Chapitre
C’est aujourd’hui presque un lieu commun que de considérer les guerres de la Révolution et de l’Empire (1792-1815) comme annonçant ou préfigurant les « guerres totales » ou « absolues » du xxe siècle . De récentes études, plus ou moins convaincantes, ont développé cette thèse qui s’est d’autant plus facilement imposée que dans la mémoire collective les violences de la Révolution tiennent aujourd’hui une plus grande place que ses principes : en Europe, en France même, la Révolution évoque moins la prise de la Bastille ou l’abolition des privilèges que la guillotine et les massacres en Vendée. C’en est fini de son prestige et de son pouvoir de séduction .
La thèse de « la première guerre totale » est évidemment historiquement fausse, mais elle n’est pas dépourvue de sens. Elle repose sur l’idée que la Révolution forme, dans toutes ses dimensions, un bloc insécable, dans lequel la guerre serait à l’image de la politique – de la politique révolutionnaire –, à laquelle elle emprunterait ses principaux caractères. Tout le monde connaît la célèbre définition de Clausewitz sur la logique de montée aux extrêmes propre au pur concept de la guerre. Jamais aucun conflit réel n’a illustré cette dynamique, pas même la guerre de Trente Ans, qui fut pourtant, et de loin, le plus effroyable conflit de toute l’histoire, ni la Première Guerre mondiale, ni même la seconde, sauf peut-être dans sa phase finale à laquelle Ian Kershaw vient de consacrer un grand livre .
En revanche, si la dynamique décrite par Clausewitz ne s’applique pas à la guerre réelle – ce que Clausewitz, grand amateur de carnages, déplorait –, elle s’applique très exactement à la politique dans sa variante révolutionnaire : ce qui caractérise en effet cette dernière, c’est de n’être encadrée par rien et de n’être soumise à aucune procédur…
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Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 24/08/2021
- https://doi.org/10.3917/herm.baech.2014.01.0165
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