Reprenons les premières lignes du manifeste adopté en mars 1982 par la Fondation européenne de recherche et de synthèse, texte rédigé essentiellement de la main d’Alphonse Dupront :
« Notre Europe est fragile, et d’autant plus nécessaire. Double et indissociable évidence, qui exige lucidité, courage et discipline de l’essentiel. »
Ces deux phrases, et l’ensemble du texte, guideront les réflexions que je voudrais vous proposer ici. En même temps le monde a considérablement changé entre 1982 et 1996 : le texte de mars 1982 était très marqué par le paroxysme de Guerre froide qui avait suivi l’entrée des troupes soviétiques à Kaboul à Noël 1979, le coup d’État de Jaruselski le 13 décembre 1981, et qui accompagnait, en ces semaines du printemps 1982, le point culminant de la crise des euromissiles en Allemagne et dans d’autres pays européens, c’est-à-dire en fait une crise politique majeure, sur fond de neutralisme. C’était la dernière période de cette maladie européenne qu’a été le communisme.
Aujourd’hui l’URSS n’existe plus, l’Europe orientale est libre, le communisme soviétique (peut-être pas le marxisme) est mort. Nous sommes entrés dans une période nouvelle, et le système international paraît hésiter entre deux tendances, d’ailleurs pressenties par Alphonse Dupront : la mondialisation ou l’anarchie.
D’un côté, en effet, les États-Unis, leur système et leurs valeurs sont plus dominants que jamais. Sur le plan politique, le « nouvel ordre Mondial » démocratique et libéral évoqué par George Bush est à…