Quelle est la nature profonde d’une mafia ? Une analyse première et superficielle tendrait à réduire une mafia à sa seule dimension criminelle (déviance, illégalité, marginalité) ou économique (recherche du profit, entreprise), c’est-à-dire à ses objectifs visibles et matériels. Or l’intention manifeste d’une entité n’en détermine pas forcément sa nature réelle. En commettant cette erreur d’analyse (confusion entre intention et nature), on risque par exemple d’occulter des aspects plus complexes et plus troublants des mafias. Une dimension culturelle d’abord : nous sommes manifestement en présence de sous-cultures profondément ancrées dans un terreau historique et social. Une dimension politique : l’importance du contrôle territorial et la limitation de la violence obligent à se demander si une mafia ne répond pas d’abord à la définition que donne Max Weber d’un groupement politique, en l’occurrence, une entité protopolitique ?
En fait, la nature d’une mafia n’est jamais univoque. Ni purement criminelle, ni spécifiquement économique, ni uniquement politique. Une mafia remplit de multiples fonctions sociales et présente des visages diversifiés. La matrice mafieuse est une machine complexe, capable de domination politique, d’enrichissement criminel et d’enracinement social. Là résident son originalité, sa force historique et probablement le secret de sa longévité. Le code génétique d’une mafia est complexe. Il se dérobe aux explications simplistes.
Les mafias sont la classe dominante des autres espèces criminelles…