Chapitre
En assurant aux journaux une pleine et presque absolue liberté, la loi du 29 juillet 1881, véritable masse de granit de la République, entendait signifier une profonde rupture historique. Elle répondait d’abord, comme l’explique son rapporteur Eugène Lisbonne, aux « exigences actuelles des mœurs », aux nécessités de la démocratie comme à celles du marché. Mais elle marquait surtout l’aboutissement d’un engagement presque séculaire, inauguré par la Révolution française qui avait affirmé d’emblée la « libre communication des pensées et des opinions », poursuivi par une gauche libérale et républicaine qui avait fait de la liberté de la presse l’une de ses revendications majeures, à la fois symbole et instrument de la démocratisation. « Voilà les traditions de la Révolution française, voilà les traditions auxquelles vous devez revenir », s’était exclamé à la Chambre le radical Charles Floquet. Fruit d’un long combat contre la tyrannie et l’arbitraire, cette liberté chèrement acquise témoignait ainsi des liens privilégiés, presque consubstantiels, noués entre des journaux désormais émancipés et une gauche qui les avait de tout temps soutenus. Ce sont ces relations que l’on voudrait ici interroger. Car si les gauches ne furent pas toujours, du moins jusqu’en 1881, à la hauteur de leurs principes, elles constituèrent en revanche les victimes attitrées de la censure et de la répression. Il en émana une sensibilité, et bientôt une culture, qui devaient contribuer à unir la République, la presse et cette « liberté sans rivages » à laquelle aspirait Jules Vallès…
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Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 01/04/2010
- https://doi.org/10.3917/dec.becke.2005.01.0285
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