Examinons deux romans d’un romancier qui fut célèbre et qui est maintenant totalement oublié, Ducray-Duminil. Il se présente lui-même comme un romancier de l’enfance et de la jeunesse, souvent mêle un peu les deux – adolescents et enfants ont, chez lui, le même statut – et qui écrit au plein moment de la Révolution puisque Alexis ou la Maisonnette dans les bois – il adore les titres doubles, comme c’était du reste la mode à l’époque – date de 1789, et que le second ouvrage cité, le plus célèbre, le seul qui soit resté un peu dans es mémoires à cause du mélodrame de Pixerécourt, à cause peut-être aussi du nom donné à l’enfant sauvage de l’Aveyron, c’est Victor ou l’Enfant de la forêt qui date de 1796.
Dans ces deux romans, nous avons le même schéma de l’enfant, un enfant abandonné, qui est un enfant perdu et qui semble faire référence à la même mythologie familiale. Il ne faudrait surtout pas se hâter d’en déduire que la Révolution amène la dispersion des familles et que nous en avons là un reflet direct. Le thème de l’enfant perdu, de l’enfant abandonné remonte aux origines du roman ; il est même peut-être – on l’a soutenu – l’origine du roman. Et il existe tout un roman familial qu’il est intéressant de confronter à l’expérience de la Révolution.
Dans ce cadre, notons trois points : celui de la quête des origines et de la dramatisation de cette quête, celui de l’éducation de ces enfants abandonnés, celui de l’errance et de l’initiation. « Tu frémirais d’horreur si tu parvenais à entrevoir l’histoire de ta naissance…