ne peuvent donc rester longtemps dans le Parc.

38La grande mobilité et le caractère insaisissable des bo’deeji se retrouvent en partie chez les vaches blanches gurmaaji (ou yaghaaji) qui sont les plus nombreuses près du Parc au Burkina Faso.

Interprétations de la transhumance

39Deux interprétations divergentes rendent compte de la transhumance dans l’espace interdit du Parc. L’une relève d’une conception héroïque et ancre cette pratique dans les éléments fondamentaux de la culture peule [Riegel, 2004]. En entrant dans le Parc, les jeunes retrouvent une activité purement pastorale et accèdent à une liberté de déplacement perdue dans les espaces agro-pastoraux. Ils échappent également à l’encadrement des déplacements et au contrôle des comportements par les notables pastoraux (warsoo’be et ruggaa’be) qui structurent la société peule dans l’Ouest-Niger. Ils deviennent autonomes et trouvent l’occasion de manifester des valeurs qui relèvent de pulaaku, le code peul de conduite. La réussite d’une transhumance dans le Parc procure de la fierté et entraîne le respect des autres dans la société peule. Finalement, le Parc du W jouerait le rôle d’un espace d’initiation au pastoralisme et à la culture peule.

40La fierté de revenir de transhumance avec un beau troupeau peut s’afficher à l’occasion d’une parade ou rassemblement annuel de troupeaux (beefi ou beefotirki) devant toute la population peule. En fait, de tels rassemblements ont surtout lieu dans la zone pastorale au nord, en fin de transhumance sahélienne. Si l’hivernage a été pluvieux là-bas, les animaux sont alors en pleine forme et c’est une période d’abondance pastorale, surtout en lait. Par contre, la fin de la saison sèche au sud ne marque pas une prospérité des animaux. Si des anciens évoquent des beefi en retour de transhumance dans le Parc avant la sécheresse de 1984 [Manceron, 2011, p 342], ces revues de bétail n’ont plus lieu. Même si des transhumants dans le Parc ont la chance de s’en tirer pas trop mal, ils ne se pavanent pas.

41De fait, une autre interprétation de la transhumance dans le Parc est moins valorisante et glorifiante. La crainte (joote) et même la peur (kulol) troublent un séjour que les transhumants vivent mal. Les punitions qu’ils subissent sont ressenties comme des calamités, en particulier l’abattage de vaches pratiqué dans le Parc au Bénin. Pour des éleveurs, abattre froidement des vaches comme si c’étaient des animaux sauvages représente un acte incompréhensible. Certains en sont devenus fous. La situation des transhumants dans le Parc est exprimée par les notions torra et billake : la souffrance, l’oppression. Ceux qui ont dû payer une lourde amende disent qu’ils sont ruinés, « épuisés » [14]. Ces plaintes et ce découragement sont peut-être plus récents que l’attitude précédente et liées aux mesures énergiques prises contre les transhumants.

42Malgré une forte pression, la défiance persistante des interdits de transhumer dans le Parc n’est pas gratuite. Elle correspond à un comportement que des anthropologues attribuent généralement au groupe peul, celui de l’évitement et de la dérobade devant l’hostilité. Plutôt que d’affronter ou de contester ouvertement un pouvoir, ils le contournent et se placent sur ses marges.

43La persistance à vouloir transhumer dans le Parc relève moins d’une attitude de bravoure que d’une véritable logique pastorale. D’abord, les transhumants affirment que, bien souvent, ils ne peuvent faire autrement que d’entrer dans le Parc. Dans un contexte pastoral très dégradé, ils ne prennent cette décision que malgré eux. D’autre part, les entrées dans le Parc expriment la recherche d’une sorte d’idéal pastoral. Pour les pasteurs, notamment ceux qui sont dotés des grandes vaches rouges, l’idéal en transhumance consiste à s’isoler en brousse avec ses animaux (serwi’da), en les amenant sur des pâturages « neufs » (leltere), c’est-à-dire non encore broutés. Ici, les herbes se tiennent droites (cemngol) et sont « fraîches ». Elles ne sont pas piétinées ni polluées par les souillures de troupeaux déjà passés. Ce type de pâturage idéal ne se rencontre que dans une brousse vide d’habitants [15]. Or, dans l’Ouest-Niger, seul le Parc peut encore offrir de tels secteurs inhabités. Plus les interdictions d’entrée de troupeaux y sont effectives, plus les pâturages neufs y sont attractifs pour les pasteurs.

44La transhumance solitaire (biggal) sur de bons pâturages ignorés ou redoutés par les autres correspond à une valorisation de la capacité pastorale dans l’imaginaire peul. Le biggankeejo est le vrai broussard, celui qui se dévoue pour le bien-être de ses animaux. En fait, biggal n’est pas pratiqué dans le Parc, espace dangereux où il est trop risqué de s’isoler. Les transhumants s’y rendent par petits groupes qui s’entraident pour le ravitaillement et en cas de problèmes avec les forestiers.

45Si l’entrée dans le Parc était vécue, les premières années, comme une période de liberté et d’exaltation des valeurs pastorales, ce n’est plus l’ambiance qui y prévaut.

Le contexte politique et institutionnel d’évolution de la transhumance : du local au global

46La pratique de la transhumance durant le dernier demi-siècle à la périphérie et à l’intérieur du Parc a été largement influencée par les événements locaux mais aussi par les politiques globales de conservation et de gestion des ressources naturelles. D’un côté, la raréfaction des ressources pastorales et les extensions agricoles ont conduit les éleveurs, notamment du Niger à exploiter, voire revendiquer les ressources pastorales de la périphérie du Parc du W. D’un autre côté, la patrimonialisation mondiale de certaines ressources naturelles et la souscription du Niger à cette politique de conservation ont à leur tour marqué les rapports des éleveurs avec la périphérie du Parc.

L’évolution des priorités des politiques nationales et internationales

47La nécessité de réglementer la chasse et de créer des zones de refuge pour la faune sauvage remonte à 1925 pour l’Afrique Occidentale Française (AOF). Entre 1952 et 1953 un vaste domaine du « W » est délimité et classé. En 1954, un décret déclare le domaine Parc National du W du Niger. Ceci s’est traduit dans les faits par le déguerpissement des villages et des populations installées dans ce domaine, l’interdiction d’accès pour la chasse et l’élevage. Pour appliquer cette réglementation, il a été mis en place les éléments d’un corps spécialisé appelé « gardes chasse », actuellement « gardes forestiers » qui ont pour tâche essentielle la protection du domaine contre la chasse, les feux de brousse, l’entrée du bétail domestique, la recherche des infractions et l’application des sanctions prévues par les textes en vigueur. À l’Indépendance du Niger, des textes complémentaires ont été édictés pour renforcer la protection intégrale de la partie nigérienne du W dont la superficie est estimée à 220 000 ha. Trois périodes ont marqué la politique nigérienne de gestion des ressources naturelles du Parc du W.

48Pendant les années 1960, les effectifs relativement faibles de population et de bétail, joints à une situation agro-écologique peu dégradée, ont favorisé une pratique pastorale « aérée » dans des espaces qui leur sont traditionnellement autorisés. Les nouvelles autorités héritèrent des textes relatifs à la protection de l’environnement issus de la période coloniale. La politique forestière, malgré son caractère coercitif, n’avait pas les moyens de sa politique et un certain profil bas était observé quant à l’exploitation des ressources naturelles « protégées ».

49La première grande sécheresse de 1972-1973 a sonné le glas de cet agro-pastoralisme paisible. Au nord de Niamey, les populations du Zarmaganda et du Kourfeye, durement éprouvées par la sécheresse, amorcèrent une migration méridienne pour s’installer dans les zones encore « vierges » du sud. Ce fut la colonisation agricole [Amadou, 1991] du sud du Boboye et de la périphérie proche du Parc du W. L’État, comme pour accompagner ce mouvement, décida de déclasser en 1976, 77 000 ha à l’est de la Réserve Totale de Faune de Tamou en bordure du fleuve. En fait, ces espaces « vierges » étaient traditionnellement pâturés pendant la saison des pluies. La progression du front agricole déstructura les aires pastorales d’un seul tenant, repoussant les transhumants plus au sud, en direction du Parc du W.

50Les deux premières décennies après l’Indépendance furent marquées par une certaine tolérance vis-à-vis de l’accès aux ressources naturelles « protégées ». Les entrées illégales dans le parc du W entre la fin des années soixante-dix et le début des années quatre-vingt ont été « comprises » par les forestiers comme étant la solution ultime pour les éleveurs de sauver leur bétail. Peu de sanctions furent infligées aux transhumants à l’époque, l’administration cherchant simplement à négocier leur retrait du Parc.

51Pendant la sécheresse de 1984 la population riveraine du parc s’est considérablement accrue [16]. Le multi-usage des ressources naturelles, dans un contexte de raréfaction et de fort accroissement des effectifs du bétail, a naturellement poussé les éleveurs, une fois encore, dans le Parc du W. Ceux-ci ont recouru à une pâture que les autorités ont de plus en plus considérée comme illégale. La période après 1990 est marquée par l’émergence de projets, l’identification et la conduite d’actions au bénéfice de la périphérie du Parc. Ces activités sont largement amplifiées par des ONGs et associations. Les politiques publiques visent une alternative consistant à desserrer l’étau autour du Parc par le développement d’actions génératrices de revenus dans la périphérie. Le projet régional ECOPAS se donne comme objectifs des résultats scientifiques mais également de renforcement des capacités du Parc dans le but de développer les activités touristiques. Des études sont menées pour mieux saisir le fonctionnement de la transhumance transfrontalière mais également la dynamique globale de la biodiversité à l’intérieur du Parc. Des réflexions sont menées ainsi que des actions concrètes d’aménagement du Parc pour que celui-ci soit plus attractif et génère des revenus sur le long terme capables d’assurer son fonctionnement. Dans la périphérie, des projets comme le PGRN (Projet de gestion des ressources naturelles) (1996-2000), la COFO (Commission foncière) depuis 1998 et le PDLT (Projet de développement local de Tillabéry) de 2000 à 2006 essaient de renforcer les capacités des différents acteurs tout en initiant des activités génératrices de revenus.

52À partir de 1990, une société pastorale nouvelle émerge à l’échelle nationale par le biais d’associations d’éleveurs : l’AREN (Association pour la réhabilitation de l’élevage au Niger) créée en 1990 puis la FNEN (Fédération nationale des éleveurs du Niger) fondée en 1996. Elles sont composées de rugga (représentants traditionnels d’éleveurs), de garso, d’anciens fonctionnaires, d’anciens bergers et de propriétaires de bétail. Leur rôle est de promouvoir le développement de l’élevage par la sensibilisation et l’éducation à travers l’information sur les droits et les obligations des différents acteurs. Ces associations interviennent aussi dans les règlements des différents conflits. La FNEN contribue à l’élaboration des textes sur le droit pastoral et foncier au Niger et à la médiation des conflits entre éleveurs et agriculteurs. Ces associations participent également à des actions plus concrètes de balisage des couloirs de passage, d’organisation de fêtes des éleveurs au cours desquelles la vente de produits laitiers et d’autres recettes sont destinées à la promotion de l’élevage, à la réalisation des puits pastoraux et enfin la construction d’écoles. Au-delà de ce tableau à l’échelle nationale, la dynamique associative reste faible dans la zone périphérique du Parc. Cela se ressent par l’utilisation concurrentielle des ressources entre les pasteurs, la récurrence des conflits, le faible impact des structures associatives dans le règlement des conflits.

53Au début des années 1990, le Niger s’est engagé dans une concertation tripartite impliquant le Bénin et le Burkina Faso. Elle aboutit à des accords visant à mieux cerner la problématique de la transhumance transfrontalière et à rendre plus efficaces les actions de surveillance et de protection du Parc du W.

54Plusieurs accords internationaux ont été signés et ratifiés par le Niger dans le cadre de la conservation et de la gestion du Parc du W. De même, des ententes et directives régionales et sous régionales ont été adoptées par les trois États ayant les ressources naturelles du Parc en commun. Au titre des grands accords internationaux figurent les Conventions Ramsar, CITES, Convention sur la Diversité biologique. Le Parc du W est ainsi promulgué Réserve de biosphère et site du Patrimoine mondial de l’Unesco. Ces accords internationaux, tout en liant le Niger à des principes de conservation, lui procurent certains avantages matériels et financiers et surtout une reconnaissance internationale. À côté des conventions internationales, le Niger a signé des accords bilatéraux. Il s’agit, entre autres, de la Décision relative à la réglementation de la transhumance entre les États membres de la CDEAO (Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest) et de l’Accord bilatéral sur la transhumance entre le Niger, le Burkina et le Bénin. La signature de ces accords et conventions provient du constat de la difficulté d’une gestion unilatérale du Parc du W. À partir de 1986 un protocole d’accord est signé entre le Bénin, le Burkina Faso et le Niger pour une gestion intégrée du Parc et son inscription, en 2006, comme Réserve de biosphère transfrontalière du W. La question de la régionalisation de la gestion prend alors toute son ampleur à travers notamment le suivi écologique et la surveillance. Toutefois, des divergences apparaissent souvent entre la gestion locale et celle internationale de ces ressources.

Les défis et solutions envisageables à la transhumance dans le Parc

55Les logiques pastorales et de conservation de la nature s’affrontent dans la périphérie et l’aire centrale du Parc du W. Le contexte de rareté des ressources naturelles, auquel s’ajoutent une forte pauvreté rurale et une insuffisance de politiques publiques nationale et internationale en matière d’appui aux communautés locales, alimentent cette confrontation. Des solutions passent par de larges concertations et par l’implication de tous les acteurs concernés.

56Les rapports entre les éleveurs transhumants et le complexe du W n’ont pas été linéaires. Ils ont connu des évolutions en fonction des choix imprimés à la politique nationale et des impératifs du contexte écologique et de conservation de la biodiversité à l’échelle internationale. Les options de conservation sur le plan national et international ne sont pas toujours bien articulées. Elles ne sont, dans la plupart des cas, pas en phase avec les besoins primaires des acteurs locaux. Des divergences sont liées aussi bien à la perception des ressources naturelles qu’à la conception de leur gestion.

57Des études menées dans le cadre de l’identification des zones éco-fonctionnelles en périphérie des réserves de biosphère [Amadou, 2006] ont fait ressortir une forte perception des ressources naturelles par les acteurs locaux sur la base des besoins primaires d’alimentation (humaine et animale) et de soins, notamment les soins thérapeutiques. Les ressources emblématiques symbolisant des valeurs identitaires existent aussi mais elles demeurent faibles et font rarement l’objet de valorisation touristique à une grande échelle.

58Les conventions internationales, sans prendre le contre-pied des perceptions des acteurs locaux, accordent une importance capitale à la conservation de la biodiversité dans toute sa plénitude. Ainsi les espèces menacées de disparition, la diversité biologique caractéristique des écosystèmes spécifiques (notamment les zones de transition et/ou de contact), la recherche scientifique sur la biodiversité mondiale sont autant d’éléments chargés de grande valeur au niveau des conventions et accords internationaux. Les politiques de conservation à l’échelle nationale entérinent généralement les conventions internationales sans impliquer les populations locales pourtant concernées au premier chef. Ces prises de position unilatérales s’expliquent souvent par les opportunités financières et logistiques qu’offre ce partenariat international. À l’inverse, les comportements de prédation (braconnage, pâturage illégal, front de colonisation agricole) des acteurs locaux en périphérie du Parc mettent à nu les accords internationaux.

59L’approche de la gestion des ressources naturelles s’est toujours faite d’une manière unilatérale. L’État reste le principal pourvoyeur de moyens mais il dispose d’une gestion sans partage. Dans les années 1990, la souscription du Niger à des accords internationaux en vue de la sauvegarde et de la conservation des aires protégées ont amené les autorités militaires de l’époque à durcir le contrôle de ces espaces. Le Niger signe alors les conventions CITES et de Bonn et participe à la préparation de la Convention Ramsar (1991) et à celle du Patrimoine mondial de l’Unesco (1996). Ces engagements incitent à adopter une politique environnementale plus rigoureuse avec des objectifs de résultats quantifiables. Il s’agit entre autres d’une interdiction stricte des activités domestiques dans le Parc et d’une reconstitution progressive et quantifiable de la diversité végétale et animale. Les autorités étatiques ont procédé à une application rigoureuse des textes en vigueur relatifs à la conservation sanctuariste du Parc. L’action de répression a été privilégiée, ignorant les retombées positives d’une démarche de sensibilisation dans les villages riverains. Les autorités ont décidé l’expulsion des populations illégalement implantées et l’interdiction d’exploitation des îles du fleuve faisant partie de la zone tampon [Amadou, 2004].

60Malgré l’émergence d’une société civile et de projets participatifs à la fin des années 1990, très peu de marges d’actions ont été octroyées aux populations locales dans la gestion des ressources naturelles. Pourtant, la dynamique associative et de projets participe à la recherche d’alternative pour un meilleur exercice des activités pastorales dans la périphérie du Parc. Tout se passe comme si l’État n’a encore aucune confiance en la capacité des acteurs locaux de gérer durablement les ressources naturelles. Si, dans le discours, les autorités parlent de plus en plus d’autogestion ou tout au moins de cogestion, il n’en est rien dans la pratique où l’on assiste à une monopolisation de l’aménagement et de la gestion des ressources par l’État. Le renforcement des agents des Eaux et Forêts, la multiplication des amendes, l’absence de cadre formel de concertation multi-acteurs et de prise de décision… sont autant d’indicateurs d’un accaparement global du mode de gestion des ressources naturelles.

61La péjoration climatique avec son cortège de précarisation des conditions de vie des populations rurales va-t-elle renforcer leur logique de prédation des ressources protégées ? Cela conduirait au maintien, voire au renforcement des actions répressives de l’État. En réalité, ces logiques ne sont pas immuables. Des actions visant à créer des activités génératrices de revenus dans la périphérie du Parc, auxquelles s’ajouteraient une progressive implication des acteurs dans l’aménagement, la gestion des espaces et la prise de décision pourraient concilier des logiques qui apparaissent figées.

62Les villages de la périphérie du Parc du W sont habités par plusieurs groupes ethniques vivant dans des hameaux généralement éparpillés sur l’ensemble des terroirs, mais toujours rattachés au village-mère [Barbero, 2011]. On est de ce fait en présence d’une dynamique d’occupation de l’espace bien organisée par les premiers occupants et qui permet l’installation et le maintien de liens de dépendance politique et sociale. Il est de ce fait possible, en ayant une bonne connaissance de ce tissu de relations sociales, de maintenir des liens de dialogue, voire de conciliation entre d’une part les différents groupes présents dans cet espace et de l’autre, les autorités de l’État [Amadou, 2006].

63La conciliation des deux logiques renvoie fortement à l’initiation par l’État d’actions tendant à l’amélioration progressive des conditions d’existence des populations riveraines du Parc du W. La faiblesse d’activités génératrices de revenus qui a comme corollaire une pauvreté générale dans la périphérie du Parc du W peut être corrigée à partir d’actions menées par des projets de développement rural et des ONG. Ainsi le PGRN a su, de 1997 à 2000, engager les acteurs ruraux sur des travaux de balisage des couloirs de passage du bétail, la restauration des sols et de la végétation des plateaux, le fonçage de puits et des opérations de microprojets. Ces actions ont eu des impacts positifs dans la prévention des conflits entre les agriculteurs et les éleveurs et sur l’atténuation des flux de déplacement vers le Parc du W.

64Le projet ECOPAS a également mené des actions de sensibilisation dans la périphérie et mis en place des infrastructures touristiques [17]. Depuis la fin des activités du projet ECOPAS en 2009, la capitalisation des acquis notamment dans le domaine de la promotion touristique a permis de générer des ressources afin d’améliorer les conditions d’existence des populations riveraines. Ces projets sont souvent relayés par des ONG (Africa 70 par exemple qui est une ONG italienne et AWF, African Wildlife Foundation) et doivent constituer, à terme, le socle d’une bonne conciliation entre les deux logiques.

65Ces actions devraient cependant être complétées par la construction et la mise en application d’outils de concertation et de gestion communs par l’État. La COFO se positionne actuellement dans cette optique. Outil du Code Rural, la COFO est un cadre de concertation, de réflexions et de prise de décisions en matière de gestion des ressources naturelles et de prévention des conflits. En périphérie du Parc du W (Boboye et Say), elle a facilité la reconnaissance par tous les acteurs des couloirs de passage du bétail et progressivement leur balisage. Elle est en train de négocier actuellement la possibilité de reconstituer la réserve déclassée de Tamou. Quant au PDLT, il a mené des actions de restauration des sols dégradés des plateaux, de création de mares artificielles et de renforcement des capacités des acteurs. Il s’appuie sur des Organisations Locales de Gestion des Terroirs.

66Une conciliation implique naturellement les autorités publiques, les acteurs locaux et les partenaires internationaux. Si la légalité des autorités publiques et des partenaires extérieurs ne souffre pas d’ambiguïté, il est souvent difficile de statuer sur la légitimité et la pertinence des acteurs locaux. Il convient dès lors de repérer les acteurs légaux et légitimes qui doivent être impliqués dans la gestion des ressources naturelles. Les chefs des villages, les maîtres des eaux, les imams, les rugga, les garso, les gardiens des lieux de culte sont les détenteurs d’un pouvoir de décision en matière de vie sociale et économique. Leur pouvoir reste incontournable pour la mise en place d’un cadre représentatif de concertation et de règlement durable des conflits liés à la gestion et l’utilisation des ressources naturelles renouvelables. Ces institutions constituent le socle d’un cadre de concertation mais ce cadre va s’élargir progressivement, du fait de l’apparition et du dynamisme d’organisations socioprofessionnelles modernes et de structures nouvelles de gestion (comités de gestion, associations interprofessionnelles, groupements féminins…).

Conclusion : variantes de localisation des enjeux entre les pasteurs et la conservation du Parc du W

67Pendant plusieurs décennies, la confrontation entre les transhumants et le Parc du W restait circonscrite aux limites du Parc. Au cours des premières années 2000, le Projet ECOPAS a innové en accordant une grande attention aux périphéries [Convers et al., 2007]. D’après cette option, la meilleure façon d’assurer la conservation de la nature à l’intérieur même du Parc consiste à intervenir en extérieur par un aménagement de l’espace et une résolution des conflits entre acteurs, selon le principe de la zone tampon. Il s’est alors produit une délocalisation des enjeux, du Parc proprement dit vers ses périphéries. De leur côté, les transhumants revendiquent un libre accès aux pâturages des périphéries et interprètent la régulation de leur usage comme une extension du Parc. En même temps, les effectifs de la grande faune ayant tendance à augmenter dans le Parc [Toutain et al., 2001], celle-ci déborde également sur les périphéries où les éleveurs se plaignent de pertes de bétail de plus en plus fréquentes. En saison des pluies, les nombreuses mares dans le Parc permettent aux antilopes, proies habituelles des lions, de se disperser. Elles deviennent alors des prises plus difficiles que les bovins qui stationnent en périphérie. À la faveur des entrées de bétail dans le Parc depuis plusieurs décennies, il s’est peut-être établi une accoutumance des grands fauves à opérer des ponctions aux dépens des bovins. Ainsi, les lions « suivraient les bœufs » dans les périphéries du Parc.

68Depuis quelques années, en particulier avec la fin du Projet ECOPAS, les enjeux sont, à nouveau, circonscrits au Parc lui-même. Avec une limitation des moyens d’intervention, celle-ci se dilue moins en périphérie pour être concentrée sur le Parc, selon une option de conservationnisme strict. En même temps, une politique de régulation et d’organisation des transhumances laisse la place à une simple action de répression des entrées illégales. D’après les conservateurs du Parc, les bergers seraient actuellement encore plus « obstinés » qu’autrefois. Dès lors, « plusieurs groupes d’éleveurs ont été appréhendés et poursuivis, souvent au-delà des frontières nationales » [18]. La confrontation entre les pasteurs et la conservation du Parc se poursuit…

Notes

  • [*]
    Géographe, maître de conférences, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Université Abdou Moumouni, Niamey.
  • [**]
    Géographe, Directeur de recherche, UMR 208 Paloc (IRD-MNHN).
  • [1]
    bone on yahri min ton : « c’est le malheur qui nous a poussés là-bas ».
  • [2]
    Les Peuls installés dans le terroir de Kotchari, au sud de Diapaga, prennent ainsi l’habitude d’entrer dans le Parc tout proche, au cours des années 1990 [Sawadogo, 2011, p. 150].
  • [3]
    mi’den tawa hu’do sanne : « on trouve beaucoup d’herbe ».
  • [4]
    a’da naata hu’do.
  • [5]
    na’i na nyalla na ndura.
  • [6]
    ‘di kaara hu’do sanne.
  • [7]
    to dure walaa hannden, parkuuji tan ngoodi : « il n’y a plus de pâturages où faire de l’élevage aujourd’hui, seulement ceux du Parc ».
  • [8]
    ceedu riiwi ‘do.
  • [9]
    Citons, parmi les plus prisées : Andropogon gayanus (ranyere ou ra’y’yere), Hyparrhenia involucrata (ngarooga), Brachiaria sp. (pagguri), Diheteropogon amplectens (mbayeeriho), Cymbopogon giganteus (wajaalo), Pennisetum pedicellatum (wuuluunde).
  • [10]
    fuu na nafa : « toutes sont utiles ».
  • [11]
    ma’yalaaji na keewi : « les souffrances sont nombreuses ».
  • [12]
    he nguyka i’be njaha : « c’est pour voler qu’ils (y) vont ».
  • [13]
    doggowo da’da tan : « celui qui sait courir n’a plus qu’à s’enfuir ».
  • [14]
    min tampu non : « nous sommes vraiment épuisés ».
  • [15]
    ladde yoolum’bere.
  • [16]
    À titre d’exemple, la population de l’arrondissement de Say, dont dépend le Parc au Niger, est passée de 74 800 habitants en 1977 à 164 300 en 1987.
  • [17]
    Gîtes touristiques de Karey-Kopto et de Boumba, randonnées pédestres, circuits sur le fleuve.
  • [18]
    Direction du Parc du W, Rapport d’activités en 2011, La Tapoa (Niger).
Français

Résumé

Comment les pasteurs, souvent considérés comme proches et même respectueux de la nature, sont-ils devenus les principaux responsables des atteintes à l’intégrité des aires protégées en Afrique soudano-sahélienne ? Les entrées illégales de transhumants dans le Parc du W ont commencé de façon exceptionnelle lors des grandes sécheresses, puis elles sont devenues habituelles. Elles renvoient à un basculement zonal des mobilités pastorales. Les modalités des transhumances sont complexes et flexibles. Les interprétations de la transhumance dans le Parc du W divergent : exaltation des valeurs pastorales versus période mal vécue. En face, la logique de conservation est affirmée au Niger par une politique nationale adossée à des conventions internationales et confortée par des accords entre États africains. De nouvelles associations d’éleveurs et des projets de développement tentent de concilier les deux logiques, mais leur influence reste faible sur les pasteurs.

Mots-clés

  • pastoralisme
  • aires protégées
  • transhumances
  • grandes sécheresses
  • Peuls
  • gestion des ressources naturelles

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Boureima Amadou [*]
  • [*]
    Géographe, maître de conférences, Faculté des Lettres et Sciences Humaines, Université Abdou Moumouni, Niamey.
Jean Boutrais [**]
  • [**]
    Géographe, Directeur de recherche, UMR 208 Paloc (IRD-MNHN).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Mis en ligne sur Cairn.info le 01/05/2012
https://doi.org/10.3917/autr.060.0055
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