La migration de retour est un thème assez peu documenté. Une des raisons en est sans doute la difficulté à définir ce que l’on entend par retour, le terme étant utilisé pour désigner des pratiques et des projets migratoires assez différents [KING, 2000]. Par ailleurs, ce terme appelle à une resémantisation à la lumière des approches privilégiant le paradigme de la circulation [PETIT, 2007]. La circulation des migrants très qualifiés dans le contexte de la mondialisation invite à cette réévaluation, avec la description de phénomènes de retours vers un certain nombre de pays émergents [IREDALE, 2004; KAPUR, 2005; MEYER, 2004]. Le développement d’un marché mondial des compétences permet à ces migrants de développer des stratégies opportunistes individuelles, l’une d’entre elles étant le retour vers le pays d’origine, qui devient une possibilité grâce aux recompositions rapides de la géographie des espaces économiques .
Nous présentons ici les résultats d'une recherche portant sur un flux de retour de migrants indiens très qualifiés, travaillant dans le secteur des hautes technologies aux États-Unis, qui est apparu au début de la décennie. Certes, des retours ont toujours eu lieu, à contre-courant du brain drain endémique et massif en Inde – à commencer par celui des grandes figures de l’indépendance indienne, toutes formées en Grande-Bretagne – mais cela restait diffus et peu visible. Le phénomène analysé ici est caractérisé par son caractère assez cohérent dans l’espace et dans le temps, l’homogénéité des profils de migrants et des pratiques du retour, son intégration aux logiques de l’économie mondialisée et sa polarisation forte vers quelques métropoles indiennes, notamment Bangalore, la désormais fameuse «Silicon Valley» du sud de l’Inde…