Chapitre
Préparant cet article, je suis tombée en écoutant France Culture sur la voix de Céleste Albaret racontant, dans un vieil enregistrement, comment Marcel Proust reçut le prix Goncourt pour À l’ombre des jeunes filles en fleurs – c’était il y a un siècle, en 1919. Un tel récit évoque inévitablement les controverses qui entourèrent cette récompense accordée juste après la Grande Guerre à un homme qui n’avait pas combattu, au détriment des Croix de bois du valeureux soldat Roland Dorgelès ; mais aussi, la saga éditoriale de la Recherche du temps perdu, refusé par Gide chez Gallimard et publié par un tout jeune éditeur, Bernard Grasset, avant de figurer parmi les grands chefs-d’œuvre de la littérature ; et même, l’histoire pathétique de ce mondain converti à la littérature pure, ravagé par la maladie et qui passa les dernières années de sa vie enfermé dans une chambre capitonnée de liège pour tenter de terminer son œuvre avant que la mort ne l’en empêche…
Ainsi, tels ces fameux papiers japonais évoqués par Proust, qui s’ouvrent et se déplissent lorsqu’on les plonge dans l’eau, ce récit de prix littéraire fait se déployer des histoires de patriotisme et de trahison, d’héroïsme guerrier et de rédemption par les Lettres, de littérature pure et d’engagement, de compétition et de course aux honneurs, de méconnaissance et de reconnaissance, de vie mondaine et de vie vouée, de sacrifice et de postérité… Autant de passions françaises encapsulées dans ce qui est presque un genre en soi : le récit de prix littéraire…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 07/02/2022
- https://doi.org/10.3917/puf.zarka.2020.01.0198
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