Le septième art a la particularité d’être à la fois un art fédérateur et une source de profondes controverses et divergences. Comme l’agriculture, qui peut être perçue, d’un côté, comme une activité noble, ancrée dans la fierté d’un métier et dans des racines rurales auxquelles la société française est particulièrement attachée, et constituant, d’autre part, un théâtre de drames humains dont les acteurs, isolés du reste de la société, sont aspirés dans la marche forcée d’un monde moderniste qui ne les comprend pas ou, pire encore, les ignore, voire leur jette l’opprobre. Or, le cinéma apparaît depuis quelques années comme un catalyseur de plus en plus présent pour exprimer cette incompréhension entre les acteurs de la ruralité et le reste de la société, tentant de reconnecter des liens distendus entre ces deux univers et de replacer l’humain au cœur de ce paysage pour éveiller les spectateurs à la détresse des femmes et des hommes qui se cachent derrière leurs assiettes.
Tel ne fut pourtant pas le cas pendant une grande partie du XXe siècle, le traitement de l’agriculture dans le cinéma français s’effectuant dans un spectre d’exploration très réducteur. Des films éducatifs à la gloire du travail de la terre de l’entre-deux-guerres, qui seront d’ailleurs repris par le régime de Vichy pour appuyer sa propagande, aux histoires populaires se déroulant dans un cadre bucolique dans la période d’après-guerre, l’agriculture apparaîtra souvent réduite à la simple expression de sa fonctionnalité, ou de la mise en valeur de ses paysages et de son environnement…