Chapitre
« Le pays ne se sent pas écouté », constate Pierre Rosanvallon en ouverture du Parlement des invisibles, persuadé que « raconter la vie » est un remède à la crise de la représentation démocratique. Cette exhortation au récit de vie s’immisce depuis quelques années dans de nombreux domaines de pensée, y compris ceux qui y étaient en apparence les moins disposés : s’il constitue une composante essentielle de l’enquête en sciences sociales, son entrée dans le champ artistique, en particulier les arts de la scène, est sujette à caution. Le récit, fondement de la structure chorale antique, est relégué en hors scène à l’âge classique, qui fait du dialogue la forme adéquate de la fable et de l’agencement d’actions la finalité d’un théâtre dramatique où le discours est réduit à la portion congrue. Le récit réapparaît pourtant dans le drame moderne et surtout contemporain, marqué par une dramaturgie qui voit dans le souffle épique le moyen de mettre en scène les conflits entre générations, genres, classes ou races. La profusion des images au sein des scènes hybrides d’un théâtre désormais post-dramatique n’a pas éclipsé ce théâtre-récit qui s’accommode volontiers de l’exigence de connaissance du monde dans lequel nous vivons.
Dans un paradoxe qui n’est qu’apparent, c’est à travers la forme renouvelée d’un théâtre documentaire soucieux de l’affleurement du réel sur le plateau que s’exprime de façon privilégiée cette pulsion de narration, attentive aux formes singulières d’existence et à la subjectivation de l’expérience…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 07/02/2022
- https://doi.org/10.3917/puf.zarka.2020.01.0208
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